29.10.2011   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/121


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre vert — Quand les défis deviennent des chances: vers un cadre stratégique commun pour le financement de la recherche et de l'innovation dans l'UE»

COM(2011) 48 final

2011/C 318/20

Rapporteur: Gerd WOLF

Corapporteur: Erik SVENSSON

Le 9 février 2011, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le

«Livre vert — Quand les défis deviennent des chances: vers un cadre stratégique commun pour le financement de la recherche et de l'innovation dans l'UE»

COM(2011) 48 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 23 juin 2011.

Lors de sa 473e session plénière des 13 et 14 juillet 2011 (séance du 13 juillet 2011), le Comité économique et social européen a adopté l'avis suivant par 122 votes pour, et 5 absentions.

1.   Résumé et recommandations

1.1   Le Comité économique et social européen accueille favorablement le Livre vert de la Commission et les objectifs formulés par celui-ci et confirme les avis qu'il a déjà adoptés sur le même sujet; se référant au rapport du groupe d'experts sur l’évaluation intermédiaire du septième programme-cadre, il recommande également que la Commission européenne s'efforce en particulier:

1.1.1

d'élaborer, grâce à des mesures structurelles complémentaires mises en œuvre au sein de ses services et des organes consultatifs qui l'assistent, une stratégie intégrée de recherche et d'innovation, tout en préservant l'identité et les conditions de travail spécifiques de chacun de ces domaines;

1.1.2

dans le budget global de l'UE, de porter enfin le budget futur consacré à la recherche et à l'innovation à un niveau qui reflète réellement l'importance et le rôle clé de ce secteur dans la stratégie Europe 2020, ainsi que l'effet de levier qu'il exerce en stimulant et en intégrant la nécessaire politique de soutien menée par les États membres;

1.1.3

de simplifier les procédures administratives nécessaires, d'assouplir et d'accélérer les processus décisionnels et d'adapter en conséquence le savoir-faire et le mandat des responsables de la Commission;

1.1.4

de mettre l'accent sur les tâches transnationales qui, grâce à la mise en commun transfrontalière des ressources et de l'expertise qu'elles permettent, apportent une valeur ajoutée européenne, notamment en ce qui concerne la recherche coopérative;

1.1.5

de cibler les fonds structurels sur des régions sous-représentées à ce jour, afin d'accroître la base d'excellence et les structures qui y sont requises, ainsi que d'améliorer les liens entre les fonds structurels et le programme-cadre;

1.1.6

de soutenir le développement de «technologies clés génériques», sans lesquelles nous ne pourrons ni relever les défis de la concurrence mondiale, ni faire droit aux grandes problématiques sociétales;

1.1.7

d'affecter 20 % du budget global du futur 8e programme-cadre à la partie du programme gérée par le Conseil européen de la recherche;

1.1.8

de soutenir la construction et la maintenance de grandes infrastructures de R&D (liste ESFRI);

1.1.9

de soutenir les innovations dans toute leur portée, notamment celles dans le domaine social et économique, sur le lieu de travail et dans le secteur créatif;

1.1.10

d'améliorer la réglementation en matière d'aides aux PME et aux microentreprises, afin de faciliter leur accès et leur participation aux programmes d'aide et à leurs instruments;

1.1.11

d'instaurer et renforcer un cadre permettant de disposer d'un capital-risque suffisant et faire en sorte de le rendre plus facilement accessible aux PME en particulier; de développer et d'adapter à cette fin l'instrument de financement avec partage des risques;

1.1.12

de reconsidérer le rôle des aides d'État ainsi que des règles de concurrence et de passation des marchés au regard de leur incidence sur l'ensemble du processus d'innovation, sur la constitution d'un savoir-faire spécialisé et sur les partenariats public-privé.

