52009DC0709

Rapport de la Commission au Conseil et au Parlement européen au titre de l’article 16 du règlement (CE) n° 273/2004 du Parlement européen et du Conseil du 11 février 2004 relatif aux précurseurs de drogues et de l’article 32 du règlement (CE) n° 111/2005 fixant des règles pour la surveillance du commerce des précurseurs des drogues entre la Communauté et les pays tiers (Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE) /* COM/2009/0709 final */


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Bruxelles, le 7.1.2010

COM(2009)709 final

RAPPORT DE LA COMMISSION AU CONSEIL ET AU PARLEMENT EUROPÉEN

au titre de l’article 16 du règlement (CE) n° 273/2004 du Parlement européen et du Conseil du 11 février 2004 relatif aux précurseurs de drogues et de l’article 32 du règlement (CE) n° 111/2005 fixant des règles pour la surveillance du commerce des précurseurs des drogues entre la Communauté et les pays tiers

(Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE)

RAPPORT DE LA COMMISSION AU CONSEIL ET AU PARLEMENT EUROPÉEN

au titre de l’article 16 du règlement (CE) n° 273/2004 du Parlement européen et du Conseil du 11 février 2004 relatif aux précurseurs de drogues et de l’article 32 du règlement (CE) n° 111/2005 fixant des règles pour la surveillance du commerce des précurseurs des drogues entre la Communauté et les pays tiers

(Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE)

INTRODUCTION

Les précurseurs des drogues sont des produits chimiques qui sont utilisés dans la fabrication de drogues illicites. En fait, il n’y a pas de production de drogues illicites sans précurseurs. Dans la majorité des cas, cependant, les produits chimiques utilisés comme précurseurs de drogue ont généralement de multiples utilisations légitimes et importantes (par exemple, dans la synthèse des plastiques, produits pharmaceutiques, cosmétiques, parfums, détergents ou arômes).

La Convention des Nations unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes (ci-après «Convention de l’ONU de 1988»), contient à son article 12, une référence spécifique aux mesures visant à prévenir le détournement de produits chimiques précurseurs de drogues pour les utiliser dans la fabrication de substances narcotiques et psychotropes.

Dans ce contexte, l’UE a mis en place, dès le début des années 90, une législation visant à empêcher le détournement de précurseurs de drogues par le contrôle et la surveillance de leur commerce légitime. Historiquement, l’UE a été un important exportateur de précurseurs et un importateur de drogues illicites mais, progressivement, elle est devenue un important exportateur de drogues de synthèses fabriquées illégalement et un importateur des précurseurs nécessaires à leur fabrication.

Par conséquent, la législation communautaire la plus récente concernant la surveillance et le contrôle du commerce des précurseurs de drogues, à savoir le règlement (CE) n° 273/2004[1] et le règlement (CE) n° 111/2005[2], a été conçue pour renforcer les contrôles à l’importation ainsi que pour étendre les exigences en matière de surveillance qui existaient précédemment.

L’article 16 du règlement (CE) n° 273/2004 et l’article 32 du règlement (CE) n° 111/2005 prévoient que trois ans après leur entrée en vigueur, une évaluation de leur mise en œuvre et de leur fonctionnement soit effectuée et fasse l’objet d’un rapport au Parlement européen et au Conseil. Dans un souci d’efficacité, le présent rapport présente la conclusion de l’évaluation des deux règlements.

LÉGISLATION COMMUNAUTAIRE RELATIVE AU CONTRÔLE DU COMMERCE DES PRÉCURSEURS DE DROGUES

Le système communautaire de contrôle des opérateurs et/ou transactions s’appuie sur la coopération étroite entre les autorités compétentes et les opérateurs économiques concernés (principalement les fabricants et négociants de produits chimiques). En particulier, la notification de transactions suspectes par les opérateurs est essentielle pour prévenir le détournement de précurseurs tout en permettant de réunir des informations afin d’identifier les trafiquants.

La sévérité des contrôles appliqués aux opérateurs et/ou transactions dépend de la sensibilité des précurseurs de drogues réglementés (également appelés «substances classifiées»), parmi lesquels on distingue trois catégories impliquant des exigences différentes, ce qui permet de trouver un équilibre approprié entre tous les moyens possibles d’empêcher les précurseurs de drogues d’atteindre les laboratoires illégaux et d’éviter la création de difficultés superflues pour les besoins légitimes de l’ensemble des opérateurs.

