22.9.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 255/31


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Programme d'aide à l'aviation européenne»

(avis d'initiative)

(2010/C 255/05)

Rapporteur: M. KRAWCZYK

Corapporteur: M. PHILIPPE

Le 16 juillet 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème:

«Programme d'aide à l'aviation européenne».

La commission consultative des mutations industrielles, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 26 novembre 2009 (rapporteur: M. KRAWCZYK; corapporteur: M. PHILIPPE).

Lors de sa 458e session plénière des 16 et 17 décembre (séance du 17 décembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 167 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   La crise actuelle est sans précédent: elle affecte tous les éléments de la chaîne de valeur du transport aérien («la chaîne de valeur»), bien que de manière différente. Dans un environnement en partie libéralisé, où seul le dernier maillon de la chaîne (à savoir les compagnies aériennes) a fait l'objet d'une libéralisation en bonne et due forme, les autres composantes de la chaîne de valeur peuvent atténuer – en partie ou en totalité – les pertes de revenu générées par la diminution du trafic en recourant de manière impropre à ce que l'on appelle le «principe de recouvrement des coûts», ou bien moyennant un abus de leur position concurrentielle.

1.2   Il en va de la résistance de l'aviation européenne, et donc de sa compétitivité internationale. Alors que d'autres régions du monde ont rapidement pris des mesures efficaces pour pallier le fléchissement du nombre de passagers et du fret, leurs homologues européens sont confrontés à des problèmes d'une autre nature, qui s'accompagnent d'effets négatifs considérables pour leurs fournisseurs. Les taxes gouvernementales de toute sorte qui viennent encore augmenter les coûts d'utilisation des infrastructures (aéroports, ATC), le manque de fonds disponibles, les contraintes environnementales unilatérales ne sont que quelques exemples de la réalité du qu'affronte le secteur aéronautique européen.

1.3   Dans le présent avis sont proposées un certain nombre de mesures à court et moyen terme que les décideurs politiques sont invités à examiner et à mettre en œuvre pour que l'aviation européenne lutte efficacement contre la crise et en sorte aussi résistante qu'elle l'était auparavant.

1.4   Il convient que la restructuration de la chaîne de valeur soit comprise et suivie par tous les acteurs qui interviennent dans le trafic aérien: les aéroports, les prestataires de services de navigation aérienne, les prestataires de services d'assistance en escale, les compagnies aériennes et les constructeurs d'aéronefs.

1.5   Le Comité rappelle que le secteur aéronautique européen dans son ensemble est considéré comme étant d'une importance stratégique pour l'Europe; il constitue en effet un moteur de croissance grâce à son personnel très qualifié/compétent. C'est pourquoi les mesures qu'il y a lieu de prendre afin de surmonter la crise qui touche le secteur doivent permettre de préserver les compétences qui seront nécessaires pour assurer le développement de l'assise industrielle et technologique de l'Europe.

1.6   Afin de mieux anticiper les évolutions futures du secteur, il serait opportun d'encourager le développement du dialogue social entre les parties prenantes ainsi que les actions en faveur de la formation et de la gestion prévisionnelle des compétences et des emplois. Les acteurs publics et privés doivent s'engager dans des activités soutenant les échanges entre les écoles et l'industrie, de même qu'appuyer la recherche et développement nécessaire à l'expansion du secteur.

1.7   Le neuvième paragraphe du présent avis couvre les propositions en faveur d'un programme de soutien à l'aviation européenne. Celles-ci comportent des initiatives qui ont trait:

à l'ajustement des infrastructures et aux coûts;

aux enjeux financiers provoqués par le manque de financement disponible et la réduction des bénéfices;

aux préoccupations environnementales;

à l'environnement réglementaire;

à la concurrence internationale;

à la recherche et au développement.

