52010DC0700

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN, AU COMITÉ DES RÉGIONS ET AUX PARLEMENTS NATIONAUX Le réexamen du budget de l'UE /* COM/2010/0700 final */


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Bruxelles, le 19.10.2010

COM(2010) 700 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN, AU COMITÉ DES RÉGIONS ET AUX PARLEMENTS NATIONAUX

Le réexamen du budget de l'UE

{SEC(2010) 7000 final}

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN, AU COMITÉ DES RÉGIONS ET AUX PARLEMENTS NATIONAUX

Le réexamen du budget de l'UE

La décision d'entreprendre un réexamen complet couvrant l'ensemble des dépenses et des ressources de l'UE date de 2006[1]. Depuis, le climat économique a radicalement changé et la crise économique mondiale a placé les dépenses publiques au cœur du débat politique dans les pays européens. Des choix difficiles sont faits dans l'ensemble de l'Union européenne. Les priorités en matière de dépenses publiques sont remises en cause comme elles ne l'ont plus été depuis des décennies.

En même temps, ces dépenses ont joué un rôle crucial dans le processus de reprise. Les mesures de stimulation adoptées fin 2008 ont permis d'éviter les pires effets de la crise. Intelligemment ciblées, ces mesures ont visé des domaines dans lesquels les efforts consentis étaient susceptibles d'être payants pour l'avenir. Soutenant les politiques en faveur de la croissance et des infrastructures stratégiques, elles ont aussi eu pour objet d'éviter que des compétences et des actifs essentiels ne soient balayés par l'onde de choc.

Le présent réexamen intervient donc à un moment où les citoyens sont particulièrement attentifs aux priorités établies en matière de dépenses ainsi qu'à leur valeur ajoutée et à leur qualité. Il fait suite à un long processus de consultation et de réflexion[2] qui a permis l'expression d'idées prometteuses, le but étant de trouver les moyens de garantir une meilleure utilisation du budget en vue de la réalisation des objectifs de l'UE, de façonner ce dernier conformément aux politiques de l'UE et de favoriser la mise en œuvre de la stratégie Europe 2020, de faire en sorte que le budget produise ses effets le plus efficacement possible et d'envisager sous un jour nouveau le meilleur moyen de fournir les ressources nécessaires au financement des politiques de l'UE.

Les dépenses publiques sont un moyen au service d'une fin, et la croissance pour l'emploi, notre priorité essentielle, vise à augmenter le nombre de personnes au travail, à renforcer la compétitivité de nos entreprises et à construire un marché unique ouvert et moderne.

La Commission doit présenter ses propositions pour le prochain cadre financier pluriannuel avant le 1er juillet 2011. Le présent réexamen aborde certains des enjeux auxquels le budget de l'UE est confronté dans la perspective du prochain cadre financier et au-delà. Ces enjeux ont trait à la façon dont l'UE doit tenir compte à la fois de l'incidence de la crise économique et budgétaire et des défis à long terme que sont l'évolution démographique, le changement climatique et la pression exercée sur les ressources naturelles. L'autre question essentielle qui se pose n'est pas de savoir s'il faut dépenser plus ou moins, mais de trouver les moyens de dépenser plus intelligemment . Enfin, il nous faut présenter une vision globale de la réforme du budget, qui en couvre à la fois les dépenses et les recettes.

L'Union européenne éprouvera de grandes difficultés pour définir la marche à suivre, mais elle en retirera aussi une grande satisfaction. Ce serait là un signal fort de sa capacité à mobiliser les instruments dont elle dispose pour produire un réel changement au bénéfice de ses citoyens.

1. Quelles leçons tirer du budget actuel?

Le traité de Lisbonne a introduit un nouvel environnement juridique pour le cadre financier pluriannuel. Il a confirmé non seulement la nécessité d'opter pour une approche à moyen terme des dépenses de l'UE, mais aussi le principe de l'autofinancement de l'UE, ce qui signifie que le processus de réexamen, tout en étant tourné vers l'avenir, s'appuie aussi largement sur l'expérience tirée de la période de financement actuelle.

Jusqu'à présent, le budget de l'UE s'est révélé un outil efficace pour réaliser les ambitions de l'UE et mettre en œuvre ses politiques. Il a apporté une contribution réellement décisive lorsqu'il s'est agi de stimuler la croissance et l'emploi, d'encourager la recherche, de renforcer la compétitivité et les compétences et de se montrer solidaires à l'égard des populations qui en ont le plus besoin. Le budget a fourni un soutien particulier à des projets prioritaires, en contribuant notamment à donner l'impulsion devenue nécessaire du fait de la crise économique. Il a renforcé la sécurité de l'Union, apporté une aide à des centaines de millions de personnes parmi les plus démunies de la planète, accéléré le développement des pays voisins de l'Europe et soutenu les politiques de l'UE dans le monde entier.

Notre objectif doit être d'utiliser le budget aussi efficacement que possible pour réaliser les objectifs de l'UE. Parmi les principaux enseignements à tirer pour atteindre cet objectif figurent les éléments suivants:

- Depuis leur introduction en 1988, les cadres financiers pluriannuels de l'UE garantissent une discipline budgétaire stricte ainsi que la prévisibilité à moyen terme des dépenses de l'UE. Cette prévisibilité a été obtenue au prix d'une souplesse limitée. Ces dernières années, le cadre financier et ses programmes n'ont pas toujours permis de réagir aux impératifs politiques et à l'évolution de la situation. Lorsque l'UE décide d'apporter une aide supplémentaire aux pays en développement à la suite de l'envolée des prix des denrées alimentaires en 2008, de réagir à l'évolution des besoins de projets européens ambitieux tels que Galileo et ITER, qui se caractérisent par de longs délais de mise en œuvre et une évolution des coûts, de participer aux efforts de relance de l'économie en 2008-2009, ou de réagir à des crises à l'échelle internationale, comme ce fut le cas pour le tsunami, elle se heurte à la rigidité excessive du système actuel. Ce n'est qu'à grand-peine, en utilisant des marges imprévues dégagées dans d'autres parties du budget que ces différentes décisions ont pu être mises en œuvre. Même dans le cadre des programmes, les obstacles à la redéfinition des priorités n'ont pas permis d'accorder l'importance qui convient aux nouveaux problèmes tels que les urgences sanitaires, de réorienter les besoins en matière de formation au lendemain de la crise ou de tenir compte de l'évolution des relations de l'UE avec les économies émergentes. Cette incapacité du budget à «prévoir l'imprévisible» porte préjudice tant à l'efficacité de l'action de l'UE qu'à son image.

- La crise économique et ses effets sur le débat relatif à la gouvernance économique constituent un de ces autres événements imprévus de ces dernières années. Ils ont mis en évidence l'interdépendance des économies de l'UE et la nécessité de renforcer les règles communes. Tout d'abord, l'utilisation du budget comme garantie pour financer le mécanisme de stabilisation européen, bien que fortement limitée par le plafond des ressources propres, s'est révélée une façon inédite de recourir au budget pour soutenir une action urgente. Il a, par ailleurs, été suggéré d'utiliser les fonds de l'UE pour renforcer les mesures préventives et correctrices destinées à soutenir le pacte de stabilité et de croissance.

- La nature du débat qui a précédé l'accord sur le dernier cadre financier a aussi eu des conséquences sur l'adéquation entre le budget et les objectifs fixés. La question des «soldes nets» ayant focalisé l'attention, les programmes ont été faussés de façon à maximaliser la possibilité d'attribuer les dépenses à l'avance en fonction des États membres. La priorité a été donnée à cette option plutôt qu'aux mesures destinées à améliorer les résultats, telles que le dialogue sur les politiques macroéconomiques et la constitution de réserves pour récompenser l'efficacité. Cela signifie également que la dimension européenne – à savoir les domaines dans lesquels l'UE est à même d'apporter la plus grande valeur ajoutée – n'a pas toujours été au centre des préoccupations. Le débat sur le «juste retour» a donc eu une incidence négative sur la qualité de la mise en œuvre et a eu pour effet de réduire la valeur ajoutée apportée par l'UE.

- La mise en place de nouveaux programmes prend du temps – en particulier lorsqu'ils se fondent sur une approche de partenariat visant à prendre en compte les priorités et les besoins locaux. Le délai entre l'obtention d'un accord sur les actes juridiques et le lancement d'une période de financement revêt une importance déterminante à cet égard. Au cours de la période qui a précédé 2007, l'accord sur le cadre financier n'étant intervenu que tardivement, ce délai utile s'en est trouvé considérablement réduit. Le lancement effectif des programmes a donc été retardé, et dans certains cas, les répercussions se sont fait sentir pendant toute la période d'exécution.

- Les retards pris dans le lancement des programmes, les complexités inhérentes au processus, la très grande décentralisation de la méthode d'exécution et l'incidence de la crise financière sur les budgets nationaux expliquent pourquoi les dépenses de cohésion ont tardé à être mises en œuvre. Une meilleure conception, une prise de décision plus rapide, des procédures rationalisées et harmonisées, une définition plus claire des priorités à tous les niveaux et une approche plus souple en matière de cofinancement ont été désignées comme autant de solutions possibles.

- Il arrive que l'effet des dépenses de l'UE soit limité par les règles régissant les programmes. Si les contrôles mis en place ont permis une amélioration constante de la gestion financière, les incohérences entre les programmes et la lourdeur des charges administratives se sont révélées des obstacles à l'efficacité. D'une manière générale, les contrôles exercés ont permis d'évaluer les programmes sur la base des ressources qu'ils mobilisaient plutôt que sur leur performance, limitant ainsi les incitations à obtenir des résultats effectifs.

- C'est dans le cadre financier existant que les premières mesures ont été prises pour expérimenter une nouvelle approche de l'incidence que peut avoir le budget de l'UE. S'il est possible de mobiliser des ressources financières provenant d'autres sources publiques et privées grâce au budget de l'UE, un même financement permettra de réaliser plus efficacement les objectifs des politiques de l'UE. Cette approche s'est révélée fructueuse dans des cas tels que le mécanisme de financement avec partage des risques, qui a stimulé les investissements des entreprises dans les activités de recherche à haut risque. Il se peut donc que la prédominance de l'approche fondée sur les subventions ait limité les effets potentiels du budget.

2. Principes à observer pour le budget de l'UE

Le budget de l'UE devant reposer sur une série de principes fondamentaux, c'est à l'aune de ces principes que les différentes options doivent être évaluées. Ils devraient, en outre, permettre aux citoyens européens d'avoir une vision plus claire de la finalité du budget de l'UE et de la façon dont les choix fondamentaux sont opérés.

2.1. Mise en œuvre des priorités d'action fondamentales

Le budget de l'UE est un instrument essentiel pour l'élaboration et la mise en œuvre des politiques de l'Union au bénéfice des citoyens et des acteurs économiques et sociaux. S'il n'est pas le seul dont celle-ci dispose – bon nombre de ses objectifs pouvant être atteints par la voie législative ou grâce à la coordination des politiques – le budget constitue toutefois un élément fondamental de la panoplie d'instruments qu'elle utilise.

Parmi les politiques qui nécessitent l'engagement de dépenses publiques substantielles, l'importance relative des dépenses devrait refléter les priorités d'action fondamentales de l'UE. Le budget devrait également correspondre aux nouvelles orientations définies par le traité de Lisbonne et l'importance accordée à des domaines particuliers tels que, par exemple, l'énergie et le climat, le rayonnement extérieur de l'UE, ainsi que la justice et les affaires intérieures.

Il doit surtout être conçu comme l'une des clefs de voûte de la stratégie Europe 2020 pour une croissance intelligente, durable et inclusive. La crise économique et financière laisse dans son sillage un contexte de faible croissance. Remédier efficacement aux conséquences de la crise et augmenter la croissance potentielle en cette période d'assainissement budgétaire ne peut se faire au seul niveau national, mais nécessite une intervention commune au niveau de l'UE. Le budget de l'UE doit appuyer le processus visant à rétablir la capacité de croissance de l'Union en affectant les ressources aux domaines dans lesquels elles sont susceptibles de produire les résultats les plus rapides, les plus importants et les plus solides.

2.2. Valeur ajoutée de l'UE

Si la valeur ajoutée d'un projet politique ne peut être ramenée à un simple bilan comptable, pour qu'une dépense au niveau de l'UE soit justifiée, elle doit répondre à un autre critère essentiel: toute dépense engagée au niveau de l'UE doit se révéler plus profitable aux citoyens que si elle avait été engagée au niveau national. La dimension européenne peut maximiser l'utilisation rationnelle des finances des États membres et contribuer à réduire le niveau total des dépenses en regroupant les ressources et les services communs en vue de réaliser des économies d'échelle. En conséquence, le budget de l'UE devrait être utilisé pour financer les biens publics de l'UE, les actions que les États membres et les régions ne peuvent pas financer eux-mêmes, ou dans les domaines où il peut garantir de meilleurs résultats.

