52004DC0257

Communication de la Commission - Avis sur la demande d'adhésion de la Croatie à l'Union européenne /* COM/2004/0257 final */


COMMUNICATION DE LA COMMISSION - Avis sur la demande d'adhésion de la Croatie à l'Union européenne

TABLE DES MATIÈRES

A. INTRODUCTION

a) Préface

b) Relations entre l'Union européenne et la Croatie

B. CRITÈRES D'ADHÉSION

1. Critères politiques

1.1. Démocratie et État de droit

1.1.1. Le parlement

1.1.2. Le pouvoir exécutif

1.1.3. Le pouvoir judiciaire

1.1.4. Mesures de lutte contre la corruption

1.2. Droits de l'homme et protection des minorités

1.2.1. Droits civils et politiques

1.2.2. Droits économiques, sociaux et culturels

1.2.3. Droits des minorités, protection des minorités et des réfugiés

1.3. Autres obligations définies par les conclusions du Conseil de l'Union européenne du 29 avril 1997

1.3.1. Coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY)

1.3.2. Coopération régionale

1.4. Évaluation générale

2. Critères economiques

2.1. Évolution économique

2.2. Evaluation au regard des critères de Copenhague

2.3. Évaluation générale

3. Aptitude à assumer les obligations découlant de l'adhésion

Chapitre 1 - Libre circulation des marchandises

Chapitre 2 - Libre circulation des personnes

Chapitre 3 - Libre prestation de services

Chapitre 4 - Libre circulation des capitaux

Chapitre 5 - Droit des sociétés

Chapitre 6 - Politique de concurrence

Chapitre 7 - Agriculture

Chapitre 8 - Pêche

Chapitre 9 - Transports

Chapitre 10 - Fiscalité

Chapitre 11 - Union économique et monétaire

Chapitre 12 - Statistiques

Chapitre 13 - Affaires sociales et emploi

Chapitre 14 - Énergie

Chapitre 15 - Politique industrielle

Chapitre 16 - Petites et moyennes entreprises

Chapitre 17 - Science et recherche

Chapitre 18 - Éducation et formation

Chapitre 19 - Télécommunications et technologies de l'information

Chapitre 20 - Culture et audiovisuel

Chapitre 21 - Politique régionale et coordination des instruments structurels

Chapitre 22: Environnement

Chapitre 23 - Protection des consommateurs et de la santé

Chapitre 24 - Coopération en matière de justice et affaires intérieures

Chapitre 25 - Union douanière

Chapitre 26 - Relations extérieures

Chapitre 27 - Politique étrangère et de sécurité commune

Chapitre 28 - Contrôle financier

Chapitre 29 - Dispositions financières et budgétaires

C. RÉSUMÉ ET CONCLUSION

1. Critères politiques

2. Critères économiques

3. Capacité à assumer les autres obligations liées à l'adhésion

Annexes

A. INTRODUCTION

a) Préface

Demande d'adhésion

La Croatie a présenté sa demande d'adhésion à l'Union européenne le 21 février 2003 et le Conseil des ministres a décidé le 14 avril 2003 de mettre en oeuvre la procédure définie à l'article 49 du traité sur l'Union européenne qui prévoit que «tout État européen qui respecte les principes énoncés à l'article 6, paragraphe 1, peut demander à devenir membre de l'Union. Il adresse sa demande au Conseil, lequel se prononce à l'unanimité après avoir consulté la Commission et après avis conforme du Parlement européen qui se prononce à la majorité absolue des membres qui le composent.»

L'article 6, paragraphe 1, dispose que «l'Union est fondée sur les principes de la liberté, de la démocratie, du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l'État de droit.»

C'est dans ce cadre juridique que la Commission soumet le présent avis.

Contexte dans lequel s'inscrit l'avis

La demande d'adhésion de la Croatie fait partie d'un processus historique, par lequel les pays des Balkans occidentaux mettent fin à la crise politique de leur région et se préparent à rejoindre l'espace de paix, de stabilité et de prospérité créé par l'Union. Dans «l'Agenda de Thessalonique pour les Balkans occidentaux» adopté par le Conseil européen en juin 2003, l'UE a souligné «qu'il appartient aux pays des Balkans occidentaux de déterminer à quel rythme ils poursuivront leur progression vers l'UE, qui dépendra des résultats obtenus en ce qui concerne la mise en oeuvre des réformes, conformément aux critères établis par le Conseil européen de Copenhague de 1993 et à la conditionnalité prévue dans le cadre du processus de stabilisation et d'association.»

Le Conseil européen de Copenhague, en juin 1993, a indiqué dans ses conclusions que:

«Les pays associés d'Europe centrale et orientale qui le désirent pourront devenir membres de l'Union européenne. L'adhésion aura lieu dès que le pays associé sera en mesure de remplir les obligations qui en découlent, en remplissant les conditions économiques et politiques requises.

L'adhésion requiert de la part du pays candidat:

- qu'il ait des institutions stables garantissant la démocratie, la primauté du droit, les droits de l'homme, le respect des minorités et leur protection;

- qu'il soit doté d'une économie de marché viable et qu'il ait la capacité à faire face à la pression concurrentielle et aux forces du marché à l'intérieur de l'Union;

- qu'il ait la capacité d'en assumer les obligations, et notamment de souscrire aux objectifs de l'union politique, économique et monétaire.

La capacité de l'Union à assimiler de nouveaux membres tout en maintenant l'élan de l'intégration européenne constitue également un élément important répondant à l'intérêt général, aussi bien de l'Union que des pays candidats».

Cette déclaration énumérait les critères politiques et économiques permettant d'examiner les demandes d'adhésion des pays associés d'Europe centrale et orientale.

Le Conseil européen de Madrid, en décembre 1995, a mentionné «la nécessité de créer les conditions d'une intégration progressive et harmonieuse des pays candidats grâce notamment au développement de l'économie de marché, à l'adaptation de leurs structures administratives et à la création d'un environnement économique et monétaire stable.»

Parmi les conditions de participation au processus de stabilisation et d'association définies par le Conseil le 29 avril 1997 figuraient la coopération avec le Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) et la coopération régionale. Ces conditions qui constituent un élément fondamental du processus de stabilisation et d'association sont intégrées dans l'accord de stabilisation et d'association signé avec la Croatie.

Dans son avis, la Commission analyse donc la demande de la Croatie sur la base de la capacité de ce pays d'assumer les obligations découlant du respect des critères fixés par le Conseil européen de Copenhague en 1993 ainsi que des conditions fixées pour le processus de stabilisation et d'association, notamment les conditions définies par le Conseil dans ses conclusions du 29 avril 1997.

Contenu de l'avis

La structure de l'avis tient compte des conclusions du Conseil européen de Copenhague. L'avis:

* décrit les relations qui ont existé jusqu'à présent entre la Croatie et l'Union, en particulier dans le cadre de l'accord existant;

* analyse la situation en ce qui concerne les conditions politiques mentionnées par le Conseil européen (démocratie, primauté du droit, droits de l'homme, protection des minorités), notamment le respect des conditions du processus de stabilisation et d'association;

* évalue la situation et les perspectives de la Croatie en ce qui concerne les conditions économiques mentionnées par le Conseil européen (économie de marché, capacité de faire face à la pression concurrentielle);

* examine la question de la capacité de la Croatie à assumer les obligations résultant de l'adhésion, c'est-à-dire l'acquis de l'Union tel qu'il est exprimé dans le Traité, le droit dérivé et les politiques de l'Union;

* procède enfin à une évaluation générale de la situation et des perspectives de la Croatie en ce qui concerne des conditions d'adhésion à l'Union et fait une recommandation concernant les négociations d'adhésion.

La Commission a inclus une analyse prospective dans l'évaluation qu'elle fait des critères économiques et de la capacité de la Croatie à assumer l'acquis; elle s'est efforcée d'évaluer les progrès que l'on peut raisonnablement attendre de la part de la Croatie au cours des prochaines années qui précèdent l'adhésion, en tenant compte du fait que l'acquis lui-même continuera d'évoluer. À cette fin et sans préjuger de la date effective de l'adhésion, l'avis se base sur une perspective à moyen terme d'environ cinq ans.

Au cours de la préparation de l'avis, la Commission a obtenu des autorités croates un grand nombre d'informations concernant la situation de la Croatie et a utilisé beaucoup d'autres sources d'information, notamment des États membres, des organisations internationales (Conseil de l'Europe, OSCE, HCR, TPIY, Pacte de stabilité, FMI, Banque mondiale, BERD, BEI etc.) et des ONG.

b) Relations entre l'Union européenne et la Croatie

Dans un climat de tension croissante au sein de la république fédérative socialiste de Yougoslavie, la Croatie a déclaré son indépendance le 25 juin 1991. Celle-ci a été suspendue pendant trois mois et confirmée le 8 octobre 1991 (par la décision du parlement relative à l'abrogation des liens juridiques unissant la Croatie à l'État de l'ancienne république fédérative socialiste de Yougoslavie). Un conflit armé s'en est suivi, qui a entraîné le déplacement de groupes ethniques et l'occupation de plusieurs régions du pays par des rebelles serbes locaux et l'armée populaire yougoslave (JNA). La Croatie a été reconnue comme État souverain par l'UE en janvier 1992 et admise aux Nations unies en mai 1992. En mai et août 1995, les opérations «Tempête» et «Éclair» ont permis aux forces armées croates de prendre le contrôle de tous les territoires occupés à l'exception de la région croate riveraine du Danube (Slavonie orientale) qui est restée sous la protection des Nations unies. La Croatie est devenue partie à l'accord de paix de Dayton/Paris de décembre 1995, qui reconnaît les frontières internationales de la Bosnie-Herzégovine et confirme le droit de tous les réfugiés de rentrer chez eux. L'accord d'Erdut de novembre 1995 prévoyait la réintégration pacifique de la Slavonie orientale en Croatie, qui s'est achevée en janvier 1998. Néanmoins, au cours de cette période, les progrès accomplis dans les domaines tels que la démocratisation, le respect des droits de l'homme, notamment des droits des minorités, et la primauté du droit ont été insuffisants pour justifier un rapprochement de l'UE.

Les élections législatives de janvier 2000 et l'élection de Stjepan Mesic à la présidence de la République en février 2000 ont marqué un tournant dans les relations entre l'UE et la Croatie. Les nouveaux dirigeants croates se sont immédiatement montrés déterminés à renforcer les valeurs et les principes démocratiques et ont accompli des progrès rapides et significatifs sur les principales questions politiques en suspens, notamment le respect des droits de l'homme, y compris des droits des minorités, la démocratisation des médias, le respect intégral des accords de Dayton/Erdut, la coopération avec le TPIY et l'amélioration des relations avec les pays voisins.

Cet engagement s'est traduit par un développement rapide des relations avec l'Union européenne. En mai 2000, la Commission a adopté un «rapport de faisabilité» [1 ] proposant l'ouverture de négociations en vue d'un «accord de stabilisation et d'association (ASA)». Depuis novembre 2000, la Croatie bénéficie de mesures commerciales autonomes accordées unilatéralement par l'Union européenne aux pays concernés par le processus de stabilisation et d'association. L'accord de stabilisation et d'association a été signé en octobre 2001 et un accord intérimaire est en vigueur depuis mars 2002.

[1] COM (2000) 311 du 24 mai 2000

Dans une résolution adoptée en décembre 2002, tous les partis politiques du parlement croate ont défini l'adhésion à l'UE comme un objectif national stratégique et demandé au gouvernement de présenter une demande d'adhésion à l'UE. Cette demande a été introduite par le gouvernement en février 2003. Malgré le changement de gouvernement intervenu après les élections législatives de novembre 2003, le consensus entre les partis sur l'objectif politique de l'adhésion à l'UE a été maintenu. L'adhésion à l'Union européenne et à l'OTAN, les relations avec les pays voisins, le développement d'une diplomatie économique et un changement de l'image de la Croatie au plan international constituent les cinq priorités de la politique extérieure annoncées par le nouveau gouvernement.

Relations contractuelles

L'accord de stabilisation et d'association (ASA) entre l'Union européenne et la Croatie a été paraphé le 14 mai 2001 et signé le 29 octobre 2001. Le processus de ratification de l'accord de stabilisation et d'association n'est pas encore terminé. Dès qu'il entrera en vigueur, l'ASA constituera le cadre juridique régissant les relations avec l'Union européenne pendant toute la période précédant une adhésion future de la Croatie. Il fournira un cadre au dialogue politique et au renforcement de la coopération régionale, contribuera à l'expansion des relations commerciales et économiques entre les parties et servira de base à l'assistance technique et financière de la Communauté. Le cadre institutionnel de l'ASA offrira un mécanisme de mise en oeuvre, de gestion et de suivi de tous les aspects des relations. Les sous-comités examineront les questions au niveau technique. Le comité de stabilisation et de l'association réunira les hauts fonctionnaires et visera à résoudre les problèmes se posant dans le cadre de l'ASA. Le conseil de stabilisation et d'association étudiera l'état global et les perspectives des relations et offrira la possibilité de mesurer les progrès accomplis par la Croatie dans le cadre du processus de stabilisation et d'association.

En attendant l'entrée en vigueur de l'ASA, un accord intérimaire est appliqué provisoirement depuis le 1er janvier 2002 et est entré en vigueur le 1er mars 2002. L'accord intérimaire applique les dispositions de l'ASA concernant le commerce des biens ainsi que celles relatives à la concurrence et aux droits de propriété intellectuelle, industrielle et commerciale. L'accord établit une zone de libre-échange entre les parties conformément aux dispositions correspondantes de l'OMC. Il met en oeuvre les mesures commerciales autonomes ambitieuses de l'UE, en vigueur depuis novembre 2000, sur une base contractuelle (à l'exception du «système des prix d'entrée» pour certains fruits et légumes, qui a été supprimé dans le cadre des mesures commerciales autonomes). Ces mesures offrent à la Croatie le libre accès à la quasi-totalité des produits du marché de l'UE, des contingents tarifaires préférentiels étant appliqués au vin, au baby beef et à certains produits de la pêche. L'accord intérimaire présente un caractère asymétrique favorable à la Croatie, celle-ci devant progressivement libéraliser son commerce d'importation en provenance de l'UE sur une période transitoire se terminant le 1er janvier 2007. À cette date, la Croatie aura éliminé tous les tarifs sur les importations de produits industriels et sur plusieurs produits agricoles et de la pêche, tout en continuant d'appliquer des droits et des contingents tarifaires à certains produits agricoles et de la pêche plus sensibles.

Deux réunions du comité intérimaire se sont tenues en avril 2002 et avril 2003. Un système de cinq sous-comités commence à fonctionner; ceux-ci servent de forums de discussion utiles sur toutes les questions techniques liées à l'application de l'accord et au processus de rapprochement de la législation. En général, la Croatie a dûment mis en oeuvre l'accord intérimaire et a contribué au bon fonctionnement des différentes institutions communes. Néanmoins, au cours des deux premières années d'application, certains problèmes de mise en oeuvre se sont posés dans le domaine du commerce des produits agricoles.

Un protocole additionnel à l'accord intérimaire/ASA concernant le commerce des vins et des spiritueux et les mesures réciproques de reconnaissance, de protection et de contrôle des dénominations de vins et des appellations de spiritueux et boissons aromatisées est en vigueur depuis mars 2002.

Un accord sur le commerce des produits textiles entre la Communauté européenne et la République de Croatie est appliqué depuis janvier 2001.

Des négociations se sont achevées en vue de l'adoption d'un protocole portant adaptation de l'accord de stabilisation et d'association et de l'accord intérimaire pour tenir compte de l'adhésion prochaine de dix nouveaux États membres à l'Union. Tandis que l'accord intérimaire s'appliquera à l'Union européenne élargie à partir du 1er mai 2004, le protocole sera indispensable pour permettre aux dix nouveaux États membres d'adhérer officiellement à l'ASA. Des adaptations techniques seront aussi nécessaires dans plusieurs domaines, notamment en ce qui concerne les préférences commerciales prévues dans le cadre de l'ASA/accord intérimaire pour les produits agricoles de base et les produits agricoles transformés, ainsi que pour les produits de la pêche, afin de ne pas perturber le commerce traditionnel entre la Croatie et l'Union européenne élargie. Il y a lieu de rappeler que les accords de libre-échange entre la Croatie et les nouveaux États membres prendront fin le 1er mai 2004, lorsque ceux-ci adhéreront à la politique commerciale commune.

Le ministère de l'Intégration européenne coordonne la mise en oeuvre de l'ASA de façon très efficace et professionnelle. Le gouvernement a mis en place des coordinateurs de l'intégration européenne dans toutes les instances de la fonction publique ainsi qu'un certain nombre de groupes de travail interministériels chargés de l'harmonisation de la législation.

En octobre 2001, la Croatie a adopté un plan d'action pour la mise en oeuvre de l'ASA, prévoyant la planification et le suivi des mesures législatives et non législatives liées aux obligations découlant de l'ASA. La Croatie publie des rapports réguliers sur l'exécution de ce plan. En décembre 2002, la Croatie a adopté le premier «programme national pour l'intégration de la République de Croatie dans l'Union européenne». Ce document stratégique exposait les ambitions de la Croatie et ses tâches en ce qui concerne les critères politiques et économiques, l'alignement du cadre juridique croate sur l'acquis, le renforcement de la capacité administrative et une stratégie d'information à l'intention de l'opinion publique croate. Le programme prévoyait l'adoption de 83 lois et textes de droit dérivé afin de faire progresser l'harmonisation du cadre juridique croate dans 13 chapitres de l'acquis. En général, ces mesures ont été adoptées dans les délais prévus. Un deuxième programme national portant sur tous les chapitres de l'acquis a été adopté en janvier 2004.

La Croatie a travaillé activement à l'alignement de sa législation sur l'acquis communautaire et de nombreux textes législatifs importants ont été adoptés par le parlement, notamment en 2003. Néanmoins, dans l'ensemble, la mise en place des structures administratives nécessaires et plus généralement le renforcement des capacités administratives et judiciaires n'ont pas évolué au même rythme, ce qui compromet la mise en oeuvre et l'application efficaces de la nouvelle législation. La Croatie doit accorder une priorité particulière au renforcement des capacités administratives et judiciaires et intégrer totalement cette dimension dans ses programmes nationaux.

Relations commerciales

L'Union européenne est le principal partenaire commercial de la Croatie. Entre 1998 et 2002, les échanges commerciaux entre l'UE et la Croatie ont sensiblement augmenté. Les importations de l'UE en provenance de Croatie ont progressé de 38 %, passant de 1,8 milliard d'euros en 1998 à 2,5 milliards d'euros en 2002. Les exportations de l'UE à destination de la Croatie ont augmenté de 47 % au cours de la même période, de 4,4 milliards à 6,5 milliards d'euros. L'évolution respective des importations et des exportations a entraîné une aggravation de plus de 50 % du déficit commercial de la Croatie avec l'UE, soit de 2,6 milliards d'euros en 1998 à 4 milliards d'euros en 2002. En outre, la Croatie a un déficit commercial de quelque 1 milliard d'euros avec les pays qui adhèrent à l'UE en mai 2004. En 2002, si les exportations représentaient approximativement 23 % du PIB de la Croatie, environ 54 % de son commerce extérieur concernait l'UE. Ce chiffre passe à presque 70 % si l'on tient compte du commerce avec les pays qui adhèrent à l'UE en mai 2004. La part de la Croatie dans le commerce extérieur de l'UE s'élevait à 0,45 % en 2002.

En 2002, les produits exportés de la Croatie vers l'UE étaient essentiellement des produits textiles (22 % du total) et des machines et de l'équipement électrique (18 % du total). Les produits exportés de l'UE vers la Croatie étaient essentiellement des machines et de l'équipement électrique (25 % du total), du matériel de transport (17 % du total) et des produits chimiques (10 % du total).

La Croatie est membre de l'Organisation mondiale du commerce et de l'accord de libre-échange centre-européen. Elle est active au sein du groupe de travail «commerce» dans le cadre du pacte de stabilité pour l'Europe du Sud-Est. Dans ce contexte, la Croatie a négocié un réseau d'accords bilatéraux de libre-échange avec tous ses pays voisins.

Assistance communautaire

Au total, entre 1991 et 2003, la Croatie a reçu quelque 550 millions d'euros au titre de l'assistance communautaire. Entre 1991 et 2000, cette assistance a été centrée sur l'aide d'urgence par le biais de l'Office d'aide humanitaire de la Commission européenne (ECHO) et du programme Obnova. En 2000, l'UE a consolidé son aide dans le cadre du programme CARDS (Programme d'assistance communautaire à la reconstruction, au développement et à la stabilisation) et a en même temps lancé le processus de stabilisation et d'association (PSA). En 2001, un montant de 60 millions d'euros a été accordé à la Croatie dans le cadre du programme CARDS.

Conformément au règlement CARDS, un document de stratégie par pays, définissant les principaux domaines de coopération pour la période 2002-2006, a été adopté en décembre 2001. Le programme indicatif pluriannuel qui lui est associé décrit plus en détail les priorités pour la période 2002-2004. Dans le cadre des programmes nationaux CARDS, la dotation financière totale pour la période 2001 et 2004 s'élève à 257 millions d'euros consacrés aux cinq priorités suivantes: stabilisation démocratique, développement économique et social, justice et affaires intérieures, renforcement des capacités administratives et environnement et ressources naturelles.

La Croatie est directement impliquée dans la programmation CARDS, notamment dans les discussions sur les stratégies en cours et l'approbation du programme indicatif pluriannuel. Ces discussions concernent non seulement le coordinateur national de l'aide mais aussi les ministères de tutelle, les bénéficiaires potentiels, les institutions financières internationales et le secteur non gouvernemental.

La Croatie bénéficie également du programme régional CARDS, de l'Initiative européenne pour la démocratie et les droits de l'homme, du programme LIFE-pays tiers, du programme de coopération YOUTH-pays tiers, de la coopération régionale en matière de lutte contre les mines dans l'Europe du Sud-Est et de plusieurs autres programmes spécifiques.

La mise en oeuvre de l'assistance CARDS a été lente mais on constate des signes d'amélioration grâce au renforcement de la capacité d'absorption de l'administration croate. Depuis janvier 2002, la délégation de la CE à Zagreb est responsable de la gestion de l'aide, ce qui a considérablement accéléré le processus de mise en oeuvre. Pour garantir une utilisation efficace des fonds de préadhésion, la Croatie devra mettre en place la capacité administrative nécessaire à cet effet.

Plusieurs projets de jumelage (police des frontières, douanes, institut de la statistique et asile) sont en cours et d'autres sont prévus dans les domaines de la gestion intégrée des frontières, l'agriculture et l'appareil judiciaire.

L'administration croate doit poursuivre ses efforts pour satisfaire aux conditions convenues pour les projets (décisions sur les politiques, mise en place et renforcement des institutions, octroi de ressources humaines et financières) mais on constate certains progrès.

Un mécanisme de coordination de l'aide entre la Commission européenne et les États membres a été mis en place depuis 2001 afin de maximiser l'incidence de l'assistance CARDS et de l'aide bilatérale des États membres.

Une coopération effective existe également avec d'autres donateurs. Depuis 1993, la Banque mondiale a soutenu 21 projets pour un montant total de 1 064 millions USD et accordé des subventions s'élevant à 20 millions USD. Des prêts sont consacrés aux investissements en infrastructures, à la santé, l'agriculture et la sylviculture, la réforme des entreprises et du secteur financier, le développement du marché des capitaux ainsi que la réforme de l'appareil judiciaire et du système des retraites. Depuis 1994, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) a procédé à des investissements pour un montant total de 1 325 millions d'euros, dont plus de 300 millions d'euros en 2002. Ces investissements sont essentiellement destinés aux entreprises (produits pharmaceutiques, alimentation, ciment et communication), au secteur financier et aux infrastructures municipales. En 2002, la Banque européenne d'investissement (BEI) a octroyé des prêts pour un montant de 130 millions d'euros destinés au développement régional (infrastructures de transport et de communication), à la cohésion économique et sociale et à la protection de l'environnement.

B. CRITÈRES D'ADHÉSION

1. Critères politiques

Le Conseil européen de Copenhague de 1993 a arrêté un certain nombre de critères «politiques» pour l'adhésion des pays candidats. Ces pays doivent disposer «d'institutions stables garantissant la démocratie, la primauté du droit, les droits de l'homme, le respect des minorités et leur protection». Dans le cas des Balkans occidentaux, les conditions définies pour le processus de stabilisation et d'association constituent également un élément fondamental de la politique de l'UE et elles seront évaluées dans le présent avis.

Dans l'intervalle, avec l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam en mai 1999, les critères politiques définis à Copenhague ont en substance été inscrits, en tant que principe constitutionnel, dans le traité sur l'Union européenne. L'article 6, paragraphe 1, du traité consolidé sur l'Union européenne dispose que: «l'Union est fondée sur les principes de la liberté, de la démocratie, du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l'État de droit.» L'article 49 du traité consolidé prévoit en conséquence que: «tout État européen qui respecte les principes énoncés à l'article 6, paragraphe 1, peut demander à devenir membre de l'Union.» Ces principes ont été soulignés dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qui a été proclamée lors du Conseil européen de Nice en décembre 2000.

Pour effectuer l'évaluation qui lui était demandée, la Commission s'est appuyée sur de nombreuses sources d'information: réponses des autorités croates au questionnaire envoyé en juillet 2003 par les services de la Commission, suivi de réunions bilatérales, discussions avec les ambassades des États membres, évaluations d'organisations internationales (en particulier, Conseil de l'Europe, OSCE, HCR, Pacte de stabilité), rapports d'organisations non gouvernementales internationales et locales, représentants des minorités, etc.

L'analyse menée ci-après comporte un examen systématique des principaux éléments d'organisation et de fonctionnement des pouvoirs publics et des mécanismes de protection des droits fondamentaux. Elle ne se limite pas à une description formelle mais cherche à évaluer le fonctionnement réel de la démocratie et de l'État de droit. Elle porte sur la situation existante à la fin de février 2004. Elle ne procède pas à un examen détaillé des changements qui ont pu intervenir dans le passé ou qui seraient annoncés pour l'avenir, même si l'intention de réformer tel ou tel secteur a été le plus souvent prise en compte dans la présente évaluation.

1.1. Démocratie et État de droit

La démocratie parlementaire a été mise en place en Croatie après les élections du printemps 1990. La nouvelle constitution a été adoptée en décembre 1990, à la veille du déclenchement de la guerre en ex-Yougoslavie. La Croatie a accédé à l'indépendance en 1991; depuis lors, un certain nombre de changements constitutionnels sont intervenus. Les changements constitutionnels de 2000 et 2001 ont été introduits pour abolir la Chambre Haute du parlement et renforcer le rôle du parlement et du gouvernement vis-à-vis du Président de la République. Le 3 janvier 2000, les élections ont mis fin à la suprématie de l'Union démocratique croate (HDZ), parti du Président Tudjman, au pouvoir pendant 11 ans. Au cours de la période 2000-2003, la Croatie, dirigée par une coalition (initiale) de 6 partis, a réalisé des avancées significatives dans les domaines liés à l'État de droit et la démocratie. Le système constitutionnel a été respecté et les institutions ont fonctionné normalement.

Le Président de la République est élu pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois au suffrage universel direct. Il convoque les élections législatives, décide de l'organisation de référendums, donne mandat de former le gouvernement à la personne qui bénéficie de la confiance de la majorité des parlementaires et exerce d'autres fonctions précisées dans la constitution. En collaboration avec le gouvernement, le Président participe également à l'élaboration et à la mise en oeuvre de la politique étrangère. Commandant suprême des forces armées, il nomme et relève de leurs fonctions les chefs militaires. Dans des circonstances définies avec précision, le Président peut dissoudre le parlement si le gouvernement n'obtient pas un vote de confiance ou si le budget de l'État n'est pas adopté dans les 120 jours suivant la date de sa proposition. Le Président est responsable des éventuelles violations de la constitution qu'il pourrait commettre dans l'accomplissement de ses fonctions présidentielles. La procédure visant à déterminer sa responsabilité est engagée sur proposition d'une majorité des deux tiers de l'ensemble des parlementaires. La Cour constitutionnelle rend un arrêt sur cette question à la majorité des deux tiers des juges la composant.

L'actuel Président de la République est M. Stjepan Mesi, vainqueur au deuxième tour des élections de février 2000; les prochaines élections auront lieu en février 2005.

La constitution a été adoptée le 22 décembre 1990 après les premières élections législatives multipartites de 1990. Elle a été modifiée en 1997, 2000 et 2001 par un vote à la majorité des deux tiers de l'ensemble des parlementaires, comme le prévoit la constitution. Elle stipule que la Croatie est une démocratie parlementaire. Néanmoins, les institutions croates ont été confrontées à un certain nombre de difficultés de fonctionnement au cours de la première décennie suivant l'indépendance. À la suite de la révision de la constitution en novembre 2000, la Croatie est passée d'un système semi-présidentiel à un système parlementaire à part entière. Cela a contribué à une réorganisation positive des liens et à un nouvel équilibre du pouvoir entre le Président, le parlement et le gouvernement.

1.1.1. Le parlement

Rôle et structure

Le parlement (Sabor) est composé d'une seule chambre, la Chambre des représentants. En vertu de la constitution, il compte un minimum de 100 et un maximum de 160 représentants élus pour un mandat de quatre ans. La loi électorale prévoit une représentation proportionnelle au moyen de listes de partis dans 10 circonscriptions électorales. Huit sièges du parlement sont réservés aux minorités qui forment la 11e circonscription électorale. La minorité serbe est assurée de trois sièges, les minorités italienne et hongroise d'un siège chacune, les Slovaques et les Tchèques ont droit à un représentant et les autres minorités sont réparties en deux groupes ayant chacun droit à un représentant. La diaspora croate, qui constitue la 12e circonscription électorale, bénéficie également d'une représentation au parlement. Le nombre de représentants élus de la diaspora dépend d'un «quota non-fixe»: le nombre de représentants élus de la circonscription électorale réservée à la diaspora est en effet calculé en divisant le nombre total des suffrages exprimés à l'étranger par le nombre moyen de voix nécessaires pour obtenir un mandat dans les dix circonscriptions électorales en Croatie.

Le parlement peut être dissout de sa propre initiative ou par une décision du Président de la République si le gouvernement n'obtient pas un vote de confiance au parlement ou si le budget de l'État n'est pas adopté dans les 120 jours suivant la date de sa proposition par le gouvernement.

Les parlementaires bénéficient des immunités parlementaires. Le rôle de l'opposition et sa participation au fonctionnement des institutions du pays sont reconnus. La minorité parlementaire est autorisée à proposer son candidat au poste de vice-président du parlement. Les parlementaires dans l'opposition sont également membres de 25 commissions parlementaires: 12 sont présidées par le HDZ et 13 par les autres partis.

La Croatie connaît une situation de multipartisme avec 94 partis politiques enregistrés. Il n'y a aucun obstacle à la création de partis et ceux-ci sont financés en proportion du nombre de sièges obtenus aux élections précédentes.

Le parlement exerce le pouvoir législatif. Il partage son droit d'initiative avec le gouvernement. En général, toutes les lois sont soumises à une longue procédure parlementaire comportant trois lectures consécutives. Néanmoins, la constitution prévoit une procédure d'urgence de deux lectures. De nombreuses lois récemment adoptées ont fait l'objet de la procédure d'urgence.

Un cinquième des parlementaires peut engager la procédure du vote de confiance au gouvernement.

Le parlement peut demander la tenue de référendums sur des propositions de modification de la constitution, sur tout projet de loi ou sur toute question jugée importante.

Fonctionnement du parlement

Les dernières élections législatives ont eu lieu le 23 novembre 2003. L'Union démocratique croate (HDZ), parti de l'ancien Président Tu!jman, a obtenu 66 sièges sur 152, dont 4 sièges de la diaspora. Le nouveau gouvernement HDZ a bénéficié du soutien du parti socio-libéral croate (HSLS), de la coalition du centre démocratique (DC), du parti des retraités croates (HSU) et des représentants des minorités.

Le nouveau parlement a tenu sa session constitutive le 22 décembre 2003 et le nouveau Premier ministre du gouvernement, Ivo Sanader, a obtenu un vote de confiance le 23 décembre 2003 (88 parlementaires ont voté pour, 29 contre et 14 se sont abstenus).

L'Union démocratique croate (HDZ), parti dans l'opposition pendant la législature précédente (2000-2003), a montré qu'il était fermement déterminé à devenir un parti démocratique à vocation pro-européenne. Toutefois, certaines déclarations récentes du HDZ lorsqu'il était dans l'opposition, restent préoccupantes pour la Commission. La preuve n'est pas encore faite que tous les membres élus ont réellement pris leurs distances par rapport au nationalisme radical.

Depuis l'indépendance de la Croatie, des élections législatives ont eu lieu en 1992, 1995, 2000 et 2003. Le processus électoral s'est clairement amélioré lors des deux dernières élections législatives qui ont été considérées comme globalement libres et équitables. Les deux dernières élections ont donné lieu à la formation de gouvernements de coalition.

Le parlement fonctionne de façon satisfaisante, ses pouvoirs sont respectés et l'opposition joue son rôle. Le parlement souffre parfois de l'absence du quorum requis, ce qui peut prolonger indûment le processus législatif.

1.1.2. Le pouvoir exécutif

Rôle et structure

La décision de nommer le Premier ministre relève du Président de la République et est cosignée par le Président du parlement après un vote de confiance du parlement à l'égard du gouvernement. Les ministres sont également soumis à l'approbation du parlement, sur proposition du Premier ministre. Le gouvernement est responsable devant le parlement. Le Premier ministre et les membres du gouvernement sont conjointement responsables des décisions gouvernementales et chaque ministre est responsable de son domaine.

À la demande du parlement, le gouvernement est tenu de l'informer de sa politique, de l'exécution des lois et autres règlements ainsi que des affaires relevant de son autorité. L'institut d'interpellation, prévu dans la constitution, régit la responsabilité du gouvernement vis-à-vis du parlement et la question de la confiance à l'égard du Premier ministre, des membres du gouvernement à titre individuel et du gouvernement dans son ensemble. Entre 1990 et 2004, il y a eu 9 interpellations.

En vertu de la constitution, le gouvernement dispose d'un pouvoir réglementaire autonome lui permettant d'arrêter des décrets de loi. Il peut être autorisé par le parlement à réglementer certaines questions par le biais de décrets, à l'exception de celles concernant les droits de l'homme et les libertés fondamentales, les droits des minorités, le système électoral et son organisation ainsi que le fonctionnement des entités gouvernementales locales et régionales autonomes. La durée d'application de ces décrets ne peut toutefois pas dépasser un an. Le gouvernement est également autorisé à arrêter des décrets ayant force de loi dans le domaine de la politique économique existante qui relève initialement de l'autorité du parlement, lorsque celui-ci n'est pas en session ou a été dissout en raison des élections. Ces décrets doivent toutefois être soumis à l'approbation du parlement dès qu'il se réunit à nouveau.

Le gouvernement est responsable du travail de l'ensemble des instances de la fonction publique, à savoir les ministères, les organes de l'administration publique et les offices administratifs. Les ministères et les organes de l'administration publique constituent les instances centrales de la fonction publique mais il existe également des offices administratifs au niveau des entités gouvernementales autonomes locales (régionales). En outre, pour certaines tâches, des bureaux locaux peuvent être mis en place au niveau des comtés, des communes ou des villes.

La structure et les tâches de la fonction publique ont été revues et définies par la loi sur l'organisation et les compétences des ministères et des organes de l'administration publique, adoptée le 22 décembre, qui institue 14 ministères et 5 organes de l'administration publique. Un bureau central de l'administration a également été créé en décembre 2003 mais n'est pas encore totalement opérationnel. La loi sur les fonctionnaires et les agents des services publics réglemente les conditions d'emploi. La loi sur le gouvernement réglemente le travail et les compétences relevant du gouvernement tandis que la loi sur les obligations et les droits des fonctionnaires de l'État réglemente les droits et les devoirs de ces derniers.

La constitution définit la structure de l'administration locale. Les entités gouvernementales autonomes locales sont les «communes» et les «villes». Les entités gouvernementales autonomes régionales sont les «comtés». En vertu de la loi, la Croatie compte 426 communes, 121 villes et 20 comtés (dont la ville de Zagreb qui jouit du statut de comté). Les responsabilités du gouvernement local, définies dans la loi sur le gouvernement local de 2001, portent sur la distribution d'eau et l'épuration, les soins de santé primaires, l'enseignement préscolaire et primaire etc. Le financement local est réglementé par la loi sur le financement du gouvernement local. Il repose essentiellement sur le partage des produits de l'impôt et différentes recettes non fiscales. Le gouvernement local autonome perçoit le produit de ses ressources propres (recettes provenant de ses actifs propres, taxes régionales et communales, amendes, droits et redevances), des impôts partagés (impôt sur le revenu, impôt sur les bénéfices, impôt sur les transactions immobilières, taxe sur les jeux) et des subventions.

L'armée et la police sont sous contrôle civil. La réforme de l'armée en cours entraînera une réduction significative du nombre de militaires. L'armée est sous le contrôle du parlement et du pouvoir exécutif. La loi prévoit le contrôle civil des services secrets par le Conseil de contrôle des services secrets, dont les membres viennent d'être nommés.

Les services de police font également l'objet d'une restructuration. En avril 2003, le ministère de l'Intérieur a annoncé un plan de réforme stratégique qui est toujours en cours. La Croatie a clairement décidé de passer d'un système applicable en temps de guerre à un système compatible avec les normes de l'UE. Des efforts soutenus doivent toutefois être consentis pour mener à bien ces profonds changements.

Le niveau de sécurité générale en Croatie reste satisfaisant. On n'a enregistré que de rares incidents à caractère ethnique.

Fonctionnement du pouvoir exécutif

La loi sur les fonctionnaires et les agents des services publics de 2001 constitue la base juridique du statut des fonctionnaires et des autres employés relevant du secteur public. La loi ne fait aucune distinction entre les personnes nommées par des politiques et les fonctionnaires permanents, laissant ainsi en suspens les questions ayant trait au statut, au rôle et aux obligations du personnel politique dans la fonction publique, à sa titularisation et aux modalités/procédures de conversion du statut de titulaires politiques en statut de fonctionnaires permanents.

En raison des nombreux règlements actuels (documents internes propres à chaque ministère contenant la description des postes, déterminant le nombre de personnes employées, etc.) et des divergences entre eux, les normes de gestion de la fonction publique sont multiples. La loi présente d'autres lacunes, notamment au niveau du système de promotion, de la mobilité, de la distinction entre les mesures dans l'intérêt du service et les mesures disciplinaires. Les règles régissant le recrutement et la sélection des candidats pourraient également être améliorées. Il est généralement admis que les salaires des fonctionnaires sont trop bas pour attirer dans la fonction publique un nombre suffisant de jeunes diplômés, en raison notamment du fait qu'ils doivent avoir un niveau de formation identique, voire supérieur, à celui exigé pour travailler dans d'autres secteurs.

Les mesures et les décisions des fonctionnaires concernant les droits et les devoirs individuels des citoyens sont régies par la loi de procédure administrative générale. Toute décision administrative peut faire l'objet d'un recours devant un organisme administratif secondaire. S'il n'est pas donné suite à ce recours, le tribunal administratif peut être saisi. Néanmoins, conformément à la décision de la Cour constitutionnelle [2] concernant les droits et les devoirs civils, le tribunal administratif n'est pas un tribunal ayant une compétence de pleine juridiction au sens de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme pour la raison précisée ci-dessous au point 1.1.3. relatif au pouvoir judiciaire.

[2] Décision de la Cour constitutionnelle n° U-I-745/1999, du 8 novembre 2000, Journal officiel 112/00

En outre, un recours peut être introduit devant le Médiateur, élu par le parlement pour un mandat de 8 ans. La durée du mandat contribue à renforcer l'indépendance politique de ce poste. Au cours de ces dernières années, de nombreuses affaires ont été portées à l'attention du Médiateur. En 2002, il a reçu 1 558 plaintes. Dans 104 de ces affaires, il a adressé une recommandation à l'administration concernée et seuls 72 plaignants ont obtenu gain de cause. Le Médiateur examine les plaintes des citoyens ayant trait à l'abus de pouvoir, tant des pouvoirs publics que des fonctionnaires à titre individuel. Outre les cas individuels, le Médiateur se penche sur d'autres questions relatives à la protection des droits constitutionnels et légaux portées à sa connaissance par d'autres sources (par exemple les médias), signalant des irrégularités dans le travail des instances et des organes de la fonction publique. Le Médiateur présente un rapport annuel au parlement.

Le règlement intérieur du gouvernement de la République de Croatie de 2000 fournit le cadre juridique pour la formulation des orientations des politiques et couvre également les consultations interministérielles. Il n'existe aucun organe unique chargé de fournir une vue d'ensemble des politiques aux décideurs. Compte tenu des nombreuses structures, la planification et la coordination des politiques ont tendance à être relativement politisées et fragmentées.

Le ministère de l'Intégration européenne est responsable de la coordination des questions relatives à l'intégration européenne. Tous les ministères disposent d'un réseau de coordinateurs européens et certains d'entre eux ont mis en place des unités spécifiquement chargées de l'intégration européenne.

Il n'existe aucune institution centrale de formation des fonctionnaires ni de programme de formation gouvernemental. La réorganisation du ministère de la Justice, de l'Administration et de l'Autonomie locale, de novembre 2003, a prévu la création du centre de formation des fonctionnaires relevant du ministère de la Justice. À la suite de l'adoption de la loi sur l'organisation et les compétences des ministères et des organes de l'administration publique, du 22 décembre 2003, le gouvernement a publié un décret le 22 janvier 2004 sur la structure interne du bureau central de l'administration. Le décret prévoit 11 unités opérationnelles, dont le centre de formation des agents de l'État. Actuellement, le ministère de l'Intégration européenne organise une formation sur l'UE à l'intention des fonctionnaires.

Le processus de développement de l'autonomie locale est toujours en cours. La décentralisation inscrite au programme gouvernemental pour 2000-2004 a été plus lente que prévu et devrait être accélérée. Depuis juillet 2001, la réforme du gouvernement local a été mise en oeuvre au niveau des comtés et dans 32 villes. Certains secteurs ont été transférés du budget de l'État à celui des comtés (enseignement élémentaire et secondaire, centres d'aide sociale et établissements d'hébergement collectif, maintenance hospitalière) et des villes (enseignement élémentaire). Depuis le début de l'année 2002, les comtés ont désormais en charge la maintenance hospitalière ainsi que la création et le financement des centres d'aide sociale et des maisons de soins pour les personnes âgées et défavorisées. Le transfert des effectifs du secteur de l'enseignement et de leurs salaires n'a jamais été opéré. La situation financière, bien que réglementée par la loi sur le financement du gouvernement local, devrait être clarifiée.

1.1.3. Le pouvoir judiciaire

Rôle et structure

Le système judiciaire croate est organisé hiérarchiquement en trois instances. Les 122 tribunaux municipaux, 114 tribunaux correctionnels, 12 tribunaux de commerce et 21 tribunaux de comtés constituent les tribunaux de première instance. Les tribunaux de comtés sont également compétents pour connaître des recours dirigés contre les décisions des tribunaux municipaux. La Croatie garantit le droit de recours (tribunaux de comtés, tribunal correctionnel de grande instance, tribunal de commerce de grande instance, Cour suprême). La Cour suprême est la juridiction la plus élevée en Croatie.

Le Président de la Cour suprême et le Procureur de l'État sont élus par le parlement et nommés par le Président de la République.

Le tribunal administratif est chargé d'assurer la protection juridique contre les décisions finales de l'administration. Néanmoins, la Cour constitutionnelle a, dans un arrêt de novembre 2000, jugé que le tribunal administratif n'était pas un tribunal ayant une compétence de pleine juridiction en vertu de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme (droit à un procès équitable), notamment en raison de sa capacité limitée d'établir les faits d'une affaire de manière indépendante et de procéder à des auditions orales et contradictoires.

La Cour constitutionnelle tranche les conflits d'intérêt entre les trois branches du pouvoir et est autorisée à évaluer si le droit primaire et le droit dérivé sont conformes à la constitution. Elle est également chargée de décider des pétitions constitutionnelles émanant de personnes estimant que leurs droits constitutionnels ont été lésés par les actes juridiques finals des autorités centrales ou des instances locales ou régionales autonomes. La Cour constitutionnelle est confrontée à un nombre de pétitions en augmentation constante. Elle est également l'organe d'appel compétent en matière de procédures concernant les décisions relatives au licenciement ou à la responsabilité disciplinaire des juges. Dans le cadre du système croate, la Cour constitutionnelle n'est pas considérée comme faisant partie du pouvoir judiciaire.

L'indépendance de l'appareil judiciaire croate est garantie par la constitution et par la loi sur les tribunaux. Les juges sont confirmés dans leurs fonctions et nommés définitivement après une période probatoire de cinq ans. Leur statut permanent est garanti par la constitution. Les juges sont nommés par le conseil national de la magistrature sur la base des avis reçus des conseils de la magistrature institués dans chaque tribunal. Le ministère de la Justice examine si les candidats répondent aux exigences formelles requises tandis que la commission parlementaire compétente et le président du tribunal compétent peuvent également exprimer leur avis. Les procureurs sont nommés par le conseil national des procureurs après une procédure similaire. Les deux conseils sont des organismes autonomes et indépendants. En ce qui concerne la sélection des candidats juges, aucun concours n'est organisé. Pour devenir juge, un juriste doit satisfaire à deux critères d'éligibilité: premièrement, réussir l'examen du barreau et deuxièmement, avoir un certain nombre d'années d'expérience professionnelle en fonction de la catégorie du tribunal auquel il présente sa candidature. En vertu de la loi sur les tribunaux, les juges ne peuvent pas être membres de partis politiques ni exercer d'autres activités susceptibles d'influencer leur autonomie, leur impartialité ou leur indépendance.

Les juges bénéficient de l'immunité en vertu de la constitution et de la loi sur les tribunaux. Pour lever l'immunité d'un juge et autoriser des poursuites criminelles à son encontre, une proposition doit être soumise au conseil national de la magistrature par le bureau compétent du Procureur de l'État. Le conseil national de la magistrature décide de la responsabilité des juges en cas de mauvaise conduite ou d'infraction aux règles de la profession dans le cadre de procédures disciplinaires. Cependant, l'évaluation des performances des juges par le conseil de la magistrature reste largement théorique. À l'exception d'une affaire en cours portant sur des allégations de corruption, rares ont été les décisions à l'encontre des juges, prises par le conseil national de la magistrature. Il n'existe aucun code déontologique contraignant applicable à l'ensemble des fonctionnaires de la Justice. L'association des juges croates (une ONG locale) a toutefois adopté un code déontologique à l'intention de ses membres.

Les tâches des conseillers et des greffiers des tribunaux sont décrites dans les règles de procédures internes de l'appareil judiciaire. Les juges accomplissent de nombreuses tâches qui pourraient être confiées au personnel de bureau. Pour soulager les juges des tâches administratives, le parlement a adopté des modifications législatives en janvier 2004.

L'appareil judiciaire se relève peu à peu d'une période de rotation et de pénurie importantes de personnel. Les emplois vacants sont progressivement occupés par de jeunes juges, procureurs et employés de bureau mais une augmentation supplémentaire globale des effectifs est prévue en principe. Pourtant, la Croatie enregistre déjà une proportion élevée de juges par rapport au nombre de citoyens, en comparaison de l'UE et des pays adhérents. À la fin de 2003, on comptait 1 868 juges, 513 procureurs, 378 conseillers et 6 023 greffiers (2,8 par magistrat).

Le budget consacré à la justice (tribunaux et prisons) s'élevait à 231 millions d'euros en 2003 contre 192 millions d'euros en 2002. La part de ce montant réservée aux investissements dans les bâtiments et les équipements de bureau était de 10,2 millions d'euros contre 5,5 millions d'euros en 2002. Une nouvelle hausse du budget pour l'appareil judiciaire, d'environ 10 %, a été approuvée pour 2004.

Les infrastructures et les équipements de la justice et de son administration constituent toujours un problème sérieux. L'informatisation des tribunaux de commerce et des registres cadastral et foncier vient seulement de commencer et exige d'importants investissements. Quelque 3 300 ordinateurs ont été livrés au cours de ces dernières années et 2 500 supplémentaires devraient l'être en 2004-2005. Les tribunaux n'ont pas encore accès aux bases de données des services de police. L'informatisation de la gestion des tribunaux devrait être achevée pour 2008. Il n'y a aucun réseau informatisé de liaison entre les différents tribunaux. Les bâtiments des tribunaux sont en général anciens et vétustes et doivent être rénovés et/ou reconstruits.

Le centre de formation professionnelle des juges et autres fonctionnaires de la justice a été créé en 1999 mais n'est devenu partiellement opérationnel qu'en 2003. Bien qu'il s'agisse officiellement d'un service autonome au sein du ministère de la Justice et que la formation continue des juges et des procureurs soit prévue, le centre ne dispose pas encore en pratique de capacités suffisantes pour mener à bien ses tâches. Il ne compte que 4 personnes dont le directeur et ne dispose d'aucun budget permanent. À l'heure actuelle, les formateurs ne sont pas recrutés sur concours ni évalués sur leurs performances. Le centre doit instamment élaborer une stratégie de formation, constituer une équipe de formateurs et commencer à dispenser une formation à long terme et des sessions de formation dans les régions. Si le centre a organisé des séminaires ponctuels (pour la plupart financés par des donateurs internationaux), notamment sur les procédures, la jurisprudence et d'autres aspects de la Cour européenne des droits de l'homme, il n'a pas encore commencé de formation en droit de l'UE. Le centre devrait également jeter les bases d'une coopération institutionnalisée avec la Cour suprême qui a pour tâche de superviser la formation des juges en vertu de la loi sur les tribunaux. Un autre problème qui se pose est le fait que les tribunaux ne disposent pas des ressources budgétaires suffisantes pour la formation. Il conviendrait d'aller sérieusement de l'avant dans les projets visant à renforcer le centre ou à mettre en place une académie judiciaire.

Fonctionnement du pouvoir judiciaire

Au cours de la deuxième moitié des années 90, le système judiciaire a souffert d'un manque d'indépendance et d'efficacité et d'une pénurie de personnel. Si des améliorations considérables ont été enregistrées, notamment en ce qui concerne l'indépendance du pouvoir judiciaire, il reste des défis importants à relever. Les principaux problèmes sont le fonctionnement généralement inefficace du système judiciaire, la longueur des délais pour rendre et appliquer les jugements ainsi que les faiblesses liées à la sélection et à la formation des juges. En outre, trop de problèmes sont soumis aux tribunaux alors qu'ils pourraient en principe être réglés par d'autres moyens. La combinaison de tous ces facteurs entraîne un important arriéré judiciaire. Un problème supplémentaire a trait au fait que les tribunaux et certains organes de l'administration ne respectent pas ou n'exécutent pas toujours dans les délais les décisions des juridictions supérieures. Les droits des citoyens ne sont donc pas encore entièrement protégés par le pouvoir judiciaire comme le prévoit la constitution.

On enregistre un arriéré d'environ 1,38 million d'affaires, ce qui montre les sérieuses contraintes qui pèsent sur le pouvoir judiciaire dans l'accomplissement de ses tâches. Pour raccourcir les procédures judiciaires et alléger la charge de travail des tribunaux, un certain nombre de mesures ont été récemment annoncées: les codes de procédures pénale et civile ont été modifiés pour simplifier et accélérer les procédures mais il reste à voir quel sera l'impact réel de ces modifications. D'autres mesures sont nécessaires dans ce domaine. Dans les affaires pénales, les tribunaux devraient être déchargés du travail d'investigation au profit du Bureau du Procureur de l'État. Les affaires d'héritage ne faisant pas l'objet de contestation devraient être traitées par les notaires publics plutôt que les tribunaux. Des premiers pas dans ce sens ont été accomplis avec l'adoption de la loi sur les héritages. Les modifications apportées à la loi sur le rôle des tribunaux visent à simplifier, accélérer et réduire le coût de la procédure d'enregistrement au rôle des tribunaux. Enfin, la loi sur la médiation prévoit une solution alternative au règlement des différends, mais les citoyens croates ne sont pas encore familiarisés avec l'institut de la médiation et on ne devrait donc pas s'attendre à des résultats tangibles dans un avenir proche.

La réforme structurelle du système judiciaire croate a commencé avec l'adoption par le gouvernement d'un document stratégique sur la «réforme du système judiciaire» en novembre 2002 et d'un plan opérationnel en juillet 2003. La stratégie consistait à identifier une série de mesures permettant de remédier à certaines faiblesses structurelles. Elle contenait des propositions relatives à la mise en place d'un système de formation professionnelle, l'allégement de la charge de travail des tribunaux et la simplification des procédures en justice. Elle prévoyait l'adoption de nouvelles lois, l'achat d'équipement et le pourvoi des postes vacants dans le secteur judiciaire, dans des délais toutefois assez irréalistes. La réforme proposée en 2002 n'a pas abordé la question des modifications à apporter à la loi sur les tribunaux en ce qui concerne les possibilités de mobilité des juges, la formation obligatoire et le lien entre performances professionnelles et promotion.

