22.9.2006   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 229/29


Avis du Comité des régions sur la communication de la Commission «Mettre en œuvre le programme communautaire de Lisbonne: Un cadre politique pour renforcer l'industrie manufacturière de l'UE — vers une approche plus intégrée de la politique industrielle»

(2006/C 229/04)

LE COMITÉ DES RÉGIONS,

VU la Communication de la Commission «Mettre en œuvre le programme communautaire de Lisbonne: Un cadre politique pour renforcer l'industrie manufacturière de l'UE — vers une approche plus intégrée de la politique industrielle», COM(2005) 474 final;

VU la décision de la Commission européenne, en date du 12 octobre 2005, de le consulter sur ce sujet, conformément à l'article 265, premier alinéa, du traité instituant la Communauté européenne;

VU la décision de son Président, en date du 10 novembre 2005, de charger sa commission de la politique économique et sociale d'élaborer un avis en la matière;

VU son projet d'avis (CdR 39/2006 rev. 2), adopté le 6 avril 2006 par sa commission de la politique économique et sociale (rapporteur: M. Onno Hoes, député provincial du Brabant septentrional (NL/ALDE);

CONSIDÉRANT CE QUI SUIT:

1)

Une politique industrielle européenne renouvelée et moderne, axée sur la compétitivité de notre industrie, est une priorité absolue de la stratégie pour la croissance et l'emploi. La problématique qui la sous-tend est en effet présente dans toutes les régions de l'UE, et la dynamique des processus sous-jacents est grande et impérieuse. Le CdR se réjouit dès lors des ambitions de la Commission, ainsi que de son intention de faciliter substantiellement les réformes nécessaires.

2)

Eu égard aux changements rapides survenus dans l'économie mondiale, il y a extrême urgence. La position concurrentielle de l'industrie européenne subit de fortes pressions, ce qui implique que le renouvellement de la politique industrielle européenne se fasse à un rythme plus soutenu et avec davantage de dynamisme. Le CdR apprécie l'engagement que la Commission a demandé et obtenu de la part des organisations de nombreuses branches d'activité, mais se demande si cela constituera un point de départ suffisant. Dans le contexte de la concurrence économique mondiale, l'Europe assoit sa puissance future avant tout dans des régions compétitives, désignées dans le présent avis par le terme anglais «valley», inspiré du concept de la célèbre «Silicon Valley» et de la philosophie du Forum économique mondial. Ces «valleys» européennes, reposant sur d'anciennes industries et branches d'activité, sont les futurs moteurs du renouveau économique et social.

3)

Les régions de Stockholm, Cambridge, Bavière, Île-de-France, Rhône-Alpes et le sud-est des Pays-Bas, ainsi que des régions en pleine éclosion telles que le Värmland, Riga et la Saxe-Anhalt en sont quelques exemples. Le CdR invite la Commission à placer cette approche au cœur de sa politique industrielle renouvelée, et ainsi mieux anticiper la formation de complexes économiques régionaux en Europe. Cela implique un remaniement complet des propositions actuelles, qui se contentent de créer des «conditions cadres» et sont à cet égard trop peu innovantes. La nouvelle politique industrielle européenne doit avant tout être centrée sur la stimulation des développements transsectoriels, axés sur de nouvelles combinaisons technologie-produit-marché.

4)

Le CdR avance dans le présent avis plusieurs propositions concrètes visant à remanier en profondeur et à intégrer davantage les instruments de l'UE. Il convient de jeter des bases solides à cette fin dès la prochaine présidence, assurée par l'Allemagne, et le CdR invite la Commission et le Parlement à proposer une politique innovatrice et offensive;

a adopté le présent avis lors de sa 65e session plénière des 14 et 15 juin 2006 (séance du 14 juin).

1.   Points de vue du Comité des régions

Propositions relatives aux politiques transsectorielles

1.1

Dans son plan de travail, la Commission présente sept initiatives politiques transsectorielles qui visent à répondre aux défis communs des différents groupes d'industries et à renforcer les synergies entre les différentes politiques:

initiative visant à garantir la protection des droits de propriété intellectuelle;

groupe de haut niveau sur la compétitivité, l'énergie et l'environnement;

mesures en matière d'accès au marché (sur les marchés internationaux);

nouveau programme de simplification de la législation;

amélioration des qualifications au sein des secteurs (personnel plus qualifié);

gestion des mutations structurelles dans l'industrie;

approche intégrée de la recherche et de l'innovation.