1.2   Par ailleurs, le Comité appelle les États membres à apporter leur contribution essentielle à la stratégie Europe 2020 en leur recommandant, même en période de contraintes budgétaires, d'investir davantage dans l'éducation (notamment les universités), la R&D et l'innovation et, en définitive, d'atteindre et de préférence dépasser, le fameux «objectif des 3 %» en matière de R&D, déjà inclus dans la stratégie de Lisbonne.

2.   Contenu essentiel de la communication

2.1   L’objectif du Livre vert est de stimuler le débat public sur les aspects essentiels qui joueront un rôle dans les futurs programmes de financement de la recherche et de l’innovation dans l’UE.

2.2   La Commission propose de s’efforcer d’apporter les améliorations suivantes:

Clarifier les objectifs et les modalités de leur mise en œuvre;

Réduire la complexité;

Accroître la valeur ajoutée et l’effet mobilisateur, et éviter les doubles emplois et la fragmentation;

Simplifier la participation;

Élargir la participation aux programmes de l’UE – disponibilité accrue;

Accroître l'impact des aides de l'UE sur la compétitivité et la société.

2.3   La Commission entend développer une stratégie commune couvrant tous les financements consacrés à la recherche et à l’innovation dans l'UE et qui sont actuellement fournis à travers le 7e programme cadre de RDT, le programme cadre pour la compétitivité et l'innovation (PIC) et les initiatives de l’UE en matière d’innovation telles que L'Institut européen d''innovation et de technologie (EIT).

2.4   Le livre vert pose 27 questions spécifiques, qui se rapportent aux domaines thématiques suivants:

Travailler de concert à la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020;

S’attaquer aux défis sociétaux;

Renforcer la compétitivité;

Renforcer la base scientifique de l’Europe et l’Espace européen de la recherche.

2.5   Le financement actuel des volets du programme pour la période actuelle de programmation (2007-2013) provient:

du 7e programme cadre de RDT (PC): 53.3 milliards d'euros;

du programme cadre pour la compétitivité et l'innovation (PIC): 3,6 milliards d'euros;

de l'Institut européen d''innovation et de technologie (EIT): 309 millions d'euros;

de la politique de cohésion: environ 86 milliards d'euros (près de 25 % du budget total des fonds structurels).

3.   Observations générales

3.1   À la lumière des décisions du Conseil du 26 novembre 2010 et du 4 février 2011 ainsi que des précédents avis du Comité mentionnés ci-après, le Comité accueille favorablement et soutient le Livre vert publié par la Commission et se félicite de l'intention de faire fonctionner ensemble toute la série d'instruments de l’UE disponibles pour la recherche et l'innovation à l'intérieur d'un cadre stratégique commun. La mise en œuvre par l'UE d'un programme de soutien ambitieux, efficace et répondant à ces objectifs est une condition essentielle pour renforcer la compétitivité de l'Europe, préserver sa prospérité et ses acquis sociaux et maîtriser les grands défis sociétaux.

3.2   Toutefois, cela signifie avant tout qu’une part suffisante et appropriée du futur budget total de l'UE doit être consacrée à ces objectifs prioritaires. Le futur budget consacré à la recherche et à l'innovation doit représenter la part du budget global de l'UE qui reflète réellement l'importance et le rôle clé que la stratégie Europe 2020 accorde à ce secteur ainsi que l'effet de levier qu'il exerce en stimulant et en intégrant la politique de soutien tout aussi nécessaire menée par les États membres.

3.3   Le titre de l’avis exploratoire du Comité «Libérer et renforcer le potentiel de l'Europe pour la recherche, le développement et l'innovation» (1) définissait déjà la mission principale de la stratégie Europe 2020. C'est précisément pour cela qu'il faut établir une stratégie commune en vue du financement de la recherche et de l'innovation de l'UE.

3.4   Cependant, il ne s'agit pas de mélanger ces deux catégories ou de les subordonner l'une à l'autre mais plutôt de s'assurer que, grâce à une stratégie commune, elles se renforceront et s'enrichiront mutuellement de la manière la plus efficace possible.