Les dépenses de l'UE en 2010 se sont élevées à 122,9 milliards d'euros. Ce chiffre est relativement bas par rapport aux budgets nationaux – soit 1 % environ du PIB de l'UE, alors que les dépenses publiques globales représentent, en moyenne, pour l'ensemble de l'UE, entre 45 et 50 % de ce PIB. D'importants domaines de dépenses – comme la fourniture de services dans les domaines de la santé, de l'éducation et de la sécurité sociale, par exemple – relèvent à juste titre de la sphère des budgets nationaux et servent à assurer des services reflétant des choix de société.

Mais dans d'autres domaines, la mise en œuvre des actions prévues en recourant au budget de l'UE constitue le seul choix rationnel et le meilleur moyen de réaliser les objectifs de l'Union. L'UE compte 500 millions de citoyens et constitue la plus grande économie dans le monde. Les occasions sont donc réelles d'exploiter cette valeur ajoutée. L'Union permet de réaliser des économies d'échelle et de cibler efficacement les actions prioritaires tout en évitant les chevauchements inutiles. Sa dimension continentale permet le bon fonctionnement des politiques fondamentales, telles que l'identification de l'excellence dans la recherche grâce à la concurrence, lorsque la masse critique nécessaire est souvent inexistante au seul niveau national. Elle est à même de combler les lacunes laissées par la dynamique des processus décisionnels nationaux, en s'attaquant aux défis transfrontières dans le domaine des infrastructures, de la mobilité, de la cohésion territoriale ou de la coopération en matière de recherche à l'échelle européenne – lacunes qui pourraient, dans le cas contraire, porter préjudice aux intérêts de l'Union dans son ensemble. L'UE a la capacité de favoriser la mobilisation d'un éventail de ressources publiques et privées bien plus large que celui disponible au seul niveau national.

En cette période de contraintes budgétaires sévères et de longue durée, la coordination entre le budget de l'UE et les budgets nationaux devrait constituer un élément essentiel pour améliorer la gouvernance économique, ainsi que la transparence et l'utilisation rationnelle des dépenses publiques.

2.3. Un budget dicté par une obligation de résultats

Déterminer les domaines dans lesquels l'action de l'UE peut apporter une valeur ajoutée n'est pas suffisant en soi. Il n'est utile de consacrer des ressources financières aux politiques qu'il convient de mener que si les dépenses engagées permettent d'obtenir les résultats souhaités. Les programmes de dépenses doivent avoir une incidence réelle et les investissements consentis se traduire par des actions concrètes, actions qu'il convient de mesurer en termes d'impact réel plutôt qu'en fonction des ressources utilisées. Il convient de trouver le bon équilibre entre la prévisibilité des dépenses et les objectifs importants que sont la flexibilité, la conditionnalité et le paiement des fonds sur la base des résultats, ainsi qu'entre une nécessaire simplification et les contrôles requis pour garantir une bonne gestion financière. Les mesures incitatives et les mécanismes de contrôle doivent, toutefois, être en place pour que les dépenses atteignent leur véritable objectif.

2.4. Avantages mutuels procurés par la solidarité

La solidarité est un des piliers de l'Union européenne, un principe fondamental dans lequel elle puise sa force. Le budget n'est pas le seul moyen dont dispose l'Union pour exprimer la solidarité, mais il constitue un élément indispensable de sa stratégie d'action. L'élargissement a renforcé la diversité économique au sein de l'Union; celle-ci a un intérêt politique, social et économique à aider ses régions les moins développées à contribuer à la réalisation de ses objectifs généraux: la stabilité doit profiter à tous. En outre, étant donné que l'Union européenne cherche à mettre en place une stratégie économique globale pour une croissance future, la solidarité suppose d'accorder une attention spécifique aux plus vulnérables et à ceux auxquels les réformes imposent une charge particulière. Tous bénéficient cependant de cette solidarité, grâce au potentiel de croissance du marché unique, aux effets transnationaux des dépenses de l'UE effectuées aux niveaux national ou régional et au cercle vertueux créé par les particuliers et les entreprises qui tirent parti des possibilités offertes par l'UE dans son ensemble. Selon les estimations, la politique de cohésion menée entre 2000 et 2006 a permis de relever de 0,7 % le PIB global de l'UE-25 en 2009, ce qui représente un bon retour sur investissement pour des dépenses qui ont représenté moins de 0,5 % du PIB de l'UE sur la même période[3].

Pour réaliser ses objectifs collectifs, l'UE doit souvent concentrer ses efforts sur certaines zones géographiques. La protection des frontières extérieures de l'Union contre l'immigration clandestine incombe logiquement aux États membres concernés. Il arrive que des infrastructures en place dans certains États membres présentent des avantages majeurs pour l'Union. Si les actions visant à promouvoir la protection de l'environnement ou à lutter contre le changement climatique peuvent avoir une dimension très locale, leurs bienfaits se font ressentir à une bien plus grande échelle. Dans de tels cas, l'investissement qu'il est possible de consentir au niveau national est souvent inférieur à ce qui est nécessaire pour déclencher une action, alors même que toute inaction est potentiellement préjudiciable pour l'Europe dans son ensemble. Le budget de l'UE devrait permettre de financer ce type de coûts aux fins de la réalisation des objectifs collectifs de l'Union.

2.5. Une réforme du financement du budget

La question des «ressources propres» constitue un important volet du réexamen du budget. C'est au début des années 1970 que l'UE a commencé à percevoir les ressources propres générées par des politiques communes telles que le tarif douanier commun. L'autonomie de ces ressources propres a été progressivement affaiblie et le système actuel de financement de l'UE a peu à peu évolué vers une combinaison opaque et extrêmement complexe de contributions provenant des budgets nationaux, de corrections et de rabais. Le lien entre les ressources propres originelles et les politiques communes de l'UE n'existe plus, ce qui a rendu le système moins transparent et suscité de plus en plus de doutes quant à son équité. Il est essentiel de porter un regard neuf si l'on veut que le financement de l'UE renoue avec les principes d'autonomie, de transparence et d'équité.

3. Un budget pour l'avenir

L'UE est désormais engagée dans un programme fondamental de réforme économique, qui vise à libérer la capacité de son économie à trouver de nouvelles sources de croissance et à créer de nouveaux emplois – la stratégie Europe 2020.

La stratégie Europe 2020 ambitionne de garantir une croissance intelligente, durable et inclusive, comme en témoignent les cinq objectifs suivants:

- porter à au moins 75 % le taux d'emploi de la population âgée de 20 à 64 ans;

- investir 3 % du PIB dans la recherche et le développement (R&D);

- réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 20 % par rapport aux niveaux de 1990 ou de 30 % si les conditions le permettent; porter la part des sources d'énergie renouvelables dans la consommation finale d’énergie à 20 %; augmenter de 20 % son efficacité énergétique;

- ramener à 10 % le pourcentage de jeunes qui quittent l'école prématurément et faire passer à au moins 40 % la part de la population âgée de 30 à 34 ans ayant achevé un cursus postsecondaire, et ce à l'horizon 2020;

- sortir au moins 20 millions de personnes de la pauvreté.

La Commission estime que la réalisation de ces objectifs devrait permettre d'accroître de 4 % le PIB de l'UE et de créer 5,6 millions de nouveaux emplois d'ici 2020 [4] .

Cet engagement concerne un large éventail de domaines d'action. Il nécessite un partenariat entre l'UE et les instances nationales et régionales; il requiert aussi un ciblage précis des actions afin que les efforts se concentrent sur les domaines où ils sont le plus susceptibles de produire des résultats. Il conviendrait par ailleurs d'accorder une attention particulière aux domaines dans lesquels les mesures prises peuvent avoir une incidence rapide sur la croissance. Le budget de l'UE peut et doit jouer un rôle clé dans la mise en œuvre de cette stratégie et devrait servir de pierre de touche à une nouvelle génération de programmes de dépenses.

Un des éléments moteurs de la stratégie Europe 2020 est la nécessité d'une vision globale de l'économie et de la société européennes, dans laquelle les différents objectifs se renforcent mutuellement et les actions entreprises peuvent concourir à la réalisation de plusieurs objectifs en même temps. Cette approche passe non par un fonds unique, mais par un degré élevé de coordination. La stratégie Europe 2020 appelle des solutions intégrées, comme doivent l'être également les instruments utilisés pour la mettre en œuvre. Les actions présentées ci-après devraient donc être considérées comme un ensemble de mesures étroitement liées les unes aux autres et interagissant entre elles pour garantir une croissance intelligente, durable et inclusive.

3.1. Croissance intelligente

La stratégie Europe 2020 repose essentiellement sur la nécessité de soutenir la transformation de l'économie européenne en une économie fondée sur la connaissance et l'innovation. Une grande partie des actions à entreprendre pour stimuler la compétitivité future et créer les emplois de demain sont axées sur les efforts fournis par les États membres pour encourager la recherche et l'innovation, revaloriser l'enseignement et supprimer les obstacles à l'entrepreneuriat. L'Europe dispose toutefois, avec la taille de son marché, d'un énorme atout qu'elle se doit d'utiliser de manière optimale, c.-à-d. en exploitant le potentiel du marché unique et en utilisant les fonds du budget de l'UE pour apporter une valeur ajoutée aux initiatives prises par le secteur public pour donner une nouvelle impulsion aux moteurs de croissance.

Recherche, innovation et éducation

La recherche et l'innovation sont les moteurs les plus durables de la croissance économique et de la croissance de la productivité. Les programmes actuels de recherche et d'innovation de l'UE ont des retombées positives considérables pour la société et offrent une valeur ajoutée européenne indiscutable, garantissant la masse critique nécessaire dans des domaines tels que la recherche fondamentale. Les dépenses consacrées par l'UE à la recherche et l'innovation ont doublé pendant la période couverte par le dernier cadre financier pluriannuel et atteindront, d'ici 2013, environ 7 % du budget de l'Union[5]. Avec le Conseil européen de la recherche et l'Institut européen de technologie, l'UE a mis en place une toute nouvelle approche promouvant l'excellence à l'échelle européenne et établissant entre l'éducation, la recherche et les entreprises les liens indispensables pour que la créativité vienne alimenter la croissance. Les futures dépenses de recherche et d'innovation doivent avoir un impact encore plus significatif en termes de croissance et de création d'emplois et en termes de retombées importantes pour la société et l'environnement.

Pour atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020 dans ce domaine, la Commission a proposé une Union de l'innovation. À une époque placée sous le signe des contraintes budgétaires, l'UE et les États membres doivent continuer d'investir dans la recherche et le développement et l'innovation. Ils doivent aussi veiller à ce que les obstacles auxquels se heurtent encore les entrepreneurs désireux d'exploiter leurs «idées sur le marché» soient éliminés: l'accès au financement doit être amélioré, les coûts des droits de propriété intellectuelle doivent être abordables, la mise en place de normes d'interopérabilité doit être accélérée et les budgets alloués aux marchés publics doivent être utilisés de manière stratégique. Parallèlement, des réformes devraient être engagées pour optimiser les montants investis, résoudre le problème de la fragmentation et optimiser les effets de levier.

- Se concentrer sur l'innovation . Le financement futur de la recherche et de l'innovation doit contribuer directement à la réalisation de la stratégie Europe 2020, et en particulier de l'Union pour l'innovation[6]. Il devrait s'appuyer sur les travaux effectués dans le cadre du programme pour la compétitivité et l'innovation et soutenir des projets novateurs, concernant notamment les PME, à net potentiel économique, afin de contribuer à consolider et à élargir la base industrielle de l'Europe. Le succès du mécanisme de financement avec partage des risques a démontré que les nouvelles approches retenues pour soutenir les projets pouvaient aider à mobiliser des investissements privés. Ce mécanisme a utilisé 1 milliard d'euros tiré du budget de l'UE pour mobiliser un montant supplémentaire de 16,2 milliards d'euros en faveur de la recherche et du développement dans l'ensemble de l'UE. Les plateformes technologiques européennes ont utilement contribué à définir les priorités importantes pour les entreprises dans l'optique du programme-cadre. Des partenariats public-privé ont été créés pour impliquer activement les entreprises et co-investir dans des programmes de recherche axés sur leurs besoins tels que les initiatives technologiques conjointes, qui ont montré comment une collaboration novatrice pouvait se contenter d'une contribution budgétaire de l'UE relativement limitée pour stimuler des initiatives industrielles européennes majeures. Tous ces instruments doivent contribuer de concert à la réalisation de ces objectifs dans un cadre stratégique commun.

- Relever les grands défis sociétaux . L'Europe est confrontée à une multitude de défis sociétaux sans précédent auxquels elle ne peut répondre que par des avancées scientifiques et technologiques majeures. La priorité devrait être accordée aux objectifs fondamentaux de l'UE et en particulier à la stratégie Europe 2020. L'UE devrait par exemple contribuer à remédier à la négligence avec laquelle a été traitée la recherche dans le domaine de l'énergie pendant des décennies, ce qui explique le retard qu'accuse l'Europe en matière de développement de sources d'approvisionnement en énergie domestiques et de mesures visant à réduire les émissions de CO². Des partenariats d'innovation européens seront lancés afin d'accélérer la recherche, le développement et le déploiement des innovations sur le marché, le but étant de mettre en commun les compétences et les ressources et de stimuler la compétitivité des entreprises européennes.

