52006DC0231

Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, Comité économique et social Européen et au Comité des Régions - Stratégie thématique en faveur de la protection des sols [SEC(2006)620] [SEC(2006)1165] /* COM/2006/0231 final */


[pic] | COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES |

Bruxelles, le 22.9.2006

COM(2006)231 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL, AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

Stratégie thématique en faveur de la protection des sols [SEC(2006)620][SEC(2006)1165]

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL, AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

Stratégie thématique en faveur de la protection des sols (Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE)

1. INTRODUCTION

Le sol est généralement défini comme la couche supérieure de la croûte terrestre. Il est constitué de particules minérales, de matières organiques, d'eau, d'air et d'organismes vivants. Le sol est l'interface entre la terre, l'air et l'eau et abrite la majeure partie de la biosphère.

La formation des sols étant un processus extrêmement lent, on peut considérer qu'il s'agit essentiellement d'une ressource non renouvelable. Le sol est une source de denrées alimentaires, de biomasse et de matières premières. Il sert de plate-forme pour les activités humaines, constitue un élément du paysage et du patrimoine culturel et joue un rôle central en tant qu'habitat et pool génique. Il assure des fonctions de stockage, de filtration et de transformation de nombreuses substances, y compris l'eau, les nutriments et le carbone. Il représente le puits de carbone le plus important au monde (1 500 gigatonnes). Ces fonctions doivent être protégées en raison de leur importance socio-économique et environnementale.

Le sol est un milieu extrêmement complexe et variable. Plus de 320 grands types de sols ont été répertoriés en Europe, chacun d'entre eux présentant des variations considérables en matière de propriétés physiques, chimiques et biologiques. La structure du sol est déterminante pour sa capacité de remplir ses fonctions. Toute dégradation de sa structure détériore également les autres milieux naturels et écosystèmes.

Le sol est soumis à une série de processus de dégradation ou de menaces : érosion, diminution de la teneur en matières organiques, contamination locale et diffuse, imperméabilisation, tassement, diminution de la biodiversité, salinisation, inondations et glissements de terrain. Dans des conditions climatiques arides ou sub-arides, la combinaison de certaines de ces menaces peut conduire à terme à la désertification.

Étant donné l'importance des sols et la nécessité d'enrayer leur dégradation, le sixième programme d'action pour l'environnement[1] a préconisé l'établissement d'une stratégie thématique sur la protection des sols (ci-après dénommée «la stratégie»).

La Commission a commencé par présenter, en 2002, une communication[2] qui a recueilli des conclusions favorables de la part des autres institutions européennes.

2. ÉVALUATION DE LA SITUATION

2.1. L'état des sols en Europe

La dégradation des sols représente un grave problème en Europe. Elle est provoquée ou aggravée par des activités humaines telles que des pratiques agricoles et sylvicoles inadéquates, les activités industrielles, le tourisme, l'expansion urbaine et industrielle et les grands travaux. Ces activités sont dommageables, car elles empêchent les sols de jouer l’entièreté de leurs rôles variés au service de l’homme et des écosystèmes. Cela a pour conséquence des pertes de la fertilité des sols, de carbone et de biodiversité, une diminution de la capacité de rétention de l'eau, une perturbation des cycles des gaz et des nutriments et une réduction de la dégradation des contaminants.

La dégradation des sols influence directement la qualité de l'eau et de l'air, la biodiversité et le changement climatique. Elle peut également altérer la santé de la population en Europe et menacer la sécurité des denrées alimentaires et des aliments pour animaux.

Ce problème touche l'ensemble de l'Union européenne, même si les processus de dégradation des sols varient considérablement d'un État membre à l'autre et que les différentes menaces se posent de manière plus ou moins grave.

