22.12.2011   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 376/87


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Conseil relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière de régimes matrimoniaux»

COM(2011) 126 final — 2011/0059 (CNS)

et la «Proposition de règlement du Conseil relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière d'effets patrimoniaux des partenariats enregistrés»

COM(2011) 127 final — 2011/0060 (CNS)

2011/C 376/16

Rapporteur: M. PEZZINI

Le 26 avril 2011, le Conseil a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

 

«Proposition de règlement du Conseil relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière de régimes matrimoniaux»

COM(2011) 126 final – 2011/0059 (CNS)

et la

 

«Proposition de règlement du Conseil relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière d'effets patrimoniaux des partenariats enregistrés»

COM(2011) 127 final – 2011/0060 (CNS).

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 31 août 2011.

Lors de sa 474e session plénière des 21 et 22 septembre 2011 (séance du 21 septembre 2011), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 156 voix pour, 3 voix contre et 6 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE partage le point de vue de la Commission quant à la nécessité d'éliminer les incertitudes et les discriminations concernant les droits de propriété des couples internationaux, et juge opportun d'adopter un paquet législatif composé de deux règlements distincts, l'un relatif aux régimes matrimoniaux, l'autre aux partenariats enregistrés.

1.2   Le Comité considère que toute réglementation en la matière doit reposer sur la sécurité juridique, la prévisibilité, la simplification ainsi que sur un accès rapide à la justice, des solutions équitables, des coûts abordables et des délais courts, sous réserve des seules exceptions d'ordre public.

1.3   Le CESE juge essentiel que les réglementations prévues protègent de façon claire et transparente les droits inhérents aux régimes matrimoniaux et aux partenariats enregistrés, mais aussi les intérêts et les droits des tiers. À cet égard, le choix de la législation applicable et des compétences juridictionnelles devrait obligatoirement s'effectuer au moment où l'union est contractée.

1.4   Le CESE se demande à cet égard s'il ne serait pas possible d'instaurer un régime européen supplémentaire et optionnel, le «28e régime», qui protègerait de la même manière les couples internationaux tant en ce qui concerne les régimes matrimoniaux que les effets patrimoniaux.

1.4.1   De surcroît, cela permettrait d'avoir plus facilement recours à l'arbitrage et de rendre applicables les accords extrajudiciaires.

1.5   Le Comité rappelle qu'il est important de garantir la force exécutoire immédiate des décisions, sans activer de procédures ultérieures, fussent-elles simplifiées, afin de réduire les coûts et les délais pour les citoyens et les lourdeurs administratives pour les systèmes judiciaires.

1.6   Le CESE préconise la mise en place d'un système d'information et de formation des juridictions compétentes, des praticiens du droit et des citoyens, en créant un portail Internet interactif dans toutes les langues officielles et en prévoyant un système d'échange d'expertise et de compétences.

1.7   Le CESE appelle de ses vœux l'établissement d'un réseau européen de points nationaux d'assistance technique et juridique gratuite, relevant de l'Agence des droits fondamentaux, afin que tous les couples soient assurés de pouvoir exercer leurs droits en connaissance de cause et de manière éclairée.

1.8   Le Comité souligne qu'il est important de regrouper devant une juridiction unique les différentes procédures en matière de succession, de divorce, de séparation de corps et de liquidation du régime matrimonial.

1.9   Enfin, le Comité recommande vivement de veiller à ce que les réglementations en vigueur, en cours de modification ou d'élaboration soient pleinement cohérentes, afin de garantir un cadre juridique homogène et simplifié en matière de régime matrimoniaux, qui soit accessible à tous les citoyens européens.

2.   Le cadre législatif actuel

2.1   Pour le Comité, il est essentiel de garantir que les citoyens puissent circuler librement d'un État membre à l'autre, afin qu'ils puissent vivre, fonder une famille et acquérir une propriété au sein de l'Union européenne sans difficultés ni incertitudes.

