52004DC0499

Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen - Élaborer un modèle agricole durable pour l'Europe grâce à la nouvelle politique agricole commune (PAC) - Réforme du secteur du sucre /* COM/2004/0499 final */


COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL ET AU PARLEMENT EUROPÉEN - Élaborer un modèle agricole durable pour l'Europe grâce à la nouvelle politique agricole commune (PAC) - Réforme du secteur du sucre

1. Introduction et résumé

L'actuel régime du sucre est souvent l'objet de vives critiques, à travers lesquelles on lui reproche de ne pas favoriser la concurrence, de provoquer des distorsions du marché, de maintenir les prix à un niveau élevé pour les consommateurs et les utilisateurs et d'influer sur le marché mondial, en particulier sur les pays en développement. Pourtant, malgré les appels lancés en faveur d'une réforme, il est demeuré quasiment inchangé depuis quarante ans.

Le succès de la nouvelle orientation de la PAC, qui a consisté à abandonner la politique de soutien des prix et de la production au profit d'un système de paiement unique par exploitation, n'a fait que confirmer la nécessité de réformer le régime du sucre.

Si elle n'est pas réformée, la politique sucrière de l'Union européenne s'écartera peu à peu des principes fondamentaux de la nouvelle PAC, à savoir l'orientation vers le marché, l'aide au revenu agricole découplée et le rétablissement de l'équilibre entre les deux piliers de la PAC à travers le renforcement du développement rural.

Le débat public qui a suivi la publication de la communication de la Commission en septembre 2003 [1] et l'analyse d'impact approfondie du secteur du sucre [2] relative aux options de réforme envisagées pour le régime communautaire du sucre a confirmé qu'il était urgent de réformer ce secteur en profondeur et qu'une réforme de cette nature comporterait des difficultés.

[1] COM(2003) 554 final.

[2] SEC(2003) 1022.

D'une part, il est ressorti de ce débat que le statu quo ne pouvait plus être maintenu, malgré les affirmations selon lesquelles l'immuabilité de la politique communautaire du sucre est la preuve de son bon fonctionnement. L'écart entre les prix communautaires et ceux du marché mondial se creuse, alors même que l'Union européenne a pris de nouveaux engagements au niveau international. Dans de telles conditions, les excédents structurels de l'UE risquent de s'accroître, la rigidité du système de quota actuel n'incitant guère le secteur à ajuster sa production.

D'autre part, les effets positifs d'une réforme sont parfois envisagés d'une manière trop simpliste. Dans le cas présent, par exemple, les effets de la nécessaire restructuration du secteur ne s'exerceront pas de la même manière dans toutes les régions de l'UE qui produisent du sucre. De la même manière, la perspective qu'une évolution du marché communautaire du sucre, liée ou non à une réforme, puisse se révéler favorable à certains pays en développement et défavorable à certains autres de ces pays soulève des questions importantes quant à la manière de traiter ce problème.

La Commission a pris en considération trois éléments importants pour formuler la présente proposition:

1. si cette proposition constitue une étape nécessaire de la réforme du sucre, l'application de la réforme de la PAC à d'autres secteurs a bien montré que cette proposition devait être équilibrée;

2. il faut offrir aux producteurs et aux partenaires commerciaux de l'UE des perspectives réalistes qui s'inscrivent dans la durée;

3. à moyen terme, lorsque certains facteurs, encore flous aujourd'hui, apparaîtront plus clairement et seront mieux définis, il y aura lieu d'examiner la possibilité d'entreprendre une nouvelle réforme.

