8.8.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 185/71


Avis du Comité économique et social européen sur le «Cadre juridique pour la politique des consommateurs»

(2006/C 185/13)

Le 10 février 2005, conformément à l'article 29 du Règlement intérieur, paragraphe 2, le Comité économique et social européen a décidé d'élaborer un avis sur le: «Cadre juridique pour la politique des consommateurs».

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 28 mars 2006 (rapporteur: M. PEGADO LIZ).

Lors de sa 426ème session plénière des 20 et 21 avril 2006 (séance du 20 avril), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 45 voix pour, 26 voix contre et 2 abstentions.

1.   Synthèse

1.1

Dans toute communauté de droit, la politique que celle-ci entend mener doit se fonder sur une base juridique qui définit les limites assignées à la compétence de cette communauté et les paramètres de son action. L'Union européenne est une communauté de droit qui doit répondre à cette exigence.

1.2

Pour qu'une base juridique soit adéquate, opérationnelle et efficace, elle doit être claire, précise et autonome. Elle doit contenir les objectifs, les principes fondateurs et les critères de mises en œuvre de la politique qu'entend poursuivre cette communauté de droit. Elle doit couvrir tous les domaines de la politique pour laquelle elle a été conçue.

1.3

Au sein de l'Union européenne, dès l'adoption du Traité de Maastricht, la nouvelle base juridique d'intervention en matière de politique de protection des consommateurs fut l'article 129-A considéré comme rapidement insuffisant pour servir de fondement au développement d'une politique à part entière en ce domaine.

1.4

Le défaut d'application de cette base juridique au fil des années a confirmé les faiblesses de celle-ci en tant que base juridique adéquate et efficace pour la promotion d'une réelle politique de protection des intérêts des consommateurs au niveau communautaire.

1.5

Les modifications introduites par le nouvel article 153 du Traité d'Amsterdam n'ont pas été en mesure de rencontrer les faiblesses ainsi dénoncées et les textes qui étaient proposés en vue de l'adoption de la Constitution Européenne n'ont pas, non plus, rencontré ces questions.

1.6

La politique des consommateurs est de toute évidence une des politiques les plus proches des citoyens européens. Elle peut influencer dans une large mesure leur adhésion à l'idéal européen dès lors que celui-ci rencontre leurs besoins et leurs aspirations, ce qui n'a pas toujours été le cas (1).

1.7

Les orientations de la Commission en matière de politique de protection des consommateurs (2) confirment une dégradation malheureusement préoccupante de la protection et de la promotion des intérêts des consommateurs. Cette carence renforce le besoin et la nécessité urgente d'une réflexion sur la base juridique que contient le Traité en cette matière.

1.8

Semblable réflexion est développée dans cet avis. Elle conduit le Comité économique et social européen à constater, qu'au-delà de l'indispensable volonté politique de faire progresser la politique de protection des intérêts des consommateurs dans le sens d'une promotion accrue de sa participation et de la protection de ses intérêts dans tous les domaines des politiques communautaires, il est également nécessaire de procéder à une étude de fond sur la refonte du cadre juridique pour asseoir la politique de protection des intérêts consommateurs.

1.9

Aidé par de nombreuses contributions de nombreux juristes européens dont l'expertise est généralement reconnue en la matière, le Comité économique et social européen peut être en mesure de conclure en proposant une nouvelle base juridique pour la politique des consommateurs. Elle devrait contribuer de façon décisive à une amélioration, à une simplification voire même à une réduction de la réglementation, en recommandant à la Commission, au Conseil ainsi qu'aux États membres de veiller à ce que semblable proposition soit prise en considération dans la perspective d'une prochaine révision du texte du Traité.

2.   Introduction. Objectif de l'avis d'initiative

2.1

Lorsque le CESE a décidé d'approuver le présent avis d'initiative, son objectif a été de promouvoir une réflexion approfondie sur la base juridique à choisir pour la politique — des consommateurs au niveau européen — à savoir l'article 153 du Traité, et ce, en le mettant en rapport tant avec le texte constitutionnel soumis aux différents États membres qu'avec le droit dérivé. Il a également veillé à faire participer les représentants intéressés par cette question ainsi que des spécialistes en matière de droit communautaire de la consommation.