D'après les estimations,

- 115 millions hectares, soit 12 % environ de la superficie totale des terres en Europe, sont soumis à l'érosion par l'eau, et 42 millions d'hectares subissent l'érosion éolienne[3];

- 45 % des sols européens ont une faible teneur en matières organiques, principalement dans le sud de l'Europe, mais également dans des régions de France, du Royaume-Uni et d'Allemagne;

- le nombre de sites potentiellement contaminés dans l'UE à vingt-cinq avoisine les 3,5 millions[4].

La base de données «Corine Land Cover»[5] fait apparaître de profondes modifications de l'utilisation des terres en Europe, qui ont une incidence sur les sols. Entre 1990 et 2000, au moins 2,8 % des terres en Europe ont changé d'affectation, avec une augmentation sensible des zones urbaines. Il existe de grandes différences selon les États membres et les régions, la proportion des superficies réaffectées au cours de cette période variant de 0,3 % à 10 %.

Il est difficile, sur la base des données limitées existantes, de faire des extrapolations à partir des tendances actuelles. Néanmoins, les tendances indiquent que les facteurs de menace liés à l'homme sont en augmentation. Le changement climatique, sous la forme de hausses de température et de phénomènes météorologiques extrêmes, accroît les émissions de gaz à effet de serre provenant des sols et aggrave les menaces telles que l'érosion, les glissements de terrain, la salinisation et la diminution des teneurs en matière organique. Tout cela indique que la dégradation des sols en Europe va se poursuivre, peut-être à un rythme plus rapide.

Il est largement prouvé que la plupart des coûts liés à la dégradation des sols ne sont pas supportés par les utilisateurs immédiats des terres, mais généralement par la société dans son ensemble et par des acteurs géographiquement éloignés des sites en cause.

2.2. Les politiques au niveau européen, national et international

Différentes politiques communautaires contribuent à la protection des sols, notamment la politique de l'environnement (dans le domaine de l'air et de l'eau, par exemple) et la politique agricole (agro-environnement et éco-conditionnalité). L'agriculture peut avoir des incidences favorables sur l'état des sols. Ainsi, les pratiques de gestion des terres telles que l'agriculture biologique et l'agriculture intégrée, ou l'agriculture extensive dans les régions montagneuses, peuvent maintenir, voire augmenter, la teneur en matières organiques du sol, et, dans le dernier cas, empêcher les glissements de terrain. Cela étant, les dispositions adoptées en faveur de la protection des sols couvrent de nombreux domaines et, dans la mesure où elles visent souvent à sauvegarder d'autres milieux naturels ou à promouvoir d'autres objectifs, elles ne forment pas une politique de protection des sols cohérente. Cela signifie que même si l'on tire le meilleur profit des politiques en vigueur, elles sont loin de couvrir tous les sols et toutes les menaces recensées pour les sols. La dégradation des sols continue par conséquent.

Depuis l’adoption de la communication de 20022, des efforts ont été entrepris pour que la protection des sols bénéficie des initiatives de politique environnementale récemment adoptées dans les domaines des déchets, de l'eau, de l'air, du changement climatique, des substances chimiques, des inondations, de la diversité biologique et de la responsabilité environnementale. Plus particulièrement, la directive sur la responsabilité environnementale[6] établit un cadre harmonisé pour le régime de responsabilité applicable sur tout le territoire de l'UE lorsque la contamination des sols engendre un risque grave pour la santé humaine. La directive ne s'applique toutefois pas aux phénomènes de contamination anciens et aux dégradations antérieures à son entrée en vigueur. Il existe une panoplie d'approches en matière de protection des sols dans les États membres. Neuf États membres possèdent une législation spécifique sur la protection des sols. Cependant, ces lois ne couvrent souvent qu'une seule menace spécifique, comme la contamination des sols, et n'offrent pas toujours un cadre cohérent de protection.

L'importance de la protection des sols est de mieux en mieux perçue au niveau international, comme en témoigne la révision de 2003 de la Charte du Conseil de l'Europe sur la protection et la gestion durable des sols.