2.   Impact de la crise sur le secteur aéronautique

2.1   L'Association du transport aérien international (IATA) estimait en mars 2009 que les pertes du secteur mondial de l'aviation s'élèveraient à 4,7 milliards de dollars en 2009. Ces prévisions ont toutefois été revues, les pertes pour 2009 ayant été estimées à 9 milliards de dollars en mai, puis à 11 milliards de dollars en septembre. Cette tendance devrait perdurer en 2010, à concurrence de 3,8 milliards de dollars de pertes.

2.2   En termes de demande, les membres de l'Association des compagnies européennes de navigation aérienne (AEA) ont enregistré une baisse du nombre de passagers de 8,2 % au premier semestre 2009. Le trafic à haut rendement a diminué de plus de 19,9 %. Les transporteurs de fret ont été touchés par une chute de la demande de 22,1 % au premier semestre 2009. Ces données sont confirmées par «Airports Council International» (ACI), qui estime la chute de la demande à 8,1 % pour le transport de passagers et 21,1 % pour le fret. Selon cette organisation, au cours des neuf premiers mois de l'année 2009, les 25 plus grands aéroports européens ont perdu 41 millions de passagers. L'Association européenne des compagnies d'aviation des régions d'Europe (ERA), qui représente les transporteurs opérant des vols à l'intérieur de l'Europe, a enregistré une chute collective du trafic passager d'une amplitude de 7,2 % au premier semestre 2009.

2.3   En 2008, le secteur du transport aérien pourvoyait environ 1,5 million d'emplois en Europe, les compagnies aériennes étant de loin le premier contributeur, à concurrence de 49 %. Au cours du premier semestre 2009 seulement, les membres de l'AEA ont réduit leurs effectifs de 34 000 personnes (soit quelque 8 % de la main-d'œuvre totale), avec des effets en cascade pour environ 90 000 emplois «indirects» dans toute l'Europe, dont la plupart sont hautement qualifiés. L'exemple de l'aéroport d'Amsterdam illustre aussi les réductions de personnel à grande échelle.

2.4   En Europe, les compagnies à bas prix ont réalisé de meilleurs résultats que les autres modèles économiques. Même si elles n'ont pas été épargnées par les faillites, puisque depuis août 2008, cinq d'entre elles ont fait défaillance, la part du marché européen qu'elles détiennent a triplé, pour atteindre 37 % en 2009, alors qu'elle était de 12 % en 2003. En juillet 2009, au pire de la crise, elles n'ont pratiquement pas procédé à des réductions de capacités, étant donné que la demande pour leurs services n'avait pas faibli, ou n'avait fléchi qu'à la marge. Cette situation peut s'expliquer pour partie par la capacité dont elles disposent d'éviter les plates-formes aériennes encombrées et de réorganiser ainsi leurs activités en fonction des impératifs financiers du moment. En ces temps de disette financière, leur dépendance vis-à-vis des aides, directes ou indirectes, des pouvoirs publics jettent toutefois un doute sur leur pérennité à moyen terme. Tout en notant que le développement des transporteurs à bas prix est devenu une réalité sociale, il y a lieu de s'interroger sur l'avenir de cette forme de transport et les effets qu'elle pourrait avoir sur l'ensemble de la chaîne de création de valeur.

2.5   En dépit de coupes claires dans les capacités du côté de l'offre, les résultats d'exploitation des transporteurs aériens traditionnels ont chuté, passant de –0,2 milliard d'euros au premier trimestre 2008 à –1,9 milliard d'euros au premier trimestre 2009. Selon l'IATA, les compagnies aériennes européennes seront les plus touchées, les pertes prévues étant de 3,8 milliards de dollars en 2009. L'ACI estime que les aéroports européens auront perdu en 2009 98 millions de passagers, les aéroports les plus petits étant les plus durement touchés.

2.6   En Europe, depuis le début de la crise (de septembre 2008 à septembre 2009), plus de 33 transporteurs ont déposé le bilan ou sont sur le point de le faire.

2.7   D'après les dernières analyses réalisées pour la Commission européenne concernant le marché du transport aérien européen en 2008, Airbus a enregistré en 2008 41,3 % de commandes de moins qu'en 2007, qui fut une année exceptionnelle en termes de carnet de commande.