Dans ce contexte, il est évident que les objectifs de la réforme devront être les mêmes que ceux fixés dans le cadre de la récente approche globale de la réforme de la PAC. Il convient de définir une orientation stratégique à long terme pour ce secteur, qui soit fondée sur une amélioration de la compétitivité, une orientation accrue de la production en fonction des impératifs du marché et un équilibre durable des marché, cadrant avec les engagements pris par l'UE à l'égard des pays tiers et des règles commerciales internationales. Toutefois, la réalisation de ces objectifs ne devra pas se faire sans égards pour les revenus des producteurs, les intérêts des consommateurs et la situation du secteur de la transformation, ni sans prévoir une période de transition pour les ajustements nécessaires. Ces objectifs seront atteints grâce à une réforme fondée sur la combinaison des éléments suivants: réduction sensible des prix, suppression du régime d'intervention, réduction des quotas et possibilité de transférer des quotas.

Concrètement, la Commission propose les éléments suivants:

* Réduction sensible du prix de soutien institutionnel applicable au sucre communautaire, réalisée en deux temps et assortie de la suppression du mécanisme d'intervention et de l'introduction d'un prix de référence. Ce prix de référence servira à établir le prix minimum payé aux producteurs de betterave sucrière, le seuil de déclenchement du stockage privé, le niveau de protection aux frontières et le prix garanti dans le cadre du régime des importations préférentielles. Un système de relevé des prix du marché de l'UE devra être mis en place rapidement.

* L'introduction d'une compensation partielle pour les producteurs sous forme d'une aide directe découplée, dans les limites budgétaires de la PAC, calculée sur la base de la même période de référence historique que celle utilisée pour la réforme de la PAC en 2003 (2000-2002). Cette aide sera intégrée dans le régime de paiement unique par exploitation.

* Simplification du système de quota actuel à travers la fusion des quotas A et B en un seul quota et la réduction du quota total ainsi obtenu, afin d'assurer un équilibre durable au marché du sucre de l'Union européenne. Les dispositions relatives au sucre C ne seront pas modifiées.

* Restructuration du secteur communautaire du sucre à travers le transfert possible de quotas entre États membres et l'introduction d'un régime de reconversion des sucreries, en vue de faciliter les ajustements nécessaires et d'en limiter les effets.

* Modification du régime d'importation applicable aux Balkans occidentaux en vue de fournir aux partenaires commerciaux de l'Union européenne un cadre clair, qui, tout en respectant les concessions commerciales actuelles, puisse préparer leur secteur aux ajustements nécessaires pour évoluer dans un environnement réaliste et économiquement durable.

En outre, cette proposition sera le point de départ d'un dialogue structuré avec les partenaires de l'Union européenne issus des pays en développement, qui portera sur le secteur du sucre et qui permettra d'envisager les moyens à mettre en oeuvre par l'Union européenne pour contribuer au mieux aux ajustements nécessaires et indispensables de la production sucrière dans les États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) et en Inde.

Enfin, si la Commission s'est engagée à suivre la voie de la réforme actuelle, il est évident, bien que certains paramètres tels que l'initiative «Tout sauf des armes» soient clairement établis, que la présente proposition ne peut prendre en considération de manière très précise tous les changements qui pourraient se produire à l'avenir et influer sur le secteur. L'incertitude qui caractérise certains facteurs, tels que les conclusions du cycle de Doha, la contestation de certains éléments de l'actuel régime du sucre par un groupe spécial de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), l'avenir de la production d'éthanol et les perspectives d'évolution des prix du marché mondial, incitent à envisager un réexamen du marché communautaire du sucre lorsque ces points auront été éclaircis. De ce fait, la Commission propose de revoir en 2008 le niveau des prix et des quotas figurant dans le projet de réforme.

2. Projet de réforme du régime communautaire du sucre

Il ressort de l'analyse d'impact approfondie effectuée par la Commission que l'actuel régime communautaire du sucre ne pourra pas être maintenu en l'état. Il apparaît, notamment, que le maintien de prix élevés, tels que ceux actuellement en vigueur dans l'Union européenne, aura pour effet d'augmenter considérablement le volume des importations de sucre, au détriment de la production communautaire. En outre, le régime actuel entraînerait une réduction relativement plus importante de la production de sucre soumise à quota dans les régions productrices de l'UE les plus compétitives, où les niveaux de sucre B sont relativement plus élevés, que dans les régions les moins compétitives, où les quotas B sont plus limités.