1.2

Ces mesures sont toutes, sans exception, d'une importance capitale pour l'accroissement de la compétitivité des industries européennes. Dans les grandes lignes, le CdR approuve donc pleinement ces propositions. En ce qui nous concerne, nous demandons qu'une attention particulière soit accordée à la gestion des mutations structurelles dans l'industrie, mais aussi, en parallèle, au nouveau programme de simplification de la législation. Il s'agit en effet d'une pierre angulaire dans ce contexte: c'est là qu'il convient d'accompagner et de promouvoir une nouvelle politique en provenance des régions. La compétitivité de l'Union européenne doit être placée au centre du débat sur la manière d'aborder les défis et les opportunités de la mondialisation, afin de garantir le bien-être de nos enfants. Nous refusons toute approche protectionniste tournée vers le passé, reposant sur le maintien de vieux acquis. Des initiatives telles que le fonds d'adaptation à la mondialisation proposé par la Commission doivent être mises en place non dans un but défensif, mais à des fins de développement, par exemple pour la formation à de nouveaux secteurs prometteurs.

1.3

Le CdR plaide pour qu'il soit fait plus explicitement référence à la politique régionale d'innovation de la Commission, qui est elle aussi fortement axée sur la stimulation des grappes régionales et des nouvelles formes de coopération. Il existe en Europe plusieurs bons exemples de coopération entre la Commission et les régions; citons notamment le programme d'action du Brabant septentrional pour l'innovation 2005-2010, baptisé «Connecting, creating and enabling winners».

1.4

L'élaboration d'initiatives transsectorielles permettra notamment de développer une politique industrielle européenne moderne et mieux intégrée. Dans ce contexte, nous souhaitons faire brièvement le point sur quelques-unes des mesures proposées, en mettant surtout l'accent sur l'utilisation des avantages offerts par une approche plus intégrée.

Groupe de haut niveau sur la compétitivité, l'énergie et l'environnement

1.5

L'énergie et l'environnement constitueront au cours des prochaines années des thèmes prioritaires au niveau mondial.

La Commission doit donner l'élan nécessaire pour instaurer un climat dans lequel les menaces seront transformées en opportunités. Ces domaines recèlent des nouveaux marchés prometteurs et des pistes intéressantes pour les politiques industrielle et de recherche de l'UE.

Cette démarche contribuera à ce que l'énergie et le développement durable (produits et processus de production plus écologiques) ne soient pas traités distinctement, mais fassent réellement partie intégrante de la politique industrielle et d'innovation. Il convient à cet égard d'accorder une attention accrue au développement des ressources énergétiques alternatives. Le prix de l'énergie représente une part importante des coûts pour notre industrie. Le CdR invite les États membres à accroître la capacité d'interconnexion afin que la libéralisation du marché de l'énergie puisse permettre à notre industrie d'acheter du gaz et de l'électricité dans toute l'Europe. Un actionnariat actif des collectivités locales et régionales dans des sociétés de fourniture d'énergie peut contribuer efficacement à la création de conditions équitables au niveau européen.

Améliorer les qualifications au sein des secteurs

1.6

Le CdR insiste pour que la nouvelle politique industrielle soit envisagée dans le cadre de la stratégie de Lisbonne et dans le contexte de la mondialisation. Les processus de restructuration dans les régions et les pays sont la conséquence de cette évolution. Comme l'a souligné le CdR dans son avis sur les restructurations et la délocalisation (CdR 148/2005 fin), il est nécessaire d'assurer une bonne gestion des restructurations (voir à cet égard notre précédente remarque sur la mise en place d'un fonds d'adaptation à la mondialisation à des fins de développement et non dans un but défensif). Dans le cadre d'une mise en œuvre à partir de Bruxelles, il est essentiel de promouvoir la cohésion économique et sociale: celle-ci doit figurer parmi les éléments de base d'un marché de l'emploi fonctionnel et plus flexible. Il est souhaitable de recentrer le débat sur le thème prioritaire de «l'innovation sociale» dont il est question ici. La question essentielle est de savoir comment procéder pour que les travailleurs européens, quel que soit leur niveau, soient mieux en mesure de suivre les restructurations parfois draconiennes, sans être victimes du chômage structurel.

1.7

L'accroissement de la productivité du travail, du taux d'emploi et de la mobilité du marché du travail est essentiel pour la compétitivité de l'Union européenne. Ce point doit faire l'objet d'une attention accrue, tant dans la politique des États membres que dans les programmes et Fonds structurels de l'UE. En outre, il convient de faciliter l'accès (temporaire) au marché de l'emploi européen pour les ressortissants de pays tiers ayant un niveau élevé de formation, une telle libéralisation contribuant également à la compétitivité de l'Europe.