2.2   Les traités et la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne garantissent la liberté de circulation et de séjour, le droit d'accès à la justice et le respect des droits fondamentaux, à savoir notamment: le droit de propriété, l'égalité de tous devant la loi, le principe de non-discrimination, le droit au respect de la vie privée et familiale, le droit de se marier et de fonder une famille conformément aux législations nationales, le droit à accéder à un tribunal impartial.

2.3   La mobilité accrue des citoyens au sein de l'UE est à l'origine d'une augmentation des mariages et des unions «internationales» entre individus n'ayant pas la même nationalité ou résidant dans des États membres différents ou dans un État membre dont ils ne sont pas ressortissants.

2.4   Le CESE est conscient de l'importance, dans un espace sans frontières intérieures, de pouvoir exercer efficacement ces droits, quelle que soit la forme des unions contractées entre ressortissants d'États membres différents et indépendamment du fait qu'ils puissent résider dans un État membre dont ils ne sont pas ressortissants. Cette situation s'accompagne souvent de la possession de biens mobiliers et/ou immobiliers situés sur le territoire de plusieurs pays de l'UE.

2.5   L'on compte actuellement environ 16 millions de couples internationaux en Europe. En 2007, sur 2,4 millions de nouveaux mariages, 13 % (310 000) présentaient une dimension internationale. De manière analogue, sur les 211 000 unions enregistrées dans l’UE la même année, 41 000 concernaient des couples internationaux.

2.6   Dans cinq pays, le mariage peut être contracté entre personnes du même sexe (aux Pays-Bas depuis 2001, en Belgique depuis 2003, en Espagne depuis 2005, en Suède depuis 2009 et au Portugal depuis 2010), tandis que le «partenariat enregistré» est un dispositif juridique plus récent, reconnu par 14 États membres (1). Ces 14 pays autorisent le partenariat enregistré de couples du même sexe, tandis que le partenariat enregistré conclu aussi bien entre personnes de même sexe qu'entre personnes de sexe opposé n'est admis qu'en Belgique, en France, au Luxembourg et aux Pays-Bas.

2.7   Consulté par la Commission en 2006 à propos du livre vert sur le règlement des conflits de lois en matière de régime matrimonial, le CESE avait approuvé sur le fond (2) les modifications apportées au règlement (CE) no 2201/2003, qui étendaient la compétence juridictionnelle et la loi applicable en matière matrimoniale, en considérant que ces modifications complétaient sur ces points un règlement qui traitait de la reconnaissance des décisions judiciaires en matière matrimoniale et de garde des enfants. Le CESE s'était déjà prononcé sur la compétence et la loi applicable en matière matrimoniale lors de la présentation du livre vert sur le divorce, sur lequel il avait élaboré un avis très approfondi, auquel il renvoie (3).

2.8   Le Comité s'était également interrogé sur l'opportunité de traiter séparément la question de la répartition des biens communs (immeubles, meubles et autres droits patrimoniaux), en élargissant le champ d'application «rationae personae» de cette répartition aux couples non mariés (lesquels peuvent aussi avoir des enfants communs).

2.9   Peut-être eût-il été plus logique de traiter d'une part toutes les conséquences de la dissolution du lien matrimonial et, d'autre part, de réglementer toutes les conséquences de la séparation des couples non mariés, vivant sous un régime de partenariat enregistré, en élaborant un cadre réglementaire unitaire.

2.10   Cela aurait sans doute amélioré la clarté et la compréhension du droit applicable et facilité la reconnaissance des décisions judiciaires, qui règlent souvent toutes les conditions et conséquences du divorce dans un jugement définitif unique.

2.11   Compte tenu des spécificités du mariage et du partenariat enregistré, ainsi que des différences juridiques qu'il peut y avoir entre ces deux formes d'union, le CESE reconnaît l'utilité de disposer de deux instruments réglementaires distincts: l'un relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière de régimes matrimoniaux et l'autre à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière d'effets patrimoniaux des partenariats enregistrés.