En janvier 2004, le parlement a donné un nouvel élan à la poursuite de la réforme judiciaire par l'adoption d'un ensemble de modifications à la loi sur les tribunaux. Dans le but de réduire l'arriéré judiciaire, les modifications prévoyaient de redistribuer les affaires par leur transfert des tribunaux surchargés aux tribunaux ayant la même juridiction mais une charge de travail moindre, d'élargir les compétences des conseillers des tribunaux en leur permettant d'accomplir certains actes de procédure de façon à soulager les juges, et d'augmenter les possibilités de mutation des juges, avec leur consentement, d'un tribunal à un autre. Les modifications prévoyaient également une description détaillée des obligations des juges et un meilleur système d'évaluation. Le gouvernement a en outre adopté des propositions visant à confier l'exécution des procédures aux agents chargés de l'application, investis de compétences publiques. Néanmoins, cette mesure exige des modifications de la loi sur la mise en oeuvre, qui n'ont pas encore été adoptées par le parlement. Il y aurait également lieu de tenir pleinement compte des modifications du code des procédures civiles, en vigueur depuis décembre 2003, qui ont introduit des délais et d'autres mesures visant à empêcher le recours abusif aux procédures. La mise en oeuvre de toutes ces mesures exigera des efforts substantiels de la part des autorités croates.

L'exécution des décisions de justice en matière pénale relève de l'autorité des juges chargés de l'exécution des jugements et est régie différemment de l'exécution d'autres types de décisions de justice ayant des implications différentes, notamment financières. L'essentiel de l'arriéré judiciaire en Croatie porte sur des affaires d'enregistrement et l'exécution des décisions de justice en matière civile, notamment celles imposant des obligations financières aux débiteurs ou exigeant certains types d'actions de leur part. Il conviendrait d'aller sérieusement de l'avant dans les projets visant à réformer la loi sur la mise en oeuvre.

1.1.4. Mesures de lutte contre la corruption

La Croatie a ratifié les conventions pénale et civile sur la corruption du Conseil de l'Europe et a adapté la législation nationale en conséquence. La corruption est qualifiée d'infraction pénale. La Croatie a adhéré au Groupe d'États contre la corruption (GRECO) en décembre 2000. Lors de sa réunion plénière en mai 2002, le GRECO a adressé seize recommandations aux autorités croates. Ces recommandations ont trait tant aux mesures législatives qu'administratives. La Croatie devrait présenter un rapport sur la mise en oeuvre des recommandations au GRECO dans un proche avenir.

La Croatie n'est pas membre de l'OCDE mais participe au groupe de travail des non-membres et joue un rôle actif dans le réseau anti-corruption. Les travaux préparatoires à l'adhésion à la convention de l'OCDE sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales sont en cours.

Selon des rapports et des enquêtes au niveau international, la corruption constitue toujours un problème en Croatie et touche différents aspects de la société. Malgré de sérieux efforts accomplis au cours de ces dernières années pour intensifier la lutte contre la corruption, d'autres mesures doivent être prises.

Au niveau national, la Croatie a adopté et a mis en oeuvre différentes lois liées à la lutte contre la corruption. Il existe également un plan global d'actions et de mesures ainsi qu'un programme national anti-corruption. Néanmoins, aucun suivi de la mise en oeuvre du programme national n'a été effectué jusqu'à présent alors que de nombreuses échéances avaient été fixées à 2001 dans le programme. La législation nationale a été partiellement alignée sur les dispositions de la convention de 1995 relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes et de ses protocoles mais des améliorations sont encore nécessaires. Plusieurs actes juridiques, notamment la loi sur la prévention des conflits d'intérêt dans l'exercice de fonctions publiques, contiennent des dispositions visant à empêcher les conflits d'intérêt entre les secteurs privé et public.

Avec la mise en place du Bureau pour la lutte contre la corruption et la criminalité organisée (USKOK), la Croatie peut compter sur un organisme spécialisé dans les enquêtes et les poursuites liées aux affaires de corruption. Le bureau fonctionne comme une unité spéciale au sein du Bureau du Procureur de l'État. Une étroite collaboration est prévue avec l'Office pour la prévention du blanchiment des capitaux. Cependant, l'USKOK n'est pas encore tout à fait opérationnel et sa capacité administrative et de fonctionnement doit être considérablement améliorée. Une formation est dispensée à différents niveaux et par le biais de plusieurs organismes et programmes.

Il existe plusieurs sources statistiques sur la corruption. Le Procureur de l'État publie un rapport annuel contenant des statistiques sur les cas de corruption, qui est discuté au parlement croate. En outre, le ministère de l'Intérieur conserve un relevé statistique distinct des délits de corruption et l'Institut national de la statistique collecte les données en la matière auprès des organes de l'administration publique, notamment du Bureau du Procureur de l'État et de l'USKOK.

Différentes mesures sont prises pour améliorer les capacités du personnel et les conditions de travail et pour fournir les infrastructures appropriées et les équipements informatiques aux tribunaux, aux services du Bureau du Procureur de l'État et à l'USKOK. Néanmoins, des améliorations significatives seront encore nécessaires. En outre, il y a lieu d'entreprendre davantage d'actions de sensibilisation du public à la corruption en tant qu'infraction pénale sérieuse.

1.2. Droits de l'homme et protection des minorités

La Croatie a mis en place un certain nombre de dispositions législatives visant à garantir le respect des droits de l'homme et ceux des minorités. La Constitution traite des libertés et droits fondamentaux. Ces droits peuvent également être garantis par l'application de certaines conventions internationales, au premier rang desquelles figure la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et ses principaux protocoles additionnels. Cet ensemble constitue un élément de l'acquis, en application de l'article 6 du traité de l'Union européenne: tout État souhaitant adhérer à l'Union européenne doit avoir au préalable ratifié ces textes.

La Croatie est membre du Conseil de l'Europe depuis 1996 et a ratifié la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et ses protocoles additionnels en 1997. Elle accorde également aux particuliers la possibilité de saisir la Cour européenne s'ils estiment que les droits dont ils disposent en vertu de cette convention ont été violés.

Parmi les autres conventions internationales protégeant les droits de l'homme et des minorités, la Croatie a ratifié la convention européenne pour la prévention de la torture, ainsi que la charte européenne des langues régionales ou minoritaires, mais doit encore signer la charte sociale européenne de 1996. Elle a ratifié les principales conventions des Nations unies existant dans le domaine des droits de l'homme, ainsi que leurs protocoles.

Conformément à l'article 140 de la Constitution, les traités internationaux font partie de l'ordre juridique interne de la République de Croatie et s'appliquent à la législation nationale ordinaire.

1.2.1. Droits civils et politiques

L'accès à la justice est garanti par la Constitution. Un système d'assistance juridique existe en matière pénale. Pour les affaires civiles, seul l'ordre des avocats fournit une assistance juridique gratuite. Les étrangers ne peuvent bénéficier d'une assistance juridique dans les affaires civiles. Aucune assistance juridique gratuite n'est fournie aux apatrides (ce qui est le cas d'un grand nombre de Roms). L'ordre des avocats détermine ses propres honoraires en ce qui concerne les services juridiques. Dans les affaires civiles, aucune assistance juridique n'est prévue par l'État, de même que celui-ci n'exerce aucun contrôle sur les critères d'éligibilité relatifs à l'assistance juridique offerte par l'ordre des avocats. La loi relative aux frais de justice exempte les rapatriés et les personnes déplacées à l'intérieur du pays de l'obligation de payer des frais de justice. En revanche, la loi sur l'asile ne précise pas la manière dont l'assistance juridique sera fournie aux demandeurs d'asile.

La peine de mort a été abolie et la Croatie a signé le protocole n° 13 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui prévoit l'abolition de la peine de mort en toutes circonstances. Ce protocole est entré en vigueur le 1er juillet 2003. La torture et les traitements inhumains et dégradants sont interdits par la Constitution. Le travail forcé ou obligatoire n'est pas davantage autorisé.

En octobre 2002, la Croatie a adopté un plan national pour la suppression de la traite des êtres humains en conformité avec les normes internationales. À l'heure actuelle, en vertu du code pénal de 1997, la traite des êtres humains n'est érigée en infraction pénale qu'en vertu de l'article 175, qui sanctionne l'esclavage sans se référer spécifiquement à ladite traite [3].

[3] Les modifications apportées en juillet 2003 au code pénal ont mis l'article 175 en conformité avec la convention internationale qui fait spécifiquement référence à la traite des êtres humains. Toutefois, pour des raisons tenant à la procédure formelle, la Cour constitutionnelle a annulé, le 27 novembre 2003, les modifications du code pénal adoptées par le Parlement le 9 juillet et devant entrer en vigueur le 1er décembre 2003. La Cour constitutionnelle a estimé que les modifications avaient été adoptées sans l'appui de la majorité qualifiée.

La Constitution croate interdit toutes les formes de discrimination, y compris la discrimination fondée sur la race. Selon le code pénal, la responsabilité pénale est engagée en cas de violation de l'égalité des citoyens sur la base de la race. Il prévoit que toute personne qui violera les droits de l'homme et les libertés élémentaires, sur la base de différences de race, de sexe, de couleur de peau, de nationalité ou d'origine ethnique, verra sa responsabilité pénale engagée. Il n'existe aucune disposition pénale spécifique interdisant les actes de xénophobie.

Les arrestations arbitraires sont interdites par la Constitution. Nul ne peut être arrêté ni placé en détention sans acte judiciaire écrit. Toute personne arrêtée a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, qui peut statuer sur la légalité de la privation de liberté dont elle fait l'objet. Elle doit, en outre, être immédiatement informée des motifs ayant présidé à son arrestation. De plus, la Constitution prévoit le paiement d'une indemnité à toute personne injustement arrêtée. La durée de la détention provisoire est définie avec précision dans la loi, la personne privée de sa liberté bénéficiant de garanties quant au respect des normes internationales.

Le droit de vote est défini par la Constitution et garanti à tous les citoyens ayant atteint l'âge de 18 ans. Cette disposition s'applique également aux citoyens qui sont à l'étranger lors des élections.

La liberté d'association et de réunion est garantie par la Constitution. La loi correspondante, entrée en vigueur le 1er janvier 2002, a été mise en oeuvre sans qu'aucun problème n'ait été signalé. Le nombre d'organisations de la société civile immatriculées en Croatie croît rapidement, ce secteur étant de plus en plus diversifié. Alors qu'on ne recensait encore que 15 375 ONG en 1999, leur nombre atteignait les 23 740 en août 2003. Sont également enregistrés quelque 70 fondations, 6 fonds et 120 ONG internationales. Au fil des ans, les ONG ont contribué dans une large mesure à promouvoir les droits de l'homme, en particulier pour tout ce qui touche aux réfugiés et au contrôle des élections.

La liberté d'expression est garantie par la Constitution. Pressions directes, harcèlement, extorsions économiques et poursuites arbitraires étaient monnaie courante avant l'an 2000. La situation s'est considérablement améliorée depuis lors. Les médias sont désormais largement déréglementés et obéissent généralement aux lois du marché libre. Il est néanmoins à craindre qu'une influence politique puisse continuer à s'exercer au niveau local.

Le secteur de la presse écrite est caractérisé par une grande diversité de quotidiens. Il existe cinq quotidiens nationaux, auxquels s'ajoutent des quotidiens régionaux ou locaux. On recense également trois hebdomadaires politiques. À l'exception de deux quotidiens nationaux, tous les journaux ont été privatisés et les journalistes n'ont plus d'obstacles majeurs à surmonter dans l'exercice de leur profession. En dépit d'une grande diversité politique, des mesures supplémentaires devraient être prises, afin de garantir la transparence en matière de propriété des médias. Toute position dominante d'un groupe d'éditeurs dans le secteur de la distribution pourrait avoir pour conséquence de fausser la concurrence (or, le principal réseau de distribution en Croatie est contrôlé à plus de 50 % par certains des plus grands éditeurs).

Dans le domaine audiovisuel, il existe plus de 130 stations de radio et radiodiffuseurs étrangers diffusant leurs programmes. Le télédiffuseur public (HTT) n'est plus en situation de monopole. La privatisation de la troisième chaîne de télévision nationale, cédée à un consortium RTL croate, pourrait favoriser le développement du secteur privé de la radiodiffusion et introduire les notions de concurrence et de pluralisme sur le marché de la télévision. Outre les trois chaînes de télévision qui couvrent l'ensemble du pays, il existe plusieurs réseaux de télévision régionale. L'accès aux sources d'informations étrangères ne fait l'objet d'aucune restriction. Les chaînes de télévision étrangères sont accessibles par satellite et par câble.

Le cadre juridique et administratif actuellement en vigueur en Croatie a été adopté dans l'intention de transposer les normes européennes dans la législation croate. Il est néanmoins à craindre qu'une influence politique puisse continuer à s'exercer sur les autorités de tutelle qui ont été créées.

Il existe quatre lois importantes dans le domaine des médias: (i) La loi sur la radiotélévision croate (HRT), de mars 2003, réglemente le fonctionnement du radiodiffuseur public, HRT, et définit les principes et les obligations en matière de programmes. La procédure de désignation des membres du conseil d'administration de HRT ne garantit pas la transparence nécessaire, pas plus que l'indépendance politique et la pluralité d'opinions dont doivent faire preuve les instances régulatrices de l'audiovisuel. Les membres du conseil ont été choisis [4] avec beaucoup de retard et davantage en fonction de considérations politiques que de l'expérience acquise dans ce domaine. Les représentants de la société civile devraient jouer un rôle plus important au niveau de la nomination des membres de ce conseil. (ii) La loi sur les médias électroniques, adoptée en juillet 2003, régit les émissions de radio et de télévision électroniques, ainsi que les publications électroniques. Elle décrit également la procédure d'octroi de licences à suivre par les radiotélédiffuseurs publics et privés. Un conseil des médias électroniques (organisme de surveillance des médias) pourra accorder et retirer les licences d'attribution de fréquences, exercer un contrôle et recevoir les plaintes. La procédure de nomination des membres du conseil ne garantit ni la transparence nécessaire, ni l'indépendance politique et la pluralité d'opinions, ni encore un personnel et des moyens financiers suffisants dont doivent pouvoir bénéficier les instances régulatrices de l'audiovisuel. La loi adoptée n'est pas pleinement en conformité avec la convention européenne sur la télévision transfrontière ni avec la directive «Télévision sans frontières» (voir également le chapitre 20 - Culture et audiovisuel). (iii) La loi sur les télécommunications, adoptée en juillet 2003, vise à faciliter la libéralisation en matière de services de télécommunication en créant des conditions favorables à de nouveaux prestataires de services de télécommunication fixe et mobile. La loi institue une Agence des télécommunications faisant office d'autorité de tutelle indépendante et chargée de l'attribution des fréquences et d'autres aspects techniques. Les liens entre l'Agence des télécommunications et le conseil des médias électroniques ne sont, toutefois, pas clairement définis et les travaux effectués par les deux organismes pourraient bien déboucher sur des impasses. Cette loi est largement en conformité avec les normes internationales, mais ses aspects relatifs à la radiotélédiffusion doivent faire l'objet d'une réforme urgente. (iv) La loi sur les médias (appelée autrefois «loi sur l'information du public»), adoptée en octobre 2003, réglemente les principes fondamentaux du travail des médias non électroniques (soit essentiellement la presse écrite), tels que la liberté d'expression, le droit du public à l'information, la protection de la vie privée et la propriété des médias. En janvier 2004, toutefois, la Cour constitutionnelle a abrogé la loi pour des raisons de procédure (elle n'avait pas été adoptée à la majorité absolue alors qu'elle s'intéressait aux droits fondamentaux de la personne). Selon la décision de la Cour constitutionnelle, la loi sur les médias peut s'appliquer à titre provisoire jusqu'au 30 avril 2004. La Croatie devrait veiller à ce que la loi sur les médias révisée tienne pleinement compte de l'article 10 de la convention européenne des droits de l'homme (CEDH), ainsi que d'autres recommandations pertinentes adoptées par le comité des ministres du Conseil de l'Europe.

[4] Le Parlement a approuvé le choix des membres du conseil le 17 octobre 2003. Six membres ont été nommés par l'ancienne coalition au pouvoir et cinq par l'opposition. Le conseil se compose de 11 membres issus de différents groupes de la société civile.

Adoptée en juillet 2003, la loi sur les modifications à apporter au code pénal, qui prévoyait notamment la criminalisation de la diffamation par les journalistes, a été annulée par la Cour constitutionnelle en novembre 2003 parce qu'elle n'avait pas été adoptée à la majorité absolue. Il importe à présent que, dans la loi révisée, la législation sur la diffamation tienne compte des normes européennes (telles que définies dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme).

Il importe, en conclusion, que des changements soient opérés, afin d'adapter les lois susmentionnées aux normes européennes, conformément aux recommandations formulées en février 2004 par la mission commune d'experts du Conseil de l'Europe, de la Commission européenne et de l'OSCE.

Le droit de propriété est reconnu par la Constitution. Toutefois, les étrangers demeurent soumis à certaines limitations définies par loi, notamment en ce qui concerne la propriété des superficies agricoles, des forêts et des zones naturelles protégées (parcs nationaux, réserves naturelles, etc.). Les personnes physiques et morales étrangères peuvent devenir propriétaires de biens fonciers en Croatie, sous réserve de réciprocité et de l'approbation du ministère des Affaires étrangères. En cas d'héritage, également, les étrangers doivent satisfaire à la condition de réciprocité.

Le processus de restitution des propriétés confisquées sous le régime communiste yougoslave est réglementé par une loi entrée en vigueur en janvier 1997. Ce processus est particulièrement lent: après 7 années de mise en oeuvre, une décision juridiquement contraignante n'a été prise que dans 34 % des cas (plus de 51 000 cas présentés) et une décision favorable n'a été obtenue que pour 21 % des plaintes. La loi prévoit que seuls les descendants au premier degré puissent demander compensation, sous réserve qu'ils satisfassent à certains critères d'éligibilité. Le gouvernement n'est pas en mesure de prévoir la date d'achèvement de la procédure.

Le respect de la vie privée est garanti. La Constitution garantit l'inviolabilité des domiciles, la liberté et le caractère privé de la correspondance. Seul un tribunal peut ordonner la fouille d'un domicile ou d'autres locaux au moyen d'un mandat motivé.

Selon les informations disponibles, aucun apatride n'aurait été enregistré en Croatie suite à la dissolution de la RSFY.

1.2.2. Droits économiques, sociaux et culturels

En 1999, la Croatie a ratifié la charte sociale européenne de 1961 et son protocole additionnel de 1999, qui sont entrés en vigueur en mars 2003. En février 2003, la Croatie a également ratifié le protocole de 1991 modifiant la charte sociale européenne. La Croatie n'a pas encore signé la charte sociale européenne de 1996.

La Constitution croate prévoit des droits économiques, sociaux et culturels. La liberté d'entreprendre et la liberté du marché sont garanties et l'État s'engage à garantir un statut juridique égal à tous les entrepreneurs. Le droit au travail, avec accès de tous à l'emploi dans des conditions identiques, est également reconnu, de même que le droit des employés et des membres de leurs familles à la sécurité sociale et à l'assurance sociale. La Constitution prévoit toute une série d'avantages sociaux, dont le droit universel aux soins de santé et à des soins spéciaux pour les plus faibles, les plus démunis et les handicapés, l'accent étant mis sur les programmes d'intégration sociale. Néanmoins, des contraintes budgétaires limitent la portée de ces droits. Les familles bénéficient d'une protection spéciale. La maternité et l'enfance sont protégées par l'État.

La Croatie, en sa qualité de successeur de la Yougoslavie, applique la convention des Nations unies sur les droits de l'enfant. Le pays devrait présenter un deuxième bilan sur les progrès de la mise en oeuvre de la convention en mai 2004. Dans le courant de l'été 2003, la Croatie a annoncé la création d'un poste de protecteur des enfants.

Rien ne s'oppose à la création de syndicats. Le droit de grève est garanti, tout en étant assorti de certaines restrictions pour les forces armées, la police, la fonction publique et les services publics (dont le personnel de santé).

Il existe un droit à l'enseignement primaire gratuit. L'accès à l'enseignement secondaire et supérieur est libre, de même que la création d'écoles privées et d'établissements d'enseignement.

La liberté religieuse est garantie. Si l'Église est séparée de l'État, il existe toutefois un accord entre la Croatie et le Saint-Siège, qui définit un cadre favorable aux travaux et activités de l'Église catholique dans la société. L'enseignement religieux, s'il n'est pas obligatoire, n'en est pas moins dispensé dans le système éducatif public. La Croatie a signé des accords similaires avec les principales confessions en Croatie (catholique, orthodoxe et musulmane, notamment), à l'exception du judaïsme. La question de la restitution des propriétés juives est l'obstacle principal à la conclusion d'un tel accord.

Les relations homosexuelles sont reconnues par la loi. La loi sur l'égalité des sexes interdit toute discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

1.2.3. Droits des minorités, protection des minorités et des réfugiés

Minorités

D'après le recensement de 2001, 7,5 % de la population croate appartient à 16 minorités nationales. Les Serbes sont les plus nombreux (4,5 % de la population totale), suivis par les Bosniaques (0,47 %), les Italiens (0,44 %), les Hongrois (0,37 %), les Albanais (0,34 %) et les Slovènes (0,3 %). D'après les dernières statistiques officielles, les Roms représenteraient 0,21 % de la population, mais le chiffre réel est probablement nettement plus élevé.

La Croatie a ratifié toutes les conventions du Conseil de l'Europe qu'elle a signées, telles que la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention-cadre pour la protection des minorités nationales, la charte européenne des langues régionales ou minoritaires, ainsi que la convention des Nations unies sur les droits civils et politiques. La Croatie a, en outre, conclu avec la Hongrie et l'Italie des accords bilatéraux sur la protection des minorités nationales. Un accord bilatéral avec la Serbie-et-Monténégro est en préparation.

La loi constitutionnelle sur les droits des minorités nationales, adoptée le 13 décembre 2002, définit le cadre juridique national pour les droits des minorités en Croatie. Les minorités nationales jouissent du droit de posséder jusqu'à huit représentants au Parlement. Au niveau local, les minorités ont le droit d'avoir des représentants dans des organes élus, ainsi que dans les instances judiciaires et administratives des municipalités et des villes. La loi constitutionnelle sur les droits des minorités nationales prévoit également la représentation des minorités dans les instances judiciaires et administratives au niveau national et local.

De surcroît, un conseil consultatif des minorités nationales a été institué au niveau national, de même que des organes consultatifs locaux auprès des conseils municipaux. Le gouvernement devrait collaborer étroitement avec le conseil des minorités nationales à la mise en oeuvre de la loi constitutionnelle sur les droits des minorités nationales.

En outre, un cadre juridique spécialement dédié aux droits de la minorité serbe dans la région du Danube a été institué par l'accord d'Erdut et la lettre d'intention de 1997. Si la plupart des droits garantis en vertu de l'accord d'Erdut sont transposés dans la loi constitutionnelle sur les droits des minorités nationales, certains droits spécifiques résultent de la lettre d'intention, tels que la représentation proportionnelle dans la police et la justice et le droit à des écoles de minorités.

Les membres des minorités nationales en Croatie exercent leur droit d'utiliser leur langue maternelle officiellement et sur un plan égal sur le territoire des villes/municipalités et des comtés, dès lors qu'ils représentent au moins un tiers de la population ou que cette disposition est prévue par des accords internationaux. De plus, ils ont droit à l'enseignement dans leur langue, et ce dès l'enseignement préscolaire (jusqu'au secondaire), conformément à la Constitution, à la loi constitutionnelle sur les droits des minorités nationales (2002) et aux lois sur l'emploi et l'enseignement de la langue et de l'alphabet des minorités nationales (2000).

Pour dispenser des cours dans la langue et l'alphabet d'une minorité nationale, un établissement d'enseignement peut aussi bien être une institution publique, financée par le budget de l'État, qu'une école privée créée par une personne physique ou morale dans des conditions identiques à celles qui s'appliquent à la création de tout établissement d'enseignement. Il semble que les principes d'égalité et de non-discrimination, de protection de l'identité nationale, d'intégration sociale, de liberté de création d'établissements d'enseignement, de programmes éducatifs et de formation appropriée des enseignants soient intégrés dans la législation croate. Ces principes sont compatibles avec les principes fondamentaux énoncés dans la convention-cadre du Conseil de l'Europe pour la protection des minorités nationales, ainsi que dans la charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

Le médiateur pourrait jouer un rôle important dans la protection des droits des minorités, s'il n'était actuellement aux prises avec de sérieuses contraintes budgétaires. Il existe un bureau gouvernemental des minorités nationales. Dans le budget de l'État pour 2003, quelque 20 millions de HRK (2,6 millions d'euros) sont alloués aux minorités par l'intermédiaire de ce bureau.

Huit représentants des minorités nationales ont été élus aux élections parlementaires du 23 novembre 2003, ce qui constitue un progrès par rapport aux élections de l'an 2000, où cinq représentants avaient été élus par les minorités nationales.

D'après le dernier recensement, 331 383 citoyens croates appartenant aux 16 minorités nationales ont le droit d'élire 471 conseils des minorités, soit 6 662 conseillers et 143 représentants aux niveaux local (municipalité) et régional (comté). Des élections aux conseils consultatifs des minorités à l'échelon local ont été organisées le 18 mai 2003. Toutefois, du fait d'une période de préparation trop courte, du faible soutien apporté par le gouvernement et du manque d'organisation au niveau des organisations représentant les minorités, moins de la moitié, seulement, des conseils auxquels les minorités pouvaient prétendre en vertu de la loi constitutionnelle sur les minorités nationales ont été élus. Des élections supplémentaires pour élire les membres des conseils des minorités nationales ont été organisées le 15 février 2004 dans 15 comtés, 64 villes et 132 municipalités. La participation s'est située aux alentours de 8 % de la population totale des minorités. Il subsiste encore des malentendus et un manque de sensibilisation au niveau des autorités locales, mais également au sein des groupes minoritaires eux-mêmes, pour ce qui est de la création officielle des conseils locaux.

En vertu de la loi constitutionnelle sur les minorités nationales, des élections partielles ont dû être organisées dans les comtés et les municipalités où les représentants des minorités n'avaient pu être nommés en nombre suffisant par le seul biais des listes de partis. Il a fallu attendre le 15 février 2004 pour la tenue de ces élections partielles, alors qu'elles auraient dû se dérouler avant le 23 mars 2003, en vertu de la loi constitutionnelle sur les minorités nationales. Il convient de noter qu'en vertu de la loi sur les élections municipales de 2001, ces élections auraient déjà dû être organisées en septembre 2002.

En ce qui concerne la représentation des minorités au sein des organismes administratifs et judiciaires publics prévue par la loi constitutionnelle sur les minorités nationales, il apparaît que les minorités sont encore sous-représentées. Le gouvernement, arguant de difficultés pratiques, de contraintes liées au budget de l'État et, en ce qui concerne la justice, de l'indépendance des tribunaux en matière de sélection des juges, n'a élaboré aucun programme visant à remédier à la sous-représentation à long terme. Bien qu'un nombre important de postes dans la fonction publique et la justice aient fait l'objet d'une publicité, rien ne permet d'affirmer que des membres des minorités nationales figurent parmi les nouveaux employés. Par ailleurs, certaines parties de la législation doivent toujours être mises en conformité avec la loi constitutionnelle sur les minorités nationales, telles que la loi sur la fonction publique, la loi sur les tribunaux, la loi sur le conseil national de la magistrature et la loi sur le ministère public. Il convient, par conséquent, de prendre les mesures appropriées pour remédier à cette situation.

En ce qui concerne les médias, les minorités et les questions les concernant ont fait l'objet d'une couverture croissante, mais pas toujours adéquate, au cours de ces dernières années, tant par les médias électroniques que par la presse écrite. Bien que les discours de haine enregistrent un recul constant, les minorités nationales sont toujours perçues et présentées comme des entités distinctes et non comme faisant partie intégrante de la société. Les dispositions de la loi constitutionnelle sur les minorités nationales selon lesquelles les stations de radio et de télévision publiques au niveau national et local sont tenues de produire et/ou de diffuser des programmes destinés aux minorités dans leurs langues respectives restent à mettre en oeuvre.

En ce qui concerne les procédures judiciaires relatives à la discrimination à l'encontre des minorités, aucun verdict n'aurait apparemment été prononcé dans lequel une quelconque discrimination envers les minorités ou une responsabilité pénale liée à la propagation de la haine ethnique aurait été établie.

La minorité serbe connaît une situation distincte. Tout d'abord, bien qu'elle soit toujours la minorité comptant le plus grand nombre de citoyens, sa part a fortement diminué, tombant de 13 % (recensement de 1991) à 4,5 % (recensement de 2001) de la population. Ensuite, les relations entre l'État croate et la minorité serbe sont grevées par le contentieux hérité du récent conflit, à savoir le retour des réfugiés et la restitution de leurs propriétés [voir paragraphe sur les «réfugiés» ci-dessous]. Après l'indépendance de la Croatie, leur statut a changé, passant de celui de nation constitutive de l'ex-Yougoslavie à celui de minorité nationale. En décembre 2003, le nouveau gouvernement a signé un accord avec les représentants des minorités serbes et leur a offert plusieurs postes dans l'administration. Il est à noter, toutefois, que les institutions actuelles de la minorité serbe (partis politiques, écoles, organisations culturelles) peuvent oeuvrer sans le moindre obstacle. Dans la région du Danube, la plupart des dispositions de l'accord d'Erdut et de la lettre d'intention du gouvernement ont été mises en oeuvre, à l'exception notable de la représentation proportionnelle des Serbes dans l'appareil judiciaire. L'État doit poursuivre ses efforts en vue d'intégrer la communauté serbe dans la société croate, et ce à tous les niveaux.

La minorité rom mérite une attention particulière. Les Roms représentent officiellement 0,21 % de la population (9 463 personnes, selon le recensement de 2001). Ils seraient, toutefois, beaucoup plus nombreux en réalité (30 à 40 000 personnes), les Roms se faisant souvent passer pour des membres du groupe majoritaire ou ne se faisant pas enregistrer. La plupart des Roms ne sont pas intégrés dans la société croate et souffrent de discrimination dans tous les domaines de la vie publique, tels que l'accès à l'emploi, la santé et la représentation politique.

En raison de l'extrême exclusion sociale dont sont victimes la plupart des Roms vivant en Croatie, le gouvernement, encouragé par le Conseil de l'Europe et l'OSCE, a adopté, le 16 octobre 2003, un programme national en faveur des Roms. Ce programme prévoit toute une série de mesures visant à assurer l'intégration sociale des Roms, tout en préservant leurs traditions et leur culture. Il aborde les questions du statut, de la représentation politique au niveau local, de l'emploi, des droits des enfants, de l'enseignement, des soins de santé, de la protection sociale, du logement et de la protection de l'environnement. Il reste à voir, néanmoins, si les fonds alloués à cette initiative à partir du budget 2004 de l'État croate permettent de mettre en oeuvre le programme.

Un très grand nombre d'affaires mettant en cause la Croatie et déposées auprès de la Cour européenne des droits de l'homme sont toujours en suspens. Il semble que cette situation soit le reflet (i) de problèmes de procédure au niveau de la justice croate (notamment en ce qui concerne la capacité de la Cour constitutionnelle à apporter une réponse nationale efficace aux questions des droits de l'homme) et (ii) de grandes inquiétudes quant au respect des droits de l'homme par certaines lois, en particulier celles régissant les questions de propriété liées à la guerre.

Réfugiés

La Croatie a ratifié la convention de Genève sur les réfugiés de 1951. De nombreux réfugiés de Bosnie-Herzégovine jouissent du statut de réfugiés en vertu de la loi croate sur le statut des personnes déplacées et des réfugiés. La définition des réfugiés énoncée dans cette loi diffère sensiblement de celle de la convention de Genève. Si la loi sur la circulation et le séjour des étrangers prévoit des procédures pour l'octroi de l'asile, aucune décision formelle accordant l'asile n'a été recensée. Le 1er juillet 2004, la nouvelle loi sur l'asile devrait entrer en vigueur.

Au cours de la période 1991-1997, il y avait au total environ 950 000 réfugiés en Croatie et hors de Croatie et personnes déplacées à l'intérieur du pays.

Consécutivement au récent conflit, quelque 550 000 Croates ont été déplacés à l'intérieur du pays. Le nombre de réfugiés serbes de Croatie [5], résultant principalement des opérations «Éclair» et «Tempête» menées en 1995 et grâce auxquelles la Croatie avait repris le contrôle de tous les secteurs occupés, s'est élevé à 370 000 personnes (330 000 en Serbie-et-Monténégro et 40 000 en Bosnie-Herzégovine). À la fin de 1997, 32 000 Serbes étaient, en outre, recensés en tant que personnes déplacées à l'intérieur du pays dans la région placée sous l'autorité de l'ATNUSO (Administration transitoire des Nations unies en Slavonie orientale). Aux 950 000 réfugiés et personnes déplacées, il convenait également d'ajouter les Croates de Bosnie, qui ont choisi, soit de s'établir en Croatie (environ 130 000 d'entre eux), soit de transiter par la Croatie vers un autre pays.

[5] "Le terme "serbe de Croatie" indique une affiliation éthnique serbe mais de citoyenneté croate"

À la fin de 2003, il y avait environ 209 000 réfugiés serbes de Croatie (189 500 en Serbie-et-Monténégro et 19 500 en Bosnie-Herzégovine). Quelque 1 700 personnes déplacées à l'intérieur du pays étaient d'origine ethnique serbe. Toujours fin 2003, 108 000 réfugiés serbes de Croatie étaient retournés dans ce pays.

En raison principalement de la longueur des déplacements et des obstacles rencontrés au retour, il semble qu'une grande partie des réfugiés serbes actuels aient opté pour l'intégration locale dans le pays dans lequel ils résident. Le recensement effectué au second semestre 2000 par les gouvernements de l'ex-République fédérale de Yougoslavie et de Bosnie-Herzégovine, en coopération avec le HCR, indiquait que le pourcentage maximal de réfugiés restants susceptibles de revenir en Croatie se situait aux alentours de 30 %, soit un peu plus de 83 000 personnes (76 500 en Serbie-et-Monténégro et 6 500 en Bosnie-Herzégovine). Une étude menée pour le compte de la mission de l'OSCE en Croatie au deuxième semestre 2003 a révélé que 15 % au plus des réfugiés actuellement en Serbie-et-Monténégro et en Bosnie-Herzégovine étaient susceptibles de revenir en Croatie, ce qui correspond à environ 30 000 personnes.

Les principaux problèmes auxquels doivent faire face les réfugiés à leur retour concernent le logement, les mines, la réinsertion économique, un éventuel harcèlement basé sur des allégations de «crimes de guerre» et l'atmosphère inhospitalière au sein des communautés d'accueil. Viennent s'ajouter à cela des problèmes administratifs, tels que la non-reconnaissance des droits de pension basés sur les années actives dans les régions placées précédemment sous contrôle serbe. En termes de réinsertion économique, le gouvernement a pris des mesures en faveur du développement économique des régions où s'installent les réfugiés, mais aucune mesure spécifique en faveur des rapatriés. Les ressources budgétaires nécessaires ont été débloquées et le processus de déminage devrait être achevé d'ici 2010.

Pendant et après la guerre, beaucoup de maisons et/ou d'appartements ont été soit détruits soit occupés. Le problème du logement peut ainsi être divisé en trois parties: (i) la reconstruction; (ii) la restitution des propriétés et (iii) la fourniture d'un logement aux anciens détenteurs de droits de location.

Reconstruction: à ce jour, le gouvernement a reconstruit quelque 130 000 maisons et appartements sur les 200 000 détruits. Sept pour cent (7 %) de ce programme a été financé par la Communauté internationale. Il semble qu'aucun retard important n'ait été pris dans la mise en oeuvre du programme de reconstruction des 16 000 maisons restantes et que celui-ci devrait être achevé d'ici la fin de 2005, ce qui faciliterait le retour d'environ 48 000 personnes. Grâce aux modifications apportées en l'an 2000 à la loi sur la reconstruction, les dernières dispositions juridiques discriminatoires ont été supprimées. La date limite pour les demandes de reconstruction avait été fixée à la fin de 2001. En mars 2004, conformément à l'accord signé avec les représentants serbes, le gouvernement a fixé un nouveau délai pour la soumission de nouvelles demandes de reconstruction, qui pourront s'échelonner entre le 1er avril et le 30 septembre 2004, ce qui devrait avoir pour conséquence de prolonger le programme de reconstruction jusqu'en 2006.

Restitution de propriétés: la restitution de propriétés résidentielles attribuées à des occupants temporaires en vertu de la loi sur la prise en charge temporaire et l'administration de certains biens est régie par les modifications apportées en 2002 à la loi sur les zones d'intérêt national particulier. La loi sur la propriété et autres droits patrimoniaux régit la restitution d'autres types de propriétés, telles que les propriétés commerciales et les terres agricoles qui auraient également pu être attribuées à des occupants temporaires en vertu de la loi sur la prise en charge temporaire et l'administration de certains biens. Des fonds ont été débloqués par le gouvernement afin de fournir d'autres possibilités de logement. À la fin de 2003, sur un total d'environ 20 000 demandes de maisons à restituer [6], un peu moins de 16 000 maisons ont effectivement été restituées (dont 4 000 sont restées vides, leurs propriétaires ne s'étant pas manifestés depuis). Le processus de restitution est, toutefois, très lent, ce qui s'explique principalement par les raisons suivantes: (i) la Croatie a elle-même fixé comme préalable à la restitution l'obligation de procurer un autre logement aux occupants (ce qui signifie que les droits des propriétaires ne sont pas pleinement reconnus); (ii) les échelons inférieurs de l'administration publique ne s'empressent pas de reloger les occupants dans les temps [7]; enfin, (iii) les tribunaux rechignent à prendre des arrêtés d'expulsion et les décisions d'expulsion des occupants illégaux ne sont pas appliquées. À l'origine, le gouvernement prévoyait que la restitution des propriétés serait achevée avant la fin de 2002. Cette échéance a ensuite été reportée à la fin de 2003. Mais ce nouveau délai n'a pas été tenu et, à la fin de 2003, quelque 3 500 maisons étaient toujours occupées, alors qu'elles avaient fait l'objet d'environ 2 200 demandes de restitution. L'accord passé entre le gouvernement et les représentants des Serbes prévoit que ce processus s'achèvera d'ici la fin de 2004.

[6] Il s'agit ici de la restitution de logements qui avaient été attribués à des fins d'occupation en vertu de la loi de 1995 sur la prise en charge temporaire et l'administration de certains biens.

[7] La restitution de la propriété au propriétaire n'est envisagée qu'à l'issue de la fourniture d'un autre logement à l'occupant temporaire. Cela signifie que l'intérêt des occupants temporaires prend le pas sur les droits des propriétaires.

Fourniture d'un logement aux anciens détenteurs de droits de location: jusque récemment, les réfugiés qui vivaient auparavant dans des logements sociaux dont ils détenaient des droits d'occupation/de location n'avaient aucun accès au logement s'ils décidaient de retourner en Croatie. Cette absence de solution était discriminatoire vis-à-vis des réfugiés des zones urbaines. En juillet 2002, les modifications apportées à la loi sur les zones d'intérêt national particulier [8] ont apporté, pour la première fois, une possibilité de solution aux anciens détenteurs de droits de location dans ces secteurs. Le 12 juin 2003, le gouvernement a, en outre, arrêté une décision consistant à procurer aussi un logement aux anciens détenteurs de droits de location candidats au retour en dehors des zones d'intérêt national particulier [9]. Cette décision prévoit de mettre des logements sociaux à la disposition des demandeurs. Les demandes devront avoir été déposées avant la fin de 2004 et les logements été fournis avant le 31 décembre 2006. Le programme ne se préoccupe pas de savoir si la résiliation des droits d'occupation/de location était ou non juridiquement justifiée. Nombre d'actions en justice sont aujourd'hui en cours et une affaire au moins a été déclarée recevable par la CEDH («Blecic c. Croatie»).

[8] Voir carte ci-jointe. Les zones d'intérêt national particulier, définies par une loi de 1996 (ultérieurement modifiée), ont été créées afin de gommer les conséquences de la guerre, d'assurer un retour plus rapide des réfugiés et des personnes déplacées à travers le pays, d'encourager le renouveau démographique et la reprise économique et de permettre un développement équilibré de toutes les régions en Croatie.

[9] Les modifications apportées en juillet 2000 et juillet 2002 à la loi sur les zones d'intérêt national particulier portent uniquement sur les retours à l'intérieur de ces zones.

Le plan de mise en oeuvre de la décision du gouvernement ayant été signé avec un retard considérable le 29 octobre dernier, aucun résultat concret n'a encore été obtenu. Aucune décision en faveur des anciens détenteurs de droits de location n'a été prise à ce jour. Le gouvernement pense être en mesure de répondre à toutes les demandes d'ici la fin de 2006. Dans le budget de l'État 2004, approuvé le 4 mars 2004, une enveloppe est consacrée à la construction de 1 500 à 1 600 appartements destinés à répondre aux premières demandes. Il est difficile d'évaluer l'incidence de ces mesures sur les retours.

En conclusion, le gouvernement croate a pris des dispositions visant à offrir des solutions de logement aux personnes déplacées et aux réfugiés candidats au retour. La mise en oeuvre de ces dispositions, à l'exception du programme de reconstruction, doit toutefois être accélérée et améliorée. La question de la restitution de propriétés autres qu'immobilières n'a toujours pas été abordée sur un plan juridique, comme c'est le cas pour la restitution des logements. Des efforts supplémentaires devraient également être consentis afin de donner aux retours un caractère durable. Il s'agit pour cela d'améliorer la situation économique et le climat général dans les zones de retour.

1.3. Autres obligations définies par les conclusions du Conseil de l'Union européenne du 29 avril 1997

Le gouvernement s'est engagé à respecter les obligations découlant des accords de Dayton/Paris. Il respecte la souveraineté et l'intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine. En vertu de l'accord d'Erdut, signé en novembre 1995, la Croatie a accepté un certain nombre d'obligations afin de permettre la réintégration pacifique de la région croate riveraine du Danube (Slavonie orientale, Baranja et Sirmium occidental) sous le contrôle souverain du gouvernement de Croatie à compter de janvier 1998 (correspondant au retrait de l'ATNUSO, l'administration transitoire des Nations unies, du territoire). Cet accord, ainsi que sa lettre d'intention au CSNU de janvier 1997, constituent aujourd'hui encore des obligations juridiquement contraignantes. Certaines dispositions ont été incorporées dans la loi constitutionnelle sur les minorités nationales, qui n'est pas encore entièrement appliquée. La Croatie met notamment tout en oeuvre pour s'acquitter de ses obligations en matière de retour des réfugiés et des personnes déplacées à l'intérieur des frontières.

1.3.1. Coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY)

La coopération de la Croatie avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) s'est considérablement améliorée au cours des derniers mois. En avril 1996, la Croatie a adopté la loi constitutionnelle relative à la coopération avec le TPIY et mis sur pied le «Conseil gouvernemental croate pour la coopération avec la Cour internationale de Justice et les juridictions pénales internationales». Jusqu'à présent, le TPIY a inculpé 5 citoyens croates de la République de Croatie d'infractions pénales commises sur le territoire de la République de Croatie, ainsi que 27 Croates de Bosnie-Herzégovine d'infractions pénales commises sur le territoire de cet État.

Aucun des trois citoyens croates accusés en 2001 et 2002 n'a été transféré au TPIY par le gouvernement, et ce pour diverses raisons. M. Rahim Ademi (accusé le 8 juin 2001) s'est volontairement livré au Tribunal en juillet 2001; le général Janko Bobetko (inculpé le 17 septembre 2002) est décédé en avril 2003. Le gouvernement croate avait au préalable contesté certaines parties de l'acte d'accusation du TPIY qui, selon lui, mettait en doute la justification politique et la légitimité d'une action particulière de l'armée croate; le général Ante Gotovina, enfin, accusé le 8 juin 2001 de prétendus crimes de guerre qui auraient été commis pendant et après l'«opération Tempête» en 1995, sous sa responsabilité propre et sous son commandement, est toujours en fuite. Le 1er mars 2004, la Croatie a reçu des actes d'accusation scellés à l'encontre des anciens généraux d'armée Cermak et Markac, qui se sont volontairement livrés au TPIY le 11 mars 2004.

Sur les 27 inculpés croates de Bosnie-Herzégovine, quatre ont été arrêtés en Croatie puis transférés au TPIY, tandis que dix-huit se sont volontairement livrés au TPIY. Six d'entre eux, qui avaient exercé des responsabilités politiques et militaires au sein d'«Herceg-Bosna», une entité créée par des Croates en Bosnie-Herzégovine lors de la guerre, ont été mis en examen, début avril 2004, par le TPIY, suite à une décision datant du 4 mars 2004. Les six suspects, tous de nationalité croate et résidant en Croatie à titre permanent, se sont volontairement livrés au TPIY le 5 avril, ont été traduits devant le tribunal le 6 avril et ont plaidé non coupable aux 26 chefs d'accusation prononcés à leur encontre. Les autres inculpés croates de Bosnie-Herzégovine ont été arrêtés par la SFOR ou les autorités d'autres pays.

La Croatie a récemment pris des mesures permettant l'accès à sa documentation nationale et autorisé des entrevues avec d'éventuels témoins, à la satisfaction du TPIY. En octobre 2003, la Croatie a adopté la loi sur la protection des témoins, en vue d'assurer une protection permanente aux témoins lors des procédures pénales [10].

[10] La loi prévoit quatre types de protection: protection corporelle et technique, transfert de la personne, mesures visant à dissimuler l'identité et la propriété, changement d'identité.

En août 2003, le Conseil de sécurité des Nations unies avait invité la Croatie à intensifier sa coopération avec le TPIY et notamment à livrer au tribunal le général Ante Gotovina, alors en fuite. La Croatie avait retardé l'exécution du mandat d'arrestation du général Bobetko avant sa mort.

La Croatie accepte la notion de responsabilité de commandement, telle que définie par le statut du TPIY (article 7, paragraphe 3) et la Convention de Rome portant statut de la Cour pénale internationale (article 28). Le code pénal actuel ne réprime pas explicitement la responsabilité de commandement. La loi sur les modifications apportées au code pénal (de juillet 2003), qui introduisait dans la législation nationale le principal type de responsabilité de commandement défini dans la Convention de Rome, a été abrogée par la Cour constitutionnelle en novembre 2003, faute d'avoir été adoptée à la majorité requise des voix. La Cour suprême a, cependant, laissé entendre, dans une décision au moins, que les commandants pouvaient, en vertu du code pénal actuellement applicable, être tenus responsables du fait de n'avoir pas empêché la perpétration de crimes de guerre dont ils avaient eu ou auraient dû avoir connaissance.

En conclusion, la coopération avec le TPIY s'est considérablement améliorée au cours des dernier mois. En avril 2004, la Procureure a déclaré que la Croatie coopère maintenant pleinement avec le TPIY. Néanmoins, la Croatie doit prendre toutes les mesures nécessaires pour s'assurer que le dernier inculpé restant soit localisé et transféré au TPIY.

Les autorités semblent déterminées à améliorer les conditions des poursuites à l'encontre des criminels de guerre devant les tribunaux croates. Au cours de la période 1991-2003, des poursuites pénales ont été engagées à l'encontre de quelque 3 100 personnes, dont plus de 1 300 ont été accusées et 548 condamnées par décision définitive (la majorité d'entre eux par contumace).

Il n'existe aucun bureau spécial pour crimes de guerre. Des départements d'enquête spéciaux chargés des poursuites contre les crimes de guerre ont été mis en place dans les 4 tribunaux de comtés de Split, Zagreb, Rijeka et Osijek par la loi sur la mise en oeuvre de la Convention de Rome portant statut de la Cour pénale internationale (CPI), adoptée le 17 octobre 2003. Ces départements ne sont, toutefois, pas opérationnels et la responsabilité de leur création incombe aux présidents des tribunaux de comtés, qui n'ont pris aucune mesure à ce jour. Certains points demeurent peu clairs: comment les compétences seront-elles définies (d'un point de vue territorial et matériel) et par qui? Comment les juges seront-ils formés? Les quatre départements auront-ils la possibilité de coopérer s'ils doivent échanger des documents ou des preuves?

Les données statistiques donnent à penser que la responsabilité pénale n'est toujours pas établie selon les mêmes critères pour toutes les personnes accusées de crimes de guerre par des tribunaux croates. Les défenseurs d'appartenance ethnique serbe sont désavantagés par rapport aux Croates aux différents stades de la procédure judiciaire et risquaient donc davantage, en 2003, d'être reconnus coupables, même si la différence de traitement a tendance à s'estomper depuis 2002. Si le nombre de Serbes poursuivis en 2003 est en augmentation par rapport à 2002, le nombre de Croates a, pour sa part, considérablement diminué. La Cour suprême a annulé en appel un grand nombre d'accusations portées à l'encontre de Serbes et ordonné la tenue de nouveaux procès suite à des erreurs commises par les juridictions de jugement. Par ailleurs, les parquets et tribunaux locaux ont continué de réaliser des procédures par contumace (27 des 32 Serbes condamnés pour crimes de guerre en 2003 l'ont été par contumace). Ces procédures sont presque exclusivement utilisées à l'encontre des Serbes et un grand nombre d'entre elles prennent la forme d'un acte d'accusation collectif. Cette pratique pose problème, car elle n'est pas compatible avec le principe de culpabilité individuelle. La poursuite de cette pratique crée aussi une charge supplémentaire pour les tribunaux, étant donné que les prévenus condamnés par contumace font régulièrement usage de leur droit à être rejugés. En dépit de quelques améliorations réalisées ces dernières années, le système demande à être réformé davantage, afin de parvenir à un traitement impartial des crimes de guerre par la justice pénale.

D'importants retards sont toujours à déplorer dans les procédures judiciaires, tant au niveau des juridictions de jugement qu'à celui de la Cour suprême. De surcroît, plusieurs affaires ont révélé des lacunes graves dans l'administration de la justice, comme le «procès Lora», à Split, ainsi que plusieurs autres procès devant les tribunaux d'arrondissement de Gospic et Zadar. Un rapatrié serbe a ainsi été reconnu coupable par le tribunal d'arrondissement de Gospic, non seulement de crimes de guerre, mais aussi de 500 ans de crimes perpétrés par les Serbes contre la Croatie («affaire Karan», ultérieurement annulée par la Cour suprême). Le Procureur général a, par ailleurs, pris l'initiative d'une série d'enquêtes concernant des Croates suspectés d'avoir perpétré des crimes de guerre contre des civils serbes l'an passé, mais le résultat de ces enquêtes reste mitigé. Le procès Gospic à Rijeka («affaire Norac») est la parfaite illustration d'un procès pénal correctement organisé.

La Croatie est disposée, en principe, à coopérer étroitement avec le TPIY en ce qui concerne les procès pour crimes de guerre devant des juridictions nationales, en acceptant comme juridiquement pertinents tous les éléments de preuve et documents d'accompagnement en provenance du TPIY. Les éléments de preuve obtenus par le TPIY seront recevables sans examen dans les procès devant des juridictions nationales.

La Croatie a soutenu les positions communes de l'Union européenne sur la Cour pénale internationale (CPI) et décidé, en conséquence, de ne pas signer avec les États-Unis d'accord bilatéral de non-extradition des ressortissants américains devant la Cour pénale internationale.

1.3.2. Coopération régionale

La Croatie participe activement à plusieurs initiatives régionales et sous-régionales, telles que le Pacte de Stabilité, l'Initiative Adriatique et Ionienne, la «Quadrilatérale» (regroupant l'Italie, la Slovénie, la Hongrie et la Croatie), l'Initiative centre-européenne (ICE), l'Initiative pour l'Europe du Sud-Est (IESE), l'Initiative Alpes-Adriatique et la Commission du Danube. La Croatie jouit du statut d'observateur dans le Processus de coopération dans l'Europe du Sud-Est. La participation de la Croatie à de telles initiatives peut sembler relever d'une démarche volontariste, malgré sa réticence affichée à être considérée comme un pays de la région des Balkans occidentaux.

En décembre 2002, la Croatie a signé avec la Slovénie, la Bosnie-Herzégovine et la Serbie-et-Monténégro un accord-cadre relatif au bassin de la Save. La Croatie a signé le protocole d'accord sur le marché régional de l'électricité dans l'Europe du Sud-Est en février 2003 et son addendum en décembre 2003 (voir également le chapitre 14 - Énergie)

Entamées en 1992, les premières négociations sur la distribution des actifs de la République fédérative socialiste de Yougoslavie ont débouché sur la signature, le 29 juin 2001, de l'accord de succession par les cinq nouveaux États (Slovénie, Croatie, Bosnie-Herzégovine, Serbie-et-Monténégro et ancienne République yougoslave de Macédoine). Cet accord a été ratifié par tous les États successeurs. La Croatie a été la dernière à le ratifier, par l'intermédiaire de son Parlement, en mars 2004. L'accord a pour objet d'inventorier les droits et obligations, l'actif et le passif de l'ex-République fédérative socialiste de Yougoslavie et d'en fixer la répartition équitable entre les États successeurs. Il se borne à énoncer les procédures et principes fondamentaux pour l'interprétation et la mise en oeuvre de l'accord.