Une situation de ce genre provoquerait une détérioration progressive du secteur communautaire du sucre, qui prendrait ainsi une direction encore plus opposée à celle de la réforme de la PAC, tandis que les secteurs réformés s'emploieraient à améliorer leur compétitivité et leur adaptation au marché.

2.1. Une orientation stratégique claire pour le secteur communautaire du sucre

Il y a lieu de prendre dès à présent les mesures nécessaires pour intégrer l'organisation commune de marché (OCM) du sucre de l'UE dans le processus de réforme de la PAC. À cette fin, il convient:

* d'intégrer le secteur communautaire du sucre dans l'orientation stratégique à long terme adoptée pour l'agriculture, en fonction de son enveloppe budgétaire actuelle, du plafond de la rubrique 1 des perspectives financières actuelles, du cadre de dépenses agricoles et des mécanismes de modulation et de discipline financière;

* d'améliorer la compétitivité du secteur communautaire du sucre en abaissant sensiblement le niveau des prix de soutien institutionnels et en simplifiant le régime de quota actuel, de façon à établir une base de production durable du point de vue économique;

* de donner la priorité aux mesures de soutien aux revenus des producteur, en transférant une partie de l'aide versée au secteur communautaire du sucre vers le régime de paiement unique par exploitation;

* en subordonnant ces paiements, comme dans le cas de tous les paiements directs de la PAC, au respect des normes communes européennes en matière d'environnement et de sécurité des aliments (conditionnalité), des règles relatives aux bonnes pratiques agricoles et environnementales et des mécanismes de modulation.

2.2. Promouvoir un secteur communautaire du sucre durable et davantage axé sur les impératifs du marché

2.2.1. Prix

Intervention

Dans l'actuelle OCM du sucre, l'intervention n'a pratiquement jamais été un instrument de réglementation actif. Il y a lieu, par conséquent, de supprimer l'intervention publique, comme cela a été fait pour d'autres secteurs dès 1999. Il est donc proposé d'abandonner le mécanisme d'intervention et le prix d'intervention pour le sucre.

Prix de référence

Le prix d'intervention sera remplacé par un prix de référence applicable au sucre. Le prix d'intervention communautaire ayant évolué depuis de nombreuses années indépendamment des prix du marché mondial et s'établissant actuellement à 632 euros/tonne, soit trois fois le prix du sucre pratiqué sur le marché mondial, le prix de référence sera fixé à un niveau correspondant au prix d'intervention actuel réduit d'un tiers. Il sera appliqué en deux phases échelonnées sur une période de trois ans, à compter de la campagne 2005/2006.

Ce prix de référence servira à établir le prix minimum payé aux producteurs de betterave sucrière, le seuil de déclenchement du stockage privé, le niveau de protection aux frontières et le prix garanti dans le cadre du régime d'importations préférentielles.

Prix minimum de la betterave sucrière

Actuellement, le prix moyen pondéré auquel les sucreries de l'Union européenne vendent leur sucre sur le marché est estimé à 655 euros/tonne, c'est-à-dire à un niveau légèrement supérieur à celui du prix d'intervention fixé à 632 euros/tonne. La présente proposition prévoit une baisse du prix du marché, qui devrait s'établir au niveau du nouveau prix institutionnel de 421 euros/tonne, ce qui représenterait une diminution effective du prix de 36 %. Afin de maintenir le parallélisme entre les réductions de prix opérées au niveau des exploitations agricoles, des sucreries et des raffineries, le prix minimum de la betterave, soit le prix payé aux agriculteurs pour leur betterave, a été fixé en appliquant un même taux de réduction au prix effectif du sucre et de la betterave sucrière. Le tableau n° 1 présente l'échéancier de l'application des réductions de prix.