2.12   Le Comité se demande s'il ne serait pas utile de réfléchir à l'élaboration d'un seul instrument intégré, sous forme d'un régime européen supplémentaire et optionnel («28e régime») (4), auquel les couples – mariés ou liés par un partenariat enregistré - pourraient adhérer librement, sans discrimination aucune. L'accord franco-allemand instituant un régime matrimonial commun (5) pourrait constituer une piste de réflexion à cet égard.

2.12.1   Les aspects patrimoniaux des mariages et des partenariats enregistrés sont souvent réglés par une procédure non contentieuse. Dès lors, de l'avis du CESE, il serait opportun d'insérer dans le 28e régime certaines clauses relatives à la validité des accords extrajudiciaires d'arbitrage (6), ce qui entraînerait des avantages certains pour les citoyens européens.

2.13   De l'avis du Comité, ces deux instruments devraient assurer:

la prévisibilité et la certitude quant à la loi applicable, grâce à des règles claires et uniformes;

la cohérence en matière de coopération judiciaire civile, en particulier dans le domaine du droit de la famille;

la reconnaissance automatique des décisions et l'exécution au moyen d'une procédure uniforme simplifiée, garantissant la circulation des jugements sans exequatur en matière de reconnaissance et d'exécution des décisions;

l'harmonisation des règles de compétence et la détermination de la loi applicable par une seule juridiction, habilitée à connaître de l'ensemble des aspects de la situation du couple, lequel devrait être tenu d'opérer un choix;

la définition d'un cadre juridique cohérent et aisément accessible, grâce à l'unification et à l'harmonisation de la terminologie relative à l'ensemble des thématiques et des concepts, ainsi que des conditions se rapportant à des règles similaires pour toutes les matières (par exemple litispendance, clauses de compétence, etc.).

3.   Propositions de la Commission

3.1   Dans le «Rapport 2010 sur la citoyenneté de l'Union: lever les obstacles à l'exercice des droits des citoyens de l'Union» (7), la Commission relève que l'incertitude quant aux droits de propriété des couples internationaux constitue l'un des principaux obstacles auxquels se heurtent aujourd'hui encore les citoyens dans l'exercice quotidien de leurs droits.

3.2   Les propositions de la Commission se fondent sur l'article 81, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

3.3   Deux initiatives de la Commission concernant la loi applicable aux droits de propriété des couples internationaux ont été soumises au Conseil: la première concerne la détermination de la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution de régimes matrimoniaux; la seconde a trait aux mêmes questions en ce qui concerne les effets patrimoniaux des partenariats enregistrés.

3.4   Les propositions de la Commission ont pour objet de jeter des ponts entre les différents systèmes juridiques de l’UE et de faciliter la vie des couples internationaux, sans harmoniser ni modifier le droit matériel des États membres en matière de mariage ou de partenariats enregistrés, mais avec pour objectif:

de permettre aux couples internationaux mariés de choisir la loi applicable à leurs biens communs en cas de décès d'un conjoint ou de divorce;

d'augmenter la sécurité juridique pour les partenariats enregistrés à caractère international en assujettissant de manière générale les biens des couples liés par un partenariat enregistré à la loi du pays dans lequel leur union a été enregistrée;

d'augmenter la sécurité juridique pour les couples internationaux (mariés ou liés par un partenariat enregistré) en instituant un ensemble de règles cohérentes pour la détermination de la juridiction compétente et de la loi applicable sur la base d'une liste de critères de rattachement hiérarchisés et objectifs;

d'améliorer la prévisibilité pour les couples internationaux en simplifiant la procédure relative à la reconnaissance des décisions et des actes adoptés dans l'ensemble de l’UE et en prévoyant la possibilité pour les citoyens de présenter plusieurs actes introductifs d'instance devant une juridiction unique.