Tous les États membres ainsi que la Communauté sont signataires de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification (UNCCD). Une partie des pays méditerranéens et la plupart des nouveaux États membres sont concernés et ont donc entamé l'adoption de programmes d'action régionaux et nationaux pour lutter contre la désertification.

Le protocole sur la protection des sols de la Convention alpine vise à préserver les fonctions écologiques des sols, à empêcher leur dégradation et à en garantir l’utilisation rationnelle dans cette région.

Le protocole de Kyoto souligne que le sol est un puits de carbone important qui doit être protégé et renforcé lorsque cela est possible. La séquestration du carbone dans les sols agricoles, grâce à certaines pratiques de gestion des terres, peut contribuer à atténuer le changement climatique. Le groupe de travail du Programme européen sur le changement climatique (PECC) consacré aux puits de carbone liés aux sols agricoles a estimé que ce potentiel représentait l'équivalent de 1,5 à 1,7 % des émissions anthropiques de CO2 de l'UE au cours de la première période d'engagement[7] au titre du protocole de Kyoto.

La convention sur la diversité biologique (CDB) a inscrit la biodiversité des sols parmi les domaines qui requièrent une attention particulière. Une «Initiative internationale pour la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique des sols» a été mise en place.

Plusieurs pays, dont les États-Unis, le Japon, le Canada, l'Australie, le Brésil et plusieurs pays en développement, ont établi des politiques de protection des sols qui comprennent des mesures législatives, des documents d'orientation, des systèmes de surveillance, des mesures d'identification des zones à risque, des inventaires, des programmes d'assainissement et des mécanismes de financement pour les sites contaminés dont il est impossible d'identifier les responsables (sites «orphelins»). Ces politiques assurent un niveau de protection des sols comparable à celui de l'approche préconisée par la présente stratégie.

3. OBJECTIF DE LA STRATÉGIE

3.1. Garantir l'utilisation durable du sol

Dans ce contexte, la Commission estime qu'il est indispensable de disposer d'une stratégie globale de l'UE pour la protection des sols. Cette stratégie devrait tenir compte de l'ensemble des diverses fonctions que peuvent remplir les sols, de leur variabilité et de leur complexité ainsi que de la gamme des différents processus de dégradation dont ils peuvent faire l'objet, tout en considérant également les aspects socio-économiques.

L'objectif général poursuivi est la protection et l'utilisation durable des sols, sur la base des principes directeurs suivants:

1. prévention de la dégradation ultérieure des sols et préservation de leurs fonctions:

2. lorsque les sols sont utilisés et leurs fonctions exploitées, de sorte qu'il convient de prendre des mesures en matière de modes d'utilisation et de gestion des sols, et

3. lorsque les sols jouent un rôle de puits/récepteur des répercussions des activités humaines ou des phénomènes environnementaux, de sorte qu'il convient de prendre des mesures à la source;

4. restauration des sols dégradés de manière à les ramener à un niveau de fonctionnalité correspondant au moins à leur utilisation actuelle et à leur utilisation prévue, en tenant compte également des implications financières de la restauration des sols.

3.2. Niveau d'intervention

La réalisation de ces objectifs implique d'agir à différents niveaux – local, national et européen. L'action au niveau européen doit nécessairement s'ajouter à l'action menée par les États membres, étant donné les considérations suivantes[8]:

- La dégradation des sols affecte d'autres aspects environnementaux pour laquelle une législation existe au niveau communautaire. Un échec de la protection des sols amoindrira le développement durable et la compétitivité à long terme de l'Europe. En effet, le sol est lié à l'eau et à l'air d'une telle manière qu'il influence leur qualité. De plus, les fonctions du sol contribuent grandement à des aspects tels que la biodiversité, la protection marine, la gestion des côtes et l'atténuation du changement climatique.

