52005DC0077

Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil - Un cadre pour le développement des relations avec la Fédération de Russie dans le domaine du transport aérien /* COM/2005/0077 final */


Bruxelles, le 14.3.2005

COM(2005) 77 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

Un cadre pour le développement des relations avec la Fédération de Russie dans le domaine du transport aérien

INTRODUCTION ET RÉSUMÉ

L'importance globale des relations entre l'UE et la Fédération de Russie, partenaires et voisins stratégiques clés, ainsi que le poids de nos secteurs respectifs de l'aviation et de l'aéronautique, sont autant d'arguments majeurs en faveur de la négociation d'un nouveau cadre pour l'organisation de nos relations dans le domaine de l'aviation.

Parallèlement à la présente communication, la Commission recommande donc que le Conseil autorise la Commission à négocier avec la Fédération de Russie, au nom de la Communauté européenne, un accord global relatif au transport aérien. Cette initiative s'appuie sur les développements concernant le rôle de la Communauté en ce qui concerne les relations extérieures dans le domaine de l'aviation; à la suite des arrêts de la Cour de justice du 5 novembre 2002 dans les affaires "Ciel ouvert", dont les conclusions reconnaissent à la Commission des compétences exclusives eu égard à d'importants aspects de la politique extérieure dans le domaine de l'aviation, ainsi que sur le livre blanc de la Commission " La politique européenne des transports à l'horizon 2010: l'heure des choix [1]", qui souligne la nécessité pour l'Union de parler d'une seule voix sur la scène mondiale pour défendre ses intérêts industriels, sociaux et environnementaux.

À la suite de ces arrêts, la Commission a indiqué qu'elle envisageait de soumettre des propositions de décisions du Conseil l'autorisant à entamer des négociations avec certains pays tiers d'importance stratégique sur un large éventail de questions dans le domaine du transport aérien.

Pour des raisons politiques et économiques importantes, il est clair que la Communauté devrait en priorité définir une politique cohérente dans le domaine de l'aviation vis-à-vis de ses principaux partenaires commerciaux, notamment la Russie, avec laquelle l'UE développe un partenariat économique et politique étroit dans le cadre de l'accord de partenariat et de coopération[2] et des quatre "espaces communs" lancés lors du sommet UE-Russie à St-Pétersbourg en mai 2003, en particulier l'Espace économique commun.

Le partenariat UE-Russie a été renforcé à la suite de l'adhésion à l'UE, le 1er mai 2004, de dix nouveaux États membres, dont huit ont eu par le passé des liens économiques et politiques particulièrement étroits avec la Russie. L'UE est le principal partenaire commercial de la Russie, avec plus de 50% de son commerce total, tandis que la Russie est le cinquième partenaire commercial de l'UE (après les États-Unis, la Suisse, la Chine et le Japon) et représente environ 5% du commerce total de l'UE. La Russie est le deuxième plus important partenaire commercial des dix nouveaux États membres de l'UE.

L'intégration des systèmes de transport constitue un préalable à une coopération fructueuse. L'aviation est un secteur des transports particulièrement dynamique, et indispensable pour assurer la liaison de l'Union européenne avec ses voisins en général et avec la Fédération de Russie en particulier. La mise en place d'une politique en matière d'aviation vis-à-vis de la Russie est donc un objectif important dans le cadre global du partenariat que l'UE développe actuellement avec son grand voisin à l'Est.

La Russie offre de bonnes perspectives de croissance pour les compagnies aériennes, les constructeurs d'appareils et les fournisseurs de services en Europe. Le trafic international de passagers russe est fortement concentré sur des destinations européennes. Environ 75% de l'ensemble du trafic passagers russe concerne des destinations européennes, et ce trafic devrait connaître une croissance annuelle de 5,8%[3] jusqu'en 2007. Pour l'UE, la Russie est actuellement le quatrième marché étranger de l'aviation[4].

Le marché russe de l'aviation se caractérise de longue date par une approche restrictive. L'accès au marché est strictement limité, et l'État continue à jouer un rôle important et influant dans l'industrie de l'aviation. Toutefois, face à une hausse de la demande et à la concurrence étrangère, le gouvernement russe a annoncé des réformes importantes dans le secteur, notamment une libéralisation progressive du marché intérieur et la privatisation des compagnies aériennes, en vue d'accroître la concurrence, d'attirer des investissements et de susciter une consolidation du secteur.