Sur la base de cette coopération, un système de surveillance volontaire est en vigueur pour d’autres substances – dites «non classifiées» — dont l’expérience a montré qu’elles étaient fréquemment détournées pour fabriquer des drogues illicites. Ce système est suffisamment souple pour réagir rapidement à l’évolution des pratiques de détournement, tout en évitant d’accroître les tracasseries administratives pour les opérateurs légitimes.

Le cadre réglementaire actuel de la Communauté en ce qui concerne les précurseurs de drogues comprend le règlement (CE) n° 273/2004, qui définit des règles harmonisées pour le contrôle et la surveillance intracommunautaires, et le règlement (CE) n° 111/2005, qui définit les règles régissant la surveillance du commerce des précurseurs de drogues entre la Communauté et les pays tiers.

MISE EN œUVRE DE LA LÉGISLATION COMMUNAUTAIRE

Règlement (CE) n° 1277/2005[3]

Le règlement (CE) n° 1277/2005 établit des règles de mise en œuvre détaillées pour le règlement (CE) n° 273/2004 et le règlement (CE) n° 111/2005. Visant à assurer une mise en œuvre plus uniforme du cadre juridique communautaire par les autorités compétentes et les opérateurs économiques, il énonce des prescriptions concernant l’octroi de licences aux opérateurs, la transmission d’informations par les opérateurs aux autorités compétentes, le système de notification préalablement à l’exportation, les autorisations d’importation et d’exportation ainsi que le contrôle du transit et des transbordements.

Orientation

Pour compléter les instruments juridiques, la Commission a élaboré et approuvé avec les États membres et les opérateurs des documents d’orientation détaillés et des activités visant à aider les autorités compétentes et les opérateurs industriels à accomplir leurs tâches.

- Questions & Réponses

Un document d’orientation a été rédigé pour fournir aux autorités compétentes des États membres et aux opérateurs économiques des réponses consensuelles aux questions d’interprétation soulevées depuis 2005 pour une mise en œuvre fluide et harmonisée de certaines dispositions de la législation communautaire. Il est régulièrement mis à jour et accessible au public[4].

- Lignes directrices de l’UE à l’intention des opérateurs en ce qui concerne le contrôle des précurseurs de drogues

Afin de faciliter le partenariat et la coopération entre les autorités compétentes et les opérateurs, des lignes directrices européennes à l’intention des opérateurs concernant le contrôle des précurseurs de drogues ont été convenues en 2006. Ces lignes directrices comprennent un ensemble de recommandations pratiques (notamment des indicateurs de risque pour l’identification de transactions suspectes) et des listes de substances classifiées et non classifiées (c’est-à-dire la «liste de surveillance volontaire de l’UE») visant à aider les opérateurs économiques à remplir leurs obligations en coopération étroite avec les autorités. Étant donné que ces lignes directrices contiennent des informations sensibles, elles sont diffusées directement par les autorités compétentes des États membres uniquement aux opérateurs fiables.

- Séminaires

Les services de la Commission et les États membres ont organisé une série de séminaires en étroite collaboration avec les opérateurs économiques afin de mieux faire connaître la nouvelle législation communautaire sur les précurseurs de drogues et insister sur l’importance du partenariat.

- Tables rondes d’experts

Les services de la Commission et les États membres ont organisé ponctuellement des tables rondes d’experts pour aborder des aspects spécifiques du détournement et du trafic des précurseurs de l’héroïne (anhydride acétique) et de précurseurs de drogues de synthèse utilisés dans la fabrication d’amphétamine ou d’ecstasie (BMK, PMK).

Assistance administrative mutuelle

Le règlement (CE) n° 515/97 du Conseil fournit une base juridique pour l’échange d’informations, y compris les règles de confidentialité, entre les États membres, d’une part, et entre les États membres et la Commission, d’autre part.

Par l’échange d’informations sur les expéditions suspectes, les détournements déjoués et les saisies de précurseurs de drogues entre les États membres et la Commission, une approche coordonnée au sein de l’UE est assurée, les enquêtes des États membres sont soutenues et les tentatives des trafiquants d’exploiter d’éventuelles faiblesses dans le marché intracommunautaire sont contrées. En outre, une assistance dans des enquêtes sur des irrégularités établies ou suspectées concernant des précurseurs de drogues peut être demandée par /apportée à des pays tiers avec lesquels l’UE a conclu des accords bilatéraux concernant les précurseurs de drogues.