3.5   Ces propositions prévoient également la création, dans le cadre du réseau judiciaire européen en matière civile et commerciale, d'un site Internet consacré aux registres existants en matière de régimes matrimoniaux et de dispositions nationales.

3.6   Ces propositions requièrent l'approbation unanime du Conseil des ministres de l'UE après consultation du Parlement européen.

4.   Observations générales

4.1   Le CESE juge souhaitable que le choix de la règlementation applicable aux couples mariés s'effectue au moment du mariage même, en évitant que puisse être choisie une loi à laquelle le mariage ne puisse être rattaché du point de vue législatif, et en prévoyant au contraire pour les mariages préexistants, si aucun choix n'est arrêté, une liste de critères de rattachement objectifs, afin d'identifier la loi devant être appliquée, conformément au système adopté dans le règlement récent «Rome III» (8).

4.1.1   De l'avis du CESE, l'introduction de règles limitant les possibilités de choix concernant la loi applicable, aurait pour effet de renforcer la sécurité juridique et donnerait aux couples concernés une certaine latitude dans le choix de la loi applicable à leurs biens, tout en garantissant la protection des intérêts des tiers.

4.1.2   Dans le cas de partenariats enregistrés, le choix est celui de la loi de l'État sous le régime duquel s'effectue cet enregistrement.

4.1.3   Le CESE souligne la nécessité de disposer d'un système d'information clair et adapté relatif au choix de la loi applicable, conformément au règlement (UE) no 1259/2010 et à la proposition contenue dans le document de la Commission COM(2011) 126 final, afin que les couples puissent prendre dûment connaissance du régime de divorce et de la réglementation des rapports patrimoniaux.

4.1.4   Le Comité donne la priorité à la sécurité juridique et fait part de ses doutes en ce qui concerne la conciliation effective entre le choix par le couple du régime juridique applicable à la réglementation de son patrimoine et la localisation réelle du bien, lorsque ce dernier se trouve dans un pays autre que celui qui a été convenu.

4.1.4.1   Selon le Comité, pour garantir la sécurité juridique et, dans le même temps, le droit des époux à sauvegarder la valeur de leurs biens meubles et immeubles, il conviendrait de procéder à une évaluation équitable du patrimoine au moment du mariage et au moment de la séparation ou du divorce.

4.1.4.2   Le CESE souhaite que soit indiqué sur tout acte relatif aux biens patrimoniaux le régime en vigueur entre les époux. C'est particulièrement important lorsque parmi ces biens figurent des actions et autres titres de participation, des assurances-vie, des fonds de pension, et autres.

4.1.5   Le CESE s'interroge sur les conséquences que peut avoir pour les tiers le fait que la loi choisie pour le régime matrimonial puisse ne pas correspondre à celle du pays où se trouve effectivement le bien, y compris lorsqu'il est situé en dehors de l'UE.

4.2   Le Comité considère qu'il est important d'éliminer les problèmes liés à la reconnaissance des décisions et des actes, en assurant des avancées en termes d'économies et de rapidité de reconnaissance des décisions et en évitant ainsi des voies de recours auprès des juridictions de différents États membres.

4.3   Les règles relatives à la liquidation des régimes matrimoniaux auraient pour effet d'étendre les compétences de la juridiction en charge du divorce ou de la succession aux questions corrélées à la liquidation du régime matrimonial. La sécurité juridique pour les citoyens s'en trouverait renforcée, car la juridiction compétente en matière de divorce ou de succession le serait également pour la liquidation du régime matrimonial.

4.3.1   Le Comité fait part de son inquiétude concernant le temps que prendra l'adaptation des règlementations internes de chaque État membre et la date à laquelle les règlements relatifs aux régimes matrimoniaux entreront en vigueur.