- Distorsion du fonctionnement du marché intérieur – les régimes nationaux en matière de protection des sols étant fort divergents, notamment en ce qui concerne la contamination des sols, ils imposent parfois des obligations très différentes aux agents économiques et entraînent ainsi un déséquilibre des coûts fixes. Dans certains cas, les investissements privés peuvent aussi être freinés s'il n'existe pas de régimes dans ce domaine et si l'ampleur de la dégradation des sols n'est pas connue avec certitude.

- Impact transfrontière – les sols, quoique globalement immobiles, ne le sont pas totalement et leur dégradation dans un État membre ou région peut avoir des conséquences transfrontières. L'appauvrissement des matières organiques du sol dans un État membre nuit à la réalisation des objectifs que s'est fixés l'UE dans le cadre du protocole de Kyoto. Les barrages sont bloqués et les infrastructures en aval sont endommagées par des sédiments provenant de l'érosion massive en amont dans un autre pays. Les eaux souterraines dans les pays limitrophes sont polluées par des sites contaminés de l'autre côté de la frontière. Il est donc primordial d'agir à la source pour prévenir les dommages et éviter les mesures correctives ultérieures, sans quoi les coûts de restauration de la qualité environnementale risquent d'être imputés à un autre État membre.

- Sécurité alimentaire – les contaminants présents dans le sol se retrouvent dans les cultures de denrées alimentaires et d'aliments pour animaux et certains animaux destinés à la production alimentaire. Ils peuvent affecter la sécurité des aliments pour la consommation humaine ou animale en libre circulation dans le marché intérieur en augmentant le niveau de substances dangereuses dans ces produits, posant donc un risque pour la santé humaine et animale. Agir à la source et au niveau européen en prévenant la contamination des sols ou réduisant son niveau est un complément nécessaire aux strictes mesures communautaires et aux contrôles de sécurité réalisés pour assurer la sécurité des denrées alimentaires et d'aliments pour animaux.

- Dimension internationale – la dégradation des sols fait l'objet d'une attention croissante dans les chartes et accords internationaux. En établissant un cadre adéquat et cohérent qui permettra d'améliorer la connaissance et la gestion des sols, l'UE peut jouer un rôle de chef de file au niveau international, facilitant le transfert du savoir-faire et l'assistance technique tout en assurant la compétitivité de son économie.

De plus, une action au niveau de l'UE aura également une valeur ajoutée en contribuant à la protection de la santé des citoyens européens qui peut être affectée de différente manière en raison de la dégradation des sols, par exemple en raison d'une exposition aux contaminants du sol par ingestion directe (dans le cas d'enfants dans une plaine de jeux) ou par absorption indirecte (consommation d'aliments ou d'eau potable contaminés). Les glissements de terrain aussi peuvent faire des victimes.

Par conséquent, la Commission propose d'établir une politique ciblée pour combler les lacunes et garantir une protection globale des sols. Elle est entièrement consciente, à cet égard, de la nécessité de respecter le principe de subsidiarité et de prendre les décisions et les mesures au niveau le plus approprié. Les sols sont une illustration parfaite de la nécessité de penser au niveau mondial et d'agir à l'échelle locale.

4. ACTIONS ET MOYENS

La stratégie proposée par la Commission repose sur quatre piliers fondamentaux:

5. établir une législation cadre ayant pour objectif principal la protection et l'utilisation durable des sols;

6. intégrer la protection des sols dans la formulation et la mise en oeuvre des politiques nationales et communautaires;

7. combler le manque de connaissances actuellement perceptible dans certains domaines de la protection des sols, grâce à des travaux de recherche soutenus par les programmes de recherche communautaires et nationaux;

8. accroître la sensibilisation du public quant à la nécessité de protéger les sols.

4.1. Proposition législative

Ayant examiné différentes options, la Commission propose l'adoption d'une directive-cadre, jugée le meilleur moyen de garantir une approche globale tout en respectant pleinement le principe de subsidiarité. Les États membres seront tenus de prendre des mesures spécifiques pour lutter contre les menaces qui pèsent sur les sols, mais la directive leur laissera une grande liberté dans les modalités de mise en œuvre de cette exigence. Ainsi, l'acceptabilité des risques, le degré d'ambition des objectifs à réaliser et le choix des mesures à prendre pour les atteindre seront laissés à la discrétion des États membres.