Plan d’action de l’UE en ce qui concerne les drogues[5]

Les mesures visant à contrer le détournement et le trafic des précurseurs de drogues restent une composante essentielle du nouveau plan d’action «drogues» 2009-2012[6] de l’UE, établi dans le cadre de la stratégie globale de l’UE en matière de drogues mis en place pour la période 2005-2012. L’action 42 du plan d’action «drogues» de l’UE pour 2009-2012 prescrit une évaluation de la législation relative aux précurseurs de drogues et de sa mise en œuvre.

Actions relevant du programme Douanes 2013

Douanes 2013 est un programme de coopération de l’UE qui offre aux administrations nationales la possibilité de créer et d’échanger des informations et expériences. Il permet l’élaboration et l’exploitation en partenariat de grands systèmes informatiques transeuropéens et la mise en place de réseaux humains réunissant des responsables nationaux de tous les pays d’Europe[7]. Plusieurs activités ont été menées pour renforcer la mise en œuvre de la législation communautaire relative aux précurseurs de drogues.

Un cours d’apprentissage électronique sur le contrôle des précurseurs de drogues à l’intention des opérateurs économiques , élaboré sur la base des lignes directrices de l’UE à l’intention des opérateurs concernant les précurseurs de drogues, a été diffusé en juin 2009.

Un cours d’apprentissage électronique pour les douanes est actuellement préparé en collaboration étroite entre les services de la Commission et des experts nationaux des douanes, de la police et d’autres autorités compétentes en matière de législation sur les précurseurs de drogues.

Un groupe de projet composé d’experts des contrôles douaniers opérationnels a été constitué pour renforcer l’efficacité opérationnelle dans la détection d’expéditions suspectes de précurseurs de drogues entrant sur ou quittant le territoire douanier de la Communauté. Plusieurs ateliers opérationnels ont été organisés afin d’échanger les bonnes pratiques.

Un exercice de réflexion a été organisé avec des agents des douanes opérationnels afin d’établir des critères d’analyse des risques pour les précurseurs de drogues qui entrent sur le territoire de la Communauté ou le quittent.

Accords bilatéraux

La Communauté a conclu dix accords bilatéraux avec des pays tiers afin de renforcer le contrôle en abordant, avec les principaux acteurs, des aspects spécifiques d’intérêt mutuel dans le domaine du contrôle des précurseurs de drogues. De tels accords ont été conclus avec la Bolivie, la Colombie, l’Équateur, le Pérou et le Venezuela[8], le Chili[9], le Mexique[10], les États-Unis[11], la Turquie[12] et la Chine[13]. De plus, en mars 2009, le Conseil a autorisé la Commission à négocier un accord bilatéral avec la Fédération de Russie.

Ces accords visent à renforcer la coopération réglementaire avec les pays tiers sur la base des instruments décrits dans le règlement (CE) n° 111/2005, à activer les mécanismes d’assistance mutuelle et à créer des groupes de suivi conjoints entre les parties contractantes.

Actions au niveau des Nations unies

La Commission et les États membres ont été étroitement associés à l’évaluation de la réalisation des objectifs fixés par la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations unies de 1998 (UNGASS) et ont régulièrement et activement participé à la session annuelle de la Commission des stupéfiants (CND), l’organe central de la politique des Nations unies en matière de drogues.

Lors de la 50e session de la Commission des stupéfiants des Nations unies (CND), une proposition de la Communauté a été adoptée par la résolution 50/10 intitulée « Prévention du détournement des précurseurs de drogues et d’autres substances utilisées pour la fabrication illicite de stupéfiants et de substances psychotropes »[14]. Cette résolution appuie les principaux principes du contrôle des précurseurs de drogues dans la Communauté.

De plus, les services de la Commission et les États membres participent activement et apportent leur soutien aux initiatives opérationnelles spécifiques menées par l’ONU pour aborder des défis particuliers concernant le détournement et le trafic de précurseurs de drogues. En particulier, l’UE participe au projet «PRISM», qui traite du détournement des précurseurs de drogues synthétiques, et au projet «COHÉSION», qui traite du détournement et du trafic des précurseurs de l’héroïne et de la cocaïne, ainsi qu’aux opérations spécifiques en rapport avec ces projets.