2.1.1

Conscients des faiblesses que représente actuellement la rédaction de l'article 153, nombreux étaient ceux qui s'accordaient à considérer que ces faiblesses étaient à l'origine du défaut d'utilisation pratique de cet article comme base juridique du droit dérivé en matière de promotion des droits et des intérêts des consommateurs ainsi qu'en matière de développement de la politique des consommateurs dans l'Union européenne. Celle-ci avait donc tout à gagner si elle pouvait être dotée d'une base juridique appropriée, opérante et efficace.

2.2

Les institutions européennes en général et en particulier les organisations de la société civile, les organisations des consommateurs et les interlocuteurs sociaux seraient assurément les premiers bénéficiaires de l'amélioration de la base juridique de la politique des consommateurs dans le Traité.

2.2.1

Le CESE, en tant que forum de représentation institutionnelle de la société civile organisée, a été jugé comme étant le lieu privilégié pour mener à bon port cette tâche, dans un esprit de dialogue entre les interlocuteurs sociaux et avec l'appui des experts universitaires en la matière.

2.2.2

Le CESE considère que la politique des consommateurs est de toute évidence une des politiques les plus proches des citoyens européens. Elle peut et doit influencer dans une large mesure leur adhésion à l'idéal européen dès lors que celui-ci rencontre leurs besoins et leurs aspirations.

2.2.3

Le 14 octobre 2005, le Comité économique et social européen a auditionné de nombreux représentants qui avaient ainsi répondu favorablement au questionnaire préparé à cet effet. Les opinions et les suggestions ainsi recueillies ont permis de mieux fonder cet avis. Le CESE remercie ici vivement tous ceux qui ont permis l'élaboration de ce texte (3).

3.   La question: une base juridique pour la politique des consommateurs

3.1

La base juridique actuelle pour la politique de défense des consommateurs figure dans le titre XIV du Traité, intitulé «protection des consommateurs», à l'article 153. L'article se lit comme suit:

1.

«Afin de promouvoir les intérêts des consommateurs et d'assurer un niveau élevé de protection des consommateurs, la Communauté contribue à la protection de la santé, de la sécurité et des intérêts économiques des consommateurs ainsi que la promotion de leur droit à l'information, à l'éducation et à s'organiser afin de préserver leurs intérêts.

2.

Les exigences de la protection des consommateurs sont prises en considération dans la définition et la mise en œuvre des autres politiques et actions de la communauté.

3.

La Communauté contribue à la réalisation des objectifs visés au paragraphe 1 par:

a)

des mesures qu'elle adopte en application de l'article 95 dans le cadre de la réalisation du marché intérieur;

b)

des mesures qui appuient et complètent la politique menée par les états membres, et en assure le suivi.

4.

Le Conseil, statuant conformément à la procédure visée à l'article 251 et après consultation du Comité économique et social, arrête les mesures visées au paragraphe 3,.b).

5.

Les mesures arrêtées en application du paragraphe 4 ne peuvent empêcher un État membre de maintenir ou d'établir des mesures de protection plus strictes. Ces mesures doivent être compatibles avec le présent traité et seront notifiées à la Commission»  (4) .

3.2

La protection des consommateurs pour être élevée au rang de matière déférée à la compétence de l'Union européenne doit nécessairement faire l'objet d'une disposition spécifique du Traité en application de l'article 5 de ce même Traité qui, dans sa version consolidée, se lit comme suit:

«Le Parlement européen, le Conseil, la Commission, la Cour de justice et la Cour des comptes exercent leurs attributions dans les conditions et aux fins prévues, d'une part, par les dispositions des traités instituant les Communautés européennes et des traités et actes subséquents qui les ont modifiés ou complétés et, d'autre part, par les autres dispositions du présent traité».

3.3

L'importance de cette règle aux termes de laquelle les États ont donc bien le pouvoir de définir leur propre compétence, mérite d'être soulignée tant notamment les lacunes, l'imprécision d'un texte ou son caractère contradictoire peuvent conduire à invalider les règles subséquentes adoptées par les institutions européennes, en vertu de ce Traité.

3.4

Il est opportun de rappeler à ce stade comment, dans son arrêt du 5 octobre 2000, la Cour de justice a rappelé qu'un acte adopté sur le fondement de l'article 100 A (aujourd'hui 95) doit avoir effectivement pour objet l'amélioration des conditions de l'établissement et du fonctionnement du marché intérieur. La Cour rappelle que si la simple constatation des disparités entre les réglementations nationales ainsi que le risque abstrait d'entrave aux libertés fondamentales ou de distorsion de concurrence étaient suffisants pour justifier le choix de l'article 100 A comme base juridique, le contrôle juridictionnel du respect de la base juridique serait privé de toute efficacité (5).

