3.4.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

CE 99/43


Jeudi 25 novembre 2010
Rapport spécial du Médiateur européen à l'attention du Parlement européen faisant suite au projet de recommandation adressé à la Commission européenne dans la plainte 676/2008/RT (conformément à l'article 205, paragraphe 2, première partie, du règlement)

P7_TA(2010)0436

Résolution du Parlement européen du 25 novembre 2010 sur le rapport spécial du Médiateur européen faisant suite au projet de recommandation du Médiateur à la Commission européenne dans la plainte 676/2008RT (2010/2086(INI))

2012/C 99 E/09

Le Parlement européen,

vu le rapport spécial adressé par le Médiateur européen au Parlement européen présenté le 24 février 2010,

vu l'article 228, paragraphe 1, deuxième alinéa, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ex-article 195 du traité CE),

vu les articles 41, paragraphe 1, 42 et 43 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne,

vu la décision 94/262/CECA, CE, Euratom du Parlement européen du 9 mars 1994 concernant le statut et les conditions générales d'exercice des fonctions du Médiateur (1), telle que modifiée par la décision 2008/587/CE, Euratom du Parlement européen du 18 juin 2008 (2),

vu la communication de la Commission adressée au Parlement européen et au Médiateur européen concernant les relations avec les plaignants en matière d'infraction au droit communautaire (3);

vu l'article 205, paragraphe 2, première phrase, de son règlement,

vu le rapport de la commission des pétitions (A7-0293/2010),

A.

considérant que l'article 228 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne habilite le Médiateur européen à recevoir les plaintes émanant de tout citoyen de l'Union concernant des cas de mauvaise administration dans l'action des institutions ou organes de l'Union,

B.

considérant que les plaintes déposées par les citoyens de l'UE constituent une importante source d'information sur les éventuelles infractions au droit de l'UE,

C.

considérant que, conformément à l’article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, «Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et agences de l’Union»,

D.

considérant que, le 1er mars 2007, une organisation non-gouvernementale active dans le domaine de la protection de l'environnement a demandé à la Commission l'accès à des informations et à des documents détenus par la direction générale entreprises et industrie et par l'ancien vice-président de la Commission chargé des entreprises et de l'industrie, concernant des réunions tenues entre la Commission et les représentants de constructeurs automobiles au cours desquelles la question de l'approche de la Commission à l'égard des émissions de dioxyde de carbone émanant des voitures a été débattue,

E.

considérant que la Commission a accordé l'accès à 15 des 18 lettres envoyées au commissaire de l'époque Günter Verheugen, mais qu'elle a refusé l'accès à trois lettres envoyées par le constructeur automobile allemand Porsche au motif que leur divulgation porterait atteinte à la protection des intérêts commerciaux de l'entreprise,

F.

considérant que, conformément à l'article premier, paragraphe a), du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (4), l'objectif de ce règlement est de garantir un accès aussi large que possible aux documents détenus par le Conseil, le Parlement européen et la Commission et que, conformément à la jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne, toute exception à ce principe doit être interprétée de façon restrictive,

G.

considérant que la Commission a refusé d'accorder au plaignant l'accès aux lettres concernées adressées par Porsche AG sur la base de l'article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement (CE) no 1049/2001, qui dispose que: «Les institutions refusent l'accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection: - des intérêts commerciaux d'une personne physique ou morale déterminée, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle …»,

H.

considérant que les lettres en question ont été envoyées par Porsche AG dans le contexte de la consultation des acteurs clés par la Commission au sujet de la révision de la stratégie communautaire visant à réduire les émissions de dioxyde de carbone des voitures particulières, qu'il était par conséquent probable que les trois lettres contenaient des informations sur les relations commerciales de Porsche AG, et que la Commission pouvait dès lors considérer qu'elles étaient couvertes par l'exception prévue à l'article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement (CE) no 1049/2001,

I.

considérant que les services du Médiateur ont examiné les trois lettres de Porsche AG ainsi qu'un échange de courriels entre la Commission et Porsche dans lesquels la Commission informait Porsche qu'elle avait l'intention de ne pas divulguer les trois lettres, et que le Médiateur, sur la base de cette analyse, a conclu que la Commission avait, à tort, refusé le plein accès aux lettres de Porsche AG au titre de l'article 4, paragraphe 2, premier tiret, et un accès partiel au titre de l'article 4, paragraphe 6, du règlement (CE) no 1049/2001 (5), et qu'il s'agissait en l'occurrence d'un cas de mauvaise administration,

J.

considérant que le 27 octobre 2008, le Médiateur a formulé un projet de recommandation à la Commission exposant les détails de cette analyse factuelle et juridique, dans lequel il affirmait que la Commission devrait accorder l'accès aux trois lettres envoyées par Porsche AG à l'ancien vice-président Günter Verheugen, dans leur totalité ou considérer de les divulguer en partie,

K.

considérant que le Médiateur, sur la base de l'article 195 CE (à présent article 228 TFUE), a demandé à la Commission de fournir un avis motivé dans un délai de trois mois, c'est-à-dire, pour le 31 janvier 2009 au plus tard,

