18.8.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 195/75


Avis du Comité économique et social européen sur «Le développement et la promotion des carburants de substitution pour les transports routiers dans l'Union européenne»

(2006/C 195/20)

Le 14 juillet 2005, le Comité économique et social européen a décidé, en vertu de l'article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis: «Le développement et la promotion des carburants de substitution pour les transports routiers dans l'Union européenne»

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 24 mars 2006 (rapporteur: M. Ranocchiari).

Lors de sa 427e session plénière des 17 et 18 mai 2006 (séance du 17 mai), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 82 voix pour, 2 voix contre et 1 abstention.

1.   Résumé et recommandations

1.1

La demande énergétique devrait exploser dans les décennies à venir et les citoyens sont de plus en plus préoccupés par la dépendance énergétique de l'UE vis-à-vis de pays tiers ainsi que par les enjeux environnementaux.

1.2

Le CESE est pleinement conscient de ce problème. Il a récemment adopté une série d'importants avis exploratoires ou d'initiative sur certains aspects fondamentaux de la question énergétique (1) et d'autres sont encore à l'examen (2).

1.3

Certaines hypothèses fondamentales reviennent de façon récurrente dans tous les avis du CESE: les sources d'énergie traditionnelles (fossiles) continueront à occuper une place prédominante dans la combinaison énergétique durant les vingt à trente prochaines années. Dans le même temps, s'il est certain que la part des énergies renouvelables va augmenter, leur développement demeurera inférieur à la progression de la consommation énergétique. La part des SER dans l'offre d'énergie se maintiendra à environ 15 à 20 % de la consommation totale. Nonobstant, les sources d'énergie renouvelables ont un rôle privilégié à jouer et il importe de les valoriser et de les soutenir.

1.4

Le secteur des transports routiers se trouve dans la même situation, car il dépend presque entièrement du pétrole (essence et gazole classique). Le présent avis entend dès lors contribuer à l'objectif ambitieux fixé par la Commission européenne, visant à remplacer 20 % des carburants traditionnels par des carburants de substitution avant 2020.

1.5

Le projet de la Commission est de substituer les biocarburants, le gaz naturel et l'hydrogène aux carburants classiques. En fait, l'origine fossile du gaz naturel ne permet pas de le considérer comme un véritable carburant de substitution puisqu'il ne s'agit pas d'une source d'énergie renouvelable. Néanmoins, sa contribution aux objectifs de la Commission est d'une importance capitale étant donné qu'il est disponible en grande quantité et en raison des avantages qu'il présente pour l'environnement. Aucune des deux options mentionnées ci-dessus (biocarburants et gaz naturel) n'est parfaite, exempte de tout effet néfaste sur l'environnement et optimale en ce qui concerne l'efficacité énergétique. L'hydrogène semble le plus approprié, mais beaucoup reste encore à faire en matière de recherche et de développement, afin de mettre sur pied une «économie de l'hydrogène» sûre et rentable.

1.6

Les biocarburants présentent des avantages d'un point de vue environnemental étant donné que leur incidence sur le climat est généralement bien plus faible, voire nulle dans les cas idéaux. Les carburants produits à partir de plantes tels que le bioéthanol et l'ester méthylique d'acides gras (FAME) étant disponibles dans des quantités proportionnelles aux récoltes, le mélange de bioéthanol avec l'essence et du FAME avec le carburant diesel est une stratégie efficace et respectueuse de l'environnement.

1.7

Les éléments du mélange doivent répondre aux critères établis notamment par le CEN (Comité Européen de Normalisation) afin de préserver le bon fonctionnement du moteur et d'éviter que la consommation de carburants et les émissions ne soient préjudiciables. Une concentration accrue de FAME dans le carburant diesel nécessite une adaptation spécifique des véhicules. Cela est possible dans le cas d'un parc de véhicules chargés d'une mission spécifique, comme le parc d'autobus urbains.