En 1996, la Croatie a établi des relations diplomatiques avec la Serbie-et-Monténégro, mais les relations entre les deux pays restent difficiles. Après l'an 2000, le changement des gouvernements en place dans les deux pays a favorisé le développement de la coopération économique. Bien que très limité encore, le commerce bilatéral se développe. Lors de leur première rencontre officielle à New-York, en novembre 2001, les deux ministres des Affaires étrangères sont convenus de priorités visant à normaliser davantage leurs relations. Depuis lors, les relations entre les deux pays se sont améliorées considérablement et des contacts de travail réguliers ont été établis. La visite du président croate Mesic à Belgrade, en septembre 2003, et plus particulièrement les excuses formulées par les deux présidents pour la douleur et la souffrance que les deux peuples se sont mutuellement infligées par le passé, sont autant d'autres jalons importants vers la normalisation des relations.

Toutefois, d'importantes questions demandent encore à être résolues: le tracé de la frontière le long du Danube et de la péninsule de Prevlaka, la succession, le problème des personnes disparues, la demande d'indemnisation des dommages de guerre formulée par la Croatie, le retour des réfugiés et la restitution de leurs biens, notamment aux entités commerciales, ainsi que la ratification d'un accord de libre-échange par la Serbie-et-Monténégro. À l'issue de longues négociations, un accord de libre-échange a été signé le 23 décembre 2002 à Zagreb. Le parlement croate a ratifié l'accord le 7 mai 2003, mais la Serbie-et-Monténégro doit encore le faire.

Une commission inter-États sur les frontières chargée de la délimitation des frontières terrestres et maritimes a été constituée en décembre 2001 pour définir le tracé de la frontière le long du Danube (347 kilomètres). En raison de la complexité politique et technique des négociations (clarification des droits de propriété, indemnisation éventuelle des propriétaires, etc.), la commission inter-États sur les frontières n'a guère progressé jusqu'ici [11]. Elle travaille actuellement à l'élaboration d'un mini-régime frontalier, afin d'accorder aux propriétaires l'accès à leurs propriétés sur le territoire contesté en attendant qu'une solution permanente soit trouvée.

[11] Lors de la dernière réunion, le 25 juillet 2003, les deux parties en présence sont convenues de fixer deux «points zéro», l'un à Bajakovo et l'autre à Racinovci, près de Brcko, à la jonction entre la Croatie, la Bosnie-Herzégovine et la Serbie. Actuellement, les autorités compétentes de Serbie-et-Monténégro examinent les réclamations croates basées sur le cadastre foncier.

En décembre 2002, les ministres des Affaires étrangères ont signé un protocole relatif à un régime intérimaire pour Prevlaka. À l'expiration du mandat de la mission d'observation des Nations unies (MONUP), le 15 décembre [12], la Croatie a repris intégralement possession de Prevlaka. Ce régime intérimaire prévoit la création d'une zone maritime démilitarisée dans la baie de Kotor, entre les caps Konfin et Ostro. Cette zone est contrôlée par des patrouilles navales mixtes de Croatie et Serbie-et-Monténégro. Le protocole prévoit la possibilité de créer des points de passages frontaliers supplémentaires, ainsi que l'établissement d'un mini-régime frontalier pour la population locale. Dans l'attente d'une délimitation frontalière définitive, une frontière maritime temporaire a été adoptée. Elle ne passe pas par le milieu de la baie de Kotor, mais laisse l'essentiel de celle-ci à la Serbie-et-Monténégro. Cette solution asymétrique avait été retenue lors de négociations antérieures, en 1998, et soumise alors au Conseil de sécurité des Nations unies. La mise en oeuvre de ce régime semble donner satisfaction. Le mini-régime frontalier est désormais d'application et aucun incident n'a été signalé à ce jour dans la zone démilitarisée. La délimitation définitive de la frontière maritime n'a, toutefois, encore fait l'objet d'aucune négociation.

[12] En 1992, le président croate Tudjman et le président yougoslave Cosic avaient conclu un accord consistant à retirer l'armée nationale yougoslave de la péninsule de Prevlaka et de la baie de Kotor et une mission d'observation des Nations unies (MONUP) avait été constituée le 1er février 1996 pour démilitariser ce secteur. Le 11 octobre 2002, le Conseil de sécurité des Nations unies avait décidé de prolonger une dernière fois le mandat de la MONUP jusqu'au 15 décembre 2002, considérant que Prevlaka ne relevait plus d'une solution militaire.

La question des minorités est l'un des sujets politiques les plus sensibles dans l'optique de la normalisation des relations. Les deux pays ont adopté des lois constitutionnelles sur les minorités. Ces lois réglementent les droits de toutes les minorités dans leurs pays respectifs et abordent certains points préoccupants les concernant. Néanmoins, un accord bilatéral sur les minorités reste à signer.

En mai 2003, la Serbie-et-Monténégro a supprimé l'obligation de visas pour les citoyens de l'Union européenne et des pays voisins, y compris la Croatie. En juin 2003, la Croatie a temporairement supprimé le régime de visa pour les citoyens de Serbie-et-Monténégro pour la période du 10 juin au 31 décembre 2003. Cette mesure a ensuite été prorogée jusqu'au 31 janvier puis jusqu'au 30 juin 2004. Le gouvernement croate a émis trois conditions politiques à l'abolition permanente du régime de visa: (i) le retour des registres des naissances, des mariages et des décès de citoyens croates confisqués en 1995 par Belgrade [13]; (ii) le remplacement des forces armées de Serbie-et-Monténégro présentes à la frontière le long du Danube par des forces de police et (iii) une coopération totale dans la recherche des disparus [14].

[13] Le 14 août 2003, le gouvernement serbe a décidé de renvoyer 420 registres.

[14] La coopération s'est considérablement améliorée au cours des deux dernières années. Néanmoins, la Croatie recherche toujours 1 275 personnes disparues, alors que la Serbie-et-Monténégro en recherche officiellement 520.

En juillet 1999, la Croatie a intenté un procès pour génocide à l'ex-République fédérale de Yougoslavie devant la Cour internationale de Justice et exigé, notamment, une indemnité non spécifique au titre des dommages de guerre [15].

[15] La Croatie a demandé que la Cour juge et déclare la RFY coupable d'avoir manqué à ses obligations légales à l'égard de la Croatie en vertu de la convention des Nations unies de 1948 sur la prévention et la répression du crime de génocide et qu'elle lui enjoigne, en conséquence, i) d'autoriser l'instruction des personnes soupçonnées d'avoir commis le crime de génocide, ii) de fournir des informations sur les personnes disparues, iii) de restituer le patrimoine culturel substitué et iv) de verser une compensation au titre des dommages causés par la violation du droit international susmentionnée.

Au début de la guerre, la Croatie avait promulgué plusieurs décrets réglementant la question des propriétés possédées par l'ancienne République fédérative socialiste de Yougoslavie et ses républiques. D'une manière générale, cette législation a empêché l'ancien État fédéral et ses républiques, l'armée yougoslave, ainsi que les personnes morales établies à l'extérieur de la Croatie de faire usage de leurs biens immobiliers sur le territoire de la Croatie. En conséquence, ces propriétés ont été intégrées dans le processus de privatisation en vertu de la loi sur la transformation des entreprises collectives et de la loi sur la privatisation. De nombreuses personnes morales croates qui possédaient des succursales dans d'autres républiques de l'ex-Yougoslavie ont perdu la jouissance pleine et entière de leurs biens, particulièrement en Serbie-et-Monténégro. L'accord de succession de la République fédérative socialiste de Yougoslavie n'ayant pas encore été ratifié, ces personnes morales sont contraintes d'intenter des actions en justice individuelles par l'intermédiaire du système judiciaire/administratif ou d'entamer des négociations directes avec les détenteurs actuels de leurs biens. À ce jour, seules quelques-unes d'entre elles ont obtenu gain de cause.

Les relations avec la Bosnie-Herzégovine se sont améliorées depuis l'accession au pouvoir d'un nouveau gouvernement croate, en janvier 2000. Depuis lors, les pays entretiennent de bonnes relations diplomatiques. Dans un souci de renforcer les institutions centrales de l'État de Bosnie-Herzégovine, la Croatie a renoncé à son ancienne politique d'établissement de «relations parallèles spéciales» avec la Fédération croato-musulmane de Bosnie-Herzégovine. Elle lui a substitué une coopération politique exclusive avec les autorités centrales de Sarajevo. Un accord sur le retour, destiné à faciliter et accélérer le retour des réfugiés, a été signé en décembre 2001. Deux autres accords importants ont été signés en juin 2002, sur la lutte contre le terrorisme et le crime organisé, d'une part, et sur les points de passage des frontières entre les deux pays, d'autre part.

Les échanges avec la Bosnie-Herzégovine ont été complètement libéralisés, conformément à l'accord de coopération économique signé le 24 mars 1995, le protocole sur les règles d'origine a été signé le 26 février 1996 et un accord de libre-échange est entré en vigueur le 1er janvier 2001.

Malgré cette évolution favorable, seuls des progrès mineurs ont été enregistrés au niveau des relations bilatérales, dus pour la plupart à des facteurs internes à la Bosnie-Herzégovine. Des questions sont encore en suspens: l'accord sur le port de Ploce, la double nationalité et la restitution de propriétés.

L'accord sur le port de Ploce n'a toujours pas été appliqué. Signé en 1998, il garantit à la Bosnie-Herzégovine un libre accès au port de Ploce via le territoire croate, mais aussi à la Croatie un libre accès à Neum, située à environ 60 km au nord de Dubrovnik, via le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Le principal problème de cet accord réside dans son article 9, qui stipule qu'un comité de sept membres doit administrer le port de Ploce: la Croatie et la Bosnie-Herzégovine désigneraient chacune trois représentants et la Cour internationale de droit maritime, un; ce dernier aurait le pouvoir de trancher, en cas de désaccord entre les deux pays. Selon la Croatie, il s'agit là d'une forme de «protectorat international» exercé à l'égard de son territoire national [16]. Ayant déjà ratifié l'accord, la Bosnie-Herzégovine l'a adopté en substance, mais souhaite qu'il soit ratifié par le parlement croate tel qu'il est, quitte à lui apporter des modifications ultérieurement. La Croatie refuse, toutefois, de le ratifier tant que des modifications n'auront pas été apportées à l'article 9. Après de longues et laborieuses négociations, le gouvernement croate et le Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine ont adopté un protocole spécial en juillet 2003, qui définit la future procédure. La signature du protocole, prévue pour août 2003, n'a cependant pas encore eu lieu. La présidence de la Bosnie-Herzégovine, responsable de la politique extérieure, a inopinément refusé d'adopter le protocole, le membre bosniaque de la présidence ayant formulé de nouvelles demandes.

[16] L'accord a été conclu en 1998, à une époque où les circonstances politiques étaient différentes. Il a été signé en même temps que l'accord sur les relations spéciales avec la Fédération croato-musulmane de Bosnie-Herzégovine. Étant donné que le nouveau gouvernement croate a décidé, en l'an 2000, de renoncer à tout projet de confédération avec cette entité (option de l'accord de Dayton), la Croatie s'est retrouvée dans une situation dans laquelle elle n'aurait pas l'entière souveraineté sur son propre territoire.

Le gouvernement croate et le Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine ont négocié un accord bilatéral sur la double nationalité. Les dispositions fondamentales précisent que les citoyens possédant la double nationalité devront effectuer leur service militaire dans un seul pays et payer des impôts et voter uniquement dans leur pays de résidence. Cette mesure devrait avoir d'importantes répercussions politiques, étant donné que les Croates de Bosnie résidant en Bosnie-Herzégovine n'auraient plus la possibilité de voter en Croatie. En dépit des progrès accomplis, l'accord n'est pas encore prêt à être signé. Ni la Croatie ni la Bosnie-Herzégovine n'a encore signé d'accord bilatéral régissant la restitution des propriétés de personnes physiques et morales situées sur le territoire de l'un ou l'autre des deux pays.

Les relations avec l'ancienne République yougoslave de Macédoine sont généralement bonnes et il n'y a aucune question en suspens. Les pays ont signé 24 accords bilatéraux. Les négociations en vue d'une convention bilatérale sur la coopération régionale en vertu de l'article 12 de l'ASA ont commencé dès la signature de l'accord par la Croatie, mais aucun progrès n'a été réalisé au cours de l'année dernière. Il existe un accord de libre-échange entre les deux pays depuis 1997. Un accord de réadmission est en vigueur depuis 2001.

Les relations avec la Slovénie sont bonnes depuis que les deux pays ont acquis leur indépendance, la Croatie et la Slovénie s'étant considérées comme des partenaires stratégiques lors de la sécession de l'ex-Yougoslavie. En 1997, un accord de libre-échange a été signé entre la Slovénie et la Croatie. Il a pris effet le 1er octobre 2001, mais était déjà appliqué à titre provisoire depuis janvier 1998. En mai 2002, la Slovénie et la Croatie ont signé un protocole additionnel à l'accord de libre-échange relatif au commerce de produits agricoles. Cet accord de libre-échange cessera de s'appliquer au 1er mai prochain, date à laquelle la Slovénie adhèrera à l'Union européenne.

Néanmoins, ces bonnes relations ont pâti des tensions consécutives aux divergences existant sur un certain nombre de questions, dont la délimitation des frontières, la centrale nucléaire de Krsko, détenue conjointement par la Slovénie et la Croatie, la Ljubljanska Banka et, tout récemment, la déclaration de la Croatie relative à une zone de pêche et de protection écologique dans l'Adriatique.

Le différend frontalier concernant la baie de Piran a mis à rude épreuve les relations croato-slovènes au cours de l'été 2002 et aucun accord sur la délimitation de la frontière maritime, une question en suspens depuis l'accession des deux pays à l'indépendance, n'a encore été conclu. L'accord frontalier négocié entre les Premiers ministres croate et slovène en juillet 2001, cédant à la Slovénie 80 % de la baie, ainsi qu'un couloir d'accès à la haute mer, a été paraphé, mais non signé, car la Croatie le considérait comme une simple composante d'un accord global (qui portait notamment sur les questions de la centrale nucléaire de Krsko et de la Ljubljanska Banka) jamais conclu. Les négociations sur un accord frontalier sont actuellement dans l'impasse. Le 10 septembre 2002, les Premiers ministres croate et slovène sont parvenus à un accord sur un régime intérimaire concernant la pêche dans la baie de Piran. Cet accord intérimaire est entré en vigueur le 23 septembre 2002 et a été régulièrement prorogé depuis lors [17]. Il ne préjuge, cependant, en rien des futures frontières entre les deux pays. Il a, jusqu'ici, été mis en oeuvre sans difficultés particulières.

[17] S'il venait à être adopté définitivement, il ferait alors juridiquement partie de l'accord sur le petit trafic frontalier et de coopération de 1997 et devrait, en conséquence, être ratifié par le Parlement.

Conséquence de cette question frontalière restée en suspens, la décision unilatérale de la Croatie d'octobre 2003 d'étendre son influence en Adriatique par la création d'une zone de pêche et de protection écologique a suscité des tensions considérables dans ses rapports avec les pays voisins. En octobre 2003, le Conseil a «invité la Croatie à poursuivre d'urgence un dialogue constructif avec ses voisins, afin de répondre aux préoccupations exprimées par toutes les parties impliquées» par cette question. Au cours des premiers mois de 2004, des réunions trilatérales ont été organisées (entre l'Italie, la Croatie et la Slovénie), dans le but de trouver une solution commune avant l'entrée en vigueur de la «zone» (2 octobre 2004), mais aucun accord politique n'a été obtenu jusqu'à présent.

Après dix années d'âpres négociations, un accord sur la centrale nucléaire de Krsko a enfin été signé en décembre 2001 et est entré en vigueur le 1er juillet 2002. Il prévoit que la centrale sera détenue, gérée et utilisée par les deux pays sur un pied d'égalité. Il régit, en outre, toutes les questions financières en suspens entre la compagnie d'électricité croate (HEP) et la compagnie d'électricité slovène (ELES) concernant la période comprise entre 1998 et le 30 juin 2002. HEP prétend que la mise en oeuvre de l'accord ne pose aucun problème. Toutefois, la question du traitement des déchets nucléaires n'a toujours pas été réglementée. Par ailleurs, la Croatie a demandé à la partie slovène de verser à HEP une compensation de 56 millions d'USD pour l'électricité non fournie après le 1er juillet 2002, date à laquelle l'accord aurait dû entrer en vigueur, et les deux pays ne se sont toujours pas mis d'accord à ce jour sur le montant de la compensation à verser à HEP.

Du temps de l'ancienne République socialiste fédérative de Yougoslavie, des agences de la Ljubljanska Banka en Croatie avaient collecté des dépôts en devises d'un montant total d'environ 422 millions d'euros [18]. À la suite de la dissolution de la Yougoslavie, les agences de cette banque ont conservé ces dépôts en devises appartenant à des citoyens croates. En guise d'indemnisation, le gouvernement a offert, en 1991, aux déposants croates de transférer leurs dépôts de la Ljubljanska Banka vers des banques commerciales croates [19]. Des dépôts d'une valeur approximative de 279 millions d'euros ont ainsi été transférés vers des banques commerciales croates au titre de la dette publique. Les quelque 150 millions d'euros de dépôts restants n'ont pas été transférés [20] et font l'objet, aujourd'hui encore, de réclamations individuelles auprès de la Ljubljanska Banka. D'autres républiques de l'ancienne République socialiste fédérative de Yougoslavie ont des problèmes similaires avec cette banque. Aucun accord n'a été conclu à ce jour, qui apporterait une solution à ce problème touchant la région.

[18] Stock au 31 décembre 1991.

[19] Les dépôts en devises des citoyens croates auprès de la Ljubljanska Banka ont été transformés en dette publique de la République de Croatie. Le gouvernement a émis des obligations en faveur des banques commerciales, remboursables en 20 versements semestriels, à un taux d'intérêt de 5 %. En plus de ces versements, les citoyens avaient la possibilité de demander aux banques d'échanger leurs obligations contre des appartements appartenant à l'État ou encore des valeurs mobilières d'entreprises publiques.

[20] Un certain nombre de déposants espéraient alors obtenir de meilleures conditions (que celles offertes par le gouvernement croate) par une négociation directe avec la Ljubljanska Banka, soit les conditions offertes aux citoyens slovènes.

La Croatie et l'Albanie entretiennent de bonnes relations politiques et le dialogue politique à haut niveau se poursuit. L'accord de libre-échange entre ces deux pays est entré en vigueur au printemps 2003, même si certaines difficultés de mise en oeuvre ont été constatées à des postes de douane en l'absence d'une connaissance approfondie des dispositions de l'accord. Au total, 23 accords bilatéraux ont été signés, qui concernent, notamment, la santé, la coopération douanière et la réadmission. La politique de visas entre les deux pays a été assouplie (au niveau des contacts commerciaux) et l'Albanie a mis un terme à l'obligation de visa pour les citoyens croates en juin 2003. Un accord de libre-échange est entré en vigueur en juin 2003.

Les relations bilatérales avec l'Italie sont très suivies et revêtent une importance particulière pour la Croatie puisque l'Italie est son principal partenaire commercial et un investisseur important. Toutefois, bien qu'intrinsèquement bonnes, les relations avec l'Italie sont mises à mal par quelques problèmes sérieux. En premier lieu figure la question des «Esuli». Entre 1943 et 1947, environ 90 % de la population italienne de Yougoslavie aurait quitté le pays, laissant derrière elle ses biens, ultérieurement nationalisés par l'État yougoslave. La question de l'indemnisation des propriétés des Esuli a été en partie réglée par l'accord d'Osimo de 1975, ainsi que par l'accord de Rome de 1981, conclus entre la République fédérative socialiste de Yougoslavie et l'Italie [21]. La restitution des propriétés nationalisées des Esuli a été rendue possible par la nouvelle loi sur la dénationalisation adoptée par le parlement croate en juillet 2002, qui accorde également le droit à la restitution et à la compensation aux citoyens étrangers, dès lors que ce droit figure dans les accords bilatéraux. La Croatie et l'Italie ont convenu d'entamer des négociations bilatérales en octobre 2002.

[21] Ces accords réglementent les demandes mutuelles de compensation au titre des dommages de guerre commis par l'ex-Yougoslavie et l'Italie. En vertu de l'accord d'Osimo, la Yougoslavie n'était pas tenue de dédommager directement les citoyens italiens mais l'État italien, qui devait ensuite indemniser ses citoyens, les Esuli en l'occurrence.

La déclaration unilatérale adoptée par le parlement croate en octobre 2003, par laquelle le pays se dotait d'une «zone exclusive de protection écologique et de pêche» en Adriatique, était une initiative incompatible avec le principe européen de coopération régionale et a, en cela, occasionné une certaine tension dans les relations bilatérales. La coopération insuffisante dont a fait preuve la Croatie pour empêcher des incidents en Adriatique fait aussi partie du contentieux entre les deux pays. Une autre question revêtant une importance particulière pour les relations bilatérales est celle de la protection des droits de la minorité italienne en Croatie. Si quelques progrès ont été enregistrés, un suivi permanent reste de rigueur.

1.4. Évaluation générale

La Croatie dispose d'institutions démocratiques stables qui fonctionnent correctement, respectent les limites de leurs compétences et coopèrent entre elles. Les élections de 2000 et 2003 ont été libres et équitables. L'opposition joue un rôle normal dans le fonctionnement des institutions.

Il n'y a pas de problème majeur en ce qui concerne la garantie d'un État de droit et le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La Croatie doit toutefois prendre des mesures pour que les droits des minorités, notamment de la minorité serbe, soient entièrement respectés. Elle devrait accélérer la mise en oeuvre de la loi constitutionnelle sur les minorités nationales et intensifier ses efforts pour faciliter le retour des réfugiés serbes de Serbie et de Bosnie-Herzégovine. Des améliorations significatives doivent être apportées au fonctionnement du système judiciaire. L'efficacité de la lutte contre la corruption doit être renforcée.

La coopération de la Croatie avec le Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie s'est considérablement améliorée au cours des derniers mois. En avril 2004, le Procureur de l'État a déclaré que la Croatie coopérait désormais entièrement avec le PTIY. La Croatie doit maintenir son entière coopération et prendre toutes les mesures nécessaires pour que le dernier inculpé soit localisé et transféré au TPIY de La Haye. La Croatie a toujours des engagements en matière de coopération régionale; des efforts soutenus sont nécessaires dans ce domaine. Cela vaut particulièrement pour la résolution des questions frontalières avec les pays voisins, dans le respect des normes internationales en matière de règlement des litiges, et des problèmes découlant de la déclaration unilatérale de «zone écologique et de pêche» protégée dans la mer Adriatique.

2. Critères economiques

En 1993, le Conseil européen de Copenhague a défini les critères économiques suivants pour l'adhésion à l'Union européenne:

" l'existence d'une économie de marché viable;

" la capacité de faire face à la pression concurrentielle et aux forces du marché à l'intérieur de l'Union.

Ces critères sont liés. D'abord parce qu'une économie de marché viable sera mieux à même de faire face à la pression concurrentielle. Ensuite, parce que dans le contexte de l'adhésion à l'Union, le marché viable est le marché intérieur. Sans intégration dans le marché intérieur, l'adhésion à l'Union européenne perdrait son sens économique, tant pour la Croatie que pour ses partenaires.

Tout pays candidat doit s'engager à respecter en permanence les obligations économiques inhérentes à l'adhésion. Cet engagement irréversible est nécessaire pour assurer que chaque partie du marché élargi de l'Union européenne continue à fonctionner selon des règles communes. La capacité d'intégrer l'acquis suppose un processus à plusieurs dimensions. D'une part, la Croatie doit être en mesure d'assumer les obligations économiques de l'adhésion, de telle sorte que le marché unique fonctionne harmonieusement et équitablement. D'autre part, la capacité de la Croatie à faire face aux pressions concurrentielles du marché intérieur postule que l'environnement économique sous-jacent soit favorable et que l'économie croate dispose d'une flexibilité suffisante et d'un capital humain et physique suffisant, notamment en ce qui concerne les infrastructures. Faute de quoi, la pression concurrentielle risque d'être considérée comme trop forte par certaines catégories sociales et des mesures de protection pourraient être réclamées, qui, si elles étaient appliquées, saperaient les fondements du marché unique.

Si la Croatie peut parvenir à un large consensus sur la nature des changements de politique économique qu'impose l'adhésion à l'Union, de même qu'à une mise en oeuvre soutenue des réformes économiques, il lui sera plus facile de respecter ses engagements en ce qui concerne les obligations économiques inhérentes à l'adhésion.

2.1. Évolution économique

Avec 4,4 millions d'habitants et un produit intérieur brut (PIB) de 176,4 milliards HRK ou 23,8 milliards d'euros en 2002 (prix courants), la Croatie est un petit pays. Sa population correspond à 1,2 % environ de celle de l'Union européenne, tandis que son économie ne représente que 0,26 % en termes de PIB. Le PIB par habitant est de l'ordre de 40 000 HRK ou 5 400 euros (mesuré selon le taux de change moyen pour 2002). Le PIB par habitant exprimé en parité de pouvoir d'achat (PPA) en 1999 était de 8 267 USD, soit 35,9 % de la moyenne de l'Union [22]. Aucune donnée régionale fiable concernant le PIB n'est actuellement disponible. Les premiers calculs font état d'une forte amplitude entre les 21 comtés existants, la ville de Zagreb se situant largement au-dessus de la moyenne, tant en termes absolus que par habitant.

[22] Le bureau croate des statistiques calcule le PIB en termes de PPA tous les trois ans, en coopération avec l'OCDE (pour la dernière fois en 1999). Les données du PIB par habitant exprimé en PPA ne sont disponibles de façon continue ni auprès des autorités croates ni auprès du FMI. L'institut viennois d'études économiques internationales (Wiener Institut für Internationale Wirtschaftsvergleiche - WIIW) estime le PIB par habitant exprimé en PPA à 9 210 euros en 2002.

Contexte macroéconomique

En tant que république constitutive de la République fédérative socialiste de Yougoslavie (RFSY), la Croatie avait adopté un système socialiste fondé sur l'autogestion et la propriété collective. Ce système permettait la libre fixation des prix pour la plupart des biens de consommation et autorisait un certain degré de concurrence. En conséquence, le secteur privé était relativement développé et la part des services dans le PIB élevée, par comparaison avec d'autres pays d'Europe centrale et orientale. La croissance rapide observée entre 1950 et 1980 reposait sur des taux d'investissement élevés, de 30 % ou plus, soutenus par un fort endettement extérieur. Dès avant l'indépendance, une part importante des exportations croates était écoulée sur les marchés occidentaux, les exportations à destination des pays du Conseil d'assistance économique mutuelle (CAEM) recevant tout de même environ 25 % du total des exportations croates (en 1990). Malgré des déficits commerciaux persistants, la balance des paiements d'avant l'indépendance enregistrait des excédents courants équivalant à 7-8 % du PIB, en raison d'un excédent permanent de la balance des services provenant principalement du secteur touristique. Pendant les années 1980, la crise de l'endettement international et la réduction des entrées de capitaux ont fait chuter l'investissement et freiné la croissance. Entre 1987 et 1990, le PIB a baissé d'environ 11 %. Les pertes qui en ont découlé pour le secteur privé ont été amorties par le système bancaire, avant que les autorités ne les financent par la création monétaire, ce qui a eu pour effet d'accélérer l'inflation, qui s'est finalement muée en hyperinflation.

À peine la Croatie venait-elle de déclarer son indépendance, en 1991, qu'elle dût fait face à un conflit dont elle n'allait sortir qu'en 1995. La guerre a infligé des dommages directs, en particulier aux infrastructures et aux habitations. Elle a également causé des dommages économiques indirects en interrompant les flux commerciaux avec les anciens membres de la RFSY, ainsi que les principaux axes de communication entre les différentes régions du pays. Le tourisme, principale industrie exportatrice de la Croatie, en a fortement souffert (ses recettes tombant à 10 % des niveaux d'avant-guerre).

Parallèlement, la Croatie a dû faire face aux problèmes consécutifs au changement de système économique et à la perte de certains débouchés naturels en Europe orientale. Les répercussions de la guerre, de l'indépendance et de la transition économique ont conduit à de profonds déséquilibres: récession, déséquilibres extérieurs et fiscaux, forte inflation et hausse du chômage, tout juste tempérée par la réduction de main-d'oeuvre inhérente au conflit. Des efforts de stabilisation, consentis dès la fin de 1993, ont permis de stabiliser les prix et de parvenir à une croissance annuelle moyenne du PIB de plus de 6 % sur la période 1994-1997. La transition vers une économie de marché a été engagée au lendemain de l'indépendance et au milieu des années 1990, la Banque mondiale et le FMI considéraient la Croatie comme l'un des pays en transition tirant le mieux son épingle du jeu.

Néanmoins, la situation économique a recommencé à se détériorer au cours de l'année 1997. Dans l'intention de couper court à une surchauffe prévisible de l'économie, de restreindre l'expansion du crédit et de stabiliser le taux de change, la politique monétaire a été resserrée entre la fin de 1997 et 1999. La réorientation des liquidités vers l'achat de devises à des fins spéculatives et l'insuffisance des restructurations, nuisible à la compétitivité des entreprises, ont mené à une accumulation rapide d'arriérés de paiement dans l'économie, tant entre les entreprises elles-mêmes qu'entre l'État et les entreprises. La conjonction d'une politique monétaire restrictive, d'une baisse de la demande intérieure et d'une détérioration des portefeuilles de prêts des banques a débouché sur une crise bancaire en 1998-99. L'aggravation des problèmes structurels, l'augmentation des impôts et des prix réglementés, ainsi que les répercussions de la crise au Kosovo ont contribué à la récession qui s'est étalée entre le dernier trimestre de 1998 et le troisième trimestre de 1999, avant que ne surviennent les premiers signes de reprise. Si le PIB réel a reculé de 0,9 % en 1999, il a connu au cours des années suivantes une croissance accélérée (4 % en moyenne entre 2000 et 2002).

Le processus de transition entre une économie planifiée et une économie de marché a eu de fortes implications pour le marché du travail croate. Les caractéristiques dominantes de la première phase du processus de transition dans ce secteur ont été une modification accélérée de la structure sectorielle de l'emploi, une diminution des niveaux d'emploi et une hausse du chômage. Le taux de chômage (défini selon les normes de l'OIT) est ainsi passé de 10 % en 1996 à 17 % au premier semestre 2001, avant de retomber à 14,4 % au second semestre 2002. Les taux de chômage varient sensiblement d'un comté à l'autre, dans une fourchette de 13 à 40 %, les régions frontalières affichant des taux particulièrement élevés. Le chômage de longue durée représentait environ 53 % du chômage total en 2002. Le taux de chômage chez les jeunes (de 15 à 24 ans) était particulièrement élevé, se situant à 34,4 %. L'importance absolue et relative des différents secteurs et industries s'est graduellement rapprochée de celle des pays développés à économie de marché. Néanmoins, la création totale d'emplois dans les secteurs productifs de l'économie n'a pas atteint des niveaux assez hauts pour absorber les ressources humaines libérées par les entreprises non compétitives qui ont été contraintes de s'adapter aux nouvelles conditions du marché. La situation des comptes extérieurs était fragile et se caractérisait, dans les premiers temps, par une grande volatilité. Bien que les recettes touristiques et, par conséquent, la balance des services se soient rétablies après la guerre, puis de nouveau après la crise du Kosovo, en 1999, le compte courant est resté négatif depuis 1995.

L'investissement direct étranger (IDE) en Croatie est resté faible jusqu'en 1995, en raison des répercussions de la guerre et de la préférence accordée aux rachats des entreprises par leurs salariés et leurs cadres dans le processus de privatisation. L'IDE s'est ensuite sensiblement redressé, notamment à partir de 1998. Selon les autorités nationales, les apports d'investissement direct étranger cumulés sur la période 1993-2002 se seraient élevés à 7,45 milliards d'euros, soit 1 656 euros par habitant. Environ 75 % des investissements provenaient de l'Union européenne et 15 % des États-Unis. Près des deux tiers des investissements étaient liés à des projets de privatisation, principalement dans le secteur bancaire, les télécommunications et le secteur pharmaceutique.

Au lendemain de l'indépendance, le déficit des administrations publiques s'est creusé, passant à 5,1 % du PIB en 1991. La situation budgétaire s'est par la suite stabilisée, les lourds déficits faisant place à des déficits sensiblement plus faibles et même à des excédents jusqu'en 1999, année au cours de laquelle elle s'est rapidement détériorée en raison de la crise économique. Néanmoins, la présentation budgétaire avait manifestement sous-estimé l'incidence véritable des politiques budgétaires, ayant été élaborée uniquement sur la base d'une comptabilité de caisse ne tenant compte ni de la création de fonds extrabudgétaires ni du recours important du gouvernement aux reports de paiements et à des modes de paiement autres que monétaires. Des estimations récentes de la situation des administrations publiques en termes de créances et de dettes, qui intègrent ces fonds extrabudgétaires, ainsi que la situation des agences et des gouvernements locaux, révèlent une forte progression du déficit, qui avait atteint le taux record de 8,2 % du PIB en 1999, pour diminuer progressivement ensuite.

La banque centrale croate (Hrvatska narodna banka - HNB) a été créée en décembre 1990. La loi sur la banque centrale croate prévoit l'indépendance opérationnelle de l'institution à l'égard du gouvernement. La HNB est responsable de la fixation et de la gestion du taux de change et de la politique monétaire. En l'absence d'un véritable marché monétaire et d'instruments monétaires sensibles aux taux d'intérêts, la politique monétaire a principalement consisté à stabiliser la kuna par rapport à la monnaie d'ancrage (successivement le deutschemark et l'euro). Elle s'intéresse en fait davantage au taux de change euro-kuna qu'à la masse monétaire. Bien que les opérations d'open market existent en théorie, la HNB contrôle généralement la masse monétaire par le recours à des instruments indirects, tels que les réserves obligatoires et les crédits de refinancement. Depuis 1995, la HNB est parvenue à stabiliser l'inflation sous la barre des 10 %.

Le dinar croate, introduit le 23 décembre 1991 en tant que monnaie provisoire de l'État croate indépendant, est devenu la seule monnaie ayant cours légal en Croatie au 1er janvier 1992. En mai 1994, la kuna croate (HRK) s'est substituée au dinar croate. Héritage de l'hyperinflation passée, l'économie croate reste caractérisée aujourd'hui par un grand degré de substitution de sa monnaie ou d'euroisation de facto. La politique actuelle de la Croatie en matière de taux de change est dite de «flottement contrôlé», le taux de change de la kuna croate ne suivant aucune orientation annoncée à l'avance. En mai 1995, lorsque la Croatie a accepté les obligations découlant de l'article VIII des statuts du FMI, la kuna est devenue entièrement convertible aux fins de la balance courante.

Le commerce des marchandises avec l'Union européenne a toujours été relativement important et n'a cessé de progresser jusqu'en 1995, année où la part de l'Union dans les échanges croates atteignait 60 %, tant pour les exportations que pour les importations. Pendant le conflit du Kosovo, la part de l'Union européenne dans les exportations croates est tombée en dessous de la barre des 50 %, avant de remonter à 55 % environ en l'an 2000, un niveau maintenu depuis lors. Ce chiffre atteint presque 70 % si l'on considère également le commerce avec les pays adhérant à l'Union européenne en 2004. Les partenaires commerciaux les plus importants sont l'Italie, l'Allemagne et l'Autriche. Après un brusque recul en 1995, la part du commerce avec les autres pays de l'ancienne République socialiste fédérative de Yougoslavie a de nouveau augmenté, la Slovénie et la Bosnie-Herzégovine étant les partenaires les plus importants. L'importance des pays de l'Accord de libre-échange centre-européen dans le commerce de la Croatie est restée modérée. Les échanges avec la Russie et le reste de l'ex-Union soviétique ont chuté au lendemain de l'indépendance et ne se sont pas redressés depuis. Seules les importations en provenance de Russie (principalement de pétrole) ont augmenté. Ces données ne tiennent, toutefois, pas compte du tourisme, qui constitue de loin le secteur économique générant le plus de recettes à l'exportation (voir également la partie 3, chapitre 15 - Politique industrielle).

De même que dans d'autres pays en transition, les exportations de la Croatie sont caractérisées par une grande proportion d'industries à forte intensité de main d'oeuvre et de capital et par une faible proportion d'industries axées sur la technologie. Le poste le plus important à l'exportation est celui des machines et du matériel de transport, grâce essentiellement à la construction navale, qui a connu une bonne progression au fil des ans et représentait près de 30 % des exportations totales en 2001. Ce même secteur joue également un rôle important au niveau des importations, vu la forte proportion de pièces importées dans la construction navale. Parmi les autres secteurs importants figurent les produits manufacturés, et notamment les produits textiles et les substances chimiques, bien que leur part régresse actuellement. L'agriculture joue un rôle mineur dans la structure des exportations.

Changements structurels

La Croatie a engagé le processus de transition sous des auspices favorables. Deuxième république de l'ex-Yougoslavie en termes de prospérité, la Croatie possédait de bonnes infrastructures, une industrie du tourisme développée et des liens bien établis avec l'Occident. Elle était déjà industrialisée avant de devenir socialiste et n'a jamais adhéré au modèle communiste d'économie planifiée. L'entrée sur le marché n'était pas régie exclusivement par l'État et les prix du marché prévalaient dans de nombreux domaines. L'existence d'entreprises privées dans l'ex-République fédérative socialiste de Yougoslavie a été rendue possible dès 1988.

Depuis son indépendance, la Croatie a été confrontée à la désindustrialisation, bien que dans une mesure moindre que d'autres pays d'Europe orientale. Ce processus s'est ralenti après 1996. L'industrie manufacturière, qui représente environ 71 % de l'industrie (construction comprise), a décliné en termes de part du PIB (21,6 % en 2001) et d'emploi (21,3 % en 2001). Partant d'un niveau élevé, le secteur des services, notamment le tourisme, a encore progressé, passant d'environ 50 % du PIB au moment de l'indépendance à environ 60 % aujourd'hui. La part de l'agriculture dans le PIB a décliné lentement dans la deuxième moitié des années 1990, mais reste toujours supérieure à 9 %, ce qui traduit bien la restructuration lente de ce secteur et l'absorption de la main-d'oeuvre licenciée dans l'industrie manufacturière par la création d'emplois salariés et indépendants.

Le système des finances publiques a longtemps été un sujet de préoccupation, faisant l'objet d'interventions croissantes de la part du gouvernement et souffrant d'un manque de transparence et de fiabilité, ainsi que de retards dans la mise à disposition des données budgétaires. Un certain nombre de facteurs ont contribué à cette évolution défavorable: l'intégration insuffisante des pouvoirs locaux, la création de fonds extrabudgétaires et le manque de transparence en découlant (au niveau de l'octroi et de l'enregistrement des subventions d'État et des garanties gouvernementales), le mauvais contrôle des dépenses, une planification à moyen terme sous-développée, des règles et des procédures de gestion budgétaire insuffisantes, ainsi qu'un faible niveau de responsabilité. Bien que des améliorations soient encore possibles, un certain nombre d'actions ont été engagées au cours de ces dernières années: introduction d'un compte unique du Trésor, introduction progressive des principes de la comptabilité d'exercice, adoption d'un nouveau système de comptes, intégration des fonds extrabudgétaires dans le budget, développement des exigences en matière de reddition des comptes et de suivi et adoption, à la mi-2003, d'une nouvelle loi organique de finances.

Avant l'an 2000, la propriété collective et l'autogestion des entreprises ne permettaient pas de faire une distinction très nette entre les propriétaires, les gestionnaires et les travailleurs; dans la plupart des entreprises, les dirigeants étaient nommés par les salariés, tandis que dans les grandes entreprises, ils étaient nommés par les autorités. D'où l'escalade des salaires, des sureffectifs et un sous-investissement. Les entreprises déficitaires survivaient non pas tant en raison des subventions de l'État qu'elles recevaient, mais parce qu'elles accumulaient des arriérés vis-à-vis d'autres entreprises et avaient un accès facile aux prêts bancaires, ce qui à son tour ruinait la santé du secteur bancaire.

La privatisation en Croatie a reposé sur deux lois essentielles: la loi de 1991 sur la transformation, qui concernait au total quelque 3 000 sociétés collectives (à l'exception de 10 grandes entreprises d'infrastructures et de services publics considérées comme des entreprises publiques) et la loi de 1993 sur la privatisation, modifiée en 1996. Depuis 1996, les entreprises publiques sont privatisées sur la base de lois particulières. Les premières politiques de privatisation ont souvent pris la forme de reprises des entreprises par les salariés (cadres et employés), ce qui n'a pas facilité la modernisation du gouvernement d'entreprise. Une fois les droits de priorité accordés aux salariés des entreprises épuisés, la deuxième phase de la privatisation (à compter de 1993) a consisté en des ventes aux enchères et en des appels d'offres, qui ont connu un franc succès en permettant l'acquisition de parts en échange de dépôts en devises étrangères gelés [23]. Les privatisations par bons de souscription ont véritablement commencé en 1998, mais n'ont conduit qu'à des résultats peu durables jusqu'à la crise économique. La privatisation des entreprises publiques et d'autres actifs «stratégiques» (les banques, par exemple) non couverts par les lois sur la transformation et la privatisation n'a débuté qu'à la fin de la décennie, sous une pression budgétaire croissante.

[23] Les dépôts en devises gelés proviennent du droit que possédaient les anciens citoyens yougoslaves de détenir des comptes en devises étrangères dans les banques nationales, ces dernières devant redéposer ces devises étrangères auprès de la banque centrale de Yougoslavie. Après la dissolution de la République fédérative socialiste de Yougoslavie, la banque centrale de Yougoslavie a conservé ces fonds et le gouvernement croate a décidé de reconnaître ces actifs en tant que dette publique. En 1991, il a émis des obligations en faveur des banques croates en compensation de ce qu'elles réclamaient à la banque centrale et gelé les dépôts, tout en permettant leur utilisation par les citoyens dans le cadre des projets de privatisation.

La fixation des prix réglementée n'était pas un trait caractéristique du système économique de la République fédérative socialiste de Yougoslavie. Tous les contrôles directs exercés sur les prix ont été supprimés après l'indépendance, à quelques exceptions près (le bois, les transports et les services postaux). Les prix de l'énergie et des télécommunications sont réglementés par les organes compétents. Il existe aussi des prix réglementés pour les services publics au niveau local. Cette situation prévalait toujours en 2003.

Jusqu'à la fin des années 1990, le système bancaire croate a été dominé par des banques d'État opérant dans un cadre insuffisamment réglementé, caractérisé par une faible surveillance et une vulnérabilité face à l'ingérence politique. La dégradation de la situation économique à partir de 1997 a également entraîné de graves problèmes de solvabilité dans le secteur bancaire, débouchant sur une crise bancaire en 1998-1999. Depuis lors, le secteur bancaire a été restructuré et assaini. Les exigences en matière de contrôles et de capitaux ont été renforcées. L'essentiel du secteur a été privatisé et est désormais contrôlé par des groupes bancaires étrangers. Néanmoins, le processus de réhabilitation et de stabilisation du secteur a été réalisé au prix fort: depuis 1991, 5,6 milliards d'euros ont ainsi été dépensés par l'État dans des mesures visant à remettre sur pied le système bancaire, soit 33 % du PIB moyen.

L'existence d'une importante économie souterraine en Croatie, alimentée par le conflit armé jusqu'en 1995, est avérée. Toutefois, un certain nombre de facteurs, dont l'introduction de la TVA en 1998, des améliorations dans l'enregistrement statistique et la venue d'entreprises étrangères, notamment dans le secteur du commerce de détail, ont contribué à son recul au cours de ces dernières années. Une étude réalisée en 2001 par l'Institut croate des finances publiques, basée sur une méthode de recherche de la non-conformité dans l'établissement des comptes nationaux, a estimé la part de l'économie informelle à environ 25 % du PIB en moyenne pour la période 1990-1995 et à environ 10 % pour la période 1996-2000.

2.2. Evaluation au regard des critères de Copenhague

L'existence d'une économie de marché viable

Le bon fonctionnement d'une économie de marché suppose la libéralisation des prix et des échanges, ainsi que la mise en place d'un cadre juridique qui soit effectivement appliqué, y compris en ce qui concerne les droits de la propriété. La stabilité macroéconomique et le consensus sur la politique économique améliorent les performances de l'économie de marché. L'efficacité de l'économie est encore renforcée lorsque le secteur financier est bien développé et qu'aucun obstacle significatif n'entrave l'entrée ou la sortie des marchés.

Il y a un consensus politique croissant concernant les objectifs fondamentaux de la politique économique. Jusqu'en 2000, la Croatie a adopté une approche plutôt progressive des réformes structurelles et essayé de parvenir à un consensus entre les partenaires sociaux. Cela a contribué à préserver la stabilité sociale, mais a, par ailleurs, retardé les réformes nécessaires. Lors de sa mise en place début 2000, le gouvernement croate a adopté une stratégie à moyen terme et peaufiné par la suite les priorités de son développement. Au cours des dernières années, les politiques ont mis l'accent non plus sur la stabilisation macroéconomique générale mais sur l'assainissement budgétaire et l'ajustement structurel afin de stimuler la compétitivité et de créer de l'emploi par une mise en oeuvre dynamique des réformes structurelles. Les politiques économiques et financières ont été soutenues notamment par deux accords de confirmation à caractère conservatoire avec le FMI et un prêt à l'ajustement structurel de la Banque mondiale. Des discussions sont actuellement en cours avec le FMI concernant un nouveau programme, à la suite de l'expiration du deuxième accord de confirmation. Le Conseil économique et social a été institué en organe consultatif composé de représentants du gouvernement, des employeurs et des syndicats, qui ne sont cependant pas toujours parvenus à trouver un accord sur les questions abordées. Dans une résolution concernant l'adhésion de la Croatie à l'Union européenne soutenue par tous les groupes parlementaires représentés, le Parlement croate déclarait en décembre 2002 que l'adhésion de la Croatie à l'Union européenne est un objectif stratégique national, qui selon des sondages d'opinion est partagé par la grande majorité de la population. Dans cette perspctive, les objectifs de la politique économique ont été fixés dans le premier «programme national pour l'intégration de la République de Croatie dans l'Union européenne» adopté par le gouvernement croate en décembre 2002. Il semble également y avoir une meilleure prise de conscience des problèmes et une volonté d'améliorer la coordination entre les différents ministères pour atteindre ces objectifs. Des organismes de coordination existent ou ont été récemment créés pour assurer la cohérence dans le domaine économique au sein du gouvernement, entre le ministère des finances et la Banque nationale croate ainsi qu'entre les principaux fournisseurs d'information statistique. Malgré l'existence d'un cadre formel de la coordination, il semble nécessaire d'en améliorer davantage la réalisation effective.

La croissance du PIB a retrouvé des taux relativement élevés après la récession de 1999. Depuis 1996, la Croatie a atteint un taux de croissance moyen de 3,7 % malgré la récession de 1999 pendant laquelle l'économie s'est contractée de 0,9 %. Pendant toute cette période, la demande intérieure, en particulier la consommation privée, qui est en partie liée au crédit, a été le principal moteur de cette croissance, la consommation publique jouant un rôle mineur après 2000. La contribution de l'investissement à la croissance (principalement par des investissements en construction de routes et de logements à l'initiative du gouvernement) a réaugmenté après 2000, lorsque l'investissement public a repris, et progresse actuellement à un rythme plus rapide que la consommation privée. Après trois ans de réduction des stocks, on a enregistré une augmentation des stocks en 2002. Bien que la balance courante ait été négative depuis 1996, la contribution de la demande extérieure nette à la croissance a été positive pendant la période 1998-2000. Étant donné la part assez élevée des investissements (24,8 % du PIB en 2002), la diminution du déficit public et la croissance endogène, l'économie croate devrait faire preuve d'une assez bonne résistance aux chocs extérieurs. L'augmentation continue de la dette extérieure, les déficits plutôt importants de la balance courante ainsi que la dépendance de la balance courante à l'égard du tourisme et la marge de manoeuvre limitée dans le domaine de la politique fiscale contribuent cependant à rendre l'économie vulnérable.

Depuis 1996, la balance commerciale et la balance courante affichent des déficits plutôt élevés. Le déficit commercial a diminué en période de ralentissement conjoncturel mais s'est à nouveau creusé avec le redressement économique après 1999. En moyenne, le déficit commercial a atteint 20,2 % du PIB au cours de la période de 1996 à 2002, et 23,55 % en 2002, ce qui reflète la forte demande intérieure, basée sur la consommation privée et les programmes de construction financés par le gouvernement, et, plus récemment, le ralentissement économique accusé par le principal partenaire commercial, l'Union européenne. L'expansion des importations a distancé celle des exportations tout au long de la période à l'exception des années 1998/1999. Le tourisme, qui a récupéré notamment après la crise du Kosovo, est le principal produit d'exportation et joue ainsi un rôle important en tant que source de recettes extérieure pour la Croatie, bien qu'il crée également une demande d'importations. Comparé à la balance commerciale, le déficit de la balance des biens et des services est donc nettement plus faible (8,7 % du PIB en 2001 et presque 12 % en 2002). La balance courante tournait autour d'une moyenne de 6,3 % du PIB au cours de la période de 1996 à 2002, et de 7,1 % en 2002, mais présente une courbe irrégulière au fil des années. Les données disponibles suggèrent que les tendances du passé - déficit commercial croissant et progression soutenue des revenus du tourisme - se maintiennent en 2003 bien que le déficit des opérations courantes devrait être inférieur à la moyenne de la période 1996-2002. De fréquentes révisions dans le passé soulignent néanmoins la nécessité d'améliorer la fiabilité des données relatives à la balance des paiements.

Les déficits de la balance des opérations courantes ont été essentiellement financés par le recours à l'emprunt étranger et aux investissements directs étrangers. Après la signature en 1996 d'accords de rééchelonnement de la dette avec les clubs de Paris et de Londres, la Croatie a pu accéder aux marchés internationaux et a emprunté à des conditions de plus en plus favorables (principalement sous forme d'obligations libellées en euros) grâce à l'amélioration de sa réputation de solvabilité. Par conséquent, la dette extérieure a augmenté et est passée de 26,7 % du PIB en 1996 à 68,5 % du PIB en 2002, de plus en plus consolidée par l'emprunt privé à l'étranger (la dette publique extérieure représente approximativement 32 % du PIB dont approximativement un tiers provient de la dette extérieure contractée par l'ancienne République socialiste de Yougoslavie - la RFSY). Dans le cadre du programme du FMI, des mesures administratives ont été prises par la Banque centrale croate (HNB) pour contenir la forte croissance de la dette extérieure, qui est néanmoins estimée devoir atteindre près de 72 % du PIB pour la fin de 2003. Les investissements directs étrangers (IDE) ont augmenté depuis 1995, plus particulièrement depuis 1998, entraînés dans une large mesure par la privatisation. Les entrées nettes d'IDE ont atteint 15 milliards d'euros en 2000 et 57 milliards d'euros en 2001, mais sont retombées à 384 millions d'euros en 2002. En moyenne, les IDE ont représenté 5 % du PIB dans la période de 1996 à 2002; pour la période 1999-2001, leurs entrées ont largement suffi à couvrir le déficit des opérations courantes.

Le chômage reste élevé, mais les premiers signes d'une amélioration progressive de la situation se font jour. Le chômage en hausse est un phénomène constant en Croatie depuis le début des années '80 et jusqu'en 2001 l'emploi n'a pas augmenté malgré la croissance économique. Il y a plusieurs raisons à la persistence de ce taux de chômage élevé: l'arrivée sur le marché de l'emploi de travailleurs victimes de liquidations et de faillites d'entreprises n'est pas entièrement compensée par de nouvelles offres d'emplois, l'augmentation des salaires est en moyenne légèrement supérieure à celle de la productivité, la charge des cotisations sociales est plutôt élevée et le marché de l'emploi se caractérise par une grande rigidité (reflétée dans les frais de procédure et les coûts monétaires élevés liés aux licenciements individuels, les restrictions à l'emploi temporaire, les coûts élevés des licenciements collectifs). Néanmoins, les tendances au déclin de l'activité et des taux d'emploi ainsi qu'à la croissance du chômage semblent s'être inversées en 2002. La forte croissance économique, des changements de système et la consolidation des données ont abouti à une baisse constante du taux de chômage officiel de 2002 à septembre 2003, moment où le chômage a commencé à augmenter légèrement. En novembre 2003, le taux officiel s'est maintenu à 18,9 %, soit un taux inférieur de 2,7 points de pourcentage à celui de novembre 2002. Les données officielles risquent de surestimer le chômage puisqu'elles ne prennent pas en considération l'emploi dans l'économie informelle. Selon la méthodologie de l'OIT, le taux de chômage a diminué pour passer à 14,1 % au cours de la première moitié de 2003 (taux moyen en 2002: 14,8 %). Le taux d'emploi de la population en âge de travailler a constamment baissé, passant de quelque 50 % en 1996 à 41,8 % en 2001 avant de se redresser légèrement et de revenir à 43,3 % en 2002. En 2001 le gouvernement a par ailleurs commencé à mettre en oeuvre plusieurs programmes pour favoriser l'emploi conformément au Plan national d'action pour l'emploi, le document d'orientation pour une politique dynamique de l'emploi. Enfin, des modifications du droit du travail, notamment des règles plus restrictives pour les indemnités de fin de contrat, ont été adoptées au milieu de l'année 2003 afin d'accroître la flexibilité du marché de l'emploi.