3.5

Cette exigence d'une base juridique claire et, partant, susceptible de contrôle dans une perspective internationale est également à inscrire sur le plan politique comme étant un signal constitutionnel incontestable concernant le besoin d'une politique de protection des consommateurs. Il n'est pas inutile de rappeler à ce sujet comment l'Acte unique européen des 17 et 28 février 1986 a remédié partiellement à la lacune que présentait le Traité de Rome en introduisant un titre uniquement consacré à l'environnement composé des articles 130 R à 130 T (aujourd'hui articles 174 à 176). Les objectifs poursuivis par l'article 175 et les critères qui ont été définis par ce même texte pour l'élaboration de l'action de la Communauté en matière d'environnement ont manifestement favorisé l'émergence d'un ensemble efficace de normes en cette matière.

3.5.1

A cet égard, la lecture comparée des articles 175 et 153 actuels du Traité montre manifestement que la qualité même de la base juridique est déterminante pour les interventions ultérieures. En matière d'environnement, les objectifs sont clairement et précisément affirmés.

Par ailleurs, l'article 175 définit des principes qui sont fondateurs des interventions de la Communauté en ce domaine.

Enfin, des paramètres techniques définis à l'article 175. 3 sont également des facteurs contribuant à une application rationnelle et utile de la politique en matière d'environnement.

3.5.2

Dans la mesure où le législateur communautaire dispose d'un pouvoir d'appréciation sur le caractère adéquat des mesures qu'il entend adopter, il est évident que la qualité de la base juridique est déterminante dans la mesure où elle réduit les hypothèses d'erreur manifeste d'appréciation ou de détournement de pouvoir ou de dépassement manifeste du pouvoir d'appréciation (6).

4.   L'article 153 est-il une base juridique acceptable pour fonder la politique communautaire pour les consommateurs européens?

4.1

À la lumière de ces enseignements, il faut constater que l'article 153 actuel du Traité ne constitue plus une base juridique qui offre des garanties suffisantes au regard des objectifs de protection des consommateurs.

4.2

Il convient de rappeler que le droit de la consommation au niveau européen s'est essentiellement développé par conséquent autour de la référence que constitue l'article 95 du Traité et doit beaucoup aux impulsions données pour la réalisation du marché intérieur. Certes, la politique de protection des consommateurs se veut transversale, et dans d'autres domaines du Traité, il existe des références explicites à la nécessité de prendre en compte la protection des consommateurs. Néanmoins, de façon générale il est considéré que l'article 153 dans sa rédaction actuelle est insuffisant.

4.3

Il est également constaté que les mesures de protection et de défense des consommateurs n'ont été adoptées qu'exceptionnellement sur base de cet article 153 (ou antérieurement l'article 129-A).

4.4

Il faut également ajouter à cette critique, qui fait de la politique des consommateurs un accessoire des règles propres au développement du marché intérieur, les conséquences tirées de l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes du 5 octobre 2000 (7) et évoquées ci-dessus. L'incertitude qui est liée notamment à cette jurisprudence peut conduire à mettre en cause, notamment par voie de questions préjudicielles, la base juridique même de certaines directives adoptées dans le domaine de la protection des consommateurs (garantie, vente à domicile, etc.).

4.5

En outre, le texte actuel définit un critère qui est celui du niveau de protection élevé des consommateurs. Ce niveau élevé de protection des consommateurs tel qu'il est défini à l'article 153 ne conduit pas nécessairement à rechercher au sein des États membres le système juridique qui offre le plus de garanties. L'article 153. 5 permet dans un tel cas en effet de maintenir des systèmes juridiques plus protecteurs, pour autant qu'ils soient compatibles avec le Traité.

4.5.1

Par ailleurs, la définition d'un niveau de protection élevé n'est guère aisée. Les paramètres qui doivent être pris en considération ne sont nullement repris dans l'article 153 et peuvent conduire à plusieurs difficultés d'interprétation.

4.6

Il semble donc aujourd'hui que la base juridique doit être revue à la lumière des réflexions qui suivent.