2.8   Pour ce qui est des constructeurs, l'année 2009 a été jusqu'à présent tout aussi mauvaise. En octobre 2009, Boeing avait reçu 195 commandes et 111 annulations, avec un solde net de 84 commandes uniquement. Pour la même période, Airbus a enregistré 149 commandes et 26 annulations, avec un solde net de 123 commandes. À titre indicatif, l'année dernière, les deux entreprises ont respectivement reçu 662 et 777 commandes.

2.9   Confrontés à une chute des commandes ainsi qu'à la suspension et/ou à la réduction des livraisons, les constructeurs aéronautiques estiment disposer d'une marge de manœuvre réduite et tentent de protéger leurs résultats en diminuant les coûts. Dans le même temps, cette approche influence leur capacité à investir dans le développement de nouvelles technologies et de nouveaux aéronefs.

3.   Implications à plus long terme pour le secteur

3.1   La stratégie adoptée par les maîtres d'œuvre (Airbus, Boeing, Dassault, ATR, Alenia, Safran, Goodrich, Thales, Liebherr, etc.) vise à raccourcir les calendriers de développement et à réduire les coûts, tout en délocalisant les activités de production et de recherche, notamment hors d'Europe. Les fournisseurs et les sous-traitants sont dans l'obligation d'adopter cette stratégie vis-à-vis de leurs propres partenaires (1).

3.2   Si une baisse significative des commandes coïncidait cette stratégie des constructeurs, cela créerait des difficultés au niveau du volume de travail pour de nombreux sous-traitants, dont l'existence pourrait être mise en danger. Suivant la même logique, il convient de remettre en question les stratégies des entreprises qui prévoient des mesures de délocalisation et de transfert de technologie hors d'Europe, au vu de leur impact social (hémorragie des ressources financières, perte de compétitivité et de valeur ajoutée, incidences sur l'environnement et le tissu socio-économique).

3.3   À long terme, cette politique peut générer des pertes d'emplois hautement qualifiés considérables en Europe, qui pourront à leur tour sérieusement menacer la compétitivité du secteur en Europe.

3.4   La hausse du taux de chômage, la diminution des revenus des particuliers et la crise de confiance ont conduit les passagers à limiter leurs déplacements, à délaisser la classe affaires et à passer des transports aériens à des modes de transport alternatifs.

3.5   Si en 2001, les compagnies aériennes membres de l'AEA ont subi une chute de revenus de 7 % et ne sont sorties du rouge qu'après trois ans, la situation actuelle est deux fois pire. Une perte totale de 15 % semble indiquer que les compagnies aériennes auront besoin de plus de trois ans avant de revenir à la normale.

Les réductions de coûts réalisées par les compagnies aériennes ne sont pas appuyées par une action simultanée des aéroports et des prestataires de services de navigation aérienne. L'ensemble de la chaîne de valeur ne réagit pas de manière uniforme à la récession économique.

4.1   En outre, le réseau complexe de réglementations souvent contradictoires limite la capacité du secteur de l'aviation à réagir aux défis posés par la crise.

Les compagnies aériennes ne contrôlent directement que 37 % de ce qui constitue leurs coûts opérationnels. Près d'un autre tiers est généré par des éléments échappant à leur contrôle direct, dont voici un aperçu:

5.1   Les coûts opérationnels «externes» s'élevaient en 2008 à un montant total de 50,5 milliards d'euros. Même s'il s'agissait avant tout (à concurrence de plus de 45 %) des coûts de carburant, dont le prix est largement incontrôlé, les 55 % restants (soit 27,5 milliards d'euros) étaient notamment imputables aux redevances aéroportuaires et ATC.