Tableau n° 1 - Prix institutionnels proposés pour le secteur communautaire du sucre

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Relevé des prix

La Commission présentera un projet de système de relevé des prix du marché du sucre et s'emploiera à le mettre en oeuvre pour la campagne 2005/2006.

2.2.2. Régimes de quotas

Réductions de quotas

Grâce au système actuel des quotas, le marché communautaire du sucre a pu faire perdurer une situation dans laquelle la production communautaire était toujours supérieure à la consommation de l'UE. Alors que le sucre produit à l'intérieur des quotas A et B se voit attribuer le même prix institutionnel, la production de sucre du quota B est soumise à une cotisation beaucoup plus élevée, car elle représente le volume destiné aux exportations avec restitution. Le sucre produit au-delà des quotas A et B est appelé sucre C ; il doit être vendu sur le marché mondial et n'ouvre droit à aucune aide. Avec la réforme opérée en 2003 et le poids qu'elle accorde à l'orientation de la production en fonction du marché, les exportations fortement subventionnées ne seront plus viables économiquement.

Par conséquent, il est proposé, à compter de la campagne 2005/2006, d'aligner les quotas de production sur la consommation intérieure, en prenant en considération les effets des nouvelles dispositions applicables aux secteurs de la chimie et de la pharmacie en ce qui concerne leur utilisation du sucre du quota, réduisant d'abord de 1,3 millions de tonnes le quota actuel de 17,4 millions de tonnes, puis, à compter de la campagne 2006/2007, en procédant à trois réductions de 0,5 million de tonnes chaque année, portant la réduction cumulée du quota de production à 2,8 millions de tonnes en 2008/2009.

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Simplification du système de quota

Dans ce contexte, les quotas A et B seront fusionnés en un seul quota afin de simplifier le régime des quotas. Les dispositions relatives au sucre C ne seront pas modifiées.

Isoglucose

Eu égard aux liens entre le marché de l'isoglusose et celui du sucre, les réductions de prix proposées auront également des effets sur les revenus du secteur de l'isoglucose de l'UE. C'est pourquoi, pour pouvoir présenter des perspectives de rendement économique à long terme, le secteur de l'isoglucose devra être en mesure de bénéficier d'économies d'échelle. À cette fin, il est proposé d'augmenter progressivement et proportionnellement les quotas applicables à l'isoglucose de 100 000 tonnes par an pendant une période de trois années à compter de la campagne 2005/2006.

2.2.3. Instruments garants de l'équilibre du marché

Suppression du mécanisme de déclassement

L'objectif général étant d'améliorer la compétitivité et d'adapter davantage la production aux impératifs du marché, l'actuel mécanisme de déclassement n'a plus lieu d'être conservé comme garant de l'équilibre du marché. En effet, le mécanisme de déclassement du sucre du quota en sucre C entraîne une réduction plus importante du quota B que du quota A et a pour effet d'exercer une pression plus forte sur les États membres producteurs de sucre les plus compétitifs, qui produisent la part la plus importante du quota B. Dans le cas du scénario du statu quo, si les importations augmentaient, cet effet n'en serait que plus perceptible et contribuerait au déclin du secteur communautaire du sucre. Il est donc proposé de supprimer ce mécanisme.

Stockage privé

Un mécanisme de stockage privé, qui sera mis en place par la Commission à travers une procédure d'appel d'offres et déclenché chaque fois que le prix du marché tombera en dessous du prix de référence, donnera la possibilité de retirer du sucre du marché.

Report

Pour rééquilibrer le marché, outre le recours au stockage privé, la Commission aura la possibilité de reporter tout volume excédentaire sur la campagne suivante, en imputant le quota du producteur de sucre. Si tel est le cas, la Commission propose que le volume reporté soit déduit en réduisant uniformément les quotas au prorata.

