10.2.2011   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 42/49


Avis du Comité des régions sur «Mettre en place un espace de liberté, de sécurité et de justice au service des citoyens européens — Plan d’action mettant en œuvre le programme de Stockholm»

2011/C 42/10

LE COMITÉ DES RÉGIONS

souhaiterait, dans le cadre de la part de responsabilité qui lui incombe concernant la mise en œuvre de la citoyenneté de l'Union, le principe de subsidiarité, la gouvernance à multiniveaux et l'application de la Charte des droits fondamentaux, contribuer à l'instauration d'une «culture des droits fondamentaux» vivante;

constate qu'en leur qualité de niveau le plus proche des citoyens, les collectivités locales et régionales sont particulièrement tenues de faire appliquer les principes de la participation politique tels qu'ils sont énoncés par le traité de Lisbonne, les constitutions nationales et les législations régionales; suggère dès lors que soit notamment examiné l'ensemble des possibilités permettant aux citoyens de l'Union de participer à des élections organisées dans leur l'État membre de résidence;

insiste sur la nécessité d'instaurer un climat de confiance particulier et une connaissance étendue des systèmes judiciaires d'autres États membres lors de la mise en œuvre du programme de Stockholm, les collectivités locales et régionales pouvant apporter une contribution en la matière dans le cadre de leurs partenariats urbains et régionaux;

met l'accent sur le rôle important des collectivités locales et régionales concernant la mise en place d'un régime de protection des données complet fondé sur les droits fondamentaux, ainsi que sur la responsabilité particulière qui leur échoit concernant la prévention de la criminalité et la mise en œuvre du concept de prévention de la criminalité organisée et de lutte contre ce phénomène au moyen d'une approche administrative;

souligne à nouveau la nécessité, compte tenu de la dimension sociale des flux migratoires toujours croissants liés à la pauvreté, d'une politique européenne en matière d'immigration et d'asile définie en concertation avec les collectivités locales et régionales et devant être fondée sur le respect des droits de l'homme, de la solidarité et de la responsabilité commune; souhaiterait, pour cette raison, la création auprès du Parlement européen d'un responsable européen des migrations, des réfugiés et de l'intégration, qui serait notamment chargé de traiter les problèmes spécifiques des ressortissants de pays tiers.

Rapporteur

:

Holger Poppenhäger (DE/PSE), ministre de la justice de l'État libre de Thuringe

Texte de référence

:

«Mettre en place un espace de liberté, de sécurité et de justice au service des citoyens européens - Plan d'action mettant en œuvre le programme de Stockholm»

COM(2010) 171 final

I.   RECOMMANDATIONS POLITIQUES

LE COMITÉ DES RÉGIONS,

1.

se félicite que la Commission propose aussi rapidement avec ce plan d'action une stratégie globale pour la mise en œuvre du programme de Stockholm concernant la mise en place d'un espace de liberté, de sécurité et de justice, permettant ainsi une participation planifiée et ciblée de tous les acteurs concernés;

2.

approuve l'objectif du plan d'action de faire progresser l'Europe des citoyens, de sorte que ceux-ci puissent exercer pleinement leurs droits;

3.

souligne une fois encore la nécessité de garantir le plein respect des droits fondamentaux et des libertés, y compris en assurant la sécurité de l'Europe;

4.

souligne qu'en pratique, les collectivités locales et régionales assument aujourd'hui déjà une responsabilité essentielle dans la mise en œuvre de ces droits et part dès lors du principe que dans le cadre de la gouvernance à multiniveaux et conformément au principe de subsidiarité, elles devraient être largement associées à ce processus, et ce dès le stade prélégislatif;

5.

examinera la possibilité de créer une banque de données propre au Comité des régions (CdR), chargée de recenser les exemples de bonnes pratiques des collectivités locales et régionales en ce qui concerne l'espace de liberté, de sécurité et de justice;

Une Europe des droits fondamentaux

6.

indique que la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne reconnaît l'indivisibilité des droits fondamentaux et des libertés de tout citoyen – indépendamment de sa nationalité ou de son statut de résident – et souligne que le plein respect, la protection et la promotion de ces droits est l'un des premiers devoirs des institutions et organes de l'Union européenne (UE), des États membres, des parlements et des gouvernements régionaux, ainsi que des élus et responsables locaux;

7.

insiste sur le rôle important joué par les initiatives portées notamment par les collectivités locales et régionales et certains groupes de la société civile dans la lutte contre l'exclusion, le racisme, l'antisémitisme, la xénophobie et l'homophobie;

8.