5.2   Les redevances aéroportuaires, qui s'élevaient au total à 2,8 milliards d'euros l'an dernier, ont soudain augmenté de plus de 5 % dans de nombreux aéroports. Seuls quelques aéroports européens ont pu s'associer aux efforts déployés par leurs utilisateurs en réduisant les redevances de manière comparable. En moyenne, les redevances aéroportuaires par passager ont augmenté de 15 % au premier trimestre 2009.

5.3   La hausse des prix du pétrole constitue une menace à la viabilité des compagnies aériennes. Le prix du kérosène a grimpé de près de 50 % depuis le début de l'année. Selon l'IATA, le prix moyen du kérosène passera de 61 dollars par baril en 2009 à 72 dollars par baril en 2010.

5.4   De même, au premier trimestre 2009, les taux unitaires de redevance pour le contrôle de la circulation aérienne (ATC) à l'unité ont augmenté d'en moyenne 3,4 % en Europe. Cette hausse a été justifiée par le principe de «recouvrement des coûts» permettant à chaque prestataire de services de navigation aérienne de compenser une diminution du trafic par une augmentation des redevances.

5.5   L'idée d'un ciel unique européen, à ce jour une occasion manquée qui devait amener des réductions de coûts pouvant aller jusqu'à 5 milliards d'euros par an ainsi que des améliorations induites par un routage plus direct et la diminution des émissions de CO2 de 16 tonnes, sera sans impact sur la réalité économique à court terme (étant donné que les blocs d'espace aérien fonctionnels n'entreront pas en vigueur avant 2012).

5.6   Les compagnies aériennes sont exposées, en raison de leur structure de coûts, à la moindre fluctuation des prix du pétrole. Dans l'intérêt de l'économie et de la responsabilité sociale des entreprises, il est nécessaire de prendre de toute urgence des mesures immédiates afin de promouvoir l'utilisation de moteurs et de carburants «révolutionnaires». À cette fin, un appui massif au financement des activités de recherche et développement s'avère crucial.

5.7   Les coûts de développement des programmes aéronautiques sont en constante augmentation; le financement de la livraison de nouveaux avions en devient donc plus difficile. Lorsque les compagnies aériennes n'ont plus accès aux financements bancaires, c'est l'ensemble du secteur aéronautique qui est menacé.

5.8   Il est nécessaire d'examiner de nouvelles modalités financières en ce qui concerne le développement et la production d'aéronefs, permettant de libérer les industriels et les opérateurs des contraintes liées au déboursement de liquidités grâce à des mécanismes facilitateurs au moment du paiement de l'aéronef.

5.9   Historiquement, les marchés publics liés aux programmes aéronautiques militaires ont toujours soutenu le secteur (qui dans l'ensemble présente à la fois une composante civile et une composante militaire) durant les périodes de mauvaise conjoncture. Il est incontestablement nécessaire d'examiner de toute urgence la possibilité d'accorder un tel soutien coordonné à l'échelon européen, ce qui faciliterait également la réorganisation d'un secteur qui reste trop fragmenté.

5.10   L'utilisation de fonds publics pour soutenir les entreprises (déjà envisageable en vertu de la législation actuelle) devrait être évaluée sur la base des engagements à maintenir les emplois et les compétences dans les entreprises concernées.

Il est plus que jamais nécessaire d'instaurer des conditions de concurrence équitables au niveau international. La crise a amené de nombreux gouvernements de par le monde à se porter au secours de leurs compagnies aériennes en difficulté. La Chine a directement subventionné China Eastern Airlines (750 millions d'euros) et China Southern Airlines (320 millions d'euros) début 2009, tandis que les redevances aéroportuaires chinoises étaient suspendues et que le prix du kérosène était abaissé. En Inde, le gouvernement a octroyé 600 millions d'euros à Air India sous la forme de prêts participatifs et de prêts bonifiés.

6.1   Certains de ces transporteurs, appelés opérateurs de la cinquième et de la sixième liberté du transport aérien, utilisent l'Europe comme un grand réservoir riche en ressources où ils viennent puiser, comme par exemple les transporteurs du Golfe.