Cette approche tient compte du fait que certaines menaces, telles que l'érosion, la diminution de la teneur en matières organiques, le tassement, la salinisation et les glissements de terrain[9], se produisent dans des zones à risque spécifiques qui doivent être identifiées. Pour la contamination et l'imperméabilisation, une approche nationale ou régionale est plus appropriée. La proposition établit un cadre permettant d'adopter, au niveau géographique et administratif approprié, des plans destinés à lutter contre les menaces là où elles se produisent.

4.1.1. Érosion, diminution de la teneur en matières organiques, salinisation, tassement et glissements de terrain

L'érosion, la diminution de la teneur en matières organiques, la salinisation, le tassement et les glissements de terrain sont abordés selon l'approche suivante:

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Selon la directive proposée, les États membres devront identifier les zones à risque sur la base d'éléments communs à prendre en considération, fixer des objectifs de réduction des risques pour ces zones et programmer des mesures visant à réaliser ces objectifs. Pour identifier les zones à risque, la Commission encourage les États membres à utiliser les systèmes de surveillance existants. Il sera possible mieux harmoniser par la suite l’approche et la méthodologie en matière de surveillance, en s’inspirant des travaux que mène actuellement le Bureau européen des sols (Réseau) dans le domaine de l'harmonisation des méthodologies. L'acceptabilité des risques et les mesures à prendre varieront en fonction de la gravité des processus de dégradation, des conditions locales et des considérations socio-économiques.

Les programmes peuvent se fonder sur des mesures déjà mises en œuvre dans le cadre national et communautaire, telles que l'éco-conditionnalité et le développement rural au titre de la PAC, les codes de bonnes pratiques agricoles et les programmes d'action adoptés en vertu de la directive sur les nitrates, les futures mesures adoptées au titre des plans de gestion de district hydrographique pour la directive-cadre sur l'eau, les plans de gestion des risques d'inondation, les programmes forestiers nationaux, ainsi que les pratiques sylvicoles durables et les mesures de prévention des incendies de forêt. S'agissant des mesures de lutte contre la diminution des teneurs en matières organiques, il convient de souligner que tous les types de matières organiques ne permettent pas de combattre cette menace. La matière organique stable est présente dans le compost, le fumier et, en bien moindre mesure, dans les boues d'épuration et le lisier animal. C'est cette fraction stable qui contribue au stock d' humus dans le sol et qui améliore les propriétés du sol.

Les États membres pourront librement combiner les différentes approches pour lutter contre des menaces simultanées. Cette possibilité sera particulièrement utile aux États membres qui combattent la désertification dans le cadre de l'UNCCD et évitera les activités redondantes.

4.1.2. Contamination

La gestion de la contamination serait abordée selon l'approche suivante :

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En se basant sur une définition commune des sites contaminés (c'est-à-dire les sites qui présentent un risque significatif pour la santé humaine et pour l'environnement) dont l'application repose sur les États membres et sur une liste commune des activités potentiellement polluantes, les États membres seront invités à répertorier les sites contaminés sur leur territoire et à établir une stratégie nationale d'assainissement. Cette stratégie reposera sur un classement clair et transparent des sites à assainir, par ordre de priorité; elle aura pour but de réduire la contamination des sols et d'atténuer le risque qui en découle, et comprendra un mécanisme destiné à financer l'assainissement des sites orphelins. En outre, pour toute transaction concernant un terrain sur lequel est exercée ou a été exercée une activité potentiellement contaminante, le vendeur ou l'acheteur potentiel sera tenu de présenter à l'administration et à l'autre partie à la transaction, un rapport relatif à l’état du sol. La directive s'attache également à prévenir la contamination, au moyen d'une exigence visant à limiter l'introduction de substances dangereuses dans les sols.