Les relations UE-Russie en la matière ont été par le passé dominées par les points litigieux concernant les paiements pour le survol de la Sibérie et par les préoccupations russes liées aux normes de l'UE relatives au bruit et à la sécurité. La question du survol de la Sibérie est d'une importance capitale pour les transporteurs aériens européens, car elle affecte les services entre l'Europe et les marchés lucratifs et en expansion d'Extrême-Orient, la Chine en particulier. Ces difficultés ont menacé les possibilités de coopération constructive et de progrès dans d'importants domaines d'intérêt mutuel, tels que la sécurité et la sûreté dans le domaine de l'aviation.

Aujourd'hui, ces relations sont fragmentaires, notamment en ce qui concerne les droits de circulation et les débouchés commerciaux accessibles aux transporteurs communautaires. Les États membres agissant individuellement n'ont pas été en mesure de mettre les accords bilatéraux en conformité avec le droit communautaire, ni de résoudre des problèmes cruciaux, tels que la question des paiements pour le survol de la Sibérie, ni de progresser de manière significative en termes d'accès au marché. Les différences d'approche en matière de sécurité et de bruit sont une source constante de malentendus potentiels dans les relations en matière d'aviation.

Un accord global entre l'UE et la Russie dans le domaine du transport aérien viserait à l'élargissement des relations dans le domaine de l'aviation et à l'établissement d'un cadre dans lequel les entreprises comme les usagers pourraient bénéficier de meilleures conditions de marché, d'un environnement juridique stable et cohérent entre les deux marchés, ainsi que de mécanismes permettant d'éviter les désaccords ou de les surmonter efficacement.

TENDANCES DE LA POLITIQUE RUSSE DANS LE DOMAINE DE L'AVIATION CIVILE: MODERNISATION, CONSOLIDATION ET LIBÉRALISATION

Un marché en croissance et en évolution

Le transport aérien est l'un des modes de transport les plus dynamiques en Russie. L'aviation civile est un secteur important de l'économie russe, employant au total 223 000 personnes. Selon le ministère russe des transports, le transport aérien de passagers s'est accru de 9,9% en 2003, le fret de 2,7%.

Alors que le marché russe du trafic aérien se développe rapidement, il demeure plutôt immature par certains aspects, avec un fort potentiel de croissance dans le secteur passagers comme dans le fret. Les prévisions de l'IATA indiquent qu'entre 2003 et 2007, le marché russe de l'aviation civile connaîtra des taux de croissance annuels de 5,8%, supérieur à ceux des marchés plus mûrs d'Europe occidentale et des États-unis.

Seules quatre compagnies aériennes (Aeroflot, Sibir, Pulkovo et UT Air) transportent plus d'un million de passagers par an. Aeroflot domine le marché international, mais est confronté à la concurrence sur le marché intérieur (Sibir occupe la première place du marché intérieur de transport aérien de passagers). Aeroflot fournit 37,7% du total des places disponibles sur le marché Russie-UE, Lufthansa occupant la deuxième place avec 12,6%[5].

Une nouvelle stratégie pour le transport aérien - vers la privatisation et la libéralisation

En octobre 2003, le gouvernement russe a annoncé sa nouvelle "Stratégie de transport pour la Fédération de Russie".

En ce qui concerne le transport aérien, un des principaux objectifs du gouvernement russe est de développer le transport aérien intérieur par une profonde restructuration visant à accroître l'efficacité et la qualité des services. La Russie compte actuellement 215 compagnies aériennes (267 en 2000), dont 55 sont propriétés de l'État; ce chiffre devrait diminuer au cours des années à venir dans un contexte de concurrence accrue, de procédures d'octroi de licence plus strictes et de l'application d'exigences plus élevées de sécurité.

Le gouvernement russe a annoncé des projets visant à améliorer sensiblement la compétitivité globale des transporteurs russes en s'adaptant aux normes internationales en matière de commerce, d'environnement et de services, et à libéraliser progressivement le marché.