ÉVALUATION

Actions entreprises par la Commission pour évaluer la mise en œuvre et le fonctionnement de la législation communautaire

En 2007, la Commission a demandé aux États membres de l’informer des mesures nationales qu’ils avaient adoptées comme prévu dans la législation communautaire (c’est-à-dire des mesures leur permettant de remplir leurs obligations de contrôle et de surveillance, ainsi que des règles en matière de sanctions applicables pour les infractions aux dispositions des règlements communautaires). La plupart avaient adopté des mesures adéquates, à l’exception de huit États membres contre lesquels la Commission a engagé des procédures en infraction. Dans le courant de 2008, la plupart des États membres concernés ont adopté ou pris des dispositions pour adopter les mesures requises et, par conséquent, toutes les mesures nationales requises devraient être adoptées avant la fin de 2009.

Afin d’évaluer le fonctionnement de la législation communautaire, un groupe de travail d’experts des autorités nationales compétentes a été mis en place pour assister les services de la Commission. En outre, la Commission a mandaté un contractant externe pour recueillir des informations auprès de toutes les parties prenantes (autorités compétentes et opérateurs industriels) par le biais de questionnaires, y compris des données quantitatives, quand elles existent, ainsi que pour analyser l’impact des retards causés par les exigences législatives imposées en ce qui concerne le commerce des précurseurs de drogues et pour collecter des propositions d’amélioration du système en place.

Tous les États membres ont répondu entièrement ou en partie pour les années 2006 et 2007. Des interviews détaillées ont été menées avec les autorités compétentes d’un échantillon d’États membres. Un total de 72 sociétés et 8 associations sectorielles (de dix État membres différents) ont fourni des réponses à l’enquête sectorielle. Cinq d’entre elles représentaient plus de 90 % des réponses. Le rapport sur cette étude a été finalisé à la fin de janvier 2009. Il contient une présentation détaillée des résultats des enquêtes. Il résume les principales constatations et propose des recommandations concernant les faiblesses identifiées. En raison des informations sensibles contenues dans le rapport, celui-ci n’est pas accessible au public. En dépit des efforts considérables du contractant, les données collectées ont été limitées et ne peuvent pas être considérées comme entièrement représentatives. Il s’est avéré particulièrement difficile de collecter des données quantifiées sur les coûts consentis par les autorités compétentes ou par les opérateurs pour mettre en œuvre les exigences juridiques.

Comme le règlement (CE) n° 111/2005 insiste beaucoup sur les contrôles douaniers, une nouvelle étude a été menée en 2007 pour examiner si le contrôle des précurseurs de drogues est une priorité pour les douanes, si ces dernières disposent des moyens nécessaires pour effectuer les contrôles et si les contrôles sont effectivement effectués.

Conclusions de l’évaluation

Principales tendances en matière de détournement et tentative de détournement

De manière générale, le cadre juridique communautaire pour le contrôle du commerce des précurseurs de drogues semble prévoir des mesures proportionnées pour prévenir le détournement des précurseurs de drogues pour la fabrication de drogues illicites. Depuis 2005, les saisies déclarées et les expéditions interceptées de substances classifiées et non classifiées révèlent un accroissement général du nombre de saisies et d’expéditions interceptées. De plus, des enquêtes visant à retrouver les sources des produits saisis permettent d’estimer a posteriori les quantités de substances les plus probablement détournées. Ces données montrent, d’une part, que le système fonctionne bien mais également, d’autre part, que les trafiquants cherchent continuellement à détourner des précurseurs de drogues de leur commerce légitime. Il semble encore plus profitable pour les trafiquants d’utiliser le détournement des circuits légitimes pour accéder aux précurseurs de drogues. Même si l’on manque de preuves quantitatives que le contrôle du commerce légal réduit effectivement de manière générale le détournement et le trafic de précurseurs de drogues, il est clair que le système de contrôle en vigueur érige des barrières importantes à l’accès des trafiquants aux précurseurs de drogues et réduit globalement la disponibilité de précurseurs de drogues pour la fabrication de drogues illicites. Les tentatives de détournement semblent actuellement se focaliser sur un nombre limité de substances – tant classifiées que non classifiées:

L’ anhydride acétique , qui est un précurseur essentiel pour la production d’héroïne, reste la cible des trafiquants dans certains États membres, comme en témoignent les données des saisies et des expéditions interceptées. L’assistance bilatérale et régionale et la coopération entre les autorités compétentes concernées ont permis de prévenir le détournement et/ou de saisir, en 2008, approximativement 220 tonnes d’anhydride acétique, ce qui représente plus de 15 % des quantités d’anhydride acétique estimées nécessaires pour la fabrication illicite d’héroïne en Afghanistan.