1.8

La Commission a élaboré la directive 2003/30/CE dans le but de promouvoir l'utilisation des biocarburants. À l'exception d'un allègement fiscal, comme pour les biocarburants, aucune mesure particulière n'a été prise jusqu'à présent concernant le gaz naturel; la Commission espère pourtant que celui-ci sera le principal acteur de la réalisation des objectifs de 2020. Apparemment, la Commission voulait voir comment les choses évolueraient concernant le gaz naturel suite aux mesures d'allègement fiscal proposées.

1.9

Cinq ans après la communication de la Commission et trois ans après l'adoption de la directive sur les carburants de substitution, le bilan des progrès réalisés demeure mitigé, car les États membres auront beaucoup de mal à atteindre les objectifs fixés. Cela pourrait également expliquer pourquoi la Commission européenne a récemment publié une communication concernant le Plan d'action sur la biomasse (3).

1.9.1

Le Plan traite des applications de la biomasse dans le domaine des transports, de l'électricité et du chauffage. Les principales mesures proposées pour le secteur des transports sont: 1) une nouvelle législation communautaire sur l'utilisation des énergies renouvelables; 2) une éventuelle révision de la directive sur les biocarburants en 2006 qui pourrait définir les objectifs à atteindre au niveau national en ce qui concerne la part de marché des biocarburants et contraindre les distributeurs de carburants à utiliser des biocarburants; 3) élaboration de plans d'action nationaux pour la biomasse; 4) développement d'une deuxième génération de biocarburants (à partir du bois et des déchets).

1.9.2

Selon les prévisions de la Commission, le Plan devrait entraîner une diminution des importations de pétrole de 8 % et une réduction de 209 millions de tonnes équivalent CO2 des émissions de gaz à effet de serre qui représentent un coût annuel direct de 9 milliards d'euros. Deux tiers de cette somme seront alloués aux biocarburants destinés aux transports dont le prix est largement supérieur aux autres carburants dérivés du pétrole (pour que le biodiesel soit concurrentiel, il faudrait que le cours du baril atteigne environ 95 euros, et environ 115 euros (4) en ce qui concerne le bioéthanol).

1.9.3

Le CESE accueille très favorablement ce Plan d'action dans la mesure où il va dans le même sens que le présent avis du Comité dont l'objectif consiste à inciter les autres institutions européennes ainsi que les États membres à encourager davantage les mesures destinées à la promotion des carburants de substitution.

1.9.4

Le CESE applaudit également à la dernière communication de la Commission relative à la «Stratégie de l'UE en faveur des biocarburants (5)», qui recommande vivement de donner une impulsion nouvelle au développement des biocarburants.

1.10

Dans les faits, tandis que la consommation des biocarburants et du gaz naturel est susceptible d'augmenter grâce à l'évolution technologique des moteurs et au système de distribution des carburants et que cette expansion permet de remplacer les carburants dérivés du pétrole dans la mesure envisagée, les solutions de substitution à long terme, telles que l'hydrogène, font l'objet d'efforts de développement: en d'autres termes, les biocarburants et le gaz naturel constituent une passerelle vers le mélange de carburants durable de 2020 et au-delà.

1.11

Le CESE recommande à la Commission de prendre des mesures contraignantes au cas où la révision de la directive sur les biocarburants, prévue en 2006, révélerait que l'action des États membres n'a pas été suffisante au regard des objectifs prévus tant pour les biocarburants que pour le gaz naturel.

1.12

Le CESE reconnaît qu'un recours accru au gaz naturel en tant que carburant automobile constitue une alternative judicieuse au pétrole tant que la technologie basée sur l'hydrogène n'est pas opérationnelle. La Commission européenne et les États membres devraient dès lors mentionner constamment dans leurs stratégies de communication ces technologies qui sont d'ores et déjà économiquement viables et montrer l'exemple lorsqu'ils acquièrent de nouveaux véhicules.

2.   Exposé des motifs

2.1

En novembre 2001, la Commission européenne a publié une communication concernant les carburants de substitution pour les transports routiers (6) qui faisait suite au livre vert intitulé «Vers une stratégie européenne de sécurité d'approvisionnement énergétique (7)», ainsi qu'au livre blanc intitulé «La politique européenne des transports à l'horizon 2010: l'heure des choix (8)». La communication de novembre 2001 comportait un plan d'action en deux points.