3.5   Aussi, et partant de ce principe, le Comité souscrit également aux objectifs mentionnés au paragraphe 2.5.

3.6   Ces dernières années, le Comité a émis d'autres avis importants sur ces objectifs ainsi que sur les questions complexes y afférentes. L'on peut citer parmi ceux-ci les suivants:

Livre vert sur l'espace européen de la recherche– Nouvelles perspectives (2);

Coopération et transfert de connaissances entre les organismes de recherche, l'industrie et les PME — un préalable important pour l'innovation (3);

Un cadre juridique communautaire applicable aux infrastructures européennes de recherche (ERI) (4);

Vers une programmation conjointe de la recherche: travailler ensemble pour relever plus efficacement les défis communs (5);

Un cadre stratégique européen pour la coopération scientifique et technologique internationale (6);

Repousser les limites des TIC: une stratégie en matière de recherche sur les technologies futures et émergentes en Europe (7);

Réexaminer la politique communautaire de l’innovation dans un monde en mutation (8);

Investir dans le développement des technologies à faible intensité carbonique (9);

Développer une stratégie commune pour les technologies clés génériques dans l'UE (10);

Simplification de la mise en œuvre des programmes cadres de recherche (11);

Initiative phare de la stratégie Europe 2020: «Une Union pour l'innovation» (12);

Des lieux de travail innovants: sources de productivité et d'emplois de qualité (13);

Évaluation intermédiaire du septième programme-cadre pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (14).

Ces avis formulaient déjà des recommandations concrètes concernant la plupart des objectifs et des questions mentionnés dans le livre vert à l'examen. C'est pourquoi le Comité renvoie explicitement à ces avis antérieurs, réaffirme leur contenu et demande qu'ils soient considérés comme faisant partie du présent avis. En référence également au rapport du groupe d'experts sur l’évaluation intermédiaire du septième programme-cadre (15), certaines observations qui rappellent ou complètent les points de vue exprimés dans ces avis sont présentées ci-après.

3.7   La liste des questions incluses dans le livre vert et examinées au chapitre 4 du présent avis laisse entendre que la Commission envisage de modifier radicalement les modalités actuelles de financement et l'établissement des priorités en la matière. Le Comité renvoie à son avis sur la «Simplification de la mise en œuvre des programmes cadres de recherche» et souligne fermement sa recommandation selon laquelle il est essentiel de préserver la continuité et la stabilité des instruments de financement européens qui fonctionnent actuellement bien (mettant en particulier l'accent sur la recherche collaborative) (16), de les renforcer et de ne pas les compromettre par des changements excessifs.

3.7.1   Il conviendrait plutôt de mettre en place un cadre stratégique commun, surtout au moyen de mesures structurelles complémentaires au niveau de la Commission et des organes consultatifs qui l'assistent. Pour ce faire, il faudrait notamment que les mesures relevant du programme cadre pour la recherche existant, du programme cadre pour la compétitivité (CIP) et de l'Institut européen pour l'innovation et la technologie (EIT) soient fusionnées au niveau des programmes et de l'administration.

3.7.2   Comme l'a souligné le Comité à plusieurs reprises, cela suppose en outre que tant les fonctionnaires de la Commission que le personnel des agences de la Commission qui sont responsables des programmes, soient internationalement reconnus comme des experts dans les domaines concernés, sur la base de leurs propres réalisations, et se voient octroyer une marge de manœuvre suffisante pour la prise de décision et accorder des possibilités d'initiatives pour pouvoir mettre leur expertise et leur jugement au service de cette stratégie commune dans l'intérêt de son succès (17). Cela n'est pas réalisable – et certainement pas exclusivement – avec des règles étroites et rigides (18). Il faut une combinaison de systèmes souples mais stables conjugués à l'expertise et à l'expérience.