4.6.1

La politique de protection des consommateurs doit faire partie des compétences propres de l'Union et ne pas se présenter comme un complément de celle menée par les États membres. Il est en effet paradoxal de considérer que la protection des consommateurs dont on dit qu'elle peut contribuer à l'amélioration du marché intérieur serait de la compétence des États membres.

4.6.2

La santé, la sécurité et les intérêts économiques des consommateurs sont présentés comme des domaines auxquels l'Union européenne doit apporter une contribution. Il conviendrait d'y voir plutôt des objectifs qui méritent assurément d'être élargis. Ainsi, les intérêts économiques des consommateurs sont-ils les seuls à prendre en considération? Il existe manifestement une contradiction plus qu'apparente entre la promotion de ces intérêts et la contribution à la protection de ceux-ci.

4.6.3

Le droit à l'information, le droit à l'éducation et à l'organisation afin de préserver ces intérêts sont des principes qu'il conviendrait de reconnaître comme étant des règles fondamentales qui détermineraient la politique de l'Union.

4.6.4

Les critères qui doivent être pris en compte pour définir le niveau élevé de protection n'étant pas définis, il faut que le Traité lui-même, les mentionne.

4.6.5

La réflexion sur la protection des consommateurs comme base juridique autonome devra prendre en considération la priorité qui doit être reconnue à la politique communautaire tant sur le fond que sur la forme. Le principe de double subsidiarité est évidemment une restriction qui paralyse tant au niveau européen que national toute politique de développement de protection des consommateurs. La double subsidiarité qu'organise l'article 153 doit être évidemment, dans ces conditions abandonnée.

4.6.6

La base juridique dans le Traité doit également s'inscrire dans une recherche où le consommateur n'est pas seulement protégé ou défendu mais bien actif. Le consommateur est un citoyen qui, dans les choix que la société propose, doit avoir un droit de parole évident et être entendu.

4.6.7

Il conviendra également de voir si les dispositions du Traité qui ont trait à l'accès à la Cour de justice ne doivent pas reconnaître un accès direct des associations de consommateurs en tant que groupes représentatifs concernés par les actes pris par l'Union européenne.

4.6.8

Il faut ajouter que le texte, dans sa formulation actuelle, se fonde sur une conception restrictive de la protection des consommateurs pratiquement concentrée sur les seules vertus de l'information.

5.   Objectifs, principes et critères pour la définition d'une base juridique pour la politique des consommateurs

5.1

Quels sont les critères qui, de manière générale, doivent déterminer la qualité d'une base juridique dans un Traité?

Il ressort des éléments retenus ci-dessus que la base juridique doit:

être claire et précise,

contenir les objectifs à poursuivre dans le cadre de la politique définie, les principes fondateurs de cette politique et les critères de mise en œuvre,

être autonome.

Ces différentes caractéristiques sont essentielles pour tenter de remédier aux difficultés énoncées ci-dessus.

5.2

Des questions périphériques peuvent en outre être intégrées dans une perspective d'affinement de la base juridique. Ainsi, des options quant à la qualité de l'harmonisation doivent être envisagées. Notamment, la politique d'harmonisation maximale ou complète est soutenue par la Commission. Faut-il encore que le niveau de protection choisi soit effectivement un niveau de protection élevé, faute de quoi l'harmonisation maximale ou totale risque de se développer au détriment des intérêts des consommateurs.

5.3

Le texte proposé tend à modifier l'article 3. 1. t du Traité en indiquant clairement, au nombre des objectifs poursuivis par les institutions, la politique de promotion et de protection des intérêts des consommateurs.

5.4

L'article 153 suggéré se décline en trois temps:

5.4.1

Il contient un inventaire des objectifs poursuivis par la politique de l'Union européenne dans le domaine de la consommation. Ces objectifs sont traditionnels. Néanmoins, il faut souligner certaines particularités de ceux-ci:

La promotion des droits à l'information, à l'éducation, à la participation et à l'organisation pour la défense et la représentation des intérêts des consommateurs, notamment par la reconnaissance des droits individuels et collectifs en ce domaine constitue une innovation. Elle est le signe exprès que les mécanismes de recours collectifs, certes, doivent être mis en place, mais également que des modes associant, de manière collective, les consommateurs à l'élaboration des règles qui les concernent doivent être organisés.

La protection de la santé et de la sécurité des consommateurs est évidemment un thème traditionnel qui doit être affirmé comme un des objectifs poursuivis par le Traité.

