30.8.2008   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 224/50


Avis du Comité économique et social européen sur les propositions suivantes

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 2002/21/CE relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques, 2002/19/CE relative à l'accès aux réseaux et services de communications électroniques ainsi qu'à leur interconnexion, et 2002/20/CE relative à l'autorisation des réseaux et services de communications électroniques»

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2002/22/CE concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques, la directive 2002/58/CE concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques et le règlement (CE) no 2006/2004 relatif à la coopération en matière de protection des consommateurs»

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant une Autorité européenne du marché des communications électroniques»

COM(2007) 697 final — 2007/0247 (COD)

COM(2007) 698 final — 2007/0248 (COD)

COM(2007) 699 final — 2007/0249 (COD)

(2008/C 224/11)

Le 10 décembre 2007, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur les propositions suivantes:

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 2002/21/CE relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques, 2002/19/CE relative à l'accès aux réseaux et services de communications électroniques ainsi qu'à leur interconnexion, et 2002/20/CE relative à l'autorisation des réseaux et services de communications électroniques»

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2002/22/CE concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques, la directive 2002/58/CE concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques et le règlement (CE) no 2006/2004 relatif à la coopération en matière de protection des consommateurs»

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant une Autorité européenne du marché des communications électroniques»

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 mai 2008 (rapporteur: M. HERNÁNDEZ BATALLER).

Lors de sa 445e session plénière des 28 et 29 mai 2008 (séance du 29 mai 2008), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 80 voix pour et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE partage les objectifs de la Commission de faire en sorte que les utilisateurs retirent un bénéfice maximal du marché des communications électroniques, de veiller à ce que la concurrence ne soit pas faussée ni entravée, d'encourager des investissements efficaces en matière d'infrastructures, et de soutenir l'innovation, en encourageant l'utilisation et la gestion efficaces des radiofréquences et des ressources de numérotation.

1.2

Étant donné que le secteur des communications électroniques se caractérise par un niveau élevé d'innovation technologique et des marchés extrêmement dynamiques, le CESE considère comme satisfaisant le modèle réglementaire du cadre des communications électroniques et les modifications proposées, qui reposent sur:

1.2.1

le principe de la réglementation décentralisée dans les États membres qui confère aux autorités nationales la responsabilité de superviser les marchés en fonction d'un ensemble commun de principes et de procédures. Par ailleurs, cela renforce l'indépendance des autorités de réglementation nationales (ARN), leur gestion ordinaire et leur marge d'appréciation, garantissant qu'elles disposent de budgets propres, de ressources humaines suffisantes et de pouvoirs coercitifs accrus pour pouvoir appliquer plus efficacement le cadre réglementaire;

1.2.2

la consolidation du marché intérieur, en assignant des compétences déterminées à la Commission pour les marchés transnationaux qui dépassent le cadre d'un État membre;

1.2.3

l'amélioration de la cohérence législative, en modernisant certaines dispositions pour les adapter à l'évolution des technologies et des marchés, en supprimant les dispositions obsolètes, redondantes ou n'ayant plus d'objet;

1.2.4

la définition d'une stratégie de gestion efficace du spectre, afin d'atteindre un espace européen unique de l'information;

1.2.5

la séparation fonctionnelle, adoptée par les ARN, dans des cas exceptionnels, après approbation de la Commission, pour garantir la fourniture de produits d'accès parfaitement équivalents à tous les opérateurs en aval, y compris aux divisions en aval du propre opérateur verticalement intégré;

1.2.6

la garantie d'une utilisation fiable et sûre des communications électroniques à travers les réseaux de communications électroniques. Pour cela, l'autorité devra contribuer à l'harmonisation des mesures techniques et organisationnelles appropriées en matière de sécurité en donnant un avis d'expert;

1.2.7

le renforcement des droits des consommateurs en ce qui concerne certains aspects des contrats, la transparence et la publication de l'information, la disponibilité des services, les services d'information et d'urgence, la conservation des numéros. Malgré cela, les propositions avancées ne permettraient pas d'atteindre le niveau élevé de protection des consommateurs prévu dans le Traité, dans la mesure où elles ne traitent pas d'autres aspects tels que la réglementation des services à la clientèle, les niveaux minimums de qualité, les clauses de pénalisation et les cas de cotraitance de services et de terminaux;