6.2   Ces transporteurs bénéficiant d'aides d'État maintiennent des opérations intercontinentales en dépit de la chute spectaculaire des taux d'occupation. Dans certains cas, ils parviennent même à les augmenter alors que les transporteurs européens, soumis à la réalité du marché, sont forcés de les réduire. Les transporteurs du Golfe ont ainsi accru de 14 % leurs capacités cette année, essentiellement par l'intermédiaire des principales plates-formes européennes.

7.   À ce jour, la réaction de la Communauté européenne à cette crise sans précédent a été la suivante: la dérogation estivale aux règles sur les créneaux horaires n'a pas suffi et est survenue trop tard. L'adoption finale et la publication de ce règlement fin juin, près de trois mois après le début de la saison estivale, ne lui ont pas permis d'aider le secteur à réagir avec plus de souplesse aux changements rapides des conditions sur le marché.

Bien que les associations de compagnies aériennes aient dès le départ rejeté l'idée d'aides d'État particulières, l'on a identifié plusieurs domaines nécessitant des mesures rapides de la part des régulateurs afin de lutter contre la crise.

8.1   La dérogation hivernale attendue vise à aider le secteur aéronautique, et en particulier les compagnies aériennes, à faire face à la crise économique en alignant leurs capacités sur la demande à la baisse. La mesure est non discriminatoire, elle profite à toutes les compagnies aériennes et à tous les modèles d'entreprise différents, et elle constitue une mesure à court terme et isolée. Elle doit être mise en œuvre à temps afin de faire sentir ses effets. Cette mesure recueille aussi l'assentiment de transporteurs à bas prix.

8.2   Étant donné que la crise a d'abord touché le secteur financier, la plupart des établissements financiers spécialisés dans le financement du secteur aéronautique ont disparu ou réorienté leur stratégie vers d'autres activités.

8.3   Afin de renouveler leur flotte, les compagnies membres de l'AEA ont commandé (situation de juillet 2009) 530 aéronefs qu'elles devraient recevoir dans les années à venir, pour une valeur s'élevant jusqu'à 29 milliards de dollars, soit une baisse en regard des 561 commandes enregistrées à la même période l'année dernière.

8.4   On estime que seules 75 à 80 % de ces commandes sont ou seront garanties ou financées par le secteur financier. Pour les 20 à 25 % restants, il faudra soit les annuler, soit trouver des modes de financement alternatifs n'existant pas aujourd'hui.

8.5   Rien qu'en 2008, la Banque européenne d'investissement a octroyé aux projets au sein des États membres des prêts pour une valeur de près de 52 milliards d'euros, dont seulement 2,7 milliards étaient destinés au secteur du transport aérien européen (compagnies aériennes, aéroports, ATC et constructeurs).

8.6   Dans son rapport final publié en mai 2009, le Groupe sur l'aviation internationale et les changements climatiques (GIACC) de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a recommandé à l'OACI d'adopter trois objectifs globaux:

a.

sur le court terme jusqu'à 2012: améliorer l'efficacité moyenne en carburant de la flotte en service de 2 % par an;

b.

sur le moyen terme jusqu'à 2020: améliorer l'efficacité en carburant de 2 % par an;

c.

de 2021 à 2050: améliorer l'efficacité en carburant de 2 % par an au niveau mondial.

8.7   Il est vital que l'aviation internationale soit représentée au sommet COP15 de Copenhague en décembre, et qu'elle y soit traitée comme un secteur. Il est également essentiel que l'accord de Copenhague fixe un plafond aux émissions du secteur aéronautique mondial. La discussion devrait concerner à la fois les compagnies aériennes et les constructeurs aéronautiques.

8.8   Eu égard à leur inclusion dans le système communautaire d'échange de quotas d'émission en 2012, il est crucial que les transporteurs européens commencent à remplacer progressivement leurs aéronefs pour des appareils plus efficaces. La dernière génération des B737 ou des A320 permet de réduire les émissions jusqu'à 7 ou 8 % par rapport à la génération précédente. Il convient d'allouer des fonds afin de permettre des innovations technologiques radicales en ce qui concerne les moteurs, les cellules d'avion et le carburant.