2.2.4. Mesures particulières applicables aux secteurs de la chimie et de la pharmacie

Il est proposé de conserver les dispositions actuelles excluant des quotas de production le sucre utilisé pour la fabrication d'alcool (y compris le rhum), de bioéthanol et de levure, et de les étendre aux quantités de sucre employées par les secteurs de la chimie et de la pharmacie pour les produits finaux à forte teneur en sucre. Étant donné que le dispositif proposé permettra à ces secteurs de s'approvisionner en sucre à un prix compétitif (proche du prix du marché), les restitutions liées à l'utilisation de sucre dans les secteurs de la chimie et de la pharmacie n'ont plus lieu d'être. Les restitutions à la production seront donc supprimées à compter de la campagne 2005/2006.

2.2.5. Restructuration

Possibilité de transférer des quotas

Les analyses qui se fondent sur les réductions de prix proposées montrent que, dans les régions dans lesquelles le prix du marché du sucre demeure supérieur aux coûts combinés de la culture et de la transformation de la betterave sucrière, la production de sucre sera maintenue, moyennant quelques changements dans la stratégie d'investissement. En revanche, les sucreries situées dans des régions peu compétitives doivent s'attendre à connaître longtemps des marges négatives. Le transfert de quota n'est possible actuellement qu'au sein d'un même État membre, empêchant ainsi la réaffectation de la production de sucre des États membres producteurs les moins compétitifs vers les plus compétitifs.

Par conséquent, il est proposé de modifier les règles régissant la répartition des quotas applicables au sucre, en autorisant le transfert de ces quotas d'un État membre à un autre. En cas de transfert, celui qui cède un quota demeure responsable en ce qui concerne les conditions environnementales du site de l'usine et le redéploiement de la main-d'oeuvre.

Régime de reconversion

Les sucreries qui, en raison des réductions de prix, ne sont plus viables économiquement et dont les quotas ne sont pas repris par un autre exploitant peuvent bénéficier d'un filet de sécurité, qui consiste en une participation aux frais liés à la réhabilitation environnementale du site de l'usine et au redéploiement de la main-d'oeuvre.

Ce dispositif sera mis en oeuvre par les États membres à compter de 2005/2006, pour une période de cinq ans, et le paiement s'effectuera sous forme d'un versement unique. Le cofinancement communautaire du dispositif sera limité à 50 % (75 % dans les régions de l'objectif 1) d'un montant unitaire de 250 euros/tonne de sucre sous quota transformé par le bénéficiaire. Dans ces conditions, le quota qui était alloué à la sucrerie fermée sera supprimé. L'enveloppe financière nécessaire à la mise en oeuvre d'un programme national au titre du dispositif sera calculée chaque année sur la base des demandes adressées par l'État membre.

2.2.6. Aide directe aux revenus des producteurs de betterave sucrière

La réduction des prix proposée entraînera une baisse sensible des revenus chez les producteurs de betterave sucrière. Pour compenser, du moins en partie, cette perte de revenu, il est proposé de mettre en place un système d'aide directe dans ce secteur utilisant une partie des dépenses du FEOGA destinées au sucre pour financer le régime de paiement unique par exploitation. Le paiement annuel sera appliqué en deux temps: une première tranche sera payable en 2005/2006 et 2006/2007 et l'autre à compter de 2007/2008. Les aides ne seront allouées qu'aux exploitants ayant produit de la betterave sucrière soumise à un quota pendant la période de référence historique, et il ne sera pas tenu compte des transferts de quotas ayant pu avoir lieu par la suite.

La perte de revenu a été évaluée compte tenu de la modification du prix minimum pondéré de la betterave sucrière dans chaque État membre, qui reflète les différentes combinaisons de sucre produit sous quotas A et B. Le montant des enveloppes nationales destinées au paiement direct, qui représente 60 % de la perte de revenu estimée, est donné pour chaque État membre dans le tableau n° 2. Dans le calcul de la compensation, les agriculteurs sont traités de la même manière, quel que soit l'État membre.