2.2

Le premier point visait à développer l'utilisation des biocarburants selon une approche double. D'une part, il envisageait la commercialisation d'une quantité sans cesse croissante de mélanges d'essence/de diesel et de biocarburant afin d'ouvrir la voie à un mélange de biocarburants obligatoire. D'autre part, il proposait des mesures fiscales visant à rendre les biocarburants financièrement intéressants, celles-ci s'appliquant également au gaz naturel. Le CESE a rendu un avis sur cette question particulière le 25 avril 2002 (9). Les deux propositions ont finalement été adoptées (10).

2.3

Le second point préconisait la création d'un groupe de contact chargé des carburants de substitution dont la mission était de conseiller la Commission sur l'évolution commerciale des carburants de substitution en général, et du gaz naturel et de l'hydrogène en particulier. L'étude du groupe de contact devait couvrir les 20 années à venir, conformément à l'objectif de la Commission qui est d'augmenter la part des carburants de substitution afin que ces derniers puissent, d'ici 2010, remplacer un cinquième (20 %) des carburants dérivés du pétrole.

2.4

En décembre 2003, le groupe de contact a publié un rapport détaillé et concret (11).

3.   Le scénario de 2020: comment le concrétiser

3.1

Selon le plan de la Commission, les biocarburants, le gaz naturel et l'hydrogène sont les trois carburants de substitution qui devraient jouer le plus grand rôle dans la réalisation de l'objectif de 20 % de substitution:

Année

Biocarburants

Gaz naturel

Hydrogène

Total

2005

2

 

 

2

2010

6

2

 

8

2015

7

5

2

14

2020

8

10

5

23

3.1.1

La part des biocarburants doit être de 2 % en 2005 pour ensuite continuer à augmenter jusqu'à 8 % d'ici 2020. Tout carburant dérivé de la biomasse est connu sous l'appellation de biocarburant. Les principaux candidats dans le domaine du transport sont actuellement:

3.1.1.1

Le bioéthanol, c'est-à-dire l'éthanol (EtOH) également appelé alcool éthylique, est produit par fermentation à partir de féculents tels que les céréales et les betteraves sucrières. Il peut soit être utilisé pur comme essence de substitution, notamment au Brésil, mais cela nécessite des moteurs spécifiques, soit être ajouté pur ou sous la forme de produit chimique synthétique ETBE (éthyl-tertio-butyl-éther) à de l'essence. Selon les normes qui déterminent la catégorie de qualité de l'essence, l'on peut mélanger jusqu'à 5 % d'éthanol à l'essence sans qu'il soit nécessaire d'adapter le moteur.

3.1.1.2

Le biodiesel, un substitut de diesel produit à partir d'huiles végétales par transestérification et connu sous le nom de FAME (ester méthylique d'acides gras). Le biodiesel le plus largement utilisé en Europe est l'ester méthylique de colza (EMC). Le CEN (Comité Européen de Normalisation) a défini une norme pour le biodiesel et un produit qui répond aux critères du CEN est déjà utilisé dans les véhicules diesel dans une proportion de 5 %. Jusqu'à il y a peu, la production de FAME à partir de produits agricoles tels que le colza suffisait pour répondre à la demande, grâce à certaines incitations fiscales. Dans sa communication de novembre 2001, la Commission exprime sa préoccupation par rapport à la faisabilité d'une production à grande échelle de carburants à base de produits agricoles (12).

3.1.1.3

Le biogaz, un gaz riche en méthane obtenu par fermentation anaérobie à partir de matières organiques telles que le fumier, les boues ou les déchets urbains solides, est analogue au gaz naturel. La qualité du biogaz doit être améliorée pour égaler celle du gaz naturel afin de pouvoir être utilisé dans les véhicules normaux conçus pour fonctionner au gaz naturel. En Suède, plus de 5000 véhicules roulent au biogaz. L'expérience de ce pays montre que le méthane, que ce soit du biogaz ou du gaz naturel, est un carburant durable peu coûteux pouvant réduire de manière drastique les émissions lors des transports urbains.