3.7.3   Le Comité a souligné à plusieurs reprises l'importance cruciale de l'innovation pour la stratégie Europe 2020. Toutefois, il rappelle également que les innovations ne sont pas nécessairement le fruit d'une séquence linéaire, à savoir, d'abord la recherche, ensuite l'innovation, mais naissent aussi d'un processus complexe d'interaction et d'imbrication de différents facteurs  (19) et englobent également des aspects sociaux et sociétaux. Cela est particulièrement vrai pour les innovations dans le domaine des services qui sont la plupart du temps inspirées par les nouveaux besoins des consommateurs et par les entreprises de l'économie sociale qui répondent aux besoins de la société. Cela vaut également par exemple pour les innovations sur les lieux de travail (20), développées et négociées entre les partenaires sociaux, ainsi que pour les innovations dans le secteur de la conception et de la création. La stratégie européenne en faveur des personnes handicapées 2010-2020 (communication de la Commission) constitue encore un autre exemple de secteur d'innovation important pour les prestataires de services publics et commerciaux dont la mission est de rendre accessibles les produits et les services, de telle manière que les personnes handicapées puissent elles aussi être réellement intégrées dans la société européenne.

3.7.4   Le Comité souligne également que la recherche et la science sont parties intégrantes du patrimoine culturel européen qui caractérise la manière dont l'Europe se développe en fonction des progrès de ses connaissances. Si elles sont les conditions préalables importantes pour l'innovation, elles doivent également être reconnues, préservées et soutenues en tant qu'éléments à part entière de la civilisation et de la culture européenne. L'innovation ne doit pas être subordonnée à la recherche de même que la recherche ne doit pas l'être à l'innovation (21). Cela équivaudrait à un appauvrissement culturel des valeurs européennes essentielles.

3.7.5   Le fait que les «règles de base» applicables aux parties prenantes et aux environnements de travail («cultures») dans les domaines de la science et de la recherche, d'une part, et dans celui de l'innovation, d'autre part, ne sont pas les mêmes, constitue une différence importante entre la recherche et l'innovation. Le Comité renvoie à cet égard à son avis «Coopération et transfert de connaissances entre les organismes de recherche, l'industrie et les PME — un préalable important pour l'innovation», dans lequel sont examinés de manière claire et détaillée les différents aspects (22). Aussi convient-il de trouver dans le cadre de la stratégie commune des solutions permettant de respecter ces différences, de les intégrer et de faire en sorte qu'il soit possible de soutenir la totalité du processus d'innovation.

3.7.6   C'est précisément pourquoi l'établissement de bons contacts et l'échange de personnel et de savoir-faire entre ces deux secteurs sont si importants et doivent être soutenus. Le Comité renvoie à son avis sur «l'évaluation intermédiaire» (23), dans lequel il traite des trois axes de soutien visés, à savoir: la science pour la science – fixation des priorités par les chercheurs; la science pour la compétitivité – fixation des priorités par l'industrie; et la science pour la société – fixation des priorités par les acteurs de la société civile.

3.8   Se référant à ses observations précédentes sur les affirmations quelque peu hâtives de la Commission concernant la fragmentation de la recherche et du développement dans l'UE, le Comité concède qu'il peut exister des exemples de ce type de problème, qui ne sont pas pour autant le reflet de la situation générale, et rappelle donc (24) qu'«il existe depuis longtemps des connexions et des réseaux de coopération au niveau européen, et souvent même mondial, dont les frontières sont constamment affinées et redessinées par l'interaction entre coopération et concurrence. Il s'agit de processus d'auto-organisation importants des différents acteurs concernés et leurs organisations», que la Commission devrait dûment reconnaître au lieu de les ignorer, en particulier parce que les programmes de R&D (plus particulièrement, la recherche collaborative) ont pour leur part considérablement contribué à cette réalisation.