- Réaliser l’Espace européen de la recherche . Il est plus que jamais essentiel d'optimiser l'efficacité du système européen de recherche et d'innovation en créant un Espace européen de la recherche véritablement unifié, au sein duquel tous les acteurs, publics et privés, peuvent agir librement, nouer des alliances et atteindre la masse critique leur permettant d’être compétitifs et d’interagir sur la scène mondiale. Une meilleure coordination aux niveaux régional, national et de l'UE est plus efficace pour prévenir les chevauchements et encourager les meilleures pratiques et une programmation conjointe renforcée pourrait garantir des synergies entre les différents niveaux de financement et les rendre complémentaires. Il convient pour ce faire d'éliminer les obstacles à la mobilité des chercheurs.

- Étendre la base de la recherche européenne . Si l'aide de l'UE doit stimuler l'excellence, elle devrait aussi contribuer à élargir la base de recherche et d'innovation en aidant à rehausser la qualité des infrastructures de recherche dans l'ensemble de l'UE. Les fonds structurels devraient être pleinement exploités afin de développer la prochaine génération d'infrastructures de recherche, en se fondant sur la spécialisation régionale.

- Augmenter l'efficacité de la mise en œuvre des projets par la simplification . La communauté scientifique et le monde des entreprises se sont plaints d'une charge administrative excessive et ont appelé la Commission à trouver un meilleur équilibre entre confiance et contrôle, et entre prise de risques et prévention des risques. Malgré les avancées enregistrées sur la voie de la simplification dans le cadre des programmes existants, il reste encore du chemin à parcourir. Les mesures à haut potentiel de simplification sont l'acceptation générale des pratiques comptables des participants, dont celle des coûts moyens, un ensemble unique de règles pour tous les participants, couvrant toutes les mesures d'intervention, et une réduction du nombre de taux de remboursement et de méthodes de calcul des coûts indirects.

- Moderniser les systèmes éducatifs à tous les niveaux . L'excellence doit plus que jamais être le mot d'ordre. Il convient d'augmenter le nombre d'universités de niveau international, d'améliorer le niveau de compétence et d'attirer les individus les plus talentueux des pays tiers. Les programmes d’enseignement et de formation existants devraient faire l’objet d’un examen coordonné dans le but de développer une méthode intégrée dans le cadre du projet phare «Jeunesse en mouvement». La plupart des compétences en matière de politique d'éducation et d'emploi relèvent des États membres, mais l'Union a la responsabilité spécifique de promouvoir la mobilité et d'éliminer les obstacles qui subsistent en Europe. Les programmes de mobilité existant dans le domaine de l'éducation n'ont pas seulement amélioré les compétences, les connaissances et le niveau d'éducation de leurs bénéficiaires, ils stimulent aussi la concurrence entre les universités et les systèmes éducatifs. La demande est aujourd'hui largement supérieure à l'offre, Erasmus étant limité, au niveau universitaire, à quelque 5 % des étudiants. De tels programmes pourraient être étendus et l'allocation de ressources pourrait être plus clairement liée à la mesure dans laquelle les possibilités de mobilité sont utilisées dans la pratique.

Infrastructures du futur

Les infrastructures transfrontières sont un des meilleurs exemples de domaines où l'UE peut combler les lacunes et obtenir de meilleurs résultats. Les réseaux de transport, de communication et d'énergie procurent d'énormes avantages à la société au sens large. Des défaillances du marché peuvent toutefois avoir pour effet que des projets à haute valeur ajoutée de l'UE ne parviennent pas à attirer les investissements privés nécessaires. Il en résulte un coût pour l'UE en termes de compétitivité, de solidarité et de fonctionnement efficace du marché unique. Un soutien financier ciblé au niveau de l'UE peut contribuer à l'amorçage de projets de cette importance, qui recèlent souvent un grand potentiel commercial à long terme.

Les États-Unis et la Chine notamment sont en train de lancer des programmes ambitieux d'investissement dans les infrastructures. Des infrastructures efficaces revêtent pour l'Europe un intérêt stratégique évident pour maintenir sa compétitivité et jeter les bases d'une croissance économique durable. L'UE doit proposer le dosage de mesures le plus approprié pour stimuler la modernisation nécessaire tout en maintenant la qualité des infrastructures existantes. Il s'agit, en d'autres termes, de mettre en place un cadre politique à long terme crédible qui convaincra les investisseurs de débloquer les importants capitaux à long terme nécessaires au financement d'investissements. Il s'agit, pour ce faire, de développer un cadre réglementaire créant des conditions favorables et de prévoir une aide financière bien ciblée fournie au moyen d'instruments de financement adéquats destinés à favoriser le démarrage de projets. C'est ainsi qu'émergeraient un réseau de transport de base européen qui ferait évoluer les flux de fret et de passagers vers des modes de transport plus durables, l'accès au haut débit partout dans l'UE et un réseau énergétique capable de concrétiser le potentiel offert par le marché intérieur, ouvrant l'accès à de nouvelles sources d'énergie et permettant d'exploiter les nouvelles technologies intelligentes.

Un tel soutien doit être axé sur les grandes priorités – éliminer les obstacles sur les axes transnationaux stratégiques européens, encourager leur extension et développer des connexions transfrontières et intermodales. Des critères stricts doivent également être fixés pour sélectionner les meilleurs projets, à savoir ceux pour lesquels il peut être démontré qu'ils ont la capacité de gestion nécessaire, qu'ils peuvent être lancés dans un délai raisonnable et qu'ils respectent les critères de référence en matière de durabilité. Si, pour certaines infrastructures telles que le transport ferroviaire ou la mise en place de réseaux desservant des communautés très peu peuplées, des investissements publics seront toujours nécessaires, pour d'autres, la capacité des projets à attirer un financement du secteur privé pourrait également être un critère important. Une stratégie commune serait nécessaire entre le budget de l'UE et les budgets nationaux, la Banque européenne d'investissement et les sources de financement privées afin de définir les priorités en matière d'investissement et de trouver le bon équilibre qui stimulera le lancement d'initiatives. Il faut pour cela un cadre réglementaire approprié au niveau de l'UE qui permette de mettre en commun les ressources privées et publiques. Il conviendrait aussi de prêter attention à la manière dont l'aide pourrait englober des projets dépassant les frontières de l'UE, au bénéfice mutuel de nos voisins et de nous-mêmes.

3.2. Croissance durable

Intégration des politiques de l'énergie et du climat dans une économie utilisant efficacement les ressources

Un des principaux objectifs de la stratégie Europe 2020 est de faire face aux défis de l'utilisation efficace des ressources, du changement climatique et de la sécurité et l'efficacité énergétiques. Il s'agit donc non seulement de donner à l'économie les moyens de remplir les objectifs fixés, mais aussi de donner une impulsion aux investissements dans les technologies et les services plus verts que l'on considère comme présentant le plus grand potentiel d'exportation et de création d'emplois pour l'avenir, un secteur qui emploie déjà 3,5 millions d'Européens[7]. Cet objectif ambitieux ne pourra être atteint que si tous les instruments dont dispose l'UE, et notamment les instruments et sources de financement innovants, sont valorisés de manière effective.

Une possibilité serait de remodeler le budget de l'UE afin de créer des fonds spécialisés de grande envergure consacrés à la mise en œuvre d'investissements dans ces domaines. Le plan européen pour la relance économique a montré qu'il était possible de définir et de soutenir des projets stratégiques essentiels dans le secteur de l'énergie et de faire face au risque que le resserrement de crédit bloque ce type de projets. Il a permis de donner de la crédibilité aux politiques à long terme de l'UE dans le domaine de l'énergie et de renforcer la volonté des investisseurs à débloquer des capitaux pour des projets assortis de longs délais d'exécution. Cette approche pourrait être encouragée en tant qu'option fondée sur des programmes distincts. Toutefois, l'intégration de ces priorités dans différents programmes peut constituer une approche plus efficace, étant entendu que la même action peut et devrait poursuivre différents objectifs en même temps. La primauté d'objectifs politiques tels que le changement climatique et l'énergie suffirait à elle seule à faire apparaître la nécessité d'une redéfinition des priorités dans les politiques telles que celles de la recherche, de la cohésion, de l'agriculture et du développement rural, assortie d'une affectation des fonds à des fins clairement politiques contrebalancée par la nécessité d'éviter de nouvelles rigidités. Cette approche pourrait s'accompagner d'une véritable obligation générale d'identifier les domaines dans lesquels les programmes ont donné une impulsion à ces politiques. L'UE serait ainsi à même d'exposer clairement quelles ressources ont contribué à la mise en œuvre de politiques telles que la lutte contre le changement climatique ou le renforcement de la sécurité énergétique, quels que soient les instruments au moyen desquels ces politiques sont mises en œuvre.

La politique agricole commune

Une économie européenne durable a besoin d'un secteur agricole dynamique apportant sa contribution à la réalisation d'un grand nombre d'objectifs de l'UE, notamment en ce qui concerne la cohésion, le changement climatique, la protection de l'environnement et la biodiversité, la santé et la compétitivité, ainsi que la sécurité alimentaire. Une série de réformes de la politique agricole commune ont abouti à ce que l'aide apportée aux agriculteurs soit de plus en plus liée à la réalisation de ces objectifs et à ce que la part de la PAC dans le budget global diminue régulièrement ces dernières années. Même si cette part a encore tendance à diminuer, l'agriculture représenterait toujours un investissement public majeur pesant sur le budget de l'UE plutôt que sur les budgets nationaux.

Des réformes successives ont rapproché l'agriculture de l'UE du marché et ont aidé à réaliser des avancées en matière de sécurité alimentaire, à améliorer la gestion des ressources naturelles et à stabiliser les communautés rurales. Plus d'un tiers des revenus agricoles provient du budget de l'UE. L'agriculture européenne reste un fournisseur majeur de produits alimentaires de qualité à une époque où les besoins d'une population mondiale en forte progression ne cessent de croître. L'industrie agroalimentaire est une source importante de dynamisme dans l'économie de l'UE.

Il y a toutefois aussi des problèmes évidents à régler. L'octroi d'aides directes repose sur des valeurs de référence datant de plus de dix ans et les niveaux des aides directes accordées aux agriculteurs varient considérablement d'un État membre à l'autre. Si un certain degré de divergence peut se justifier, tout plaide en faveur d'un rapprochement progressif entre les niveaux d'octroi d'aides. Renoncer aux références historiques permettrait également d'éviter une culture de la dépendance qui peut faire obstacle au recours à des mesures d'incitation visant l'obtention de résultats. Cela soulèverait aussi des problèmes en ce qui concerne la pression exercée sur les revenus des agriculteurs et sur les coûts de production, ainsi que la question du ciblage et de la fixation de priorités des deux piliers de la PAC.

En juin dernier, le Conseil européen a souligné qu'un secteur agricole durable, productif et compétitif pouvait apporter une contribution importante à la stratégie Europe 2020, compte tenu du potentiel de croissance et d'emploi que possèdent les zones rurales, tout en assurant des conditions de concurrence loyales.

Les réformes pourraient être poursuivies de différentes manières:

- renforcement du ciblage de la PAC sur les priorités d'orientation générales de l'UE, assorti de l'«écologisation» des aides directes afin de soutenir les pratiques environnementales plus exigeantes et les améliorations positives visant à stimuler l'innovation et la compétitivité en milieu rural, en se fondant sur le concept d'écoconditionnalité;

- le développement rural devrait avoir pour but de promouvoir un secteur agricole compétitif et l'innovation dans des domaines tels que les processus de production et le progrès technologique, d'encourager la diversification économique dans les zones rurales, de préserver l'environnement et les ressources naturelles, d'œuvrer tant à l'atténuation du changement climatique qu'à l'adaptation à ce dernier, de soutenir la gestion de l'eau et de renforcer l'efficacité énergétique, et d'offrir un appui spécifique aux acteurs les plus défavorisés de l'économie rurale, notamment ceux qui sont confrontés à des problèmes tels que la désertification;

- recours au marché combiné avec le développement de formes d'assurance conformes à la «boîte verte» de l’OMC et d'autres outils de gestion des risques liés aux variations de revenus soudaines, en association avec une amélioration des conditions de concurrence dans la chaîne d'approvisionnement alimentaire;

- meilleure synergie entre le développement rural et les autres politiques de l'UE dans le but de contribuer à la mise en œuvre de politiques dans des domaines tels que la recherche, l'emploi et les infrastructures de réseau, et notamment l'intégration avec un cadre stratégique commun et les programmes de réforme nationaux s'inscrivant dans le cadre de la stratégie Europe 2020.