Les autorités douanières de l’UE ont accru leur vigilance dans le contrôle du commerce de l’ éphédrine et de la pseudo-éphédrine en vrac ou contenue dans des préparations pharmaceutiques/médicaments, transitant principalement par l’UE, mais occasionnellement également exportées vers des pays tiers où a lieu la production illicite de méthamphétamines. Ces produits ont fait l’objet d’une importante augmentation des saisies, principalement de préparations pharmaceutiques contenant de la pseudo-éphédrine. Depuis 2005, des expéditions suspectes d’approximativement 86 tonnes d’éphédrine ou de pseudo-éphédrine en vrac ou en comprimés ont été découvertes, saisies ou interceptées, empêchant ainsi la production de jusqu’à 65 tonnes de méthamphétamines (en fonction des méthodes de synthèse employées) ayant une valeur estimée de revente en rue de 9,7 milliards de dollars.

La gamma-butyrolactone (GBL) est une substance non classifiée incluse dans le programme de surveillance volontaire de la Communauté. Les données disponibles montrent que la coopération avec l’industrie à travers la surveillance et la notification volontaires fonctionne bien mais également que les trafiquants continuent d’être intéressés par le détournement de GBL — ainsi que d’autres substances chimiques soumises à un contrôle moins strict. En 2008, des tentatives de détournement ou saisies de 2170 litres de GBL ont été enregistrées.

Depuis 2005, il n’y a pas d’indication que la Communauté soit visée pour le détournement d’autres précurseurs importants. Par exemple, il n’y a pas eu de saisies importantes ou d’expéditions interceptées pour le permanganate de potassium, un précurseur essentiel pour la cocaïne.

Atouts et faiblesses de la législation

Il convient de noter que la période prévue dans les règlements pour mener l’évaluation de leur fonctionnement était plutôt courte pour pouvoir révéler des effets clairs. Le recul a d’autant plus manqué que de nombreux États membres ont tardé à adopter toutes les mesures nécessaires pour se conformer entièrement à leurs obligations au titre des règlements.

Cependant, toutes les actions élaborées depuis 2005 ont sans aucun doute contribué à la mise en œuvre harmonisée et au bon fonctionnement de la législation communautaire. De plus, l’adoption progressive par les États membres des mesures nationales et pouvoirs prévus dans la législation communautaire a considérablement renforcé leur capacité d’agir en cas d’infractions à la législation communautaire.

Globalement, les dispositions du règlement (CE) n° 273/2004, du règlement (CE) n° 111/2005 et des modalités d’exécution contenues dans le règlement (CE) n° 1277/2005 fonctionnent bien et atteignent l’objectif poursuivi, c’est-à-dire la prévention du détournement sans créer d’obstacles superflus pour les activités commerciales légitimes concernant les précurseurs de drogues classifiés. Le contrôle et la surveillance se focalisent sur les opérateurs plutôt que sur chaque transaction. La répartition des substances classifiées en trois catégories s’est avérée un moyen efficace d’appliquer une approche modulée, en fonction de la sensibilité des substances et des quantités échangées légitimement.

Le principe fondamental entériné dans la législation relative au commerce intracommunautaire et au commerce entre la Communauté et les pays tiers — la coopération entre les opérateurs économiques et les autorités compétentes — fonctionne bien. Cette coopération, bien que mise en œuvre et utilisée différemment par les États membres, facilite les notifications obligatoires ou volontaires de transactions ou commandes suspectes et prévient, à un stade précoce, le détournement de substances classifiées et non classifiées tout en permettant le fonctionnement fluide du commerce légal. C’est un outil flexible, rapide et efficace pour répondre aux tendances en permanente évolution du trafic et à l’intérêt croissant des trafiquants pour des substances moins contrôlées. Les lignes directrices de l’UE à l’intention des opérateurs sur le contrôle des précurseurs de drogues et le nouveau cours sur le contrôle de précurseurs de drogues à l’intention des opérateurs économiques complètent utilement la législation.