1.2.8

le renforcement de la protection de l'intimité et de la vie privée, même si toutes les propositions ne sont pas suffisamment ambitieuses, comme dans le cas de la protection face aux «spam». Selon le CESE, il faudrait partir du principe du consentement exprès et préalable du consommateur à recevoir des communications commerciales;

1.3

le CESE considère que l'idée de faire entrer les équipements terminaux dans le champ d'application du cadre réglementaire est très positive car cela facilitera l'accès des utilisateurs handicapés aux communications électroniques. De même, il salue l'instauration, entre autres, de mesures contraignantes concernant le service universel visant à faciliter l'accès des personnes handicapées aux services téléphoniques accessibles au public, y compris aux services d'urgence et de renseignements téléphoniques ainsi qu'aux annuaires, aux mêmes conditions que les autres utilisateurs finals;

1.4

la simplification et la réduction des frais administratif sont également importantes et l'assouplissement des tâches de gestion du spectre facilitera les procédures administratives et l'utilisation du spectre par les opérateurs. Le CESE considère qu'il est important de prévoir des restrictions limitées sur le plan technique mais aussi des restrictions plus larges pour atteindre des objectifs d'intérêt général. Les États membres devront imposer les restrictions en question, concernant notamment la diversité culturelle et linguistique, la liberté d'expression et le pluralisme des médias, la promotion de la cohésion sociale et territoriale, la sécurité de la vie humaine, en tenant compte des besoins techniques, sociaux, culturels et politiques de tous les États membres, conformément à la législation nationale et au droit communautaire;

1.5

la création d'une autorité européenne du marché des communications électroniques, indépendante de la Commission, qui renforce les pouvoirs des ARN, peut s'avérer positive dans la mesure où elle offrirait les moyens nécessaires pour établir une association efficace entre la Commission et les autorités de régulation nationales, sur des sujets qui exigent une cohérence au niveau européen, comme les définitions des marchés, les analyses et solutions concernant ces derniers, l'harmonisation de l'utilisation du spectre radioélectrique ou la définition des marchés transnationaux.

2.   Introduction

2.1

En 2002 a été adoptée une réforme du marché des télécommunications qui s'est traduite par l'établissement du cadre réglementaire des communications électroniques (recouvrant à la fois l'ensemble des réseaux satellitaires et terrestres, les communications fixes et sans fil), constitué de la directive-cadre et des directives régissant l'accès, l'autorisation, le service universel, ainsi que le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur.

2.2

Ce cadre réglementaire de l'UE applicable aux réseaux et services de communications électroniques a été instauré pour faciliter l'accès des nouveaux opérateurs aux infrastructures existantes, encourager les investissements dans d'autres infrastructures et offrir un choix plus vaste et des prix moins élevés aux consommateurs.

2.3

Le modèle réglementaire du cadre actuel repose sur le principe de la réglementation décentralisée dans les États membres qui confère aux autorités nationales la responsabilité de superviser les marchés en fonction d'un ensemble commun de principes et de procédures.

2.4

Le cadre réglementaire prévoit un niveau minimum d'harmonisation et laisse aux autorités de réglementation nationales (désignées ci-après par le sigle ARN) ou aux États membres le soin de définir les mesures d'application.

2.5

La directive-cadre vise à limiter progressivement la réglementation sectorielle ex ante au fur et à mesure du développement de la concurrence sur le marché, ce qui devrait intervenir par le biais d'une recommandation de la Commission identifiant les marchés de produits et de services où une réglementation ex ante pourrait se justifier.

2.5.1

L'objectif de toute action réglementaire ex ante est de servir l'intérêt des consommateurs, en veillant à ce que les marchés de détail soient compétitifs. La définition des «marchés pertinents» peut varier au fil du temps, à mesure que les caractéristiques des produits et des services évoluent et que les possibilités de substitution du côté de la demande et de l'offre se modifient, comme indiqué dans la recommandation de la Commission du 17 décembre 2007 (1).