La réforme de la PAC pourrait donc être menée avec une intensité variable. Elle pourrait ainsi se limiter à éliminer certaines disparités existant actuellement en garantissant par exemple une plus grande équité dans la répartition des aides directes entre États membres et agriculteurs. Elle pourrait aussi procéder à une révision approfondie de la politique afin qu'elle devienne plus durable et établisse un nouvel équilibre entre les différents objectifs politiques, les agriculteurs et les États membres, en particulier en instaurant une approche plus ciblée des priorités. Une réforme plus radicale irait plus loin, abandonnant progressivement l'aide au revenu et la plupart des mesures de marché et donnant la priorité aux objectifs en matière d'environnement et de changement climatique par rapport aux dimensions économique et sociale de la PAC.

3.3. Une croissance inclusive

Politique de cohésion et Europe 2020

La cohésion s'est révélée l'un des moyens les plus efficaces dont dispose l'Union pour démontrer son attachement à la solidarité, tout en propageant la croissance et la prospérité dans l'ensemble de l'Union. Cette politique a des effets positifs pour tous, car les investissements réalisés dans les économies de l'UE profitent à tous les États membres. Elle permet de réaliser des investissements de modernisation, dynamise la croissance dans les régions les moins prospères de l'UE et joue un rôle de catalyseur du changement dans l'ensemble des régions d'Europe. Elle élargit les marchés et crée de nouveaux débouchés commerciaux pour l'UE dans son ensemble. Associée à des réformes structurelles et à un cadre macroéconomique stable, elle peut apporter une réelle contribution à la croissance. Toutefois, pour procurer de tels avantages, les dépenses de cohésion doivent être ciblées précisément pour produire une valeur ajoutée optimale. Cela implique de se concentrer rigoureusement à la fois sur les objectifs de la stratégie Europe 2020 et sur les résultats.

L'affectation des dépenses de cohésion pour la période 2007-2013 à la réalisation des objectifs de la stratégie de Lisbonne a démontré les avantages qu'il y a à recourir à une variété d'instruments financiers pour atteindre des objectifs généraux. Pour la prochaine période, la stratégie Europe 2020 fournit à la fois un ensemble bien précis de priorités communes et un cadre clair pour définir les priorités de financement. Europe 2020 permet une concentration beaucoup plus forte que par le passé. Des priorités claires pourraient être fixées pour parvenir à une croissance intelligente, durable et inclusive sur la base des objectifs suivants: l'aide aux nouvelles entreprises, l'innovation, la réduction des émissions polluantes, l'amélioration de la qualité de notre environnement, la modernisation des universités, les économies d'énergie, le développement des réseaux d'énergie, de transport et de télécommunications présentant un intérêt commun pour l'UE, l'investissement dans les infrastructures de la recherche, le développement du capital humain et une inclusion active contribuant à la lutte contre la pauvreté.

La corrélation explicite entre la politique de cohésion et la stratégie Europe 2020 offre une véritable occasion de continuer à aider les régions les plus pauvres de l'UE à combler leur retard et de faire en sorte que la politique de cohésion devienne un moteur de croissance important pour l'ensemble de l'Union. Les programmes de réforme nationaux sont l'outil approprié pour garantir des synergies entre les dépenses de cohésion de l'UE et les priorités nationales en matière de réformes et de dépenses.

Dans toutes les régions, la politique de cohésion doit devenir le porte-étendard des objectifs de la stratégie Europe 2020 relatifs à une croissance intelligente, inclusive et durable. Ceux-ci peuvent être un puissant moteur pour la politique de cohésion, renforçant ainsi les obligations du traité ayant trait à la consolidation de la cohésion économique, sociale et territoriale de l'Union de manière à accélérer la réduction des disparités entre les niveaux de développement des différentes régions. Comme aujourd'hui, l'attachement de l'Union européenne au principe de solidarité doit l'inciter à concentrer ses ressources sur les régions et les États membres les plus démunis. Le soutien offert par la politique de cohésion est aussi important pour le reste de l'Union, qui doit affronter des problèmes tels que l'exclusion sociale ou la dégradation de l'environnement (par exemple dans les zones urbaines), accompagner les processus de restructuration économique et la transition vers une économie davantage axée sur l'innovation et la connaissance et créer des emplois et améliorer les qualifications. Il convient d'accorder une attention particulière aux régions qui ont progressé, mais n'ont pas encore achevé leur processus de rattrapage. Un système d'aide transitoire simple et équitable permettrait d'éviter tout choc économique dû à une chute brutale des financements.

Il convient d'apporter un certain nombre d'ajustements à la programmation stratégique actuelle afin d'accroître la valeur ajoutée de cet outil de l'UE, grâce à une coordination plus étroite entre Europe 2020 et la politique de cohésion. Cette coordination nécessite un cadre plus clair au niveau européen, un processus de négociation plus stratégique entre les partenaires à l'échelon local et régional, les États membres et la Commission et un suivi approprié des progrès réalisés. L'objectif doit être d'aboutir à un consensus sur le rôle de la stratégie Europe 2020 en tant que moteur des politiques à tous les niveaux, et sur l'appropriation par tous des actions à mener sous forme de partenariats entre l'UE et les échelons nationaux et régionaux.

Une concentration et une cohérence accrues

Pour maximiser l'impact des dépenses de cohésion à l'avenir, il faudra faire en sorte que les États membres et les régions concentrent les ressources nationales et de l'UE sur les priorités fixées par l'Union. Pour ce faire, il est possible de définir un nombre restreint de priorités qui revêtent une importance européenne et sont reliées à des objectifs sectoriels par la voie de la stratégie Europe 2020. Ce «menu» de priorités thématiques liées directement aux lignes directrices intégrées et aux projets phares d'Europe 2020 s'afficherait à travers les instruments juridiques relatifs à la politique de cohésion et démontrerait ainsi également la capacité de cette dernière de répondre à différents besoins (des grands projets d'infrastructure dans certaines régions aux petits projets locaux dans des zones urbaines défavorisées). Des priorités transversales telles que l'innovation seraient obligatoirement définies. Les régions plus développées pourraient être invitées à allouer l'intégralité de l'enveloppe à leur disposition à deux ou trois priorités, tandis que les régions moins développées pourraient consacrer leurs moyens plus élevés à un éventail de priorités un peu plus large.

Il serait essentiel d'accroître la cohérence et la coordination avec d'autres instruments de l'UE mettant en œuvre les politiques menées par celle-ci dans des domaines tels que les transports, les communications, l'énergie, l'agriculture, l'environnement et l'innovation. Il conviendrait d'offrir aux bénéficiaires des aides de l'UE un ensemble cohérent de programmes complémentaires permettant une «spécialisation intelligente» et d'éviter ainsi d'être confronté à une multitude de règles disparates et de dispositifs se chevauchant partiellement. Une harmonisation accrue des règles d'admissibilité et d'exécution serait une étape importante vers une mise en œuvre plus intégrée des politiques de l'UE sur le terrain.

Un cadre stratégique commun

Afin de renforcer l'intégration des politiques de l'UE en vue de la mise en œuvre de la stratégie Europe 2020 et conformément aux lignes directrices intégrées, la Commission pourrait adopter un cadre stratégique commun définissant une stratégie d'investissement globale qui traduirait les objectifs d'Europe 2020 en priorités d'investissement. Ce cadre fixerait plus particulièrement les besoins d'investissement liés aux objectifs généraux et aux projets phares. Il mettrait également en avant les réformes requises pour maximiser l'impact des investissements soutenus par la politique de cohésion.

Le cadre remplacerait la méthode actuelle, qui consiste à adopter des orientations stratégiques distinctes pour chaque politique, et garantirait une coordination plus étroite entre ces dernières. Il engloberait les actions relevant actuellement du Fonds de cohésion, du Fonds européen de développement régional, du Fonds social européen, du Fonds européen pour la pêche et du Fonds européen agricole pour le développement rural. Le cadre définirait également des liens et des mécanismes de coordination avec d'autres instruments de l'UE tels que les programmes de recherche, l'innovation, l'éducation et la formation tout au long de la vie et les réseaux.

Un contrat de partenariat en matière de développement et d'investissement axé sur les résultats escomptés du soutien de l'UE

S'appuyant sur le cadre stratégique, les États membres présenteraient leur stratégie de développement dans leurs programmes nationaux de réforme, afin de garantir une appropriation forte des priorités de l'UE aux niveaux national et régional. Cette stratégie définirait la manière dont l'État membre et ses régions entendent tenir compte des priorités et objectifs fixés par Europe 2020, des projets phares, des recommandations thématiques et de celles qui leur sont spécifiquement destinées. Elle déterminerait également les changements positifs qu'ils s'efforceraient d'introduire avec le concours de l'UE. Le résultat des échanges avec la Commission prendrait la forme d'un contrat de partenariat en matière de développement et d'investissement entre elle et l'État membre qui intégrerait les engagements des partenaires aux niveaux national et régional.

Ce contrat énoncerait les objectifs à atteindre, décrirait la manière de quantifier et de mesurer les progrès accomplis pour réaliser ces objectifs et définirait la répartition des ressources nationales et de l'UE entre les domaines prioritaires et les programmes. Il fixerait un nombre limité de conditions liées aux réformes nécessaires pour garantir la bonne exécution des programmes. Le cas échéant, il déterminerait les projets stratégiques à intégrer (p. ex. les grandes lignes d'interconnexion en matière de transport et d'énergie). Il décrirait aussi la coordination entre les fonds de l'UE à mettre en œuvre au niveau national.

Une telle approche aurait pour effet de corréler l'allocation initiale potentielle des ressources entre les États membres et les régions (un choix politique sur le mode privilégié pour mettre en œuvre la solidarité) à un dispositif efficace garantissant que les objectifs réalisés sont à la hauteur des aides allouées.

Améliorer la qualité des dépenses

Les capacités institutionnelles du secteur public aux niveaux national, régional et local sont essentielles à une élaboration, à une application et à un suivi efficaces des politiques requises pour atteindre les objectifs d'Europe 2020. Pour pouvoir absorber au mieux les ressources de l'Union, les pouvoirs publics concernés et les bénéficiaires doivent absolument disposer des capacités techniques et administratives adéquates. Le renforcement des capacités institutionnelles et administratives peut contribuer à la réalisation des ajustements structurels et favoriser la croissance et l'emploi - ce qui contribuera à améliorer considérablement la qualité des dépenses publiques. L'allocation des ressources financières doit donc tenir compte de la capacité des États membres et des régions d'utiliser efficacement ces ressources et de la nécessité de respecter les principes de cofinancement et d'additionnalité, tout en reconnaissant les pressions qui s'exercent sur les budgets nationaux.

La politique de cohésion peut jouer un rôle important dans ce contexte en finançant des mesures de renforcement des capacités institutionnelles, en encourageant les réformes administratives et en favorisant une culture de la performance et du résultat. Ce rôle pourrait être consolidé par des mesures ciblées d'assistance technique aidant les États membres et les régions à élaborer et à mettre en œuvre de grands programmes d'investissement dans des secteurs tels que les infrastructures de réseau et l'environnement, ainsi qu'à assurer leur suivi.

Un autre moyen d'augmenter la qualité des dépenses consisterait à instaurer un certain niveau de concurrence qualitative entre les programmes susceptibles de bénéficier de l'aide de la politique de cohésion. Une part limitée des fonds disponibles au titre de cette politique pourrait être affectée à une réserve de performance à laquelle tous les États membres et régions éligibles pourraient accéder. Les fonds de cette réserve seraient alloués sur la base des progrès accomplis au titre des programmes nationaux et régionaux en vue de la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020.

Doter la main-d'œuvre de demain des qualifications adéquates

Une main-d'œuvre dotée de qualifications à la fois plus nombreuses et de meilleur niveau est essentielle à une économie européenne fondée sur la connaissance. De plus en plus d'emplois exigeront des qualifications plus élevées. L'UE doit donc concentrer son action sur la réalisation des objectifs d'Europe 2020 et se préparer ainsi aux besoins de l'économie de demain. Des investissements ciblés peuvent apporter une forte valeur ajoutée en encourageant l'adaptabilité et l'apprentissage tout au long de la vie, notamment par un soutien aux stratégies nationales visant à réformer les systèmes d'éducation et de formation et à améliorer les capacités institutionnelles.

Le Fonds social européen soutient déjà la formation d'environ 9 millions d'Européens par an. Il témoigne de l'équilibre établi dans les politiques économiques de l'UE et illustre concrètement la manière dont l'Union promeut à la fois l'inclusion et la croissance. Il s'appuie sur l'expérience acquise au niveau transnational pour soutenir des groupes sociaux ou des secteurs qui, dans le cas contraire, bénéficieraient d'une aide limitée, voire inexistante, et cible plus particulièrement les approches novatrices de l'emploi, de la formation et de l'inclusion sociale.

Le Fonds social européen pourrait être recentré sur les objectifs d'Europe 2020. Une initiative européenne englobant tous les aspects liés à l'emploi pourrait améliorer les qualifications, la mobilité, l'adaptabilité et la participation à la société au moyen d'initiatives conjointes dans les domaines de l'éducation, de l'emploi et de l'intégration. L'intégration des minorités telles que les Roms et des migrants, domaine dans lequel l'action visant à garantir l'inclusion sociale et les droits légaux des migrants est étroitement liée à la stratégie globale de l'UE en matière de migrations, est un autre volet qui présente un intérêt direct pour l'UE. Parallèlement, l'importance de l'emploi et des qualifications dans la vision de l'économie portée par l'UE souligne la nécessité de disposer d'une visibilité accrue et de niveaux de financement prévisibles dans le cadre stratégique en matière de cohésion décrit plus haut.