La croissance du trafic passagers au cours des dernières années est le principal facteur à l'origine du passage à une stratégie de libéralisation du marché intérieur du transport aérien. Cette libéralisation a commencé en 2002 par la suppression du régime des quotas en place jusqu'alors. Le gouvernement russe envisage d'éliminer encore davantage de quotas et d'évoluer ainsi plus rapidement vers la libéralisation totale du transport aérien intérieur.

Le gouvernement vise à encourager les alliances stratégiques, tant au niveau intérieur qu'international, afin de contribuer à préparer les transporteurs russes à la concurrence. En effet, les pressions concurrentielles entre les compagnies aériennes russes sur les liaisons intérieures et internationales devraient susciter des transformations importantes du secteur aérien russe au cours des années à venir. Un signe avant-coureur des évolutions à venir a été la signature par Aeroflot, le 24 mai 2004, d'un protocole d'accord préparant le terrain pour l'adhésion de la compagnie aérienne russe à l'alliance SkyTeam . On a également annoncé la possibilité d'une privatisation d'Aeroflot.

La modernisation des infrastructures

La plupart des aéroports russes ont besoin d'être rénovés et modernisés. La stratégie de transport adoptée par le gouvernement russe prévoit de poursuivre la privatisation des aéroports et de procéder à une "optimisation" du réseau d'aéroports dans l'ensemble du pays. L'amélioration du fonctionnement des aéroports sera cruciale pour le développement du secteur de l'aviation civile en Russie. Les questions et les procédures liées à la sûreté jouent un rôle accru depuis les dramatiques actes terroristes de l'été 2004. Une nouvelle loi sur la sûreté des transports a été préparée.

De même que le gouvernement russe envisage des réformes profondes du secteur de l'aviation intérieure, il a annoncé des plans de restructuration de l'industrie aéronautique.

Actuellement, la disponibilité d'appareils efficaces et modernes constituent le principal facteur limitatif de la croissance des compagnies aériennes russes. Les estimations suggèrent que les compagnies aériennes devront remplacer un tiers de leur flotte vieillissante (environ 95% des appareils en service ont été conçus entre 1960 et 1980) au cours des cinq années à venir. Plus de 1600 appareils actuellement exploités ne sont pas conformes aux normes de bruit de l'OACI.

La Russie, traditionnellement, possède une importante industrie de l'aviation. Ce secteur emploie actuellement environ 500 000 personnes dans quelque 300 sociétés et instituts de recherche et d'ingénierie. Les besoins sont cependant énormes en matière d'investissements, de modernisation et de restructuration.

Ce processus semble avoir démarré à la suite de propositions formulées par l'Agence spatiale et aéronautique russe (Rosaviakosmos), dans le contexte de la nouvelle stratégie de transport de la Russie. Elle propose des mesures radicales pour créer un consortium unique dans le domaine de l'aérospatial (OAK - Construction unifié d'aéronefs), qui semble suivre l'exemple d'EADS. Le consortium serait contrôlé par des capitaux privés (avec une participation publique de 25,5%) et son objectif serait d'atteindre une part de 10% du marché mondial de l'aviation.

Relations UE-Russie – La nécessité d'une approche communautaire

Des marchés en croissance présentant un intérêt commercial mutuel majeur

Des liaisons aériennes bien développées vers l'Union européenne et les principales destinations internationales sont essentielles pour le développement de l'économie russe ainsi que pour ses relations commerciales avec l'UE.

Le trafic international de passagers russe est fortement concentré sur des destinations européennes. En 2002, 4,3 millions de passagers ont voyagé entre la Russie et l'Europe occidentale, et 1 million de passagers entre la Russie et l'Europe centrale et orientale. Environ 75% de l'ensemble du trafic passagers russe concerne des destinations européennes, et ce trafic devrait connaître une croissance annuelle de 5,8% jusqu'en 2007[6].

Le trafic aérien entre l'UE et la Russie s'est sensiblement accru au cours des dix dernières années. Les fréquences hebdomadaires entre les États membres et la Russie sont passées de 279 en 1992 à 465 en 2003, tandis que le nombre de places disponibles dans le trafic aérien UE-Russie passait de 44 880 en 1992 à 65 663 en 2003. Le potentiel de croissance du marché russe est largement reconnu.