3.   Les propositions de la Commission

3.1

La Commission lance une large refonte de la réglementation européenne actuellement applicable aux communications électroniques (appelée ci-après «cadre réglementaire») en présentant simultanément:

deux propositions de directive; l'une modifiant la directive-cadre, la directive Accès et la directive Autorisation; l'autre modifiant la directive sur le service universel et celle sur la protection de la vie privée;

une proposition de règlement instituant une Autorité européenne du marché des communications électroniques (appelée ci-après «l'Autorité»).

3.2

En bref, ces propositions ont pour objet de définir le cadre réglementaire européen «modifié» des communications électroniques en l'adaptant aux demandes des autorités de réglementation nationales ainsi que des opérateurs et des consommateurs de biens et de services.

3.3

Il s'agit d'établir un cadre réglementaire «modifié» cohérent pour l'économie numérique, qui tire profit des avantages découlant du développement du marché intérieur. Les propositions concernent les éléments suivants:

3.4

S'agissant de la proposition modifiant la directive-cadre et les directives Autorisation et Accès:

a)

en ce qui concerne la gestion du spectre radioélectrique, l'on veille à ce que les États membres consultent les parties intéressées lorsqu'ils envisagent d'introduire des dérogations au principe de neutralité technologique et à l'égard des services, même s'il s'agit d'objectifs d'intérêt général;

b)

elle améliore la cohérence du cadre règlementaire en rationnalisant plusieurs éléments de la procédure d'analyse de marché et en autorisant la Commission à reprendre une analyse d'un marché si une ARN a pris un retard important dans l'exercice de ses fonctions;

c)

elle accroît la sécurité et l'intégrité des réseaux en renforçant les obligations existantes et en étendant le champ des exigences d'intégrité au-delà des réseaux de téléphone pour couvrir les réseaux mobiles et internet;

d)

elle renforce les garanties juridiques des intéressés en définissant différents critères pour l'indépendance des ARN et en reconnaissant le droit de recours contre leurs décisions et la possibilité de suspendre les mesures qu'elles adoptent afin d'éviter, en cas de nécessité impérieuse, un préjudice grave et irréparable;

e)

elle tient compte des besoins des différentes catégories d'utilisateurs vulnérables en dotant les équipements terminaux d'exigences techniques qui facilitent l'accès des utilisateurs handicapés et en actualisant les objectifs des ARN en ce qui concerne les personnes âgées et les personnes ayant des besoins sociaux;

f)

elle permet aux ARN d'imposer la séparation fonctionnelle avec l'accord préalable de la Commission;

g)

elle établit une procédure de sélection commune;

h)

enfin, elle renforce les pouvoirs d'exécution des ARN qui disposent à leur tour de la faculté d'assortir les autorisations générales de conditions particulières pour garantir l'accessibilité aux utilisateurs handicapés, le respect des droits d'auteur et de propriété intellectuelle, ainsi que les communications des pouvoirs publics destinées au public en cas de danger imminent.

3.5

La proposition modifiant les textes afférant au régime du service universel, aux droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques, au traitement des données à caractère personnel, à la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques et à la coopération en matière de protection des consommateurs repose sur les progrès réalisés dans l'approche législative de la Commission dans le secteur.

3.5.1

En ce sens, elle reconnaît que la concurrence seule n'est pas suffisante pour satisfaire les besoins de tous les citoyens et protéger les droits des utilisateurs; des dispositions spécifiques sont donc prévues afin de préserver le service universel et les droits des utilisateurs, ainsi que la protection des données à caractère personnel.

3.5.2

Il est notamment question d'améliorer la transparence tarifaire et la publication d'informations à l'intention des utilisateurs finals, en imposant aux opérateurs l'obligation de publier des informations actualisées comparables, adéquates et aisément accessibles et en accordant aux ARN le pouvoir d'exiger ces obligations des opérateurs.