Enfin, la promotion des intérêts juridiques, économiques, sociaux et culturels des consommateurs constitue manifestement un élément nouveau. Elle reconnaît en effet le consommateur comme acteur de la société et non pas comme simple utilisateur des produits et des services. C'est au terme de la reconnaissance de cette promotion que des politiques notamment de développement durable peuvent être élaborées. C'est également sur le même registre que s'élaborera une politique associant étroitement la promotion des intérêts des consommateurs et le respect dû à l'environnement.

5.4.2

Des principes peuvent, au stade de la formulation de l'article 153, être affirmés:

L'action préventive;

La réparation efficace;

Le développement d'une consommation durable;

Le principe créateur de risque-payeur;

Le principe participatif.

Ces cinq principes sont nécessaires pour mener à bien la politique ci-dessus évoquée.

5.4.3

Le texte proposé rappelle, de manière traditionnelle, que les exigences, certes, qui s'inscrivent ici dans une base autonome ne peuvent être non plus ignorées dès lors qu'il s'agit de développer d'autres politiques de l'Union européenne.

5.4.4

Certains paramètres doivent être pris en compte notamment dès lors qu'il s'agit de développer ces mesures. La notion de degré de protection élevé prendra en compte notamment des données socio-économiques qui sont disponibles et qui permettent de définir exactement le comportement des consommateurs face à l'acquisition et à l'utilisation des produits et services mis sur le marché. De même, la reconnaissance explicite de recours collectifs doit être affirmée.

5.4.5

L'article 153 a, tel qu'il est proposé, définit la politique qui doit être suivie par le Conseil.

Une des questions débattues est celle de l'effet direct des directives. La solution proposée est celle tendant à privilégier les règlements comme technique d'harmonisation. Elle rend vain le débat en l'état sur l'effet précisément des directives. Une formule souple permettant d'amener les États membres à prendre position lorsqu'ils entendent maintenir ou établir des mesures de protection est élaborée.

Cette solution favorise l'harmonisation maximale, soumise cependant à une appréciation au cas par cas.

5.4.6

Enfin, le texte de l'article 153 contient une innovation dans la mesure où il élève au rang de destinataires des associations de consommateurs au sens de l'article 230 du Traité. En d'autres termes, les actes communautaires qui méconnaissent les dispositions de ce Traité peuvent faire l'objet d'un recours direct des associations devant la Cour.

6.   Conclusion: proposition d'une nouvelle base juridique

Vu ces données, la proposition est formulée comme suit:

Article 153

1.   La politique de la Communauté, dans le domaine de la consommation, assure la poursuite des objectifs suivants:

La promotion des droits à l'information, à l'éducation, à la participation, à l'organisation pour la défense et la représentation des intérêts du consommateur, notamment par la reconnaissance des droits individuels et collectifs dans ces domaines;

La protection de la santé et de la sécurité des consommateurs;

La promotion des intérêts juridiques, économiques, sociaux et culturels des consommateurs.

2.   La politique de la Communauté dans le domaine de la protection des consommateurs vise au niveau de protection le plus élevé. Elle est fondée sur les principes suivants:

Principe d'action préventive;

Principe de réparation efficace des atteintes aux droits et aux intérêts individuels et collectifs des consommateurs;

Principe créateur de risque-payeur;

Principe de développement d'une politique de consommation et de protection durable;

Principe de participation des consommateurs par des instances représentatives de leurs intérêts à l'élaboration et à l'application des règles.

3.   Les exigences en matière de protection des consommateurs sont intégrées dans la définition et la mise en œuvre des autres politiques de la Communauté.

4.   Dans l'élaboration de son action en matière de protection des consommateurs, la Communauté tient compte:

de niveaux de protection élevés qui sont reconnus aux consommateurs au sein des États membres;

des données socioéconomiques disponibles relatives à l'acquisition et à l'utilisation des produits et services mis sur le marché;

de l'effectivité des recours mis en place en cas d'atteinte aux droits ou aux intérêts des consommateurs, notamment par la reconnaissance d'actions d'intérêt collectif.

Article 153 a

1.   Le Conseil statuant conformément à la procédure visée à l'article 251, et après consultation du Comité économique et social, arrête des mesures nécessaires à la réalisation des objectifs visés au paragraphe 1 de l'article 153; ces mesures font l'objet d'une révision régulière visant à garantir qu'elles continuent d'assurer un niveau élevé de protection des consommateurs.