La Croatie a réussi à maintenir de faibles taux d'inflation. Le taux de change de la kuna par rapport à l'euro est le principal ancrage nominal de la stabilité des prix et le principal objectif indirect de la politique monétaire. Cela est dû au fort degré de substitution de la monnaie, à la forte intégration commerciale avec l'UE et à la présence marquée et croissante de l'euro dans la structure monétaire du commerce extérieur. Cette politique a permis d'obtenir des taux d'inflation à un seul chiffre depuis 1995. Entre 1996 et 2002, l'inflation moyenne des prix de détail, actuellement le principal indicateur en l'absence d'un indice des prix à la consommation (IPC), a été de 4,3 % (en moyenne annuelle), et de 2,2 % en 2002 [24]. Les taux d'inflation au cours des onze premiers mois de 2003 sont restés inférieurs en moyenne de 1,5 % à ceux de la période correspondante de 2002. L'efficacité des instruments orthodoxes de la politique monétaire a néanmoins été limitée. L'excès structurel de liquidité dans le passé ajouté à la faiblesse des systèmes de paiement et des pratiques de gestion des liquidités des banques ont entravé le développement des marchés monétaires et des instruments monétaires sensibles aux taux d'intérêts. Dans ce contexte, la HNB a décidé au début de 2003 d'un ensemble de mesures administratives afin de limiter la croissance du crédit intérieur financé par des emprunts à l'étranger, qui menaçait d'affaiblir la position extérieure et de compromettre la stabilité du secteur bancaire. Ces mesures ont expiré à la fin de 2003. Bien que les mesures administratives aient ralenti la croissance du crédit, la dette extérieure a encore augmenté au cours de l'année 2003 en raison des emprunts directs à l'étranger et des opérations de leasing. En réponse à un autre resserrement monétaire opéré par la HNB, les taux d'intérêt du marché monétaire ont augmenté pendant le quatrième trimestre de 2003, tendance qui, si elle se poursuit, pourrait avoir des implications pour le service de la dette publique.

[24] L'inflation de base, qui exclut les prix des produits agricoles et les prix réglementés de l'indice des prix à la consommation, est en moyenne de 3,4 % pendant la même période. L'inflation des prix à la production était même plus faible, de l'ordre de 2,6 %.

Le taux de change de la kuna par rapport à l'euro n'a guère varié. Depuis 1994, la HNB met en oeuvre une politique de taux de change dite de «flottement contrôlé», c'est-à-dire que la HNB vise à atténuer les fluctuations de taux de change de la kuna par rapport à l'euro, qui suivent généralement un cycle saisonnier d'appréciation pendant la saison touristique estivale suivie d'une dépréciation. Cette politique a abouti à un taux de change nominal plutôt stable, qui a de facto varié de plus ou moins 6 % par rapport au taux de change moyen depuis 1994. Ces dernières années, le taux de change de la kuna vis-à-vis du dollar US a suivi les fluctuations de l'euro par rapport au dollar US, ce qui a eu une incidence sur les indicateurs extérieurs exprimés dans cette monnaie. Néanmoins, des indicateurs efficaces du taux de change nominal et réel ont montré une tendance à la dépréciation en ce qui concerne la période de 1996 à 2000 suivie de tendances à l'appréciation.

Les déficits budgétaires ont été ramenés à des niveaux moins élevés mais les progrès se sont bloqués en 2003. Selon les données du FMI, le déficit général du secteur public s'est sensiblement creusé passant à 8,2 % du PIB en 1999, financé partiellement par une augmentation des arriérés des organismes gouvernementaux auprès des entreprises publiques et privées de 0,8 % du PIB (soit au total 5,9 % du PIB). Il est ensuite redescendu à 6,5 % en 2000 pour passer à 6,8 % en 2001, les règlements des arriérés contribuant négativement au financement. En conformité avec la politique d'ajustement dans le cadre de l'accord de confirmation contrôlé par le FMI, le déficit a encore été réduit passant à 4,8 % du PIB en 2002. Le déficit a initialement été estimé pouvoir se réduire à 4,6 % en 2003, sur la base d'une réduction de la forte masse salariale publique par un gel des salaires et par une compression de l'emploi public, des allocations de chômage et des allocations familiales. Il y a toutefois eu un dépassement considérable des dépenses prévues au cours du dernier trimestre de 2003, en raison notamment d'augmentations salariales de dernière minute dans le secteur public, ce qui explique que le déficit ait dépassé les 5 % en 2003. La transparence et la structure des dépenses publiques ont sensiblement changé avec le temps et leur part dans le PIB est graduellement abaissée (50,0 % en 2002). Les fonds extrabudgétaires, notamment pour les pensions et le secteur de la santé, ont été graduellement intégrés dans le budget. Dans le cadre d'un mouvement général de décentralisation, les produits de la fonction publique et des recettes ont été transférés au niveau du gouvernement local (entre 2000 et 2002, la part des recettes des budgets municipaux, urbains et des comtés ont augmenté, passant de 5,7 % à 7,1 % du PIB). Il y a cependant eu des problèmes pour mettre en place les capacités administratives appropriées. La Croatie a pu accéder aux marchés internationaux pour financer son processus de reconstruction après la guerre. Combiné à des recettes substantielles de la privatisation et à l'évolution favorable des recettes, ce financement a atténué les contraintes budgétaires et a entraîné un déficit budgétaire de l'administration centrale plutôt élevé, causé en partie par l'importance de la facture pour les salaires du secteur public et par le gonflement de l'endettement public. En 1999, la crise économique et financière a sensiblement aggravé l'état des finances publiques. Dans la période de 1996 à 2002, les recettes totales en tant que part du PIB ont connu un pic à 48,4 % en 1999 pour passer sous les 45,2 % du PIB en 2002, y compris la réduction de la pression fiscale en 2000 et 2002. Les dépenses totales ont culminé à 56,6 % du PIB en 1999 pour tomber à environ 49,5 % en 2003. Par conséquent, la dette publique a rapidement augmenté, passant de 31,6 % du PIB en 1997 à 51,6 % du PIB en 2001. Ce ratio a été maintenu depuis lors. Le déficit primaire s'est détérioré pour atteindre le taux record de 6,5 % du PIB en 1999 après quoi la tendance au creusement s'est inversée et le déficit primaire a été ramené à 2,7 % en 2002. Afin d'assurer la viabilité à long terme des finances publiques, le système de sécurité sociale est en cours d'adaptation. Une réforme en vue de moderniser le régime de retraite introduisant un système à trois piliers est en voie mise en oeuvre depuis 2002. Les critères d'éligibilité pour les allocations de chômage sont également devenus plus stricts. La réforme du secteur de la santé n'en est toutefois encore qu'à ses débuts et l'expérience de l'introduction de régimes d'assurance complémentaires a été mitigée. La nouvelle loi de finances adoptée en 2003 améliorera la gestion du budget et nécessitera la mise en place à moyen terme d'un cadre budgétaire. Parallèlement à l'introduction du compte unique du Trésor et du nouveau système de comptes, cela devrait contribuer à améliorer la qualité, le champ d'application et la régularité des statistiques fiscales, qui laissaient à désirer jusqu'à présent.

Le dosage des politiques s'est amélioré depuis 2000 quand la politique budgétaire s'est orientée vers la stabilité macroéconomique. À la fin des années 90, la politique monétaire devait assumer la charge importante d'assurer la stabilité macroéconomique à mesure que la politique budgétaire devenait plus expansionniste. Après 2000, la politique budgétaire a graduellement contribué à un environnement macroéconomique stable par une compression des dépenses, y compris la réduction de la masse salariale publique et la restructuration des dépenses vers les investissements, même si ce processus s'est enlisé en 2003. D'une manière générale, la politique budgétaire a permis d'améliorer la politique monétaire sans compromettre la stabilité des prix au cours de cette période. Même s'il est en voie de diminution, le secteur public représentait bien plus de la moitié de l'écart entre épargne nationale et investissement en 2002. Néanmoins, puisque le gouvernement continue à compter, dans une large mesure, sur le financement extérieur, la conversion des fonds à usage national doit être étroitement coordonnée afin de ne pas compromettre la politique monétaire.

La libéralisation des prix a bien progressé mais les prix imposés continuent à jouer un rôle. En 2003, la part des prix imposés dans l'indice des prix à la consommation représentait 23 % mais a augmenté de 4,8 points de pourcentage au cours des trois dernières années. Cela reflète le poids accru de ces prix (principalement des services publics, du téléphone, de l'énergie et de l'électricité), qui sont annuellement ajustés mais non une multiplication du nombre de prix réglementés. Les prix des biens et des services sont libéralisés à l'exception de certaines activités économiques pour lesquelles les prix sont contrôlés administrativement au niveau national ou local, notamment pour certains produits agricoles et pour les transports publics, ainsi que les services publics et les services postaux de base. Le système de contrôle des prix dans les domaines de l'énergie et des télécommunications est actuellement remplacé par des organismes de régulation conformément à la libéralisation en cours de ces secteurs; la plupart de ces organismes ne sont cependant pas encore opérationnels (voir partie 3, Chapitres 14 - Énergie et 19 - Télécommunications).

Malgré son retrait progressif, l'État reste prédominant dans plusieurs secteurs de l'économie. Dans la période 1993-1999, la part du secteur privé dans le PIB a doublé, passant de 30 à 60 % mais a stagné à ce niveau comparativement faible. En 2001, 71,3 % des actifs corporels totaux étaient détenus par l'État, ce qui représente même une augmentation de 6,1 points de pourcentage par rapport à 1999. Outre les secteurs publics habituels comme l'enseignement, la santé, les services postaux et collectifs, d'autres secteurs économiques à participation élevée de l'État dans les actifs corporels sont l'agriculture, les services publics, les transports et les biens immobiliers; même dans l'industrie manufacturière (la construction navale en particulier) la part publique représente un tiers des actifs corporels totaux. Suite au programme de construction d'autoroute, l'actionnariat public dans la construction s'est maintenu à 90 %. D'autre part, les actifs corporels de l'intermédiation financière (99,9 %), reflétant la privatisation presque terminée du secteur bancaire, et du commerce (93,1 %) étaient presque entièrement aux mains du secteur privé dès 2001. La privatisation est bien avancée dans les télécommunications, bien que l'ouverture du marché ait progressé lentement. Le monopole de la téléphonie fixe s'est formellement terminé fin 2003. Il y a deux opérateurs de réseaux de téléphonie mobile, mais une troisième licence devrait être envisagée pour renforcer la concurrence. Le secteur privé a toutefois manifesté davantage de dynamisme que les entreprises publiques en termes d'augmentation des recettes ainsi que de rentabilité dans la période 1996-2001. La hausse des recettes des entreprises privées a été supérieure à la croissance du PIB nominal et leur part des recettes totales des entreprises a augmenté, passant de 58,4 % à 67,8 %.

La privatisation a progressé mais se heurte fréquemment à des problèmes juridiques et politiques. Depuis son arrivée au pouvoir en 2000, le nouveau gouvernement a consolidé les participations publiques via le Fonds de privatisation croate (HFP) mais il subsiste des actifs auprès de l'Agence pour le redressement des établissements bancaires et des caisses de retraite et de maladie. Pendant la période de janvier 2000 à décembre 2002, le portefeuille de l'État a été réduit de 1 860 à 1 056 sociétés, principalement par la vente de participations minoritaires, mais n'a plus guère évolué jusqu'en août 2003. Le nombre de sociétés en portefeuille fluctue constamment en raison de l'annulation des accords antérieurs d'achats d'actions. Au milieu de l'année 2003, il y avait encore en portefeuille 170 entreprises, dans lesquelles l'État détient toujours une participation majoritaire, tandis qu'il détient moins de 25 % des parts dans 822 entreprises. Il reste encore une participation élevée de l'État dans des entités touristiques dont une partie ont été mises en vente par appel d'offres mais n'ont pas rencontré beaucoup d'intérêt en raison des besoins d'investissements massifs et du degré d'endettement. À la mi-2003, le gouvernement a adopté une proposition visant à remodeler les compétences du HFP pour achever la privatisation, mais cette proposition est toujours sur la table du Parlement et a effectivement découragé la préparation de nouveaux projets de privatisation. Étant donné le rôle important des ministères de tutelle pour le lancement et l'approbation des projets de privatisation, on peut se demander si le nouveau système accélérera les procédures. La privatisation des conglomérats agricoles a débuté fin 2002 et a connu des problèmes significatifs dus à l'état généralement déplorable du registre foncier et du cadastre, qui empêchent l'établissement de marchés foncier et du logement efficients. Depuis 2001 (les données les plus récentes disponibles), quelque 87 % des actifs corporels en terres agricoles et en logements étaient encore détenus par l'État. Plus généralement, les grandes entreprises, souvent anciennement publiques ou collectives, jouent toujours un rôle important dans l'économie de la Croatie. Bon nombre d'entreprises continuent à avoir des droits exclusifs ou spéciaux à certains égards bien que des mesures soient prises pour libéraliser des secteurs tels que les télécommunications, l'électricité et le pétrole. Les entreprises publiques sont privatisées conformément à des lois spéciales. Une participation majoritaire de 51 % dans la compagnie des télécommunications a été vendue à un investisseur étranger mais le gouvernement a reporté l'offre envisagée d'autres participations. Une première mesure de privatisation du secteur de la fourniture d'énergie a été prise en vendant 25 % des parts de la compagnie pétrolière INA pendant l'été 2003. La privatisation du réseau de distribution de la compagnie d'électricité a été retardée. Deux offres pour privatiser la plus grande compagnie d'assurance ont été annulées et le gouvernement a décidé d'y conserver une participation majoritaire.

Même si les autorités ont lancé plusieurs initiatives, des obstacles continuent d'entraver l'entrée ou la sortie des marchés. Dans la période de 1999 à 2001, le nombre global d'entreprises dans les secteurs de l'industrie manufacturière et des services a décliné de presque 3 %, reflétant une certaine consolidation ainsi que l'impact du ralentissement économique en 1998/1999. Tant le nombre d'entreprises nouvellement créées que l'augmentation nette du nombre total d'entreprises se sont rétablis après 2000. Les entreprises sont cependant encore confrontées à des coûts relativement élevés, une charge administrative considérable, des difficultés d'accès au financement, notamment pour les échéances à long terme, et des marchés intérieurs dominés par quelques groupes d'entreprises caractérisés par une concurrence peu intense. Un autre facteur était la rigidité de la législation du travail, qui a cependant été en partie corrigée par les modifications adoptées en 2003. Malgré certains délais pour des étapes particulières, globalement les procédures pour la création d'une entreprise sont longues et varient d'une région à l'autre: selon le rapport 2002-2003 sur la compétitivité internationale du Forum économique mondial, il faut en moyenne 51 jours pour lancer une entreprise en Croatie, ce qui est considérablement plus long que dans beaucoup d'économies développées. Il n'existe pas encore de guichet unique. Les autorités croates ont lancé une initiative globale visant à mettre en oeuvre les conclusions d'une étude du FIAS [25] sur les obstacles administratifs aux investissements étrangers (janvier 2001). Cela a notamment donné lieu à l'adoption en février 2002 d'un plan d'action contenant des mesures détaillées à court et à long termes dont les résultats se sont avérés mitigés. Les lois et procédures régissant la faillite ont été introduites en 1997 et la loi sur les faillites a été modifiée en juillet 2003. Comme c'est le cas pour les procédures judiciaires en général, les procédures de faillite sont longues et souffrent des faiblesses de l'appareil judiciaire. Ce constat est illustré par le processus de privatisation. Parmi les entreprises qui ont fait l'objet de transformation et de privatisation depuis 1991, 728 ont été mises en faillite, mais les procédures de faillite ne sont clôturées que dans 177 cas. Les modifications de la loi sur les faillites créent la base juridique d'une simplification et d'une accélération des procédures, notamment par l'introduction de calendriers, qui doivent toutefois être respectés.

[25] Service-conseil pour les investissements étrangers, qui est un service commun de la Société financière internationale (SFI) et de la Banque mondiale.

Le cadre juridique s'aligne rapidement sur l'acquis communautaire, mais l'efficacité de l'appareil judiciaire laisse encore à désirer. Dès l'automne 2001, les autorités avaient déjà adopté un plan de mise en oeuvre de l'accord de stabilisation et d'association afin d'aligner la loi croate sur l'acquis. Pendant l'été 2003, plusieurs lois importantes ont été adoptées dans le secteur économique, notamment la loi sur la faillite, le droit des sociétés, la loi sur les opérations de change et le droit du travail. Le défi consistera à assurer la mise en oeuvre et l'application effectives de cette législation notamment en améliorant la capacité de l'administration publique. Néanmoins, le réseau des tribunaux ne fonctionne pas bien et n'applique pas efficacement les droits des créanciers et les droits de propriété. Les procédures sont lentes et il reste un arriéré judiciaire substantiel. L'interprétation juridique varie d'un tribunal à l'autre, les capacités administratives et professionnelles font défaut, il y a un manque de personnel d'appoint et le système de formation professionnelle est déficient. Le cadastre et le registre foncier sont dans un état déplorable, qui reflète également l'équipement technique souvent périmé et insuffisant des tribunaux. Les autorités sont conscientes des problèmes et ont engagé avec des donateurs internationaux un certain nombre de projets pour améliorer la capacité et l'efficacité des tribunaux dans un souci de modernisation. La situation est néanmoins peu susceptible de s'améliorer considérablement à court terme. (Voir également la partie 1, Critères politiques.).

Le secteur financier est suffisamment développé pour canaliser le fruit de l'épargne vers les investissements productifs mais l'expansion du crédit à des entreprises clientes souffre de la faiblesse du secteur judiciaire. La privatisation du secteur bancaire croate est presque complète, seules deux banques commerciales, représentant 4 % des actifs bancaires totaux, sont encore majoritairement détenues par l'État. Des banques étrangères contrôlent plus de 90 % du total des avoirs bancaires. Depuis début 2004, le secteur bancaire croate comporte 42 banques essentiellement dominées par six groupes bancaires, ainsi que quatre caisses d'épargne logement et une caisse d'épargne. Les deux principaux groupes bancaires représentent approximativement 49 % des avoirs totaux. En outre, 115 coopératives d'épargne et de prêt opéraient sur le marché croate en 2002, mais elles ne représentaient qu'une petite partie des actifs totaux. L'arrivée sur le marché de banques étrangères a abouti à un élargissement de la gamme des produits et des services offerts par les banques croates ainsi qu'à une intensification de la concurrence. Cela se reflète dans la réduction de l'écart entre les taux créditeurs et les taux débiteurs moyens qui est tombé de 10,1 % en 1998 à 6,5 % en 2001. Un changement dans la méthodologie depuis le 1er janvier 2002 (le secteur public et les institutions financières ne sont plus inclus dans les statistiques de taux d'intérêt) a abouti à une remontée ponctuelle du différentiel d'intérêt entre les taux moyens, spécialement pour les activités non indexées sur la devise étrangère, qui s'est maintenu à 9,6 % fin 2002. Les banques privées ont été autorisées à traiter les ordres de paiement, ce qui était autrefois réservé au Bureau national des transactions de paiement (ZAP) hérité de l'ex-Yougoslavie. Actuellement, 11 banques traitent des ordres de paiement qui représentent environ 60 % des transactions quotidiennes. Des liquidités suffisantes, des procédures rationalisées d'approbation des prêts et des taux d'intérêts réduits ont rendu l'accès au crédit plus facile. Les prêts domestiques totaux (à la fois en kuna et en devises étrangères) évalués en pourcentage du PIB ont augmenté, passant de 27,9 % en 1996 au pourcentage relativement haut de 55,2 % à la fin de 2002. La part du crédit au secteur privé a légèrement diminué au cours des dernières années mais représentait quelque 88 % de l'ensemble des prêts, soit quelque 48,9 % du PIB. Les crédits aux entreprises ont repris au cours des deux dernières années après la baisse de la demande induite par la récession en 1999: les prêts totaux représentaient 26,6 % du PIB à la fin de 2002, retrouvant donc le niveau de 1998. Les difficultés engendrées par le recours à des biens immeubles comme garantie ainsi que les longues procédures de faillite mettent en péril la protection nécessaire des droits des créanciers et des droits de propriété et affectent les prêts. En association avec la rentabilité plus élevée perçue du prêt aux particuliers et le manque d'accès des particuliers à l'emprunt étranger direct, cet état de fait a abouti à une croissance plus faible du crédit aux entreprises qu'aux ménages, qui comprennent cependant souvent des artisans et des microentreprises. L'actionnariat étranger a favorisé la forte croissance du crédit par la disponibilité de fonds des sociétés mères mais cette croissance a suscité des inquiétudes au sujet de l'impact sur la qualité des portefeuilles de crédits des banques et a contribué à la hausse de la dette extérieure. Bien que les prêts à moyen et à long terme soient de plus en plus disponibles (10-15 ans pour des personnes morales et 25-30 ans en ce qui concerne les prêts hypothécaires), 40,9 % de l'ensemble des prêts au secteur privé sont consentis pour moins d'un an et l'échéance moyenne des prêts bancaires n'a guère changé depuis 1999 (2,7 ans au 31 mars 2003 par rapport à 2,5 ans à la fin de 1999).

Le secteur financier non bancaire est moins développé. En termes d'actifs, le secteur non bancaire représente quelque 12 % des actifs totaux du secteur financier, ce qui souligne la dimension toujours limitée des services financiers autres que bancaires. Le secteur de l'assurance, de taille limitée il est vrai, est néanmoins fortement concentré et offre une vaste gamme de produits. En 2002, 24 compagnies d'assurance opéraient en Croatie dont 13 étaient nationales (pour un encaissement brut de primes équivalant à 3,2 % du PIB). Le plus grand assureur détenait 46 % des parts du marché tandis que 5 autres compagnies en détenaient de 5 à 10 % chacune. Bien qu'il existe deux bourses (à Zagreb et à Varazdin), les marchés financiers ne sont ni très actifs ni dotés d'une abondance de liquidités et le rachat de sociétés croates par des investisseurs étrangers a encore réduit le nombre de sociétés cotées. La capitalisation boursière totale des deux bourses représentait 30 % du PIB à la fin de 2002. Les demandes d'inscription en bourse introduites par des entreprises en 2003 sont peu susceptibles d'entraîner un accroissement des transactions. L'établissement de caisses de retraite a eu un important impact sur le chiffre d'affaires et le volume des transactions, notamment d'obligations. Depuis septembre 2003, les 5 fonds de pension obligatoires et 4 fonds de pension volontaires en Croatie témoignaient d'une forte croissance des actifs. (Voir également la partie 3, Chapitre 3 - Libre prestation de services.).

La stabilité du secteur bancaire s'est améliorée mais la forte euroïsation reste un facteur de vulnérabilité potentielle. La HNB est l'autorité responsable en matière d'agrément et de surveillance des opérations bancaires. Depuis la crise de 1998, le secteur bancaire a été stabilisé et sa consolidation se poursuit. Le professionalisme avec lequel la crise de 2002 a été gérée a contribué à renforcer la confiance dans le système bancaire, ce qui s'est traduit par la croissance des dépôts bancaires, notamment en devises étrangères dans le cadre de de l'introduction physique de l'euro dans la zone euro. Un système de garantie des dépôts a été instauré dès 1997. Selon les indicateurs de la HNB sur les prêts improductifs, sur le ratio d'adéquation des fonds propres et sur le coefficient de liquidité primaire, la rentabilité et la solidité des établissements bancaires se sont améliorés. En 2003, la HNB a pris un certain nombre de mesures qui sont parvenues à ralentir la croissance du crédit. Il reste à voir si l'accroissement récent des activités de prêt, notamment aux ménages, aura une incidence sur la qualité du crédit. L'indexation sur les devises étrangères reste une pratique importante, qui augmente la vulnérabilité du système bancaire: les dépôts en devises étrangères, libellés en ou indexés sur celles-ci, représentent encore 88,5 % de l'ensemble des dépôts, malgré une légère tendance à la baisse. En ce qui concerne les prêts bancaires, 78 % sont libellés en ou indexés sur des devises étrangères alors que les emprunteurs perçoivent un revenu libellé en kuna et/ou n'ont pas accès aux instruments de couverture. Les obligations d'État en kuna sont indexées à 70 % sur le taux de change de l'euro.

Capacité à faire face à la pression concurrentielle et aux forces du marché

La capacité de satisfaire à ce critère dépend de l'existence d'une économie de marché et d'un cadre macroéconomique stable, créant un climat de prévisibilité favorable aux prises de décisions par les agents économiques. Elle suppose également que le pays dispose d'un capital humain et physique suffisant. Les entreprises publiques doivent être restructurées et les entreprises doivent investir pour accroître leur efficacité. En outre, plus les entreprises auront accès à des financements extérieurs et réussiront à se restructurer et à innover, plus il leur sera facile de s'adapter. D'une manière générale, un pays qui aura déjà atteint un degré élevé d'intégration économique avec l'Union avant l'adhésion pourra plus aisément assumer ses obligations de membre.

La Croatie a réalisé un degré suffisant de stabilité macroéconomique pour permettre aux opérateurs économiques de prendre des décisions dans un climat stable et prévisible. Depuis la crise économique de 1998/1999, la Croatie se caractérise par une stabilité macroéconomique confirmée. Une meilleure stabilité économique et les réformes structurelles entreprises jusqu'à présent contribuent au fonctionnement des mécanismes du marché bien que les interventions du gouvernement se poursuivent. Les conditions de base nécessaires pour faire face aux pressions concurrentielles sont donc réunies. Parmi les défis à relever, il reste à poursuivre l'assainissement budgétaire et la privatisation, à étendre et à approfondir le développement du secteur financier et à améliorer l'environnement dans lequel les entreprises évoluent, notamment en améliorant l'efficacité de l'appareil judiciaire.

La population active bénéficie d'un assez bon niveau d'instruction mais son taux d'activité est faible. Malgré sa productivité macroéconomique améliorée, la Croatie souffre de l'inactivité économique d'une grande part de sa population (le taux d'activité était de 50,9 % en 2002) et est confrontée à des défis démographiques (depuis juin 2003, le ratio des souscripteurs aux fonds de pension par rapport aux bénéficiaires était de 1 pour 4). Le niveau de productivité de la Croatie en termes de revenu par habitant se situe à 21 % de celui de l'UE en termes nominaux et à 35,9 %, mesuré en parités de pouvoir d'achat. Les gains de productivité varient selon les secteurs et les branches mais les données disponibles suggèrent une meilleure performance du secteur des services que de ceux de l'industrie et de l'agriculture. En général, les taux de scolarité dans l'enseignement secondaire et secondaire supérieur indiquent que le niveau d'instruction de la population en âge de travailler a augmenté au fil des années depuis 1996. Néanmoins, la part des personnes titulaires d'un diplôme universitaire oscillait entre 10,7 et 13,4 %. Cette perspective ne prend pas en considération la nécessité de moderniser la qualité de l'enseignement et les programmes d'études (voir la partie 3, Chapitre 18 - Éducation et formation). Selon les informations du gouvernement, approximativement 1 050 étudiants sont inscrits dans des universités à l'étranger. Comparée à la moyenne de l'UE, la Croatie présente dans sa population (âgée de 25 à 64 ans) un pourcentage plus élevé de titulaires d'un diplôme de l'enseignement secondaire et des pourcentages plus faibles de diplômés de l'école primaire et de l'enseignement post-secondaire. En 2002, le programme de promotion de l'emploi a été adopté. Il vise à réduire le chômage et à améliorer les perspectives d'emploi de groupes cibles spécifiques par exemple par un soutien à ceux qui quittent les universités et à l'ancien personnel militaire. (Voir également la partie 3, Chapitre 13 - Affaires sociales et emploi.).

La Croatie investit dans l'amélioration de son infrastructure et a réalisé des taux d'investissement relativement bons et stables. Dans la période de 1996 à 2002, le ratio investissement-PIB a atteint en moyenne approximativement 23 %, avec un taux record de 24,8 % en 2002, dont plus de 70 % étaient des investissements privés. Nominalement, les investissements directs étrangers (IDE) ont considérablement contribué à l'investissement et à la croissance pendant cette période: ils ont représenté en moyenne 5 % du PIB. Près des deux tiers des IDE étaient néanmoins liés à des projets de privatisation comme en témoignent les principaux secteurs qui ont bénéficié d'IDE: les télécommunications, l'intermédiation financière et l'industrie pharmaceutique. Les investissements entièrement nouveaux ne représentent que 16,4 % du total. Les principaux secteurs d'investissements intérieurs étaient l'industrie manufacturière, le commerce, les transports et la construction, qui se caractérise par de gros investissements publics dans les routes et la reconstruction. Bien que la capacité des infrastructures de transport semble suffire aux besoins actuels sauf pendant la haute saison touristique, leur qualité est perçue comme peu satisfaisante par les entrepreneurs. Dans la période 1996-2002, l'investissement dans les routes, notamment pour la construction de nouvelles autoroutes, a atteint un niveau élevé. Parallèlement, l'investissement dans les infrastructures ferroviaires est resté modeste, mais devrait reprendre dans le cadre d'un programme quadriennal. Les télécommunications se sont sensiblement améliorées: le réseau à lignes fixes est entièrement numérisé et il y a deux opérateurs de téléphonie mobile, ce qui a permis un taux de pénétration de la téléphonie mobile de 56 % dès juin 2003. La mise en oeuvre des réformes réglementaires et l'ouverture à la concurrence sont néanmoins toujours en retard dans certains secteurs des infrastructures, y compris les télécommunications. Les dépenses intérieures brutes en faveur de la recherche et du développement technologique ont atteint une moyenne annuelle de 0,96 % du PIB au cours de la période 1997-2001, augmentant au cours de la période, ce qui est relativement élevé mais toujours inférieur à la moyenne de l'Union européenne (2,21 % en 2000). Cela vaut aussi pour la R & D par habitant et la participation des entreprises à la R & D.

Au cours de la période 1996-2001, la part de l'industrie manufacturière et de l'agriculture a diminué légèrement tandis que le secteur des services, traditionnellement fort, a gagné davantage en puissance. L'industrie manufacturière a marqué une légère tendance à la baisse, passant de 22,3 % du PIB (à prix constants) à 21,5 %. Dans l'industrie manufacturière, les activités à faible valeur ajoutée tendent à dominer la structure industrielle, en partie en raison des anciennes politiques de privatisation. De même, l'agriculture s'est contractée avec le temps de plus de 10 %, mais elle représente pourtant encore 9,1 % du PIB (à prix constants). Ce secteur est dominé par de petites exploitations agricoles dispersées et de grands conglomérats, qui sont en train d'être privatisés. La productivité et l'efficacité se situent à un niveau faible et il y a d'importants besoins d'ajustement, ce qui pourrait mener à une chute de l'emploi dans l'agriculture, qui est encore important. Le secteur du commerce a augmenté considérablement depuis le creux de 1998 mais reste inférieur aux niveaux de 1996/1997. Les tendances en ce qui concerne l'emploi ont suivi le même profil.

Après un départ laborieux, la restructuration des entreprises a progressé. À la suite de l'adoption par le gouvernement au début de 2001 d'un programme visant à accélérer la restructuration et la privatisation, il y a eu des progrès en matière de restructuration. L'ancien service des postes et télécommunications croate a été scindé en 1999 en deux sociétés par actions dont l'une, l'Entreprise croate de télécommunications, a été en partie privatisée. À la mi-2003, 30 entreprises avaient été réorganisées et 20 entreprises étaient en cours de restructuration. La restructuration des chemins de fer débute. Bien qu'il n'y ait aucun plan global de restructuration des entreprises, le gouvernement a adopté des programmes pour restructurer la construction navale et les conglomérats agro-industriels, qui ont bénéficié d'importantes subventions et interventions de l'État. En outre, un plan de restructuration est en préparation pour le secteur de l'acier. Les arriérés ont été réduits dans une large mesure et ont été estimés inférieurs à 0,2 % du PIB à la mi-2003, ce qui est néanmoins peu susceptible de couvrir l'ensemble du secteur public (par exemple le secteur de la santé). (Voir la partie 3, chapitre 15 - Politique industrielle.).

La part des petites entreprises dans le PIB et l'emploi y a augmenté bien que leur nombre total ait diminué. Les petites et moyennes entreprises (y compris les artisans, les coopératives et les microentreprises) représentent 99,6 % de l'ensemble des entreprises et 65,7 % de l'emploi dans des entreprises (en juin 2003). Dans la période de 1996 à 2000, le nombre de petites entreprises a diminué de 8,9 % bien que l'emploi y ait augmenté en termes absolus (de 6,8 %) et en pourcentage de l'emploi total (de 3,2 points de pourcentage). La situation était exactement inversée en ce qui concerne les moyennes et grandes entreprises. La part de PME dans le PIB est estimée à quelque 55 %. Les PME tendent à souffrir davantage des obstacles à l'accès aux marchés et des faiblesses de l'environnement des entreprises. À cet égard, il convient de souligner notamment les difficultés d'accès au financement dues aux problèmes rencontrés pour fournir des garanties et au manque de compétences des banques à évaluer la solvabilité des PME, à la concurrence d'entreprises d'État subventionnées, au manque de connaissances entrepreneuriales et aux faiblesses de l'infrastructure institutionnelle de l'appareil judiciaire et de l'administration publique notamment. Les autorités ont fait des efforts pour améliorer la situation, et le nombre croissant d'entreprises nouvellement créées semble montrer les premiers signes d'une amélioration. En 2000, il a été créé un ministère distinct qui a mis en oeuvre plusieurs initiatives pour améliorer la situation des PME mais a été réintégré dans le ministère de l'économie après les élections de novembre 2003. Le gouvernement a également adopté un programme de développement des petites entreprises pour 2003-2006 et signé la Charte européenne des petites entreprises, qui énonce les principes visant à améliorer l'environnement dans lequel les PME évoluent. La coordination entre les différents niveaux de gouvernement en termes de politique des PME et la communication entre les autorités et les milieux d'affaires devraient encore être intensifiées. (Voir la partie 3, chapitre 16 - Petites et moyennes entreprises.).

Le niveau des aides d'État et de l'aide à des secteurs spécifiques est encore considérable tandis que la transparence reste faible. Il a été établi que les interventions de l'État, manifestes ou déguisées, allaient croissant avant 2000. Au cours des trois dernières années, des efforts ont été déployés pour faire du contrôle des aides d'État une priorité par des mesures tant législatives que concrètes. Un plan d'action concernant les subventions dans l'économie a été élaboré en 2001 et sa mise en oeuvre contrôlée par le programme de prêts à l'ajustement structurel de la Banque mondiale, ce qui a permis une diminution progressive des aides d'État en pourcentage du PIB. On élabore des critères d'octroi de garanties par l'État et les sorties nettes ont diminué au cours des dernières années mais les montants garantis ont plus que doublé de 2000 à 2002. Les autorités considèrent que pendant la période 2000-2002 les aides d'État ont représenté en moyenne 3,5 % du PIB et avaient tendance à diminuer mais cela ne concerne que les seules subventions directes prélevées sur le budget central. Des estimations théoriques plus complètes qui comprennent d'autres formes d'aides d'État laissent entrevoir des niveaux plus élevés. Le cadre juridique et institutionnel dans le domaine des aides d'État ne date que de 2003. La Croatie devra non seulement réduire le niveau global des aides d'État mais aussi leur niveau dans des secteurs particuliers (comme l'agriculture, les transports, la construction navale, le tourisme et, plus récemment, les chemins de fer) en faveur d'un soutien horizontal. (Voir la partie 3, chapitre 6 - Politique de concurrence.).

La Croatie a sensiblement libéralisé ses échanges au cours des dernières années. Les mesures successives de libération des échanges introduites depuis 1993 ont permis des améliorations considérables mais les progrès en matière de véritable intégration commerciale avec d'autres pays ont été limités par l'isolement politique de la Croatie jusqu'au début de l'an 2000. Depuis lors, la Croatie a fait des progrès rapides: elle a fait adhéré à l'OMC (en novembre 2000) et conclu un certain nombre d'accords bilatéraux de libre-échange (ALE) notamment avec l'Union européenne, des pays voisins et l'AELE. Depuis le 1er mars 2003, l'adhésion de la Croatie à l'accord de libre-échange centre-européen (ALECE) est effective. Suite à ces accords, les taux moyens pondérés des droits de la nation la plus favorisée applicables aux produits industriels se sont maintenus à 3,5 % au début de 2003. La Croatie est une petite économie ouverte et le ratio de ses échanges commerciaux au PIB (biens et services) était de 103,7 % en 2002. (Voir la partie 3, chapitre 26 - Relations extérieures.).

L'économie de la Croatie est déjà hautement intégrée à l'Union. L'UE est de loin le premier partenaire commercial de la Croatie, représentant en moyenne 52,6 % des exportations et 56,2 % des importations pendant la période comprise entre 1999 et 2002. Ces parts de marché augmenteront de l'ordre de 13 et 15 points de pourcentage respectivement par l'adhésion de dix nouveaux États membres à l'Union européenne le 1er mai 2004. En 2002, la Croatie a exporté vers l'UE pour 2,74 milliards d'euros tandis que ses importations atteignaient 6,32 milliards d'euros. La balance commerciale des marchandises affiche un déficit élevé et croissant: tandis que les exportations n'ont guère progressé que de 7 % de 1996 à 2002, les importations ont augmenté de 26 %, ce qui a donné lieu à une montée subite de 51 % du déficit commercial et à une détérioration du taux de couverture des importations par les exportations qui est passé de 57 à 48 %. Par conséquent, la part de la Croatie dans les importations totales de l'UE a diminué (passant de 0,4 % en 1993 à 0,2 % en 2002) tandis que la part de la Croatie dans les exportations totales de l'UE est restée stable (à 0,7 %). Plusieurs facteurs ont contribué à cette évolution. La structure des exportations de marchandises croates a connu une évolution relativement défavorable entre 1995 et 2000, partiellement en raison de la domination persistante des entreprises publiques anciennes et actuelles (notamment la construction navale qui est largement tributaire des importations). La part des industries à forte intensité de main-d'oeuvre, notamment textiles, chaussures, bois et construction navale, a augmenté, en raison notamment de l'important volume d'opérations de perfectionnement passif, dont la valeur ajoutée tend à être plus faible et qui sont plus vulnérables à la concurrence des prix. En outre, l'amélioration de l'accès au marché des entreprises croates par le réseau des ALE ne portera ses fruits qu'à plus long terme. L'intégration commerciale avec l'Union européenne est également entravée par le fait que la Croatie n'est pas encore intégrée dans le système paneuropéen de cumul diagonal des règles d'origine. Étant donné les coûts salariaux relativement élevés, il faudra renforcer la restructuration de l'économie croate pour l'orienter vers une spécialisation de ses exportations dans des industries davantage axées sur la technologie afin de relever avec succès le défi de la concurrence sur le marché unique et poursuivre l'amélioration du climat économique. Une agence de promotion du commerce et des investissements a été fondée à la fin de 2002 afin de soutenir les activités d'exportation notamment des PME mais elle n'est pas encore opérationnelle. En ce qui concerne la compétitivité de la Croatie dans le secteur des services, les recettes du tourisme ont augmenté de près de 90 % pendant la période 1996-2002 et le secteur représente déjà 17 % du PIB. Le tourisme est susceptible de se développer davantage à condition que l'on procède à une privatisation des équipements susceptible de déboucher sur de nouveaux investissements.

La productivité de la main-d'oeuvre s'est sensiblement améliorée mais elle est en retard sur la moyenne de l'UE. Selon les données croates, l'augmentation du PIB réel de 39 % pendant la période de 1993 à 2001 et la diminution de l'emploi de 8 % ont produit une croissance de productivité de la main-d'oeuvre (PIB réel par travailleur) de 50 %, soit 5,2 % en moyenne annuelle. La croissance de la productivité a été considérablement plus rapide dans le secteur des services que dans l'industrie et l'agriculture. Presque aucun des secteurs industriels n'a enregistré d'augmentation de l'emploi entre 1997 et 2002, en fait, la plupart d'entre eux accusaient une baisse significative. En 2001, la productivité de la main-d'oeuvre en Croatie s'est maintenue à quelque 25 % de la moyenne de l'UE aux taux de change courants et à près de 40 % lorsqu'elle est mesurée en parités de pouvoir d'achat. La productivité de l'industrie est légèrement plus élevée que la productivité totale (elles s'établissent respectivement à 27 % et 44 % du niveau de l'UE). Les coûts salariaux unitaires moyens sont élevés et proches de la moyenne de l'UE (97 %), ce qui exclut un avantage concurrentiel en termes de coûts du travail. Aucun des indicateurs de compétitivité extérieure ne fournit cependant de preuves d'une détérioration relative de la position de la Croatie depuis 1995 par rapport à celle de ses principaux partenaires commerciaux et d'autres pays en transition. Des évaluations de la compétitivité et la fragilité des soldes extérieurs suggèrent la nécessité de réformes structurelles dans le secteur des entreprises pour améliorer la compétitivité de la Croatie.

2.3. Évaluation générale

La Croatie peut être considérée comme dotée d'une économie de marché qui fonctionne. Elle devrait être en mesure de faire face à la pression concurrentielle et aux forces du marché à l'intérieur de l'Union à moyen terme, pour autant qu'elle continue à mettre en oeuvre son programme de réforme, en vue de surmonter certaines faiblesses persistantes.

En Croatie, il y a un consensus politique croissant concernant les objectifs fondamentaux de la politique économique. La Croatie est parvenue à créer un environnement macroéconomique d'une grande stabilité et à maintenir un faible taux d'inflation. La stabilité économique renforcée et les réformes structurelles entreprises jusqu'à présent permettent le fonctionnement des mécanismes du marché. Cela vaut notamment pour la libéralisation du commerce et des prix et, dans une moindre mesure, pour la privatisation. La Croatie est caractérisée par une population active dotée d'un assez bon niveau de formation et par de bonnes infrastructures routières et de télécommunications. Le pays dispose d'un secteur bancaire bien développé et d'une industrie touristique concurrentielle. L'économie de la Croatie est déjà bien intégrée à l'Union.

Cependant, le fonctionnement des mécanismes du marché doit encore être amélioré. Il conviendrait notamment de renforcer l'efficacité de l'appareil judiciaire, d'alléger les lourdes charges qui pèsent sur l'administration et de remédier à l'absence d'un registre cadastral et foncier complet. La restructuration et la privatisation des entreprises ont été plus lentes que prévu et certaines grandes entreprises auparavant détenues collectivement continuent de jouer un rôle important dans l'économie. Les secteurs de la construction navale et de l'agriculture doivent notamment être modernisés. Les réformes à apporter au système fiscal, au régime de la sécurité sociale et à la fonction publique ne sont pas encore achevées; quant à l'assainissement budgétaire, il doit être poursuivi avec détermination. L'intégration complète dans le marché unique et l'adoption de l'acquis communautaire risquent, au stade actuel, de poser des difficultés à plusieurs secteurs lorsqu'ils devront faire face à la concurrence à l'intérieur du marché unique. En remédiant aux insuffisances constatées, l'investissement, la croissance et, partant, la compétitivité de la Croatie s'en trouveraient améliorés.

3. Aptitude à assumer les obligations découlant de l'adhésion

Parmi les critères de l'adhésion définis lors du Conseil européen de Copenhague de juin 1993 figurait «la capacité d'en assumer les obligations, et notamment de souscrire aux objectifs de l'union politique, économique et monétaire».

En présentant une demande d'adhésion sur la base du traité, la Croatie a accepté sans réserve les objectifs fondamentaux de l'Union, y compris ses politiques et ses instruments. La présente partie de l'avis examine la capacité de la Croatie d'assumer les obligations résultant de l'adhésion - c'est-à-dire le cadre juridique et institutionnel, connu sous le nom d'acquis, qui permet à l'Union de concrétiser ses objectifs.

Compte tenu de l'évolution de l'Union, l'acquis est devenu progressivement plus conséquent et constitue pour les adhésions futures un défi plus important que par le passé. La capacité de la Croatie à mettre en oeuvre l'acquis sera essentielle pour qu'elle réussisse à fonctionner au sein de l'Union.

À cet égard, l'alignement sur l'acquis constitue une condition nécessaire mais non suffisante pour satisfaire aux obligations de l'adhésion à l'UE. La Croatie doit également prendre toutes les mesures et créer les structures d'exécution indispensables à la mise à niveau de ses capacités administratives et judiciaires et à une mise en oeuvre efficace. Il est dès lors procédé à une analyse et une évaluation des capacités administratives et judiciaires de la Croatie dans chacun des chapitres examinés ci-dessous.

Aux fins des négociations d'adhésion précédentes, l'acquis a été subdivisé en 29 chapitres. La présente partie suit la structure de ces 29 chapitres de négociation. Chaque chapitre examine la situation actuelle et à venir de la Croatie. Dans chaque chapitre, la description et l'analyse sont précédées d'un bref résumé de l'acquis, avec mention des éventuelles dispositions pertinentes de l'accord de stabilisation et d'association ou de l'accord intérimaire. Enfin, chaque chapitre contient une brève évaluation de l'aptitude de la Croatie, à moyen terme, à assumer les obligations résultant de l'adhésion. Aux fins du présent avis et sans préjuger d'une éventuelle date d'adhésion future, une période de cinq ans a été définie comme l'horizon à moyen terme pour l'évaluation prospective.

Chapitre 1 - Libre circulation des marchandises

Le principe de la libre circulation des marchandises repose sur le fait qu'il doit être possible d'échanger des biens librement sur tout le territoire de l'Union européenne. Dans un certain nombre de secteurs, ce principe général est complété par un cadre réglementaire harmonisé, de type «ancienne approche» (qui impose des spécifications de produit précises) ou «nouvelle approche» (qui impose des exigences générales auxquelles les produits doivent satisfaire). La transposition de la législation européenne harmonisée applicable aux produits représente l'essentiel du contenu du présent chapitre. Par ailleurs, l'existence de capacités administratives suffisantes permettant d'appliquer des mesures horizontales et procédurales dans des domaines tels que la normalisation, la certification et la surveillance de marché est primordiale. Le présent chapitre couvre également les règles communautaires très précises applicables aux marchés publics, qui requièrent l'établissement d'organes de mise en oeuvre spécialisés.

L'accord de stabilisation et d'association/accord intérimaire contient un certain nombre d'obligations dans le domaine de la libre circulation des marchandises, telles que la création d'une zone de libre-échange. Il prévoit également l'alignement progressif sur les règlements et les procédures techniques communautaires et sur les procédures européennes de normalisation, de métrologie, d'accréditation et d'évaluation de la conformité ainsi que l'ouverture progressive des marchés publics.

En ce qui concerne les mesures horizontales et procédurales, la Croatie a adopté en octobre 2003 une nouvelle législation sur la normalisation et la métrologie légale. Elle a également cherché à s'aligner progressivement sur les principes de l'approche nouvelle et de l'approche globale par l'adoption en septembre 2003 de nouvelles lois sur les exigences techniques applicables aux produits et l'évaluation de la conformité, la sécurité générale des produits et l'accréditation. Ces nouvelles lois prévoient la séparation des fonctions correspondantes du Bureau national pour la propriété intellectuelle, pour la normalisation et la métrologie, qui est actuellement responsable de la normalisation, de l'évaluation de la conformité, de l'accréditation et de la métrologie. Le Bureau a également pour tâche de définir les spécifications des règlements techniques et de désigner les institutions chargées des actions de surveillance du marché. En janvier 2004, le Bureau national pour la normalisation et la métrologie a été fusionné avec le Bureau national de la propriété intellectuelle et est devenu le Bureau national pour la propriété intellectuelle, la normalisation et la métrologie.

Une stratégie nationale visant à aligner la législation technique croate sur celle de la CE a été adoptée en janvier 2003. Ce document définit les responsabilités correspondantes en matière de transposition et de mise en oeuvre des directives de type nouvelle approche et ancienne approche.

Le Bureau national pour la propriété intellectuelle, la normalisation et la métrologie, en sa qualité d'institut national chargé des normes, a créé environ 166 comités techniques couvrant 420 secteurs CEN/CENELEC/ETSI. Les comités comptent 3 100 experts représentant des organismes privés et publics. Le processus d'adoption des normes européennes/internationales a commencé en 1996. Jusqu'ici, 7 519 nouvelles normes croates ont été adoptées, dont 4 877 normes européennes. L'organisme croate de normalisation est le représentant national au sein de l'ETSI depuis 1994 et est affilié au CEN et au CENELEC depuis 1995.

Le service croate d'accréditation dépend du Bureau national pour la propriété intellectuelle, la normalisation et la métrologie. Il a accrédité 22 organismes et 47 autres sont en cours d'accréditation. La nouvelle loi sur l'accréditation prévoit la création d'un organisme indépendant d'accréditation pour janvier 2005. L'actuel service d'accréditation est membre associé de la Coopération européenne pour l'accréditation (EA).

On compte actuellement environ 25 organismes privés fournissant des services d'évaluation de la conformité en Croatie, dans le domaine des essais, de l'homologation et de l'inspection des produits industriels. L'objectif est de parvenir à ce que tous les organismes d'évaluation de la conformité dans les domaines réglementés soient accrédités selon les exigences internationales et européennes. Dans le cadre de la législation en vigueur, les rapports d'essais des laboratoires étrangers compétents sont reconnus en Croatie.

Même avant l'adoption de la nouvelle loi sur la métrologie, le système croate de métrologie légale correspondait au système en vigueur dans l'UE et reposait sur l'ancienne approche. Le système actuel de métrologie est décentralisé et comporte des laboratoires et des titulaires de normes nationales de mesures. Le Bureau national pour la propriété intellectuelle, la normalisation et la métrologie est l'institution chargée de la coordination.

La Croatie dispose d'un système garantissant que les produits commercialisés répondent à des exigences types. Le système repose sur la loi relative à l'inspection de l'État de 1999, qui prévoit une autorisation préalable à la mise sur le marché pour 55 groupes de produits pour lesquels des inspecteurs de l'État délivrent des certificats de qualité. La structure de surveillance du marché requise dans le cadre de la nouvelle approche doit encore être mise en oeuvre conformément à la nouvelle loi sur les exigences techniques applicables aux produits et l'évaluation de la conformité. La coordination entre l'inspection de l'État et l'administration douanière en ce qui concerne les contrôles de conformité et de sécurité des produits aux frontières extérieures est définie dans la loi relative à l'inspection de l'État.

Dans les domaines couverts par les directives «nouvelle approche», la Croatie n'a pas encore transposé la majeure partie de la législation sectorielle. À ce stade, elle a uniquement adopté la législation visant à l'alignement dans les domaines de la métrologie légale (instruments de pesage à fonctionnement non automatique), des pré-emballages et des équipements destinés à être utilisés en atmosphères explosibles (ATEX). Une nouvelle loi sur la construction est entrée en vigueur en janvier 2004. L'alignement complet sur l'acquis sur les produits de la construction est prévu avant la fin de 2004. Il en va de même pour la législation sur les machines, le matériel électrique (matériel basse tension et compatibilité électromagnétique), les dispositifs médicaux, les appareils à gaz, les récipients à pression, les équipements sous pression, les ascenseurs, les équipements de protection individuelle, les bateaux de plaisance, les jouets, les équipements hertziens et les équipements terminaux de radio et télécommunications, que la Croatie prévoit également de transposer avant décembre 2004.

Dans les secteurs couverts par les directives «ancienne approche», la législation croate n'est que partiellement alignée sur l'acquis sur les véhicules à moteur. À ce stade, il est difficile de dire quels certificats de réception CE sont acceptés sans rectification. La législation sur les substances chimiques est très fragmentée en Croatie et certaines parties de l'acquis ne sont pas couvertes. Bien que la Croatie cherche à clarifier la distinction entre substances et préparations dans une nouvelle loi sur les produits chimiques, d'importantes divergences subsistent entre la législation croate et communautaire. L'alignement sur l'acquis sur les textiles et les chaussures doit être poursuivi. En ce qui concerne les textiles, la loi croate sur la protection des consommateurs définit des critères d'étiquetage obligatoires qui vont plus loin que ceux de la directive relative aux dénominations textiles et peuvent donc constituer des obstacles à la libre circulation des marchandises. Le cadre juridique applicable à la commercialisation des médicaments à usage humain est mis en place grâce à la nouvelle loi sur les médicaments et les produits pharmaceutiques et une série d'ordonnances qui doivent être alignées sur l'acquis. La réglementation technique actuelle sur le cristal est en grande partie alignée sur l'acquis. Il n'existe actuellement en Croatie aucune loi sur le classement des bois.

En matière de sécurité alimentaire et de législation sur les denrées alimentaires (voir aussi le chapitre 7 - Agriculture), l'alignement préliminaire sur l'acquis vient seulement de commencer en Croatie avec l'adoption d'une nouvelle la loi concernant les produits alimentaires en juillet 2003. Malgré l'engagement d'intégrer dans la nouvelle loi les principes généraux et les exigences figurant dans le règlement communautaire correspondant, les directives concernant l'étiquetage, la présentation, la publicité et le contrôle officiel des denrées alimentaires n'ont été que partiellement transposées. La Croatie a également adopté la législation sur les additifs, les contaminants, l'hygiène et les contacts, ce qui ne constitue qu'un alignement partiel sur l'acquis.