3.2

En ce qui concerne le gaz naturel, la Commission européenne n'a pas été aussi active qu'il l'eût fallu pour que le gaz naturel puisse contribuer pleinement aux objectifs de 2020 et aucune proposition spécifique n'a été présentée à ce jour.

3.3

Le manque d'initiative de la Commission est problématique dans la mesure où le rapport du groupe de contact «Carburants de substitution» créé par la Commission, qui est fondé sur une analyse «Well-to-Wheels» (WTW) est parvenu à la conclusion que «le gaz naturel est l'unique carburant de substitution susceptible de dépasser largement les 5 % de parts de marché avant 2020 et donc de concurrencer l'offre de carburants classiques sur un marché arrivé à maturité».

3.4

Dans la communication de novembre 2001, la Commission charge le gaz naturel du rôle principal dans la réalisation de l'objectif des carburants de substitution pour 2020. Le groupe de contact a adopté cette position pour les raisons suivantes:

3.4.1

Le gaz naturel répond au besoin de sécurité accrue de l'approvisionnement, non seulement par le biais d'une diversification des carburants, du fait qu'il ne dépend pas du pétrole, mais également parce que la demande n'est pas limitée par l'offre fondamentale. Alors que l'expansion du biocarburant pourrait en fin de compte être limitée par l'offre, une part de 10 % des transports routiers, c'est-à-dire l'objectif de la Commission pour 2020, représenterait environ 5 % de la consommation totale de gaz naturel de l'UE prévue à cette date. Cette remarque illustre la nécessité de développer une approche synergique pour les trois carburants de substitution.

3.4.2

Le gaz naturel contribue à atteindre l'objectif stratégique de réduction des émissions de gaz à effet de serre. La structure chimique du méthane (CH4) montre clairement que le gaz naturel contient moins de carbone que d'autres combustibles fossiles, tels que l'essence et le diesel. L'analyse WTW montre que les émissions de gaz à effet de serre des véhicules à gaz naturel sous pression sont inférieures à celles d'un véhicule roulant à l'essence et, grâce aux nouvelles technologies, comparables à celles d'un véhicule roulant au diesel. Étant donné l'évolution de la technologie de conception des moteurs de véhicules à gaz naturel sous pression, les émissions de gaz à effet de serre seront inférieures à celles des véhicules diesel en 2010.

3.4.3

Outre son faible taux d'émission de gaz à effet de serre, le gaz naturel utilisé comme carburant automobile présente d'autres avantages environnementaux en ce qui concerne les gaz d'échappement. Les véhicules à gaz naturel utilisés aujourd'hui rejettent en effet très peu d'oxydes d'azote (NOx) et ne contribuent pas à la production de particules fines qui posent un problème critique. Ainsi, les limites strictes fixées par l'Union européenne pour le rejet des particules dans l'atmosphère sont-elles positives pour les véhicules à gaz naturel. Les bus urbains roulant au gaz naturel se sont avérés être un mode de transport viable et la Commission européenne a contribué, par l'appui financier qu'elle a déjà apporté à l'introduction de véhicules modèles, à accroître leur présence. On pourrait aisément améliorer l'environnement urbain en favorisant l'utilisation du gaz naturel par les autobus et les camions de ramassage des ordures dans le cadre d'un plan de marchés publics respectueux de l'environnement.

3.4.4

La récente proposition de directive relative à la promotion de véhicules de transport routier propres constituerait un pas décisif en ce sens (13). Une fois adoptée, elle aura pour effet de contraindre les administrations des États membres à réserver 25 % de leurs acquisitions annuelles (achats ou leasing) de véhicules lourds (plus de 3,5t) à des véhicules utilisant des carburants de substitution et respectueux des normes EEV (14). Les normes EEV («véhicules plus respectueux de l'environnement») s'appliquent aux véhicules roulant aux biocarburants, au gaz naturel comprimé ou liquéfié, à l'hydrogène ainsi qu'aux véhicules hybrides et électriques.

3.5

À l'état naturel, l'hydrogène n'existe qu'en combinaison avec d'autres éléments. Dans la nature, on trouve des composés chimiques qui comportent de l'hydrogène, par exemple l'eau et les hydrocarbures. 11 % du poids de l'eau (H2O) est constitué d'hydrogène (2/18). L'essence et le carburant diesel sont un mélange d'hydrocarbures. Le méthane, un hydrocarbure, est le principal composant du gaz naturel et du biogaz.