4.4   Le CESE juge qu'il est indispensable de garantir la libre circulation des décisions par leur reconnaissance automatique sur tout le territoire de l'Union et leur exécution selon une procédure homogène et simplifiée; il est également d'avis qu'il y a lieu d'assurer la cohérence requise en matière de coopération judiciaire civile.

4.5   Selon le CESE, la définition d'un cadre juridique cohérent et facilement accessible doit constituer l'objectif général; il considère que, à cette fin, il y a lieu de procéder à une unification et à une harmonisation de la terminologie relative à l'ensemble des thématiques et des concepts, ainsi que des exigences se rapportant à des règles similaires pour toutes les matières (par exemple, la litispendance, les clauses attributives de compétence, la résidence habituelle, etc.).

4.6   De l'avis du Comité, il importe également de permettre la reconnaissance et l'exécution des décisions ainsi que la libre circulation des décisions sans exequatur dans le marché intérieur, conformément aux modifications proposées (9) aux règles en matière civile et commerciale, en vertu du règlement (CE) no 44/2001 du Conseil, sans exceptions autres que celles d'ordre public et conformément à la Charte des droits fondamentaux.

4.7   Le CESE souscrit à la possibilité de rassembler devant une seule juridiction les différentes procédures: procédures relatives au divorce, à la séparation de corps et à la liquidation du régime matrimonial du couple. Les juridictions compétentes sont les mêmes que celles qui ont été indiquées en vertu du règlement «Bruxelles II bis».

4.7.1   Le Comité souligne l'importance d'éviter des procédures parallèles et l'application d'un droit matériel différent aux biens des couples mariés ou enregistrés.

4.8   Le CESE considère qu'il est capital de mener une action communautaire de formation en direction des membres des autorités publiques concernées et des praticiens du droit qui seront tenus d'appliquer le nouveau cadre réglementaire relatif aux régimes matrimoniaux et aux effets patrimoniaux des partenariats enregistrés.

4.9   Il conviendra de dispenser aux époux et aux couples enregistrés une information adaptée sur les incidences de la législation choisie sur le patrimoine, dans le cas de son transfert, notamment dans l'hypothèse où le régime choisi diffère de celui de la localisation effective des biens.

4.10   Conformément aux conclusions du Conseil Justice et affaires intérieures des 24 et 25 février 2011, «le respect des droits fondamentaux devrait aussi être pris en compte lors de la rédaction des actes juridiques qui ne font pas l'objet d'une procédure législative» (10). Le Comité considère que l'Agence des droits fondamentaux peut et doit jouer un rôle actif en ce qui concerne l'assistance technique et juridique accordée aux couples pour leur permettre d'exercer efficacement leurs droits.

5.   Observations particulières

5.1   Réglementations proposées relatives aux régimes matrimoniaux

5.1.1   Le Comité marque son accord quant à la définition des régimes matrimoniaux comme couvrant à la fois les aspects relatifs à la gestion quotidienne des biens des époux, et ceux liés à leur liquidation, sans affecter la nature des droits réels, la qualification des biens et droits et la détermination des prérogatives du titulaire de ces droits, sous réserve des seules exceptions de droit public prévues par la législation des États membres.

5.1.2   Le Comité est soucieux d'assurer la cohérence en matière de compétences entre les régimes applicables en vertu des règlements no 1259/2010 (divorce ou séparation) et 2201/2003 (mariage) et ceux prévus par la proposition de règlement relative aux régimes matrimoniaux (voir chapitre II, articles 4 et 5, et chapitre III, articles 15 à 18).

5.1.2.1   Le CESE considère que le choix de régimes différents dans les divers cas de figure, choix qui serait laissé à l'appréciation des parties, est susceptible de déboucher sur une trop grande complexité et d'éventuels conflits de compétences, avec les conséquences qui en découlent, ce qui allongerait les délais et accroîtrait les coûts. Le Comité juge souhaitable que la compétence judiciaire soit déterminée au moment du mariage.