Dans le domaine de la sécurité alimentaire, la loi sur les produits alimentaires fournit un cadre permettant de créer une nouvelle agence alimentaire. Une fois opérationnelle, l'agence aura pour tâche d'analyser les risques liés aux produits alimentaires, d'émettre des avis aux ministères de la Santé et de l'Agriculture quant à la législation nécessaire à l'alignement sur l'UE et de coordonner les activités d'inspection entre les deux ministères responsables de la sécurité alimentaire. Elle sera chargée d'organiser des actions de formation à l'intention des différents organismes d'inspection et de rédiger des guides sur les bonnes pratiques en matière d'hygiène et sur l'analyse des risques et de maîtrise des points critiques. La loi sur les produits alimentaires prévoit également la mise en place d'un système d'alerte rapide central au sein de l'agence alimentaire. Le système croate d'agrément préalable à la mise sur le marché pour les denrées alimentaires n'est pas conforme à l'acquis.

En ce qui concerne la législation dans d'autres secteurs, le cadre juridique croate a été modifié en septembre 2003 afin de l'aligner sur la directive relative à la restitution des biens culturels ayant quitté illicitement le territoire d'un État membre de l'UE. La Croatie a également adhéré à un certain nombre de conventions internationales dans ce domaine. En ce qui concerne les armes à feu à usage civil, une nouvelle loi sur les armes est en cours d'élaboration. Dans sa forme actuelle, la nouvelle loi ne serait que partiellement alignée sur les règles communautaires et devrait faire l'objet d'autres modifications pour l'être entièrement. Le projet de loi introduit également une carte d'armes à feu qui pourrait à terme devenir la carte européenne d'armes à feu prévue dans la directive correspondante.

Dans le secteur non harmonisé, la Croatie doit veiller à ce que sa législation, y compris les mesures distinctement et indistinctement applicables, soit compatible avec les articles 28 - 30 du traité CE et la jurisprudence afférente de la Cour de justice des Communautés européennes (l'accent devant surtout être mis sur le principe de la reconnaissance mutuelle). Parmi les exemples de mesures existantes pouvant être incompatibles avec le droit communautaire figurent les licences d'importation (toujours exigées pour certains produits), les campagnes publicitaires effectuées par la Chambre économique, les équipements de stockage obligatoires et l'étiquetage obligatoire du pays d'origine dans le cadre de la loi relative à la protection des consommateurs.

Le cadre juridique croate suit largement les règles de l'UE en matière de marchés publics. Néanmoins, il conviendra de remédier à plusieurs points faibles importants tels que l'octroi d'exemptions exagérément nombreuses toujours prévues dans le cadre de la loi sur la passation des marchés publics et la portée du recours aux procédures négociées. Quant au système de recours, un certain nombre de questions devront être abordées pour assurer la conformité avec l'acquis. Par exemple, des soumissionnaires empêchés de répondre à un appel d'offres en raison d'irrégularités de procédure devront avoir la possibilité de contester cet appel d'offres. En outre, certaines mesures d'exécution sont toujours en attente d'adoption.

En ce qui concerne les structures administratives, le Bureau national pour les marchés publics a été officiellement mis en place en novembre 2003 avec un retard considérable. Il est chargé d'un certain nombre de tâches liées à la mise en oeuvre de la loi sur les marchés publics. En juillet 2003, la Croatie a adopté une nouvelle loi sur la Commission nationale de contrôle des procédures de passation des marchés. La Commission s'occupera des procédures d'examen des plaintes. Ses cinq membres ont été nommés par le Parlement en octobre 2003. Le Bureau national pour les marchés publics et la Commission nationale doivent désormais devenir tout à fait opérationnels pour que leur bilan de la mise en oeuvre des règles soit crédible.

Conclusion

Bien que la Croatie ait pris en 2003 les premières mesures pour aligner sa législation nationale sur le principe de la libre circulation des marchandises, les éléments clés de l'acquis ne sont pas encore en place.

Les mesures horizontales et procédurales ainsi que la législation sectorielle doivent notamment être rapprochées de la législation de l'UE. La Croatie n'a pas encore achevé la nécessaire séparation entre les fonctions de réglementation, d'accréditation, de normalisation et d'homologation des produits, ces deux dernières fonctions devant essentiellement être confiées au secteur privé. Des efforts significatifs sont indispensables en ce qui concerne la transposition des directives ancienne approche et nouvelle approche. Bien que des mesures initiales aient été prises pour l'aligner sur l'acquis, la législation croate sur les denrées alimentaires devra être revue. Les structures de mise en oeuvre actuelles doivent être améliorées et de nouvelles doivent également être créées, notamment en ce qui concerne la surveillance du marché dans le cadre de l'approche nouvelle et de l'approche globale et certains aspects de la sécurité alimentaire.

Si la Croatie procède dans un avenir proche à un examen minutieux de sa législation, elle devra être en mesure de se conformer aux principes fondamentaux de la libre circulation des marchandises qui régissent le secteur non harmonisé.

Pour parvenir à un régime efficace de marchés publics, la Croatie devra poursuivre ses efforts afin de rendre son cadre législatif conforme à l'acquis et finaliser les dispositions de mise en oeuvre nécessaires. Malgré des progrès récents, la capacité de la Croatie d'appliquer l'acquis sur les marchés publics doit encore être sensiblement renforcée.

De façon générale, dans le domaine de la libre circulation des marchandises, la Croatie doit faire des efforts considérables et soutenus pour aligner sa législation sur l'acquis et pour la mettre en oeuvre et l'appliquer de manière effective à moyen terme.

Chapitre 2 - Libre circulation des personnes

L'acquis dans ce domaine prévoit le traitement non-discriminatoire des travailleurs légalement employés dans un pays autre que leur pays d'origine, ce qui inclut la possibilité de cumuler ou de transférer des droits en matière de sécurité sociale; à cet égard, la coopération administrative entre les États membres est nécessaire. Afin de faciliter l'exercice de certaines professions, l'acquis en matière de libre circulation des personnes contient aussi des règles spécifiques relatives à la reconnaissance mutuelle des qualifications et des diplômes; pour certaines professions, un programme de formation harmonisé doit avoir été suivi pour être en mesure de se prévaloir d'une qualification reconnue dans un État membre de l'UE. Par ailleurs, ce chapitre couvre également les droits de séjour et de vote des citoyens de l'Union européenne dans tout État membre.

Dans le domaine de la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles, le système croate repose sur l'affiliation obligatoire à des associations professionnelles (chambres) qui réglementent les professions, ce qui permet de contrôler les activités et de protéger les titres professionnels. Les membres des chambres professionnelles sont affiliés au système de sécurité sociale dans les mêmes conditions que les autres citoyens.

La législation croate actuellement en vigueur semble concerner exclusivement la reconnaissance des titres universitaires. Une nouvelle loi, qui entrera en vigueur en 2004, prévoit une procédure semblable à celle figurant dans les directives relatives au système général de reconnaissance mais limitée à l'enseignement supérieur. En outre, elle ne couvre pas les directives spécifiques basées sur la coordination de la formation et la reconnaissance automatique. Enfin, les procédures prévues dans la législation croate ne répondent pas à toutes les conditions de l'acquis, par exemple en termes de délais, de motivation et de droit de recours.

En ce qui concerne les exigences de formation, le système croate diffère sensiblement du système de l'Union européenne, notamment dans le domaine médical. Dans un certain nombre de professions médicales (par exemple, les médecins généralistes et les infirmières), les exigences requises en Croatie ne correspondent pas aux exigences minimales fixées dans l'acquis. Dans ces cas, les titres correspondants ne feraient pas l'objet d'une reconnaissance automatique dans l'UE.

Dans le domaine des droits des citoyens, en ce qui concerne l'accès à l'enseignement supérieur, les citoyens étrangers qui souhaitent s'inscrire doivent satisfaire à certaines conditions s'ils ne résident pas en permanence en Croatie. En outre, les droits d'inscription pour les étudiants étrangers diffèrent de ceux pratiqués à l'égard des étudiants croates.

La législation croate devra être modifiée pour être conforme à l'acquis. Conformément au principe de la non-discrimination en raison de la nationalité figurant à l'article 12 du traité, la Croatie devrait prendre des mesures garantissant que les ressortissants de l'UE ont le droit de s'inscrire dans ses institutions d'enseignement supérieur dans les mêmes conditions que les ressortissants nationaux, sans être tenus de résider en permanence en Croatie et d'acquitter des frais d'inscription différents.

En ce qui concerne les droits de séjour, pour obtenir un permis de séjour d'une durée supérieure à trois mois, les citoyens de l'UE n'exerçant pas d'activité économique doivent introduire une demande de séjour prolongé. Sous certaines conditions, ils peuvent également demander un permis de séjour permanent.

La Croatie devra modifier sa législation afin d'assurer la compatibilité avec l'acquis sur la libre circulation des personnes, notamment en ce qui concerne les formalités et les conditions d'entrée et de séjour des citoyens de l'UE en Croatie.

En ce qui concerne les droits de vote, la constitution croate restreint actuellement le droit de vote aux citoyens croates. La Croatie devra permettre aux citoyens de l'Union résidant en Croatie et n'ayant pas la nationalité croate de voter et de se présenter comme candidats aux élections municipales et du Parlement européen. En outre, la Croatie devra promulguer des lois afin de transposer l'acquis correspondant sur les droits de vote aux élections municipales et du Parlement Européen. L'acquis dans ce domaine ne concerne pas les élections parlementaires ni présidentielles nationales.

En ce qui concerne la libre circulation des travailleurs, la loi sur les étrangers, en vigueur depuis janvier 2004, stipule que les étrangers doivent être en possession d'un permis de travail. Ce permis peut être accordé sur demande de l'employeur dans les limites d'un contingent de permis de travail fixé annuellement par le gouvernement croate. Ce contingent ne devrait pas inclure les permis de travail délivrés aux travailleurs étrangers et aux membres de leurs familles, dont le statut est régi par l'accord de stabilisation et d'association.

La connaissance de la langue croate est une exigence obligatoire à la pratique de la profession de médecin, de pharmacien et de notaire. L'acquis n'autorise l'application d'exigences linguistiques obligatoires que dans des circonstances très exceptionnelles, sur la base d'un examen au cas par cas. Il y a lieu de se pencher sur les exigences législatives sur le plan des compétences linguistiques afin de garantir un intérêt public justifié, la non-discrimination et la proportionnalité.

Pour être conforme à la législation de l'UE sur la libre circulation des travailleurs, la législation croate doit faire l'objet de plusieurs modifications, notamment pour que les ressortissants de l'UE ne soient pas tenus d'être en possession d'un permis de travail et, en ce qui concerne l'accès à l'emploi, qu'ils ne subissent pas de discrimination sur la base de la nationalité même s'ils ne résident pas encore en Croatie. Quant à l'accès à l'emploi dans le secteur public, seuls les postes directement liés aux activités propres au service public, c'est-à-dire impliquant l'exercice du pouvoir public et la responsabilité du maintien de l'intérêt général de l'État, peuvent être réservés aux ressortissants croates. Les ressortissants de l'UE doivent être autorisés à amener les membres de leur famille; le conjoint et les enfants doivent être autorisés à travailler sans permis de travail. D'autres modifications de la loi croate seront nécessaires pour assurer la libre circulation des travailleurs.

En outre, la Croatie devra adopter des mesures conformes à l'acquis, notamment en ce qui concerne les droits à pension complémentaire, afin de couvrir tous les régimes de pension complémentaire, obligatoires ou volontaires, liés à l'activité professionnelle des travailleurs salariés ou non salariés, même si ces régimes ne semblent pas exister actuellement en Croatie.

En ce qui concerne la coordination des régimes de sécurité sociale, le système de sécurité sociale croate comprend toutes les branches traditionnelles de la sécurité sociale qui relèvent du champ d'application des règles de coordination communautaires. Les avantages et autres caractéristiques du système croate ressemblent à ceux de plusieurs États membres de l'UE. Néanmoins, la Croatie accorde un nombre relativement élevé d'avantages spécifiques aux victimes de guerre. Le système de sécurité sociale croate repose sur le principe de l'assurance obligatoire dans le pays de la prestation du travail et contient des définitions précises des travailleurs salariés et non salariés. Le régime d'assurance obligatoire n'est pas discriminatoire à l'égard des non-Croates. Néanmoins, pour bénéficier de la couverture de sécurité sociale, les étrangers doivent être détenteur d'un permis de travail ou d'exploitation. La Croatie a conclu un certain nombre d'accords bilatéraux de sécurité sociale avec des pays tiers, dont plusieurs États membres de l'UE. En vertu de ces accords, la Croatie applique déjà le principe de la totalisation des périodes d'assurance et de l'exportation des prestations vis-à-vis de 23 pays. Les dispositions communautaires dans le domaine de la coordination des systèmes de sécurité sociale ne visent pas à harmoniser mais à coordonner les systèmes de sécurité sociale des États membres. Dans la mesure où ces règlements sont directement applicables dans tout État membre de l'UE, il n'est pas nécessaire que la Croatie modifie sa législation en matière de sécurité sociale. Seules des modifications techniques devront être apportées pour tenir compte des particularités du système de sécurité sociale croate.

Le Fonds national d'assurance maladie, le Fonds national d'assurance pension et le Bureau national pour l'emploi sont les structures administratives qui seraient chargées d'appliquer les dispositions communautaires dans ce domaine. La mise en oeuvre des règlements de coordination aura certaines implications financières pour la Croatie, notamment dans le secteur des pensions et des soins de santé.

Conclusion

De façon générale, dans le domaine de la libre circulation des personnes, la Croatie doit fournir des efforts considérables et soutenus pour aligner sa législation sur l'acquis et pour la mettre en oeuvre et l'appliquer de manière effective à moyen terme. Elle devra notamment veiller à assurer l'alignement complet sur l'acquis et une capacité administrative adéquate dans le domaine de la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles. Une attention particulière doit aussi être accordée aux exigences découlant de l'acquis dans le domaine des droits des citoyens (notamment les droits de séjour et de vote et la non-discrimination en matière d'accès à l'enseignement supérieur) et de la libre circulation des travailleurs (à savoir la non-discrimination à l'égard des travailleurs migrants de l'UE).

Chapitre 3 - Libre prestation de services

Dans ce domaine, les États membres doivent veiller à ce que leur législation nationale n'entrave pas le droit de s'établir où que ce soit dans l'Union européenne et d'y exercer la libre prestation de services. Dans certains secteurs, l'acquis prescrit des règles harmonisées à respecter pour que le marché intérieur puisse fonctionner. Celles-ci concernent principalement le secteur financier (banque, assurance, services d'investissement et marchés de valeurs mobilières), mais aussi certaines professions (artisans, commerçants, agriculteurs, agents commerciaux). Il existe également des règles harmonisées à respecter en ce qui concerne la protection des données à caractère personnel et certains services de la société de l'information.

L'accord de stabilisation et d'association prévoit la libéralisation progressive des prestations de services entre l'UE et la Croatie.

En ce qui concerne le droit d'établissement, le cadre réglementaire croate doit être adapté pour garantir que les obstacles qui subsistent encore pour les personnes physiques et morales de l'Union européenne seront supprimés. La législation croate concernant les titres exige, par exemple, que toute société établie en Croatie qui a plus que 100 actionnaires et un capital social de plus de 30 millions de HRK (4 millions d'euros) soit cotée en bourse. Cette exigence constitue un obstacle à l'établissement d'opérateurs de l'Union européenne.

En ce qui concerne les dispositions directement applicables du traité CE garantissant la libre prestation de services, la Croatie devra lever les obstacles à la prestation transfrontalière de services par des entreprises de l'Union européenne. La loi croate ne fait pas de distinction entre les opérateurs établis dans un État membre de l'UE qui fournissent des services sur le territoire de la Croatie sur une base temporaire et ceux qui assurent ces prestations par l'intermédiaire d'un établissement stable. Actuellement, les prestataires de services de l'UE ne peuvent pas exercer d'activité économique en Croatie sans y établir une succursale ou une filiale. En outre, la législation de la Croatie contient un certain nombre d'exigences qui peuvent constituer des obstacles à la prestation des services à titre occasionnel ou temporaire, par exemple la nécessité de fournir des traductions certifiées conformes de documents, d'obtenir une licence d'artisan et d'être soit directeur soit représentant habilité.

En ce qui concerne les services financiers, il y a eu une consolidation progressive du secteur bancaire croate et une augmentation régulière du nombre de filiales d'établissements de crédit de l'Union. Le principal texte de loi régissant le secteur bancaire est la loi bancaire, qui constitue une bonne base pour l'harmonisation mais ne couvre pas tous les aspects de l'acquis communautaire en la matière. La loi dispose qu'après l'adhésion de la Croatie à l'Union européenne, les banques qui sont autorisées à fournir des services bancaires et d'autres services financiers dans un État membre de l'UE peuvent également fournir ces services en Croatie, directement ou par l'intermédiaire d'une succursale. D'autres actes établissent des règles comptables pour les établissements de crédit et la Croatie applique un système de garantie des dépôts. De nouvelles règles sur l'adéquation des fonds propres des banques et des sociétés d'investissement sont entrées en vigueur en janvier 2004. Il n'y a pas de législation spécifique sur les conglomérats, les établissements de monnaie électronique (seules les banques sont autorisées à émettre de la monnaie électronique) et la liquidation des établissements de crédit. En dehors de cela, les divergences entre la législation croate et l'acquis régissant le secteur bancaire semblent être principalement d'ordre technique et concernent des questions telles que la coopération entre les organismes de surveillance, l'échange d'informations entre autorités compétentes croates, les exigences minimales de fonds propres et l'adaptation ou l'introduction de quelques définitions juridiques dans le droit national de la Croatie.

La banque nationale est l'autorité compétente en matière d'agrément et de surveillance des établissements de crédit. Ses compétences sont définies dans la loi sur la Banque centrale croate (HNB) et la loi bancaire. Le département de surveillance bancaire de la Banque centrale croate assure la supervision bancaire et occupe 75 personnes. Il y a un programme de formation professionnelle permanente. Les prérogatives de la banque centrale en matière de surveillance semblent être largement conformes aux normes internationales selon une évaluation du FMI effectuée mi-2002.

Les coopératives d'épargne et de prêt sont agréées et supervisées par le service de surveillance des établissements financiers du ministère des finances conformément à la loi sur les coopératives d'épargne et de prêt. Si ces coopératives sont couvertes par la définition des établissements de crédit proposée par les directives bancaires, cela peut poser des problèmes d'indépendance et de compétences des autorités de surveillance.

Le marché des assurances est fortement concentré en Croatie. Il est dominé par les assurances non vie qui représentent environ 80 % des primes brutes souscrites; la catégorie de loin la plus importante est l'assurance responsabilité civile pour les véhicules à moteur (près d'un tiers du revenu des primes). Sur le marché croate des assurances, la part des sociétés sous contrôle étranger n'excède pas 25 %, bien que leur part dans les assurances vie soit supérieure à 50 %. Les principaux actes régissant le système d'assurance sont la loi sur les assurances et la loi sur la médiation et la représentation en matière d'assurances. La loi sur les assurances est partiellement harmonisée avec les directives communautaires régissant les assurances vie, non vie et automobile. D'importants efforts supplémentaires seront cependant nécessaires pour parvenir à un alignement complet sur l'acquis.

En ce qui concerne les structures administratives, les bases du système de surveillance sont en place mais, comme le montre l'évaluation du FMI de mi-2002, il y a lieu d'en renforcer l'organisation et les ressources pour permettre à l'autorité de surveillance d'assumer efficacement ses fonctions. La direction pour la surveillance des compagnies d'assurance et le bureau croate des assurances ont été institués sur la base de la loi sur les assurances. La direction, qui emploie actuellement une quinzaine de personnes (aucun actuaire cependant), effectue la surveillance afin de protéger les intérêts des preneurs d'assurance. Elle délivre des agréments et approuve les statuts et actes constitutionnels et les nominations aux conseils d'administration. Elle définit également les normes de gestion financière des sociétés et établit les types d'assurance et de groupes de risques. Le fonctionnement de la direction ne donne pas satisfaction à ce jour et une réorganisation est envisagée. Le bureau croate d'assurance représente des compagnies d'assurance auprès des institutions internationales, protège les victimes d'accidents de la route et traite les sinistres survenus à l'étranger. Il gère également le fonds de garantie pour l'indemnisation de certains dommages dans le domaine de l'assurance obligatoire. Le bureau semble fonctionner d'une manière satisfaisante.

Les marchés de valeurs mobilières sont encore sous-développés en Croatie. Bien qu'il y ait deux bourses des valeurs, les marchés financiers ne sont ni très actifs ni dotés d'une abondance de liquidités et la capitalisation boursière équivalait à quelque 30 % du PIB à la fin de 2002. Le cadre législatif de la Croatie régissant les marchés de valeurs mobilières et les entreprises d'investissements collectifs constitue la base pour l'alignement nécessaire sur l'acquis. Les principaux actes juridiques sont la loi sur le marché des valeurs mobilières et la loi sur les fonds d'investissement. Il n'a cependant pas encore été créé de système d'indemnités pour perte d'investissement.

En ce qui concerne les structures administratives, la commission croate des valeurs mobilières (CROSEC) a été mise en place en 1996 et est devenue opérationnelle vers la fin de 2002, avec la nomination de tous ses membres et l'adoption de son statut par le gouvernement croate. Elle emploie 27 personnes. En août 2002, le FMI a considéré qu'il était nécessaire de renforcer les pouvoirs de la CROSEC et de clarifier ses procédures. Bien que certains progrès aient été accomplis depuis lors, des efforts supplémentaires restent à faire pour renforcer sa capacité de surveillance.

En ce qui concerne la surveillance des conglomérats financiers, la coopération entre les autorités de surveillance croates n'a pas encore été officialisée. Un programme de surveillance des établissements financiers et des marchés financiers sur une base consolidée a, en revanche, été adopté par le Parlement. Sur cette base, la création d'un comité de coordination avec les représentants des organismes de surveillance sectoriels est prévue.

Une loi sur la protection des données à caractère personnel et la libre circulation de telles données a été adoptée en 2003 et semble être largement conforme aux principales dispositions de l'acquis. La législation comprend des exigences visant à assurer un niveau adéquat de protection pour le transfert de données à caractère personnel vers des pays tiers, mais ne prévoit pas les dérogations prévues dans la directive concernant la protection des données personnelles. La création d'une agence pour la protection des données à caractère personnel, dont le chef doit être désigné par le Parlement, est prévue mais elle n'a pas encore été créée.

En ce qui concerne les services de la société de l'information, la Croatie a adopté la loi sur le commerce électronique, qui transpose partiellement l'acquis. Elle devra se doter des moyens adéquats de surveillance dans ce domaine et désigner un point de contact chargé de la coopération avec les autorités dans d'autres États membres de l'UE. Elle devrait également prendre des mesures pour interdire la production, la fabrication, la vente et la distribution de cartes à puces pirates et d'autres dispositifs permettant de contourner les systèmes de protection par cryptage de services à accès conditionnel, ainsi que pour garantir l'application de sanctions adéquates.

Conclusion

De façon générale, les obstacles à la création ou à la prestation de services transfrontaliers par des personnes physiques ou morales de l'UE doivent être supprimés. La Croatie a déployé des efforts considérables pour rapprocher le cadre juridique et le dispositif de surveillance des normes de l'UE dans le domaine des services financiers. À cet égard, le secteur bancaire semble avoir bien progressé mais des améliorations sont encore nécessaires. Le cadre réglementaire et administratif dans les secteurs de l'assurance, des services d'investissement et des marchés de valeurs mobilières doit être développé et aligné sur l'acquis.

Dans l'ensemble, la Croatie devra encore fournir des efforts considérables pour renforcer le cadre juridique et le dispositif de surveillance, y compris des services financiers, afin d'aligner sa législation sur l'acquis dans ce domaine et pour la mettre en oeuvre et l'appliquer de façon effective à moyen terme.

Chapitre 4 - Libre circulation des capitaux

Les États membres sont tenus d'éliminer toutes les restrictions nationales appliquées à la circulation des capitaux entre eux, mais aussi avec les pays tiers (à quelques exceptions près), et d'adopter les règles communautaires garantissant le bon fonctionnement des systèmes de virement transfrontalier et de transfert de capitaux, quelle que soit la forme de ces derniers. L'acquis comprend également des règles harmonisées en matière de systèmes de paiement. Les directives relatives au blanchiment de capitaux érigent le blanchiment de capitaux en infraction pénale. Elles exigent des établissements financiers qu'ils s'informent sur leurs clients, conservent une documentation appropriée et informent les autorités de tout soupçon de blanchiment de capitaux. Les directives portent également sur les activités des comptables, des commissaires aux comptes, des notaires et autres membres des professions juridiques indépendantes, des gérants, propriétaires et directeurs de casinos, des agents immobiliers et de certains marchands d'articles de grande valeur lors de transactions importantes effectuées en espèces. Il y a lieu de mettre en place une capacité d'exécution adéquate.

L'accord de stabilisation et d'association prévoit un calendrier pour la libéralisation des capitaux dans les années qui suivent sa ratification. Il prévoit également la libéralisation progressive du marché immobilier.

En ce qui concerne les mouvements de capitaux et les paiements, la Croatie est membre du FMI depuis 1992 et a instauré la pleine convertibilité des opérations relevant de la balance courante en 1995. Au cours de la période 1998-2001, les investissements directs étrangers ont dépassé les 5 milliards d'euros, dont 55 % en provenance de l'Union européenne. Ces dernières années, les résidents croates ont également commencé à investir à l'étranger. Approximativement 90 % des actifs du secteur bancaire sont détenus par des sociétés étrangères.

La loi sur le marché des changes, en vigueur depuis juin 2003, aligne les définitions sur l'acquis et fournit le cadre d'une libéralisation progressive des capitaux. Il n'y a pas de restriction aux investissements directs de non-résidents en Croatie, sauf dispositions contraires prévues par des lois spéciales. Ces lois sectorielles portent sur un intérêt public (par exemple les stupéfiants, le pluralisme des médias), l'exercice de l'autorité publique (par exemple les notaires publics) ou des secteurs actuellement régis par des accords bilatéraux (par exemple les transports et la pêche) et doivent être alignées avant l'adhésion. L'investissement intérieur de non-résidents et de ressortissants étrangers dans des biens immobiliers est soumis à des restrictions et est également entravé par les graves faiblesses du système d'enregistrement foncier de la Croatie.

L'alignement sur l'acquis s'impose également dans les domaines des règles d'investissement applicables aux investisseurs institutionnels (par exemple les caisses de retraite et les coopératives d'épargne et de prêt), des droits spéciaux de l'État dans les entreprises privatisées (télécommunications, pétrole et électricité), ainsi que des dispositions spécifiques régissant les risques externes supportés par le système financier et l'élimination des restrictions qui subsistaient à la libre circulation des capitaux à court terme.

En ce qui concerne les systèmes de paiement, le cadre juridique croate concernant les virements transfrontaliers repose sur la loi sur le marché des changes et doit être davantage aligné sur l'acquis. Par exemple, les établissements financiers devraient être tenus d'informer leurs clients des conditions applicables aux virements transfrontaliers et une compensation spéciale devrait être introduite en cas de défaillance dans les virements. En outre, le système de recours prévu (arbitrage et conciliation devant la Cour permanente d'arbitrage et le centre de conciliation à la chambre de commerce croate) s'avère être une procédure excessivement lourde.

La Croatie a mis en place ces dernières années le cadre de lutte contre le blanchiment de capitaux. Elle participe aux travaux du Comité restreint d'experts sur l'évaluation des mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux (comité Moneyval du Conseil de l'Europe), qui agit en tant qu'organe régional assimilé au Groupe d'action financière sur le blanchiment des capitaux (GAFI). En juillet 2003, le comité Moneyval a adopté le deuxième rapport d'évaluation de la Croatie. L'alignement sur les recommandations du rapport revêt une importance capitale.

Le code pénal érige en infraction pénale le blanchiment de capitaux, il adopte une approche englobant toutes les infractions («all-crimes» approach) et couvre également la négligence grave, la responsabilité pénale des personnes morales et l'auto-blanchiment. L'infraction de blanchiment de capitaux repose néanmoins sur l'attestation effective du fait que l'argent ou la propriété est le produit d'un crime ou d'un délit. La loi de 1997 sur la prévention du blanchiment de capitaux a été récemment révisée et les modifications sont entrées en vigueur en janvier 2004. La loi comprend l'obligation de s'informer sur les clients, d'informer l'Office national pour la prévention du blanchiment des capitaux (le service de renseignement financier croate au sein du ministère des finances) de tout soupçon de blanchiment de capitaux et de transactions en espèces dépassant un certain seuil, et de conserver une documentation appropriée. La liste des entités soumises à des mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux est complète.

La législation doit être alignée davantage sur la deuxième directive de l'Union européenne concernant le blanchiment des capitaux. Par exemple, l'obligation de s'informer sur les clients présente quelques lacunes telles que la situation des relations commerciales non permanentes et des transactions ponctuelles, l'identification des personnes agissant au nom de personnes morales ainsi que l'exemption sur les retraits de comptes d'épargne. En outre, les autorités de surveillance doivent également être tenues de signaler tout soupçon de blanchiment de capitaux. L'Office national pour la prévention du blanchiment des capitaux peut demander des informations complémentaires à la suite de rapports faisant état de transactions suspectes, mais il n'est pas clairement indiqué pourquoi les institutions déclarantes peuvent refuser de répondre à ces demandes. Les sanctions sont de nature administrative et s'avèrent plutôt légères.

Les comptes numérotés et les livrets au porteur sont autorisés pour les résidents, mais l'identification du client est exigée. La nouvelle loi relative aux valeurs mobilières n'autorise plus les titres au porteur.

En ce qui concerne la capacité administrative, l'efficacité du système doit être renforcée, y compris les ressources de l'Office national pour la prévention du blanchiment des capitaux. Seules les banques bénéficient d'un retour d'information. Les procédures internes, la formation du personnel et la sensibilisation au blanchiment de capitaux des institutions déclarantes, des autorités de surveillance et des services répressifs doivent être améliorées, notamment par la création de la base juridique adéquate. En outre, la surveillance de la conformité avec la législation relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux dans les secteurs bancaires et non bancaires et les orientations à leur intention devraient être renforcées afin de garantir une meilleure adéquation des mandats, des pouvoirs, des moyens, de la coopération avec d'autres organismes ainsi qu'une conformité réelle avec la législation. En raison des insuffisances du système, les résultats en termes de condamnations et de confiscations sont à ce jour limités. (Voir également le chapitre 24 - Coopération en matière de justice et affaires intérieures).

Conclusion

D'une manière générale, la Croatie devra poursuivre ses efforts pour aligner sa législation sur l'acquis et pour le mettre en oeuvre et l'appliquer effectivement à moyen terme dans le domaine des mouvements de capitaux, des paiements et des systèmes de paiement. La Croatie doit achever la mise en place de son système de lutte contre le blanchiment de capitaux. Si des ressources suffisantes sont fournies pour appliquer la loi et si l'on parvient à pallier les faiblesses connues du système, il devrait être possible d'élaborer à moyen terme un système efficace de lutte contre le blanchiment de capitaux.

Chapitre 5 - Droit des sociétés

Dans ce domaine, les États membres doivent adopter et appliquer les normes harmonisées nécessaires au bon fonctionnement des entreprises sur le marché intérieur. Cinq domaines législatifs sont concernés: le droit des sociétés au sens strict, le droit comptable, les droits de propriété intellectuelle, les droits de propriété industrielle et la reconnaissance et l'exécution tant des décisions de justice en matière civile et commerciale que des obligations contractuelles.

L'accord de stabilisation et d'association et l'accord intérimaire sur le commerce et les mesures d'accompagnement prévoient l'obligation pour la Croatie de garantir au plus tard trois ans après l'entrée en vigueur de l'accord intérimaire (c'est-à-dire d'ici mars 2005) une protection des droits de propriété intellectuelle, industrielle et commerciale d'un niveau comparable au niveau atteint dans la Communauté, en l'assortissant de moyens réels pour les faire appliquer. Cette obligation couvre notamment la protection des droits d'auteur, y compris de logiciels, et des droits voisins, des droits relatifs aux bases de données, brevets, dessins et modèles, marques de commerce et de service, topographies de circuits intégrés, indications géographiques, y compris des appellations d'origine, ainsi que la protection contre la concurrence déloyale visée à l'article 10 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle et la protection des informations non divulguées en matière de savoir-faire.

Le cadre légal de la Croatie dans le domaine du droit des sociétés a été établi par la loi sur les sociétés de 1993 qui a récemment subi d'importantes modifications entrées en vigueur en janvier 2004. La loi fixe des minima en matière de fonds propres et contient des clauses de sauvegarde relatives à la protection du capital social. Les sociétés sont soumises à diverses obligations en matière de protection des créanciers et le droit à l'information est l'un des droits fondamentaux des actionnaires; elles sont également tenues de rendre publiques les informations relatives aux grandes décisions les concernant. Dans l'ensemble, ce cadre juridique constitue une base solide pour la poursuite de l'alignement sur l'acquis dans le domaine du droit des sociétés. Une loi régissant les procédures de reprise de sociétés anonymes est en place depuis 2002.

En ce qui concerne les structures administratives, les informations sur les sociétés sont tenues dans les registres des tribunaux de commerce. Les états financiers sont tenus séparément dans les registres de l'agence financière. On ne voit pas clairement dans quelle mesure ces deux registres sont liés. Les tribunaux de commerce publient des informations sur les sociétés dans le Journal officiel et dans un quotidien. Les registres sont accessibles au public et les droits de consultation servent uniquement à couvrir les coûts. Le temps requis pour enregistrer une société varie d'un tribunal de commerce à l'autre et peut aller de quelques jours à trois semaines (des retards supplémentaires pour les entreprises en phase de démarrage sont liés à l'enregistrement dans les administrations des douanes, des impôts et des statistiques, ce qui peut prendre jusqu'à quatre mois; voir également le chapitre 16 - Petites et moyennes entreprises).

La comptabilité est réglementée par la loi sur la comptabilité de 1992. Le conseil croate des normes comptables est l'organisme de normalisation compétent. La loi prévoit des sanctions en cas de non-respect des exigences en matière d'information financière. Une nouvelle loi sur la comptabilité est sur la table du Parlement, elle prévoit la mise en place d'un Conseil d'information financière doté d'un pouvoir réglementaire. La Croatie a déjà pris des mesures en vue de la transition vers une comptabilité basée sur les normes comptables internationales (IAS). Il convient cependant de veiller davantage à une parfaite conformité avec les normes comptables internationales et à leur application correcte.

En matière d'audit, il existe une loi sur l'audit qui dispose que le ministère des Finances a le pouvoir d'agréer les sociétés d'audit. Le gouvernement croate a adopté un plan pour se conformer à toutes les exigences de l'acquis en la matière.

Dans le domaine des droits de propriété intellectuelle et industrielle, la Croatie a adhéré à l'accord ADPIC de l'OMC et aux principales conventions internationales dans ce domaine, y compris le traité de l'OMPI sur le droit d'auteur et le traité de l'OMPI sur les interprétations et exécutions et sur les phonogrammes. La législation croate prévoit un régime frontalier spécifique en ce qui concerne les droits de propriété intellectuelle et industrielle. Leur application effective, y compris en matière de lutte contre le piratage et la contrefaçon, reste cependant un défi capital pour la Croatie. Elle doit veiller à doter ses services de police de ressources et de compétences suffisantes et à améliorer l'efficacité de son appareil judiciaire. En ce qui concerne les structures administratives, l'ancien Bureau national de la propriété intellectuelle employait 88 personnes et ses effectifs sont largement insuffisants dans certains domaines où un renforcement rapide s'impose. En janvier 2004, le Bureau national de la propriété intellectuelle a été fusionné avec l'ancien Bureau national pour la normalisation et la métrologie et est devenu le Bureau national pour la propriété intellectuelle, la normalisation et la métrologie.

Le cadre juridique croate en matière de droits de propriété intellectuelle a fait l'objet d'une réforme approfondie en 2003 avec l'adoption de la nouvelle loi sur les droits d'auteur et les droits voisins. Cette loi constitue un texte juridique complet couvrant le champ d'application de la protection, y compris les droits et les exceptions, les dispositions sur la protection des mesures techniques, le droit des contrats applicable au droit d'auteur, les sociétés de gestion collective ainsi que l'application effective des droits et le droit de suite des artistes. Elle aligne largement la législation croate dans le domaine des droits d'auteur et des droits voisins sur l'acquis mais certaines modifications seront nécessaires pour parvenir à un alignement complet. Les instruments juridiques indispensables à la lutte contre le piratage et la contrefaçon sont en place mais il convient de veiller à une application adéquate. En ce qui concerne les structures administratives, l'effectif du service des droits d'auteur du Bureau national de la propriété intellectuelle ne compte qu'une personne à la mi-2003 et doit être renforcé.

En ce qui concerne les droits de propriété industrielle aussi, le cadre juridique croate a fait l'objet d'un réexamen complet en 2003 avec l'adoption d'une nouvelle loi sur les brevets, d'une nouvelle loi sur les dessins industriels, d'une nouvelle loi sur les marques, d'une nouvelle loi sur les indications géographiques et les appellations d'origine des produits et des services et d'une nouvelle loi sur la protection des topographies des produits semi-conducteurs. En outre, l'Organisation européenne des brevets et la Croatie ont récemment signé un accord d'extension concernant les demandes de brevets européens. Selon cet accord, les brevets européens peuvent être étendus à la Croatie à condition qu'à la date du dépôt, une extension soit dûment demandée. Tandis que la législation croate semble être largement conforme à l'acquis, des modifications supplémentaires seront nécessaires pour parvenir à un alignement complet. En ce qui concerne les structures administratives, les effectifs de la section des experts techniques du département des brevets du Bureau national de la propriété intellectuelle devraient être renforcés et un programme de formation devrait être mis en place en priorité. Le traitement des demandes de brevets enregistre un arriéré important et qui ne cesse de croître en raison de la complexité et de la lourdeur des procédures, qui devraient être simplifiées.

Conclusion

Dans les domaines du droit des sociétés et de la comptabilité, la Croatie a consenti en ce qui concerne le rapprochement des législations des efforts qui doivent être poursuivis. La totale transparence des registres de commerce devrait être assurée et la durée des procédures d'enregistrement, parfois longues, réduite. Il y a également lieu de renforcer l'application effective des normes comptables et des normes d'audit.

Dans le domaine des droits de propriété intellectuelle et industrielle, la Croatie a pris d'importantes mesures législatives en 2003. L'alignement sur l'acquis demande à être poursuivi. La Croatie doit également prêter l'attention requise au respect de l'échéance fixée dans l'accord intérimaire. En outre, les procédures de mise en oeuvre et les structures administratives pertinentes doivent être renforcées afin d'assurer une application effective de la législation. Une attention particulière doit être également consacrée à la lutte contre le piratage et la contrefaçon, notamment grâce à des services de police disposant d'effectifs suffisants et à un appareil judiciaire efficace.

La Croatie a pris plusieurs mesures importantes pour aligner son cadre législatif sur l'acquis mais elle doit poursuivre cet alignement et renforcer ses capacités administratives dans le domaine des droits de propriété intellectuelle et industrielle. Dans l'ensemble, la Croatie doit poursuivre ses efforts pour aligner sur l'acquis sa législation en matière de droit des sociétés et pour la mettre en oeuvre et l'appliquer effectivement à moyen terme.

Chapitre 6 - Politique de concurrence

L'acquis en matière de concurrence couvre les politiques relatives aux ententes et au contrôle des aides d'État. Il est constitué de règles et de procédures visant à lutter contre les comportements anticoncurrentiels des entreprises (accords restrictifs entre entreprises et abus de position dominante) et à empêcher les pouvoirs publics d'accorder des aides d'État qui faussent la concurrence sur le marché intérieur. En règle générale, les règles de la concurrence sont directement applicables dans l'ensemble de l'Union et les États membres doivent pleinement coopérer avec la Commission pour les faire respecter.

L'accord de stabilisation et d'association/accord intérimaire sur le commerce et les mesures d'accompagnement prévoit l'application, dans les relations commerciales entre la Communauté et la Croatie, d'un régime de concurrence basé sur les critères des articles 81 et 82 (accords entre entreprises et abus de position dominante), de l'article 86 (entreprises publiques et entreprises bénéficiant de droits spéciaux ou exclusifs) et de l'article 87 (aides d'État) du traité CE. Il stipule également qu'un organisme public indépendant du point de vue de son fonctionnement doit être doté des pouvoirs nécessaires à l'application intégrale de ce régime de concurrence. L'accord intérimaire prévoit, en outre, l'application de règles relatives aux aides d'État propres au secteur sidérurgique, y compris l'obligation pour la Croatie de présenter à la Commission un programme de restructuration et de reconversion de son industrie sidérurgique.

En matière de lutte contre les ententes, le cadre législatif en Croatie est constitué de la loi sur la concurrence adoptée en juin 2003 et en vigueur depuis octobre de la même année. Cette loi, qui a remplacé celle de 1995, reprend les grands principes des règles communautaires sur les ententes. Elle porte, notamment, sur l'interdiction des ententes restrictives et sur l'abus de position dominante. Il demeure que certains aspects de la loi croate sur la concurrence, tels que la procédure pour la nullité automatique des ententes restrictives, doivent encore être modifiés pour être en parfaite conformité avec l'acquis. Les conditions régissant l'octroi de dérogations à l'interdiction des ententes restrictives doivent également être entièrement alignées sur les conditions cumulatives de l'article 81 du traité CE. Il existe, de surcroît, un risque d'interférence entre la loi croate de procédure administrative générale et la loi croate sur la concurrence. Afin de garantir l'entière indépendance de l'agence pour la protection de la concurrence sur les marchés, il importe de veiller à ce qu'aucune décision d'annulation extraordinaire ne puisse être prise, sur la base de la loi administrative générale croate, à l'encontre d'une décision de l'agence pour la protection de la concurrence sur les marchés.

En ce qui concerne les capacités administratives, l'agence pour la protection de la concurrence sur les marchés est chargée de mettre en oeuvre la loi croate sur la concurrence. Cette agence a été créée en 1995. D'après la loi sur la concurrence, l'agence est une entité indépendante exerçant ses activités de façon autonome. En septembre et octobre 2003, le président et les quatre autres membres du comité pour la concurrence sur les marchés, l'organe de gestion et de décision de l'agence, ont été nommés. L'agence emploie actuellement 28 personnes, dont les cinq membres du comité. Il reste à connaître l'état d'avancement réel de la capacité administrative de l'agence pour la protection de la concurrence sur les marchés.

Le cadre juridique n'étant entré en vigueur que récemment, il n'y a pas encore suffisamment d'informations sur le bilan de l'agence en matière d'application de la législation. Dans un proche avenir, le défi le plus important pour l'agence consistera à garantir la mise en oeuvre et l'application effectives des règles sur les ententes par les entreprises, de sorte que celles-ci puissent s'habituer à un environnement concurrentiel semblable à celui de la Communauté bien avant l'adhésion finale. Cela nécessite également un système judiciaire fiable, qui soit en mesure de traiter efficacement les procédures d'appel à l'encontre des décisions de l'agence et de rendre des décisions conformes à l'acquis communautaire. L'administration publique et les acteurs économiques compétents devront, en outre, avoir une connaissance suffisante de la législation et de la politique en matière de concurrence.

Dans le domaine des aides d'État, il n'existait aucun cadre juridique complet en Croatie jusqu'en 2003. Cette année là, la Croatie a pris d'importantes mesures dans ce sens en adoptant la loi sur les aides d'État et le règlement sur les aides d'État, respectivement entrés en vigueur en avril et juillet 2003. Néanmoins, il reste à voir si, dans la pratique, ce cadre donne suffisamment de pouvoirs à l'autorité de contrôle pour lui permettre d'exercer un contrôle exhaustif et approprié de tous les systèmes d'aide nouveaux et anciens, en conformité avec l'acquis communautaire.

Afin de se conformer pleinement à l'acquis de l'Union européenne en matière d'aides d'État, l'agence pour la protection de la concurrence sur les marchés, en sa qualité d'instance de contrôle des aides d'État, doit pouvoir autoriser des régimes d'aide généraux et non se contenter d'émettre un avis. Certaines modifications supplémentaires de la législation croate sur les aides d'État seront nécessaires. Il convient, notamment, de modifier d'urgence l'article 4, paragraphe 3, point d), de la loi croate sur les aides d'État, de sorte que les aides d'État visant à faciliter le développement de certaines activités économiques ou de certains secteurs économiques puissent être jugées compatibles. Cette disposition ne devrait être appliquée que dans des circonstances très particulières (voire exceptionnelles). Plus généralement, il semble que la Croatie n'ait guère pris conscience du fait que ses régimes d'aide se situent au-delà de l'aide budgétaire directe, notamment en ce qui concerne l'aide fiscale. Dans ce contexte, il reste à déterminer si la loi sur les zones d'intérêt national particulier, la loi sur les zones franches et la loi de promotion des investissements sont compatibles avec l'acquis.

Pour ce qui est des capacités administratives, l'agence pour la protection de la concurrence sur les marchés s'est vu confier, en plus de ses compétences en matière d'entente, la responsabilité de la mise en oeuvre de la loi sur les aides d'État et de la rédaction des arrêtés nécessaires. Il conviendra de lui allouer les ressources administratives supplémentaires nécessaires à cette fin. Des règles de procédure doivent être mises en place, afin de permettre à l'autorité nationale de contrôle des aides d'État d'être informée par les instances octroyant l'aide de toutes les propositions de projets d'aide, d'obtenir d'elles tous les renseignements nécessaires et d'exprimer son avis avant l'octroi de l'aide proposée (clause de statu quo).

En sa qualité d'autorité chargée du contrôle des aides d'État, l'agence aura pour défi de dresser au plus tôt un bilan crédible de mise en oeuvre de la législation. À ce stade, le cadre juridique et la structure administrative sont trop récents pour tirer des conclusions en la matière. Les données fiables sur l'utilisation des aides d'État dans l'économie croate sont trop peu nombreuses et la transparence est faible. Il n'existe pas, à l'heure actuelle, d'inventaire fiable des aides d'État. En vertu de l'article 35 de l'accord intérimaire, la Croatie est tenue de fournir à la Commission un inventaire complet des aides d'État, ainsi qu'un rapport régulier annuel sur les aides d'État. L'inventaire des aides d'État est fondamental et l'agence pour la protection de la concurrence sur les marchés doit s'assurer au plus tôt que toutes les mesures s'y rapportant sont bien couvertes et qu'elles ont fait l'objet d'une évaluation permettant d'établir leur compatibilité avec le marché commun, en vertu de l'article 87 du traité CE.

En ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises bénéficiant de droits spéciaux ou exclusifs chargées de la gestion de services publics, la loi croate sur la concurrence leur est pleinement applicable, conformément à l'article 86 du traité CE.

En ce qui concerne les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général, la loi croate sur la concurrence a repris la formulation de l'article 86, paragraphe 2, du traité CE, sauf pour ce qui est du critère de proportionnalité, ce qui laisse une trop grande liberté d'action aux entreprises gérant des services d'intérêt général. Par conséquent, en l'absence de limitation, le risque existe de voir ces entreprises se soustraire entièrement au champ d'application de la loi sur la concurrence.

Enfin, en ce qui concerne la libéralisation de secteurs particuliers, il reste à découvrir l'incidence qu'aura la législation sectorielle spécifique sur la bonne application des règles générales de la concurrence dans les secteurs concernés (télécommunications, banque, énergie, pétrole et produits pétroliers, gaz). La libéralisation de secteurs spécifiques de l'économie est abordée dans les chapitres relatifs aux différents secteurs.

Conclusion

Le domaine de la lutte contre les ententes dispose désormais d'un cadre législatif de base. Le processus d'harmonisation avec l'acquis doit se poursuivre et l'agence pour la protection de la concurrence sur les marchés doit être renforcée. Parallèlement, l'agence devra s'employer à afficher un bilan crédible de mise en oeuvre de la législation.

En ce qui concerne les aides d'État, des mesures importantes ont été prises en 2003 en vue de créer le cadre juridique nécessaire, mais ce dernier doit encore être achevé. La Croatie devra renforcer la transparence de sa réglementation applicable aux aides d'État et y sensibiliser davantage les acteurs concernés. Elle devra aussi veiller au contrôle efficace des aides d'État, notamment en dotant l'agence de tous les pouvoirs nécessaires. Il est essentiel de développer les capacités administratives de l'agence pour la protection de la concurrence sur les marchés.

Dans l'ensemble, la Croatie devra faire des efforts considérables et soutenus pour aligner sur l'acquis sa législation en matière de concurrence, ainsi que pour la mettre en oeuvre et l'appliquer à moyen terme.

Chapitre 7 - Agriculture

Le chapitre relatif à l'agriculture couvre un grand nombre de règles contraignantes, dont beaucoup sont directement applicables. Le fonctionnement de la politique agricole commune repose sur les éléments essentiels que sont la bonne application de ces règles et l'efficacité de l'administration publique chargée d'en assurer le respect. Cela implique la mise en place de systèmes de gestion, tels que l'organisme payeur et le système intégré de gestion et de contrôle, ainsi que la capacité à mettre en oeuvre des actions de développement rural. L'adhésion à l'Union européenne rend nécessaire l'intégration dans les organisations communes de marchés de toute une série de produits agricoles, dont les cultures arables, le sucre, les produits animaux et les cultures spécialisées. Enfin, ce chapitre comporte des règles précises applicables dans le domaine vétérinaire, qui sont essentielles à la préservation de la santé des animaux et à la sécurité alimentaire sur le marché intérieur, ainsi que des dispositions détaillées applicables dans le domaine phytosanitaire, qui régissent notamment la qualité des semences, les produits phytopharmaceutiques et les organismes nuisibles.

L'accord de stabilisation et d'association/accord intérimaire réglemente le commerce préférentiel des produits agricoles.

La Croatie dote actuellement son agriculture de moyens lui permettant de faire face à la compétitivité de l'Union européenne et d'élaborer des conditions de travail et de vie appropriées dans les zones rurales. La Croatie a connu les différentes phases d'ajustement agricole par lesquelles sont passés d'autres pays d'Europe centrale et orientale. Après avoir connu une forte baisse au cours de la première moitié des années 1990, la production agricole s'est stabilisée, principalement dans le secteur de la production végétale. Les cultures de blé et de maïs couvrent 57 % des terres cultivables en Croatie. À l'instar d'autres économies en transition, la Croatie a assisté à la baisse rapide et continue de l'élevage en général et de la production bovine en particulier. Ce recul est la conséquence de la faiblesse et du rétrécissement des marchés, de la faible compétitivité des exploitations agricoles et du secteur de l'agroindustrie, ainsi que d'un accès limité aux capitaux. Malgré cette tendance à la baisse, l'importance économique de l'agriculture demeure relativement élevée, puisque sa valeur brute participe à hauteur de 10 % environ au PIB total. L'agriculture de la Croatie est dominée par les exploitations agricoles familiales. La taille moyenne des exploitations agricoles est de 2,8 ha. Environ 84,5 % des superficies cultivées et 94,3 % des vaches appartiennent à des exploitations agricoles privées. Environ 47,5 % des ménages ruraux exploitent moins d'un hectare de surfaces agricoles et environ 39,4 % d'entre eux, de 1 à 5 ha. L'agriculture de subsistance et de semi-subsistance est une caractéristique très importante de l'agriculture et des économies rurales en Croatie. Les efforts en vue d'augmenter la compétitivité du secteur agroalimentaire en Croatie dépendent donc principalement de la renaissance des économies rurales plutôt que de politiques agricoles axées sur le marché.

La structure changeante de la production agricole se retrouve au niveau des échanges agricoles. Les exportations agroalimentaires en 2002 ont représenté au total 487 millions d'euros, soit une hausse de 31 % par rapport à 1995. Sur la même période, les importations agroalimentaires totales ont augmenté de 37 %, atteignant 963 millions d'euros en 2002. Néanmoins, la part de l'agriculture dans le commerce total a diminué tout au long de la période 1995-2002, passant de 10,5 % à 9,4 % en ce qui concerne les exportations et de 12,3 % à 8,5 % en ce qui concerne les importations. La Croatie reste un importateur net de produits agricoles. En 2002, le commerce avec l'UE-25 a représenté 213 millions d'euros d'exportations et 725 millions d'euros d'importations. La balance commerciale avec l'UE-25 suit la tendance générale au déficit, affichant un solde négatif de 512 millions d'euros en 2002. Les principaux produits agricoles et agro-alimentaires exportés par la Croatie ont été le tabac et les produits du tabac, les préparations alimentaires diverses, le sucre et les sucreries, ainsi que les céréales. Les principaux produits agricoles et agro-alimentaires importés par la Croatie ont été les préparations alimentaires diverses, les boissons, les fruits et les noix, les animaux vivants et les produits laitiers. La Croatie est devenue membre de l'OMC en 2000 et s'est engagée à réduire progressivement ses obstacles aux échanges agricoles d'ici à 2005. Des accords de libre-échange existent avec la plupart des pays européens.

Le cadre juridique dans ce domaine comprend principalement la loi sur l'agriculture, la loi sur les terres agricoles, la loi sur la production écologique de produits agricoles et de denrées alimentaires et la loi sur les aides d'État dans l'agriculture, la sylviculture et la pêche. Plusieurs ordonnances gouvernementales réglementent des secteurs particuliers. Le gouvernement opère dans le cadre d'un programme national pour l'agriculture et les zones rurales et d'une stratégie de développement de l'agriculture et de la pêche adoptée par le Parlement.

