52006IP0488

Résolution du Parlement européen sur un nouveau cadre stratégique pour le multilinguisme (2006/2083(INI))

Journal officiel n° 314 E du 21/12/2006 p. 0207 - 0210


P6_TA(2006)0488

Un nouveau cadre stratégique pour le multilinguisme

Résolution du Parlement européen sur un nouveau cadre stratégique pour le multilinguisme (2006/2083(INI))

Le Parlement européen,

- vu l'article 192, deuxième alinéa, du traité CE,

- vu les articles 149, 151 et 308 du traité CE,

- vu les articles 21 et 22 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne,

- vu sa résolution du 14 janvier 2003 sur le rôle des pouvoirs locaux et régionaux dans la construction européenne [1], et la référence qui y est faite à la diversité linguistique en Europe,

- vu la décision no 1934/2000/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 juillet 2000 établissant l'année européenne des langues 2001 [2],

- vu la résolution du Conseil du 14 février 2002 sur la promotion de la diversité linguistique et de l'apprentissage des langues dans le cadre de la mise en œuvre des objectifs de l'année européenne des langues 2001 [3],

- vu la charte européenne des langues régionales ou minoritaires du Conseil de l'Europe, entrée en vigueur le 1er mars 1998,

- vu la convention-cadre du Conseil de l'Europe pour la protection des minorités nationales, entrée en vigueur le 1er février 1998,

- vu sa résolution du 4 septembre 2003 contenant des recommandations à la Commission sur les langues européennes régionales et moins répandues — les langues des minorités au sein de l'Union européenne dans le contexte de l'élargissement et de la diversité culturelle [4],

- vu l'article 45 de son règlement,

- vu le rapport de la commission de la culture et de l'éducation (A6-0372/2006),

A. considérant que le respect de la diversité linguistique et culturelle est l'un des principes fondamentaux de l'Union européenne et est reconnu dans les termes suivants par l'article 22 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne: "L'Union respecte la diversité culturelle, religieuse et linguistique",

B. considérant que le multilinguisme est une caractéristique de l'Union qui fait de celle-ci, indubitablement, un exemple, de même qu'une composante fondamentale de la culture européenne,

C. considérant qu'il a demandé, dans sa résolution précitée du 14 janvier 2003, l'insertion dans le traité CE d'un nouvel article 151 bis libellé comme suit: "La Communauté, dans le domaine de sa compétence, respecte et encourage la diversité linguistique en Europe, y compris les langues régionales ou minoritaires en tant qu'expression de cette diversité, en encourageant la coopération entre États membres et en utilisant d'autres instruments appropriés pour atteindre cet objectif",

D. considérant que la promotion du multilinguisme dans une Europe pluraliste est un facteur essentiel de l'intégration culturelle, économique et sociale et qu'il renforce notamment les qualifications des citoyens et facilite leur mobilité,

E. considérant que certaines langues européennes sont parlées également dans un grand nombre de pays tiers et constituent un lien important entre les habitants et les nations de diverses régions du monde,

F. considérant que certaines des langues européennes se prêtent particulièrement à l'établissement d'une communication directe immédiate avec d'autres parties du monde,

G. considérant que la diversité culturelle peut aussi être un facteur de cohésion sociale et une source de tolérance, d'acceptation des différences, d'identification et de compréhension mutuelle entre les peuples,

H. considérant que le multilinguisme devrait également avoir pour objectif de favoriser le respect de la diversité et de la tolérance afin d'éviter que d'éventuels conflits actifs ou passifs ne naissent entre différentes communautés linguistiques des États membres,

I. considérant que toutes les langues sont, en tant qu'instruments primordiaux d'accès à la culture, un mode distinct de perception et de description de la réalité et qu'elles doivent, par conséquent, pouvoir bénéficier des conditions que requiert leur développement,

J. considérant qu'il est important de connaître les principes de l'apprentissage de la parole, de la formulation et de l'acquisition des concepts de base à la petite enfance, qui sont les fondements de la connaissance de la langue maternelle, pour favoriser l'apprentissage d'autres langues et répondre ainsi à l'objectif de la "langue maternelle + 2",

K. considérant que les langues régionales et minoritaires constituent une source importante de richesse culturelle et qu'il convient de mieux les soutenir en vue de les préserver puisqu'elles constituent un patrimoine culturel commun,

L. considérant que le Parlement européen et le Comité des régions se sont à plusieurs reprises prononcés sur l'importance des langues moins répandues et qu'il n'existe pas actuellement de dispositions législatives à l'échelle de l'Union concernant les langues européennes régionales et moins répandues,

M. considérant qu'une attention particulière en faveur de l'accès à l'apprentissage des langues devrait être accordée aux personnes défavorisées ou en difficulté et aux personnes handicapées.