Droits de propriété intellectuelle

1.8

Le CdR constate que certains secteurs manufacturiers importants jouissent toujours d'avantages considérables sur leurs concurrents, mais ils peuvent également subir les effets négatifs de la mondialisation. Une protection adéquate de la propriété intellectuelle et industrielle revêt une importance vitale pour la position concurrentielle de l'UE. La protection de la propriété intellectuelle stimule les actions innovatrices et le développement de nouveaux types d'entreprises. Le cadre réglementaire doit être adapté aux mutations technologiques et sociales, évoluant rapidement. La législation en la matière doit être claire et offrir une sécurité juridique. Les règles doivent être adoptées ET appliquées tant au niveau européen (législation communautaire) que mondial (OMC, ADPIC). De nombreux entrepreneurs au sein des PME, les moteurs de l'innovation, ne savent toujours pas précisément comment ils doivent réagir aux violations de leur propriété intellectuelle. Les frais extrêmement importants de maintien des brevets en Europe, qui sont bien plus élevés qu'aux États-Unis par exemple, posent un gros problème à de nombreuses PME. En outre, en ce qui concerne les frais liés aux demandes de brevet, il importe au plus haut point que le brevet communautaire soit enfin mis en place, après 30 années de discussions. Cinq ans après la présentation d'une proposition concrète par la Commission européenne, ce dossier est toujours dans l'impasse au Conseil en raison d'un désaccord à propos du régime linguistique. Le CdR invite la Commission européenne à présenter une directive d'harmonisation reposant sur l'article 95 du traité instituant la Communauté européenne. Cela permettrait de maintenir les régimes nationaux de brevets tout en introduisant le principe de reconnaissance mutuelle. La limitation du nombre de langues à celle de l'État membre concerné plus l'anglais permet de réduire considérablement les coûts du brevet communautaire, ce qui est tout à l'avantage des PME. Un brevet international concurrentiel est ainsi créé. Par ailleurs, il est indispensable de réduire au minimum la taxe pour le maintien de la demande de brevet, qui existe dans de nombreux pays de l'UE et fait partie de ces facteurs qui brident le développement des innovations.

Approche intégrée de la recherche et de l'innovation

1.9

Le 7e programme-cadre et le programme d'initiative communautaire (PIC), en combinaison avec les Fonds structurels, jouent un rôle essentiel en matière de promotion et d'orientation. Les ressources du 7e programme-cadre sont indispensables pour garantir la position concurrentielle de l'UE et renforcer les régions à la pointe en matière de technologies. Le budget ne doit pas être réduit lors de la définition des perspectives financières.

1.10

Le présent avis demande explicitement que l'on veille à stimuler la formation de complexes économiques régionaux en Europe («valleys» européennes). À cette fin, il est indispensable que les Fonds structurels et les programmes-cadres tels que le 7e programme-cadre et le PIC puissent être davantage utilisés de manière combinée dans les régions. Le CdR invite la Commission à présenter des propositions concrètes à cet égard.

Il importe entre autres de concentrer les ressources en faveur de la recherche de pointe, autour des éléments clés que sont la stimulation de la culture de l'innovation ouverte et la constitution de grappes dans les régions.

1.11

Il faut davantage que des investissements massifs dans la recherche afin de développer un modèle économique durable pour une région technologique de pointe. C'est ce que révèlent entre autres les expériences acquises dans le cadre de la région Brainport Eindhoven. La stimulation d'une grande diversité d'applications de certaines connaissances dans plusieurs chaînes d'innovation assure la création de nouveaux emplois à tous les niveaux ainsi qu'un ancrage de la connaissance dans une région. Les petites et moyennes entreprises ont ainsi droit aux mêmes stimulants que les développeurs de connaissances. Le CdR invite la Commission européenne à utiliser les programmes européens et les Fonds structurels de manière plus ciblée et comme multiplicateurs pour stimuler quelques chaînes d'innovation par région. Cela permettrait de créer de très nombreux nouveaux emplois de niveau professionnel secondaire et supérieur, et de niveau universitaire.

1.12

En ce qui concerne ce dernier point, le CdR demande que l'on se penche plus particulièrement sur l'accessibilité des programmes-cadres et fonds européens pour les petites et moyennes entreprises. Nous estimons qu'il s'agit là d'un problème de taille, et en l'absence d'une simplification, l'ambition de promotion des PME a peu de chances d'aboutir. Il importe de créer une culture d'innovation plus ouverte, dans laquelle les PME pourront accéder plus facilement à des ressources et des projets mieux intégrés.