En ce qui concerne les questions horizontales, les préparatifs en vue de la constitution d'un organisme payeur et d'un système intégré de gestion et de contrôle (SIGC) en sont encore à leurs balbutiements, bien que la Croatie envisage de les élaborer à partir des structures existantes, à savoir la direction du marché et des aides structurelles au sein du ministère de l'Agriculture, et d'un registre des exploitations agricoles relié à une base centrale de données informatisées. L'acquis relatif à l'organisme payeur et au SIGC, qui jouent un rôle capital au niveau du versement des fonds de la politique agricole commune aux agriculteurs, étant très exigeant, la planification et la préparation nécessiteront d'importants investissements et un renforcement des institutions bien avant l'adhésion. Les mécanismes d'échange de la Croatie sont limités à la gestion des contingents d'importation et des certificats d'importation/exportation et il n'existe pas de subventions à l'exportation. Outre les dispositions fondamentales de la loi sur les produits alimentaires, il n'existe aucune mesure spécifique en vigueur, en conformité avec la législation de l'Union européenne, concernant l'agriculture biologique et la politique de qualité. La Croatie devra également se doter d'un réseau d'information comptable agricole (RICA) en conformité avec l'acquis, les systèmes de comptabilité agricoles n'étant actuellement considérés que comme une mesure parmi d'autres pour le développement général des zones rurales.

En ce qui concerne les aides d'État, exception faite des subventions liées au marché et des mesures de développement rural, la Croatie a mis au point d'autres systèmes d'octroi d'aides aux agriculteurs: une exonération du droit d'accise sur le diesel européen pour les producteurs de céréales, d'oléagineux, de betteraves à sucre et de tabac; l'application d'un taux de TVA de 0 % à toutes les variétés de pain et de lait; une aide financière permettant de contracter une assurance contre les dommages causés aux récoltes; une aide compensatoire destinée à atténuer les conséquences des dommages causés par les catastrophes naturelles. La Croatie subventionne la production de lavande et d'herbes médicinales, ainsi que la mise en place de nouvelles plantations de lavande. Elle devra aligner toutes ses mesures d'aides d'État sur les dispositions de traité et sur les orientations adoptées dans ce domaine.

Cultures arables. En ce qui concerne la production agricole, la Croatie accorde des subventions à la production pour les cultures de céréales (blé, seigle, triticale et céréales fourragères) et d'oléagineux (tournesol, soja et colza), mais pas pour les protéagineux. Les subventions sont différentes pour les qualités panifiables et les céréales fourragères. La gestion et le contrôle de ce système divergent du système de l'Union européenne. Les procédures héritées de l'ancien système de gestion des subventions sont en cours d'harmonisation et des préparatifs sont en cours en vue de leur alignement sur le SIGC (système intégré de gestion et de contrôle). De plus, l'organisme de contrôle agricole fait actuellement l'objet d'une réorganisation. Le régime d'intervention croate doit introduire des normes de qualité minimales pour ses exigences de qualité internes (teneur en protéines, indices de Zélény et de Hagberg, etc.). La Croatie devrait également adapter la gestion du régime d'importation et d'exportation dans ce secteur, notamment par l'introduction de certificats d'importation/exportation et de restitutions à l'exportation. En ce qui concerne le sucre, la Croatie accorde des subventions liées aux superficies pour la production de betterave à sucre, au-delà d'un seuil minimal, qui ne sont pas compatibles avec l'acquis et applique des droits de douane et des contingents préférentiels. Il n'existe aucun mécanisme correspondant aux principaux instruments de gestion de l'organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (mesures de contrôle de la production, accords interprofessionnels, régime des prix d'intervention et système de communication). Le contrôle approprié de la preuve de l'origine pour le sucre exporté mérite une attention permanente. Les structures administratives nationales essentielles sont en place et pourraient servir de base à la création des instruments nécessaires. Elles auraient toutefois besoin d'être sensiblement renforcées pour être en mesure de gérer l'organisation commune des marchés pour le sucre.

Produits animaux. Dans le secteur du lait et des produits laitiers, la Croatie accorde une aide par litre de lait au-delà d'un seuil minimal, sur la base d'une teneur en graisse de 3,7 %. La subvention est plus élevée pour les régions défavorisées. À l'instar du système de l'Union européenne, la Croatie a des subventions à la production, un prix indicatif pour le lait, des droits de douane et des contingents tarifaires préférentiels. Toutefois, il n'existe actuellement aucun régime d'intervention ni aucune mesure de gestion des contingents et rien n'a été prévu à cet égard. La production laitière de la Croatie ne correspond qu'à 80 % de sa consommation annuelle de lait et de produits laitiers, la différence étant couverte par les importations. En ce qui concerne les boeufs et les veaux, la Croatie possède des régimes spécifiques pour l'engraissement du bétail, l'élevage de bétail et les vaches laitières. Des mesures commerciales sont également appliquées. Afin d'être en parfaite conformité avec l'acquis dans ce domaine, la Croatie devrait entamer des préparatifs en vue de la mise en place d'un système d'identification des animaux, d'un classement des carcasses de bovins et d'un système approprié de relevé des prix. Des subventions à la production au-delà d'un seuil minimal sont également accordées pour l'élevage de moutons et de chèvres. La subvention est plus élevée pour les régions défavorisées. À la différence du système applicable dans l'Union européenne, les animaux mâles font également l'objet de subventions. Aucune mesure d'intervention ou de stockage privé n'est appliquée. La Croatie devrait mettre au point un classement des carcasses approprié et un système de relevé des prix basé sur le poids des carcasses. Dans le secteur de la viande porcine, des subventions par tête sont accordées pour engraisser et élever des porcs, au-delà d'un seuil minimal. Elles ne sont pas en conformité avec la législation de l'Union européenne. Des droits de douane et des contingents préférentiels sont appliqués. Il semble que la méthode de classement des carcasses EUROP ait été mise en place, mais qu'elle ne soit encore liée à aucun système de relevé des prix opérationnel. Des dispositions appropriées devraient également être prises pour gérer les systèmes communautaires de stockage privé et de restitutions à l'exportation. En ce qui concerne les oeufs et la volaille, la Croatie accorde des subventions à la production au-delà d'un seuil minimal et applique des droits de douane et des contingents préférentiels. Des normes de commercialisation et des relevés de prix conformes aux dispositions de l'Union européenne restent encore à appliquer et devraient être mis en place dans la perspective de l'adhésion. Le centre de l'élevage croate a la responsabilité d'un certain nombre de fonctions dans le secteur des produits animaux.

Cultures spécialisées. Dans le domaine des fruits et légumes, la Croatie applique une subvention à la production à l'hectare annuelle et des paiements par versement unique pour la plantation de nouveaux vergers. Ces mesures ne sont pas en conformité avec l'acquis. Aucune subvention n'est accordée pour la transformation des fruits et légumes. La formation d'organisations de producteurs n'en est qu'à ses débuts et devrait être davantage encouragée. Une attention particulière devrait être accordée à l'alignement des normes de commercialisation croates sur les normes de l'Union européenne et à la création d'un organisme de contrôle de qualité. Il convient aussi de créer un système d'information sur les marchés. Dans le secteur viti-vinicole, la Croatie accorde des subventions à l'hectare pour la production de raisin et la plantation de nouveaux vignobles, ainsi que des subventions à versement unique pour le matériel de multiplication de la vigne. Ces mesures ne sont pas en conformité avec l'acquis. Il n'existe aucune restriction à la plantation de vignes en Croatie et aucune mesure de distillation n'y est appliquée. Aucune mesure d'intervention n'est appliquée dans le domaine de la production vinicole. Il existe des subventions pour l'huile d'olive applicables à la production d'olives, à la plantation d'oliveraies, au matériel de multiplication et à la production d'huile d'olive vierge. Seule la subvention à la production d'olives serait compatible avec les dispositions de l'Union européenne. La Croatie devrait élaborer un système informatisé d'information géographique en conformité avec l'acquis. La Croatie devrait, en outre, aligner sa législation sur les normes de commercialisation, les caractéristiques techniques de l'huile d'olive et les méthodes d'analyse appropriées. En ce qui concerne les fibres, la Croatie applique des droits de douane au lin et au chanvre. Il semble qu'elle ne soit pas en conformité avec d'autres dispositions de l'acquis dans ce domaine, notamment les conditions spécifiques s'appliquant aux importations de chanvre dans l'Union. En ce qui concerne le secteur des bananes, la Croatie pratique un système uniquement tarifaire, avec un taux de droit de la nation la plus favorisée actuel de 10 %. Ce système uniquement tarifaire est conforme au système applicable dans l'Union européenne depuis 2006, mais la Croatie devra également adopter les normes de qualité de l'Union. Des subventions à la production sont accordées aux producteurs de tabac. Un système de prix garantis est également en place, à la différence de l'Union européenne. Pour ce qui est des semences, la Croatie accorde une subvention basée en partie sur la production et en partie sur la superficie. Ce dernier type de subvention n'est pas en conformité avec l'acquis actuel. L'éventail des variétés de semences pouvant bénéficier d'une aide est également plus large que dans l'Union européenne. Une aide à la production est aussi accordée pour le houblon, assortie de subventions à la création de nouvelles plantations et aux matières végétales certifiées. La Croatie entend augmenter sa production dans ce domaine, tandis que l'Union européenne tente d'adapter la production à la demande du marché.

En ce qui concerne le développement rural, le modèle de développement proposé par la stratégie de développement de l'agriculture et de la pêche comprend trois programmes principaux portant sur: le développement des zones rurales, la conservation des races indigènes et protégées et les préparatifs de commercialisation des produits agricoles. Les documents correspondants témoignent de l'engagement de la Croatie vis-à-vis du développement rural, tant au niveau national que régional, le pays affichant des objectifs politiques semblables à ceux de l'Union européenne. Les activités en cours indiquent que la Croatie dispose déjà d'une capacité à élaborer et à mettre en oeuvre une politique de développement rural, ainsi que des dotations financières appropriées du budget national. Une définition nationale des régions défavorisées est déjà en vigueur. Ces préparatifs constitueront un bon point de départ pour le futur développement des programmes de développement rural, en conformité avec l'acquis. Des préparatifs complets seront néanmoins nécessaires pour adopter des mécanismes de mise en oeuvre compatibles avec l'Union européenne, notamment des organismes payeurs. Il conviendra également de renforcer la coopération entre tous les services concernés.

Dans les secteurs vétérinaire et phytosanitaire, la Croatie possède des services qui fonctionnent généralement bien et relèvent de la responsabilité du ministère de l'Agriculture.

Dans le domaine vétérinaire, les principales dispositions législatives sont la loi sur la médecine vétérinaire, la loi sur les médicaments vétérinaires et la loi sur le bien-être des animaux. Plusieurs ordonnances gouvernementales réglementent les questions propres à ce domaine. La Croatie applique déjà certains aspects fondamentaux de la législation de l'Union européenne. Un certain nombre de directives de base ont été partiellement transposées, mais doivent encore être mises entièrement en conformité avec l'acquis. Bien que des efforts aient été observés au niveau du traitement des encéphalopathies spongiformes transmissibles (EST) et des sous-produits animaux, la Croatie doit encore apporter la preuve qu'elle est non seulement capable d'aligner strictement sa législation sur l'acquis (notamment pour ce qui est des restrictions à l'importation relatives à l'EST et de la politique d'abattage en cas d'épidémie), mais aussi de la mettre en oeuvre et de contrôler son application. Les importantes restrictions à l'importation relatives à l'EST appliquées par la Croatie à l'ensemble des États membres moins trois ne sont pas justifiées sur le plan scientifique et constituent à ce titre une violation de l'accord intérimaire. En conséquence, la Croatie devrait aligner son régime d'importation d'animaux vivants et de produits à base de viande sur ses obligations internationales en matière sanitaire et phytosanitaire, ainsi que sur l'acquis de l'Union européenne.

Un système d'identification et d'enregistrement des animaux est actuellement mis en place et devrait être mis en conformité avec les normes de l'Union. Des systèmes élémentaires de lutte contre les maladies animales et de contrôle de la santé animale existent, mais ils doivent davantage tenir compte des exigences législatives et institutionnelles de l'Union européenne. Les principes fondamentaux de la législation de l'Union européenne en matière de bien-être des animaux ont été introduits dans la législation nationale. La Croatie devra déployer des efforts dans le domaine des mesures communes, car des pans importants de l'acquis ne sont pas encore transposés. Les capacités de contrôle des résidus devront être améliorées.

En ce qui concerne la santé publique dans les établissements agroalimentaires, seuls quelques sites satisfont aux critères de l'Union européenne en matière de structures et d'hygiène et sont actuellement habilités à exporter vers l'Union. Beaucoup d'établissements auront besoin d'investissements importants pour améliorer leurs équipements et devraient être soutenus dans cette tâche. La législation et les dispositions concernant l'alimentation animale doivent être entièrement révisées. Les autorités croates doivent faire des efforts significatifs pour mettre en conformité avec les exigences de l'Union européenne la gestion du régime national des contrôles vétérinaires, du régime des contrôles vétérinaires des importations en provenance de pays tiers et des règles d'importation, notamment en ce qui concerne la formation des inspecteurs et le matériel de laboratoire approprié.

Dans le secteur phytosanitaire, la législation a été partiellement mise en conformité avec l'acquis. Les principales dispositions législatives sont la loi sur la protection des végétaux et trois ordonnances portant sur: l'inspection phytosanitaire des végétaux et le contrôle de la protection des végétaux dans les transports transfrontières nationaux; les contrôles phytosanitaires obligatoires des cultures, des installations, des semences et du matériel de multiplication; les modalités et conditions d'entrée des semences agricoles et horticoles et du matériel de multiplication agricole dans les catalogues nationaux des différentes variétés. En ce qui concerne les organismes nuisibles, la Croatie doit introduire le concept des zones protégées dans sa législation, sans être pour autant tenue d'établir des zones protégées sur son propre territoire, et poursuivre ses travaux sur les directives de contrôle de l'Union européenne. La question des produits phytopharmaceutiques demande un surcroît d'attention et la réforme de l'administration correspondante devrait se conformer à l'acquis. Les capacités de contrôle des résidus doivent encore être développées. D'importantes directives de l'Union européenne dans le domaine des semences et du matériel de multiplication devront être transposées. En ce qui concerne les variétés de plantes, la Croatie a commencé à transposer les aspects relatifs à la commercialisation et à la protection.

La Croatie doit veiller à ce que les accords vétérinaires et phytosanitaires internationaux actuellement en vigueur soient mis en conformité avec l'acquis.

Dans le domaine de la sécurité alimentaire, une loi sur les produits alimentaires a été adoptée en 2003, qui met partiellement en oeuvre l'acquis dans ce domaine. La loi prévoit la création future d'une agence alimentaire, qui, une fois en place, devrait se charger de l'évaluation des risques et de la coordination des activités de contrôle entre les ministères concernés, tout en gérant le système d'alerte rapide central (voir le chapitre 1 - Libre circulation des marchandises).Conclusion

La Croatie devra faire des efforts considérables et soutenus pour aligner sur l'acquis sa législation en matière d'agriculture, ainsi que pour la mettre en oeuvre et l'appliquer à moyen terme.

Plusieurs mesures actuellement en vigueur dans la politique agricole croate ne sont pas en conformité avec l'acquis et devraient être éliminées progressivement. La Croatie devra entamer en temps opportun les préparatifs en vue de se doter d'instruments de base pour gérer la politique agricole commune, et notamment d'un organisme payeur conforme à Union européenne et d'un système intégré de gestion et de contrôle (SIGC). Il conviendra d'accorder une attention particulière au renforcement de la capacité administrative à gérer des organisations communes de marchés et des activités de développement rural.

La Croatie s'est efforcée de s'aligner sur les normes de l'Union européenne dans les secteurs vétérinaire et phytosanitaire. Les autorités croates doivent faire des efforts significatifs pour réorganiser leur gestion et leurs structures administratives, afin de permettre la mise en place d'un système de contrôle compatible avec l'Union européenne, notamment en ce qui concerne le système des contrôles à l'importation. Il reste, toutefois, des lacunes importantes à combler et la Croatie doit s'évertuer à consolider les récentes réformes et la modernisation de son cadre juridique, ainsi qu'à poursuivre l'adaptation de son administration. La Croatie doit également arrêter les priorités juridiques et institutionnelles auxquelles s'atteler à l'avenir pour faire face aux nouveaux développements dans les secteurs vétérinaire et phytosanitaire. Il convient d'accorder une attention particulière à la formation des inspecteurs et du personnel dans les administrations, à la modernisation des laboratoires et au soutien à apporter aux efforts visant à mettre le secteur agroalimentaire en conformité avec les exigences de l'Union européenne en matière de santé publique.

Chapitre 8 - Pêche

L'acquis dans le domaine de la pêche est constitué de règlements qui ne nécessitent pas de transposition en droit national. Toutefois, il requiert l'introduction de mesures destinées à préparer l'administration et les opérateurs à l'application de la politique commune de la pêche (dans les domaines de la politique de marché, de la gestion des ressources et de la flotte, des inspections et des contrôles, des actions structurelles et des aides d'État). Dans certains cas, les accords ou conventions de pêche conclus avec des pays tiers ou des organisations internationales doivent être adaptés.

L'accord de stabilisation et d'association/accord intérimaire réglemente le commerce préférentiel des produits de la pêche.

En ce qui concerne la gestion des ressources et de la flotte, la Croatie possède une flotte d'environ 3 150 navires et embarcations (832 chalutiers, 332 sennes coulissantes et 1 999 navires polyvalents). La législation de base dans ce domaine est la loi sur la pêche maritime et la loi sur la pêche en eau douce. Pour pratiquer la pêche professionnelle, il faut être titulaire d'une licence appropriée qui, dans le cas de la pêche artisanale, n'est délivrée qu'aux ressortissants croates. Les engins de pêche sont réglementés par une ordonnance sur la pêche maritime commerciale. Il n'existe aucun régime de quotas sauf pour les grands pélagiques. Des dispositions spécifiques s'appliquent à la pêche du thon. La Croatie applique un programme de développement de la flotte visant à augmenter les captures et la consommation des petits pélagiques faisant l'objet de stocks partagés avec les autres pays riverains de la mer Adriatique. Ce programme prévoit, pour la période 2004-2009, la construction de 30 nouveaux navires (90-120 tonnes brutes) contre le retrait d'une partie non quantifiée de la vieille flotte. Néanmoins, ce programme est contraire à l'avis scientifique de la Commission générale des pêches pour la Méditerranée. Les bateaux d'une puissance inférieure à 29 kW sont autorisés à pratiquer la pêche côtière au chalut du picarel jusqu'à un mille marin de la côte.

Les principales activités de pêche concernent les petits pélagiques bleus (pilchard et anchois) au moyen de filets à senne coulissante et de filets dérivants, les grands pélagiques (thon) au moyen de filets à senne coulissante et les crevettes, merlus et rougets au moyen de chaluts. Les sennes côtières, les nappes à fil multiple et les filets maillants sont très répandus.

Pour gérer le secteur de la pêche, le ministère de l'Agriculture s'appuie sur un département central (principalement responsable de la législation et de la coordination) et sept bureaux locaux (principalement responsables de la délivrance des licences et de la collecte des données). Il existe en outre une inspection de l'État indépendante qui est chargée du contrôle des activités commerciales dans tous les secteurs, dont la pêche, bien qu'elle ne compte aucune unité spécifiquement responsable de l'inspection de la pêche. Ses inspecteurs en nombre limité se voient donc confier, entre autres, des activités d'inspection de la pêche. Les équipements actuellement disponibles sont insuffisants et aucun système de contrôle des navires n'est prévu. La police maritime, qui dépend du ministère de l'Intérieur, est responsable des inspections en mer. Bien que les deux services coopèrent, la coordination de leurs activités ne semble pas être suffisamment développée. Dans l'ensemble, le système d'inspection soulève actuellement de sérieux doutes quant à son efficacité en termes de personnel, d'équipement et de coordination entre les différents services administratifs concernés.

L'enregistrement de la flotte croate est effectué manuellement par chaque autorité portuaire. Chaque navire est également enregistré dans la base de données informatisée du registre des licences de pêche commerciale. La Croatie se prépare à introduire un registre électronique des navires de pêche opérationnel, conformément à l'acquis.

La Croatie devrait clarifier le système de licences pour la pêche artisanale à des fins commerciales. Elle devrait également démontrer sa capacité à mesurer et contrôler correctement la capacité et l'effort de pêche de sa flotte. Il existe trois types de licences de pêche: à caractère commercial, artisanal et récréatif/sportif. Tout requérant de licence de pêche commerciale doit figurer dans le registre des petites entreprises. Une licence est également exigée pour l'élevage de poisson.

En Croatie, les actions structurelles dépendront du ministère de l'Agriculture.

En ce qui concerne les aides d'État au secteur de la pêche, la Croatie a mis en place un large éventail de régimes de soutien de la pêche et de l'élevage et de la transformation de poisson, notamment en faveur de l'élevage des espèces autochtones. Les régimes en question vont des mesures d'appui à la politique de commercialisation et de tarification et à la politique structurelle aux aides à l'aquaculture et à la pêche en eau douce. Certaines de ces mesures devront être mises en conformité avec l'acquis.

En ce qui concerne les accords de pêche internationaux, la Croatie est membre de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (CICTA) et de l'Organisation internationale pour le développement de la pêche en Europe centrale et orientale (EUROFISH). Elle est aussi membre du Conseil général des pêches pour la Méditerranée (CGPM) et a ratifié le budget autonome pour cette organisation. Le seul accord bilatéral en vigueur est un accord sur un régime transfrontalier transitoire avec la Slovénie.

Le 3 octobre 2003, le parlement a unilatéralement déclaré une zone écologique et de pêche protégée dans la mer Adriatique. Les compétences élargies qui en découlent entreront en vigueur un an après sa proclamation. Cela implique apparemment l'interdiction pour les navires étrangers d'entreprendre tout type de recherche scientifique dans la zone sans l'autorisation des autorités croates. Il est regrettable que la Croatie ait décidé de déclarer une zone écologique et de pêche protégée dans la mer Adriatique sans dialogue ni coordination adéquats avec les autres pays concernés.

Conclusion

Le secteur de la pêche croate connaît une expansion significative. Les captures de petits pélagiques et le nombre de navires de pêche ont augmenté. Des progrès ont été accomplis dans l'enregistrement informatisé des navires de pêche. Ces développements ne sont toutefois pas le fruit d'une stratégie de précaution ni d'études scientifiques précises.

La Croatie devra aller de l'avant dans l'alignement de sa législation sur l'acquis dans ce domaine afin de le mettre en oeuvre et de l'appliquer effectivement à moyen terme. Ses efforts devraient notamment être axés sur la mise en place de structures adéquates de gestion des instruments du marché et des fonds communautaires et de contrôles appropriés, notamment par un système de contrôle par satellite. Une solution à la déclaration d'une zone écologique et de pêche protégée dans la mer Adriatique doit être trouvée dans le cadre des conclusions de la conférence de Venise pour le développement durable des pêches en Méditerranée.

Chapitre 9 - Transports

La législation de l'Union européenne dans le domaine des transports vise à améliorer le fonctionnement du marché intérieur par la promotion de services de transport efficaces et respectueux tant de l'environnement que des utilisateurs. L'acquis en la matière couvre les secteurs du transport routier, ferroviaire, aérien, maritime et fluvial. Il porte également sur les normes techniques et de sécurité, les normes sociales et la libéralisation du marché dans le cadre du marché unique européen du transport.

L'accord de stabilisation et d'association contient des dispositions sur le transport par la voie terrestre, notamment en ce qui concerne le développement des infrastructures, la promotion du transport combiné rail-route ainsi que l'amélioration de l'accès au marché, la facilitation du transit et les normes techniques, environnementales et sociales dans le domaine du transport par la voie terrestre.

La Croatie investit un pourcentage significatif de son PIB dans les infrastructures de transport. Pour tous les modes de transport, les capacités sont en général suffisantes. Néanmoins, la majorité des infrastructures se trouve dans un état moyen, voire médiocre. Le réseau de transport de base a déjà été défini avec la Commission dans le cadre de l'établissement d'une approche stratégique visant à développer un réseau d'infrastructures de transport de base dans la région.

Dans le secteur du transport routier, les règles déjà appliquées se rapprochent de l'acquis. L'accès au marché du transport routier des passagers et des marchandises est réglementé ainsi que l'accès à la profession, dont les règles s'appliquent tant aux opérateurs nationaux qu'internationaux. Toutefois, celles-ci devront encore être alignées sur l'acquis. Dans le domaine de l'acquis social, la Croatie progresse vers une approche communautaire sur les temps de conduite et les périodes de repos; elle exige l'utilisation du tachygraphe et applique au transport national les modalités de l'accord européen relatif au travail des équipages des véhicules effectuant des transports internationaux par route (AETR). En outre, dans le domaine de l'acquis technique, la Croatie progresse vers une approche communautaire dans la mesure où elle applique, notamment, les modalités de l'accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par route (ADR) et où la législation nationale est proche de, mais pas tout à fait compatible avec, l'acquis sur le contrôle technique des véhicules, le permis de conduire, les poids et dimensions des véhicules et les limiteurs de vitesse. En ce qui concerne l'acquis fiscal, la Croatie devrait aligner le niveau des taxes annuelles sur les véhicules et des tarifs appliqués aux utilisateurs sur l'acquis. En outre, la question du caractère discriminatoire des taxes (taxes supplémentaires pour les véhicules immatriculés à l'étranger) devrait être réglée.

Quant à la capacité administrative, les responsabilités dans le secteur du transport routier ont été récemment concentrées sur le ministère des Affaires maritimes, du Tourisme, des Transports et du Développement. Il sera essentiel de veiller à une coopération efficace entre ce ministère et le ministère de l'Intérieur (responsable de la police) ainsi qu'à un niveau de contrôle suffisant afin d'appliquer les normes de l'UE dans le domaine de la législation sociale et des spécifications techniques.

Dans le secteur du transport ferroviaire, l'acquis sur la séparation des comptes entre la gestion des infrastructures et les opérations ferroviaires a été adopté. L'opérateur (toujours intégré) responsable (Hrvatske eljeznice) jouit d'une autonomie de gestion, mais est entièrement détenu par l'État et placé sous le contrôle d'un «conseil de surveillance» nommé par le gouvernement. La situation financière de cette société, qui fait actuellement l'objet d'une restructuration, reste précaire. La récente législation ferroviaire de l'UE (premier paquet ferroviaire) a été incorporée dans la législation croate dans ce domaine, qui sera mise en oeuvre à partir de 2005, notamment l'accès non discriminatoire au réseau national. Néanmoins, l'essentiel de la législation secondaire (notamment en ce qui concerne l'indépendance en matière d'attribution des capacités) doit encore être adopté. La Croatie devrait également aligner sa législation sur l'acquis relatif à l'interopérabilité.

La capacité administrative dans ce secteur devra encore être renforcée, compte tenu également de la mise en oeuvre de l'acquis communautaire révisé dans le domaine ferroviaire.

Le secteur du transport fluvial en Croatie est relativement restreint, la flotte croate étant dans une faible mesure capable d'opérer sur les principales voies d'eau communautaires. La propriété des infrastructures et des ports est distincte de celle de la flotte. Les règles sociales sont déjà alignées sur l'acquis, la législation croate sur l'accès à la profession comprenant de nombreuses exigences spécifiques supplémentaires. Il conviendra de poursuivre l'alignement. En ce qui concerne les spécifications techniques pour les navires, la Croatie applique déjà les règles de la Commission économique des Nations Unies pour l'Europe, qui correspondent à l'acquis. Il en va de même pour le transport des marchandises dangereuses.

La capacité administrative dans ce secteur semble être bien assurée au niveau ministériel et grâce au registre de la navigation croate.

Dans le secteur du transport aérien, une partie importante de l'acquis doit encore être transposée, notamment les dispositions sur l'assistance en escale, la répartition des créneaux horaires, les systèmes informatisés de réservation et la tarification. Bien que la Croatie soit membre de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) et de la Conférence européenne de l'aviation civile (CEAC), elle n'est pas encore membre à part entière des autorités conjointes de l'aviation (JAA), ce qui signifie qu'elle devra poursuivre l'alignement sur les règles de sécurité. L'alignement sur les règles en matière d'aides d'État et de concurrence devra faire l'objet d'une attention plus soutenue. En outre, un accord aérien global prévoyant l'accès réciproque au marché aérien devrait être négocié avec l'UE.

Il y a lieu de renforcer la capacité administrative et de préciser les rôles et responsabilités des différents organismes compétents (autorité responsable de l'aviation civile, département chargé des enquêtes sur les accidents aériens, ministère des Affaires maritimes, du Tourisme, des Transports et du Développement).

Dans le secteur du transport maritime, l'essentiel de la législation régissant les normes techniques est conforme aux normes respectives de l'Organisation maritime internationale (OMI) et de l'Organisation internationale du travail (OIT), dont la Croatie fait partie, notamment en ce qui concerne la sécurité, la formation des marins et les normes sociales. La Croatie ne devrait donc pas rencontrer de difficultés majeures pour aligner sa législation sur l'acquis dans le domaine social et de la sécurité à moyen terme. L'alignement sur l'acquis devra toutefois être poursuivi en ce qui concerne les conditions d'immatriculation des navires, les obligations et contrats de service public et certains volets de la législation sociale (les horaires de travail à bord des navires nationaux, l'enseignement et la formation maritimes et la délivrance des brevets aux gens de mer). Selon les statistiques de 2002 produites dans le cadre du mémorandum d'entente de Paris sur le contrôle par l'État du port, le pourcentage des navires battant pavillon croate immobilisés à la suite du contrôle de l'État du port était de 8,9 %. Ce pourcentage doit être comparé avec la moyenne de 3,5 % enregistrée en 2002 pour les navires battant pavillon de l'UE. Le pavillon croate figure sur la liste grise du mémorandum d'entente de Paris.

La capacité administrative devrait être renforcée pour que la Croatie puisse satisfaire aux exigences de l'acquis dans le domaine de la mise en oeuvre du contrôle par l'État du port et l'État du pavillon. En outre, l'accès illimité aux services de cabotage maritime devrait être garanti.

Conclusion

La Croatie devra aller de l'avant dans l'alignement de sa législation sur l'acquis afin de le mettre en oeuvre et de l'appliquer effectivement à moyen terme. Ces efforts devront surtout porter sur la poursuite de l'alignement dans le secteur du transport aérien. Pour garantir une application effective de l'acquis, les structures administratives croates devront encore être renforcées.

Chapitre 10 - Fiscalité

L'acquis dans le domaine de la fiscalité couvre essentiellement la fiscalité indirecte, à savoir la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) et les droits d'accises. Il énonce les définitions et principes de la TVA. Les accises sur les huiles minérales, les produits du tabac et les boissons alcooliques sont réglementées par des directives communautaires en ce qui concerne la structure du droit, le niveau des taux minima et la détention et la circulation de marchandises soumises à accises. Dans le domaine de la fiscalité directe, l'acquis couvre certains aspects de la fiscalité appliquée aux entreprises et il vise principalement à éliminer les obstacles aux activités transfrontalières des entreprises. Enfin, la législation communautaire relative à la coopération administrative et à l'assistance mutuelle fournit des instruments pour lutter contre l'évasion et la fraude fiscales intracommunautaires, qu'il s'agisse de la fiscalité directe ou indirecte.

Dans le domaine de la fiscalité indirecte, la Croatie applique un système de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) mis en place en 1995 et modifié à plusieurs reprises. Le système actuel de la TVA est fondé sur la législation de l'UE en matière de TVA, ce qui constitue un bon point de départ. Parallèlement à la TVA, un système de taxes sur les ventes de biens et de services existe toujours bien que ces taxes n'aient représenté que 0,16 % des recettes des administrations publiques en 2002 contre 31,3 % pour la TVA. Les définitions du champ d'application de la taxe, des assujettis, de l'assujettissement à la TVA ainsi que les dispositions relatives au lieu de prestation sont semblables à celles prévues dans la législation de l'UE. Les entrepreneurs étrangers non résidents peuvent demander à être enregistrés à la TVA en Croatie. Un assujetti dont le chiffre d'affaires annuel ne dépasse pas 85 000 HRK (environ 500 euros) n'est pas tenu d'être enregistré à la TVA, ce seuil étant supérieur à celui prévu dans l'acquis.

Actuellement, la Croatie applique un taux normal de TVA de 22 % et ne prévoit aucun taux réduit, ce qui est conforme à l'acquis. Néanmoins, un taux nul s'applique à une série de biens et de services spécifiques: pain, lait, livres, journaux scientifiques et matériel didactique, produits pharmaceutiques et équipements médicaux destinés à soulager ou à traiter des handicaps, cinéma et services touristiques achetés à l'étranger. L'application d'un taux nul n'est pas compatible avec l'acquis. Il n'y a aucune discrimination vis-à-vis des biens importés dans la mesure où le taux qui leur est applicable est identique celui pratiqué à l'égard des produits nationaux semblables. Les exonérations de la TVA sans déduction de la taxe perçue en amont sur la fourniture de certains biens et services sont tout à fait semblables aux dispositions prévues dans l'acquis, mais la poursuite de l'alignement est indispensable.

En vertu de l'acquis, les fournitures de biens à destination et à l'intérieur des zones franches et des entrepôts douaniers francs sont exonérées de la TVA. Cependant, l'application territoriale de la loi sur TVA exclut les zones franches établies en Croatie, ce qui n'est pas conforme à l'acquis de l'UE (voir aussi chapitre 25 - Union douanière).

Les assujettis sont autorisés à déduire la TVA sur leurs achats de biens et de services destinés à des fins commerciales, mais la loi croate sur la TVA ne permet pas le remboursement aux opérateurs non établis, sauf dans des cas très limités. Cette disposition est contraire à la législation communautaire. En outre, la loi sur la TVA ne contient aucun des régimes spéciaux de TVA prévus dans l'acquis; le seul régime spécial concerne les voitures d'occasion.

En ce qui concerne la capacité administrative, l'administration fiscale, qui est un organe administratif au sein du ministère des Finances, est compétente en matière de fiscalité directe et de TVA (à l'exception de la TVA sur les importations qui est perçue par l'administration douanière). Elle se compose du siège central, de 20 bureaux régionaux et de 121 bureaux locaux. Les compétences et les pouvoirs de l'administration fiscale sont clairement définis ainsi que les droits et les obligations des contribuables.

Selon les données disponibles, l'économie informelle qui était importante dans les années 90, semble avoir régressé. Le pourcentage des taxes prélevées à l'échéance (85 %) est de loin inférieur à la moyenne de l'UE (93 %). La stratégie de contrôle de la TVA et des impôts directs, déterminée par les dispositions de la loi générale sur les impôts, doit être améliorée et renforcée. Un plan d'action annuel en matière d'inspection est défini en ce qui concerne les contrôles et leur sélection s'opère sur la base de plusieurs critères différents. Il semble qu'il faille revoir à la hausse le nombre d'inspecteurs des impôts et qu'il soit prévu de le faire. Au niveau local et opérationnel, les employés de l'administration fiscale sont responsables de tous les impôts des contribuables relevant de leur compétence; néanmoins, les inspecteurs sont spécialisés en fonction de la taille et/ou de l'activité des contribuables.

Il est possible de faire appel contre les décisions de l'administration fiscale et de traduire les contribuables coupables de fraude fiscale devant les tribunaux; cependant, du moins dans ce dernier cas, les procédures sont lentes et dès lors inefficaces. La fraude fiscale concerne surtout la TVA. Le département indépendant d'enquête sur la criminalité fiscale dispose d'un bureau central et de bureaux régionaux à Zagreb, Rijeka, Split et Osijek mais il n'est pas encore bien organisé et ne peut pas compter sur des spécialistes de la fraude. En outre, la coopération entre l'administration fiscale, la police, le bureau du procureur général, les juges et les tribunaux de première et de deuxième instances est loin d'être optimale, ce qui entraîne de sérieux retards.

En ce qui concerne les droits d'accises, tous les produits relevant du système harmonisé des droits d'accises de l'UE (alcool et boissons alcooliques, produits du tabac et huiles minérales) sont soumis à des droits d'accises. Les droits d'accises ont représenté 9 % des recettes des administrations publiques en 2002 (y compris sur certains produits supplémentaires soumis à accises en vertu de la loi croate). Il est prévu d'adopter un acte uniforme régissant les droits d'accises, ce qui devrait rapprocher la législation de l'acquis, de même que l'introduction d'un système de suspension de droits applicable aux mouvements intérieurs sur la base de l'acquis de l'UE et la mise en place de procédures de contrôle plus efficaces.

Il sera nécessaire de procéder à de profonds ajustements de l'assiette de l'impôt, des structures et des définitions de la plupart des marchandises soumises à des droits d'accises harmonisés au niveau communautaire. En ce qui concerne l'alcool et les boissons alcooliques, la Croatie semble autoriser une exonération pour toutes les catégories de boissons alcooliques, à l'exception de la bière, fabriquées par les particuliers et destinées à leur propre consommation. L'acquis ne prévoit pas cette exonération dans le cas des produits intermédiaires et des spiritueux. Contrairement à l'acquis, la Croatie exonère également de droits les petites brasseries produisant moins de 1 500 litres par an. Quant aux produits du tabac, l'exonération de droits devra inclure les tabacs manufacturés dénaturés. En ce qui concerne les huiles minérales, tous les types de combustibles de chauffage sont exonérés de droits d'accises. La portée de ces exonérations n'est pas conforme à l'acquis.

En ce qui concerne le niveau des droits d'accises, les taux appliqués aux catégories susmentionnées sont parfois inférieurs aux niveaux minima de l'UE. Cela vaut notamment pour les cigarettes et le tabac à rouler. Quant à la comparaison avec les taux minima de l'UE pour les produits alcooliques, particulièrement la bière, elle n'est pas encore possible en raison de la structure différente des droits. En ce qui concerne les huiles minérales, les taux d'accises ne différent pas en fonction de leur utilisation. Le gaz de pétrole liquéfié destiné à n'importe quel usage - de même que les autres huiles minérales - est taxé à un niveau sensiblement inférieur aux taux minima prévus dans l'acquis. Le niveau des taux appliqués aux produits nationaux et aux produits importés similaires est identique. Le système croate de suspension des droits devra être mis en conformité avec les exigences de l'acquis. Il faudra notamment corriger les dispositions actuelles en matière de suspension de droits d'accises qui ne s'appliquent pas aux produits importés soumis à accises.

L'administration douanière est responsable des droits d'accises depuis janvier 2002. Cependant, le service des droits d'accises n'existe pas encore en tant qu'entité administrative réellement opérationnelle dans la mesure où il ne compte que deux employés. Sur le plan du fonctionnement, seuls 10 bureaux de douane traitent spécifiquement des droits d'accises. Le recrutement de nouveaux effectifs et une formation systématique des employés à la perception et au contrôle des droits d'accises sont donc nécessaires et sont prévus. En outre, il semble que la Croatie soit confrontée à d'importants problèmes liés à la contrebande des produits du tabac - et, dans une moindre mesure, d'alcool - par ses frontières.

En ce qui concerne la fiscalité directe, certaines dispositions concernant la taxation des intérêts, des redevances, des dividendes et des commissions versés par les sociétés croates aux non-résidents doivent encore être alignées sur la directive relative aux intérêts et redevances et la directive «mère-filiales». En outre, il convient de rappeler que la directive relative à l'imposition des revenus de l'épargne exige l'introduction d'un échange transfrontalier d'informations entre les États membres sur le paiement d'intérêts aux personnes physiques ayant leur résidence dans l'UE.

La transposition de la directive sur les fusions devrait permettre l'élimination des obstacles fiscaux aux réorganisations d'entreprises transfrontalières. En ce qui concerne la Cour européenne de justice, il convient de rappeler que bien que la fiscalité directe relève de la compétence des États membres, ceux-ci doivent néanmoins l'exercer de façon compatible avec le droit communautaire et donc éviter toute discrimination, manifeste ou déguisée, fondée sur la nationalité.

À l'heure actuelle, la Croatie applique cinq régimes préférentiels d'imposition des bénéfices et des revenus. Il convient de rappeler que la Croatie sera tenue de se conformer aux principes du code de conduite dans le domaine de la fiscalité des entreprises, qu'elle ne pourra notamment pas introduire de nouvelles mesures fiscales et qu'elle devra revoir la législation existante éventuellement contraire à ces principes.

La perception des impôts directs relève de la responsabilité de l'administration fiscale (voir ci-dessus la capacité administrative en matière de TVA).

En ce qui concerne la coopération administrative et l'assistance mutuelle, l'expérience croate est jusqu'ici très limitée, tant dans le domaine de la TVA que des droits d'accises. Il conviendra de prendre des initiatives à cet égard, notamment en ce qui concerne la mise en place de systèmes informatisés d'échange d'informations. Dans ce domaine, le système d'échange d'informations sur la TVA (VIES), l'application destinée à la TVA sur les services électroniques, le système d'échange de données relatives aux accises (SEED) et le système d'informatisation des mouvements et des contrôles des produits soumis à accises (EMCS) devront être mis sur pied pour être totalement opérationnels à la date de l'adhésion.

Conclusion

Des modifications supplémentaires devront être apportées au système de la TVA pour l'aligner sur l'acquis. Il conviendra de se pencher sur le régime actuellement applicable aux zones franches qui ne sont pour l'instant pas considérées comme faisant partie du territoire croate aux fins de la TVA, afin de garantir l'alignement complet de ce régime sur l'acquis et un contrôle approprié des zones franches. Les taux nuls de TVA et la taxe sur les ventes devront être supprimés. Bien qu'il existe un système de droits d'accises, l'alignement sur l'acquis exigera des efforts considérables dans tous les domaines et catégories de produits. En matière de fiscalité directe, des efforts supplémentaires seront nécessaires pour parvenir à un alignement complet sur l'acquis, y compris la jurisprudence de la Cour européenne de justice.

La capacité de l'administration fiscale doit être fortement renforcée, notamment au niveau des fonctions de perception et de contrôle. La capacité administrative de l'administration douanière chargée des droits d'accises est insuffisante et de sérieux efforts seront nécessaires, notamment pour mettre en place une structure d'organisation et un service plus adéquats, s'appuyant sur un personnel suffisant et formé. Pour que la lutte contre la fraude fiscale soit plus efficace, il faudra remédier à la complexité des procédures de répression de la fraude ainsi qu'à la faiblesse du système judiciaire croate.

Dans l'ensemble, la Croatie devra consentir des efforts considérables et soutenus pour aligner sa législation sur l'acquis, ainsi que pour la mettre en oeuvre et l'appliquer dans le domaine de la fiscalité à moyen terme. Une attention particulière devra être accordée à l'interconnexion des systèmes informatiques si la Croatie veut être en mesure de faire face à ses obligations résultant de l'adhésion dans ce domaine spécifique.

Chapitre 11 - Union économique et monétaire

La législation de l'UE relative à l'union économique et monétaire (UEM) contient un certain nombre de règles spécifiques garantissant l'indépendance des banques centrales des États membres et interdisant le financement direct de l'État par la banque centrale ainsi que l'accès privilégié du secteur public aux institutions financières. En outre, tous les États membres sont tenus de fixer les mesures spécifiques nécessaires à la protection de l'euro contre la contrefaçon. Ces règles devront être appliquées à la date de l'adhésion. Au moment de leur adhésion, on attend des nouveaux États membres qu'ils coordonnent leurs politiques économiques et se soumettent aux dispositions du Pacte de stabilité et de croissance et du statut du système européen de banques centrales. Ils s'engagent également à se conformer aux critères prévus dans le traité pour pouvoir adopter l'euro. Jusqu'à leur adoption de l'euro, ils participeront à l'union économique et monétaire à titre d'États membres faisant l'objet d'une dérogation et traiteront la question de leurs taux de change comme une préoccupation commune.

En Croatie, l'indépendance de la banque centrale semble être largement garantie. En effet, la loi sur la banque centrale croate de 2001 paraît à peu près conforme à la législation de l'UE. Elle stipule que la banque (Hrvatska narodna banka - HNB) ne reçoit ni ne requiert d'instructions d'autres autorités. La banque est financièrement indépendante et est la seule institution responsable des politiques monétaires et des changes en Croatie. La banque a pour objectif premier d'atteindre et de maintenir la stabilité des prix.

Néanmoins, certaines dispositions de la loi HNB doivent encore être améliorées. En termes d'indépendance institutionnelle, les dispositions relatives à l'indépendance de la banque centrale doivent encore être alignées sur l'acquis. En matière de notification de la politique monétaire, la HNB est notamment tenue de fournir des informations ex-post afin d'empêcher toute possibilité d'influence extérieure. En termes d'indépendance personnelle, les dispositions concernant les motifs de licenciement des membres du conseil d'administration devraient être davantage rapprochées des statuts du SEBC.

En ce qui concerne l'interdiction du financement direct du secteur public par la Banque centrale, la loi interdit formellement de fournir directement des crédits à la République de Croatie. Néanmoins, la possibilité de couvrir un déficit entre les recettes et les dépenses de la HNB par des titres obligataires de la République de Croatie pourrait constituer une forme de financement monétaire dans la mesure où la HNB est tenue de les acquérir.

En ce qui concerne l'interdiction d'accès privilégié, la loi sur les assurances et la loi sur les fonds de pension obligatoires et volontaires prévoient des seuils/planchers en ce qui concerne les fonds publics croates. Cela équivaut à offrir un accès privilégié à la République de Croatie par rapport à d'autres États et institutions. En outre, la loi sur les coopératives d'épargne et de prêt permet le placement des fonds disponibles uniquement dans les titres émis par la République de Croatie. Ces lois devront être adaptées.

La Croatie a mis en place des procédures pour la protection de l'euro contre la contrefaçon. Les euros suspects sont envoyés au centre de criminalistique pour analyse technique et ce dernier transmet ses résultats à la HNB et au département d'enquêtes criminelles de la police. Bien que la capacité d'analyse technique existe, il conviendrait d'envisager la mise en place d'un bureau national se consacrant entièrement à la contrefaçon. Des accords prévoient la transmission d'informations dans ce domaine à Europol et à Interpol. Si les établissements de crédit sont tenus de retirer de la circulation les billets de banque suspects et de les remettre aux autorités compétentes, aucune sanction n'est prévue en cas de non-respect de cette obligation. Il conviendra de modifier la législation sur ce point.

Conclusion

La Croatie devrait être en mesure de satisfaire aux exigences de l'acquis dans le domaine de l'union économique et monétaire à moyen terme. Néanmoins, certains aspects de la législation relatifs à l'indépendance de la banque centrale, au financement monétaire, à l'accès privilégié du secteur public aux institutions financières et à la protection de l'euro doivent encore être alignés. La préparation de la participation de la Croatie à la troisième étape de l'UEM en tant qu'État membre faisant l'objet d'une dérogation ne devrait pas poser de sérieux problèmes avant l'adhésion.

Chapitre 12 - Statistiques

L'acquis dans le domaine des statistiques suppose l'adoption de certains principes fondamentaux d'impartialité, de fiabilité, de transparence, de confidentialité des informations à caractère personnel et de diffusion de statistiques officielles. Il concerne aussi la méthodologie, les nomenclatures et les modalités de collecte des données dans divers secteurs - infrastructures statistiques, macroéconomie, évolution des prix, entreprises, transports, commerce extérieur, démographie, politique régionale, agriculture, environnement, science et technologie et politique régionale. Le système statistique d'un pays repose en premier lieu sur son institut statistique national, qui sert de point de référence en matière de méthodologie, d'établissement et de diffusion des statistiques.

En ce qui concerne l'infrastructure statistique en Croatie, le cadre juridique a été modernisé avec l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur les statistiques officielles en juin 2003. Les principes de fiabilité, d'indépendance professionnelle, de confidentialité des statistiques et des données personnelles à des fins exclusivement statistiques sont entérinés dans cette loi qui est entièrement conforme aux principes de l'UE.

L'Institut national de la statistique (INS) joue un rôle de premier plan dans le système statistique. Le directeur général de l'INS et le directeur adjoint sont nommés par le gouvernement. Certaines tâches de l'INS sont confiées à 21 bureaux régionaux qui constituent un élément important du système statistique croate mais ne font pas partie de l'Institut sur le plan administratif. Comme la loi le prévoit, un Conseil de la statistique a été créé en octobre 2003 pour améliorer sensiblement les relations entre les producteurs et les utilisateurs de statistiques et pour y associer plus étroitement l'université. La coordination avec d'autres producteurs de statistiques officielles continue de poser des problèmes et peut être considérée comme le principal point faible du système statistique croate. Grâce à la création récente de 15 comités consultatifs de la statistique, couvrant l'ensemble des principaux domaines statistiques, la situation devrait s'améliorer. Ces comités devraient aider l'INS à renforcer son rôle de coordination et à promouvoir l'utilisation de méthodes communes et harmonisées. Dans la foulée de la loi sur les statistiques officielles, la Croatie vient d'adopter le concept de cycle de gestion stratégique et est en train de mettre au point des documents de stratégie à long, moyen et court termes en ce qui concerne les statistiques officielles croates. L'INS emploie un personnel statutaire de 396 personnes, dont 42 % sont universitaires. Les fluctuations de personnel sont plus importantes à l'INS que dans d'autres services de l'administration. Aucun programme de formation spécifique aux statistiques officielles n'est dispensé par l'INS et il n'existe aucun code traduisant les principes fondamentaux ou la loi statistique en règles de comportement pour le personnel.

En ce qui concerne les classements, les nomenclatures nationales d'activités économiques et de produits par branche semblent être conformes aux exigences de l'UE. Une nouvelle proposition de «nomenclature régionale statistique» (NUTS - Nomenclature des unités territoriales statistiques) en Croatie doit être présentée à la Commission afin de parvenir à un accord sur une ventilation NUTS.

La production de statistiques régionales conformes à la future ventilation NUTS convenue doit être renforcée pour permettre notamment le calcul, au niveau NUTS II, du PIB par habitant sur la base des chiffres de la valeur ajoutée brute.

En ce qui concerne les statistiques démographiques et sociales, le dernier recensement de la population date de 2001 et le prochain devrait avoir lieu en 2011. Dans l'intervalle, les statistiques relatives aux flux migratoires externes devront être améliorées de manière à ce que des statistiques démographiques plus fiables puissent être produites sur une base annuelle en utilisant le dernier recensement comme point de départ. Une enquête sur les forces de travail est menée tous les six mois depuis 1996 sur un échantillon de 8 500 ménages; elle répond aux normes du BIT et d'Eurostat.

En ce qui concerne les statistiques macroéconomiques, des améliorations significatives doivent encore être apportées pour atteindre un niveau suffisant de qualité et de comparabilité des comptes nationaux sur la base de la méthodologie du SEC 95. La capacité administrative de l'INS doit être renforcée. Il n'existe toujours pas d'indice des prix à la consommation harmonisé.

En ce qui concerne les statistiques commerciales, l'actuel répertoire des entreprises ne satisfait toujours pas aux besoins statistiques. Il devrait être procédé à un recensement économique afin de permettre l'établissement d'un registre statistique sur une base homogène.

En ce qui concerne les statistiques des transports, la capacité administrative de l'INS doit être renforcée afin de pallier le manque d'informations sur les transports aérien et maritime, de marchandises et de passagers et de statistiques sur les accidents de la route.

En ce qui concerne les statistiques du commerce extérieur, la qualité des statistiques est déjà relativement satisfaisante et le système de production largement aligné sur l'acquis. Des améliorations devront surtout porter sur l'harmonisation méthodologique selon les normes de l'UE, la qualité des données et la mise au point d'outils permettant de rapprocher les statistiques de celles des autres pays du PSA et de l'UE.

Les statistiques agricoles croates pourront être améliorées grâce aux résultats du recensement agricole qui a eu lieu en juin 2003. Les efforts devraient être axés sur l'établissement d'un registre des exploitations agricoles et sur l'amélioration de l'environnement informatique dans le secteur.

Les statistiques sur l'environnement, la science et la technologie doivent être développées plus avant étant donné que le nouvel acquis dans ces deux domaines statistiques vient d'être renforcé.

Conclusion

Afin de permettre d'autres améliorations et développements dans le domaine des statistiques, la Croatie doit renforcer les ressources humaines dans les secteurs-clés tels que les statistiques macroéconomiques. La formation du personnel doit aussi être considérablement améliorée. Dans ce contexte, il y a lieu de résoudre la question de la réorganisation des bureaux régionaux qui est toujours en suspens. Des efforts sont également nécessaires sur le plan des infrastructures informatiques.

En outre, pour parvenir à une totale conformité avec l'acquis, une collaboration étroite entre l'INS et d'autres producteurs de données statistiques sera indispensable au sein de l'administration croate. Il conviendra de renforcer le rôle central de l'INS dans le système statistique de la Croatie.

Dans l'ensemble, le système statistique croate s'est remarquablement et rapidement rapproché des normes internationales et de l'UE. Si elle poursuit ses efforts, la Croatie ne devrait pas rencontrer de difficultés majeures pour aligner sa législation sur l'acquis et le mettre en oeuvre et l'appliquer effectivement à moyen terme.