4.1.3. Imperméabilisation

Pour parvenir à une utilisation plus rationnelle des sols, les États membres seront invités à prendre des mesures appropriées pour limiter l'imperméabilisation des sols en réhabilitant les sites désaffectés, et pour en atténuer les effets en utilisant des techniques de construction qui permettent de maintenir autant que possible toutes les fonctions des sols.

4.1.4. Autres menaces

La directive ne couvre pas directement la diversité biologique des sols, mais sera globalement bénéfique pour la biodiversité grâce aux mesures proposées contre les autres menaces. Elle contribuera ainsi à la réalisation de l'objectif qui consiste à enrayer le déclin de la biodiversité d'ici à 2010.

4.2. Recherche

Il faut poursuivre les recherches pour combler les lacunes dans la connaissance des sols et pour renforcer les fondements des politiques. La Commission entend suivre les recommandations issues de la consultation des parties concernées, au sujet des groupes prioritaires :

- les processus qui sous-tendent les fonctions des sols (par exemple le rôle des sols dans la comptabilité globale du CO2 et dans la protection de la biodiversité),

- les modifications spatiales et temporelles dans les processus relatifs aux sols,

- les facteurs écologiques, économiques et sociaux qui entraînent des menaces pour les sols,

- les facteurs qui influencent les rôles utilitaires des sols pour l'environnement, et

- les procédures et technologies opérationnelles pour la protection et la restauration des sols.

La proposition de septième programme-cadre (2007-2013) inclut la recherche sur les fonctions des sols dans le cadre des domaines prioritaires «Environnement» et «Alimentation, agriculture et biotechnologie».

4.2.1. Biodiversité

Les connaissances sont insuffisantes ce qui concerne la diversité biologique des sols. Le problème sera également abordé dans le septième programme-cadre afin de mieux comprendre la contribution de la biodiversité à l'environnement. Cet approfondissement des connaissances bénéficiera aussi du soutien des initiatives en cours dans le cadre de la convention sur la diversité biologique et du programme « Forest Focus ».

4.3. Intégration

Les politiques communautaires dans les domaines, notamment , de l'agriculture, du développement régional, des transports et de la recherche ont une incidence considérable sur les sols. Il ne sera possible d'atteindre les objectifs de la présente stratégie qu'en intégrant davantage la protection des sols dans les autres politiques.

La Commission envisage de prendre certaines mesures décrites à la section 6.

4.4. Sensibilisation

L'opinion publique n'est pas assez consciente de l'importance de la protection des sols. Il convient donc de prendre des mesures pour améliorer les connaissances et échanger les informations et les meilleures pratiques. La Commission encouragera les initiatives dans les domaines suivants par exemple :

- diffusion à grande échelle de l'Atlas européen des sols, et maintenance du site web http://eusoils.jrc.it consacré aux sols et donnant libre accès aux informations sur les sols qui sont pertinentes pour l'élaboration des politiques en Europe,

- poursuite du cours d'été «European Summer School on Soil Survey» destiné à offrir une formation spécifique aux jeunes chercheurs,

- soutien d'initiatives telles que le Manifeste européen pour le patrimoine terrestre et la diversité géologique («European Manifesto on Earth Heritage and Geodiversity»),

- intégration des aspects liés à la connaissance et à la protection des sols dans les campagnes d'information et de formation financées par la Communauté,

- attribution de prix récompensant la gestion des sols, le cas échéant,

- initiatives lancées dans le cadre de l'UNCCD, notamment en 2006 qui est l'Année internationale des déserts et de la désertification.

5. INCIDENCE ET RÉSULTATS ESCOMPTÉS

La stratégie a fait l'objet d'une évaluation des incidences et d'une vaste consultation des parties intéressées. Différentes options et mesures connexes ont été analysées dans le cadre de ces travaux qui comprennent des actions non contraignantes, un cadre juridique européen souple et non normatif, ainsi que des législations sur les différentes menaces pour les sols, et fixent des objectifs et des moyens d'action au niveau de l'UE.