1.13

L'expérience de la politique régionale d'innovation révèle que les PME profitent surtout de l'interaction avec les plus grandes entreprises. C'est pourquoi nous insistons pour que la politique industrielle européenne fasse plus explicitement référence à l'interaction entre les grandes entreprises (1) et les PME. L'interaction entre les PME et les centres de recherche est tout aussi importante.

1.14

Pour terminer, encore une remarque sur l'éventualité d'une approche plus intégrée de la politique industrielle européenne. Il convient en particulier d'envisager l'intégration de la politique industrielle avec la politique de développement durable et de cohésion sociale; il y a là un défi important à relever pour l'Europe. La Commission pourra ainsi contribuer à ce que, dans le cadre du développement d'une société durable de la connaissance en Europe, l'on s'attache plus rapidement aux nouvelles formes de coopération et aux combinaisons produit-marché dans des domaines tels que l'industrie de la santé (innovation médico-technique), l'environnement et l'énergie, offrant d'intéressants nouveaux marchés aux industries européennes.

1.15

Par ailleurs, nous avons déjà abordé la tendance au regroupement et à la spécialisation des principales activités économiques en Europe. Cette tendance peut être renforcée dans d'autres domaines politiques, par exemple en ce qui concerne l'aménagement du territoire et la modernisation des infrastructures. La politique européenne devrait viser plus précisément la création de solides conditions favorables à des sites d'exception (transfrontaliers) internationaux, reliés à une infrastructure européenne moderne les rendant accessibles. En outre, l'idée du Président de la Commission, M. Barroso, de créer une université européenne (IET) mérite d'être soutenue. Un institut technologique d'excellence dans l'Union européenne permettra d'éviter toute nouvelle fuite des cerveaux vers d'autres parties du monde. Il est grand temps que l'UE mette en place un institut capable de rivaliser avec le MIT de Boston, par exemple.

Propositions relatives aux politiques sectorielles

1.16

La Commission se propose d'engager les nouvelles initiatives suivantes:

forum pharmaceutique;

examen à mi-parcours de la stratégie relative aux sciences de la vie et à la biotechnologie;

nouveaux groupes de haut niveau sur l'industrie chimique et l'industrie de la défense;

le programme spatial européen;

task-force sur la compétitivité des TIC;

dialogue politique pour la construction mécanique;

études sur la compétitivité (industries des TIC, de l'alimentaire et de la mode et du design).

1.17

Les études sectorielles qui sous-tendent les travaux de la Commission laissent apparaître que de nombreuses industries européennes sont assez robustes pour pouvoir rester concurrentes au niveau mondial. Pour pouvoir réaliser des performances de niveau international, il est crucial que l'industrie soit en mesure de répondre aux exigences de savoir et d'innovation liées aux nouveaux produits et processus de production.

1.18

Il est important que l'UE comme les États membres continuent à soutenir fermement ce processus de mutation et de réforme. Nous constatons que les actuels programmes-cadres de l'UE constituent un instrument de promotion efficace en liaison avec les (nouveaux) Fonds structurels.

1.19

Dans les secteurs tels que les industries mécaniques et des systèmes, la concentration et la masse sont des éléments cruciaux dans le cadre de la définition des calendriers stratégiques européens. Dans ce contexte, les calendriers stratégiques ENIAC et Artemis sont d'une importance capitale pour les investissements européens et nationaux en la matière.

1.20

Bien que la position concurrentielle des différents secteurs doive faire l'objet d'une attention constante, il importe de constater que la prospérité future de l'Europe dépendra de plus en plus des activités transsectorielles. Ce point mérite une attention particulière de la part de la Commission. La politique industrielle peut contribuer à l'accélération des développements dans ce domaine par la stimulation des «chocs intersectoriels», donnant lieu, par définition, à des bonds en avant et des innovations spectaculaires au niveau des produits et des marchés. Cette évolution commence à se dessiner dans certains secteurs, notamment l'agro-alimentaire et le secteur pharmaceutique (sciences de la vie), la technologie biomédicale, ainsi que les systèmes automobiles et de haute technologie.