Chapitre 13 - Affaires sociales et emploi

L'acquis social comprend des normes minimales dans des domaines tels que le droit du travail, l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes sur le marché de l'emploi et en matière de sécurité sociale, la santé et la sécurité au travail. Des règles spécifiques à caractère contraignant ont également été élaborées en matière de santé publique (maîtrise et surveillance de la consommation de tabac, contrôle des maladies transmissibles) et, dernièrement, en ce qui concerne l'interdiction de toute discrimination fondée sur l'origine raciale ou ethnique, la religion ou les croyances, le handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. Le Fonds social européen (FSE) est le principal instrument financier grâce auquel l'Union appuie la mise en oeuvre de sa stratégie de l'emploi et contribue aux efforts de lutte contre l'exclusion sociale (ses dispositions d'application sont abordées dans le chapitre 21, qui traite des instruments structurels). Les États membres participent au dialogue social au niveau européen de même qu'aux processus politiques communautaires en matière d'emploi, d'insertion sociale et de protection sociale.

En ce qui concerne le droit du travail, la législation nationale croate semble couvrir la plupart des principes fondamentaux énoncés dans les directives communautaires sur le droit du travail dans les domaines tels que le temps de travail, l'information et la consultation des travailleurs et l'information sur les conditions applicables au contrat de travail. En cas d'insolvabilité de leur employeur, un certain niveau de compensation est garanti aux travailleurs, celle-ci étant payée par le fonds pour le développement et l'emploi. Il sera toutefois nécessaire de procéder à plusieurs ajustements de la législation nationale dans le domaine du droit du travail afin de transposer et mettre en oeuvre la totalité de l'acquis. En outre, la législation croate ne semble pas correspondre aux directives sur les conseils d'entreprise européens et le détachement de travailleurs.

En ce qui concerne l'égalité de traitement entre les hommes et les femmes, la constitution interdit toute forme de discrimination et la Croatie a ratifié plusieurs conventions internationales. La Croatie est également liée par l'article 8 de la Charte sociale européenne et par l'article 1er de son protocole additionnel. Les principales lois qui interdisent la discrimination fondée sur le sexe en matière d'emploi sont le code du travail et la loi sur l'égalité des chances entre hommes et femmes. En général, il semble que la législation de base nécessaire soit largement en place en Croatie. Des ajustements juridiques sont toutefois nécessaires, par exemple les dispositions entraînant une surprotection des femmes, qui devraient être supprimées. Il se peut que les différences entre hommes et femmes en ce qui concerne l'âge de l'admission à la retraite dans la police, l'armée et la fonction publique doivent être adaptées et que le troisième pilier (volontaire) du système de retraite doive être revu en conséquence.

Un certain nombre de structures institutionnelles ont été spécifiquement créées pour promouvoir, mettre en oeuvre et contrôler l'égalité de traitement entre hommes et femmes (notamment le comité pour l'égalité des chances du parlement, la commission sur les questions d'égalité des chances et le bureau pour l'égalité des chances du gouvernement ainsi que le médiateur pour l'égalité des chances). En outre, d'autres structures sont actives dans le domaine des droits de l'homme en général, dont l'égalité, par exemple le comité de coordination des affaires sociales et des droits de l'homme et le bureau des droits de l'homme du gouvernement.

La loi sur la santé et la sécurité au travail constitue le cadre juridique de base dans ce domaine. Elle comporte également des dispositions concernant les travailleurs indépendants et d'autres textes juridiques qui ne sont que partiellement alignés sur la législation de l'UE. Des efforts supplémentaires devront être consacrés à la transposition des directives de l'UE sur certains aspects de la santé et la sécurité tels que l'amiante, le bruit, les agents chimiques, les agents cancérigènes et les équipements de travail.

L'Inspection du travail est responsable de la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans la plupart des secteurs de l'économie. La structure de base existe mais le nombre d'inspecteurs est peu élevé (78 inspecteurs pour plus de 1,2 million de travailleurs). La capacité administrative de l'Inspection du travail doit donc être renforcée non seulement en termes de personnel, mais également d'équipement. Ses possibilités d'appliquer des sanctions efficaces et dissuasives sont limitées en raison des insuffisances du système judiciaire. Les tribunaux mettent beaucoup de temps à prendre des décisions et ont tendance à infliger des peines légères.

Le dialogue social est relativement bien développé en Croatie, tant entre l'État et les partenaires sociaux qu'entre l'État et d'autres acteurs économiques et sociaux, dans le cadre d'un processus multipartite. Le dialogue bipartite progresse également. On compte six organisations syndicales, dont l'une (Association des syndicats autonomes - SSSH) jouit du statut d'observateur auprès de la Confédération européenne des syndicats (CES). Il existe deux organisations patronales, dont l'une (Association croate des employeurs - HUP) jouit du statut d'observateur auprès de la Communauté des confédérations de l'industrie et des employeurs d'Europe (UNICE). Des consultations tripartites sont organisées au sein du Conseil économique et social et dans trois comités différents du parlement croate. Le gouvernement consulte également les partenaires sociaux par le biais des conseils d'administration de certains fonds et institutions tels que le Fonds national de pension, le Fonds national d'assurance maladie, le Conseil des médias et le Service pour l'emploi.

Un dialogue social autonome semble prendre forme à différents niveaux: des entreprises, local, sectoriel et national. À ce jour, 142 organisations de partenaires sociaux ont été créées mais elles ne couvrent qu'un nombre limité de secteurs. Les conventions collectives semblent être essentiellement conclues au niveau des entreprises et sont enregistrées par le ministère de l'Économie, du Travail et des Entreprises. Le taux de couverture des conventions collectives est d'environ 60 %. Il conviendra d'aller de l'avant dans la mise en place d'un dialogue bipartite autonome, essentiellement au niveau sectoriel.

La Croatie est actuellement occupée à réformer son système de santé. La réorganisation du Fonds d'assurance maladie en tant que principale source financière de la réforme est intervenue en 2003 et constitue un élément essentiel du processus. Il semble que les mesures prises pour améliorer l'état de santé de la population soient appropriées (l'accent étant mis sur la promotion de la santé, la prévention de la maladie et l'accès généralisé aux soins). Néanmoins, des ressources supplémentaires s'avèrent nécessaires, sur le plan financier, matériel et humain, pour que la réforme des soins de santé soit un succès et que l'état de santé de la population s'améliore.

Un système de contrôle des maladies transmissibles a été mis en place par la loi sur la protection de la population contre les maladies infectieuses et d'autres actes législatifs. Il existe une base juridique pour la mise en oeuvre de plans d'éradication des maladies transmissibles ainsi qu'un programme d'immunisation élaboré selon les recommandations et orientations de l'OMS. Il conviendrait de modifier la liste des maladies placées sous le contrôle de l'État et d'utiliser les définitions de cas de l'UE dans le cadre du système de notification afin de permettre la comparabilité des données. Les capacités de contrôle continu sont disponibles et on constate une coopération entre les services de soins de santé et les services vétérinaires. Les maladies transmissibles ne semblent pas constituer un problème sérieux en Croatie. Les données à cet égard sont satisfaisantes et les courbes de morbidité favorables. Néanmoins, des efforts supplémentaires sont nécessaires pour préparer la coordination avec les structures de l'UE, notamment en vue de la mise en place d'un système de contrôle des maladies nosocomiales, d'un système de surveillance de la résistance antimicrobienne ou d'un plan d'action national en cas d'épidémie.

Plusieurs textes de loi couvrent le domaine de la qualité du sang. Il semble qu'ils soient largement conformes à la directive sur le sang. Il se peut qu'il n'y ait pas suffisamment de ressources matérielles pour satisfaire aux exigences dans ce domaine. La Croatie devrait aussi élaborer et mettre en oeuvre une nouvelle législation pour s'aligner sur la directive relative à la qualité et la sécurité des tissus et des cellules, qui vient d'être adoptée.

La loi croate de 1999 sur les restrictions en matière d'utilisation des produits du tabac est dans une large mesure conforme aux dispositions de la directive sur les produits du tabac. Elle ne répond toutefois pas à toutes les exigences de l'acquis en ce qui concerne notamment les avertissements, les teneurs en monoxyde de carbone et les désignations trompeuses. Les teneurs maximales en nicotine et en goudron sont également plus élevées que celles prévues dans la directive. La loi comporte une interdiction de publicité qui est plus stricte que celle figurant dans la directive sur la publicité. Elle contient également des dispositions sur l'interdiction de fumer dans les lieux publics, fixe un âge minimal pour l'achat de tabac et prévoit des mesures de prévention du tabagisme.

En ce qui concerne la politique de l'emploi, le taux de chômage s'élevait à 14,1 % pendant les six premiers mois de 2003 (selon la méthodologie de l'OIT) bien qu'il ait diminué au cours des deux dernières années. Les taux d'activité restent faibles, ce qui constitue une source de préoccupation. La politique de l'emploi consiste essentiellement en un certain nombre de mesures actives en faveur du marché du travail (par exemple, en faveur des jeunes sans expérience professionnelle et des nouveaux diplômés universitaires), qui sont mises en oeuvre par les services de l'emploi. Les partenaires sociaux et régionaux sont impliqués dans le processus. Bien que le manque de fonds tende à restreindre la portée de ces mesures, les agences pour l'emploi ont fait l'objet d'une profonde réforme et semblent ainsi disposer d'une base de mise en oeuvre efficace. Aucune mesure ne semble exister en faveur des chômeurs de longue durée. Il y aurait lieu de renforcer les liens entre les agences pour l'emploi et les écoles professionnelles pour remédier à l'inadéquation actuelle entre l'offre et la demande de compétences sur le marché du travail.

La Croatie a l'intention d'élaborer un premier plan national d'action pour l'emploi (PNAE) sur la base des lignes directrices européennes pour l'emploi révisées. Le premier PNAE devrait contribuer à une approche plus stratégique en matière d'emploi. Dans ce contexte, la Croatie doit développer les capacités d'analyse, de mise en oeuvre et d'évaluation des politiques de l'emploi.

Dans le cadre des actions préparatoires au Fonds social européen, la mise en oeuvre de mesures actives en faveur du marché du travail constitue une première étape utile. La Croatie devra adapter ses structures et sa législation pour mettre en place la capacité administrative nécessaire à la gestion, l'exécution, le suivi, l'audit et le contrôle des mesures liées au fonds social aux niveaux national et régional.

Par rapport à la taille de son économie, la Croatie applique un système de protection sociale relativement généreux. Des réformes ont été entreprises au cours de ces dernières années, notamment le système de retraite à trois piliers.

Un domaine où des progrès doivent encore être accomplis concerne l'introduction d'indicateurs qualitatifs et quantitatifs internationalement comparables d'exclusion sociale et de pauvreté, ainsi que de méthodes permettant leur calcul. Une analyse spécifique de l'exclusion sociale et de la pauvreté dans la société croate est indispensable à l'élaboration des futurs programmes en faveur des groupes vulnérables tels que les retraités, les chômeurs de longue durée, les personnes handicapées, les réfugiés et les Roms, spécialement dans les régions ayant été touchées par la guerre.

La Croatie semble avoir progressé en matière de lutte contre la discrimination bien qu'aucun texte de loi spécifique n'ait été adopté. Des mesures nationales doivent être prises pour appliquer les dispositions anti-discriminatoires. Le code du travail a récemment fait l'objet de modifications sur un certain nombre de points couverts par les directives (définitions de la discrimination directe et indirecte, du harcèlement, de la charge de la preuve). Il semble que des dispositions anti-discriminatoires dans les domaines autres que l'emploi figurent uniquement dans la constitution, le code pénal et les instruments internationaux en matière de droits de l'homme ratifiés par la Croatie. En ce qui concerne l'organisme chargé de promouvoir l'égalité requis au titre des directives, la Croatie dispose actuellement d'un médiateur pour les droits de l'homme pouvant assurer la fonction de cet organisme. (En ce qui concerne les droits des minorités, des réfugiés et des Roms, voir partie 1 - Critères politiques)

Conclusion

Bien que la Croatie ait commencé l'alignement sur l'acquis dans les domaines du droit du travail, de la santé et la sécurité au travail, de la santé publique, de l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes et de la lutte contre la discrimination, des progrès substantiels restent à faire. Le cadre réglementaire et, notamment, administratif en matière de protection de la santé et de la sécurité au travail doit être renforcé. Des mesures actives en faveur du marché du travail doivent encore être mises au point pour remédier à l'inadéquation actuelle entre l'offre et la demande de compétences sur le marché du travail. Une approche plus stratégique en matière d'emploi doit être adoptée et complétée par une capacité appropriée d'analyse, de mise en oeuvre et d'évaluation. Le renforcement des services d'emploi publics devrait aller de pair avec la poursuite des initiatives de modernisation. Une analyse spécifique de l'exclusion sociale et de la pauvreté dans la société croate est nécessaire. En outre, il y a lieu de renforcer le dialogue social et d'envisager des actions préparatoires à la mise en oeuvre du FSE.

D'une manière générale, la Croatie devra consentir des efforts considérables et soutenus pour aligner sa législation sur l'acquis et pour le mettre en oeuvre et l'appliquer réellement à moyen terme dans le domaine de la politique sociale et de l'emploi. Il convient aussi qu'elle se prépare à participer aux processus de coopération mis en place au niveau européen dans les domaines de l'emploi, l'insertion sociale et les retraites.

Chapitre 14 - Énergie

La politique communautaire de l'énergie a notamment pour objectifs d'améliorer la compétitivité, de veiller à la sécurité des sources d'approvisionnement et de protéger l'environnement. L'acquis dans ce domaine comprend des règles et des politiques qui concernent en particulier la concurrence et les aides d'État (y compris dans le secteur du charbon), le marché intérieur de l'énergie (l'ouverture des marchés de l'électricité et du gaz, la promotion des énergies renouvelables, la gestion des crises et l'obligation de constituer des stocks pétroliers de sécurité, par exemple), l'efficacité énergétique et l'énergie nucléaire.

La Croatie dispose de certaines sources d'énergie domestiques (pétrole, gaz, combustibles solides, énergie hydraulique) mais dépend de plus en plus de sources d'approvisionnement extérieures, notamment pour le pétrole. Elle est un pays de transit important pour l'électricité, le gaz et le pétrole. Ses réserves de charbon récupérables relativement limitées sont estimées à 39 millions de tonnes mais il n'y a plus aucune production nationale de combustibles solides depuis 1997. La houille, utilisée pour la production d'électricité et dans l'industrie sidérurgique, est importée en faibles volumes, soit moins de 100 000 tonnes par an. La Croatie est membre des réseaux d'électricité d'Europe de l'Ouest (Union pour la coordination du transport de l'électricité-UCTE). La stratégie nationale de développement du secteur énergétique, couvrant la période 2002-2012, semble être généralement conforme aux objectifs de l'UE dans le domaine de l'énergie. Les principales entreprises du secteur de l'énergie appartiennent à l'État (Hrvatska Elektroprivreda - HEP - holding spécialisé dans les activités liées à l'électricité, Plinacro dans le transport du gaz et Jadranske naftovod dans le transport du pétrole). La privatisation du secteur a commencé avec la vente de 25 % des parts de la compagnie pétrolière et gazière INA. La poursuite de la privatisation est envisagée. Les 40 sociétés de distribution de gaz appartiennent généralement aux autorités locales. La compagnie d'électricité HEP possède 50 % des parts de la centrale nucléaire de Krsko située en Slovénie.

En ce qui concerne la sécurité d'approvisionnement, et notamment les stocks de pétrole, la législation-cadre existe et comprend, entre autres, la loi sur l'énergie, la loi sur le marché du pétrole et des produits pétroliers, la loi sur les stocks stratégiques d'urgence et l'ordonnance sur les réserves obligatoires de pétrole et de produits pétroliers. Cette législation-cadre prévoit notamment l'augmentation progressive des stocks obligatoires de pétrole (de 10 % à 25 % des importations nettes de l'année précédente d'ici à 2006). Les stocks sont généralement détenus par les sociétés. La Croatie doit prendre d'autres mesures afin de se conformer à l'acquis qui exige des stocks d'urgence de pétrole de 90 jours. Les principaux organes administratifs dans ce domaine de l'acquis sont le ministère de l'Économie et le Bureau de l'Inspection de l'État. La Croatie envisage la création d'une agence distincte qui serait responsable des stocks de pétrole. Le renforcement de la capacité administrative semble nécessaire.

Dans le domaine de la compétitivité et du marché intérieur de l'énergie, la Croatie a adopté cinq lois fondamentales en juillet 2001: la loi sur l'énergie, la loi sur le marché de l'électricité, la loi sur le marché du gaz, la loi sur le marché du pétrole et des produits pétroliers et la loi réglementant les activités liées à l'énergie.

Le marché de l'électricité a été ouvert aux clients consommant plus que 40 GWh par an. L'accès aux réseaux est soumis aux règles relatives à l'accès de tiers. La compagnie d'électricité HEP a mis en place un opérateur indépendant chargé du transport et du marché.

Le marché du gaz a été ouvert aux gros clients dont la consommation annuelle dépasse 100 millions de m³ et à tous les producteurs d'électricité et de chaleur/électricité à partir du gaz. L'accès aux réseaux est garanti par le régime de l'accès négocié de tiers.

Tant dans les sociétés de gaz que d'électricité, les comptes correspondant aux différentes activités sont dissociés. La législation prévoit la possibilité d'imposer des obligations de service public et le contrôle de la sécurité d'approvisionnement.

La Croatie a pris des mesures essentielles en vue de sa participation progressive au marché intérieur de l'énergie et de l'alignement sur les directives sur l'électricité et le gaz. Elle prévoit d'ouvrir entièrement son marché de l'électricité et du gaz d'ici à 2007, de manière globalement conforme aux exigences de l'UE. La législation doit être encore affinée et les dispositions d'application sont en attente d'adoption. La possibilité de restreindre les importations et les exportations de produits énergétiques devrait être supprimée. La Croatie devrait également éliminer les distorsions de prix. Les prix du gaz semblent refléter les coûts mais il subsiste des distorsions dans le domaine de l'électricité et du chauffage urbain.

Le Conseil croate de régulation de l'énergie est un organisme officiellement indépendant qui délivre des licences pour les activités énergétiques, supervise les tarifs et exerce d'autres fonctions de régulation. Les cinq membres du Conseil sont nommés par le Parlement et ses coûts sont couverts par le budget de l'État. Il ne devrait y avoir aucun lien obligatoire entre le Conseil de régulation et l'Institut de l'énergie dominé par le HEP. De façon générale, il est nécessaire de renforcer le pouvoir, la formation et le personnel du régulateur et du ministère et de définir leurs rôles respectifs de sorte qu'aucun réexamen spécifique d'une décision du régulateur ne puisse être adressé au ministère. Des réformes devront également être entreprises au sein du groupe dominant dans le secteur de la production d'électricité, en l'occurrence le HEP.

La Croatie applique, sur la base de la loi sur l'exploitation minière, un système non discriminatoire d'autorisations pour la prospection, l'exploration et la production des hydrocarbures; néanmoins, elle devrait assurer la conformité avec la directive sur les autorisations d'exploitation des hydrocarbures.

Le marché régional de l'électricité en Europe du Sud-Est, couvrant l'électricité et le gaz, a mis en place un programme de transition échelonné, adapté aux caractéristiques spécifiques de la région. L'objectif du programme est la réintégration des marchés nationaux et infranationaux de l'énergie dans la perspective finale d'une adhésion au marché intérieur de l'énergie de l'UE. Dans ce contexte, la Croatie est encouragée à rétablir ses infrastructures d'interconnexion avec le sud et à gérer les échanges accrus qui en résulteront.

La Croatie a mis en place, depuis 1997, des programmes d'efficacité énergétique et d'utilisation des énergies renouvelables. Ils reposent, depuis 2002, sur la stratégie de développement du secteur énergétique. Le budget annuel du programme en 2002 et 2003 s'élevait à 2,8 millions HRK (380 000 euros); des moyens financiers supplémentaires sont en outre consacrés au travail juridique et institutionnel dans ce domaine. Le cadre législatif comporte la loi sur l'énergie et la loi sur le fonds pour la protection de l'environnement et l'efficacité énergétique. Les dispositions d'application visant à l'alignement sur l'acquis sont en cours de préparation et devraient entrer en vigueur en 2004.

Des progrès restent à faire pour améliorer l'efficacité énergétique et promouvoir les sources d'énergie renouvelables. Il y a lieu d'approfondir la législation et de renforcer la capacité institutionnelle.

Dans le domaine de l'énergie nucléaire et de la sûreté nucléaire, la Croatie ne dispose pas de centrales nucléaires ni d'installations du cycle du combustible. Néanmoins, la compagnie nationale d'électricité (HEP) est co-propriétaire de la centrale nucléaire de Krsko située en Slovénie. L'accord sur la centrale nucléaire de Krsko entre la Croatie et la Slovénie, réglementant le statut et d'autres aspects juridiques liés aux investissements, à l'exploitation et au déclassement de la centrale, est entré en vigueur en mars 2003. La Croatie n'envisage pas actuellement la construction d'une centrale nucléaire. En ce qui concerne la gestion des déchets radioactifs, il existe deux installations de stockage de sources radioactives usées et de déchets de faible activité résultant de différentes applications des sources radioactives.

La loi sur la sûreté nucléaire, adoptée en octobre 2003, constitue le cadre juridique applicable au secteur nucléaire conformément aux normes internationales, notamment aux recommandations de l'AIEA. La Croatie est signataire de plusieurs accords bilatéraux et conventions internationales et est membre de l'AIEA.

Il n'existe actuellement aucune autorité de tutelle indépendante en matière d'énergie nucléaire. Le ministère de l'Économie est entièrement responsable de la sûreté nucléaire, de l'octroi des autorisations pour les installations nucléaires, y compris les équipements de traitement des combustibles et des déchets, et des activités liées à la sauvegarde des matières nucléaires. Néanmoins, la nouvelle loi sur la sûreté nucléaire prévoit la création d'un Institut national pour la sûreté nucléaire, qui assumera la responsabilité des activités liées la sûreté nucléaire, auparavant du ressort du ministère de l'Économie. En vertu de la nouvelle loi, cette autorité de tutelle en matière de sûreté nucléaire sera opérationnelle au plus tard le 1er janvier 2005. L'Agence pour la gestion des déchets dangereux est responsable des activités ayant trait à l'élimination et au stockage des déchets dangereux, y compris les déchets radioactifs. Le ministère de l'Intérieur est chargé d'adopter et de contrôler les mesures de protection et de sécurité contre les risques de manipulation et de trafic illicite de matières nucléaires. Il prend également les décisions sur les mesures de protection spécifiques pour le transport de matières radioactives.

Dans le domaine des sauvegardes nucléaires, la Croatie a signé et ratifié un accord de sauvegarde global et un protocole additionnel à cet accord avec l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Dès l'adhésion, le traité EURATOM sera directement applicable et les opérateurs dans le secteur du nucléaire en Croatie devront communiquer toutes les informations dans le domaine des sauvegardes à la Commission qui en informera à son tour l'AIEA.

Conclusion

La Croatie devra poursuivre ses efforts pour aligner sa législation sur l'acquis dans ce domaine et pour la mettre en oeuvre et l'appliquer de façon effective à moyen terme, y compris les dispositions du traité EURATOM. Ces efforts devront surtout être consacrés à la législation et la capacité administrative dans le domaine des stocks de pétrole, du marché intérieur de l'énergie, de l'efficacité énergétique et l'utilisation des énergies renouvelables ainsi que de l'énergie nucléaire. La constitution effective de stocks de pétrole de 90 jours devra également être garantie.

Chapitre 15 - Politique industrielle

La politique industrielle de l'UE vise à accroître la compétitivité des entreprises et à améliorer le taux d'emploi tout en opérant sur des marchés ouverts à la concurrence internationale. Elle a pour objectif d'accélérer l'adaptation aux changements structurels en promouvant un cadre propice à l'initiative et à la création d'entreprises dans toute la Communauté. La stratégie communautaire dans ce domaine consiste principalement à définir des principes fondamentaux et à élaborer des déclarations de politique industrielle à caractère horizontal et sectoriel. Le contrôle des aides d'État et la compatibilité des systèmes d'aide avec les règles communautaires constituent un élément important de toute politique industrielle (voir également le chapitre 6 - Politique de concurrence).

L'industrie croate représentait 25,3 % du PIB en 2002. L'industrie manufacturière se compose d'environ 8 500 entreprises, dont la plupart appartiennent au secteur privé. L'emploi dans l'industrie s'élève à quelque 300 000 personnes. Les petites entreprises représentent plus de 90 % de l'ensemble des entreprises industrielles, mais les moyennes et grandes entreprises emploient 84 % de la main-d'oeuvre industrielle. Les secteurs les plus importants sont l'alimentation, la chimie, le textile-habillement et la construction navale.

L'agro-alimentation constitue l'un des secteurs les plus importants et dynamiques de l'industrie croate. Elle représente 20,5 % de la production industrielle totale et 17,7 % de l'emploi total dans l'industrie. Le nombre d'entreprises dans ce secteur a augmenté de 21 % entre 1999 et 2002. La production a augmenté d'environ 14 % entre 1998 et 2001. Les investissements des États membres de l'UE sont axés sur la fabrication de boissons non alcoolisées, d'eaux minérales et de bières.

L'industrie chimique est un secteur industriel important en Croatie, représentant environ 11 % dans la production industrielle totale et 8 % de l'emploi total dans l'industrie. Cette industrie se compose essentiellement de PME appartenant à des propriétaires privés et deux tiers des entreprises relèvent du secteur du caoutchouc et des plastiques. L'importance de l'investissement étranger direct dans le secteur en 1999 et 2000 est un indicateur de l'amélioration de la compétitivité. La balance commerciale dans le secteur est largement négative, l'UE étant le principal partenaire commercial.

Le secteur du textile-habillement apporte une contribution relativement importante à l'économie croate, représentant 5,6 % de la production industrielle totale et 17 % de l'emploi. La structure industrielle est caractérisée par la propriété privée et la prédominance des petites entreprises. Les importations en provenance de l'UE ont augmenté. Des ajustements structurels supplémentaires sont nécessaires pour accroître la compétitivité dans ce secteur.

La production du secteur de la construction navale croate correspond à 1 % de la production mondiale. Il représente 4,4 % de la production industrielle et 4,9 % de l'emploi industriel. Il n'a pas fait l'objet d'une privatisation significative, cinq des six chantiers navals étant toujours détenus par l'État. Ce dernier accorde actuellement une aide importante au secteur qui devra être soumis à une politique de restructuration pour améliorer sa compétitivité conformément aux règles en matière de concurrence et d'aides d'État.

Le secteur croate de l'industrie lourde (matières premières) est peu important, représentant moins de 3 % de la production et de l'emploi industriels. Le ciment constitue la moitié de cette production. Quant à l'emploi, il se répartit plus équitablement sur les différents sous-secteurs. L'industrie sidérurgique croate produit des ronds à béton pour le secteur de la construction, essentiellement destinés à la consommation intérieure, et des tuyaux sans soudure qui sont principalement exportés. Cette industrie représente à peine 1 % de l'ensemble de la production et de l'emploi industriels. Une des deux entreprises sidérurgiques croates a été privatisée. Un programme de restructuration et de conversion du secteur de l'acier sera à la base des efforts que la Croatie devra consentir pour se conformer à ses obligations au titre du protocole 2 de l'accord intérimaire relatif au commerce et aux mesures d'accompagnement en ce qui concerne les aides d'État.

Les produits pharmaceutiques qui représentent 4 % de la production industrielle et 1,7 % de l'emploi industriel, présentent une tendance à la baisse depuis trois ans. Le secteur est caractérisé par la prédominance d'une société avec 70 % de l'emploi. Les investissements étrangers directs ont diminué; quant à la principale entreprise croate, elle a procédé à des acquisitions sur les marchés étrangers.

Le secteur des appareillages électriques et de la construction mécanique (comprenant le matériel de radio, de télévision et de télécommunications) est déjà étroitement intégré à l'industrie de l'UE. Il représente 5,3 % de la production industrielle et 5,5 % de l'emploi industriel. La Croatie est spécialisée dans les métaux et l'appareillage électrique et son utilisation des capacités est relativement élevée. Les importations croates dans ce secteur ont essentiellement pour origine l'UE qui est également la destination principale des exportations croates.

La structure de l'industrie de la construction et des matériaux de construction est semblable à celle des États membres de l'UE et représente environ 4 % du PIB. Il est à très à forte intensité de main-d'oeuvre avec un tiers de l'emploi industriel total. La majorité des entreprises sont des PME. Les investissements étrangers directs ont connu une forte expansion pendant la période de reconstruction après la guerre et ont diminué depuis.

L'industrie des technologies de communication et d'information (TCI) est de taille relativement réduite en Croatie, avec 3 % de la production industrielle et 2 % de l'emploi. La balance commerciale est largement négative, les exportations de l'UE provenant essentiellement d'Autriche, d'Allemagne et d'Italie, ce qui montre que le commerce entre industries constitue une part essentielle des échanges de TCI. L'industrie des équipements de télécommunications est la seule à bénéficier d'un apport important en capitaux étrangers.

Le tourisme qui constitue la principale industrie d'exportation croate continue de progresser. Après avoir connu un sérieux déclin au début des années 90 en raison du déclenchement des hostilités dans la région, le secteur touristique a redémarré en 1996 et représente actuellement 17 % du PIB. On a atteint le chiffre de 45 millions de nuitées et de 7 millions de visiteurs étrangers en 2002. Les capacités hôtelières sont encore d'environ 25 % inférieures à celles de 1991 mais il existe un potentiel de développement important à condition que des progrès soient accomplis en matière de privatisation des actifs touristiques et qu'il y ait davantage d'investissements. En 2002, plus de 55 % des touristes étrangers provenaient des États membres de l'UE.

La Croatie n'a pas encore adopté de stratégie industrielle globale, indépendante de sa politique économique générale. Les conditions-cadres pour l'industrie sont mises en oeuvre par le biais d'autres politiques gouvernementales telles que le programme de travail du gouvernement de la République de Croatie (2000-2004) et les principes du développement de la République de Croatie au 21e siècle. Les autorités croates devraient adopter et mettre en oeuvre une stratégie cohérente pour améliorer la compétitivité industrielle et l'environnement des entreprises en général. Cette stratégie devrait tenir compte des besoins et des caractéristiques spécifiques des différents secteurs.

L'investissement étranger dans l'industrie manufacturière représente 13 % de l'ensemble des investissements étrangers directs. Une agence de promotion du commerce et des investissements vient d'être créée mais n'est pas encore totalement opérationnelle. D'autres mesures devraient être adoptées pour stimuler les investissements nationaux et étrangers, notamment par la simplification des procédures juridiques et administratives.

En ce qui concerne la privatisation et la restructuration, un programme de privatisation du portefeuille de l'État a été adopté en février 2001. De lourdes dettes, une faible rentabilité, une main-d'oeuvre excédentaire et un engagement limité de la part du gouvernement ont contribué à processus de privatisation plus lent que prévu. Les progrès dans la restructuration de l'industrie manufacturière restent inégaux. Les secteurs où la restructuration et la modernisation s'avèrent des plus urgentes sont le textile, l'acier et la construction navale.

L'autorité centrale responsable de la formulation et de la coordination de la politique industrielle est le ministère de l'Économie, du Travail et des Entreprises, dont le rôle de coordinateur devrait être renforcé. Les associations professionnelles sont consultées par le gouvernement mais des efforts supplémentaires sont nécessaires pour institutionnaliser la promotion des entreprises et le dialogue entre le secteur public et le secteur privé en Croatie. La privatisation relève du Fonds de privatisation d'État sauf indication contraire au titre de lois spécifiques.

Conclusion

La Croatie devra améliorer rapidement les conditions nécessaires aux investissements nationaux et étrangers et achever le processus de privatisation et de restructuration. Si elle poursuit ses efforts, elle devrait pouvoir satisfaire aux exigences de l'UE dans le domaine de la politique industrielle à moyen terme.

Chapitre 16 - Petites et moyennes entreprises

La politique de l'UE à l'égard des PME entend mieux définir et coordonner les actions menées en faveur de l'entreprise dans l'ensemble du marché intérieur pour y encourager la création de petites et moyennes entreprises. Ce faisant, elle vise aussi à améliorer le climat général dans lequel les PME exercent leurs activités. Cette politique repose essentiellement sur la constitution d'enceintes consultatives, sur l'élaboration de programmes communautaires, de communications et de recommandations et sur des échanges de meilleures pratiques.

La Croatie a souscrit à la Charte européenne des petites entreprises au sommet de Thessalonique en juin 2003. Les PME constituent la grande majorité des entreprises croates, soit 99,6 % du nombre total d'entreprises (moyenne de l'UE: 98 %) et 65,7 % de l'emploi (moyenne de l'UE: 66 %). La politique croate considère l'artisanat et les coopératives comme des entreprises distinctes. La politique-cadre est fixée dans plusieurs lois qui énoncent les fondements et définitions juridiques spécifiques des PME.

Le programme de développement des petites entreprises pour 2003-2006 définit la stratégie du gouvernement en ce qui concerne les PME, prévoyant notamment d'accorder davantage d'importance aux PME dans l'économie nationale. Entre 2000 et 2003, la Croatie disposait d'un ministère spécialement chargé des PME; ses attributions ont été réaffectées au ministère de l'Économie, du Travail et des Entreprises au début de 2004.

Il n'existe aucune procédure d'évaluation d'incidence de la législation sur l'environnement des entreprises, mais elle est en cours de préparation. La qualité de la législation et des règles applicables aux entreprises de même que l'efficacité de l'administration et du pouvoir judiciaire en Croatie devront encore être améliorées pour offrir un environnement favorable aux entreprises.

En ce qui concerne la défense et la promotion des intérêts, il est obligatoire de s'affilier à une chambre. Les chambres sont organisées par types d'entreprises et sur le modèle de la Chambre générale de commerce. Une caractéristique originale de la représentation des PME en Croatie est que les chambres d'entreprises et la chambre de l'artisanat sont représentées dans des organes de travail du parlement croate et exercent une influence directe sur l'élaboration de la nouvelle législation.

Le délai nécessaire à l'enregistrement d'une entreprise a été raccourci au cours de ces dernières années mais il faut poursuivre la simplification des procédures. Une loi sur la signature électronique a été votée en janvier 2002 mais il n'existe pratiquement pas de commerce électronique à l'heure actuelle et l'enregistrement électronique des entreprises n'est pas possible.

Le ministère de l'Économie, du Travail et des Entreprises gère un programme de soutien des exportations par les PME. La Chambre de commerce croate dispose d'un centre pour la qualité et gère un Euro-Info-Centre de correspondance. La législation fiscale nationale ne prévoit pas d'exonération d'impôts pour les petites entreprises. Quelques abattements fiscaux sont accordés pour la réhabilitation de zones géographiques spécifiques ou en faveur de certaines catégories de personnes.

L'accès au financement des PME s'est amélioré grâce aux taux d'intérêt relativement faibles offerts par les banques mais les exigences de garantie peuvent toujours constituer un obstacle aux prêts bancaires. L'Agence croate pour les petites entreprises (HAMAG) fonctionne de facto comme un fonds public de garantie et a émis 3 400 garanties depuis 1995 pour une valeur de 87 millions d'euros.

Le programme croate pour le développement de la technologie et de l'innovation (HITRA) vise à mettre en place les instruments et les institutions nécessaires au transfert de technologie aux PME au moyen de différents incitants financiers et non financiers.

L'éducation et la formation à l'esprit d'entreprise ne sont pas reconnues comme des matières distinctes dans le programme des études d'enseignement secondaire mais certaines activités extra-scolaires soutenues par des donateurs existent. Le choix de ces cours au niveau universitaire est limité. Une série de mesures et des manuels visant à promouvoir les activités des entreprises bénéficient du soutien du gouvernement, des chambres de commerce et des services de conseils aux entreprises. Des enquêtes sur les qualifications des entrepreneurs sont en cours, à l'initiative du ministère de l'Économie et des chambres professionnelles croates.

Conclusion

La Croatie devrait poursuivre l'adaptation de sa législation régissant les entreprises, l'amélioration de l'environnement administratif et juridique et la mise en oeuvre de la Charte européenne des petites entreprises. Il lui faudrait s'aligner sur la nouvelle recommandation formulée par la Commission concernant la définition des PME. De façon générale, la Croatie devrait être en mesure de participer pleinement à la politique de l'UE à l'égard des PME.

Chapitre 17 - Science et recherche

L'acquis en matière de science et de recherche, par nature, n'exige aucune transposition dans l'ordre juridique national. La capacité de mise en oeuvre ne concerne pas l'application et l'exécution de dispositions juridiques mais plutôt l'existence de conditions nécessaires à une participation pleine et entière aux activités des programmes-cadres. Pour garantir le succès de la mise en oeuvre de l'acquis dans ce domaine, notamment une association réussie aux programmes-cadres, la Croatie devra créer les capacités de mise en oeuvre nécessaires dans le domaine de la recherche et du développement technologique par un renforcement du personnel affecté aux activités des programmes-cadres.

La Croatie participe aux 6e programmes-cadres des Communautés européennes pour la recherche et le développement technologique en tant que pays tiers.

En Croatie, la science et la recherche relèvent du ministère de la Science, de l'Éducation et des Sports. Les organes consultatifs sur les questions de science et d'enseignement supérieur sont le Conseil scientifique national et le Conseil national pour l'enseignement supérieur. La législation de base dans ce domaine est la loi sur l'activité scientifique et l'enseignement supérieur adoptée en juillet 2003. La politique en matière de technologie est définie dans le programme croate pour un développement technologique innovant.

Les dépenses publiques consacrées à la recherche et au développement s'élevaient à 1,09 % du PIB en 2001 (UE: 1,99 % du PIB). Les dépenses des entreprises sont estimées à 32-45 % du montant du budget de l'État consacré à la R&D. Le système croate dans le domaine de la recherche est articulé autour de 5 universités, 26 instituts publics, 11 centres de recherche dans le secteur industriel, 18 écoles d'enseignement supérieur professionnel, 8 écoles polytechniques, 1 centre militaire de recherche et 50 autres entités juridiques spécialisées dans la recherche scientifique.

Une participation à part entière aux programmes-cadres, qui devrait constituer la première étape de la mise en oeuvre de l'acquis dans le domaine de la recherche, nécessite le développement de la politique de la recherche, de l'infrastructure et du cadre institutionnel adéquat. Elle dépend également des disponibilités budgétaires pour le paiement des frais d'association.

Les perspectives d'intégration de la science et la technologie croates dans l'espace européen de la recherche sont définies dans la stratégie pour le développement de la science en République de Croatie au 21e siècle et dans la loi sur l'activité scientifique et l'enseignement supérieur. Ces documents prévoient des changements en profondeur afin de créer un système efficace et stimulant dans le domaine de la science et la technologie, fondé sur le modèle de l'UE. L'intégration dans l'espace européen de la recherche est soutenue par le biais des programmes CARDS et TEMPUS.

Conclusion

Les efforts devront se poursuivre pour améliorer l'efficacité et la compétitivité de la recherche et du développement économique en Croatie et les rapprocher du niveau européen. La participation aux programmes-cadres devra être bien préparée pour avoir des chances de succès. La Croatie est toutefois bien placée pour répondre aux exigences de l'UE dans ce domaine à moyen terme.

Chapitre 18 - Éducation et formation

L'éducation, la formation et la jeunesse relèvent principalement de la compétence des États membres. Le traité CE dispose que la Communauté contribue au développement d'une éducation de qualité et met en oeuvre une politique de formation professionnelle qui appuie et complète l'action des États membres. L'acquis dans ces domaines consiste en une directive visant à la scolarisation des enfants de travailleurs migrants, en programmes d'action et en recommandations. Les États membres doivent disposer de la capacité de mise en oeuvre nécessaire pour participer effectivement aux programmes communautaires relevant de ce chapitre (Leonardo Da Vinci, Socrates et Youth).

Une nouvelle loi sur l'activité scientifique et l'enseignement supérieur, entrée en vigueur en 2003, fournit un cadre pour la réforme des universités, les programmes d'étude et la mise en oeuvre des principes de la déclaration de Bologne que la Croatie a signée en 2001. Le programme Tempus a grandement contribué à la réforme de l'enseignement supérieur et a jeté les bases d'une coopération avec les instituts d'enseignement supérieur de l'UE.

Les priorités de la Croatie en matière d'éducation ont été progressivement recentrées sur les besoins d'une économie de marché et l'amélioration de la qualité du système d'enseignement et de formation. Un domaine nécessitant une attention particulière est l'enseignement des langues étrangères dans les écoles primaires et secondaires.

On compte actuellement peu d'enfants de ressortissants de l'UE inscrits dans les écoles croates. D'ici à l'adhésion, des mesures appropriées devront être prises en ce qui concerne les enfants de travailleurs migrants afin de satisfaire aux exigences spécifiques de l'acquis.

L'enseignement professionnel en secondaire constitue un sérieux défi pour la Croatie. Une commission a été chargée d'élaborer une stratégie pour l'enseignement professionnel et un processus de réforme a été lancé, notamment avec la création d'un Conseil national de l'enseignement professionnel. Néanmoins, les efforts de réforme actuellement déployés semblent insuffisants pour surmonter les problèmes tels que le manque d'enseignants qualifiés, les programmes d'études dépassés, le faible niveau d'investissement, l'absence d'un système de normes et de qualification professionnelles reconnu au niveau national et des liens insuffisants avec le secteur privé. Des améliorations dans ce domaine constitueront un élément essentiel dans la lutte contre le chômage.

Une politique structurée en ce qui concerne la jeunesse a été élaborée et a donné lieu à l'adoption d'un plan national d'action pour les jeunes en 2003. Si elle adhère à l'UE, la Croatie devra souscrire aux objectifs communs en matière de participation et d'information des jeunes, décidés par le Conseil en novembre 2003. La Croatie profite déjà du programme Youth en tant que pays tiers et les organisations croates participent activement aux échanges de jeunes, au Service volontaire européen et aux mesures de soutien.

Conclusion

La Croatie ne devrait pas rencontrer de problèmes majeurs dans ce domaine à moyen terme. Néanmoins, il lui faudra consentir des efforts considérables pour mettre en place un système d'enseignement professionnel moderne et conforme aux politiques sociale et de l'emploi de l'UE.

Chapitre 19 - Télécommunications et technologies de l'information

L'acquis dans le domaine des télécommunications vise à éliminer les obstacles au bon fonctionnement du marché unique des services et réseaux de télécommunication et à mettre en place des services modernes accessibles à tous. Un nouveau cadre réglementaire relatif aux communications électroniques a été adopté par l'Union européenne en 2002. En ce qui concerne les services postaux, l'objectif consiste à mettre en oeuvre le marché unique en ouvrant ce secteur à la concurrence de manière progressive et contrôlée, dans un cadre réglementaire garantissant un service universel.

L'accord de stabilisation et d'association prévoit une coopération en matière d'infrastructures de communication électronique, notamment de réseaux de télécommunications classiques et de réseaux audiovisuels, ainsi que de services connexes, en vue de parvenir à l'alignement de la Croatie sur l'acquis communautaire à partir de l'entrée en vigueur du présent accord.

Sur le plan juridique, les services de télécommunication en Croatie sont régis principalement par la loi sur les télécommunications entrée en vigueur en août 2003. La Croatie s'est engagée, dans le cadre de l'OMC/AGCS, à supprimer le principal monopole en matière de télécommunications avant le 1er janvier 2003, une date arrêtée par la loi croate de 2000 sur les télécommunications pour l'abolition du monopole des télécommunications fixes des opérateurs en place. Toutefois, les dispositions administratives prévues par la loi de 2000 n'ont pas donné de bons résultats et, en août 2003, cette loi a été remplacée par une nouvelle loi sur les télécommunications visant à améliorer la transposition de l'acquis de 1998 et de certaines parties de l'acquis de 2002. Des modifications devront encore être apportées pour mettre le régime relativement pesant de l'autorisation en conformité avec l'acquis et pour garantir le parfait respect des dispositions du service universel, notamment pour ce qui est des aspects de neutralité technologique, de caractère abordable et de compensation. La Croatie doit toujours adopter certaines dispositions d'application essentielles pour que la libéralisation du marché puisse s'opérer.

En ce qui concerne les infrastructures de télécommunications de base, la pénétration de la téléphonie mobile et la prestation de services de RNIS et de DSL, la Croatie se situe à un niveau comparable à celui d'autres pays dont le marché est ouvert depuis 2001.

Selon la loi sur les télécommunications de 2003, le conseil pour les télécommunications et l'institut croate pour les télécommunications doivent être remplacés par une nouvelle agence pour les télécommunications. Pour la transposition et la mise en oeuvre de l'acquis, il importe que l'agence soit une autorité de tutelle entièrement indépendante disposant des pouvoirs et des ressources nécessaires à la mise en oeuvre d'une politique de libéralisation. Des procédures efficaces d'application des décisions de l'autorité de tutelle doivent être mises en place, de même qu'une procédure d'appel efficace. Il importe, en particulier, que ces procédures ne permettent pas d'utiliser le régime d'appel pour retarder la mise en oeuvre des décisions de l'autorité de tutelle. Il conviendra de coordonner les actions de la nouvelle autorité de tutelle et des autres institutions compétentes, telles que le ministère responsable, l'agence pour la protection de la concurrence sur les marchés et le conseil de protection des consommateurs. De plus, le conseil des usagers des services de télécommunications doit encore être créé et structuré correctement, afin de participer à la résolution des conflits survenant entre prestataires et usagers des services de télécommunications publics.

En pratique, peu de résultats ont été obtenus en matière d'entrée sur le marché depuis janvier 2003. Cette situation n'est, toutefois, n'a pas uniquement imputable à des lois défectueuses et à des institutions inefficaces. Plusieurs belles occasions de garantir d'importantes entrées sur le marché se sont présentées, telles que la possible venue d'un troisième opérateur de téléphonie mobile et d'un deuxième opérateur de réseau fixe, mais ces occasions n'ont pas été saisies. Des doutes s'ensuivent quant au niveau d'engagement de la politique de libéralisation. Les principaux bénéficiaires de ces retards ont été les deux sociétés présentes sur le marché national croate.

L'ouverture du marché a donc été contrecarrée par un manque d'engagement au niveau politique qui, conjugué à des institutions réglementaires mal conçues, a entraîné des retards dans la mise en oeuvre d'importantes mesures de libéralisation. Néanmoins, le rééquilibrage des prix de l'opérateur en place en vue de les rendre compétitifs est bien avancé et les indicateurs de cette société en situation de monopole montrent qu'elle a besoin d'un stimulus concurrentiel. Outre un monopole de fait en matière de réseau fixe, le groupe en place détient 53 % du marché de la téléphonie mobile et 75 % du marché des fournisseurs de services Internet. La Croatie devrait adopter des mesures urgentes visant à libéraliser son marché et à garantir que l'opérateur en place fait l'objet d'un contrôle réglementaire efficace.

Sur le plan juridique, les services postaux croates sont régis par la nouvelle loi postale, adoptée en 2003, qui rapproche dans une certaine mesure la législation croate de l'acquis. Néanmoins, de grandes divergences subsistent, notamment en ce qui concerne le champ d'application du service universel, les limites du secteur réservé, les procédures d'autorisation et de notification et la qualité du service. En vertu de la nouvelle loi postale, Hrvatska posta bénéficiera de l'exclusivité en tant que prestataire du service universel.

En ce qui concerne les structures administratives, la loi postale prévoit la création du conseil pour les services postaux, qui fera office d'autorité de tutelle. Les pouvoirs de ce conseil, tels que définis dans la nouvelle loi postale, sont largement en conformité avec ceux prévus dans l'acquis. Il importe, néanmoins, que le conseil soit doté du personnel et des ressources nécessaires à l'efficacité du régime réglementaire. Il importe, en outre, que son indépendance opérationnelle soit garantie.

Conclusion

La Croatie ne sera véritablement en mesure de garantir la mise en oeuvre intégrale et efficace de l'acquis dans le domaine des télécommunications que si elle apporte un appui politique significatif à la politique de libéralisation. L'autorité de tutelle devrait disposer de ressources et de pouvoirs adéquats et son indépendance à l'égard des préoccupations politiques quotidiennes devrait être assurée. Il convient également de fournir des ressources appropriées à l'autorité de tutelle nationale dans le domaine des services postaux et de garantir son indépendance opérationnelle.

D'une manière générale, la Croatie devra fournir des efforts considérables et soutenus, afin d'aligner sa législation sur l'acquis, mais aussi pour la mettre en oeuvre et l'appliquer à moyen terme dans les domaines des télécommunications et des services postaux.

Chapitre 20 - Culture et audiovisuel

Ce chapitre prévoit l'alignement de la législation sur la directive «Télévision sans frontières» et insiste sur la capacité à participer aux programmes communautaires «Culture 2000», «Media Plus» et «Media Formation». La directive «Télévision sans frontières» crée les conditions nécessaires à la libre circulation des programmes télévisés au sein de l'Union européenne. Elle suppose le respect de règles fondamentales communes en matière de juridiction, de publicité, d'événements importants, de promotion des oeuvres européennes, de protection des mineurs et de l'ordre public, ainsi que de droit de réponse.

La politique culturelle croate semble être compatible avec les objectifs communautaires définis dans le traité CE et reposer sur des instruments et des capacités institutionnelles pour promouvoir la culture et la coopération.

Dans l'audiovisuel, un nouveau cadre législatif a été mis en place en 2003 (voir également la partie 1 - Critères politiques). La loi sur les médias électroniques régit l'activité des organismes de radiodiffusion télévisuelle privés et publics, tandis que la loi croate sur la radio et la télévision (HRT) porte sur le statut et l'activité du radiodiffuseur de service public. La législation en la matière comprend aussi la loi sur les médias et la loi sur les télécommunications. La Croatie est partie à la convention européenne sur la télévision transfrontière.

L'adoption, en 2003, de la nouvelle législation sur les médias constitue un important pas en avant. La loi sur les médias électroniques est largement alignée sur les normes internationales et européennes en la matière et la Croatie s'est efforcée de transposer les dispositions de la directive «Télévision sans frontières». Quelques différences demeurent, toutefois, en matière de définitions, de juridiction, de publicité, de promotion des oeuvres européennes, de protection des mineurs, d'événements importants, de droit de réponse et de contrôle juridictionnel. La loi sur les médias électroniques et la loi croate sur la radio et la télévision devront être adaptées en conséquence.

La principale autorité de tutelle devrait être le conseil des médias électroniques, prévu dans la loi sur les médias électroniques, mais dont les membres n'ont pas encore été nommés. Ce conseil aura sept membres nommés par le Parlement pour 5 ans, sur proposition du gouvernement. Il sera compétent vis-à-vis des radiodiffuseurs tant publics que privés et ses pouvoirs comprendront l'octroi de concessions, le contrôle du respect de la loi par les radiodiffuseurs et la présentation de rapports au Parlement. Le conseil devrait agir de manière autonome, mais il reste à voir si l'indépendance politique et la pluralité des opinions de ses membres peuvent être garanties dans la pratique. Des préoccupations du même ordre ont été exprimées concernant le conseil de programmation de HRT, dont les membres ont été nommés par le Parlement en octobre 2003, avec un retard important.

Conclusion

Si la Croatie procède aux adaptations législatives nécessaires et met en oeuvre le cadre législatif créé en 2003 d'une manière à la fois efficace, prévisible et transparente, elle devrait être capable de satisfaire aux exigences de l'Union européenne dans ce domaine à moyen terme.

Chapitre 21 - Politique régionale et coordination des instruments structurels

L'acquis dans ce domaine est principalement constitué de règlements-cadres et de règlements d'application qui ne nécessitent pas de transposition dans le droit national. Ils définissent les règles applicables à l'élaboration, l'approbation et la mise en oeuvre des programmes des Fonds structurels et des interventions du Fonds de cohésion. Ces programmes sont négociés et convenus avec la Commission, mais leur mise en oeuvre incombe aux États membres. Il convient de noter que les règlements sur les Fonds structurels seront révisés d'ici la fin de l'année 2006 au plus tard. Il est capital que les États membres respectent la législation communautaire en général (dans les domaines des marchés publics, de la concurrence et de l'environnement, par exemple) lors du choix et de la mise en oeuvre des projets et qu'ils disposent des structures institutionnelles nécessaires pour garantir une mise en oeuvre rationnelle et rentable, du point de vue tant de la gestion que du contrôle financier.

D'ici à son adhésion, la Croatie devra se doter des capacités administratives lui permettant de participer à la politique structurelle de l'Union. Elle devra, notamment, concevoir et mettre en oeuvre des plans de développement régional; déterminer clairement les responsabilités des ministères et autres organismes administratifs impliqués dans la gestion des fonds communautaires; assurer une collaboration étroite entre la Commission, les autorités nationales et régionales compétentes, les partenaires économiques et sociaux, ainsi que les entreprises privées impliquées dans le financement des programmes et des projets; garantir le cofinancement des programmes et des projets; élaborer les mécanismes financiers nécessaires; assurer un suivi, un contrôle et une évaluation appropriés des programmes et des projets et présenter un programme de convergence, afin de remplir les conditions pour bénéficier de l'aide du Fonds de cohésion. Les travaux sur le renforcement des capacités en faveur du développement régional n'ont commencé que récemment et dépendent largement des projets CARDS entamés fin 2003.