Les recommandations des parties concernées, la situation actuelle de la protection des sols dans l'UE, et notamment les politiques et les mesures en place dans une minorité d'États membres, de même que le coût total de la dégradation des sols pour la société, ont convaincu la Commission qu'une directive-cadre souple serait le moyen le plus adéquat pour agir en faveur de la protection des sols.

L'analyse d'impact, effectuée conformément aux orientations de la Commission et sur la base des données disponibles, montre que la dégradation des sols pourrait coûter jusqu'à 38 milliards d'euros par an.

Les coûts découlant directement de la directive proposée, principalement dus à l'obligation d'inventorier les zones à risque et à l'obligation de répertorier les sites contaminés, pourraient atteindre 290 millions d'euros par an pour l'UE-25 durant les cinq premières années et 240 millions d'euros les 20 années suivantes, après quoi ils seront inférieurs à 2 millions d'euros par an. Ils seront principalement supportés par les pouvoirs publics.

Ces obligations produiront des bénéfices car elles permettront de mieux localiser les menaces pour les sols et de mieux en connaître la gravité, et donc d'adopter des mesures plus ciblées et plus efficaces. Les bénéfices n'ont pas pu être quantifiés car ils dépendront de la manière dont seront réellement exploitées ces nouvelles connaissances.

La directive permet aux États membres de fixer leurs objectifs à la hauteur de leurs propres ambitions et de sélectionner les mesures, dans le cadre des programmes et des stratégies d'assainissement, qu'ils jugent les plus appropriées et les plus efficaces par rapport aux coûts. Par conséquent, les coûts et les bénéfices dépendront du niveau d'ambition des objectifs ainsi que de la manière dont les États membres exploiteront les possibilités offertes par la législation existante pour contribuer à la protection des sols, comme l'éco-conditionnalité prévue dans le cadre de la PAC par exemple.

Les mesures peuvent donner lieu à différents scénarios, en fonction des différents niveaux d'ambition. Tous les scénarios ont ceci en commun que les coûts supplémentaires ne commenceraient à s'appliquer qu'à partir de 2015 environ et pourraient être pris en charge soit par les exploitants des sols et le pollueur, soit par les pouvoirs publics, soit encore par les deux parties, selon les décisions prises en définitive par les États membres. Les bénéficiaires seraient principalement la société dans son ensemble et certains agents économiques.

Pour certains scénarios ambitieux à très ambitieux, les incidences sociales, économiques et environnementales des mesures que pourraient éventuellement adopter les États membres ont été examinées dans une annexe à l'analyse d'impact.

L'estimation des coûts supplémentaires éventuels, notamment dans le scénario envisagé, doit tenir compte du fait que les bénéfices estimés sont nettement supérieurs aux coûts, d'autant qu'il est impossible d'inclure une série d'avantages environnementaux découlant des rôles utilitaires des sols, notamment la préservation de la biodiversité et le maintien des cycles des nutriments et des gaz.

Par ailleurs, la directive constitue la première approche politique axée sur la protection des sols au niveau de l'UE. Elle est destinée à protéger les sols en tant que ressource importante et généralement non renouvelable de l'UE, d'approximativement 400 millions d'hectares.

6. PROCHAINES ÉTAPES

Pour assurer la mise en pratique de l'action décrite ci-dessus, la Commission accomplira les tâches suivantes :

- rédiger des appels pour des projets de recherche visant à soutenir l'élaboration de la politique conformément aux objectifs de la présente stratégie, et intégrer dans les décisions les nouvelles connaissances acquises sur la diversité biologique des sols, à partir de 2006;

- réexaminer la directive sur les boues d'épuration en 2007, comme annoncé également dans la stratégie thématique pour la prévention et le recyclage des déchets[10], afin de garantir que le meilleur profit est tiré de la réintroduction des nutriments tout en limitant davantage les rejets de substances dangereuses dans les sols;