La mise en œuvre et le fonctionnement du système commun de licence introduit pour le commerce intracommunautaire et pour le commerce entre la Communauté et les pays tiers à l’intention des opérateurs traitant de précurseurs de catégorie 1 (les substances les plus sensibles) s’avèrent efficaces, tant du point de vue des autorités compétentes que de celui de l’industrie.

L’exigence d’enregistrement pour les opérateurs traitant les précurseurs un peu moins sensibles de la catégorie 2 en ce qui concerne le commerce intracommunautaire et le commerce entre la Communauté et les pays tiers apparaît suffisante pour permettre un contrôle adéquat par les autorités compétentes et la prévention du détournement de l’important volume du commerce intracommunautaire de ces substances. En fait, les utilisateurs finals des substances de la catégorie 2, qui ne mettent pas les substances sur le marché, ne sont tenus ni de s’enregistrer, ni de déclarer les quantités qu’ils achètent pour leur propre usage final. Ils sont donc difficilement connus des autorités compétentes. Il est également très difficile pour les fabricants ou grossistes des substances de la catégorie 2 d’exercer leur obligation de contrôler la légitimité de leurs clients et de l’usage final déclaré de la substance et, par conséquent, de notifier comme il se doit toute transaction suspecte aux autorités compétentes. Le contrôle par les autorités compétentes de la légitimité des opérateurs est difficile et d’autant plus lorsque les fabricants/grossistes et les utilisateurs finals de substances de la catégorie 2 sont établis dans des États membres différents et lorsque la chaîne commerciale implique plus de deux entités basées dans plus d’un État membre. Ces problèmes ont été mis en évidence en particulier pour l’anhydride acétique, un précurseur essentiel pour la fabrication illicite d’héroïne.

L’évaluation a permis de déceler une interprétation différente de certaines dispositions législatives sur laquelle il y a lieu de se pencher afin de faciliter leur mise en œuvre harmonisée correcte dans la Communauté. Cela concerne, en particulier, les champs à remplir obligatoirement dans la déclaration des clients et les critères pour considérer les produits contenant des substances classifiées comme des mélanges, l’application des seuils existants pour l’exemption de l’enregistrement des mélanges contenant des substances de la catégorie 2 conformément à l’article 6 du règlement (CE) n° 273/2004, par rapport à la formulation de l’article 14 du règlement (CE) n° 1277/2005.

Les dispositions concernant la fréquence de déclaration par l’opérateur aux autorités compétentes ne fournissent pas une base suffisante pour exécuter les devoirs de contrôle et de surveillance. Un aperçu des mouvements du commerce légal constitue un instrument important pour détecter les expéditions suspectes.

Les instruments régissant le contrôle des exportations et importations permettent aux autorités compétentes d’effectuer des vérifications préalables des finalités licites d’une transaction et, par conséquent, fournissent le moyen de prévenir le détournement à un stade précoce. L’utilisation du système de notification préalablement à l’exportation permet au pays tiers qui en fait la demande de vérifier la transaction envisagée et d’informer ainsi les autorités compétentes des États membres si la transaction est licite ou non.

L’insistance sur les procédures et contrôles douaniers s’est avérée très utile. La Communauté est de plus en plus confrontée à des expéditions détournées des canaux de distribution légaux avant d’entrer sur le territoire douanier de la Communauté. Cette évolution a renforcé l’attention des douanes et le contrôle frontalier. Les dispositions concernant le contrôle du transit ou des transbordements semblent avoir, dans une certaine mesure, accru la possibilité de vérifier les finalités licites de telles expéditions mais elles ne permettent cependant pas aux autorités compétentes de vérifier les finalités licites dans chaque cas.

L’étude sur les contrôles douaniers des précurseurs de drogues en 2007 a identifié des faiblesses concernant la détection d’expéditions suspectes pour lesquelles de fausses déclarations de douane sont confectionnées. L’évaluation a révélé des poches d’excellence mais elle a également montré qu’en général, d’importantes améliorations restaient à faire. En particulier, le rapport a révélé l’absence de priorité accordée à la législation sur les précurseurs de drogues par les administrations des douanes, le manque de sensibilisation et d’expertise ainsi que l’insuffisance des ressources (par exemple, pour l’équipement de laboratoire).