2.   Les mesures d'harmonisation à mettre en application avec le paragraphe 1 ne peuvent empêcher un État membre de maintenir ou d'établir des mesures de protection plus strictes. Ces mesures doivent être compatibles avec le présent Traité et seront notifiées à la Commission

3.   La Commission, dans les six mois après la notification mentionnée au paragraphe 3, décide du rejet de la mesure nationale en justifiant notamment si celle-ci représente un obstacle au fonctionnement du marché intérieur. En l'absence d'une décision dans ce délai, la mesure est considérée comme acceptée, sauf si la complexité de la matière exige une prolongation du délai jusqu'à un an au plus, auquel cas l'État membre en reçoit notification dans le premier délai de six mois.

4.   La Commission assure, en coopération étroite avec les états membres, l'application effective des mesures prises en vue de la promotion des droits et intérêts des consommateurs. En particulier, les États membres sont tenus de prendre les dispositions nécessaires pour

a)

Définir et appliquer des sanctions à caractère effectif, proportionnées et dissuasives en cas d'infraction aux mesures qui imposent des obligations ou interdictions pour la protection des consommateurs;

b)

Faire cesser de telles infractions;

c)

Prévoir des procédures judiciaires et non judiciaires simplifiées pour la prévention et la réparation des atteintes aux droits et intérêts des consommateurs et une juste compensation des dommages subis.

5.   Les associations de consommateurs dûment reconnues selon le droit interne des États membres ou par la Commission européenne sont présumées être destinataires au sens de l'article 230 du Traité des mesures prises en application du présent article et de l'article 153.

Bruxelles, le 20 avril 2006.

La Présidente

du Comité économique et social européen

Anne-Marie SIGMUND


(1)  Comme le CESE l'a dénoncé notamment dans son Avis sur «La politique des consommateurs après l'élargissement de l'Union européenne», JO C 221 du 8.09.2005 et le Parlement européen l'a, lui aussi, reconnu dans son rapport sur la promotion et la protection des intérêts des consommateurs dans les nouveaux États membres (Rap. Henrik Dam Kristensen, PE 359.904/02-00). Une telle prise en compte pourrait, d'ailleurs, être mieux assurée par le développement complémentaire d'approches d'autorégulation, de corégulation et de modes alternatifs de règlement des litiges.

(2)  Bien évidentes dans la nouvelle directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 (JO L 149 du 11.06.2005) sur les pratiques commerciales déloyales, dans son programme d'action communautaire dans le domaine de la santé et de la protection des consommateurs (2007/2013) [COM(2005) 115 final] et dans le retrait de la proposition de règlement relatif à la promotion des ventes dans le marché intérieur (COM(2005) 462 final du 27.09.2005).

(3)  À l'audition du 14 octobre 2005 étaient présents: M. Carlos Almaraz, (UNICE), Professeur Thierry Bourgoignie, (Université du Québec à Montréal), Ms Nuria Rodríguez, (Bureau Européen des Unions de Consommateurs), M. Denis Labatut et Ms Kalliopi Spyridaki, (UGAL - Union of Groups of Independant Retailers of Europe), M. Jon-Andreas Lange, (Forbrukerradet – The Consumer Council of Norway), M. William Vidonja, (CEA), Mr Patrick von Braunmühl, (Verbraucherzentrale Bundesverband – vzbv) et Mr Hubert J.J. van Breemen, (VNO NVW).

En outre on a reçu des commentaires écrits en réponse au questionnaire adressé à quelques dizaines de juristes et académiciens partout en Europe, de la part de Professeur Thierry Bourgoignie, (Université du Québec à Montreal), Professeur Jean Calais-Auloy, (Faculté de Droit et des Sciences Économiques de Montpellier), M. Stephen Crampton, (Which?), Professeur Mário Frota, (APDC - Associação Portuguesa de Direito do Consumo), Mme Cornelia Kutterer, (Bureau Européen des Unions de Consommateurs), Mr Jon-Andreas Lange, (Forbrukerradet – The Consumer Council of Norway), Mme René-Claude Mäder, (CLCV - Consommation, Logement et Cadre de Vie), Professeur Stephen Weatherill (ECLG), Professeur Hans Micklitz, (Institut für Europäisches Wirtschafts-und Verbraucherrecht e.V.Universität Bamberg), Mme Gaëlle Patetta, (UFC–Que Choisir?), Professeur Norbert Reich, (Universität Bremen Fachbereich Rechtswissenschaften), de l'UNICE ainsi que de l'Euro Commerce.