Étant donné que l'hydrogène en tant que tel n'existe pas dans la nature, il doit être fabriqué. En effet, il est produit commercialement pour les besoins des industries chimique, pétrochimique et des raffineries de pétrole.

Afin de produire de l'hydrogène, par exemple en procédant à une électrolyse de l'eau ou à un reformage à la vapeur (steam-reforming) du gaz naturel, il convient d'apporter de l'énergie, à savoir de l'électricité pour l'électrolyse et de la chaleur pour le reformage à la vapeur.

L'analyse WTT (well-to-tank) joue un rôle clé dans la classification des divers parcours de la matière première à l'hydrogène en fonction de la consommation d'énergie et des émissions de gaz à effet de serre.

L'hydrogène est depuis longtemps un produit industriel qui est fabriqué et commercialisé par les grandes entreprises du secteur du gaz ou est destiné à un usage interne dans les raffineries de pétrole. Cependant, son utilisation en tant que carburant pour les transports est toute récente. C'est pourquoi l'objectif d'un taux de substitution de 2 % d'ici 2015 puis de 5 % d'ici 2020 est très ambitieux.

3.5.1

Le groupe de contact a identifié plusieurs questions liées à une utilisation accrue d'hydrogène en tant que carburant pour le transport:

i)

l'hydrogène liquide, c'est-à-dire à -252oC, stocké dans des réservoirs cryogéniques, par exemple, d'un véhicule muni d'un moteur à combustion interne, l'hydrogène gazeux comprimé, par exemple, dans des bouteilles à 700 atmosphères à bord d'un véhicule à pile à combustible;

ii)

une production centralisée d'hydrogène dans des unités de grande capacité qui peut être optimalisée par rapport à la consommation d'énergie ou une production distribuée en petites unités à la station-service;

iii)

étant donné que la rentabilité des véhicules à pile est maximale à moyenne puissance, il serait probablement judicieux d'établir une distinction entre les véhicules à pile pour des opérations, comme le trafic urbain, qui requièrent une puissance modérée, et les véhicules dotés de moteurs à combustion interne qui doivent fonctionner à plein régime lors de longs trajets;

iv)

d'autres questions préoccupantes concernent la technologie de la pile à combustible en tant que telle, c'est-à-dire l'appareil dans lequel l'hydrogène libère les électrons qui constituent le courant électrique qui fait tourner le moteur électrique qui à son tour fait tourner les roues. Ces questions sortent du cadre du présent avis.

3.5.2

En résumé, le carburant de substitution que constitue l'hydrogène présente un défi à deux niveaux: i) la distribution du carburant et ii) l'alimentation. Le fait que l'UE consacre de plus en plus de fonds de R&D à l'étude de l'hydrogène et des piles à combustible par le biais des programmes-cadres 5 et 6 est tout à fait justifié. Pour l'instant, dans le cadre du 6ème PC, la recherche en matière de piles à hydrogène et à combustible relève de la sous-priorité thématique «Systèmes énergétiques durables» qui dispose d'un budget global de 890 millions d'euros. À l'occasion des débats concernant le futur 7ème PC, le Parlement européen propose de placer ce thème dans une nouvelle priorité thématique intitulée «toutes les sources d'énergie actuelles ou futures non émettrices de CO2» et de la doter d'une enveloppe budgétaire encore plus élevée. Les avantages environnementaux découlant du fait que seule de l'eau est produite lors de l'oxydation de l'hydrogène dans une pile à combustible, justifient cet effort.

4.   Conclusions

4.1

L'objectif du document de la Commission européenne de novembre 2001, à savoir 20 % de carburants de substitution d'ici 2020, repose sur deux technologies/produits bien établis, les biocarburants et le gaz naturel, ainsi que sur une évolution prometteuse, à savoir l'hydrogène et les piles à combustible.

4.2

En dépit de certains obstacles, les biocarburants et le gaz naturel sont d'ores et déjà disponibles et ont toutes les qualités pour relever le défi tant sur le plan du savoir-faire en matière de distribution du carburant que de la technologie de fabrication des moteurs.