3.9   Le Comité recommande en outre d'accorder une attention et un soutien renforcés à la naissance de pôles de recherche et d'innovation européens de niveau mondial. Ces derniers représentent un réseau attractif d'universités, d'instituts de recherche et d'entreprises qui se développe de lui-même, favorisant des liens efficaces entre les sociétés spécialisées qui s'y sont implantées. Le Comité souligne une fois de plus la nécessité dans ce contexte de créer également au sein de l'UE un plus grand nombre d'universités d'envergure internationale et invite notamment les États membres à agir en ce sens avec davantage de détermination.

3.10   Le Comité réitère sa recommandation – qui s'adresse avant tout aux États membres – de faciliter la création d'entreprises, d'améliorer leur capacité de résistance et leurs débouchés commerciaux et de créer l'environnement nécessaire à cette fin (voir également le paragraphe 4.7.1). Un allégement de la bureaucratie et la présence d'un capital-risque suffisant sont déterminants à cet égard. Si au niveau européen l'instrument de financement avec partage des risques – une création conjointe de la Commission européenne et de la Banque européenne d'investissement – représente une bonne base de départ, il convient néanmoins d'améliorer sensiblement l'accès des PME en particulier à un capital-risque suffisant.

4.   Observations particulières

Ce chapitre traite de quelques-unes des 27 questions posées par la Commission dans le Livre vert à l'examen. Elles ne sont pas répétées ici mais implicitement reprises ci-dessous.

4.1   Les utilisateurs des instruments de financement de l'UE ont besoin d'une table des matières bien structurée et d'un guide pratique, disponibles à la fois sur papier et en ligne. En outre, dans le souci d'assurer une continuité maximale, il faut trouver un juste équilibre entre les instruments qui ont été testés avec succès et les principes sous-jacents, d'une part, et un nombre aussi réduit que possible de nouvelles approches, d'autre part.

4.2   Trouver un équilibre entre un ensemble de règles uniformes et la souplesse nécessaire, en tenant compte des exigences spécifiques, requiert, parallèlement à l'harmonisation des règles, une reconnaissance totale des procédures nationales dans le contexte du cadre stratégique commun pour la recherche et l'innovation. Concernant les pratiques de travail au sein de la Commission, le Comité renvoie au paragraphe 3.7.2; les fonctionnaires devraient, durant la période nécessaire à l'acquisition d'une expérience dans les nouvelles approches, se voir accorder une marge de manœuvre suffisante pour pouvoir recourir aux exceptions/réglementations spéciales/dérogations (24) qui doivent encore être définies, dès lors qu'il faut d'abord acquérir une expérience dans ce domaine (25). Le Comité renvoie à cet égard à son avis sur la «Simplification» (26), dans lequel il préconise de suivre une approche fondée sur la confiance et de se montrer plus tolérant à l'égard des erreurs.

4.3   Compte tenu des nécessaires mesures nationales et régionales de soutien à la recherche et à l'innovation mises en œuvre par les États membres et des programmes de réforme correspondants, les ressources de l'UE devraient être destinées en priorité à la coopération transnationale, en particulier à la recherche collaborative. En mettant en commun l'expertise et les ressources de plusieurs États membres, la recherche collaborative apporte une nette valeur ajoutée européenne, exerce un effet de levier sur la politique de soutien menée par les États membres et favorise l'intégration européenne.

4.4   Étant donné que l'excellence doit demeurer le principe directeur de la R&D dans le cadre de la stratégie Europe 2020 également, les fonds structurels devraient être davantage ciblés sur les régions qui ont jusqu'à présent été sous-représentées, dans le but d'y édifier une base d'excellence et d'y mettre en place les structures dont elles ont besoin de manière urgente. Dans cet ordre d'idées, le Comité soutient l'affirmation de la Commission selon laquelle «Il existe depuis longtemps des connexions et des réseaux de coopération au niveau européen, et souvent même mondial, dont les frontières sont constamment affinées et redessinées par l'interaction entre coopération et concurrence. Il s'agit de processus d'auto-organisation importants des différents acteurs concernés et leurs organisations.»