- réexaminer la directive relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution[11] (IPPC) en 2007, en vue de renforcer les éléments liés à la protection des sols et à la prévention de la contamination en étudiant, notamment, le moyen d'harmoniser l'obligation fondamentale d'éviter tout risque de pollution, en assainissant le site des installations IPPC de manière à retrouver un «état satisfaisant», et en assurant une surveillance périodique des sols sur le site;

- vérifier attentivement si l'exigence de protection des sols est correctement prise en compte dans les plans de développement rural pour 2007-2013 et ultérieurement;

- contrôler la contribution à la protection des sols fournie par les exigences minimales en matière de bonnes conditions agricoles et environnementales définies par les États membres conformément à l'article 5 et à l'annexe IV du règlement (CE) n° 1782/2003;

- lancer des initiatives pour développer des meilleures pratiques en vue d'atténuer les effets préjudiciables de l'imperméabilisation sur les fonctions des sols en 2007;

- élaborer une stratégie de mise en oeuvre commune pour la directive-cadre et les autres piliers de la stratégie, en partenariat avec les États membres, tout en poursuivant un dialogue ouvert avec les experts qui ont participé à la consultation des parties concernées. Cela permettra de lancer des activités aidant les États membres à identifier et à développer les mesures les plus rentables pour réaliser les objectifs de la stratégie. Cela permettra également une meilleure coopération entre États membres en atteignant des approches comparables en matière de protection des sols;

- établir une approche solide concernant l'interaction entre la protection des sols et le changement climatique des points de vue de la recherche, de l'économie et du développement rural, afin que les politiques dans ces domaines soient complémentaires,

- évaluer les synergies possibles entre les mesures visant la protection et l'utilisation durable des sols et les mesures incluses dans les plans de gestion de district hydrographique en vertu de la directive-cadre sur l'eau, en 2009;

- évaluer les synergies possibles entre les mesures visant la protection et l'utilisation durable des sols et les mesures visant à la protection des eaux côtières en incluant celles qui ont été incorporées dans la stratégie thématique pour la protection et la conservation du milieu marin[12];

- assurer l'intégration des aspects relatifs à la protection des sols dans la politique des produits afin de prévenir la contamination des sols;

- assurer que les actions prévues par la présente stratégie et les initiatives prises en vertu de la convention sur la lutte contre la désertification, de la convention sur la diversité biologique, du protocole de Kyoto et de la convention alpine soient concertées, cohérentes et complémentaires.

La présente stratégie contient des mesures jugées appropriées à ce stade au niveau de l'UE. L'avancement des objectifs de la stratégie sera évalué, le cas échéant, dans le cadre de l'examen du sixième programme d'action pour l'environnement.

[1] Décision n°1600/2002/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juillet 2002 établissant le sixième programme d'action communautaire pour l'environnement (JO L 242 du 10.9 2002, p. 1).

[2] COM(2002)179.

[3] AEE (Agence européenne pour l'environnement), 1995, «L'environnement de l'Europe - L'évaluation de Dobríš» - le chapitre 7, consacré aux sols, couvre l'Europe géographique.

[4] Voir l'analyse d’impact.

[5] http://terrestrial.eionet.eu.int/CLC2000/docs/publications/corinescreen.pdf.

[6] Directive 2004/35/CE (JO L 143 du 30.4.2004, p 56).

[7] Voir: http://ec.europa.eu/comm/environment/climat/pdf/finalreport_agricsoils.pdf.

[8] Voir l'analyse d'impact pour les éléments probants.

[9] Les inondations ont fait l'objet d'une proposition de directive distincte relative à l’évaluation et à la gestion des inondations (COM(2006)15).

[10] COM(2005)666.

[11] Directive 96/61/CE (JO L 257 du 10.10.1996, p. 26).

[12] COM(2005)504.