3.5.3

En ce qui concerne la portabilité du numéro, des mesures sont prévues pour permettre aux consommateurs de changer facilement de fournisseur (le délai maximal pour que ce changement soit effectif est fixé à une journée et les ARN sont dotées du pouvoir d'éviter les pratiques dissuasives des fournisseurs); la proposition prévoit un renforcement de l'obligation de transmettre les informations sur la localisation de l'appelant dans le contexte des services d'urgence via différentes mesures, notamment l'obligation de transmettre les informations aux autorités chargées de gérer les urgences, etc.

3.5.4

La possibilité donnée aux États membres de prendre des mesures spécifiques en faveur des utilisateurs handicapés est remplacée par l'obligation explicite d'agir en ce sens, notamment en permettant aux ARN de demander aux opérateurs de publier des informations à destination des utilisateurs handicapés.

3.5.5

Par ailleurs, cette modification donne aux ARN le pouvoir d'empêcher une dégradation de la qualité des services en fixant des niveaux de qualité minimaux pour les services de transmission par réseau destinés aux utilisateurs finals et permet aux ARN de surveiller les tarifs de détail si aucune entreprise n'a été désignée comme fournisseur de service universel.

3.5.6

Cette modification garantit également que les utilisateurs finals sont avertis des violations de la sécurité qui entraînent la perte ou compromettent d'une autre manière leurs données à caractère personnel et qu'ils sont informés des précautions à prendre afin de minimiser les dégâts.

3.5.7

Cette modification garantit que l'utilisation d'espion-giciels et d'autres logiciels malveillants reste interdite par le droit communautaire, quelle que soit la méthode utilisée pour son installation dans l'équipement de l'utilisateur, et renforce la lutte contre les communications commerciales non sollicitées en permettant aux fournisseurs de services internet de saisir la justice à l'encontre des polluposteurs.

3.6

Enfin, mentionnons la proposition de création de «l'Autorité», responsable devant le Parlement européen, qui comprendra un conseil des régulateurs réunissant les dirigeants des ARN de tous les États membres de l'UE et remplacera le Groupe des régulateurs européens (ERG) (2).

3.6.1

«L'Autorité» conseillera la Commission pour l'adoption de certaines décisions, jouera le rôle de centre d'expertise sur les réseaux et les services de communications électroniques au niveau de l'UE et assumera les fonctions de l'Agence européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l'information (AESRI/ENISA).

4.   Observations générales

4.1

Le CESE salue les propositions de la Commission dans la mesure où elles visent à apporter des solutions aux besoins en matière de réglementation et de gestion du marché paneuropéen des communications électroniques.

4.1.1

Il approuve l'objectif de la Commission d'ouvrir davantage les marchés des télécommunications à la concurrence et d'encourager les investissements dans les réseaux à haut débit (y compris toutes les technologies fixes, mobiles et satellitaires) (3) ainsi que l'objectif d'assurer davantage l'internet de l'avenir, c'est-à-dire l'internet sémantique et des objets, notamment dans le contexte de la numérisation des services audiovisuels et une gestion optimale du spectre dans le marché intérieur. Il y va de l'intérêt commun des consommateurs et des entreprises qui doivent accéder aux réseaux et services de télécommunications de haute qualité technique («performants»).

4.1.2

Le CESE note que le cadre réglementaire en vigueur dans le secteur des télécommunications a permis:

d'accomplir des progrès substantiels dans la mise en place de marchés plus ouverts et dynamiques, comme le relève la Commission dans son 12 (1) rapport sur la mise en œuvre de la réglementation en matière de télécommunications;

de lutter contre l'existence de fortes inégalités entre les opérateurs et contre les avantages dont bénéficiaient les anciens monopoles d'État.

4.2

Il est également positif de constater que la réglementation prévue dans les propositions est étendue au domaine des communications électroniques et, par conséquent, à tous les réseaux de transmission et de prestation de services associés.

4.3

Outre l'amélioration des aspects purement techniques et de gestion que nous avons déjà mentionnée, le CESE salue les nombreuses dispositions visant notamment à renforcer les droits des utilisateurs des services de communications électroniques ainsi que les garanties procédurales et administratives des opérateurs permettant leur mise en œuvre effective sur le plan national (droit d'audition des personnes concernées, obligation de motivation des décisions, mesures de précaution et droit de recours). L'introduction de ces garanties est conforme au «Droit à une bonne administration», visé à l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux.