Tableau n° 2 - Enveloppes financières destinées à l'aide directe aux revenus des agriculteurs (en millions d'euros)

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* y compris les montants correspondant aux mesures d'écoulement en vigueur.

Les États membres incorporeront les paiements directs dans le paiement unique par exploitation et pourront le faire en se fondant soit sur la surface consacrée à la culture de betterave sucrière, qui correspond au volume de betterave sucrière produit sous quota pendant la période de référence historique, soit sur la surface totale consacrée à la culture de betterave sucrière pendant la même période. Comme dans la réforme de 2003 de la PAC, lorsque le paiement unique par exploitation est régionalisé, l'État membre peut également faire preuve de flexibilité lors de la définition de l'équilibre entre les paiements individuels et les moyennes régionales ou nationales.

En outre, les régions ultrapériphériques bénéficieront également d'un traitement spécial, qui prendra en considération les contraintes propres à leur agriculture et au secteur du sucre, ainsi qu'à leur situation géographique par rapport au marché européen, et elles auront la possibilité d'exclure les paiements directs du régime de paiement unique par exploitation, comme cela a déjà été fait dans les autres secteurs réformés [3].

[3] Dans le cadre de la présente réforme, les fonds qui sont actuellement spécialement destinés au soutien du sucre des régions ultrapériphériques seront maintenus.

2.3. Respect des engagements internationaux de l'Union européenne

Les engagements internationaux de l'UE concernant le sucre soulèvent des questions complexes, car, quelle que soit la réforme adoptée par l'UE pour l'OCM du sucre, les pays en développement n'en sortiront pas tous gagnants. Ces questions ne devraient pas être traitées de manière hâtive et simpliste, mais donner lieu, au contraire, à un dialogue ouvert et structuré, entre l'Union européenne et ses partenaires, sur l'ensemble des paramètres examinés.

La présente proposition permet de préciser certains de ces paramètres, tels que le soutien des prix intérieurs de l'UE ou le niveau des quotas communautaires. Si d'autres paramètres, tels que les conclusions du cycle de Doha et du groupe spécial de l'OMC, ne seront mieux connus qu'au fur et à mesure que les débats avanceront, la nécessité d'affronter dès à présent les difficultés liées aux les engagements de l'Union européenne en matière de sucre ne doit faire aucun doute.

Actuellement, l'évolution des prix mondiaux du sucre est essentiellement influencée par l'offre excédentaire, et notamment l'augmentation de la production et des exportations brésiliennes, responsable en grande partie de la récente baisse des prix mondiaux et des nouveaux problèmes de compétitivité auxquels font face beaucoup d'autres pays en développement. Si l'initiative «Tout sauf des armes» offre aux plus pauvres des pays en développement de réelles chances d'exporter de grandes quantités de sucre vers l'Union européenne, elle a aussi suscité des craintes quant à une éventuelle érosion des préférences accordées aux États ACP et à l'Inde.

Enfin, l'augmentation sensible des importations communautaires en provenance des Balkans occidentaux, qui demeurent importateurs nets de sucre, soulève des questions quant à la viabilité économique de ces flux, en particulier en ce qui concerne les retombées pour leurs économies locales, compte tenu de la réforme proposée pour l'OCM du sucre.

La Commission considère que, si elle s'emploie à résoudre les problèmes liés aux engagements internationaux de l'UE concernant le sucre, la mise en oeuvre de l'initiative «Tout sauf des armes» et ses effets escomptés constitueront un paramètre clairement établi dans le débat avec les États ACP et l'Inde.