Soutenir les secteurs mis sous pression

Compte tenu de la taille et de la diversité de l'économie de l'UE, il arrive inévitablement que les avantages dont profite le plus grand nombre aient un effet préjudiciable pour quelques-uns. À titre d'exemple, on pourrait citer un accord commercial qui ouvre d'importants nouveaux marchés aux exportations de l'UE, mais engendre un changement sensible de l'environnement concurrentiel dans certains secteurs. Le Fonds européen d'ajustement à la mondialisation constitue déjà un bon exemple de la manière de remédier à ce type d'effets négatifs localisés, et un fonds élargi pourrait être pérennisé afin de contribuer à atténuer l'impact d'un certain nombre de perturbations majeures sur la main-d'œuvre d'un État membre. Il convient également de simplifier le fonctionnement du Fonds pour lui permettre de réagir plus rapidement à l'évolution du contexte économique.

3.4. Citoyenneté

De nombreux programmes de dépenses de l’UE contribuent de diverses manières à la consolidation d’une citoyenneté de l’Union. À chaque fois qu’un citoyen perçoit les effets concrets d’une action de l’UE – bourses de mobilité, résultats de la recherche ou encore projets de cohésion locale –, cela illustre la vocation de l’Union à servir ses citoyens. Les programmes en faveur de la diversité culturelle montrent la multiplicité des manières dont la construction européenne peut affecter les citoyens.

L’action de l’UE dans ce domaine englobe aussi la dimension des «droits», notamment la promotion des droits fondamentaux et des valeurs de l’UE. Elle pourrait inclure des initiatives visant à faire de l’UE un espace de justice, en supprimant les entraves au bon déroulement des procédures civiles transfrontalières et des relations entreprises-consommateurs, en promouvant la reconnaissance mutuelle et la confiance mutuelle dans les procédures pénales et en favorisant l’accès à la justice dans toute l’Union.

Des programmes plus spécifiques axés sur la culture ou la citoyenneté permettent également de préparer les Européens à surmonter les barrières culturelles et à tirer pleinement profit des possibilités que leur procure l’espace européen. Différents programmes visant à promouvoir la coopération culturelle et le patrimoine culturel de l’Europe, l’interaction des citoyens et la participation des jeunes à la société pourraient être intégrés au sein d’un programme unique, visible, en faveur d’une Europe unie dans la diversité et pourraient être gérés de manière conjointe.

Les responsabilités de l’Union envers ses citoyens se reflètent aussi dans le Fonds de solidarité de l’Union européenne, qui a permis à celle-ci de manifester sa détermination collective à faire face aux situations de crise. Depuis 2002, l’UE a été en mesure d’apporter plus de 2,1 milliards d’euros d’aide aux États membres et régions frappés par des catastrophes naturelles majeures. L’expérience a toutefois montré que l’utilisation de ce fonds faisait l’objet d’importantes restrictions ou défaillances. La lenteur de la mise à disposition de l’aide, le manque de transparence des critères de mobilisation du Fonds et sa limitation aux catastrophes d’origine naturelle sont autant de problèmes à traiter. Par exemple, le financement du Fonds ne s'inscrit pas dans la durée et ce dernier ne peut être sollicité dans tous les types de catastrophe majeure. Une participation du budget de l’UE pourrait également permettre de combler les lacunes du système qui empêchent le déploiement rapide des équipes de protection civile des États membres là où leur présence est nécessaire, et de développer un réseau efficace de protection civile, démontrant ainsi combien la coopération au niveau de l’UE peut avoir des effets importants pour les personnes dans le besoin, dans l’Union comme dans le reste du monde.

Les dépenses consacrées aux politiques jouant un rôle central dans les domaines de la liberté, de la sécurité et de la justice constituent également un élément directement pertinent pour les citoyens. Car il s’agit là de politiques dont la réussite revêt clairement un intérêt commun. L’aide en faveur d’une gestion efficace des frontières, de l’échange d’informations et d'expertise pour l’application effective des décisions de justice et de la mise en œuvre des politiques en matière d’asile et d’immigration profite à l’Union tout entière. Lors de la prochaine période de financement, l’accent devra être mis sur la gestion des frontières extérieures (y compris SIS II/VIS et le futur système d’entrée et de sortie), la politique en matière de retour, l’asile et l’intégration des immigrants légaux. Dans ces domaines, la répartition de la charge entre les États membres, le soutien des travaux des administrations nationales et le regroupement des ressources et du budget de l’UE constituent des priorités en vue de rechercher des solutions efficaces et économiques pour la bonne exécution de ces politiques.

3.5. Soutien à la préadhésion

L'aide financière en faveur du renforcement de l'intégration par le biais du processus d'élargissement aide l'UE à réaliser ses objectifs dans un certain nombre de domaines d'une importance essentielle pour la relance économique et la croissance durable, tels que l'énergie, les infrastructures de réseau, la protection de l'environnement et les efforts de lutte contre le changement climatique. Elle contribue aussi à faire en sorte que les pays candidats et les candidats potentiels soient tout à fait prêts pour une éventuelle adhésion, notamment en encourageant ces pays à consolider les priorités de l'UE liées à la stratégie Europe 2020 dans leurs priorités nationales. Elle doit donc rester un des outils visant à promouvoir la réussite de l'élargissement.

3.6 Une Europe de rang mondial

Les Européens attendent de l’UE qu’elle défende ses intérêts et exerce son influence sur la scène internationale. Dans certains domaines, tels que la réduction de la pauvreté, les migrations, la compétitivité, le changement climatique, l’énergie, le terrorisme ou encore la criminalité organisée, les enjeux exigent une réponse internationale. À l’ère de la mondialisation, il est essentiel d’assortir nos objectifs intérieurs, qui consistent à assurer une croissance et des emplois durables en Europe, d’une politique extérieure. Par ailleurs, la solidarité a évidemment une dimension extérieure: l’UE peut s’enorgueillir d’être le premier bailleur de fonds pour l’aide au développement et l'aide humanitaire dans le monde – environ 55 % du total des dons dans le monde proviennent de l’UE et de ses États membres – et de jouer un rôle prépondérant dans la lutte contre pauvreté. Elle est également tout à fait consciente de l’importance des objectifs du millénaire pour le développement aux fins de la stabilité, de la sécurité et de la promotion du bien-être dans de nombreuses régions du monde.

L’utilisation efficace des ressources de l’UE doit suivre les mêmes règles au niveau international et à celui de l’Union: un regard intelligent afin d’orienter l’action collective là où elle peut être plus efficace que la somme des actions nationales, des programmes de dépenses et des politiques clefs cohérents, ainsi qu’un regard nouveau sur les mécanismes et instruments de mise en œuvre existants.

Cette démarche sera facilitée par les nouvelles structures pour les relations extérieures prévues par le traité de Lisbonne, qui permettront d’utiliser de manière créative les différents outils de la politique extérieure de l’UE et de travailler dans un cadre stratégique à long terme.

Affirmer les valeurs et les intérêts de l’UE dans le monde

La mise en place du SEAE offre à l’UE les moyens d’améliorer sa capacité d’affirmer ses intérêts dans le monde entier, conformément à son poids économique et politique. La capacité de l’UE à cibler efficacement ses instruments requiert une vision stratégique claire, des relations adéquates avec les pays tiers partenaires et des mécanismes bien conçus. Les instruments doivent être suffisamment réactifs à l’évolution des priorités et adaptés aux diverses situations. Certains des grands défis planétaires auxquels est aujourd'hui confrontée l'Union exigent une attention particulière. Par exemple, l’UE et les États membres devront être en mesure d’honorer leurs engagements en matière de financement de la lutte contre le changement climatique. Cette question mérite une réflexion distincte, qui sera influencée par l’évolution des négociations. Il faudra veiller à la cohérence et à la visibilité de la participation de l’UE aux efforts internationaux, à garantir son efficacité et à permettre des économies d’échelle dans la gestion des décaissements. Il importera également de déterminer si le rôle du budget de l’UE devrait être appuyé par un instrument distinct permettant de regrouper une participation collective stable et visible de l’UE. Les migrations, pour lesquelles il est nécessaire de calibrer efficacement les actions à l'intérieur de l'Union et par-delà ses frontières, constituent un autre exemple.

Réagir aux situations de crise

Il est particulièrement important de renforcer la capacité de réaction de l’Union aux conflits et aux catastrophes à grande échelle. La contribution essentielle de l'UE à la dimension plus globale de la sécurité dans les relations extérieures souligne la nécessité d'exploiter les outils en vigueur tels que l'instrument de stabilité, les opérations relevant la PESC et les missions d'observation électorale. La vitesse de déploiement, la flexibilité et la capacité d'adapter les actions à l'évolution du contexte politique constituent autant d'éléments cruciaux.

L’aide humanitaire de l’UE est l’une des sources les plus visibles et les plus efficaces d’aide d’urgence. Toutefois, la phase d’aide d’urgence doit être suivie plus rapidement d’actions de développement plus substantielles permettant de sortir des situations de crise et de renforcer l'aptitude à surmonter les difficultés futures, ce que retardent les rigidités du budget. Au cours de la période de financement actuelle, le budget d’aide humanitaire a dû recourir chaque année à la réserve d’aide d’urgence, illustrant ainsi les nombreuses sollicitations auxquelles est soumis ce domaine du budget.

Réduction de la pauvreté

L’Europe s’est construite sur des valeurs. La lutte contre la pauvreté est donc l’un des objectifs fondamentaux de l’UE. L’aide aux pays les moins développés a des répercussions concrètes sur certaines problématiques, telles que l’accès aux denrées alimentaires, à la santé, à l’éducation et à l’eau salubre, ou encore l’adaptation aux effets du changement climatique. L’UE est de ceux qui se consacrent le plus à la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement à l’horizon 2015. En s’engageant collectivement à consacrer 0,7 % de son RNB à l’aide publique au développement d’ici à 2015 – ce qui requiert une augmentation significative du volume total de l’aide au développement –, l’UE a reconnu l’importance de l’action financière extérieure dans la réalisation de ses objectifs.

Étant donné la très nette valeur ajoutée dont la politique européenne de développement peut être porteuse, il est essentiel que l’échelon européen joue son rôle dans l’augmentation de l’aide au développement. La politique de développement de l’UE a déjà une portée mondiale – tandis que les États membres se concentrent sur un nombre restreint de partenaires – et pour de nombreux pays partenaires, elle constitue la seule présence significative dans ce domaine. Par son action, l’UE peut transposer dans le monde entier un ensemble cohérent d’objectifs. Aussi l’action de l’UE présente-t-elle des avantages conséquents par rapport à l’action des pays sur le plan de la présence, de l’échelle et de la priorité des interventions ainsi que du poids politique. Elle présente un fort potentiel en vue de mieux répartir le travail entre les bailleurs de fonds, de réaliser d’importantes économies d’échelle et de fournir aux bénéficiaires un point de contact unique. En outre, elle profite du poids et de la légitimité de l’action conjointe de 27 États membres.

L’expérience montre qu’une aide efficace et de grande qualité exige des efforts particuliers de coordination des bailleurs de fonds et d’organisation de la gouvernance. En tant que principal bailleur de fonds dans le monde, l’Union a une légitimité que n’ont pas les États membres individuellement pour s’exprimer sur certains sujets, tels que la gouvernance, la coopération régionale, le développement économique ou encore les infrastructures. À la suite de l’adoption, en 2006[8], du consensus européen pour le développement, des avancées ont été réalisées dans le regroupement des ressources de tous les bailleurs de fonds européens afin d’éviter tout chevauchement et de favoriser la concentration lorsqu’elle est nécessaire. Cependant, l’aide demeure fragmentée, ce qui entraîne un gaspillage des ressources et des conséquences tant financières que politiques. Résoudre ces problèmes contribuerait à la fois à apporter des gains significatifs d’efficacité aux États membres – qui atteindraient, selon les estimations, jusqu'à 6 milliards d'euros par an[9], à faciliter les travaux des administrations des pays partenaires et à aider l’UE à exercer pleinement son influence. Parmi les autres grandes priorités figurent la recherche du bon équilibre entre prévisibilité du volume des aides pour les pays partenaires et besoin d’un degré suffisant de flexibilité aux fins de l’adaptation aux changements (par exemple les fluctuations importantes du prix des produits alimentaires) ainsi que la nécessité de disposer de programmes efficaces de reconstruction consécutifs à une catastrophe.

Des fonds fiduciaires ont été créés au niveau de l’UE: par exemple le Fonds fiduciaire UE-Afrique pour les infrastructures. La démarche consiste à transférer les ressources des fonds de la Commission et des États membres de manière à les combiner à la capacité de prêt de la BEI et des banques de développement nationales, et permet de produire un effet multiplicateur important. Ces possibilités pourraient être examinées de manière plus approfondie.