4.2.1

Ne faisant pas partie des sources d'énergie renouvelables, en raison de son origine fossile, le gaz naturel ne devrait pas être considéré comme un véritable carburant de substitution. Néanmoins, il représente aujourd'hui l'une des options les plus réalistes pour remplacer les carburants dérivés du pétrole brut et s'avère indispensable pour la réalisation de l'objectif de 20 % de substitution en 2020. Les raisons pour lesquelles le gaz naturel pourrait jouer un rôle majeur en tant que carburant de substitution sont les suivantes:

les réserves de gaz naturel sont considérables et seront d'une longévité supérieure à celles de pétrole brut;

malgré les récentes difficultés, la répartition géopolitique garantit un marché relativement stable par rapport au pétrole;

il présente le taux H/C (hydrogène/carbone) le plus élevé parmi les hydrocarbures et les émissions de CO2 les plus faibles;

le gaz naturel peut ouvrir la voie à l'exploitation de l'hydrogène. Un réseau de gaz naturel bien établi pourrait faciliter le développement de petites installations locales à hydrogène.

Les obstacles à la diffusion de véhicules roulant au gaz naturel sont principalement liés à l'insuffisance et à l'hétérogénéité du réseau de distribution.

4.2.2

En ce qui concerne les biocarburants, ils associent les bons résultats environnementaux du gaz naturel et l'avantage de constituer une source d'énergie renouvelable, ce qui réduit la dépendance par rapport aux combustibles fossiles. En outre, même si cela n'a pas encore été clairement prouvé, il semble réellement possible de créer de nouveaux emplois dans le secteur agricole, ou au moins de ne plus en perdre. Les ressources forestières peuvent contribuer à la production de biocarburants, par exemple grâce à la gazéification de la liqueur noire ou à la fermentation de la biomasse ligno-cellulosique. Ces deux technologies étant actuellement encore en phase d'expérimentation, leur contribution à la production de biocarburants ne pourra être perceptible qu'à moyen terme. Cependant, compte tenu de la demande actuelle de carburants pour les transports (15), il convient d'examiner toute augmentation spectaculaire de l'utilisation de biocarburants à la lumière des effets globaux que celle-ci produit sur l'environnement:

les cultures destinées à la fabrication du biodiesel représentent une production de niche, qui ne peut répondre à l'ensemble de la demande européenne de carburant;

pour atteindre l'objectif de 6 % en 2010, il faudra consacrer jusqu'à 13 % de l'ensemble des surfaces agricoles de l'UE des 25 aux cultures permettant de produire des biocarburants. Cela risque d'entraîner des mesures onéreuses afin de protéger les terres, les nappes phréatiques ainsi que la biodiversité et pour empêcher de nouvelles émissions de gaz à effet de serre (16). Les importations ne feraient que déplacer le problème dans d'autres pays, ce qui augmenterait le trafic maritime.

4.2.3

D'après sa communication du 7 février 2006, il semblerait que la Commission ait l'intention de s'attaquer aux problèmes et incertitudes inhérents aux biocarburants (17). Plusieurs mesures ont été rassemblées en vue de promouvoir et soutenir la production et l'utilisation des biocarburants à l'échelle de l'UE et dans les pays tiers. Le CESE suivra avec beaucoup d'intérêt la mise en œuvre de cette stratégie.

4.3

La réalisation de l'objectif de 2020 pour les carburants de substitution requiert une approche synergique, c'est-à-dire que les trois carburants doivent susciter le même intérêt.

4.4

Il est raisonnable de penser que les efforts liés au développement du marché de ces carburants de substitution qui ont prouvé leur valeur commerciale ne rencontreront pas beaucoup d'obstacles étant donné l'existence du savoir-faire et des technologies.

4.5

La Commission européenne devrait engager une réflexion commune avec les milieux industriels sur les raisons qui ont jusqu'à présent empêché le développement du gaz naturel en tant que carburant automobile. Selon nous, il conviendrait que chaque État membre fixe son objectif minimal en tenant compte de son contexte national.