(4)  Outre l'article précité, la politique des consommateurs a ses fondements dans différentes autres dispositions du Traité UE, parmi lesquelles on peut distinguer d'emblée celle qui a présidé à l'appel lancé en préambule aux États membres à assurer la promotion du «progrès économique et social de leurs peuples, compte tenu du principe du développement durable et dans le cadre de l'achèvement du marché intérieur» et l'instauration d'une «citoyenneté commune de ressortissants de leur pays», ainsi que dans les dispositions des articles 2 et 6 dudit traité ou encore, dans les dispositions visées aux articles 2; 3, paragraphe 1, alinéa t); 17, paragraphe 2; 33, paragraphe 1 alinéa e); 34, paragraphe 2 II; 75, paragraphe 3, II; 81, paragraphe 3; et 87, paragraphe 2, alinéa a), du Traité CE dans sa rédaction telle qu'issue du Traité de Nice.

(5)  CJCE, 5 octobre 2000, République fédérale d'Allemagne c. Parlement et Conseil, affaire C-376/98, Rec., I -8149, voir plus spécialement les attendus 76 à 89.

(6)  Sur ces questions voir CJCE, 20 octobre 1977, S.A. ROQUETTE FRERES, affaire 29/77, Rec. p. 1835.

(7)  C-376/98, Rec., 1/8498, Allemagne c/Parlement et Conseil.


ANNEXE I

À l'Avis du Comité économique et social européen

Les amendements ci-dessous ont été repoussés au cours des débats mais ont recueilli au moins un quart des voix exprimées:

Paragraphe 1.3

Supprimer le paragraphe.

Exposé des motifs

Le paragraphe 1.3 contient une affirmation catégorique: «Au sein de l'Union européenne, dès l'adoption du Traité de Maastricht, la nouvelle base juridique d'intervention en matière de politique de protection des consommateurs fut l'article 129-A considéré comme rapidement insuffisant pour servir de fondement au développement d'une politique à part entière en ce domaine». Cette critique sévère n'est étayée par aucune preuve.

Résultats du vote

Voix pour: 23

Voix contre: 39

Abstentions: 5

Paragraphe 1.4

Supprimer le paragraphe.

Exposé des motifs

Le paragraphe 1.4 contient une affirmation catégorique: «Le défaut d'application de cette base juridique au fil des années a confirmé les faiblesses de celle-ci en tant que base juridique adéquate et efficace pour la promotion d'une réelle politique de protection des intérêts des consommateurs au niveau communautaire». Cette critique sévère n'est étayée par aucune preuve.

Résultats du vote

Voix pour: 23

Voix contre: 39

Abstentions: 5

Paragraphe 1.5

Supprimer le paragraphe.

Exposé des motifs

Le paragraphe 1.5 contient une affirmation catégorique: «Les modifications introduites par le nouvel article 153 du Traité d'Amsterdam n'ont pas été en mesure de rencontrer les faiblesses ainsi dénoncées et les textes qui étaient proposés en vue de l'adoption de la Constitution européenne n'ont pas, non plus, rencontré ces questions». Cette critique sévère n'est étayée par aucune preuve.

Résultats du vote

Voix pour: 23

Voix contre: 39

Abstentions: 5

Paragraphe 4.6.1

Biffer intégralement ce paragraphe.

Exposé des motifs

Le paragraphe qu'il est proposé de supprimer aboutirait à convertir la politique des consommateurs en compétence communautaire, privant ainsi les États membres de la possibilité d'édicter des règles plus strictes en la matière.

Résultats du vote

Voix pour: 26

Voix contre: 35

Abstentions: 8

Paragraphe 4.6.7

Supprimer le paragraphe.

Exposé des motifs

Il n'est pas souhaitable que les associations des consommateurs puissent avoir un accès direct à la Cour de justice. Toutes les associations de défense d'intérêts pourraient alors demander cela au nom de leurs membres. Un tel droit pourrait entraîner des situations inacceptables (comme on les connaît aux États-Unis d'Amérique — class actions).