appelle de ses vœux une amélioration de la protection des minorités et des groupes et individus vulnérables;

9.

suggère que les régions et les communes revoient graduellement leur législation actuelle, y compris leurs statuts, ainsi que les nouveaux actes législatifs à la lumière de la Charte et des développements constitutionnels européens, notamment les dispositions européennes en matière de lutte contre les discriminations;

10.

souhaiterait contribuer, dans le cadre de la gouvernance à multiniveaux et en étroite coopération avec l'Agence européenne des droits fondamentaux, à la mise en œuvre d'une «culture des droits fondamentaux» vivante et invite en conséquence la Commission à rendre régulièrement compte, notamment au CdR, des dispositions procédurales qu'elle a prises pour assurer le respect effectif des droits fondamentaux;

11.

accueille favorablement la coopération trilatérale engagée en 2009 entre la Commission, l'Agence européenne des droits fondamentaux et le CdR et souhaiterait qu'elle soit approfondie et étendue;

Politique en faveur des citoyens

12.

considère que le droit à une totale liberté de circulation et une participation politique active des citoyens représentent des aspects essentiels de la citoyenneté de l'Union;

13.

constate qu'en tant que niveau le plus proche des citoyens, les collectivités locales et régionales sont particulièrement tenues de faire appliquer les principes de la participation tels qu'ils sont énoncés par les constitutions nationales et les législations régionales ainsi que par le traité de Lisbonne;

14.

suggère par conséquent que soit examinée la possibilité d'étendre le droit de vote des citoyens européens au-delà des élections locales et européennes;

15.

soutient les efforts déployés pour accorder aux ressortissants de pays tiers séjournant légalement dans l'Union, en fonction de la durée de leur séjour, des possibilités de participation au niveau local;

16.

partage le point de vue du Parlement européen, de la Commission et du Conseil européen selon lequel l'initiative citoyenne européenne établie par le traité de Lisbonne contribuera également à asseoir la légitimité démocratique de l'Union;

17.

souligne la nécessité que les citoyens de l'Union aient pleinement accès à l'information, condition d'une participation politique active; apprécierait que les États membres assurent eux aussi ce plein accès à l'information et invite ses membres à œuvrer en ce sens;

Un espace judiciaire européen – renforcer la confiance

18.

se félicite que le traité de Lisbonne ait permis, grâce à des avancées décisives dans le domaine du droit civil et du droit pénal, d'assurer une réelle visibilité de l'espace judiciaire européen aux yeux des citoyens;

19.

souligne que pour permettre l'application du principe de la reconnaissance mutuelle des systèmes judiciaires, il convient de renforcer la confiance mutuelle, notamment grâce à l'introduction de normes minimales;

20.

considère dès lors que l'échange de juges, de procureurs et autres magistrats, principalement dans le cadre du réseau judiciaire européen mais aussi sur la base des partenariats urbains et régionaux existants, contribue à développer cette confiance et devrait être davantage encouragé;

21.

préconise, afin de développer encore la culture judiciaire européenne, de procéder à un échange intensif d'expériences concernant d'autres formes de sanctions pénales, les modes alternatifs de règlement des conflits déjà en œuvre et les différents systèmes de formation juridique initiale et continue;

22.

estime que la méthode du «cadre commun de référence» contribuerait de manière déterminante à l'européanisation de la législation et à une meilleure application de celle-ci;

23.

demande, s'agissant des futurs actes législatifs, que l'on évalue leur incidence sous l'angle des droits fondamentaux et que l'on prenne également en compte leurs implications financières, économiques et sociales sur les régions;

Garantir une Europe sûre et libre

24.

souligne que les collectivités locales et régionales assument une responsabilité particulière en ce qui concerne la sécurité des citoyens résidant sur leur territoire et le développement d'une culture judiciaire européenne fondée sur la dignité humaine, la liberté, l'égalité et la solidarité, première mesure de prévention du racisme et de la xénophobie;

25.

souligne l'importance fondamentale, pour une société démocratique, de la liberté de réunion - importance reconnue par la Charte des droits fondamentaux - et se montre également préoccupé par l'instrumentalisation de ce droit fondamental à des fins xénophobes, racistes et extrémistes;

26.

estime dès lors qu'il y a lieu d'intensifier et d'améliorer au plus vite la coopération administrative et l'échange d'informations sur les bonnes pratiques entre les autorités compétentes, de manière à garantir le libre exercice du droit de réunion;

27.

accueille favorablement la mise en œuvre prochaine du plan d'action sur la radicalisation violente et suggère d'étudier la possibilité d'appliquer des normes européennes minimales pour les mesures pénales sanctionnant les actes politiques extrémistes;