1.21

Dans cette perspective, les quatre grandes catégories définies par la Commission ne couvrent pas suffisamment de domaines. Par exemple, il aurait fallu inclure dans les industries des sciences de la vie l'important domaine de la «médecine moléculaire». La nanoélectronique et les systèmes intégrés auraient également dû être explicitement mentionnés. Un terme plus large, par exemple «industrie créative» aurait dû être utilisé pour désigner l'industrie de la mode et du design, eu égard à l'évolution qu'elle connaît actuellement.

1.22

Il apparaît donc de plus en plus important de promouvoir les grappes cohérentes d'activités industrielles et d'encourager les activités industrielles émergentes. La Commission devrait mentionner ce point de manière plus formelle et explicite dans son plan de travail.

1.23

Ce que l'on appelle le «modèle des grappes» — c'est-à-dire la collaboration intensive et structurelle entre les autorités, les entreprises et les instituts du savoir — constitue à cet égard un facteur de réussite essentiel pour toutes les régions innovatrices d'Europe, telles que Stockholm, la Bavière, l'Île-de-France, Rhône-Alpes et le sud-est des Pays-Bas. Ce type d'approche mérite un soutien substantiel dans le cadre d'une politique industrielle européenne renouvelée et mieux intégrée.

2.   Autres recommandations du Comité des régions

L'Europe en 2027 (vision d'avenir)

2.1

Le plan de travail de la Commission repose sur la stratégie de Lisbonne et les objectifs de Göteborg, et constitue à cet égard un ensemble cohérent. Comme nous l'avons déjà fait remarquer en plusieurs endroits, ce plan renferme beaucoup de bonnes intentions, toutes appréciables. Rares sont ceux qui le contesteront. Il manque toutefois une vision d'avenir claire concernant la capacité de l'Europe à se distinguer par rapport à ses concurrents dans le reste du monde.

2.2

Le CdR recommande le développement d'une vision stimulante et enthousiasmante. Où en sera l'Europe en 2027? Comment les industries européennes auront-elles répondu aux exigences formulées en 2006? Comment l'investissement dans les «régions intelligentes» aura-t-il abouti à un renouveau économique et social dans tous les États membres de l'UE? Comment aurons-nous réussi, dans la société durable de la connaissance, à transformer les questions liées à l'énergie, à l'environnement et à l'industrie de la santé en nouvelles opportunités et en nouveaux marchés? Et cetera, et cetera.

Miser sur les régions de pointe en Europe et l'interaction avec les régions

2.3

Il est recommandé de miser sur les développements prometteurs dans les différentes régions, en rejoignant les concentrations et les spécialisations économiques qui ne cesseront de gagner en importance au cours des prochaines années en Europe. Il y a lieu de partir du principe que la promotion des régions de pointe contribuera sensiblement au renouveau économique et social au sens large, dans tous les États membres de l'UE.

2.4

Il est recommandé d'adopter, dans le cadre de la nouvelle politique industrielle de l'UE, des critères d'identification des futures régions compétitives de pointe au niveau européen et dans chaque État membre, ce qui permettrait de canaliser les fonds des programmes d'investissement européens vers ces régions compétitives pour compléter les investissements nationaux et régionaux, mais également de soutenir la commercialisation de leur production matérielle et immatérielle.

Cette politique industrielle européenne renouvelée, axée sur des évolutions prometteuses et les nouveaux complexes économiques régionaux, doit, dans le cadre d'une «nouvelle solidarité», accorder une attention explicite à la stimulation des régions en retard de développement. Le CdR propose à la Commission de mettre en place un système de levier, par exemple en conditionnant la contribution des programmes cadres et Fonds structurels de l'UE à la conclusion de partenariats économiques interrégionaux.

De l'approche sectorielle aux grappes (nouveaux domaines)

2.5

La stimulation des secteurs européens de pointe pour leur permettre d'atteindre le niveau international est et reste un objectif important de la politique industrielle européenne. La prospérité future dépendra toutefois de manière croissante des activités transsectorielles. Il est recommandé d'améliorer la visibilité des évolutions autonomes existantes dans les «grandes catégories» du plan de travail présenté par la Commission.

2.6

Par conséquent, le CdR recommande que la nouvelle politique industrielle de la Commission se concentre davantage sur l'importance stratégique d'une approche transsectorielle, en reconnaissant le pouvoir des «chocs intersectoriels». La coopération structurelle entre les autorités, les entreprises et les instituts du savoir, également désignée par le terme de «triple hélice», est à cet égard une condition sine qua non. Ce modèle de grappe est l'une des cartes de visite de la nouvelle politique industrielle européenne.