5.1.3   Le Comité est d'avis que le principe de reconnaissance mutuelle concernant la libre circulation des décisions, des actes authentiques et des transactions judiciaires en matière de régimes matrimoniaux doit exclure toute autre procédure ultérieure telle que celles proposées. Toute procédure d'exequatur (voir règlements Bruxelles I et II) augmenterait en effet les coûts et allongerait les délais.

5.1.4   Selon le CESE, il faudrait exclure à l'article 4 des deux règlements la possibilité de subordonner à l'accord des partenaires la compétence des juridictions saisies d'une demande en dissolution ou annulation à statuer également sur les effets patrimoniaux de tels actes.

5.2   Réglementation proposée pour les aspects patrimoniaux des partenariats enregistrés

5.2.1   Le CESE estime qu'il est indispensable de prendre en considération les spécificités des partenariats enregistrés afin de déterminer, s'agissant des seuls aspects patrimoniaux, les conséquences juridiques de ces partenariats pour les partenaires et vis-à-vis de tiers

5.2.2   Le CESE craint que les règles figurant au Chapitre III de la proposition de règlement 127/2011 (partenariats enregistrés) ne soient incompatibles avec les dispositions en vigueur dans le pays dans lequel les biens sont situés.

5.2.3   Compte tenu des différences existant entre les régimes au sein des pays qui autorisent les partenariats enregistrés, il serait utile, afin de renforcer le respect des droits des membres des partenariats enregistrés et ceux des tiers, d'harmoniser les systèmes d'information ainsi que les procédures de publicité et d'opposabilité des droits afférents aux biens qui appartiennent aux couples, en particulier lorsque ces biens se trouvent dans des pays qui ne reconnaissent pas le partenariat enregistré.

5.3   Accès à l'information sur les régimes patrimoniaux existant dans les États membres

5.3.1   Le CESE insiste sur l'importance d'assurer un accès adapté à l'information en premier lieu pour les époux et les partenaires ayant enregistré leur union, mais également pour les juridictions compétentes et les praticiens du droit, au moyen de guides pratiques rédigés dans les langues de l'UE; il souligne aussi l'importance de créer un portail Internet dans toutes les langues officielles de l'Union.

5.3.2   Le Comité considère qu'un programme de formation des autorités judiciaires, des praticiens et des usagers du droit est indispensable, de même que des échanges d'expériences, dans le but d'assurer une diffusion adéquate des expertises et connaissances sur les différents systèmes juridiques nationaux pertinents.

5.3.3   Le CESE appelle de ses vœux l'établissement d'un réseau européen de points nationaux d'assistance technique et juridique, relevant de l'Agence des droits fondamentaux, afin que tous les couples mariés ou unis par un partenariat enregistré soient assurés de pouvoir exercer gratuitement et en connaissance de cause leurs droits en matière de régimes matrimoniaux.

Bruxelles, le 21 septembre 2011.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Finlande, France, Hongrie, Irlande, Luxembourg, Pays-Bas, République tchèque, Royaume-Uni, Slovénie et Suède.

(2)  JO C 325 du 30.12.2006, p. 71.

(3)  JO C 24 du 31.01.2006, p. 20.

(4)  JO C 21 du 21.01.2011, p. 26.

(5)  Cf. France - Conseil des ministres du 23 mars 2011.

(6)  Proposition du ministère italien de la Justice; voir également Cour de justice de l'Union européenne, Arrêt West Tankers, AFF C-185/07, paragraphe 26 sur la validité de la clause d'arbitrage.

(7)  Adopté le 27 octobre 2010.

(8)  Voir règlement UE no 1259/2010 du 20.12.2010, JO L 343 du 29.12.2010, p. 10.

(9)  Voir COM(2010) 748 final.

(10)  Conclusions du Conseil sur le rôle du Conseil de l'Union européenne pour assurer la mise en œuvre effective de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 24-25 février 2011.