Parmi d'autres priorités, il convient de faire en sorte que la politique de l'UE en matière de développement contribue substantiellement et directement à améliorer de manière significative la gouvernance dans les pays partenaires et à renforcer plus avant l'impact réel de l'aide. Pour ce faire, il faut notamment mettre davantage l'accent sur des projets présentant une forte valeur ajoutée européenne et sur des accords de partenariat clairs, ciblés et axés sur les résultats. L'expérience concernant les différents régimes financiers s'appliquant au Fonds européen de développement et à l'instrument de coopération au développement a soulevé des questions importantes en termes d'efficacité, de flexibilité et de procédure démocratique, qu'il convient d'examiner de manière plus approfondie.

Par ailleurs, l’UE doit examiner comment elle peut élaborer une stratégie plus intelligente face à l’évolution de la nature de partenaires tels que les pays à revenu intermédiaire et les économies émergentes, avec lesquels la coopération dans le domaine des partenariats économiques, environnementaux et sociaux prend de plus en plus d’importance, tout comme les aspects liés au développement.

Des relations étroites et efficaces avec les voisins de l’UE les plus proches

Le voisinage de l'UE, qui compte quelque 300 millions d'habitants, offre des perspectives importantes à l'Union. Pour garantir sa prospérité et sa stabilité à long terme et démontrer sa capacité à assumer les responsabilités propres à son rang d'acteur mondial, l'UE doit faire en sorte de promouvoir ses valeurs et de soutenir le développement économique dans son voisinage. L’appui financier peut constituer un instrument important d’une politique de voisinage efficace. Dans ce domaine, l’accent devrait être mis sur des mesures crédibles d’incitation à la réforme et à la coopération pour les pays du voisinage de l’Union, qu’ils aient ou non des perspectives d’adhésion à l’UE à long terme. Une aide spécifique devrait notamment être apportée dans le contexte d’accords de libre-échange approfondis et complets et de l’alignement sur l’acquis du marché unique. Un degré élevé de priorité devrait être accordé aux domaines proches de l’acquis et des propres priorités stratégiques de l’Union – l’énergie, les migrations et les contrôles aux frontières, ou encore la protection de l’environnement –, avec une attention particulière pour le renforcement des capacités et des institutions.

La politique de voisinage est déjà l’un des meilleurs exemples de collaboration entre le budget de l’UE et les institutions financières européennes en vue d’optimiser les investissements dans le développement social et économique. De fait, la contribution de 117 millions d’euros du budget de l’UE aux instruments combinés a permis la mobilisation de 7 milliards d’euros d’investissements en provenance des institutions financières européennes. Cette formule pourrait être encore approfondie.

3. 7. Dépenses administratives

Dans le cadre financier actuel, les dépenses administratives représentent 5,7 % du budget. Il s’agit non seulement des frais relatifs au personnel, aux systèmes informatiques et aux bâtiments pour toutes les institutions, mais également des coûts de fonctionnement qu’induit l’utilisation de 23 langues. Les différentes institutions ont désormais atteint leurs objectifs de recrutement de ressortissants des nouveaux États membres. Leurs effectifs devraient donc se stabiliser. En effet, la Commission applique une politique de croissance zéro depuis 2007 et répond à ses nouvelles priorités par le redéploiement du personnel en place, sans solliciter de postes supplémentaires au-delà des besoins induits par l’élargissement. Le Conseil, le Parlement et d'autres institutions ont demandé des postes supplémentaires en raison de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne. La mise en place du SEAE exigera, au départ, une croissance des effectifs pour répondre aux besoins de recrutement de diplomates nationaux, mais à terme, il faudrait que le processus dans son ensemble se révèle neutre d’un point de vue budgétaire.

L’élaboration du prochain cadre financier devrait en partie consister en une recherche rigoureuse de gains d’efficience et d’efficacité des ressources administratives, ce qui sous-entend d’étudier dans quelle mesure la rationalisation et l’utilisation conjointe des procédures, des outils et des ressources permettraient de réduire le coût de l’action des institutions et des agences de l’UE. Par exemple, la Commission vient de lancer une importante analyse de l’utilisation de l’informatique dans ses services dans le but d’en améliorer les résultats et de réaliser des économies. Cette démarche permettrait de réaliser des économies conjointes si des systèmes informatiques communs ou partagés étaient mis au point pour toutes les institutions. Des bénéfices pourraient également être tirés d’une coopération interinstitutionnelle équivalente dans les domaines, par exemple, de la traduction ou de la gestion des documents. Un autre aspect intéressant est la conception des programmes de dépenses eux-mêmes, dans laquelle la charge administrative pour la Commission comme pour ses partenaires devrait constituer un élément important à prendre en compte. Parallèlement, la Commission poursuivra le redéploiement de son personnel en vue de se concentrer sur ses priorités, de réduire ses frais généraux et d’accroître les effectifs qui se consacrent aux politiques primordiales. La Commission analysera ses dépenses administratives - et celles de ses agences - dans le cadre de la préparation du prochain cadre financier, afin de définir des moyens de relever les nouveaux défis avec les ressources existantes, notamment en trouvant le juste équilibre entre une mise en œuvre efficace des programmes et une maîtrise des coûts administratifs.

D'une manière générale, toutes les institutions de l'UE devront observer une stricte discipline afin de contenir à l'avenir leurs dépenses administratives.

4. UN BUDGET EFFICACE

Bien cibler les dépenses est essentiel, mais ne suffira pas. Les dépenses doivent aussi être orientées en vue d'obtenir des résultats. Pour que les contributions des États membres dans le budget de l'UE portent des fruits, la prochaine génération de programmes financiers doit être revue de manière à placer l'efficacité en tête des priorités.

4.1. Utiliser le budget pour démultiplier les investissements

Plus le budget de l'UE servira à démultiplier le financement des investissements stratégiques ayant la plus grande valeur ajoutée européenne, plus son impact sera grand. Des instruments financiers novateurs pourraient générer un nouveau flux de financement important pour les investissements stratégiques. Pour les projets présentant un potentiel commercial à long terme, la norme devrait être que les fonds de l'UE sont utilisés dans le cadre de partenariats avec les secteurs privé et bancaire, notamment via la Banque européenne d'investissement (BEI), mais aussi avec d'autres partenaires, parmi lesquels les banques de développement des États membres et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD). Une telle approche nécessite une coordination étroite en amont entre les experts techniques de la Commission et ceux des banques: la logique est que les projets sont soutenus sur la base de procédures de mise en concurrence des promoteurs, l'accent étant mis sur la valeur ajoutée de l'UE.

La BEI a apporté une contribution majeure à la réaction de l'Europe face à la crise économique. Elle jouera maintenant un rôle clef dans le processus de réforme de l'économie européenne dans des domaines tels que les technologies vertes, les infrastructures et la sécurité énergétique. Cet élément semble indiquer la nécessité d'optimaliser l'utilisation des capitaux fournis par la BEI, et notamment d'intensifier le recours aux mécanismes de partage des risques afin de permettre aux ressources de la banque de produire un effet de levier plus important et d'étendre le rayon d'action de la banque. La Commission et la BEI ont déjà élaboré avec succès un certain nombre d'instruments financiers communs. La combinaison de subventions provenant du budget de l'UE et de prêts accordés par la BEI et d'autres institutions financières a permis de tripler l'impact financier des dépenses extérieures de l'UE en attirant des investissements atteignant plusieurs fois le montant apporté par les institutions financières. Cette approche devrait être étendue pour devenir la norme dans les domaines présentant un potentiel commercial à long terme, en l'assortissant de nouvelles règles pour encadrer les instruments combinés.

En règle générale, les programmes de dépenses doivent être à la fois attentifs aux besoins des fonds privés (par exemple en termes de délais de mise en œuvre et d'allègement des procédures), précis sur les résultats qu'ils cherchent à obtenir et réalistes quant au moment auquel l'UE devrait se retirer de projets qui parviennent à la rentabilité commerciale. L'UE pourrait être davantage disposée à envisager les flux de revenus perçus auprès des utilisateurs d'infrastructures telles que les péages comme un moyen de limiter les coûts à long terme supportés par les contribuables. De même, plus les coûts externes peuvent être internalisés, plus les recettes générées pour contribuer aux investissements nécessaires à la réalisation d'objectifs stratégiques tels qu'une décarbonisation accélérée de l'économie seront élevées. Les instruments financiers devraient viser à pallier les défaillances identifiables du marché en tenant compte de l'état des marchés financiers nationaux, de l'environnement juridique et réglementaire et des besoins des bénéficiaires finals.

Les nouveaux instruments financiers d'exécution du budget doivent être intelligents, intégrés et souples. Ils peuvent répondre à un grand nombre de besoins différents tout en exploitant des outils uniformes. Pour l'essentiel, les lois de financement sont les mêmes pour tous, quel que soit le secteur concerné: des entreprises et des projets à diverses phases de leur développement ont besoin de fonds propres, de crédits ou d'une combinaison des deux. La panoplie d'instruments financiers nécessaire à l'exécution du budget de l'UE revêt une dimension double et pourrait être mise en œuvre au moyen de deux dispositifs généraux de l'UE auxquels devront recourir les différents programmes de dépenses: un mécanisme de collecte de fonds propres et un mécanisme de partage des risques (incluant des garanties). En ce qui concerne les garanties de prêt en tant qu'option possible pour les instruments financiers novateurs, il conviendra d'analyser soigneusement les implications de l'effet de levier produit par le budget de l'UE afin que le plafond des ressources propres soit respecté, notamment à la lumière des régimes de garantie existants. Une utilisation plus générale du budget de l'UE en tant qu'instrument de garantie de prêts et d'obligations nécessiterait de tenir dûment compte de la capacité d'émettre ces garanties.

4.2. Emprunts obligataires européens pour le financement de projets

L'idée d'émettre des emprunts obligataires européens pour le financement de projets est née de la constatation du potentiel qu'offrent les instruments financiers novateurs et de la situation particulière dans laquelle se trouve l'économie européenne aujourd'hui. L'économie de l'UE est fortement dépendante des infrastructures, dans des domaines tels que l'énergie, les transports et les TIC. Les objectifs de la stratégie Europe 2020 en matière de modernisation de l'économie européenne nécessiteront des investissements colossaux[10]. L'UE peut d'ores et déjà appuyer ces projets en indiquant une orientation stratégique cohérente aux investisseurs qui prennent des décisions qui les engagent sur plusieurs décennies et en fournissant le cadre réglementaire adéquat. Mais au lendemain de la crise financière, les investisseurs sont encore réticents. Les projets revêtant un intérêt stratégique essentiel pour l'UE n'arrivent pas à mobiliser les investissements nécessaires. Les budgets nationaux ne sont pas en mesure de prendre le relais pour assurer le financement de tels projets et sont, de fait, à la recherche de solutions de substitution pour endosser une plus grande responsabilité en ce qui concerne les infrastructures. Retarder les projets pourrait priver l'UE des bénéfices économiques, entre autres, des infrastructures et entraîner le risque de devoir passer, plus tard, par des solutions plus coûteuses.

Les emprunts obligataires européens pour le financement de projets auraient pour but de remédier à ce problème, en inspirant une confiance suffisante pour permettre aux grands projets d'investissement de s'attirer le soutien dont ils ont besoin. La Banque européenne d'investissement et d'autres grandes institutions financières apportent déjà une contribution majeure avec leurs prêts directs, et la BEI en particulier a réagi à la crise en augmentant nettement le volume de ses prêts. Mais l'ampleur du défi que constituent les projets d'infrastructures est telle que l'UE doit agir pour débloquer les financements privés.

Pour ce faire, des crédits du budget de l'UE pourraient être affectés au soutien de projets dans une mesure suffisante pour améliorer leur profil de risque et, partant, attirer des financements de la BEI, d'autres institutions financières et d'investisseurs privés sur les marchés des capitaux, tels que les fonds de pension et les compagnies d'assurance. Les garanties de l'UE ou de la BEI seraient émises en faveur d'instruments spéciaux créés par le secteur privé pour attirer des financements provenant du marché des capitaux. Les projets bénéficiant d'un tel mécanisme devraient démontrer qu'ils revêtent un intérêt stratégique pour l'UE et qu'ils remplissent certains critères de viabilité. En tant que tel, ce soutien ne pourrait pas être préaffecté à des États membres ou à des secteurs, mais il irait aux projets qui parviennent à attirer un financement adéquat de la part du secteur privé. Le délai de remboursement dépendrait d'une évaluation de la période nécessaire pour que le projet devienne rentable.