La part la plus élevée du trafic aérien entre l'UE et la Russie revient à l'Allemagne (39% des fréquences entre l'UE et la Russie)[7], suivi par l'Espagne (12%), la France (11%), le Royaume-Uni (8,5%) et la Finlande (7%). Parmi les nouveaux États membres, la Pologne et la République tchèque ont un trafic important avec la Fédération de Russie.

Avec la Chine, la Russie constitue également un des plus grands marchés touristiques à "fort potentiel" du monde. Le nombre total de touristes à destination de la Fédération de Russie s'est accru de 7,3% en 2002 (moyenne européenne 2,3%). Les voyagistes européens ont entamé une coopération et des associations (joint-ventures) avec des voyagistes en Russie. Le tourisme russe est d'une importance croissante pour l'industrie européenne du tourisme. Les touristes russes comptent parmi ceux qui dépensent le plus dans le tourisme international (12 milliards de dollars US en 2002)[8].

Relations bilatérales dans le domaine de l'aviation entre les États membres de l'UE et la Russie

Un marché fragmenté et restrictif

La Fédération de Russie est signataire d'accords bilatéraux relatifs aux services aériens avec 23 des 25 États membres; ces accord régissent en particulier les droits de trafic et les questions afférentes d'importance bilatérale (désignation des compagnies aériennes, sécurité de l'aviation, droits et services de douane, etc.). Cette fragmentation complique le cadre réglementaire applicable aux services aériens entre l'UE et la Russie.

En outre, les accord bilatéraux des États membres avec la Russie réglementent en général lourdement l'accès au marché, non seulement en termes de désignation limitée des compagnies aériennes ou des destinations qui peuvent être desservies, mais aussi en termes de fréquences et de capacités que peuvent exploiter les compagnies désignées.

Au-delà des illégalités mises en lumière par la Cour de justice européenne dans les arrêts "Ciel ouvert", des problèmes juridiques se posent également dans le domaine du droit européen de la concurrence, qui devront être abordés dans le contexte d'un futur accord entre l'UE et la Russie en matière de transport aérien.

Nuages dans le ciel - les principales questions en suspens

Le survol de la Sibérie

Les compagnies aériennes de l'UE qui survolent le territoire russe doivent acquitter à leur concurrent russe, Aeroflot, des redevances spéciales sans rapport avec les paiements normaux liés aux services de contrôle aérien. Ces paiements, qui sont imposés par la Russie dans les accords bilatéraux avec les États membres dans le cadre d'accords commerciaux obligatoires entre les compagnies aériennes de l'UE et Aeroflot, constituent une charge inacceptable pour le transit, vont à l'encontre de la pratique universelle et sont jugés incompatibles avec le droit international, notamment l'article 15 de la convention de Chicago de 1944. En 2003, ces paiements ont été estimés à un total de 250 millions d'euros environ pour les compagnies aériennes européennes. La Russie est le seul pays au monde à imposer de tels paiements. En outre, ces paiements ne sont appliqués ni de manière transparente ni à tous les partenaires commerciaux de la Russie. Le transit au-dessus de la Sibérie est essentiel pour les compagnies aériennes de l'UE afin de s'assurer un accès commercialement viable au marché en expansion de l'Extrême-Orient, notamment la Chine. Les liaisons avec l'Extrême-Orient sont un élément majeur de la rentabilité économique des compagnies aériennes de l'UE.

La plupart des transporteurs de fret de l'UE entre l'Europe occidentale et l'Extrême-Orient évite les paiements pour le survol en contournant le territoire russe. Les transporteurs aérien de fret russes, Aeroflot en particulier, ont ainsi un avantage net puisqu'ils offrent des services de fret depuis l'Europe occidentale vers l'Extrême-Orient directement via la Russie.

Aspects environnementaux et questions de sécurité

Les compagnies aériennes russes exploitent encore un nombre non négligeable de vieux appareils non conformes aux normes internationales et européennes en matière d'environnement (bruit) et de sécurité. Cela demeure un obstacle à l'amélioration des relations entre l'UE et la Russie dans le domaine de l'aviation, qu'il convient d'aborder dans le cadre d'une approche globale au niveau de l'UE.