8.9   La moyenne d'âge des flottes en service demeure relativement élevée, ce qui a d'ailleurs une incidence sur les résultats des compagnies aériennes. Aussi convient-il d'instaurer un secteur structuré pour le démantèlement. Les exemples actuels restent trop rares et insuffisamment coordonnés. Il y a lieu de créer un véritable secteur européen, sous les auspices des pouvoirs publics.

8.10   Les constructeurs et leurs sous-traitants devraient naturellement être associés à ces initiatives, qui pourraient créer de nouveaux emplois et générer des revenus supplémentaires en étendant l'activité industrielle à toute la durée de vie du produit, jusqu'à la mise hors service des aéronefs.

8.11   Les prestataires de services de navigation aérienne fonctionnent sur la base du principe de recouvrement des coûts. Ainsi, lorsque le niveau de trafic diminue, les coûts à l'unité augmentent, si bien que les compagnies aériennes sont «doublement touchées» par la crise. Les prestataires de services de navigation aérienne doivent ajuster leur base de coûts au nouvel environnement économique et à un trafic aérien sensiblement plus bas.

8.12   Le paquet «Ciel unique européen» concernera indirectement le principe de recouvrement des coûts en imposant des objectifs de performance aux blocs d'espace aérien fonctionnels et aux États membres. Sa mise en œuvre ne débutera toutefois qu'en 2012. SESAR, le programme conçu pour établir une architecture unique, devrait remplacer les 22 systèmes d'exploitation, les 30 langages de programmation et les 31 systèmes nationaux actuellement utilisés.

8.13   Étant donné que les États membres ont déjà adopté la directive sur les redevances aéroportuaires, ils devraient agir en cette période de crise comme si les principales dispositions de la directive étaient déjà d'application. La Commission est désormais effectivement compétente pour les redevances aéroportuaires dans l'UE.

8.14   L'an dernier, l'Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) s'est vue confier la compétence légale pour les règles de sûreté liées aux opérations de vol, aux licences du personnel navigant et à la surveillance des opérateurs de pays tiers.

8.15   Il y a lieu de continuer à soutenir l'amélioration de la sûreté au moyen d'analyses fondées sur les données et ciblées sur le risque. Les améliorations apportées à la sécurité à l'instigation du secteur, en partenariat avec les gouvernements, ont conduit à des progrès en matière d'amélioration de la sûreté aéronautique, et cette position de chef de file devrait se maintenir, dans la mesure où la sécurité se trouve au cœur du secteur aéronautique. Il convient de s'assurer que l'AESA traite exclusivement des considérations de sécurité.

8.16   Le secteur aéronautique attend depuis longtemps un accord final sur la reconnaissance mutuelle des mesures de sûreté par l'Union européenne et les États-Unis. Il convient désormais de prendre une décision politique afin de reconnaître que les mesures de sûreté américaines sont équivalentes. Cette reconnaissance profitera aux 6 millions de passagers venant des États-Unis et transitant par un aéroport de l'UE chaque année.

Le secteur aéronautique européen constitue une composante essentielle de l'économie, en ce qu'il contribue beaucoup à l'un de ses fondamentaux: la mobilité (des biens et des personnes). Il représente aussi une part importante de la forte assise industrielle, du développement technologique et de la croissance économique. Préserver cette base dans une perspective de long terme revêt une importance capitale, et les efforts allant dans ce sens doivent être encouragés. Ce secteur constitue également un élément moteur pour la relance économique, en ces temps de mondialisation. Dès lors, les objectifs prioritaires des gouvernements devraient consister à garantir la pérennité des piliers qui soutiennent leurs économies fragilisées, notamment l'aviation, mais aussi à créer les conditions d'un retour rapide à un environnement sain. C'est pourquoi le CESE recommande vivement que soient prises les actions et les mesures de soutien suivantes:

9.1   Les effets des cycles économiques et des pressions de la concurrence devraient se faire sentir sur la chaîne de valeur dans son ensemble (aéroports, constructeurs aéronautiques, fournisseurs de kérosène, prestataires de services d'assistance en escale, prestataires de services de navigation aérienne, compagnies aériennes). Des restructurations sont en cours afin de minimiser l'impact négatif du ralentissement économique.