4.3. Projets de grande envergure

Les projets de grande envergure nécessitant des contributions de plusieurs milliards d'euros sur de longues périodes posent un problème particulier. L'UE est en train d'acquérir une expérience considérable avec des projets tels que Galileo, ITER et GMES. Il est reconnu que ces projets revêtent une importance stratégique essentielle et pourraient avoir un potentiel commercial à long terme. Leur fonctionnement repose sur la coopération transnationale. Toutefois, ils font aussi l'objet de dépassements de budget considérables et leur gouvernance ne se prête pas bien à la gestion directe par les institutions de l'UE. Les incertitudes budgétaires sont difficilement compatibles avec la manière dont le budget de l'UE est planifié. Pour les promoteurs de projets, une solution consisterait à créer une structure d'appui, sous la forme d'une entité distincte à la bonne gestion de laquelle l'UE veillerait de près et à laquelle le budget de l'UE apporterait une contribution stable sous la forme d'un montant annuel fixe, étant entendu que l'UE ne devrait pas combler les éventuels déficits de financement.

4.4. Encourager l'utilisation des ressources

Le budget de l'UE peut être un agent de réforme puissant, ainsi qu'il est reconnu dans le débat actuel sur le recours aux sanctions et aux incitations financières pour garantir le respect du pacte de stabilité et de croissance. Dès lors, il y a tout lieu d'utiliser cette influence au sein des programmes pour garantir l'obtention de résultats. Les idées exposées ci-dessus concernant la politique de cohésion pourraient être appliquées dans d'autres contextes et être étendues à tous les domaines de dépenses, en arrêtant un ensemble spécifique d'objectifs à la réalisation desquels le décaissement des fonds serait conditionné. La constitution d'une réserve au niveau de l'UE pour la plupart des programmes ou une modulation des taux de cofinancement en fonction des résultats figurent parmi les autres approches possibles. Quoi qu'il en soit, il serait essentiel de garantir le traitement équitable de tous les États membres, la transparence et l'automatisme.

Pour ce faire, une approche différente et des instruments distincts seront nécessaires. Les programmes devraient prévoir la définition d'objectifs spécifiques, mesurables, réalisables, pertinents et datés, ainsi que d'indicateurs de performance adéquats. Des critères d'évaluation clairs sont nécessaires pour qu'un système incitatif puisse fonctionner correctement, de même qu'une évaluation systématique et renforcée. Réalisées systématiquement et en temps opportun, les évaluations peuvent jouer un rôle essentiel dans l'effort général visant à maximiser la valeur ajoutée des dépenses de l'UE.

4.5. Une structure reflétant les priorités

La structure du budget est elle-même un élément important pour faire connaître la finalité des dépenses et les objectifs à atteindre et pour les réaliser. Nous avons tout à gagner d'un budget qui, dans sa structure comme dans son équilibre, reflète les priorités politiques de l'UE. La structure actuelle a quelque peu évolué en ce sens, mais une prochaine étape consisterait soit à réduire le nombre de rubriques au minimum, soit à articuler le budget autour de la stratégie Europe 2020. La première solution aboutirait à trois rubriques: Dépenses intérieures, Dépenses extérieures et Dépenses administratives. La seconde solution aboutirait à trois sous-rubriques remplaçant les rubriques I à III actuelles et couvrant les politiques dont le centre de gravité relève des trois volets de la croissance intelligente, durable et inclusive, en plus d'une quatrième sous-rubrique «interne» consacrée aux politiques en matière de citoyenneté. Deux dernières rubriques viendraient compléter l'ensemble, l'une couvrant les politiques extérieures (l'actuelle rubrique IV), l'autre couvrant l'administration.

4.6. Durée du cadre financier pluriannuel

Un cadre financier pluriannuel permet une cohérence et une prévisibilité à long terme. Il garantit aussi la discipline budgétaire et le bon déroulement du cycle budgétaire. Toutefois, chaque cadre est le fruit de décisions politiques qui doivent refléter l'évolution des préférences politiques.

Les trois derniers cadres financiers ont été conclus pour une durée de sept ans. Le Parlement européen[11] et certains des participants à la consultation publique sont d'avis que cette durée devrait être ramenée à cinq ans. Une des grandes raisons invoquée était l'alignement sur la fin du mandat du Parlement européen et de la Commission. Une période de cinq ans permettrait à chaque Commission de proposer et à chaque Parlement de négocier un cadre, même s'ils ne le voient pas mis en œuvre. Une période de cinq ans présenterait aussi des avantages sur le plan de la capacité à tenir compte de besoins nouveaux, et des inconvénients en termes de planification: non seulement des périodes plus longues permettent aux programmes d'imprimer des changements plus substantiels, mais elles sont mieux adaptées aux schémas d'investissement du secteur privé. Une autre solution ciblée sur les dates spécifiques en question consisterait en une période de sept ans assortie d'un réexamen approfondi au bout de cinq ans, en vue d'une dernière réaffectation spécifiquement ciblée sur la stratégie Europe 2020, ce qui permettrait explicitement de ne pas préjuger de l'avenir.

Cependant, la solution la plus intéressante pourrait être une période de dix ans, mais assortie d'un réexamen approfondi à mi-parcours («5 + 5»). Une telle approche laisserait la possibilité d'opérer une vaste redéfinition des priorités. Les plafonds globaux et les instruments juridiques fondamentaux pourraient être fixés pour dix ans. La répartition des ressources à l'intérieur des rubriques et la fixation des priorités dans les programmes et instruments pourraient toutefois rester sujettes à réévaluation. Pour ce faire, une approche possible pourrait être la constitution de réserves et de marges substantielles dans toutes les parties du budget.

4.7. Réagir à l'évolution de la situation

Un des équilibres les plus difficiles à ménager dans le budget est celui entre prévisibilité et flexibilité. Il est toutefois évident que le budget actuel s'est avéré trop rigide pour résister à la pression des événements. Entre des besoins urgents d'intervention de l'UE en réponse à des événements extérieurs, qu'il s'agisse du tsunami ou du Proche-Orient, et la nécessité impérieuse de réagir à la crise économique, l'approche actuelle a montré ses limites. Avec un ciblage approprié essentiel pour l'efficacité des dépenses et une évolution de la situation qui impose un changement des priorités, il est clair que la rigidité du budget affecte la qualité des dépenses. Le Parlement européen et le Conseil ont raison d'exercer un contrôle attentif des changements d'orientation des dépenses. Mais la marge de manœuvre autorisée et les modalités d'exercice de ce contrôle devraient être revues. L'expérience montre que la solution évidente consistant à augmenter les marges n'a pas été possible en raison des pressions exercées pour préaffecter les dépenses. En conséquence, on pourrait convenir d'un pourcentage fixe (5 % par exemple) obligatoire. Ce taux pourrait aussi être fixé à un niveau inférieur pour les cinq premières années de la période financière et à un niveau supérieur pour les années restantes, ou augmenter progressivement d'année en année. Il serait ainsi possible de mieux tenir compte des nouvelles priorités à l'occasion du réexamen à mi-parcours. D'autres moyens peuvent permettre d'accroître la flexibilité, notamment:

- une flexibilité en matière de réaffectation permettant les transferts entre rubriques pour une année donnée, dans certaines limites,

- la possibilité de transférer les marges inutilisées d'une année sur l'autre – là encore, dans des limites convenues,

- la liberté d'avancer ou de repousser des dépenses dans le cadre de l'enveloppe pluriannuelle d'une rubrique, afin de pouvoir agir de manière contracyclique et de réagir efficacement aux grandes crises,

- une augmentation du volume, ou un élargissement de la portée, de l'instrument de flexibilité et de la réserve d'aide d'urgence existants, éventuellement en les fusionnant.

La disposition actuelle relative à une flexibilité de 0,03 % adoptée à la majorité qualifiée devrait aussi être maintenue, car elle constitue une soupape de sécurité importante autorisant des écarts limités par rapport aux plafonds prévus.

Toutes ces modifications devraient aller de pair avec un changement d'état d'esprit. L'important devrait être non plus l'attribution de dotations fixes et prédéterminées, mais l'utilisation des ressources restreintes de l'UE en faveur d'investissements stratégiques d'une durée limitée, en tablant sur le fait que le versement des fonds est conditionné par l'obtention de résultats.

4.8. Simplifier et réduire les charges administratives inutiles

La consultation publique a clairement fait apparaître que les procédures de mise en œuvre et les exigences de contrôle sont trop compliquées et peuvent réellement dissuader de participer à des programmes de l'UE. Celle-ci est tenue de veiller à ce que les crédits soient dépensés efficacement, mais elle pourrait aussi prendre une série de mesures pour réduire à la fois la charge administrative qui pèse sur les bénéficiaires des fonds et ses coûts administratifs, ce qui permettrait d'affecter davantage de ressources à l'objectif final:

- le règlement financier dote l'UE de règles financières communes, mais les modalités et procédures de mise en œuvre peuvent varier considérablement d'un instrument politique à un autre. Une série de principes communs bien définis devraient être adoptés pour réduire les écarts et les limiter au strict nécessaire. L'association d'instruments différents dans un cadre d'application commun est une bonne manière de faciliter l'interface entre les citoyens, les entreprises, plus particulièrement les PME, et les pouvoirs publics, d'une part, et le budget de l'UE, d'autre part;

- la récente proposition de la Commission concernant une révision du règlement financier contient des mesures simples pour mettre en place des règles financières simplifiées. Il conviendrait de les examiner plus avant pour autoriser des procédures allégées pour les petites subventions (les seuils pourraient être fixés à un niveau supérieur pour ces projets) et recourir davantage aux paiements forfaitaires, ainsi qu'aux systèmes axés sur la performance.

4.9. Garantir une gestion financière saine

Les dépenses publiques nécessitent un contrôle efficace, efficient et proportionné qui doit fournir aux citoyens et à leurs représentants au sein du Parlement européen, ainsi qu'au Conseil, l'indispensable assurance que le budget de l'UE est dépensé correctement. Mais il est un point au-delà duquel la charge des contrôles nuit à l'efficacité du programme. Une approche plus modulée des contrôles requis dans les différents États membres et un consensus sur le risque d'erreur tolérable pour les différents domaines d'action permettraient de parvenir au juste équilibre.

Ces dernières années, la Commission a consacré beaucoup d'attention à l'amélioration de l'efficacité des systèmes de gestion et de contrôle, dans le but d'obtenir une déclaration d'assurance positive de la part de la Cour des comptes. Les résultats obtenus sont satisfaisants, mais il est possible de faire plus, notamment en collaborant avec les États membres qui mettent en œuvre une part importante du budget, en gestion partagée avec la Commission. Le système consistant à baser les paiements sur une déclaration de paiement par les États membres plutôt que sur les dépenses des bénéficiaires - tel qu'il est utilisé aujourd'hui pour les dépenses liées à la PAC - rapprocherait le processus de contrôle du niveau local et permettrait un meilleur alignement sur les procédures nationales existantes. La procédure serait plus simple et plus normale que la centralisation des contrôles au niveau de l'UE. Elle pourrait être liée à des déclarations d'assurance nationales fiables pour souligner la responsabilité des pouvoirs publics dans l'utilisation des ressources de l'UE.

Pour augmenter le montant des fonds acheminés à l'aide des instruments financiers, la Commission devra modifier en profondeur la manière dont elle gère ses dépenses budgétaires. Elle s'attachera de plus en plus à déléguer les tâches d'exécution budgétaire et à coopérer avec des institutions financières clés telles que la Banque européenne d'investissement (BEI)[12], d'où la nécessité d'harmoniser les principaux aspects liés à l'élaboration et à la gestion des instruments financiers, d'établir un juste équilibre entre une approche commune des opérations réalisées par la Commission avec ses partenaires de financement, qui protège les intérêts financiers de l'UE, et la marge de manœuvre qui doit être accordée au niveau de la mise en œuvre pour garantir l'efficacité des politiques. Cela permettrait également de renforcer la visibilité politique, d'accroître l'efficacité administrative par des mesures de simplification, de rationaliser la communication et le suivi et, enfin, de simplifier l'évaluation pour l'ensemble des instruments.

5. Le budget de l'UE en tant qu'instrument d'appui à la gouvernance économique

La dynamique en faveur de la croissance et de l'emploi dans l’UE nécessite une approche complète. Cette exigence est au cœur de la stratégie Europe 2020. La stabilité macroéconomique et les réformes structurelles ne sont pas deux voies distinctes entre lesquelles un choix doit être opéré; elles constituent au contraire deux impératifs qui se renforcent mutuellement. Aussi est-il naturel d'établir un lien entre le budget de l'UE et le renforcement de la gouvernance économique.

La Commission a présenté toute une série de mesures destinées à réformer la gouvernance économique et à la rendre plus efficace[13]. Elle fera progresser ces questions dans le cadre du débat sur la gouvernance économique consécutif au Conseil européen d'octobre.

6. Prendre en compte l'élargissement

Les élargissements futurs auront inévitablement des conséquences pour le budget de l'UE en raison des augmentations potentielles tant des recettes que des engagements de dépenses. Si les nouveaux États membres contribueront à l'accroissement du PIB cumulé et à la création de nouvelles opportunités d'expansion économique, ils pourront aussi prétendre au bénéfice des Fonds structurels et des autres instruments. Le calendrier des adhésions dépend de la vitesse à laquelle les pays candidats pourront remplir les critères requis. Dans ce contexte, le Conseil européen de décembre 2006 s'est engagé à s'abstenir de fixer d'éventuelles dates limites pour l'adhésion tant que les négociations ne seront pas sur le point d'aboutir. Par conséquent, le nouveau cadre financier ne pourra préjuger d'une éventuelle décision politique sur les futurs élargissements, qui sera fondée sur l'état de préparation d'un pays à l'adhésion. Une fois que les adhésions seront approuvées et les dates confirmées, le cadre financier devrait être adapté de manière à prendre en compte les exigences en matière de dépenses qui découleront de l'issue des négociations d'adhésion.