Résultats du vote

Voix pour: 30

Voix contre: 38

Abstentions: 4

Paragraphe 5.4.1

Supprimer les mots:

La promotion des droits à l'information, à l'éducation, à la participation et à l'organisation pour la défense et la représentation des intérêts des consommateurs, notamment par la reconnaissance des droits individuels et collectifs en ce domaine constitue une innovation. Elle est le signe exprès que les mécanismes de recours collectifs, certes, doivent être mis en place, mais également que des modes associant, de manière collective, les consommateurs à l'élaboration des règles qui les concernent doivent être organisés.

Exposé des motifs

Il n'est pas souhaitable que les associations des consommateurs puissent avoir un accès direct à la Cour de justice. Toutes les associations de défense d'intérêts pourraient alors demander cela au nom de leurs membres. Un tel droit pourrait entraîner des situations inacceptables (comme on les connaît aux États-Unis d'Amérique — class actions).

Résultats du vote

Voix pour: 30

Voix contre: 40

Abstentions: 3

Paragraphe 5.4.4

Supprimer la dernière phrase:

5.4.4

Certains paramètres doivent être pris en compte notamment dès lors qu'il s'agit de développer ces mesures. La notion de degré de protection élevé prendra en compte notamment des données socioéconomiques qui sont disponibles et qui permettent de définir exactement le comportement des consommateurs face à l'acquisition et à l'utilisation des produits et services mis sur le marché. De même, la reconnaissance explicite de recours collectifs doit être affirmée.

Exposé des motifs

Il n'est pas souhaitable que les associations des consommateurs puissent avoir un accès direct à la Cour de justice. Toutes les associations de défense d'intérêts pourraient alors demander cela au nom de leurs membres. Un tel droit pourrait entraîner des situations inacceptables (comme on les connaît aux États-Unis d'Amérique — class actions).

Résultats du vote

Voix pour: 27

Voix contre: 42

Abstentions: 4

Paragraphe 5.4.6

Supprimer le paragraphe.

Exposé des motifs

Il n'est pas souhaitable que les associations des consommateurs puissent avoir un accès direct à la Cour de justice. Toutes les associations de défense d'intérêts pourraient alors demander cela au nom de leurs membres. Un tel droit pourrait entraîner des situations inacceptables (comme on les connaît aux États-Unis d'Amérique — class actions).

Résultats du vote

Voix pour: 26

Voix contre: 44

Abstentions: 2

Paragraphe 6

Supprimer le paragraphe.

Exposé des motifs

Le paragraphe 6 contient une proposition ambitieuse de nouvelle base juridique pour la politique de protection des consommateurs. Comme démontré aux paragraphes précédents (1.3, 1.4 et 1.5), le texte de l'avis ne comporte pas suffisamment de preuves démontrant que ces changements sont nécessaires ou utiles. Au lieu de lancer une vaste modification de la base juridique existante pour la politique de protection des consommateurs, l'avis devrait porter bien davantage sur les véritables arguments qui feront de la nouvelle base légale la priorité lors de la prochaine révision du Traité.

Résultats du vote

Voix pour: 23

Voix contre: 39

Abstentions: 5

Article 153

Supprimer dans le point 4 le texte du dernier tiret.

de l'effectivité des recours mis en place en cas d'atteinte aux droits ou aux intérêts des consommateurs, notamment par la reconnaissance d'actions d'intérêt collectif.

Exposé des motifs

Il n'est pas souhaitable que les associations des consommateurs puissent avoir un accès direct à la Cour de justice. Toutes les associations de défense d'intérêts pourraient alors demander cela au nom de leurs membres. Un tel droit pourrait entraîner des situations inacceptables (comme on les connaît aux États-Unis d'Amérique — class actions).

Résultats du vote

Voix pour: 27

Voix contre: 44

Abstentions: 2

Article 153 A

Supprimer le quatrième paragraphe de l'article 153 A que l'avis propose d'insérer dans le traité.

Exposé des motifs

Ce paragraphe aurait pour effet d'assujettir la politique des consommateurs aux règles du marché intérieur. Un tel schéma est en contradiction sur le fond avec le reste de l'avis.

Résultats du vote

Voix pour: 27

Voix contre: 34

Abstentions: 14


ANNEXE II

À l'Avis du Comité économique et social européen

Le passage suivant de l'avis de section a été rejeté au profit d'un amendement adopté par l'Assemblée, mais a obtenu au moins un quart des voix exprimées:

Paragraphe 6, Article 153 A

2.

Les mesures d'harmonisation prennent par priorité la forme de règlement.

Résultats du vote

31 voix pour la suppression de ce paragraphe

24 voix contre

14 abstentions.