Les préparations pharmaceutiques/médicaments à usage humain contenant des précurseurs de drogues sont actuellement exclus du champ d’application de la législation sur les précurseurs de drogues. La fabrication, l’importation et la vente en gros des médicaments, y compris ceux destinés à l’exportation, sont soumises à une autorisation, à des obligations spécifiques et à des inspections régulières en vertu de la législation communautaire concernant les produits pharmaceutiques (directive 83/2001/CE). Ces activités sont donc considérées comme soumises à un contrôle systématique suffisant par les autorités compétentes des États membres. Ces fabricants, importateurs et grossistes ne sont toutefois pas soumis aux exigences spécifiques de notification préalable de la législation sur les précurseurs de drogues lorsqu’ils exportent des médicaments qui contiennent des précurseurs de drogues. Cet état de fait a conduit à une situation où dans certains États membres, des exportations et les transits/transbordements de préparations pharmaceutiques/médicaments contenant des précurseurs de drogues — en particulier l’éphédrine ou la pseudo-éphédrine n’ont pas été interceptés ou saisis même s’il était très probable que ces produits seraient détournés et serviraient à la fabrication illicite de drogues.

Il semble exister d’autres faiblesses mineures liées à la législation sur les précurseurs en ce qui concerne le commerce extérieur. Celles-ci incluent en particulier le manque de flexibilité pour les autorités compétentes en ce qui concerne la période requise pour attendre la réponse aux notifications préalables à l’exportation, l’absence de procédures d’autorisation simplifiée pour les expéditions répétitives entre opérateurs bien connus dans la Communauté et dans les pays de l’AELE, et la nécessité de simplifier encore davantage les procédures d’autorisation dans l’environnement électronique des douanes.

RECOMMANDATIONS D’AMÉLIORATIONS

Amélioration de la mise en œuvre harmonisée de la législation actuelle

En tant que première des mesures d’amélioration à apporter, le partage des meilleures pratiques entre les autorités des États membres, y compris les douanes, et la mise en œuvre pratique d’un partenariat réel entre les autorités et les opérateurs économiques devraient être encore davantage encouragés et facilités. L’échange des meilleures pratiques à travers des ateliers, séminaires, tables rondes et exercices de pistage sur des thèmes spécifiques et/ou des précurseurs de drogues spécifiques peut être facilité au niveau communautaire, afin d’apprendre immédiatement des meilleures pratiques mises en place dans certains États membres et, in fine, de renforcer l’ensemble des systèmes de contrôle.

L’interprétation harmonisée de certaines dispositions législatives actuelles, par exemple l’application des seuils d’enregistrement des mélanges contenant des substances classifiées – en particulier l’interprétation de l’article 6 du règlement (CE) n° 273/2004, par rapport à la formulation de l’article 14 du règlement (CE) n° 1277/2005, ou des critères uniformes pour les mélanges contenant des précurseurs de drogues, peuvent être réalisés en actualisant et en complétant le guide «Questions & Réponses».

Cela renforcera la mise en œuvre des règles communautaires tout en évitant que les trafiquants ne concentrent leurs tentatives de détournement sur les États membres dans lesquels les règles communautaires semblent être moins strictement appliquées et/ou les sanctions perçues comme faibles.

Amélioration des déclarations

Les obligations de déclaration telles que définies à l’article 19 du règlement (CE) n° 1277/2005 devraient être revues afin d’obtenir une collection d’informations plus précises et plus fraîches sur les notifications des opérateurs. Cela peut être réalisé en augmentant la fréquence de déclaration d’annuelle à semestrielle voire trimestrielle, tout en facilitant cette déclaration en utilisant des moyens électroniques sécurisés modernes d’échange d’informations, y compris, le cas échéant, la constitution d’une base de données sécurisée européenne.