Les bénéfices d'une app ROCHE COMMUNAUTAIRE DES RELATIONS UE-RUSSIE DANS LE DOMAINE DE L'AVIATION

Avantages économiques globaux

Les industries de l'aviation et de l'aéronautique de l'UE et de la Fédération de Russie sont des composantes fondamentales de notre coopération économique, qui contribue à la mobilité de nos citoyens ainsi qu'au développement industriel. L'importance des relations de la Fédération de Russie et de l'UE dans le domaine de l'aviation s'est accrue avec l'élargissement de l'UE et le trafic entre les marchés de l'UE-25 et de la Fédération de Russie a connu une hausse sensible.

Au cours de la décennie écoulée, l'UE a développé un véritable marché unique européen du transport aérien. Les consommateurs bénéficient également d'un choix plus étendu et de tarifs plus bas, en particulier avec l'apparition des nouvelles compagnies à prix réduits. L'UE développe également des normes communes de sûreté, de sécurité et de gestion du trafic aérien pour le ciel unique.

Tout le potentiel du marché intérieur ne sera cependant pas atteint tant que la Communauté n'agira pas comme une seule et même entité dans ses relations avec les pays tiers en matière d'aviation, partout où des efforts coordonnés peuvent créer une valeur ajoutée dans l'intérêt de l'industrie européenne de l'aviation et des usagers. Selon les résultats d'une récente étude réalisée pour le compte de la Commission, un marché entièrement ouvert entre l'UE et la Russie générerait des bénéfices pouvant aller jusqu'à 680 millions d'euros par an pour les deux parties, du fait des créations d'emplois dans l'industrie de l'aviation, des dépenses des touristes et des voyageurs et des services d'appui à l'industrie de l'aviation dans son ensemble.

Les relations plus étroites entre l'UE et la Russie en matière d'aviation qui résulteraient d'un accord dans ce domaine pourraient encourager l'intégration de l'aviation civile russe dans le réseau existant des alliances globales.

Le développement de liens plus étroits entre les industries aérospatiales européennes et russes ainsi que le renforcement de la coopération industrielle figurent parmi les actions prioritaires dans la feuille de route pour l'espace économique commun UE-Russie. Le renforcement de cette coopération, qui pourrait être envisagé dans le cadre global des négociations en vue d'un accord entre la Communauté et la Russie dans le domaine de l'aviation, ouvrirait également de nouveaux débouchés, avec d'importants bénéfices économiques.

Les économies substantielles (environ 250 millions de dollars par an) qui seraient réalisées par les compagnies aériennes européennes à la suite de l'élimination des paiements liés au survol de la Sibérie, ainsi que les bénéfices associés à un environnement plus libéral propice à l'expansion des services à destination de l'Extrême-Orient via la Russie, doivent également être pris en compte.

L'ouverture et l'intégration des marchés doivent être réalisées d'une manière équilibrée qui tienne compte des autres objectifs importants et atténue les incidences négatives potentielles, tant en termes de concurrence, de protection de l'environnement, de développement durable qu'à d'autres points de vue.

Droits de trafic – créer de nouveaux débouchés, ouvrir le ciel

En ce qui concerne les droits de trafic, comme indiqué précédemment, l'environnement actuel est très restrictif en ce qui concerne la désignation, les fréquences, la capacité et les itinéraires. Cela fait obstacle à l'expansion des services aériens, malgré une demande croissante. L'accord viserait donc à permettre une ouverture progressive de l'accès aux deux marchés, en vue de stimuler les investissements et la concurrence et ainsi d'améliorer les services pour les passagers et le fret.

Les conditions actuelles du marché ainsi qu'en matière réglementaire sont telles qu'un espace d'aviation ouvert, qui reste un objectif à long terme, a peu de chances de voir le jour à brève échéance. Cet objectif pourrait plutôt être atteint par étapes, afin de garantir une transition équilibrée et sans rupture.