Remarques spécifiques sur la stratégie cadre

1. se félicite de l'engagement pris par la Commission, et notamment dans le contexte de la nouvelle stratégie cadre, pour encourager la connaissance des langues et en tirer avantage sur les plans culturel et socio-économique;

2. estime que, afin d'atteindre les objectifs fixés par la stratégie de Lisbonne, il est indispensable d'améliorer la qualité, l'efficacité et l'accessibilité des systèmes d'éducation et de formation de l'Union en favorisant l'apprentissage des langues étrangères;

3. reconnaît l'importance stratégique que revêtent les langues européennes de diffusion mondiale comme moyens de communication et comme instruments de solidarité, de coopération et d'investissement économique, et donc comme l'un des éléments majeurs de la politique européenne en matière de multilinguisme;

4. approuve l'objectif à long terme, défini par la Commission, d'améliorer les aptitudes linguistiques individuelles par référence à l'objectif fixé par le Conseil européen réuni en 2002 à Barcelone, à savoir que les citoyens devraient apprendre, outre leur langue maternelle, au moins deux langues étrangères;

5. rappelle, à cet effet, aux États membres de l'Union la nécessité de promouvoir une réelle politique d'apprentissage des langues étrangères par des mesures appropriées; réaffirme, en outre, que l'apprentissage précoce des langues revêt une importance considérable et devrait être fondé sur des méthodes efficaces, conformément aux meilleures techniques disponibles;

6. déplore le manque de données précises et fiables et d'indicateurs pertinents au sujet de la situation actuelle des compétences en langues étrangères dans les États membres et, par conséquent, se félicite de la proposition de créer un indicateur européen des compétences linguistiques; considérant que cet indicateur devrait porter sur toutes les langues officielles de l'Union et pourrait, dans la mesure où les procédures le permettent, s'étendre au-delà des cinq langues les plus parlées pour couvrir les autres langues de l'Union, afin de restituer une image fidèle des compétences linguistiques;

7. est d'avis que les propositions relatives au multilinguisme ne devraient pas se limiter aux principales langues officielles/des États membres;

8. se félicite de l'engagement de la Commission de permettre aux citoyens d'accéder dans leur propre langue à la législation, aux procédures et à l'information relatives à l'Union, mais estime que cet effort devrait comprendre autant de langues des États membres utilisées par les citoyens de l'Union que possible, ce qui permettrait de traduire dans les faits la déclaration de la Commission selon laquelle le citoyen doit pouvoir, sans obstacles, accéder à l'Union dans sa propre langue et contribuerait notablement à réduire le fossé entre l'Union et nombre de ses citoyens, qui est la principale finalité du plan D (démocratie, dialogue et débat);

9. invite la Commission ainsi que les autres institutions européennes à tirer le meilleur parti des nouveaux outils numériques et technologiques de traduction sur leurs sites Internet, afin de permettre aux citoyens européens de consulter et de recevoir via Internet des informations sur l'Europe dans leur propre langue;

10. estime que les immigrants devraient se voir proposer les plus grandes facilités pour acquérir la ou les langues du pays d'accueil telles que définies par la législation de ce dernier, en vue de leur intégration sociale et culturelle dans la mesure où cela s'avère nécessaire, en s'appuyant notamment sur les méthodes qui se sont révélées efficaces pour l'apprentissage des langues et pour l'intégration des citoyens issus de l'immigration et afin de leur permettre de suivre des cours dans leur langue maternelle pour pouvoir entretenir des liens avec leur pays d'origine;

11. approuve l'idée d'inciter les États membres à élaborer des plans nationaux, car elle vaut reconnaissance de la nécessité d'une planification linguistique au niveau des États membres; considère qu'une telle initiative est de nature à améliorer la situation de nombreuses langues moins répandues et à mieux faire saisir l'importance de la diversité linguistique; suggère que ces plans prennent en compte les langues les moins répandues de chaque État membre, examinent les possibilités qui s'offrent aux adultes intéressés d'apprendre ces langues et retiennent de tels projets parmi les exemples de bonne pratique;