Modification de certaines exigences pour les substances de la catégorie 2

Compte tenu des faiblesses identifiées, il semble nécessaire de renforcer les contrôles pour toutes les substances de la catégorie 2 ou spécifiquement pour l’anhydride acétique (principal précurseur dans la production d’héroïne) de manière à assurer que les opérateurs possédant ou vendant des substances de la catégorie 2 – ou spécifiquement de l’anhydride acétique – fassent l’objet de contrôles adéquats afin de décourager les tentatives de détournement. Cela peut se faire de différentes manières:

- modifier le règlement (CE) n° 273/2004 afin d’exiger l’enregistrement pour les utilisateurs finals qui possèdent des substances de la catégorie 2 pour leur propre usage, par exemple en modifiant la définition d'«opérateur» ou la définition de «mise sur le marché» ou en modifiant l’article 3, paragraphe 6, établissant le système d’enregistrement;

- modifier le règlement (CE) n° 1277/2005 afin d’introduire des conditions et procédures d’enregistrement communes;

- modifier l’annexe I du règlement (CE) n° 273/2004 et, par conséquent, l’annexe du règlement n° 111/2005 afin de reclasser l’anhydride acétique de la catégorie 2 à la catégorie 1.

Mise en place de contrôles appropriés pour les préparations pharmaceutiques/médicaments contenant de l’éphédrine ou de la pseudo-éphédrine

Sans reproduire les dispositions administratives applicables aux fabricants, importateurs et grossistes de médicaments, il convient d’envisager de renforcer les dispositions en matière de contrôle des préparations pharmaceutiques/médicaments contenant de l’éphédrine ou de la pseudo-éphédrine transbordée ou transitant dans l’UE. En ce qui concerne les exportations de médicaments, la législation sur les produits pharmaceutiques comprend des dispositions dans ce sens. Il convient d’engager des réflexions sur l’opportunité de prendre des dispositions pratiques harmonisées spécifiques concernant l’exportation de médicaments contenant de l’éphédrine ou de la pseudo-éphédrine et leur supervision par les autorités compétentes en matière de médicament ou d’inclure dans la législation relative aux précurseurs de drogues une possibilité d’intercepter les exportations de préparations pharmaceutiques/médicaments lorsqu’il existe des motifs raisonnables de suspecter que les substances sont destinées à la fabrication illicite de drogues.

Amélioration et ajustement des exigences procédurales par rapport au risque de détournement

Afin de parvenir à un niveau de contrôle proportionné au risque de détournement, la procédure concernant les notifications préalables à l’exportation devrait être adaptée pour permettre aux autorités compétentes d’agir au cas par cas, des procédures d’autorisation simplifiées pour les expéditions répétitives entre opérateurs bien connus dans la Communauté et dans les pays de l’AELE devraient être introduites et les procédures d’autorisation dans l’environnement électronique des douanes devraient être encore davantage rationalisées.

PROCHAINES ÉTAPES

Les faiblesses identifiées peuvent être abordées par différents moyens, dont certains nécessitent des modifications de la législation communautaire. Toute option retenue devrait être attentivement examinée, notamment en ce qui concerne son impact sur les opérateurs économiques qui pratiquent légalement le commerce de ces substances à des fins légitimes et leur efficacité à prévenir les détournements pour la fabrication de drogues illicites.

Étant donné que la législation actuelle n’est pleinement opérationnelle que depuis peu, la Commission entreprendra principalement de soutenir, organiser et faciliter les mesures visant une meilleure mise en œuvre afin de bénéficier immédiatement des meilleures pratiques établies.

La Commission continuera cependant également à collecter les informations nécessaires à l’identification des meilleures options pour remédier aux faiblesses potentielles identifiées dans la législation et pour évaluer les impacts des options retenues pour les autorités compétentes et les opérateurs économiques.

[1] JO L47 du 18.2.2004, p. 1

[2] JO L 22 du 26.1.2005, p. 1

[3] JO L 202 du 3.8.2005, p. 7

[4] http://ec.europa.eu/enterprise/chemicals/legislation/precursors/index_en.htm

[5] COM (2008) 567/4

[6] JO C 326 du 20.12.2008, p. 7 – 25

[7] JO L 154/25-31

[8] JO L 324 du 30.12.95, p. l

[9] JO L 336 du 11.12.1998, p. 46

[10] JO L 77 du 19.3.1997, p. 22

[11] JO L 164 du 21.6.1997, p. 22

[12] JO L 64 du 7.3.2003, p. 28

[13] JO L 56 du 28.2.2009, p. 6

[14] Résolution 50/10, p. 42 du rapport de la 50e session de la Commission des stupéfiants (E/CN.7/2007/16/Corr.1) http://www.unodc.org/unodc/en/commissions/CND/session/50.html