4.4

Le CESE soutient tout particulièrement les demandes formulées dans de précédents avis et reprises dans les propositions, en ce qui concerne:

l'obligation pour les États d'adopter des mesures spécifiques en faveur des utilisateurs handicapés (4), pour atteindre les objectifs de la Charte européenne des droits fondamentaux et de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées.

les principes généraux de gestion du spectre, qui est d'intérêt public et doit être géré dans une perspective économique, sociale et environnementale, outre le fait que la neutralité par rapport à la technologie et aux services, doit permettre la diversité culturelle et linguistique, la liberté d'expression et la pluralité des médias et tenir compte des besoins techniques, sociaux, culturels et politiques de tous les États membres (5);

4.4.1

Afin de garantir la diversité culturelle et linguistique, il est important que les signes diacritiques des diverses langues et les caractères cyrilliques, grecs et autres soient écrits et non déformés lors de la transmission de textes électroniques; en outre, l'on ne devrait pas autoriser les surcoûts pour l'utilisation de lettres dotées de signes diacritiques dans les messages électroniques (SMS).

4.5

Le CESE soutient également les propositions de la Commission qui abordent les aspects suivants:

a)

la simplification des procédures d'analyse de marché qui permet d'alléger la charge administrative des ARN et de réduire les coûts administratifs des opérateurs;

b)

le renforcement de la sécurité et de l'intégrité des réseaux pour garantir un usage fiable des communications électroniques;

c)

le renforcement de l'indépendance des ARN, en limitant l'influence éventuelle d'autres organismes publics sur la gestion quotidienne de l'ARN, et en veillant à ce qu'elle dispose de son propre budget distinct et de ressources humaines suffisantes.

5.   Observations particulières

5.1

Les propositions de la Commission supposant d'une part l'adoption de «mesures de rapprochement» des législations nationales en matière de communications électroniques et, d'autre part, la création d'un nouvel organisme supranational, le CESE tient à souligner que ces propositions reposent exclusivement sur l'article 95 du traité CE.

5.1.1

Bien entendu, cette disposition peut être une base juridique adéquate et suffisante pour justifier la réalisation des objectifs recherchés (6) mais, conformément à la jurisprudence de la CJCE, la Commission devra veiller à ce que les mesures adoptées à cette fin aient un véritable impact sur les ordres juridiques nationaux (en les modifiant) et réglementent de façon exhaustive, à l'échelon supranational, tous les aspects renforçant la position des consommateurs et utilisateurs des communications électroniques ainsi que ceux relatifs aux garanties juridiques et procédurales instaurées dans les propositions (7).

5.1.2

En résumé, l'adoption du futur cadre réglementaire supranational dans ce domaine ne doit pas se contenter d'être une simple opération de maquillage du cadre réglementaire supranational en vigueur dans le secteur des communications électroniques.

5.1.3

La même observation peut être faite en ce qui concerne la création de «l'Autorité», dont l'existence est parfaitement justifiée dans la mesure où elle pourra contribuer à l'application uniforme et efficace des nombreuses mesures proposées dont elle sera, en principe, responsable, du fait des compétences spécifiques qui lui seront attribuées.

5.1.4

La création de cette Autorité est conforme au principe de subsidiarité en ce que la coopération existante:

a)

est peu structurée et fondée sur des mécanismes inefficaces, ce qui fragmente le marché intérieur;

b)

ne garantit pas l'égalité de conditions entre opérateurs établis dans différents États membres;

c)

empêche d'obtenir les bénéfices qu'offriraient au consommateur la concurrence et les services transfrontaliers.

5.1.5

Elle est également conforme au principe de proportionnalité en ce qu'elle offre les moyens d'établir un partenariat efficace entre la Commission et les régulateurs nationaux pour des questions qui requièrent une cohérence à l'échelle européenne.

5.2

L'Autorité devrait servir de forum exclusif pour la coopération entre les ARN dans l'exercice de ses responsabilités conformément au cadre réglementaire.