Dans ce contexte, il apparaît naturel à la Commission de conserver les dispositions de l'actuel protocole sur le sucre ACP et de l'accord Inde, qui engagent l'Union européenne à payer chaque année, à un prix garanti, une quantité convenue de 1,3 million de tonnes d'équivalent de sucre blanc. Afin de tenir compte des modifications apportées par la présente proposition, l'UE devra continuer de respecter cet engagement, mais en payant un prix garanti inférieur pour le sucre blanc, équivalent au prix de référence communautaire. À ce niveau de prix, le prix du sucre brut s'établira à 329 euros/tonne, et l'aide versée aux raffineurs, devenue inutile, sera supprimée.

Dans le cadre du débat lancé par la Commission à travers son Livre vert sur l'avenir des règles d'origine dans les régimes commerciaux préférentiels, la Commission envisage de présenter une proposition relative à l'application des règles d'origine au cas du commerce du sucre, en particulier afin d'empêcher que ces règles puissent être détournées.

Pour éviter toute distorsion de concurrence avec les pays les moins avancées (PMA) bénéficiant de l'initiative «Tout sauf des armes», les exploitants de l'UE continueront de payer le sucre importé dans le cadre de cette initiative à un prix qui ne soit pas inférieur au prix garanti du sucre en provenance des États ACP et d'Inde.

Enfin, pour que les Balkans occidentaux puissent conserver les avantages que leur procure le régime communautaire d'importation du sucre, la Commission propose d'introduire un quota tarifaire à un niveau leur permettant de maintenir leurs exportations vers l'UE au niveau actuel et de tabler sur un équilibre durable entre leur production et leur consommation.

Assurément, la mise en oeuvre de la proposition de la Commission nécessitera certains ajustements dans le secteur du sucre des États ACP et de l'Inde. La Commission entamera un dialogue avec les pays signataires du «Protocole Sucre» (et avec l'Inde) sur la base d'un plan d'action qui sera proposé avant la fin de l'année 2004, afin de définir les mesures d'accompagnement appropriées, mesures qui porteront tant sur les échanges que sur le développement. En ce qui concerne les mesures commerciales, l'accord de Cotonou prévoit le réexamen du «Protocole Sucre» dans le contexte des négociations entre l'Union européenne et les États ACP sur les accords de partenariat économique (article 36.4). Le «Protocole Sucre» devra être intégré dans les accords de partenariat économique de telle manière qu'il ne compromette pas l'engagement pris par l'Union européenne de garantir l'ouverture totale du marché du sucre aux pays les moins avancés à compter de 2009 et qu'il soit parfaitement conforme aux règles de l'OMC. En ce qui concerne l'aide au développement, la Commission propose d'introduire des mesures spécifiques destinées à aider l'Inde et les pays signataires du «Protocole Sucre» à s'adapter aux nouvelles conditions du marché. Ces programmes viseront à améliorer la compétitivité du secteur du sucre dans les régions dans lesquelles il est viable économiquement et à encourager la diversification lorsque la compétitivité du secteur sucrier ne peut être maintenue [4].

[4] Pour financer ces mesures, il sera fait appel à l'instrument de flexibilité jusqu'à la fin de l'année 2006, et, passé cette date, à une allocation thématique dans le cadre de l'instrument «Coopération au développement et coopération économique», comme il a été proposé dans le cadre des prochaines perspectives financières 2007-2013.

Compte tenu des garanties de prix, du tarif préférentiel accordé aux États ACP et à l'Inde, ainsi que de l'accès illimité en exemption de droit pour les pays visés par l'initiative «Tous sauf des armes» à compter de 2009/2010, l'instrument que constitue l'établissement des «besoins maximaux supposés d'approvisionnement» n'aura plus lieu d'être.

Toutefois, il sera nécessaire, comme pour les États ACP et l'Inde actuellement, de continuer à assurer un suivi des importations de sucre et de leur origine, pays par pays.