4.6

Cette proposition devrait également inclure toutes les exigences techniques et de sécurité relatives aux stations de remplissage de gaz naturel sous pression. Dans de nombreux cas, les dispositions en la matière sont assez vieilles et ne tiennent pas compte des progrès récents. Une révision en ce sens, conjuguée à la simplification de mesures administratives, peut certainement contribuer à l'essor des stations de remplissage de gaz naturel sous pression. Les procédures d'autorisation de construction d'une station de remplissage de gaz sont très souvent inutilement compliquées et prennent trop de temps.

4.7

Comme indiqué au paragraphe 4.2.1, une telle démarche facilitera également la transition vers les véhicules à hydrogène dans le futur. En fait, les avancées technologiques réalisées dans le domaine du stockage des carburants à bord des véhicules s'avèrent également primordiales pour l'hydrogène comprimé. Il en va de même pour l'approvisionnement, les compteurs et la conception des stations de réapprovisionnement de la filière hydrogène. Tout investissement dans le domaine des technologies utilisant le gaz naturel est également bénéfique au progrès des technologies de l'hydrogène.

4.8

Le développement rapide des carburants de substitution commercialisés peut fournir une solution de repli au cas où un imprévu vient retarder l'ambitieux programme de développement de l'hydrogène.

4.9

Enfin et surtout, le CESE rappelle que la possibilité de réaliser de vrais progrès vers des véhicules plus propres et consommant moins de carburant ne dépend pas que du développement de carburants de substitution, mais également de la possibilité d'améliorer la qualité des infrastructures afin de lutter plus efficacement contre les embouteillages, de la promotion des transports en commun, et, avant tout, de la capacité à changer le comportement des consommateurs. L'engouement actuel pour les véhicules de type «SUV» («Sport Utility Vehicles» — véhicules utilitaires de sport) démontre toutefois que les consommateurs ne sont pas enclins au changement. La plupart de ces véhicules consomment beaucoup de carburant et émettent une quantité considérable de CO2. La demande croissante de ce type de véhicules fait que les constructeurs automobiles ont du mal à s'engager en faveur d'automobiles plus respectueuses de l'environnement.

Bruxelles, le 17 mai 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  «Promouvoir les énergies renouvelables: moyens d'action et instruments de financement» (JO C 108 du 30.04.2004), «La fusion nucléaire» (JO C 302 du 07.12.2004), «Situation et perspectives des sources d'énergie “traditionnelles” que sont le charbon, le pétrole et le gaz naturel dans la future combinaison énergétique» (JO C 28 du 03.02.2006); «Sources d'énergie renouvelables» (JO C 65 du 17.3.2006); «Efficacité énergétique» (JO C 110 du 9.5.2006).

(2)  «L'approvisionnement énergétique de l'UE – Stratégie d'optimalisation» (CESE TEN/227).

(3)  Voir le document COM(2005) 628 final du 7 décembre 2005.

(4)  Voir la note de bas de page no 16 dans le document intitulé «Plan d'action – biomasse» COM(2005) 628 du 7 décembre 2005.

(5)  COM(2006) 34 final du 7 février 2006.

(6)  COM(2001) 547.

(7)  COM(2000) 769.

(8)  COM(2001) 370.

(9)  JO C 149 du 21.06.2002.

(10)  Directives 2003/30/CE (JO L 123/42 du 08.05.2003) et 2003/96/CE (JO L 283/51 du 27.10.2003).

(11)  Rapport du groupe de contact «Carburants de substitution», «Market Development of alternative fuels», décembre 2003.

(12)  Sous-titre «Politique agricole» au point 2.2.

(13)  COM(2005) 634 du 21 décembre 2005.

(14)  Voir la directive 2005/55/CE.

(15)  Les biocarburants représentent à l'heure actuelle seulement environ 0,6 % de la consommation de gazole et d'essence dans l'UE.

(16)  Agence européenne pour l'environnement (AEE 2004/04). D'autres études tentent d'estimer la quantité de biomasse que l'Europe pourrait utiliser sans porter atteinte à l'environnement.

(17)  «Une stratégie de l'UE en faveur des biocarburants», COM(2006) 34 final.