9.2   La Commission devrait lancer toutes les procédures visant à faciliter et à mettre en œuvre une dérogation à la règle 80:20 en ce qui concerne l'utilisation des créneaux horaires pour la saison hivernale 2009-2010.

9.3   Si l'on sait qu'à moyen terme, le trafic aérien devrait augmenter de 4 à 5 % chaque année, et que 25 000 aéronefs pouvant accueillir plus de cent passagers pourraient être construits au cours des vingt prochaines années, il convient de gérer à bon escient les capacités de production européennes. Au cas où des restructurations seraient inévitables, le maintien des capacités et des compétences est un aspect qui devrait être pris en considération.

9.4   Le Comité plaide pour que les procédures d'information et de consultation des partenaires sociaux soient respectées en cas de restructuration. Il encourage tous les partenaires sociaux à développer un dialogue social structuré et anticipateur au sein des entreprises et aux niveaux national et européen.

9.5   Les pouvoirs publics devraient aider les entreprises vulnérables à maintenir leurs compétences et leurs emplois, par exemple en améliorant l'accès à la formation professionnelle en période de ralentissement économique. Les organes publics pourraient montrer l'exemple en promouvant le développement et l'acquisition des compétences nécessaires à moyen et à long terme. Dans ce contexte, le Comité considère qu'un dispositif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences impliquant les partenaires sociaux doit être mis en place.

9.6   Dans ses avis (SOC/347, en dernière date), le Comité a souligné l'importance que revêtent un enseignement de grande qualité dans les écoles et les universités ainsi que de bons contacts entre l'industrie et les écoles/universités afin d'assurer la disponibilité d'une main-d'œuvre munie des connaissances et des compétences appropriées.

9.7   Ce type de soutien coordonné émanant des pouvoirs publics (EU, États, régions, etc.) est crucial pour faire face aux effets de la crise, qui touche le secteur industriel à un moment où de nombreuses personnes partent à la retraite. Si les compétences ne sont pas maintenues dans le secteur des constructeurs, il ne sera pas à même de relever les défis à long terme.

9.8   La Banque européenne d'investissement devrait revenir à sa politique d'avant 2007, lorsque les transporteurs européens pouvaient profiter de ses prêts. Ce mouvement devrait être rapide et concerner spécifiquement le financement de nouveaux aéronefs. Cela ne reviendrait pas à financer une expansion de la flotte.

9.9   Il conviendrait également de prévoir des mécanismes couvrant les risques financiers, tels que ceux induits par la fluctuation des taux de change (cf. paragraphe 4.6 de l'avis CCMI/047). Ceux-ci pourraient notamment revêtir la forme de garanties pour les prêts basées sur des avances remboursables, ou de prêts par la Banque européenne d'investissement.

9.10   Il convient de prévoir un financement supplémentaire pour la recherche et le développement dans le secteur aéronautique, afin de permettre au secteur de relever les défis futurs, et notamment de répondre aux exigences du système communautaire d'échange de quotas d'émission. Une approche mondiale, s'appliquant à l'ensemble du secteur sous l'égide de l'OACI, constituerait toutefois la meilleure des solutions pour atténuer internationalement les effets du changement climatique, s'agissant d'aider à résoudre un problème d'envergure planétaire.