7. Réforme du financement de l'UE

À l'instar du volet «dépenses» du budget, la structure du volet «financement» a considérablement évolué avec le temps. La contribution RNB a pris une importance de plus en plus grande et représente actuellement trois quarts du budget. Un grand nombre de corrections et de dispositions spéciales ont été progressivement introduites tant du côté des recettes que du côté des dépenses du budget (certains de ces mécanismes expireront automatiquement en 2013). Les négociations budgétaires ont récemment été fortement influencées par l'insistance des États membres sur la notion de positions nettes, d'où la priorité accordée aux instruments assortis d'enveloppes financières allouées préalablement sur une base géographique par rapport à ceux présentant la plus grande valeur ajoutée au niveau de l'UE.

La consultation sur le réexamen du budget a montré que les parties concernées étaient très critiques à l'égard du système actuel de financement du budget de l'UE. Ce système est perçu comme opaque et trop complexe, inéquitable - notamment en ce qui concerne les corrections apportées - et s'appuyant excessivement sur des ressources considérées comme des dépenses à réduire autant que possible par les États membres. À l'exception des droits de douane générés par l'union douanière, les ressources existantes ne présentent pas de liens clairement établis avec les politiques de l'UE.

Il convient de souligner que cet argument ne concerne pas la taille du budget mais pose plutôt la question de la combinaison appropriée de ressources. L'introduction progressive d'une nouvelle ressource ouvrirait la porte à la réduction, la suppression progressive ou l'abandon d'autres ressources.

Des propositions de réforme du financement du budget ont été formulées par des universitaires, des gouvernements, des organisations non gouvernementales et le Parlement européen. Ce dernier a adopté, en 2007, un rapport analysant le système actuel des ressources propres et suggérant toute une série de nouvelles ressources propres possibles[14].

L'introduction d'une nouvelle phase dans l'évolution du financement de l'UE pourrait comporter trois dimensions étroitement liées: la simplification des contributions des États membres, l'introduction d'une ou plusieurs nouvelles ressources propres et la suppression progressive de tous les mécanismes de correction. Des changements ayant été apportés de manière progressive, des éléments essentiels du système de financement de l'UE devraient être conservés: un financement stable et suffisant du budget de l'UE, le respect de la discipline budgétaire et un mécanisme destiné à assurer l'équilibre du budget.

Simplifier les contributions des États membres

Par rapport à la ressource propre RNB, la ressource propre TVA existante ne présente qu'une faible valeur ajoutée. Afin de recréer une base d'imposition comparable, il s'agit d'appliquer un calcul mathématique plutôt que de passer directement du citoyen à l'UE. En tant que telle, cette ressource renforce la complexité et l'opacité des contributions. L'abandon de la ressource TVA dans sa forme actuelle et l'introduction, en parallèle, d'une nouvelle ressource propre, simplifieraient le système de contributions.

Introduire progressivement une ou plusieurs ressources propres liées aux politiques

De nouvelles ressources propres pourraient remplacer intégralement la ressource propre TVA existante et réduire le volume de la ressource RNB prélevée directement sur les trésors nationaux. L'introduction de nouvelles ressources propres refléterait le passage progressif de la structure budgétaire à des politiques plus proches des citoyens et ambitionnant de fournir des biens publics européens et de générer une valeur ajoutée de l’UE plus élevée. Elle pourrait soutenir - et être étroitement liée à - la réalisation d'objectifs politiques européens et internationaux importants concernant par exemple le développement, le changement climatique ou les marchés financiers.

En ce qui concerne les nouvelles ressources propres possibles, les critères suivants semblent pertinents:

- Elles devraient être plus étroitement liées à l'acquis et aux objectifs de l'UE concernant le renforcement de la cohérence et de l'efficacité de l'ensemble du budget dans la réalisation des priorités politiques de l'UE. Il y a lieu, à cet égard, de garder présent à l'esprit l'article 2, paragraphe 2, de la décision relative aux ressources propres[15], qui stipule que « constituent, en outre, des ressources propres inscrites au budget général de l’Union européenne les recettes provenant de toutes nouvelles taxes qui seraient instituées, dans le cadre d’une politique commune ».

- Elles devraient être de nature transfrontalière et se fonder sur un système couvrant l'ensemble du marché intérieur.

- Elles devraient être calculées sur la base d'une assiette harmonisée, de manière à garantir une application uniforme de la ressource dans l'ensemble de l'Union.

- Les recettes d'une nouvelle ressource devraient, dans la mesure du possible, être perçues directement par l'UE en dehors des budgets nationaux.

- Elles devraient être appliquées de manière équitable et ne pas exacerber la question des corrections.

- Leur impact cumulé sur certains secteurs devrait être pris en compte.

- Elles devraient veiller à ne pas imposer une nouvelle et lourde responsabilité administrative à l'UE en matière de perception.

La Commission considère que les moyens de financement énumérés dans la liste non exhaustive figurant ci-dessous pourraient constituer de nouvelles ressources propres qui remplaceraient progressivement les contributions nationales, allégeant ainsi le fardeau pour les trésors nationaux:

- taxation européenne du secteur financier,

- recettes tirées par l'UE de mises aux enchères dans le cadre du système d'échange de quotas d'émissions de gaz à effet de serre,

- redevance européenne liée au transport aérien,

- TVA européenne,

- taxe européenne sur l'énergie,

- impôt européen sur les sociétés.

Chacun de ces moyens de financement a ses caractéristiques particulières et présente des avantages et des inconvénients[16]. À la lumière des commentaires reçus, la Commission présentera des propositions dans le cadre de ses propositions générales concernant le cadre financier pluriannuel.

Résoudre la question des mécanismes de correction

Le Conseil européen de Fontainebleau de 1984 a exposé les principes fondamentaux qui sous-tendent ce système: « la politique des dépenses constitue, à terme, le moyen essentiel pour résoudre la question des déséquilibres budgétaires» et «tout État membre supportant une charge budgétaire excessive au regard de sa prospérité relative est susceptible de bénéficier, le moment venu, d'une correction ». Le renforcement des dépenses consacrées à la croissance et à l'emploi, à l'énergie, à la lutte contre le changement climatique et à l’affirmation des intérêts de l'UE dans le monde réduirait la nécessité de maintenir les mécanismes de correction. La composition des dépenses du prochain cadre financier pluriannuel et des autres réformes du système de ressources propres déterminera si des mécanismes de correction se justifient à l'avenir.

8. Conclusions et prochaines étapes

Le présent réexamen expose les idées de la Commission sur l'architecture et la finalité du budget de l'UE. Il présente une vision de ce que pourrait être un budget réformé répondant à la volonté de produire un véritable changement: telle sera l'ambition de la Commission lorsqu'elle formulera ses propositions pour le nouveau cadre financier l'année prochaine. Ces idées se fondent sur la conviction que d'ici 2020, l'UE devra avoir pris des mesures décisives pour devenir une société intelligente, durable et inclusive. Pour y parvenir, nous devons mettre l'économie européenne sur la bonne voie, prendre les décisions importantes qui s'imposent pour transformer nos infrastructures, nous doter des compétences nécessaires pour l'avenir, affirmer le rôle moteur que nous jouons sur la scène internationale et empêcher les divergences croissantes qui se font jour dans nos sociétés de menacer leur stabilité à long terme. Le budget de l'Union doit être considéré comme un des moyens communs que nous mettons au service d'objectifs communs. À une époque d'intense pression sur les finances publiques, il ne saurait être question de percevoir les budgets nationaux et celui de l'UE comme se faisant concurrence: ils servent les mêmes objectifs, aux niveaux où ils peuvent produire les meilleurs effets.

En conséquence, les budgets de demain doivent avoir pour principal objet d'apporter une réelle contribution à la réalisation de nos objectifs. Ils doivent intégrer la nécessité de s'adapter à un monde qui évolue rapidement et être rigoureusement concentrés sur les résultats. Ils doivent tenir compte de la nécessité de faire preuve de solidarité dans la poursuite de notre programme d'action commun. Enfin, leurs modes de financement doivent être transparents pour les citoyens, qui doivent pouvoir en apprécier le caractère rationnel et équitable.

Il est possible de simplifier l'exécution du budget de l'UE et de la rendre plus efficace. Une plus grande souplesse est nécessaire pour permettre l'adaptation du budget à l'évolution des circonstances, tout en garantissant le financement des investissements à long terme. À une époque de contraintes budgétaires, il est possible de recourir à des instruments financiers plus innovants pour pouvoir exploiter davantage le budget et accroître à la fois l'incidence et le champ d'action des projets hautement prioritaires de l'UE qu'il est possible de réaliser.

La modernisation du budget de l'UE doit donc avoir pour objet de cibler les dépenses, de maximiser les avantages tirés de chaque euro dépensé et d'inscrire fermement le budget dans le contexte des autres moyens utilisés par l'Union européenne, ses institutions et ses États membres pour permettre à l'Europe de s'engager à l'avenir sur la voie de la croissance et des emplois.

La Commission traduira les idées et options exposées dans le présent réexamen du budget en propositions concrètes au cours des prochains mois et se réjouit à la perspective d'engager un dialogue avec les autres institutions et les parties prenantes à ce sujet. Ces échanges alimenteront les propositions qui seront présentées en juin 2011 en vue d'un nouveau cadre financier pluriannuel couvrant la période postérieure à 2013. Il s'agira notamment d'une proposition de règlement fixant le cadre financier pluriannuel et d'un projet de décision relatif aux ressources propres. Au second semestre 2011, la Commission présentera les propositions législatives requises pour mettre en œuvre les politiques et programmes nécessaires pour faire progresser les ambitions de l'Union européenne pour les années à venir.

[1] JO C 139 du 14.6.2006, p. 15 (déclaration n° 3).

[2] Rapport de consultation:http://ec.europa.eu/budget/reform/library/issue_paper/summary_consulation_doc_final_en.pdf

[3] Ce chiffre inclut à la fois le budget de l'UE et les cofinancements nationaux.

[4] Estimations des services de la Commission fondées sur les analyses suivantes: «Quantifying the potential macroeconomic effects of the Europe 2020 strategy: stylised scenarios» (Documents économiques de la Commission n° 424, septembre 2010) et «Macroeconomic effects of Europe 2020: stylised scenarios» (ECFIN Economic Briefs 2010 n° 11).

[5] Selon les estimations, l'actuel programme-cadre devrait créer 900 000 emplois et générer une augmentation du PIB de l'UE de 1 %.

[6] Union de l'innovation – COM(2010)565 du 6.10.2010. D'autres projets phares de la stratégie Europe 2020, dans ce domaine, concernent la stratégie numérique pour l'Europe et la politique industrielle.

[7] Rapport de la Commission pour la conférence de haut niveau sur la compétitivité industrielle (avril 2010).

[8] «Le consensus européen», JO C 46 du 24.2.2006, p. 1.

[9] «Le programme d’action à l’appui de l’efficacité de l’aide - les bénéfices d’une action européenne» (étude réalisée par HTSPE à la demande de la Commission européenne, octobre 2009).

[10] À titre d'exemple: d'ici à 2020, il est estimé que 500 milliards d'euros seront nécessaires pour mettre en œuvre le programme TEN-T et que 38 à 58 milliards d'euros et 181 à 268 milliards d'euros le seront pour atteindre les objectifs fixés par la Commission en matière de réseaux à large bande. Dans le secteur de l'énergie, les besoins sont estimés à 400 milliards d'euros pour les réseaux de distribution et les réseaux d'électricité dits «intelligents», à 200 milliards d'euros pour les réseaux de transmission et le stockage et à 500 milliards d'euros pour la mise à niveau des capacités de production existantes et la construction de nouvelles capacités, exploitant en particulier des sources d'énergie renouvelables.

[11] Résolution du 25 mars 2009 sur le réexamen à mi-parcours du cadre financier 2007-2013 [INI/2008/2055 – P6_TA(2009)0174].

[12] Les instruments financiers ne seront pas mis en œuvre exclusivement par l'intermédiaire de la BEI, mais celle-ci jouera un rôle de catalyseur pour attirer d'autres sources de financement publiques et privées.

[13] Améliorer la coordination des politiques économiques au profit de la stabilité, de la croissance et de l'emploi – Des outils pour renforcer la gouvernance économique de l'UE [COM(2010) 367].

[14] Rapport du Parlement européen sur l'avenir des ressources propres de l'Union européenne [2006/2205(INI) Rapporteur: M. A. Lamassoure].

[15] Décision 2007/436/CE, Euratom du Conseil du 7 juin 2007.

[16] Voir le document de travail des services de la Commission.