28.

salue l'annonce dans le plan d'action d'une évaluation des mesures prises par les États membres pour lutter contre la corruption et signale que cette approche exige une culture administrative axée sur la prévention ainsi qu'une grande transparence des procédures administratives;

29.

souligne, à l'instar du contrôleur européen de la protection des données, que la protection de la vie privée est de la plus haute importance dans la société globale de l'information. Une application cohérente du droit fondamental à la protection des données est dès lors de mise, y compris en ce qui concerne les poursuites pénales et la prévention de la criminalité;

30.

considère que de par leur expérience en matière de développement de la protection des données, les collectivités locales et régionales devraient être associées à ce processus de manière continue et à un stade précoce;

31.

accueille favorablement la révision annoncée de la directive 2006/24 sur la conservation de données et part du principe que cette révision s'effectuera notamment à la lumière de la Charte des droits fondamentaux;

32.

approuve l'idée défendue par la «stratégie numérique», selon laquelle le fait de garantir la protection et la sécurité des données – y compris dans le cadre des accords conclus avec des pays tiers et de l'évaluation des nouveaux modèles commerciaux relevant de l'économie en ligne – renforce la confiance des citoyens dans les techniques modernes de communication et lève ainsi un obstacle essentiel à leur développement;

33.

estime que l'utilisation de la vidéosurveillance par des opérateurs publics et privés doit faire l'objet d'un examen critique;

34.

confirme ses avis sur la lutte contre l'exploitation sexuelle des mineurs, la pédopornographie et la traite des êtres humains ainsi que sur la protection des mineurs non accompagnés; rappelle ici notamment son avis CdR 136/2006 fin et souligne qu'il convient de créer des instruments financiers spécifiques dans le cadre de la mise en œuvre du plan d'action de la Commission en faveur des mineurs non accompagnés, afin de tenir dûment compte de la situation particulière de ces derniers et des régions qui les accueillent;

35.

fait valoir la nécessité d'évaluer l'efficacité des mesures prises jusqu'ici par l'UE pour assurer la protection des victimes, ou plutôt leur mise en œuvre, dans le cadre des rapports réguliers imposés par la législation européenne;

36.

répète, au regard des catastrophes naturelles transfrontalières d'origine climatique auxquelles nous assistons aujourd'hui, comme les inondations mais aussi les incendies, que les collectivités locales et régionales ont un rôle majeur à jouer dans la prévention des risques;

37.

rappelle sa demande relative à la mise en œuvre par l'Union d'une approche commune équilibrée en matière de protection civile, qui laisse aux États membres une marge de manœuvre suffisante pour fixer leurs propres priorités;

38.

attend avec intérêt l'évaluation prévue dans le plan d'action des instruments de la politique de protection civile de l'UE et la communication sur le renforcement de la capacité de réaction de l’UE en cas de catastrophes et approuve expressément les propositions annoncées de renouvellement de l'instrument financier européen pour la protection civile;

39.

met en avant le rôle important joué par les collectivités locales et régionales dans la prévention de la criminalité et demande qu'elles soient associées en temps utile à l'évaluation du réseau européen de prévention de la criminalité, ainsi qu'à la création d'un observatoire pour la prévention de la criminalité et à la mise en œuvre du concept de prévention de la criminalité organisée et de lutte contre ce phénomène au moyen d'une approche administrative;

40.

invite à prêter le plus grand soin aux mesures proposées concernant les statistiques relatives à la criminalité, de manière à garantir la validité de ces données;

Développement d'une politique européenne en matière d'asile et d'immigration

41.

souligne à nouveau la nécessité, compte tenu de la dimension sociale des flux migratoires toujours croissants liés à la pauvreté, d'une politique européenne en matière d'immigration et d'asile définie en concertation avec les collectivités locales et régionales et fondée sur le respect des droits de l'homme, de la solidarité et de la responsabilité;

42.

partage l'avis du Parlement européen selon lequel le soutien actuellement apporté aux régions frontalières européennes est insuffisant et demande en conséquence à la Commission de proposer, dans la communication à venir sur le développement de la solidarité au sein de l'UE, des solutions possibles afin d'assurer une répartition solidaire des réfugiés ainsi que des mesures immédiates visant à soulager les régions concernées;

Migrations

43.

accueille favorablement une politique d'immigration orientée vers les pays d'origine, mais tenant également compte des exigences du marché du travail européen et de l'évolution démographique;

44.

appelle de ses vœux un cadre juridique plus cohérent en matière de regroupement familial et juge nécessaire de faire usage avec doigté des mesures d'assouplissement supplémentaires prévues dans le cadre des accords sur le régime des visas;