4.5   Afin d'établir des synergies avec les fonds structurels et une coordination optimale avec la politique de soutien des États membres, il est crucial d'établir des liens efficaces (27) entre le futur cadre stratégique commun pour le financement de la recherche et de l'innovation et le futur cadre stratégique commun pour la cohésion (question 8). «La spécialisation intelligente» devrait être le principe directeur du développement des stratégies régionales.

4.6   Pour mieux soutenir l'ensemble du processus d'innovation, le Comité préconise de revoir en profondeur avec les parties prenantes concernées les règles en matière d'aides d'État, de budget, d'achats publics et de concurrence, qui peuvent faire obstacle à la réalisation de cet objectif (voir question 19) (28). La cause en est l'équilibre et/ou l'éventuel conflit entre la législation sur la concurrence et la promotion de l'innovation. Pour cette raison, la législation sur la concurrence, les aides d'État et les achats publics ne devrait pas être élaborée ou mise en œuvre de manière à entraver l'innovation; des réformes en la matière pourraient même s'avérer nécessaires. Les innovations ont parfois également besoin d'être protégées contre une éventuelle acquisition par des concurrents voulant bloquer le processus d'innovation.

4.6.1   Le processus d'innovation, de la phase de financement public de la recherche à celle de la commercialisation, requiert, lorsque c'est possible, des partenariats établis sur le long terme, qu'il est difficile de mettre en place avec les règles actuelles (publicité, propriété intellectuelle, réglementation sur les aides d'État et les achats publics, par exemple) (question 20). De nouvelles approches et règles devraient être recherchées en la matière afin d'éviter un éventuel conflit entre «plus d'innovation» et «plus de publicité et une concurrence plus loyale». L'innovation ou la recherche fondamentale n'étant généralement pas affectées par ce conflit d'intérêts, une part suffisante de celle-ci pourrait apporter une contribution significative à cet objectif (voir également paragraphe 4.7.3).

4.7   L'autre question clé soulevée par la Commission a trait à la répartition des fonds entre:

les PME, les entreprises sociales et les grands groupes,

la recherche fondamentale et la recherche axée sur des objectifs sociétaux,

la recherche et le processus d'innovation consécutif,

les innovations techniques, relatives aux services, aux besoins sociétaux et les innovations en entreprises,

approches descendante et ascendante.

Pour autant qu'il ne se soit pas déjà prononcé à ce sujet, le Comité formule à cet égard les suggestions suivantes.

4.7.1   Pour toute une série de raisons, les PME, et en particulier les petites entreprises, méritent une attention particulière lors de la définition des domaines thématiques à financer et des instruments à utiliser (29):

les PME devraient avoir la possibilité de se joindre à des programmes pour une période donnée, adaptée à l'entreprise (comme dans le cas des actions actuelles sur les FET),

une attention particulière et des critères d'éligibilité moins stricts devraient être accordés aux jeunes entreprises et aux microentreprises (moins de 10 salariés) qui recèlent un important potentiel d'innovation,

les fonds devraient être utilisés pour soutenir l'intégralité des processus d'innovation (ce qui est particulièrement important pour les chefs d'entreprise),

il faut mettre davantage l'accent sur les innovations en matière de services,

des modérateurs/facilitateurs seront nécessaires pour aider les petites entreprises à tirer parti des programmes d'innovation et leur faciliter l'accès à ceux-ci – le réseau de soutien européen aux entreprises pourrait jouer un rôle important à cet égard,

les entreprises de l'économie sociale peuvent être prises en compte dans la conception des modèles de financement.

4.7.2   Les grandes avancées en matière de connaissances fondamentales et les innovations modernes qui en résultent telles que l'Internet, le GPS, l'image à résonance magnétique, les lasers, les ordinateurs, les nanotechnologies, etc., sont le fruit de la recherche fondamentale et de la recherche appliquée qui a lui a succédé. Tant la recherche fondamentale que la recherche appliquée sont un semis essentiel pour les innovations futures (30). Le Comité s'est également penché sur la question de savoir comment ce semis peut parvenir aux organisations qui peuvent alimenter et développer les innovations (31).