9.11   Eu égard à l'importance innovatrice et stratégique du secteur aéronautique pour la base industrielle et technologique de l'Europe, l'on pourrait apporter un vif soutien à la recherche-développement, mise à mal par la crise, grâce à des efforts soutenus de l'UE allant de la phase de mise en œuvre du 7e programme-cadre pour la recherche jusqu'au 8e programme-cadre à venir. Il convient de ne pas réduire l'appui public à la recherche-développement, afin de garantir l'excellence de l'Europe en la matière. Aussi la R&D et la coopération sont-elles incontournables si l'on veut continuer à miser sur le développement d'une industrie aéronautique durable à long terme au moyen de carburants alternatifs et de mesures opérationnelles de substitution.

9.12   Les contractants de premier rang souffrent moins du ralentissement économique que leurs fournisseurs et sous-traitants, qui représentent la majorité des compétences et des emplois du secteur. Un processus de soutien pourrait revêtir la forme d'une mutualisation des emprunts et des garanties des sous-traitants. Les constructeurs devraient appuyer les efforts déployés par les fournisseurs en leur garantissant des revenus et une charge de travail à long terme.

9.13   Le paquet «Ciel unique européen II» doit être mis en œuvre de toute urgence. La fragmentation de l'espace aérien européen entraîne de lourdes charges supplémentaires non seulement pour les passagers, mais aussi pour les transporteurs. Le CESE a vivement appuyé le paquet «Ciel unique européen II» dans son dernier avis. L'aéronautique constitue un secteur global et l'interopérabilité s'imposera si l'on veut éviter des charges et des facteurs d'inefficacité supplémentaires. Il convient donc de constamment veiller à ce que soit assurée l'interopérabilité de SESAR et NextGen. Le mécanisme de financement de la mise en œuvre de SESAR doit être arrêté par la Commission en 2010 afin de permettre une large participation à cette entreprise révolutionnaire.

9.14   Il faut appeler tous les États membres à accélérer la mise en œuvre de la directive sur les redevances aéroportuaires. La Commission devrait envisager de faire usage de la compétence que lui confère la directive.

9.15   La Commission adressera une communication aux États membres et à EUROCONTROL afin d'instaurer un moratoire sur les redevances ATC. Le Comité a pleinement conscience des efforts qu'a déjà réalisés la DG TREN à ce sujet, et l'encourage fermement à accroître la pression sur les États membres.

9.16   Il convient que les institutions européennes encouragent la consultation entre les prestataires de services de navigation aérienne et les compagnies aériennes conformément aux exigences du règlement no 1794/2006 sur la tarification. Une nouvelle mise à jour de ce règlement est nécessaire afin de refléter le dispositif d'amélioration des performances mis en œuvre dans le paquet «Ciel unique européen II».

9.17   Il faut garantir le fait que l'AESA traite exclusivement des questions de sûreté. Il y a lieu de s'assurer que la sûreté des vols est préservée et améliorée.

Le principe de sûreté à guichet unique devrait être appliqué dans toute l'UE d'ici avril 2010 (date de l'entrée en vigueur des nouvelles règles européennes en matière de sûreté établies dans le règlement 300/2008). En outre, il convient que soit présentée aux États membres une proposition sur le principe de sûreté à guichet unique UE-États-Unis, sur la base de l'évaluation mutuelle des mesures de sûreté européennes et américaines, et qu'elle soit mise en œuvre le plus rapidement possible.

9.18   Davantage d'accords internationaux en matière d'aviation entre l'UE et des pays tiers sont nécessaires afin de créer des conditions de concurrence équitables au niveau international. L'accord conclu par la Commission avec le Canada a été vivement salué par le CESE dans son avis.

9.19   De manière générale, l'incidence croissante des cas de coopération régionale et internationale entre acteurs du secteur (opérateurs, constructeurs, pouvoirs publics) pourrait contribuer à stimuler l'offre et l'activité générale dans le secteur, pour autant que les modalités d'un tel «échange» soient socialement responsables et impliquent l'ensemble des partenaires sociaux.

Bruxelles, le 17 décembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  V. également l'avis du CESE sur «L'aéronautique européenne: Situation et perspectives» (JO C 175 du 28.7.2009, p. 50-56).