2.7

La stimulation des «chocs intersectoriels» est axée sur l'innovation et des combinaisons produits-marchés totalement nouvelles dans l'industrie. Cela dépasse de loin le seul cadre des secteurs industriels, les chocs avec d'autres domaines, sociaux et économiques, assurent une nouvelle dynamique. Le CdR renvoie à cet égard aux chocs avec le domaine de l'art et de la culture (industrie créative), aux chocs entre cultures (nouvel esprit d'entreprise interculturel) ou avec l'enseignement professionnel (nouveaux savoir-faire). L'Union européenne peut et doit jouer un rôle de stimulation important dans ces domaines. Le CdR demande à la Commission d'accorder une attention particulière à ces points dans les programmes et les nouveaux Fonds structurels.

Encourager une plus grande intégration

2.8

Les propositions relatives aux mesures transsectorielles proposent des pistes pour une approche plus intégrée de la politique européenne. Nous avons recommandé d'accentuer les éléments suivants:

énergie, environnement, et industrie de la santé: transformer la «problématique sociale» en nouvelles opportunités sur le marché, dans le cadre de la future société européenne durable de la connaissance (cf. paragraphe 2.1);

une tesk-force européenne sur l'innovation sociale, qui ne soit pas indépendante de la politique industrielle européenne mais en constituerait plutôt un élément central, et qui, tout en se consacrant à la main-d'œuvre hautement qualifiée, veillerait également à offrir des perspectives aux travailleurs les moins qualifiés du marché de l'emploi;

approche intégrée de la recherche et de l'innovation: améliorer la cohérence entre les programmes-cadres et les fonds structurels dans les plans et les orientations, et concentrer notamment les ressources sur la recherche de pointe;

politique d'appels d'offres: ce point n'est pas abordé par la Commission, mais devrait pourtant faire l'objet de l'une des initiatives politiques transsectorielles dans le contexte du soutien aux PME, qui éprouvent de plus en plus de difficultés à être prises en compte lors des appels d'offres de l'UE;

contribuer à la création de sites d'exception (transfrontaliers) internationaux, également dans le cadre d'autres politiques européennes.

Débureaucratisation, accessibilité aux PME

2.9

Le plan de travail de la Commission accorde à très juste titre beaucoup de valeur à la force innovatrice des petites et moyennes entreprises. La mesure dans laquelle ces entreprises peuvent être touchées dans la pratique dépend toutefois fortement de la simplification de la législation européenne. La configuration actuelle des propositions relatives aux PME réduit considérablement, par exemple, les possibilités de subventions de la recherche-développement dans les PME, ce qui est en contradiction flagrante avec le renforcement de la position concurrentielle au niveau mondial. Actuellement, une PME américaine consacre sept fois plus d'argent à la recherche-développement qu'une PME européenne.

2.10

Il n'y aura bientôt plus aucune entreprise qui acceptera de satisfaire à toutes les exigences administratives de l'UE pour une subvention de 15 %. Le CdR préconise dès lors une importante débureaucratisation, visant à rendre les programmes-cadres et les fonds européens plus accessibles aux PME. Toutes les propositions de la Commission à cet égard bénéficient de notre profond soutien.

Dans cette perspective, la participation des autorités régionales et locales, en tant qu'administrations les plus proches des PME, facilitera l'accès de ces dernières aux aides communautaires.

2.11

La déréglementation et l'allègement des charges administratives grâce à la réglementation européenne, ainsi qu'une analyse minutieuse des coûts et des bénéfices de cette dernière, constituent une condition sine qua non de la réalisation des objectifs de Lisbonne. L'évaluation de l'impact de la législation européenne sur les entreprises joue à cet égard un rôle important. Afin de garantir la qualité de cette évaluation d'impact, il est essentiel qu'elle soit réalisée par une tierce partie, indépendante. Le CdR invite la Commission à présenter des propositions dans les plus brefs délais. Le mécanisme néerlandais basé sur un organe de contrôle indépendant (Adviescollege Toetsing Administratieve Lasten, ACTAL) pourrait servir de point de départ.

Conclusion

Dans le cadre de l'évaluation à mi-parcours à laquelle procédera prochainement la Commission, le CdR apprécierait particulièrement une réaction aux propositions et remarques formulées dans le présent avis. Nous invitons en outre la Commission à envisager l'introduction d'un rapport de suivi annuel, à propos duquel le CdR est tout disposé à faire part de ses observations.

Bruxelles, le 14 juin 2006.

Le Président

du Comité des régions

Michel DELEBARRE


(1)  À cet égard, il convient de prêter également attention à la notion de grandes entreprises.