4.7.3   C'est pourquoi, le CESE recommande que les mesures bénéficiant d'un soutien sous l'égide du Conseil européen de la recherche soient portées, dans le futur huitième programme cadre, à au moins 20 % du financement total et qu'une importance suffisante soit accordée à des questions essentielles d'autres volets du programme. Le CER a démontré de manière éclatante sa capacité à promouvoir de nouvelles idées et la recherche de pointe. Il devrait s'intéresser davantage dans le cadre de ses procédures futures aux aspects relatifs à la carrière des jeunes scientifiques, afin de garder ou de récupérer ceux-ci pour la recherche européenne.

4.7.4   La recherche collaborative est – en tant qu'élément central de l'actuel programme de coopération (32) – le principal pilier de l'actuel 7e programme cadre de R&D (et ses prédécesseurs) et affiche d'excellents résultats; c'est l'instrument de financement clé qui permet de regrouper des activités de recherche dans les États membres et d'éviter leur fragmentation. Il est par conséquent absolument indispensable de préserver dans le futur cadre stratégique commun l'importance qui lui est actuellement accordée (33). Cela est d'autant plus vrai que c'est précisément la recherche collaborative qui est destinée à apporter des solutions aux grands défis de la société (questions 9 et 11) et qui contribue aussi de manière significative au développement de nouvelles technologies qui sont cruciales pour la compétitivité globale de l'Europe.

4.7.5   De manière générale, il faudrait accorder un rôle plus important au soutien des projets qui suivent une approche ascendante (voir également 4.7.10) (questions 9 et 10), afin de laisser plus de place aux idées innovantes non envisagées dans la liste thématique ou qui par exemple ne sont pas développées par les industries existantes (voir également le paragraphe 3.7.6 - fixation des priorités par l'industrie) – à titre d'exemple, l'avion n'a pas été inventé par l'industrie navale!

4.7.6   Si les approches de type descendant résultent d'une perspective stratégique des décideurs de premier plan reposant sur leurs connaissances actuelles, les approches ascendantes s'appuient quant à elles sur le potentiel créatif des scientifiques, des ingénieurs et d'autres parties prenantes qui travaillent directement sur les éléments à étudier ou à améliorer. Même lorsqu'il s'agit des grands défis de société, il convient de mettre davantage l'accent sur des idées et des propositions émanant de la vaste communauté des connaissances que sur des directives provenant des autorités supérieures. «… les investissements effectués dans le contexte de la politique d'innovation devraient viser les innovations organisationnelles et les pratiques initiées par les employés sur le lieu de travail». (34)

4.7.7   L'équilibre entre les approches ascendante et descendante exige de mieux les différencier: une part suffisante de procédures suivant l'approche ascendante sont nécessaires, même à l'intérieur de domaines thématiques spécifiques (technologies clés ou grands défis de société, par exemple), pour laisser suffisamment de place à des propositions de solutions n'ayant pas été conçues selon l'approche descendante. Par ailleurs, il faut néanmoins aussi donner une chance à des pistes entièrement nouvelles pour des questions et des problèmes qui n'ont peut-être pas été immédiatement identifiés. Tandis que de telles procédures peuvent déjà être mises en pratique dans le cadre du programme «idées», il conviendrait de leur accorder une place significativement plus grande dans la recherche collaborative aussi, à l'instar de la démarche fructueuse entreprise dans le cadre des actions «technologies futures et émergentes» du thème «technologies de l'information et des communications», par exemple. Pour gérer cette approche, il convient d'accorder davantage de flexibilité et de marge de manœuvre aux fonctionnaires concernés.