45.

approuve dans leur principe les mesures prévues dans le plan d'action pour empêcher durablement l'immigration clandestine;

46.

fait valoir que les mesures proposées ne doivent pas aller à l'encontre de la protection des réfugiés assurée au niveau européen et international;

47.

déplore que la Commission ne prévoie pas dans le plan d'action, en vue de la mise en œuvre d'une approche coordonnée à l'égard des personnes sans titre de séjour, de propositions et d'initiatives prenant en compte les droits européens fondamentaux et espère qu'il sera tenu compte des intérêts de ce groupe dans la modification prévue de la directive définissant l'aide à l'entrée, au transit et au séjour irréguliers ainsi que dans le rapport sur la directive prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier;

48.

estime que les programmes de réadmission ne devraient en principe s'appliquer que sur une base volontaire et en accord avec les objectifs de la politique de développement et que le retour devrait tendre à l'intégration sociale durable des personnes concernées;

49.

regrette que le plan d'action ne prévoie pas pour l'instant d'amélioration en ce qui concerne les droits et les devoirs des ressortissants de pays tiers;

50.

insiste sur la nécessité, s'agissant des mesures prévues dans le plan d'action en matière de protection et d'échange des données ainsi que de leur révision, de respecter les règles relatives à la protection des données également dans le domaine de la politique d'immigration et d'asile;

51.

salue les mesures annoncées en faveur de l'intégration et demande à cet égard que le Comité des régions soit associé en temps utile à l'élaboration de la communication relative à un programme de l'UE pour l'intégration, ainsi qu'au développement du mécanisme de coordination prévu;

52.

demande, en ce qui concerne les mesures statistiques prévues, qu'un équilibre adéquat soit assuré entre le gain de connaissances et les charges qui en résultent;

53.

souhaiterait la création auprès du Parlement européen d'un responsable européen des migrations, des réfugiés et de l'intégration, qui serait notamment chargé de traiter les problèmes spécifiques des ressortissants de pays tiers;

Politique d'asile

54.

invite le Parlement européen et le Conseil à procéder au plus vite à l'introduction prévue dans le plan d'action de critères et de bases de décision comparables pour les décisions en matière d'asile;

55.

estime que le respect de normes minimales conformes aux exigences en matière de droits fondamentaux et de droits de l'homme s'impose aussi bien pour ce qui est de l'hébergement des demandeurs d'asile qu'en ce qui concerne les règles régissant la libre circulation de ces derniers;

L'Europe dans le monde – La dimension extérieure de l'espace de liberté, de sécurité et de justice

56.

se félicite que le traité de Lisbonne permette d'organiser plus efficacement l'action extérieure de l'UE en se concentrant davantage sur les objectifs relatifs aux droits de l'homme et à la politique de développement;

57.

accueille favorablement l'engagement pris par la Commission, en concertation avec le haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, également vice-président de la Commission, d'assurer la cohérence entre les relations extérieures et la dimension extérieure de la justice et des affaires intérieures ainsi que la coopération au développement;

58.

approuve le fait que le plan d'action porte également sur des intérêts communs liés aux migrations légales et illégales (immigration, asile, coopération en matière de gestion des frontières) et prenne en considération la lutte contre le terrorisme et la criminalité, la définition de priorités géographiques en relation avec certaines questions, le cadre général présidant aux échanges d'informations, les garanties offertes en matière de protection des droits fondamentaux et des droits de l'homme, la transparence et le libre accès à l'information, la protection des données et les garanties correspondantes en matière de protection des droits pour les citoyens de l'Union et les ressortissants de pays tiers;

59.

suggère d'associer aux discussions sur les questions concernant la dimension extérieure de l'espace de liberté, de sécurité et de justice le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe, l'Assemblée régionale et locale euro-méditerranéenne, les plateformes du Partenariat oriental et d'autres réseaux pertinents;

60.

juge important d'exploiter et de renforcer le potentiel considérable représenté par les collectivités locales et régionales dans le cadre de la coopération transfrontalière en matière d'espace de liberté, de sécurité et de justice, notamment en ce qui concerne les questions relatives à l'intégration des migrants et des demandeurs d'asile;

61.

juge nécessaire de procéder à des évaluations régulières dans ce domaine également, afin de garantir une mise en œuvre efficace et cohérente des mesures relevant de cette nouvelle politique extérieure de l'Union européenne.

Bruxelles, le 2 décembre 2010.

La présidente du Comité des régions

Mercedes BRESSO