Actions visant à garantir la conformité avec le droit communautaire

Conformément à la jurisprudence établie par la Cour européenne de justice dans ses arrêts du 5 novembre 2002, les accords bilatéraux existants dans le domaine des services aériens entre les États membres et la Fédération de Russie doivent être considérés en infraction au droit communautaire dans la mesure où ils contiennent des clauses de désignation qui instituent une discrimination envers les transporteurs des autres États membres, ou d'autres clauses qui empiètent sur le domaine de compétence exclusive de la Communauté. À moins que ces accords ne soient rapidement modifiés ou remplacés par d'autres conformes au droit communautaire, ils doivent être dénoncés par les États membres concernés. Cette situation prive les compagnies aériennes exploitant des liaisons entre l'UE et la Fédération de Russie de la certitude juridique indispensable et risque de compromettre le développement futur de nos relations dans le domaine de l'aviation.

Le résultat des négociations bilatérales entre les États membres et la Fédération de Russie n'ont pas permis la mise en conformité des accords existants avec le droit communautaire.

Un objectif clé d'un accord global relatif au transport aérien entre la Communauté et la Fédération de Russie devrait donc être de résoudre les questions juridiques en suspens liées aux accords bilatéraux en vigueur entre la Russie et les États membres.

Survol de la Sibérie – mise en œuvre de l'élimination des paiements d'ici à 2013

Un accord global CE-Russie dans le domaine du transport aérien prévoirait une période de transition pour la modernisation du mécanisme actuel des paiements liés au survol de la Sibérie d'ici à 2013 au plus tard, et garantirait que les redevances appliquées à l'issue de la période de transition seront transparentes et fondées sur les coûts, et n'entraîneront pas de discrimination entre les compagnies aériennes.

En 1997, le Conseil s'est félicité de l'initiative de la Commission d'entamer des consultations directes avec la Fédération de Russie sur cette question.

La Communauté a pu démontrer sa capacité de négociation avec la Russie, qui a atteint son point culminant avec l'engagement du gouvernement russe, pris le 21 mai 2004 dans le contexte des négociations sur l'adhésion de la Russie à l'OMC, d'éliminer les éléments non commerciaux de l'actuel système des paiements pour le survol de la Sibérie, afin de le remplacer par un système fondé sur les coûts, transparent et non discriminatoire, d'ici à 2013 au plus tard. Il a également été convenu que les modalités de l'élimination progressive de ces paiements au cours d'une période transitoire s'achevant en 2013 seraient arrêtées dans le contexte des négociations entre la Russie et la CE en vue d'un accord global dans le domaine du transport aérien. Cela représente le meilleur cadre pour que les deux parties s'entendent sur la marche à suivre. Les bénéfices économiques de l'élimination des paiements seront importants pour les compagnies aériennes de l'UE, en particulier du fait du développement du trafic à destination des marchés lucratifs et en expansion d'Extrême-Orient.

S'il s'avère difficile d'avancer sur ce point, des actions parallèles, par exemple dans le cadre de l'OACI et de l'application de l'article 15 de convention de Chicago, peuvent être lancées.

Permettre une meilleure intégration du marché – normes en matière de sécurité, de sûreté et d'environnement

Dans le contexte de la libéralisation du marché intérieur de l'aviation en Russie, le gouvernement russe s'est montré intéressé à poursuivre le dialogue avec la CE sur des questions réglementaires. Cela pourrait prendre la forme d'une assistance technique dans le domaine réglementaire, sur la base de l'expérience de la CE avec un cadre réglementaire libéralisé, voire d'un rapprochement des législations relatives à l'aviation. Une telle opération, aboutissant à un cadre réglementaire cohérent et sûr, serait clairement de l'intérêt de la Communauté ainsi que d'opérateurs du secteur qui souhaitent étendre leurs services en Russie et nouer des relations commerciales étroites avec les compagnies russes.

Il serait particulièrement important d'instaurer des dispositions strictes en matière de sûreté et de sécurité et de garantir que l'ouverture du marché intervienne dans un contexte de convergence réglementaire et d'intégration à des niveaux appropriés. L'accord pourrait instituer une coopération étroite afin de garantir le respect des normes de sûreté internationale les plus élevées, en tenant pleinement compte des procédures et des normes applicables ainsi que des développements en cours sur le territoire de la Communauté. L'accord pourrait également permettre de définir des mécanismes et procédures conjoints pour la coopération dans le domaine de la sûreté.