12. se déclare favorable aux initiatives visant à améliorer la formation des enseignants, y compris de ceux qui n'enseignent pas les langues ou qui relèvent de l'enseignement professionnel, et souhaite une multiplication du nombre de langues enseignées en milieu scolaire et extrascolaire afin de permettre aux futurs enseignants d'apprendre puis d'enseigner une plus large gamme de langues dans les mêmes conditions, sous réserve qu'un intérêt ait été manifesté en ce sens; rappelle, à cette occasion, que la formation linguistique est essentielle pour promouvoir et faciliter non seulement la mobilité des étudiants, mais également celle de tous les travailleurs recherchant une activité professionnelle dans un des États membres;

13. insiste afin qu'une attention particulière soit accordée en faveur de l'apprentissage des langues aux personnes défavorisées ou en difficulté et aux personnes handicapées;

14. estime que l'apprentissage des langues devrait être un élément essentiel du programme pour l'éducation et la formation tout au long de la vie;

15. se félicite du recours accru à l'enseignement d'une matière par l'intégration d'une langue étrangère (EMILE), grâce auquel les élèves apprennent une matière par le canal d'une langue étrangère, et invite les États membres à former un réseau des meilleures pratiques, en analysant notamment les résultats obtenus par les cours d'immersion dans les pays multilingues;

16. se félicite que les établissements d'enseignement supérieur jouent un rôle plus actif dans la promotion du multilinguisme, non seulement parmi les étudiants et le personnel, mais aussi dans un environnement local plus large, et, par conséquent, estime qu'il importe d'encourager les relations entre les universités et les autorités nationales, locales et régionales;

17. se félicite de l'accent mis, dans le septième programme cadre pour la recherche, sur les activités de recherche et de développement technologique liées aux technologies de l'information en rapport avec les langues, de sorte que le multilinguisme se trouve renforcé par les nouvelles technologies de l'information;

18. approuve les propositions en faveur du multilinguisme dans la société de l'information, ainsi que de la création et de la circulation des contenus et des connaissances multilingues; considère qu'une panoplie de plus en plus large de technologies favorisera le développement de l'emploi de toutes les langues, y compris les moins répandues; considère que la technologie offre le plus grand potentiel pour la mise en place d'un espace sociolinguistique au profit de toutes les langues de l'Europe;

19. approuve les propositions visant au développement des professions et des secteurs d'activité liés aux langues; estime que toutes les langues européennes devront faire appel aux nouvelles technologies, comme le traitement de la parole, la reconnaissance vocale, etc., de même qu'aux travaux terminologiques, ainsi qu'au développement de l'enseignement, de la certification et de l'évaluation dans le domaine linguistique, faute de quoi les langues les moins répandues seront reléguées et verront leur espace sociolinguistique envahi par les langues les plus parlées;

20. approuve la proposition en faveur d'une plus grande transparence dans l'enseignement, l'évaluation et la certification linguistiques grâce à la publication d'un inventaire des systèmes aujourd'hui disponibles.

Mesures proposées

21. invite les institutions et les organes européens à mieux communiquer avec les citoyens dans la langue nationale de ces derniers sans considération du statut officiel ou non officiel de cette langue dans l'État membre ou à l'échelle de l'Union;

22. invite les institutions et les organes de l'Union à coopérer étroitement avec le Conseil de l'Europe pour la promotion et la protection de la diversité linguistique et de l'apprentissage des langues, ainsi qu'à mettre à profit l'expérience acquise par cette institution en matière de politique linguistique (s'agissant, par exemple, du Portefeuille européen des langues et de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires);

23. encourage la Commission à poursuivre la mise en œuvre des propositions formulées dans sa résolution précitée du 4 septembre 2003 dans la mesure de leur faisabilité et à communiquer régulièrement au Parlement les résultats obtenus;

24. invite le médiateur européen à consacrer une attention particulière au respect des droits linguistiques des citoyens européens et à offrir davantage de voies de solution dans les situations linguistiques conflictuelles au sein de l'Union;

25. demande à la Commission de faciliter et de favoriser l'accès à l'information et au financement des organismes candidats ayant pour objectif de promouvoir le multilinguisme par des réseaux et/ou des projets financés par la Commission à partir de 2007;

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26. charge son Président de transmettre la présente résolution à la Commission, au Conseil et aux gouvernements des États membres.

[1] JO C 38 E du 12.2.2004, p. 167.

[2] JO L 232 du 14.9.2000, p. 1.

[3] JO C 50 du 23.2.2002, p. 1.

[4] JO C 76 E du 25.3.2004, p. 374.

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