5.2.1

Le CESE attend la future évaluation du fonctionnement de l'Autorité pour s'assurer que ses actions reposent sur la transparence, l'obligation de rendre des comptes et l'indépendance, et que les pouvoirs des ARN ont été renforcés en leur conférant un fondement solide et transparent dans le droit communautaire.

5.3

Par ailleurs, concernant l'accent placé sur le volet législatif du cadre réglementaire proposé, il convient de reconnaître l'utilité de l'application de critères spécifiques de réglementation du secteur, aux côtés des principes et règles de la libre concurrence sur le marché intérieur (8). Cela est particulièrement vrai pour ce secteur qui a besoin d'interventions administratives ex ante impliquant des analyses économiques sophistiquées du marché concerné, ce dont n'ont pas besoin tous les secteurs du marché intérieur (9).

5.3.1

Le CESE souscrit à l'objectif du cadre réglementaire de réduire progressivement la réglementation sectorielle «ex ante», à mesure que se développe la concurrence sur le marché, comme l'a fait progressivement la Commission, par exemple dans sa recommandation du 17 décembre 2007. Le CESE espère que le dynamisme du marché des communications électroniques, l'évolution des caractéristiques des produits et des services ainsi que les possibilités de substitution, rendront inutile le recours à ce type de mesures d'intervention.

5.3.2

Le CESE considère que la «séparation fonctionnelle» est une mesure exceptionnelle qu'il convient d'appliquer de manière restrictive. Seules les ARN devraient pouvoir imposer cette mesure après approbation de la Commission, qui devrait demander un avis à la nouvelle autorité.

5.3.3

En outre, une solution de ce type serait uniquement justifiée en cas d'échec répété des tentatives visant à atteindre une non-discrimination effective dans plusieurs marchés concernés et lorsqu'il s'avère que les perspectives de concurrence en matière d'infrastructures sont étroites ou nulles dans un délai raisonnable, malgré le recours à une ou plusieurs solutions considérées au préalable comme appropriées.

5.4

Cependant, les propositions spécifiques à ce secteur ne tiennent pas compte de plusieurs aspects pertinents concernant, d'une part, l'application efficace et transparente des critères de libre concurrence entre opérateurs et fournisseurs de services sur le marché paneuropéen et, d'autre part, certains aspects importants des droits des utilisateurs.

5.5

En premier lieu, il faudra préciser la portée de la notion de «sécurité nationale», dont la «responsabilité exclusive» du maintien est conférée aux États membres, au titre du dernier alinéa du paragraphe 2 de l'article 3bis du traité UE modifié par le traité de Lisbonne.

5.5.1

Cette reconnaissance de facultés non réglementées créera un vaste pouvoir discrétionnaire lorsqu'il s'agira de définir les causes et les mesures qui, pour des raisons de sécurité nationale, peuvent engendrer des exceptions à l'application des règles et principes sectoriels et du droit de la concurrence, y compris en ce qui concerne les propositions de la Commission.

5.5.2

À l'heure actuelle, dans le secteur des communications électroniques, il existe des règles nationales qui laissent à la discrétion des États membres l'identification des réseaux, services, installations et équipements de télécommunications développant des activités essentielles pour la défense nationale et la protection de la sécurité publique (10). Dans ce sens, le CESE rappelle que la pratique suivie dans l'application du projet «Galileo» peut constituer une référence utile.

5.6

Afin de préserver la cohésion économique, sociale et territoriale lors de la mise en place des nouvelles infrastructures de réseaux, en particulier des «réseaux de nouvelle génération», les pouvoirs publics doivent, dans le respect du droit communautaire et des principes démocratiques, promouvoir le progrès économique et social et un taux d'emploi élevé, en garantissant une évolution équilibrée et durable, en vue de développer un marché des communications électroniques de haut niveau technologique.

5.6.1

Les mesures d'intervention doivent encourager le déploiement futur des réseaux de nouvelle génération sans soutien public par le biais de financements publics provenant, notamment, des autorités locales, tout en garantissant que la neutralité technologique ne soit pas affectée ou que, dans le respect du principe de proportionnalité, l'inutile duplication des ressources de réseau soit évitée.