L.

considérant que la Commission n'a pas fourni son avis dans le délai de trois mois prévu à l'article 228 TFUE, mais qu'elle a, à la place, demandé six prorogations de délai pour soumettre son avis détaillé sur le projet de recommandation du Médiateur, et qu'au mois de juillet puis en septembre 2009, le Médiateur a informé le secrétariat de la Commission de son intention de présenter un rapport spécial au Parlement s'il ne recevait pas une réponse à son projet de recommandation,

M.

considérant que la nouvelle Commission, lorsqu'elle a pris ses fonctions, a effectivement accordé l'accès aux lettres, mais que cela s'est produit plus de 15 mois après la communication du projet de recommandation au lieu des trois mois précisés dans le statut du Médiateur et à l'article 228 du TFUE,

N.

considérant que la Commission, en retardant sa réponse au projet de recommandation pendant 15 mois, a enfreint son obligation de coopération sincère et de bonne foi avec le Médiateur au cours de son enquête sur l'affaire 676/2008/RT, et que ce fait est préjudiciable non seulement au dialogue interinstitutionnel, mais aussi à l'image publique de l'UE,

O.

considérant que le Médiateur a constaté des retards dans le chef de la Commission dans une autre affaire impliquant l'accès aux documents (355/2007(TN) FOR), dans laquelle la Commission aurait dû soumettre son avis détaillé au projet de recommandation du Médiateur pour le 31 octobre 2009, et qu'elle ne l'a toujours pas fait,

P.

considérant que la Commission a respecté les délais fixés pour répondre aux plaintes dans seulement 4 affaires sur 22 en matière d'accès aux documents traitées par le Médiateur en 2009; que dans 14 de ces 22 affaires, elle a présenté sa réponse avec plus de 30 jours de retard, et dans six affaires, elle a introduit sa réponse avec au moins 80 jours de retard,

Q.

considérant que le Parlement en tant qu'unique institution élue de l'Union européenne a pour mission de sauvegarder et de protéger l'indépendance du Médiateur dans l'exercice de ses fonctions à l'égard des citoyens de l'UE et de veiller à la mise en œuvre des recommandations qu'il formule,

1.

souscrit aux critiques formulées par le Médiateur européen et à sa recommandation à la Commission au sujet de la plainte 676/2008/RT;

2.

reconnaît que les retards excessifs accumulés pour répondre au Médiateur dans cette affaire constituent un manquement de la Commission à son devoir de coopération loyale qui découle du traité;

3.

est très préoccupé par la pratique courante de retard et d'obstruction de la Commission dans le cadre des enquêtes du Médiateur dans les affaires relatives à l'accès aux documents;

4.

rappelle que, dans le contexte des consultations prévues à l'article 4, paragraphe 4, du règlement (CE) no 1049/2001, la Commission doit établir un délai de réponse pour le tiers auteur d'un document et souligne que la Commission devrait exercer ce pouvoir de façon à lui permettre de respecter ses propres délais (6);

5.

rappelle la jurisprudence pertinente relative au principe de coopération loyale (Article 4, paragraphe 3, du TUE), en vertu de laquelle les institutions de l'Union ont un devoir de coopération en toute bonne foi dans leurs relations réciproques et fait remarquer que cette obligation est clairement stipulée dans le nouvel article 13, paragraphe 2, du TUE;

6.

est d'avis que l'attitude non coopérative de la Commission dans cette affaire et dans d'autres affaires qui concernent l'accès aux documents risque d'éroder la confiance des citoyens dans la Commission et de compromettre la capacité du Médiateur européen et du Parlement européen à superviser la Commission de manière adéquate et efficace et va ainsi à l'encontre du principe même de l'état de droit sur lequel l'Union européenne est fondée;

7.

exige que la Commission donne au Parlement européen l'engagement qu'elle remplira son devoir de coopération loyale avec le Médiateur européen à l'avenir;

8.

souligne qu'au cas où la Commission omettrait de donner un tel engagement et/ou qu'elle persisterait dans ses pratiques non coopératives à l'égard du Médiateur, le Parlement pourrait sanctionner la Commission, et que ces sanctions pourraient consister à placer une partie du budget de la Commission pour les dépenses administratives dans la réserve;

9.

charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et au Médiateur européen.


(1)  JO L 113 du 4.5.1994, p. 15.

(2)  JO L 189 du 17.7.2008, p. 25.

(3)  JO C 244 du 10.10.2002, p. 5.

(4)  JO L 145 du 31.5.2001, p. 43.

(5)  L'article 4, paragraphe 6, du règlement (CE) no 1049/2001, est libellé comme suit: «Si une partie seulement du document demandé est concernée par une ou plusieurs des exceptions susvisées, les autres parties du document sont divulguées.»

(6)  L'article 5, paragraphe 5, des règles détaillées pour l'application du règlement (CE) no 1049/2001, annexées à la décision de la Commission 2001/937/CE, stipule que: «Le tiers auteur consulté dispose d'un délai de réponse qui ne peut être inférieur à cinq jours ouvrables mais qui doit permettre à la Commission de respecter ses propres délais de réponse …»