3. Incidence de la réforme proposée

3.1. Incidence sur le budget

Le coût annuel de la réforme proposée s'inscrit toujours dans les limites du scénario du statu quo des dépenses établi par la Commission lorsqu'elle a présenté, au moment des propositions pour la réforme de la PAC en janvier 2003, des prévisions de dépenses pour la PAC pour la période allant jusqu'à 2013. Le coût que représentent pour la PAC les nouvelles mesures proposées pour ce secteur, et notamment l'aide directe découplée aux agriculteurs, qui constitue l'élément principal, sera compensé par les économies réalisées grâce à la forte réduction des dépenses consacrées aux restitutions à l'exportation, ainsi qu'à la suppression des restitutions à la production dont bénéficiaient les secteurs de la chimie et de la pharmacie et de l'aide au raffinage.

Lorsque les mesures proposées pour le secteur auront été intégralement mises en oeuvre, l'aide directe aux revenus aura un coût annuel de 1 340 millions d'euros et les dépenses relatives aux restitutions à l'exportation pour le sucre et aux restitutions à l'exportation pour le sucre contenu dans les produits transformés exportés se monteront à quelque 100 millions d'euros dans les deux cas. Ce dernier chiffre pourrait se révéler toutefois inférieur si le régime de reconversion entraînait l'annulation d'un grand nombre de quotas et, partant, une diminution des volumes exportés. Les frais liés au mécanisme de stockage privé seraient limités et ne risqueraient d'augmenter que si les prix du marché menaçaient de descendre bien au-dessous du prix de référence.

En ce qui concerne les ressources propres, 75 % des montants perçus grâce au système des cotisations à la production constituent des rentrées budgétaires (360 millions d'euros pour le budget 2004). À l'avenir, avec l'adaptation de la production communautaire de sucre à la consommation intérieure, ces recettes diminueront considérablement et iront jusqu'à disparaître.

3.2. Effets économiques

Malgré les réductions importantes pratiquées sur les prix intérieurs, dont devrait bénéficier le consommateur, il faut s'attendre à un ajustement marginal par rapport à la consommation de sucre sous quota en raison des nouvelles dispositions relatives à l'utilisation du sucre par les secteurs de la chimie et de la pharmacie.

La production communautaire de sucre devenant plus compétitive, les importations en provenance des partenaires préférentiels ne devraient progresser que de 0,5 million de tonnes, passant de 1,9 à 2,4 millions de tonnes de sucre. En cas de maintien du régime des importations applicable aux Balkans occidentaux, l'augmentation du volume des importations serait essentiellement attribuable aux effets du régime d'exemption de droits prévu par l'initiative «Tout sauf des armes» pour les pays les moins avancés.

D'après les prévisions, l'effet combiné des propositions relatives au prix de soutien et à la réduction des quotas devrait consister en une réduction sensible du niveau de la production communautaire sous quota, qui passerait de 17,3 à 14,5 millions de tonnes par an. Dans ces conditions, on peut s'attendre à ce que certaines régions productrices de l'UE cessent de cultiver la betterave.

Ajoutons à cela que les exportations de sucre subventionnées par l'UE devraient diminuer de quelque 2 millions de tonnes.

4. Calendrier de mise en oeuvre et de révision des dispositions proposées

Dans la présente communication, la Commission a proposé d'apporter des modifications notables à un grand nombre d'instruments du régime communautaire actuellement appliqué au sucre.

Considérant qu'il est urgent de jeter les bases d'un nouveau régime pour le sucre, d'établir une nouvelle perspective pour les investissements à long terme dans le secteur communautaire du sucre et de faire face aux effets des mesures commerciales déjà prises, la Commission est d'avis d'appliquer immédiatement, soit dès le début de la campagne 2005/2006 et pour une période de trois ans, l'ensemble des propositions exposées précédemment.

Toutefois, à ce stade et en l'absence de certitudes quant à l'issue du cycle actuel de l'OMC et des effets réels de l'initiative «Tout sauf des armes», la Commission propose de revoir en 2008 les prix et les quotas arrêtés dans la proposition de réforme.