5.7

En ce qui concerne l'influence du cadre réglementaire proposé par la Commission sur les droits des utilisateurs, signalons que, dans certains cas, il faudra réaliser une analyse spécifique de la préservation du droit d'accès aux services d'intérêt économique général (11) (outre le fait qu'il s'agit d'un droit fondamental reconnu par l'article 36 de la Charte des droits fondamentaux de l'UE, sera régi par l'article 16 du TUE et par le protocole no9 annexé aux traités) et de la défense de la libre concurrence, qui ne figurera pas parmi les objectifs spécifiques de l'UE au titre de l'article 3 du traité de Lisbonne et fera donc l'objet d'une réglementation ad hoc suivant le protocole sur le marché intérieur et la concurrence annexé aux traités.

5.7.1

Si le CESE salue le fait que, dans la proposition sur le service universel, un mécanisme de consultation soit instauré dans les États membres afin de garantir que le processus décisionnel tienne dûment compte des intérêts des consommateurs, il regrette cependant qu'aucune des dispositions ne fasse référence au rôle de la société civile organisée en matière de consultation et de participation au processus d'adoption par les organes supranationaux compétents des mesures adéquates garantissant l'application efficace du mécanisme de consultation dans l'UE.

5.7.2

Quant à l'aspect matériel du service universel, le CESE attend la proposition de la Commission en la matière, qui devrait intervenir en cours d'année, afin de se prononcer de façon définitive. Il réitère (12) provisoirement les principes qu'il juge applicables à cet égard, à savoir:

a)

l'accès à des services de qualité à des prix équitables, adéquats et abordables;

b)

l'accès public rapide, à large bande, à des services d'information et de télécommunications avancés dans toutes les régions;

c)

l'accès de tous les consommateurs, indépendamment de leurs revenus et de leur situation géographique, avec un droit de péréquation tarifaire;

d)

la contribution équitable et non discriminatoire de l'ensemble des prestataires de services de communications électroniques à la préservation et au développement du service universel;

e)

l'existence de mécanismes spécifiques, prévisibles et suffisants qui garantissent la conservation et l'extension du service universel en fonction de la technologie et des évolutions sociales;

f)

tout autre principe jugé nécessaire par les ARN pour protéger l'intérêt public;

g)

l'instauration d'un «Forum» ou d'un «Observatoire des communications électroniques» au niveau de l'UE, afin de prendre en compte l'avis de tous les agents économiques et sociaux et des autres entités de la société civile organisée.

5.7.3

En ce qui concerne le service universel, la directive devrait aborder les aspects suivants:

a)

la nécessité de réguler les services à la clientèle fournis par les opérateurs, y compris la possibilité d'imposer des niveaux de qualité en la matière, lorsque les services commencent à se dégrader;

b)

la définition de clauses pénales, afin d'apporter une plus grande sécurité juridique;

c)

les modifications contractuelles;

d)

les niveaux minimaux de qualité pour certains aspects, afin de permettre aux ARN, si elles le souhaitent, d'imposer des niveaux minimaux de qualité pour tous les services;

e)

la facturation détaillée et les services à taux majoré, en adoptant le principe selon lequel tout service hors communications électroniques doit figurer en détail sur les factures;

f)

l'acquisition de services et de terminaux doit faire l'objet d'une plus grande transparence dans les dispositions contractuelles.

5.7.4

L'amélioration de la protection des consommateurs prévue dans la proposition relative au service universel ne leur garantit pas complètement un niveau élevé de protection correspondant aux dispositions de l'article 153 du traité CE, car il n'est pas tenu compte du principe général selon lequel les abonnés ont le droit de résilier sans pénalité leurs contrats à durée indéterminée avec les fournisseurs de réseaux ou de services de communications électroniques.

5.7.5

Il existe toutefois certains aspects pour lesquels ladite protection s'est améliorée:

une information sur les prix comprenant des tarifs transparents, actualisés ou comparables, ainsi que sur les types de services offerts;

la réforme du règlement no 2006/2004, qui permet une coopération internationale afin d'éviter des pratiques non désirées telles que l'hameçonnage (phishing) (13), le harcèlement électronique (cyberstalking) et l'usurpation (spoofing).