Dans le contexte des nouvelles relations entre la Fédération de Russie et la CE dans le domaine de l'aviation, il serait possible de fournir une assistance en vue de l'harmonisation, le cas échéant, des normes de certification, afin de préparer le terrain pour une coopération plus étroite entre l'Interstate Aviation Committee (IAC) et l'Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA). Un arrangement opérationnel a été conclu entre ces deux organismes en juillet 2004.

En ce qui concerne les questions environnementales, l'accord pourrait établir un cadre pour la consultation entre la CE et la Fédération de Russie, notamment afin de faciliter l'amélioration des normes environnementales en Russie, en particulier en ce qui concerne le bruit des appareils. En outre, l'accord devrait sauvegarder la m rge de manoeuvre de l'UE en ce qui concerne les mesures visant à atténuer l'incidence de l'aviation sur le changement climatique et d'autres questions environnementales.

Coopération industrielle - exploiter les points forts et les besoins mutuels de l'industrie aérospatiale

L'industrie aérospatiale de l'UE est très intéressée à développer une collaboration avec son homologue russe et les centres de recherche du domaine. Divers projets conjoints, notamment en matière de conception, de production, de formation et de certification de sécurité sont déjà en cours, avec la participation des principales compagnies de l'UE et de la Russie. En 2003, Airbus a ouvert un centre d'ingénierie (ECAR—Engineering Center Airbus) en Russie, en coopération avec la compagnie russe Kaskol. L'industrie de l'UE participe également à des projets de développement russes concernant des nouveaux appareils plus respectueux de l'environnement, tels que le TU 204 et le Russian Regional Jet (RRJ). L'accord pourrait créer un nouveau cadre pour les relations en matière d'aviation entre la Fédération de Russie et l'UE, à l'intérieur duquel une coopération industrielle pourrait être promue. Cette coopération permettrait de soutenir des projets de recherche sélectionnés en commun visant à accompagner la restructuration et la modernisation en cours dans l'industrie aérospatiale russe. Il pourrait notamment s'agir de travaux de recherche et de développement relatifs à des normes communes (sécurité, sûreté et environnement), de programmes de formation ainsi que de soutien à la modernisation du système russe de contrôle aérien et des infrastructures aéroportuaires.

Conclusions

La présente communication expose le contexte et les motifs en faveur d'un accord global dans le domaine du transport aérien entre la Communauté et la Fédération de Russie, qui permettrait aux deux partenaires d'établir un cadre cohérent et clair dans lequel pourraient se développer, au cours des prochaines années, des relations constructives en matière d'aviation.

Ce cadre viserait notamment à améliorer les débouchés commerciaux des deux parties, à garantir le respect du droit communautaire, à promouvoir en cas de besoin le rapprochement des législations dans le domaine de l'aviation, à établir des mécanismes conjoints de coopération en matière de normes relatives à la sûreté, la sécurité et l'environnement, enfin à promouvoir la coopération industrielle. Il entraînerait également des bénéfices économiques importants.

La situation actuelle, où chaque État membre, et non la Communauté, négocie les droits de trafic aérien et les conditions d'accès avec les pays tiers, constitue à l'évidence un handicap. Tant que les États membres négocieront de manière bilatérale avec la Russie, il sera beaucoup plus difficile de réaliser les bénéfices importants en termes d'accès au marché et d'intégration sur lesquels tablerait la Communauté, qui escompterait également ouvrir d'importantes possibilités de coopération dans les domaines réglementaire, technique et industriel.

[1] COM (2001) 370.

[2] L'article 43 de cet accord ouvre la possibilité de conclure des accords de transport spécifiques en vue d'améliorer les conditions de l'accès mutuel au marché et des services.

[3] Source: IATA.

[4] Source: Commission européenne: données relatives aux places disponibles, 2004.

[5] Source: OAG.

[6] Source: IATA.

[7] L'Allemagne constitue, pour la Russie, le plus grand marché international d'aviation. Lufthansa, Aeroflot, Pulokovo et Air Sibir exploite chacune plus de 100 fréquences hebdomadaires entre la Fédération de Russie et l'Allemagne.

[8] Source: Organisation mondiale du tourisme (OMT), Tourism highlights 2003.