4.7.8   En ce qui concerne les mesures relatives aux infrastructures de R&D (liste ESFRI), le Comité réitère sa recommandation selon laquelle (35) elles doivent être soutenues à travers des contributions en faveur de la construction et de l'entretien. Le programme «Personnes», qui inclut par exemple les actions Marie Curie (question 23) a lui aussi largement fait la preuve de son utilité et devrait par conséquent être reconduit intégralement voire étendu.

4.7.9   Au regard des problèmes importants relatifs à une politique européenne commune dans le domaine économique, monétaire et financier, qui sont actuellement au cœur du débat politique, et des questions macro-économiques y afférentes, le Comité recommande d'accorder une place suffisante dans les programmes de soutien aux recherches en la matière.

4.7.10   En ce qui concerne les questions dépassant le cadre de la R&D (question 17), le Comité recommande avant tout de mettre à profit les expériences acquises avec les instruments qui viennent d'être créés dans ce but et de ne pas en créer de nouveaux (36). Pour ce qui est des indicateurs et des partenariats pour l'innovation, l'on peut également se référer à l'avis relatif à une «Union de l'innovation» (37). En ce qui concerne la capitalisation, le Comité renvoie au même avis (38).

Bruxelles, le 13 juillet 2011.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  JO C 325 du 30.12.2006, p. 16.

(2)  JO C 44 du 16.2.2008, p. 1.

(3)  JO C 218 du 11.9.2009, p. 8.

(4)  JO C 182 du 04.8.2009, p. 40.

(5)  JO C 228 du 22.9.2009, p. 56.

(6)  JO C 306 du 16.12.2009, p. 13.

(7)  JO C 255 du 22.9.2010, p. 54.

(8)  JO C 354 du 28.12.2010, p. 80.

(9)  JO C 21 du 21.1.2011, p. 49.

(10)  JO C 48 du 15.2.2011, p. 112.

(11)  JO C 48 du 15.2.2011, p. 129.

(12)  JO C 132 du 03.5.2011, p. 39.

(13)  JO C 132 du 03.5.2011, p. 22.

(14)  JO C 218 du 23.7.2011, p. 87.

(15)  http://ec.europa.eu/research/evaluations.

(16)  JO C 48 du 15.2.2011, p. 129, paragraphe 3.12.

(17)  JO C 48 du 15.2.2011, p. 129, paragraphe 3.10.

(18)  JO C 256 du 27.10.2007, p. 17, paragraphe 6.4.

(19)  Voir note 12.

(20)  JO C 132 du 03.05.2011, p. 22.

(21)  Voir note 12.

(22)  JO C 218 du 11.9.2009, p. 8, paragraphes 4.1 à 4.4

(23)  JO C 218 du 23.7.2011, p. 87.

(24)  Voir note 12.

(25)  JO C 256 du 27.10.2007, p. 17, paragraphe 6.4.

(26)  Voir note 11, paragraphe 3.6.

(27)  Voir également le paragraphe 3.7.1.

(28)  JO C 218 du 11.09.2009, p. 8, paragraphe 4.8.

(29)  Voir note 12, paragraphe 4.10.

(30)  JO C 354 du 28.12.2010, p. 80, paragraphe 3.2.3.

(31)  Voir note 3.

(32)  Toutefois, de nouveaux concepts devraient être utilisés dans la proposition pour le 8e programme cadre de R&D afin de faire référence aux mesures qui ont jusqu'ici été décrites comme relevant de la «recherche collaborative» et de la «coopération».

(33)  Voir également paragraphe 4.3.

(34)  JO C 132 du 03.05.2011, p. 5.

(35)  Voir avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Initiative phare Europe 2020 – Une Union de l'innovation», JO C 132 du 03.05.2011, paragraphe 3.8.4.

(36)  Voir également note de bas de page 12.

(37)  Voir note 12, paragraphes 4.2. et 4.4.

(38)  Voir note 12, paragraphe 4.8.