5.8

En matière de protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques, le CESE estime que la proposition constitue un progrès par rapport à la législation en vigueur et invite la Commission à renforcer la confidentialité des communications et des données relatives au trafic qui transitent sur les réseaux publics de communications et les services de communications électroniques accessibles au public, selon les critères définis dans la jurisprudence de la CJCE (14).

5.8.1

Le CESE plaide pour un renforcement de la réglementation des droits fondamentaux liés aux communications électroniques, tels que la protection de l'intimité, le respect de la vie privée, la protection des données à caractère personnel, le secret des communications, la confidentialité, ainsi que certains aspects commerciaux relatifs à la propriété intellectuelle.

5.8.2

S'agissant de la sécurité (15), il convient d'adopter des mesures appropriées qui garantissent des réseaux sûrs (16) et l'utilisation de matériel crypté, afin d'améliorer la protection de la vie privée.

5.8.3

Le CESE considère comme positif le fait que la protection garantie par cette directive s'applique aux réseaux publics de communications qui admettent des dispositifs de compilation des données et d'identification (y compris les dispositifs sans contact, tels que les systèmes d'identification par radiofréquences, RFID) (17).

5.9

En ce qui concerne les communications commerciales non sollicitées («spam»), le CESE répète (18) qu'il faut, d'après lui, que la législation se base systématiquement sur le principe de consentement exprès préalable du consommateur. C'est en effet l'intérêt de ce dernier qui doit prévaloir pour éviter les communications commerciales non sollicitées. Il conviendrait donc d'envisager toutes les mesures nécessaires pour garantir le respect de ce principe, le cas échéant en instaurant des sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives.

Bruxelles, le 29 mai 2008.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  JO L 344, 28.12.2007, p. 65.

(2)  Créé par la décision no 2002/627/CE de la Commission du 29.07.2002, modifiée en dernier lieu par la décision de la Commission du 6.12.2007, JO L 323 du 8.12.2007, p. 43.

(3)  JO C 44 du 16.2.2008, p. 50, adopté le 30.10.2007, rapporteur, M. Retureau.

(4)  Avis exploratoire sur «La future législation sur l'e-accessibilité», JO C175 du 27/07/07, p. 91-95.

(5)  JO C 151 du 17.6.2008, p. 25.

(6)  Arrêt CJCE du 2.5.2006, affaire C-436/03.

(7)  Ibid., bases juridiques 44 et 45.

(8)  voir BAVASSO, A: «Electronics Communications: A new Paradigm for European Regulation», CML Rev. 41, 2004, p. 110 ss.

(9)  voir De STREEL, A: «The integration of Competition Law Principles in the New European Regulatory Framework for Electronics Communications», World Competition, 26, 2003, p. 497.

(10)  Pour une analyse plus détaillée de ces questions, voir: MOREIRO GONZÁLEZ, Carlos J.: «Las cláusulas de Seguridad Nacional», Iustel, 2007, p. 26-31 et 53-64.

(11)  Voir avis du CESE 267/2008 (adopté le 14.02.2008), rapporteur: M. Hencks.

(12)  Avis du CESE, session plénière des 28 février et 1er mars 2001, JO C 139 du 11.5.2001, p. 15.

(13)  Il s'agit d'une technique d'escroquerie qui consiste à s'emparer, sans le consentement de la victime, des données d'accès à son compte courant afin de pouvoir y accéder et dévier les fonds.

(14)  Voir, notamment, l'arrêt de la CJCE du 29 janvier 2008 (affaire C-275/06).

(15)  L'avis du CESE sur la lutte contre la fraude et la contrefaçon des moyens de paiement est en cours d'élaboration. (INT/417, DT R/CESE 480/2008)

(16)  Voir l'avis sur la «sécurité des réseaux et de l'information», rapporteur M. Retureau, JO C 48 du 21.02.2002, p. 20.

(17)  Voir l'avis sur le thème «Identification par radiofréquences (RFID)», rapporteur M. Morgan, JO C 256 du 27.10.2007, p.66.

(18)  Avis adopté les 24/25 janvier 2001, JO C 123 du 25.04.2001, p. 53.