La Croatie possède une organisation territoriale à deux niveaux et compte 20 comtés au niveau régional, ainsi que 123 villes autonomes (zones urbaines) et 425 municipalités autonomes (zones rurales) au niveau local. Aucune région administrative et territoriale ne correspond actuellement au niveau NUTS II. Toutefois, la création de régions et d'unités correspondant aux niveaux NUTS II et III a commencé. Aucune donnée précise n'est disponible sur le PIB par habitant en fonction du niveau NUTS II (ou III), mais il faut cependant noter que les disparités régionales sont généralement très grandes.

En ce qui concerne le cadre législatif, les politiques régionales décidées au niveau central sont couvertes par plusieurs textes de loi (loi sur les îles, loi sur les zones d'intérêt national particulier, loi sur les régions de collines et de montagnes, loi sur la reconstruction de Vukovar et loi sur le Fonds de développement régional). Chaque loi définit des systèmes spécifiques de prise de décision, de mise en oeuvre et de contrôle. Les abattements fiscaux sont l'un des principaux mécanismes utilisés pour atteindre les objectifs sur le plan législatif, bien qu'une aide financière puisse également être fournie pour certains projets.

Il n'existe aucune loi spécifique en matière de politique régionale. Si cela n'empêche en rien le pays de participer à la politique structurelle de l'Union européenne, il importe en revanche que les lois existantes soient mises en conformité avec les obligations contenues dans les règlements sur les Fonds structurels. La Croatie a l'intention de préparer un plan de développement national (PDN) pour la période comprise entre 2005 et 2007. Ce PDN sera basé en partie sur des documents de planification antérieurs, tels que la stratégie de développement de la République de Croatie, la stratégie nationale pour le développement régional, les stratégies sectorielles et les programmes de développement régional. La plupart de ces documents font actuellement l'objet de travaux.

Le succès de la préparation de la participation aux Fonds structurels et au Fonds de cohésion est étroitement lié à l'alignement sur les règles de l'Union européenne en matière de marchés publics, d'aides d'État et d'environnement (voir les chapitres 1 - Libre circulation des marchandises, 6 - Concurrence et 22 - Environnement). En particulier, les clauses préférentielles discriminantes à l'égard des sociétés communautaires ne sont pas autorisées, des examens complets des aides d'État doivent être effectués et des évaluations des incidences sur l'environnement doivent être exécutées systématiquement avant que les projets ne soient mis en oeuvre.

Entrée en vigueur en juillet 2003, la nouvelle loi sur le budget a introduit une programmation budgétaire pluriannuelle. Il n'existe, toutefois, aucune disposition juridique permettant des transferts budgétaires entre les programmes.

La Croatie met en oeuvre plusieurs mesures actives en faveur du marché du travail qui sont comparables à celles financées par le Fonds social européen, mais une attention considérable devra être accordée au développement des ressources humaines au niveau des plans de développement national et régional.

En ce qui concerne le cadre institutionnel pour la mise en oeuvre de la politique de développement régional, le ministère des Travaux publics, de la Reconstruction et de la Construction est devenu instance de coordination en mars 2003. La partie du ministère concernée par ces questions a été absorbée par le ministère des Affaires maritimes, du Tourisme, des Transports et du Développement début 2004. Il a pour mission de préparer les lois et les décisions, de gérer et de contrôler les programmes et projets économiques et sociaux insulaires et régionaux, mais aussi de procéder à une évaluation. Dans la plupart des cas, la mise en oeuvre des programmes de développement est de la compétence de différents organismes aux niveaux régional et local, tandis que le contrôle incombe essentiellement aux ministères compétents. Il convient d'élaborer un mécanisme de coordination interministérielle approuvé par le gouvernement.

Il n'existe aucune structure clairement définie pour mettre en oeuvre le principe de partenariat. La coordination entre les niveaux central et local est actuellement informelle et s'effectue au cas par cas. Une structure de partenariat unique couvrant la préparation, le financement, le contrôle et l'évaluation de l'aide devrait être établie pour chaque forme d'aide.

Il n'existe aucun système ou mécanisme national approprié permettant de contrôler et d'évaluer la qualité et l'incidence des programmes de développement. Une méthodologie normalisée et des procédures intersectorielles communes doivent être introduites.

En ce qui concerne la gestion et le contrôle financiers, l'unité centrale de financement et d'adjudication au sein du ministère des Finances a commencé à mettre en oeuvre les premiers projets décentralisés en 2003, mais ses structures et procédures doivent encore être affinées afin de répondre aux exigences de l'Union européenne. À l'avenir, la Croatie devrait améliorer ses systèmes de gestion et de contrôle financiers, en conformité avec les exigences des Fonds structurels.

Des progrès doivent également être accomplis en ce qui concerne la mise à disposition de statistiques régionales appropriées et fiables. En particulier, la Croatie devrait renforcer sa capacité à élaborer des données statistiques adéquates (PIB par habitant/SPA, taux de chômage) aux niveaux NUTS II et III, afin de déterminer des zones éligibles et à des fins de programmation et de contrôle.

Conclusion

Les mécanismes de politique régionale de la Croatie sont à un stade précoce. Des efforts considérables et soutenus afin de définir des stratégies, créer des structures administratives et mettre en oeuvre des programmes seront nécessaires si la Croatie veut être en mesure, à moyen terme, d'appliquer les règles communautaires et de gérer efficacement les fonds des politiques structurelles de l'Union européenne.

Chapitre 22: Environnement

La politique communautaire dans le domaine de l'environnement vise à promouvoir le développement durable et à protéger l'environnement pour les générations actuelles et futures. Elle repose sur l'intégration de la protection de l'environnement dans les autres politiques communautaires, sur une action préventive, sur le principe du pollueur payeur, sur la correction à la source des atteintes à l'environnement et sur le partage des responsabilités. L'acquis se compose de quelque 200 actes juridiques couvrant la législation horizontale, la pollution de l'eau et de l'air, la gestion des déchets et des substances chimiques, les biotechnologies, la protection de la nature, la pollution et la gestion des risques industriels, le bruit et la radioprotection.

Le respect de cet acquis suppose d'importants investissements, mais il se traduit aussi par des avantages significatifs en termes de santé publique et de réduction des coûts liés aux dommages causés aux forêts, aux habitats, aux paysages et aux lieux de pêche. Une administration solide et bien équipée aux niveaux national, régional et local est indispensable pour appliquer et faire respecter l'acquis dans le domaine de l'environnement.

La loi de 1994 sur la protection de l'environnement, telle que modifiée en 1999, fournit un cadre juridique à la protection de l'environnement. Il convient encore de l'aligner sur l'acquis. Le domaine de l'environnement a été inclus pour la première fois dans le programme national pour l'intégration dans l'Union européenne en 2004. Compte tenu du volume considérable de dispositions législatives sur l'environnement figurant dans l'acquis, il convient de renforcer sensiblement la priorité accordée à ce domaine si l'on veut que le rapprochement des législations s'effectue dans le temps imparti.

En ce qui concerne la capacité administrative, le ministère de la Protection de l'environnement et de l'Aménagement du territoire a été institué en l'an 2000, en tant qu'organe central de l'administration publique. Dans le cadre de la récente réorganisation des services mise en oeuvre par le nouveau gouvernement, il est devenu le ministère de la Protection environnementale, de l'Aménagement du territoire et de la Construction. Les effectifs alloués à la protection de l'environnement sont faibles, une grande partie du personnel travaillant à l'aménagement du territoire et à la construction. Plusieurs autres instances sont également responsables de divers aspects de la protection de l'environnement et, en 2002, deux nouvelles institutions (l'agence pour l'environnement et l'institut national de protection de la nature) ont été créées, qui ne sont, toutefois, pas encore totalement opérationnelles. L'administration environnementale devra être renforcée pour mettre en oeuvre l'acquis et assurer la planification et l'élaboration des stratégies de financement appropriées. Des efforts particuliers devront être consentis, afin que les administrations régionales et locales disposent des ressources nécessaires pour s'acquitter efficacement des responsabilités qui leur sont dévolues.

Une direction de l'inspection a été créée au sein du ministère de l'Environnement; elle est articulée en services d'inspection régionaux et près de la moitié des 461 membres du personnel de ce ministère y étaient affectés fin 2003. Des missions d'inspection sont également confiées à d'autres services gouvernementaux ayant des responsabilités dans le domaine de l'environnement. Néanmoins, seuls 32 inspecteurs sont chargés de couvrir les secteurs autres que la qualité de l'eau, l'aménagement du territoire et le bruit, ce qui est clairement insuffisant. Le nombre de poursuites pour infraction au droit de l'environnement témoigne de la faiblesse des niveaux d'application. Cette situation peut être imputée à divers facteurs, tels que le manque de ressources humaines et financières conférées à cette activité, les faiblesses de l'appareil judiciaire et juridique de la Croatie et des insuffisances dans la législation qui empêchent son application efficace.

La sensibilisation du public aux questions environnementales commence à faire son chemin, mais sa participation à la prise de décision en matière d'environnement et son accès aux informations dans ce domaine restent limités.

Sur le plan régional, la Croatie participe au programme régional de reconstruction environnementale dont elle assure actuellement la co-présidence. La Croatie participe également aux activités de l'Agence européenne pour l'environnement financée par le programme CARDS et au programme LIFE-pays tiers.

L'investissement dans les infrastructures environnementales en Croatie demeure faible. D'importants investissements sont nécessaires pour garantir la mise en oeuvre de l'acquis environnemental. Les travaux récents visant à donner la priorité aux projets concernant l'environnement devraient s'avérer utiles à cet égard.

L'intégration des aspects environnementaux dans d'autres politiques est l'un des principes fondamentaux de la stratégie nationale pour l'environnement, adoptée par le Parlement en 2002, ainsi que de son document d'application, le plan national d'action en faveur de l'environnement. La stratégie environnementale fait partie de la stratégie globale de développement de la Croatie et nombre d'autres secteurs (le tourisme, les transports, l'énergie, etc.) intègrent la protection de l'environnement dans leurs objectifs fondamentaux. Il reste encore à voir, toutefois, dans quelle mesure ces stratégies se traduiront dans les faits. Sur un plan pratique, tout porte à croire que l'on n'accorde toujours pas à l'environnement toute l'attention qui lui est due dans le cadre de l'évolution d'autres secteurs. Aucune stratégie nationale pour le développement durable n'a encore été mise au point.

En ce qui concerne la législation horizontale, la Croatie est signataire de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et a signé le protocole de Kyoto, sans l'avoir encore ratifié. Il existe diverses dispositions juridiques garantissant l'accès du public à l'information en matière d'environnement, bien que la loi sur la protection de l'environnement ne soit pas encore totalement alignée sur la convention d'Aarhus, que la Croatie a signée. Les réglementations concernant l'évaluation des incidences sur l'environnement contiennent des dispositions sur la participation du public, mais ce droit n'est guère utilisé dans la pratique. Si la Croatie a une ordonnance sur l'évaluation des incidences sur l'environnement datant de 1984, celle-ci demande à être réexaminée, afin d'être adaptée à l'acquis. Il s'agit là d'une priorité, au même titre que la mise en oeuvre de l'acquis sur l'évaluation environnementale stratégique. La Croatie devra prendre des dispositions pour favoriser la participation du public à la prise de décision en matière d'environnement dans toute une série de domaines, notamment au travers de procédures d'autorisation et par l'élaboration de plans sur la gestion des déchets, la qualité de l'air et la pollution de l'eau par les nitrates, ce qui devrait constituer un défi de taille.

Les niveaux de pollution atmosphérique ont baissé depuis 1990, en raison du recul de l'industrie lourde. Des valeurs limites et des systèmes de contrôle sont actuellement élaborés, de manière à aligner le pays sur l'acquis. Le plan national d'action en faveur de l'environnement expose des mesures visant à améliorer la qualité de l'air, tandis que la fixation d'échéances offre la possibilité de contrôler les avancées dans ce domaine. Il convient d'élaborer des plans et des programmes de qualité de l'air, ainsi que l'exige l'acquis.

La gestion des déchets est le problème numéro un dans le domaine de l'environnement en Croatie. Il convient non seulement d'aligner le cadre législatif sur les exigences et les normes de l'Union européenne, mais aussi de mettre en oeuvre les réglementations croates existantes. Un plan de gestion des déchets doit être adopté. Les installations de recyclage, de valorisation et d'élimination des déchets sont peu nombreuses et très en deçà des normes de l'Union européenne. Des systèmes de collecte et de ramassage doivent être mis en place. La plupart des déchets sont déversés dans des décharges et les sites non autorisés sont au moins huit fois plus nombreux que les sites officiels, beaucoup de ces derniers n'étant d'ailleurs pas en conformité avec la loi sur les déchets. Le pays ne possède aucune décharge de déchets dangereux. Ce secteur représente un défi important pour la Croatie et son alignement sur l'acquis requerra de grands efforts.

La législation actuelle sur la qualité de l'eau constitue une base solide pour l'alignement sur l'acquis, même si certains arrêtés font souvent défaut au niveau local. Il convient de réaliser les inventaires et programmes d'action nécessaires et de recenser les zones sensibles et les zones vulnérables. La Croatie est signataire de la convention internationale pour la protection du bassin du Danube et élabore actuellement un plan de gestion du bassin hydrologique. Le réseau d'assainissement ne couvre que 40 % de la population et 12 % seulement des eaux usées subissent un traitement (moins de 5 % faisant l'objet d'un traitement secondaire). Si elle veut s'aligner sur acquis, la Croatie devra consentir à d'importants investissements en matière de collecte et de traitement des eaux usées, ainsi qu'au niveau de la distribution d'eau potable.

La législation sur la protection de la nature a été réactualisée grâce à une nouvelle loi sur la protection de la nature. Actuellement, 10 % de la surface terrestre est protégée, mais il existe des propositions visant à rapprocher ce pourcentage de la moyenne de l'Union européenne (15-20 %). Étant donné que 43 % du territoire de la Croatie est boisé et que le pays possède une biodiversité extraordinairement riche, la définition du réseau des sites NATURA 2000 constituera un défi important. Bien que le cadre législatif pour la protection de la nature existe déjà, il convient de renforcer les stratégies de mise en oeuvre, et notamment la gestion des zones protégées. Dans ce contexte, le récent transfert de compétence pour la protection de la nature du ministère de l'Environnement vers le ministère de la Culture semble aller à l'encontre des pratiques habituelles dans les États membres de l'Union. La protection des espèces menacées n'est pas assurée actuellement en dehors des zones protégées. La convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) est entrée en vigueur en l'an 2000. La Croatie a coopéré avec les pays Visegrád en vue de la constitution de réseaux écologiques nationaux.

Pour ce qui est de la pollution et de la gestion des risques industriels, il n'existe aucun système de prévention et de réduction intégrées de la pollution. Bien que les niveaux de pollution atmosphérique en général aient baissé récemment, la Croatie ne serait pas en mesure actuellement de respecter les limites d'émission requises par l'Union européenne pour les grandes installations de combustion et doit prendre des mesures visant à se conformer aux plafonds d'émission nationaux. S'il existe une obligation légale pour les opérateurs des sites industriels d'élaborer des plans d'intervention, nul ne sait véritablement dans quelle mesure ceux-ci ont été mis en pratique. La Croatie a ratifié la convention CEE-ONU sur les accidents industriels.

En ce qui concerne les substances chimiques et les organismes génétiquement modifiés (OGM), il reste encore à voir si le nouveau système restreignant l'usage d'OGM est compatible avec l'acquis sur la libre circulation des marchandises. La législation relative aux substances chimiques est incomplète et il n'existe aucun registre des substances chimiques présentes sur le marché. Le recensement des «nouvelles» substances chimiques ne fait pas partie des exigences actuelles. Des efforts importants devront donc être consacrés à l'alignement sur l'acquis dans le secteur de la chimie. Il n'existe encore aucune législation sur les biotechnologies.

Le problème du bruit est abordé dans le cadre de la stratégie nationale pour l'environnement et du plan national d'action en faveur de l'environnement. Une législation a été élaborée afin de transposer l'acquis dans ce domaine. Toutefois, les échéances fixées pour certaines actions prévues dans le cadre du plan d'action ont été repoussées (de quatre années, dans certains cas).

Quant à la sûreté nucléaire et à la radioprotection, la Croatie a institué un cadre juridique concernant les divers aspects des normes de sécurité de base, des expositions à des fins médicales et de la préparation aux situations d'urgence. La transposition des directives fixant les normes de base relatives à la protection sanitaire et sur la protection sanitaire lors d'expositions à des fins médicales doit encore être menée à bien. L'acquis en matière de protection opérationnelle des travailleurs extérieurs, d'information de la population en cas d'urgence radiologique et de contrôle des transferts de déchets radioactifs doit encore être transposé. Le ministère de l'Économie est responsable de la sûreté nucléaire, de l'octroi des autorisations pour les installations nucléaires, y compris les équipements de traitement des combustibles et des déchets, ainsi que des activités liées à la sauvegarde des matières nucléaires. À l'heure actuelle, la Croatie possède deux installations de stockage de sources radioactives usées et de déchets de faible activité. Adoptée en octobre 2003, la loi sur la sûreté nucléaire prévoit la création d'un institut national pour la sûreté nucléaire. Faute de capacités administratives suffisantes, l'application directe des articles 33 à 37 du traité Euratom et des dispositions pour la préparation aux situations d'urgence poserait des problèmes de taille. Il importe donc que la Croatie mette en place les autorités de tutelle appropriées, les autorités chargées de la radioprotection compétentes et des comités consultatifs indépendants spécifiques.

Conclusion

Si les composants de base d'un cadre législatif permettant à la Croatie de poursuivre l'alignement sur l'acquis sont bien présents, il est toutefois nécessaire d'accorder une plus grande priorité à la protection de l'environnement. Il conviendra pour ce faire de renforcer la planification et l'élaboration de stratégies de financement. Les diverses stratégies existantes donnent la prééminence à la protection de l'environnement, mais il importe qu'elles se traduisent par des mesures pratiques. Les aspects environnementaux doivent, en outre, être pris en considération dans d'autres secteurs. Il existe de graves lacunes au niveau de la mise en oeuvre et de l'application, qu'il convient de combler afin que l'acquis puisse être appliqué de manière efficace.

Dans l'ensemble, la Croatie devra faire des efforts considérables et soutenus pour aligner sa législation sur l'acquis, ainsi que pour la mettre en oeuvre et l'appliquer dans le domaine de l'environnement à moyen terme. Néanmoins, le respect d'un certain nombre de textes de lois communautaires exigeant un niveau d'investissements à la fois élevé et constant, de même que des efforts considérables sur le plan administratif (notamment en ce qui concerne la gestion des déchets, le traitement des eaux usées et l'eau potable), ne saurait être obtenu qu'à long terme et nécessitera une augmentation significative des investissements consacrés à l'environnement.

Chapitre 23 - Protection des consommateurs et de la santé

L'acquis dans ce domaine couvre la protection des intérêts économiques des consommateurs (publicité trompeuse et comparative, indication des prix, crédit à la consommation, clauses contractuelles abusives, vente à distance et démarchage à domicile, voyages à forfait, utilisation à temps partiel de biens immobiliers, actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs, certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation), ainsi que la sécurité générale des produits (responsabilité du fait des produits défectueux, imitations dangereuses et sécurité générale des produits et commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs). Les États membres de l'UE doivent faire appliquer correctement l'acquis, au moyen de procédures judiciaires, de mécanismes de règlement extrajudiciaire des litiges et de dispositifs administratifs adéquats, notamment la surveillance du marché et la participation active des organisations de consommateurs.

La Croatie s'est dotée d'un cadre législatif de base pour la protection des consommateurs, notamment par l'adoption de la loi sur la protection des consommateurs. Les principales structures administratives sont également en place. Un programme national bisannuel pour la protection des consommateurs définit les tâches prioritaires de la Croatie dans ce domaine. Le ministère de l'économie est l'autorité compétente en la matière et un conseil de protection des consommateurs a été institué. La surveillance du marché est en grande partie déléguée à l'inspection de l'État.

En ce qui concerne les mesures liées à la sécurité, la Croatie s'est efforcée de s'aligner sur les principes de la directive communautaire sur la sécurité générale des produits en adoptant en septembre 2003 la loi sur la sécurité générale des produits, qui sera complétée par une ordonnance sur la fourniture mutuelle d'informations. Le cadre juridique de la Croatie en matière de responsabilité du fait des produits défectueux comprend également le principe de la responsabilité objective, la définition des dommages, l'exonération de la responsabilité et la charge de la preuve. Il se fonde sur la loi croate sur les obligations qui diverge actuellement de l'acquis à maints égards et devra être modifiée.

En ce qui concerne les mesures non liées à la sécurité, une loi sur la protection des consommateurs, adoptée en 2003, vise à transposer les directives communautaires sur la publicité trompeuse et la publicité comparative, concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux, sur le crédit à la consommation, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, sur l'utilisation à temps partiel de biens immobiliers, en matière de contrats à distance et en matière d'indications concernant l'indication des prix des produits. La loi sur le commerce du tourisme et la loi sur les obligations ne sont que partiellement alignées sur la directive communautaire sur les voyages, vacances et circuits à forfait et devront être modifiées. La législation de la Croatie ne couvre pas certaines directives communautaires (relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs, sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation et en matière de commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs). L'alignement sur l'acquis doit donc encore se poursuivre en la matière.

Dans le domaine de la surveillance du marché, le système actuel, reposant sur l'agrément préalable à la mise sur le marché, est loin d'être conforme à l'acquis. L'inspection de l'État est compétente pour faire appliquer la législation en matière de surveillance du marché, en collaboration avec d'autres institutions publiques. Les dispositions de base sont en vigueur en ce qui concerne la méthodologie d'évaluation des risques, la notification du danger des produits et la collaboration des producteurs et distributeurs. Des actions spécifiques de surveillance du marché sont effectuées pour certaines catégories de produits. Pour un certain nombre d'autres produits cependant, la surveillance du marché fait défaut en raison de l'absence de normes, d'un financement insuffisant pour effectuer les tests ou d'un manque de compétence juridique de l'inspection de l'État. Des échanges d'informations entre la Croatie et d'autres pays n'ont lieu qu'au niveau gouvernemental. La Croatie devrait tirer profit de son adhésion au système transitoire d'échange rapide d'informations sur les produits dangereux (TRAPEX).

Il existe deux grandes associations de consommateurs en Croatie, mais leurs activités sont essentiellement concentrées dans la zone de Zagreb. Il y a une autre association de consommateurs plus petite à Osijek. À partir de 2004, le financement public dont elles bénéficient sera majoré. Selon la loi sur la protection des consommateurs, les associations de consommateurs peuvent rejoindre l'Union des associations de protection des consommateurs, une entité juridique, qui est notamment habilitée à émettre des avis sur les projets de textes de loi concernant les consommateurs et à représenter les intérêts des consommateurs dans les débats parlementaires. Les organisations de consommateurs doivent être soutenues pour renforcer leur rôle dans l'élaboration et l'application de la politique croate des consommateurs. Le gouvernement devrait poursuivre son travail de développement d'un mouvement des consommateurs indépendant, représentatif et efficace en Croatie.

Aucune législation spécifique ne vise à faciliter l'accès des consommateurs à la justice. Ce sont les règles du code civil qui s'appliquent. Un système spécifique de modes alternatifs de résolution des conflits de consommation, conforme aux recommandations de la Commission en la matière, n'a pas encore été élaboré à ce jour. Les associations de consommateurs ont le droit d'engager des poursuites devant le tribunal compétent contre des pratiques commerciales illégales et la publicité trompeuse, mais les faiblesses de l'appareil judiciaire de la Croatie constituent un obstacle à l'exercice effectif de ce droit.

La Croatie ne dispose pas de programmes d'information et d'éducation des consommateurs, bien qu'elle prévoit d'en élaborer un dans les prochaines années. Les actions dans ce domaine devraient être sensiblement renforcées.

Conclusion

La Croatie devra poursuivre ses efforts pour aligner sa législation sur l'acquis dans ce domaine et pour la mettre en oeuvre et l'appliquer effectivement à moyen terme. Ces efforts devraient porter en particulier sur la responsabilité du fait des produits et les mesures non liées à la sécurité ainsi qu'à la mise en place d'un système de surveillance du marché, qui satisfasse aux exigences communautaires. Le renforcement des organisations de consommateurs et la promotion du développement d'un mouvement des consommateurs indépendant et représentatif requièrent également une attention particulière, de même que la promotion d'actions d'information et d'éducation des consommateurs.

Chapitre 24 - Coopération en matière de justice et affaires intérieures

Les politiques de l'UE dans le domaine de la justice et des affaires intérieures visent à maintenir et à poursuivre le développement de l'Union en tant qu'espace de liberté, sécurité et justice. Sur des questions telles que le contrôle des frontières, les visas, l'immigration, le droit d'asile, le trafic de stupéfiants et le blanchiment de capitaux, la lutte contre le crime organisé, le terrorisme, la fraude et la corruption, la coopération policière et judiciaire, la coopération douanière, la protection des données et la reconnaissance mutuelle des décisions de justice, ainsi que les instruments juridiques relatifs aux droits de l'homme, les États membres doivent disposer de moyens suffisants pour leur permettre d'appliquer des normes appropriées et acceptables. La capacité administrative doit être conforme à ces normes à la date de l'adhésion. En outre, la mise en place d'un appareil policier et judiciaire à la fois indépendant, fiable et efficace revêt également une importance capitale. L'acquis de Schengen, qui se traduit par la suppression des contrôles aux frontières intérieures de l'Union européenne, constitue le point essentiel du présent chapitre. Des parties substantielles de cet acquis ne sont cependant pas applicables au moment de l'adhésion d'un nouvel État membre, mais seulement plus tard après une décision distincte du Conseil.

L'accord de stabilisation et d'association prévoit une coopération poussée entre la Croatie et l'UE sur des questions telles que les visas, le contrôle aux frontières, le droit d'asile, la réadmission d'immigrés clandestins, le blanchiment de capitaux, le crime organisé et la criminalité liée à la drogue, ainsi que l'amélioration de l'efficacité de l'appareil judiciaire de la Croatie.

Dans le domaine de la protection des données, une nouvelle loi sur la protection des données à caractère personnel est entrée en vigueur en Croatie en juin 2003. Elle régit la protection des données à caractère personnel sur les personnes physiques, ainsi que la surveillance de la collecte, du traitement et de l'utilisation des données à caractère personnel. La Croatie a signé mais n'a pas encore ratifié la convention de 1981 du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel. L'alignement sur la recommandation du Conseil de l'Europe concernant l'utilisation des données de la police est en cours d'élaboration. La création d'une agence pour la protection des données à caractère personnel est prévue (voir également le chapitre 3 - Libre prestation de services).

Une avancée marquante a eu lieu en Croatie dans le domaine de la politique des visas. La conformité aux obligations de l'UE en matière de visas et au régime d'exemption de visa à l'entrée dans l'UE en est à un stade relativement avancé. Une nouvelle loi sur les étrangers a remplacé en janvier 2004 la loi précédente sur la circulation et le séjour des étrangers. Une attention particulière doit être accordée à ses mesures d'exécution.

Un système informatique est graduellement mis en place pour relier les missions diplomatiques de la Croatie au registre national des visas (IKOS) au ministère de l'intérieur. Le développement de ce système doit se poursuivre et la formation du personnel doit être une priorité.

Bien que la Croatie consente des efforts pour moderniser et transformer son système de gestion des frontières, il lui reste encore d'importants défis à relever. Le cadre législatif n'est pas encore complet, particulièrement en ce qui concerne l'instauration d'une stratégie de gestion intégrée des frontières. La nouvelle loi sur la protection des frontières nationales est entrée en vigueur en novembre 2003 mais il y aura lieu de poursuivre l'élaboration de mesures d'exécution. La Croatie doit également mettre en oeuvre les engagements pris en la matière dans le cadre du Forum UE-Balkans occidentaux, tels que définis lors de la réunion ministérielle «Justice et affaires intérieures» (JAI) de novembre 2003.

La direction de la police des frontières relevant du ministère de l'intérieur n'a commencé à fonctionner en tant qu'unité autonome de la police qu'en juillet 2002, tandis que la police des frontières opère toujours dans le cadre des forces générales de police au niveau régional. En raison de la réorganisation en cours, il est impossible de déterminer clairement le nombre d'agents qui consacrent l'essentiel de leur temps de travail à la gestion des frontières. Ils sont toutefois encore en nombre insuffisant, particulièrement si l'on considère que des portions de la frontière terrestre de la Croatie ont vocation à faire partie de la frontière extérieure de l'UE. Le recrutement et la formation du personnel, l'amélioration des méthodes de travail (capacités d'analyse de risque notamment) et la modernisation de l'équipement sont des questions à aborder d'urgence. Dans ce contexte, il convient de renforcer la formation spécialisée pour les agents de la police des frontières à l'école de police. Il y a en outre lieu d'améliorer la coopération entre les différentes autorités concernées par la gestion des frontières.

L'équipement et l'infrastructure techniques disponibles ne sont pas encore adaptés à une surveillance efficace de la frontière verte (3 332 km) ou de la frontière bleue, et des investissements substantiels s'imposent. La police des frontières utilise le système d'information central de la police, qui ne répond cependant pas aux besoins de la gestion des frontières et devra être adapté.

La base juridique pour la coopération avec les pays voisins est en place et l'accent devrait désormais être mis sur une mise en oeuvre appropriée. Il y a en particulier d'importants risques de franchissement non autorisé de la frontière avec la Bosnie-Herzégovine, où un grand nombre de routes et de chemins transfrontaliers restent presque incontrôlés. Ces points de passage devront être correctement contrôlés pour empêcher le franchissement illégal des frontières.

Dans le domaine de l'immigration, la législation sur les permis de séjour, le regroupement familial et les questions connexes est en place. Une nouvelle loi sur les étrangers a remplacé la législation précédente et est appliquée depuis janvier 2004. Au cours des six premiers mois de 2003, 34 279 étrangers avaient un permis de séjour permanent en Croatie, 10 038, un permis de séjour temporaire prolongé, et 1 197, des visas d'affaires. La plupart étaient des ressortissants de pays voisins. Il n'existe aucune mesure spécifique pour l'intégration des ressortissants de pays tiers, mais ils ont les mêmes droits fondamentaux que les citoyens croates.

La Croatie est encore essentiellement considérée comme un pays de transit plutôt que comme un pays de destination de migrants illégaux en route vers l'espace Schengen. Au cours des neuf premiers mois de 2003, 2 915 personnes, provenant surtout de pays voisins, ont été appréhendées alors qu'elles tentaient de franchir illégalement la frontière. Par rapport aux années précédentes, il y a eu une tendance à la baisse qui peut être attribuée à la stabilisation générale de la région. Des accords de réadmission ont été signés avec 24 pays.

Le droit d'asile est garanti par la Constitution. Il n'y a toutefois actuellement aucune disposition prévoyant des procédures accélérées, et la notion de «pays d'origine sûr» n'est pas appliquée. Une nouvelle loi sur le droit d'asile a été adoptée en juillet 2003 et devrait entrer en vigueur en juillet 2004. Elle devrait renforcer le système de recours et introduire des dispositions couvrant la protection temporaire, la notion de «pays tiers sûr» et de «demandes manifestement infondées», les conditions d'accueil ainsi que l'intégration des réfugiés. Le nouvel acte devrait également être harmonisé avec la Convention de Genève de 1951 et le Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés et les recommandations et résolutions du Conseil de l'Europe en la matière. Il n'existe toujours pas de centre de documentation et d'information sur le pays d'origine.

Les empreintes digitales des demandeurs d'asile et des immigrés clandestins sont enregistrées mais il n'existe pas de base de données électronique. En vue d'une éventuelle participation à Eurodac, le système d'enregistrement des empreintes digitales doit être revu et modernisé. D'autres ajustements de la législation s'imposent pour assurer l'entière conformité avec les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable (Dublin II).

Entre 2000 et l'été 2003, 214 personnes ont introduit des demandes d'asile en Croatie. À ce jour, toutes les décisions prises en ce qui concerne les demandes d'asile en Croatie ont été défavorables. Les dispositions actuelles prévoyant un centre d'accueil temporaire sont insatisfaisantes. Un centre d'accueil pour demandeurs d'asile doit être créé, mais il n'y a eu aucune décision claire sur son lieu d'implantation ou sur l'attribution du financement nécessaire pour assurer la couverture des frais de personnel, de fonctionnement et d'entretien. En outre, les structures de coordination interservices doivent être renforcées et la coopération avec les organisations internationales telles que le HCR devrait être améliorée.

En matière de coopération policière, une nouvelle loi sur la police est entrée en vigueur en janvier 2001. Sur cette base, la police a été démilitarisée et des réformes sont en cours. La nouvelle législation définit clairement les tâches et les responsabilités, mais il y a lieu d'élaborer davantage le principe de la prévention de la criminalité. L'équipement et les infrastructures doivent être améliorés et un système informatique intégré de renseignement sur les activités criminelles doit être mis en place.

La police criminelle est sous l'autorité du Procureur de l'État. Toutes les activités d'investigation et autres mesures limitant les droits des citoyens doivent être convenues avec les autorités judiciaires. Les pouvoirs d'investigation limités d'autres services tels que les autorités douanières et fiscales exigent de ces services une étroite collaboration avec la police. Cette coopération doit encore être développée et renforcée.

La Croatie a des accords de coopération policière avec d'autres pays de la région (en particulier la Bosnie-Herzégovine, la Serbie-et-Monténégro, la Hongrie, la Slovénie et l'Italie). La coopération et l'échange d'informations se sont améliorés ces dernières années. Pour pouvoir conclure l'accord de coopération prévu avec Europol, il sera nécessaire d'atteindre un niveau satisfaisant de protection des données à caractère personnel.

En ce qui concerne la criminalité organisée, la Croatie est un pays de transit important sur la route des Balkans vers l'Europe occidentale, tant pour la traite des êtres humains que pour la contrebande d'armes, de drogues et de voitures volées. La Croatie a signé et ratifié la convention de 2000 des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée et les protocoles relatifs à la traite des personnes et au trafic illicite de migrants. Le protocole contre la fabrication et le trafic illicites des armes à feu, munitions et autres matériels connexes doit encore être signé. La Croatie a également ratifié la convention de 2001 du Conseil de l'Europe sur la cybercriminalité. La Croatie doit mettre en oeuvre les engagements pris en la matière dans le cadre du Forum UE-Balkans occidentaux, tels que définis lors de la réunion ministérielle JAI de novembre 2003. En outre, plusieurs modifications du code pénal sont toujours requises pour parvenir à l'alignement complet sur les exigences de l'UE, du Conseil de l'Europe et de l'OSCE.

Au niveau national, le Bureau pour la lutte contre la corruption et la criminalité organisée (USKOK) est le principal organe de lutte contre les formes de crime sus-mentionnées, y compris le terrorisme. Les capacités administratives et opérationnelles du Bureau sont cependant encore limitées et tout le personnel nécessaire n'a pas été recruté. La coordination avec d'autres agences doit être améliorée.

Il y a lieu d'élaborer une approche plus stratégique de la lutte contre la criminalité organisée. Il faut également combattre la fabrication et le trafic illicites d'armes à feu.

Un cadre législatif de base est en place pour combattre le terrorisme. La Croatie a ratifié plusieurs instruments internationaux de lutte contre le terrorisme, tels que la convention européenne de 1977 pour la répression du terrorisme. Le protocole de 2003, qui la modifie, a été signé. Néanmoins, la convention internationale des Nations unies de 1999 pour la répression du financement du terrorisme est encore à signer.

En matière de lutte contre la fraude et la corruption, la Croatie a signé et ratifié les conventions pénale et civile sur la corruption du Conseil de l'Europe. Sa législation nationale a été en partie alignée sur les dispositions de la convention de 1995 relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes et de ses protocoles. D'autres améliorations s'imposent en ce qui concerne la définition de la fraude (tant sur le plan des dépenses que des recettes), la corruption active et passive, la responsabilité pénale des chefs d'entreprise et la responsabilité des personnes morales. Au niveau de l'application, il faut se préoccuper davantage de la poursuite efficace des cas de corruption. Il y a lieu de mettre au point des plans d'action destinés à empêcher et à combattre la corruption dans les services compétents chargés de faire appliquer la loi (police des frontières, police, douanes, pouvoir judiciaire).

En matière de protection de l'euro contre la contrefaçon, la Croatie est membre de la Convention internationale de 1929 pour la répression du faux monnayage. Les dispositions de cette convention ont été incorporées au droit croate, principalement dans le code pénal, qui couvre l'infraction de contrefaçon de devises étrangères, y compris l'euro, et semble être généralement conforme à l'acquis. (Voir aussi le chapitre 11 - Union économique et monétaire.)

La Croatie est un pays de transit pour le trafic de drogue (principalement l'héroïne) sur la route des Balkans. La consommation de drogues dans le pays ainsi que les infractions liées à la drogue détectées et signalées sont en augmentation. La Croatie est signataire des principales conventions des Nations unies sur les drogues. Le code de procédure pénale, le code pénal et la loi sur la lutte contre la toxicomanie constituent le cadre législatif national fondamental pour parer à l'offre de stupéfiants. Le programme national 2003 de lutte contre la toxicomanie constitue la base pour traiter en détail la problématique des drogues et définit les organes de l'État compétents pour adopter des programmes spécifiques permettant de définir des actions concrètes dans chaque domaine particulier.

L'accent devrait être mis davantage sur l'amélioration de la coopération et de la coordination entre les différents services des forces de l'ordre impliqués dans la lutte contre le trafic de drogue. Par ailleurs, les services des forces de l'ordre manquent souvent de l'équipement technique adéquat. La majorité des toxicomanes ne relèvent d'aucun programme de traitement de la toxicomanie. Un réseau national d'informations devrait être créé et le bureau pour la lutte contre la toxicomanie devrait être préparé à son rôle futur de point de contact national et à la coopération éventuelle avec l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT).

La Croatie a consenti des efforts pour combattre le blanchiment de capitaux. Un cadre législatif de base a été adopté en la matière et développé au cours des dernières années. La Croatie a ratifié la convention du Conseil de l'Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime et a commencé à incorporer des conventions internationales et des normes communautaires dans sa législation nationale.

L'Office national pour la prévention du blanchiment de capitaux, établi au sein du ministère des finances conformément à la loi sur la prévention du blanchiment de capitaux, fonctionne en tant que service de renseignement financier autonome et indépendant. Il recueille et analyse des informations sur les mouvements suspects de capitaux et les signale à la police et au procureur. La répression dans ce domaine reste cependant faible. À ce jour, seul un cas de blanchiment de capitaux a donné lieu à une condamnation. L'office doit donc être renforcé et il y a lieu de rendre la coopération avec la police, le bureau du Procureur de l'État et le pouvoir judiciaire plus efficace. (Voir également le chapitre 4 - Libre circulation des capitaux.)

Une coopération douanière efficace requiert un niveau adéquat d'infrastructures et d'équipements, notamment, de l'informatisation et des services d'enquête, ainsi que la mise en place d'une administration douanière efficace dotée d'un nombre suffisant d'agents qualifiés et motivés, présentant un haut degré d'intégrité.

Il y a encore beaucoup à améliorer dans la coopération entre la police, les douanes, et d'autres organes de contrôle aux frontières. Aucun protocole d'accord n'a encore été conclu entre elles. Il serait utile que la Croatie mette en place un programme de protocoles d'accord avec des organisations professionnelles et entre les douanes et la police pour lutter notamment contre le trafic de stupéfiants. Il convient aussi de veiller à modifier la législation pour tenir compte des conventions concernées de l'UE (Naples II et technologie de l'information), à créer un service spécial d'enquête au sein de l'administration douanière et à mettre en place un système de formation des agents des douanes.

En ce qui concerne la coopération juridique en matière pénale et civile, la reconnaissance et l'exécution des décisions de justice étrangères sont incorporées dans la loi relative aux conflits de lois, et le système général applicable en matières civile et commerciale est semblable à celui fixé dans le droit communautaire. Les règles pour déterminer la loi applicable, les procédures concernant les ordres de paiement, les décisions sur des questions de statut personnel et les procédures internationales d'insolvabilité sont aussi largement conformes au droit et aux principes communautaires. Il y a des conventions bilatérales avec plusieurs pays voisins.

Plusieurs conventions clés ont été ratifiées ou sont en voie de l'être, dont la convention européenne de 1972 sur la transmission des procédures répressives, la convention européenne de 1959 d'entraide judiciaire en matière pénale, la convention européenne d'extradition de 1957 et la convention de La Haye de 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants. La Croatie n'est pas partie à la convention de La Haye de 1965 relative à la signification et la notification à l'étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale et les méthodes actuelles diffèrent sensiblement de celles que préconise l'UE. La Croatie n'est pas partie non plus à la convention de La Haye de 1970 sur l'obtention des preuves à l'étranger en matière civile ou commerciale. La portée de la législation prévoyant l'indemnisation des victimes d'actes terroristes et de manifestations publiques devrait être étendue pour inclure les victimes de tout crime. Des améliorations devraient être apportées à la formation des juges dans des domaines tels que la coopération internationale et les nouvelles techniques d'investigation.

Conclusion

La Croatie a consenti des efforts pour aligner sa législation sur l'acquis dans le domaine de la justice et des affaires intérieures et a commencé à progresser dans l'application des réformes dans des institutions telles que la police, la police des frontières et le service de renseignement financier. Il reste cependant beaucoup à faire pour aligner davantage la législation sur l'acquis et pour transformer les différents services des forces de l'ordre en institutions efficaces capables d'assumer les tâches qui leur incombent. Des investissements considérables seront en outre nécessaires en équipements et en infrastructures ainsi qu'en renforcement de la capacité administrative. La situation géographique de la Croatie à la croisée de flux migratoires constitue un défi particulier.

D'une manière générale, la Croatie devra consentir des efforts considérables et soutenus pour aligner sa législation sur l'acquis et pour la mettre en oeuvre et l'appliquer réellement à moyen terme dans le domaine de la justice et des affaires intérieures.

Chapitre 25 - Union douanière

L'acquis relatif à l'Union douanière se compose presque exclusivement d'une législation qui lie directement les États membres et qui ne requiert pas de transposition en droit national, notamment: le code des douanes communautaire et ses dispositions d'application, la nomenclature combinée, le tarif douanier commun et des dispositions concernant le classement tarifaire, les allégements tarifaires, la suspension de droits et certains contingents tarifaires; en outre, il comprend des dispositions régissant le contrôle douanier des marchandises de contrefaçon et des marchandises pirates, des précurseurs de drogue et des biens culturels, ainsi que l'assistance administrative mutuelle dans le domaine des douanes. Font également partie de l'acquis des accords communautaires conclus dans les secteurs concernés, y compris le transit. Les États membres doivent veiller à disposer des capacités de mise en oeuvre nécessaires, notamment de liaisons avec les systèmes informatiques douaniers de la CE.

L'accord de stabilisation et d'association/accord intérimaire sur le commerce et les mesures d'accompagnement prévoient la création d'une zone de libre-échange avec la Communauté et l'élimination immédiate ou progressive des droits de douane pour un vaste éventail de produits. Ils contiennent également des règles d'origine qui doivent être respectées pour que des préférences commerciales puissent être accordées.

La loi douanière croate et ses dispositions d'application sont calquées sur le modèle du code des douanes communautaire et ses dispositions d'application. Elles contiennent des procédures et des dispositions douanières relatives aux renseignements tarifaires contraignants, aux renseignements contraignants en matière d'origine, à la valeur en douane, aux règles d'origine, aux régimes douaniers économiques et aux zones franches. On compte 14 zones franches en Croatie. Elles doivent faire l'objet d'adaptations pour être conformes à l'acquis (Voir également les chapitres 6 et 10 - Concurrence et Fiscalité). Des procédures simplifiées doivent encore être développées, notamment pour l'agrément des opérateurs sur la base de systèmes d'audit appropriés.

La Croatie met régulièrement à jour sa législation douanière pour tenir compte des modifications du code des douanes communautaire et de ses dispositions d'application. Cependant, des modifications du code des douanes communautaire de 2000 n'ont pas encore été transposées; elles couvrent notamment les régimes douaniers économiques, les zones franches et les entrepôts francs, le recours aux déclarations électroniques et la naissance d'une dette douanière. De sérieux efforts seront nécessaires pour adapter la procédure de transit croate aux exigences du Nouveau système de transit informatisé (NSTI). Les dispositions en matière de contrôle douanier des marchandises de contrefaçon et des marchandises pirates, permettant aux douanes d'intervenir à la fois sur demande et d'office, sont déjà appliquées. Les systèmes de contrôle douanier pour l'importation et l'exportation des biens culturels et des précurseurs sont en vigueur. Certaines taxes de dédouanement actuellement appliquées en vertu de la loi sur les taxes administratives, du tarif des taxes administratives et de la loi sur le tarif douanier semblent être contraires à l'acquis et devront être supprimées.

La Croatie applique des règles d'origine préférentielles dans le cadre de ses accords de libre-échange actuels, y compris l'accord de stabilisation et d'association/l'accord intérimaire avec la Communauté sur le commerce et les mesures d'accompagnement. Des problèmes spécifiques se sont récemment posés en ce qui concerne les certificats d'origine préférentielle pour le sucre, qui ont amené la Commission européenne à adresser une mise en demeure aux importateurs de ce produit. Cette affaire a démontré les sérieuses lacunes des systèmes croates de gestion et de contrôle des certificats d'origine préférentielle. Par la suite, l'administration croate a constaté des améliorations en ce qui concerne cet aspect du contrôle douanier. Il sera important de veiller à ce que la Croatie mette intégralement en oeuvre les mesures nécessaires pour empêcher la réapparition de ce type de problème. Dans ce domaine, un contrôle efficace des règles d'origine en Croatie sera primordial.

Depuis 2002, le tarif douanier croate repose sur la nomenclature combinée, conformément aux dispositions requises de l'accord intérimaire. Le public a également accès à une version électronique du tarif via Internet. Il constituera une bonne base pour l'établissement d'un tarif intégré compatible avec le tarif intégré des Communautés européennes (TARIC). La Croatie n'applique pas de plafonds tarifaires ni de système généralisé de préférences.

Grâce à l'assistance technique de la Communauté, la Croatie améliore la capacité administrative et opérationnelle de ses services douaniers. Il existe une loi sur les services douaniers régissant l'administration douanière croate. Les bases juridiques et la structure organisationnelle des douanes croates devront être revues pour les rendre entièrement compatibles avec les exigences et les normes de l'UE. L'administration douanière devrait notamment bénéficier d'une plus grande souplesse en ce qui concerne la répartition des ressources budgétaires et humaines.

Un programme de formation couvrant un large éventail de questions douanières, notamment celles liées à l'adhésion, devrait être mis en place à l'intention de l'ensemble du personnel. Dès l'adhésion, la Croatie devra abolir les contrôles douaniers aux frontières avec les États membres de l'UE. Elle devra prendre en considération, dans son programme stratégique, les ressources nécessaires au renforcement des postes situés aux frontières avec les pays non membres de l'UE. La fonction d'audit interne devra être renforcée. La communication interne devra être améliorée pour garantir une mise en oeuvre uniforme de la législation douanière dans l'ensemble du pays. Des progrès sont à accomplir en ce qui concerne les relations avec les utilisateurs finaux, notamment en termes de communication. Le service douanier dispose d'une page web en langue croate uniquement.

Il manque toujours un code déontologique au service douanier; il conviendra d'en mettre un au point et de l'appliquer. Des efforts sont entrepris pour fonder les contrôles douaniers sur l'analyse de risque afin d'accélérer les procédures douanières. Un nouveau département chargé de mettre en place une procédure uniforme d'analyse de risque est en cours de création. Ce nouveau département devra être totalement opérationnel. La Croatie effectue déjà des contrôles a posteriori qui devront toutefois être revus. Les trois laboratoires douaniers existants devront être améliorés pour être conformes aux exigences de l'UE.

Au sein des douanes croates, le recours à l'informatique semble être très répandu grâce à un réseau stable. En outre, la connexion des opérateurs au système de traitement des déclarations en douane est opérationnelle. Les applications informatiques en matière de transit, de tarif, de perfectionnement actif, de renseignements tarifaires (contraignants) et de contingents d'importation semblent être opérationnelles. Il conviendra de veiller à la compatibilité avec les systèmes douaniers informatisés de l'UE afin de garantir l'interconnexion dès l'adhésion.

Conclusion

La Croatie a commencé à déployer des efforts pour se préparer à assumer les responsabilités nécessaires en tant qu'administration douanière de l'UE, notamment en termes de protection et de contrôle des frontières extérieures de l'UE. La Croatie devra aller de l'avant dans l'alignement de sa législation sur l'acquis afin de le mettre en oeuvre et l'appliquer effectivement à moyen terme. Sa capacité administrative devra notamment être évaluée. Elle devra attacher une attention particulière à la modernisation et au renforcement de son administration douanière, notamment en la dotant de ressources budgétaires, informatiques et humaines suffisantes et en améliorant la formation.

Chapitre 26 - Relations extérieures

L'acquis dans ce domaine se compose presque exclusivement d'une législation qui lie directement les États membres de l'UE et qui ne requiert pas de transposition en droit national. Cette législation de l'UE résulte des accords multilatéraux et bilatéraux de la Communauté en matière de politique commerciale ainsi que d'un certain nombre d'instruments autonomes de défense commerciale. Dans les domaines du développement et de l'aide humanitaire, les pays candidats doivent se conformer à la législation et aux engagements internationaux de l'UE en la matière et se doter des capacités nécessaires pour participer aux politiques de l'UE dans ces secteurs.

L'accord de stabilisation et d'association/accord intérimaire sur le commerce et les mesures d'accompagnement comportent dans plusieurs domaines des dispositions exigeant des parties qu'elles agissent conformément aux principes de l'OMC ou d'autres obligations internationales correspondantes.

La Croatie est membre de l'Organisation mondiale du commerce depuis le 30 novembre 2000. Au moment de son adhésion, elle a souscrit à des engagements ambitieux qu'elle met en oeuvre progressivement. La Croatie n'a pas encore entamé de négociations en vue d'adhérer à l'accord de l'OMC sur les marchés publics. Dès l'adhésion à l'UE, la Croatie devra se conformer à toutes les obligations des accords multilatéraux de l'OMC dont la Communauté est signataire. Elle devra notamment appliquer le tarif douanier commun de la Communauté et les dispositions de la politique agricole commune en matière de commerce extérieur. La période transitoire convenue pour la mise en oeuvre par la Croatie de la liste de ses concessions et engagements sur les biens dans le cadre de l'OMC se termine en 2007. D'ici là, la Croatie appliquera des droits moyens simples d'environ 5,3 % sur les produits industriels et de 15,5 % sur les produits agricoles. Les niveaux actuels des droits équivalents pour l'UE s'élèvent à 3,6 % pour les produits industriels, 12,4 % pour les produits de la pêche et 16,2 % pour les produits agricoles.

Dès l'adhésion à l'UE, la Croatie sera liée à la politique commerciale commune de l'UE et à ses différents accords commerciaux préférentiels. Elle deviendra également membre de l'Espace économique européen. En outre, elle devra appliquer le régime autonome d'échanges préférentiels que la Communauté accorde à certains pays tiers, notamment le système généralisé de préférences. En contrepartie, elle devra mettre fin à tous ses accords commerciaux préférentiels avec des pays tiers et rendre tous les autres accords, y compris les accords commerciaux non-préférentiels, conformes aux obligations inhérentes à l'adhésion à l'UE. Actuellement, outre l'accord de stabilisation et d'association/accord intérimaire avec la Communauté, la Croatie a conclu des accords de libre-échange avec l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, l'ancienne République yougoslave de Macédoine, la Suisse, le Liechtenstein, la Norvège, l'Islande et la Turquie. Elle avait conclu des accords de libre-échange avec six des dix pays adhérents (Slovénie, Hongrie, Pologne, République tchèque, République slovaque et Lituanie), qui deviendront caducs à l'adhésion de ces pays à l'UE le 1er mai 2004. La Croatie est membre de l'ALECE et maintiendra ses accords préférentiels ALECE avec la Bulgarie et la Roumanie après l'élargissement de l'UE de 2004. Enfin, un accord de libre-échange signé avec la Serbie-et-Monténégro n'est pas encore entré en vigueur.

Dans le domaine des services, les engagements de la Croatie dans le cadre du GATS ne sont pas entièrement conformes à ceux de la Communauté. Dès l'adhésion, la Croatie devra veiller à ce que ses engagements multilatéraux dans le cadre du GATS soient le plus compatibles possible avec ceux de la Communauté. À cet effet, la Croatie devrait étroitement coopérer et coordonner ses positions avec celles de la Commission européenne en ce qui concerne les négociations de Doha sur le développement.

Dans le domaine des instruments de défense commerciale, les dispositions d'application sont en cours d'adoption par la Croatie. Dès l'adhésion, cette dernière devrait abroger toutes les dispositions juridiques et mesures nationales applicables en la matière dans la mesure où la législation communautaire entrera directement en vigueur sur son territoire.

La Croatie gère actuellement des programmes d'assurance-crédit et de financement à l'exportation. Dès l'adhésion, elle devra veiller à ce que son système d'assurance-crédit à l'exportation à court terme soit conforme aux règles communautaires relatives à la concurrence. En ce qui concerne les crédits à l'exportation à moyen et long termes, les règles doivent encore être alignées afin d'être entièrement conformes à la législation communautaire et aux obligations internationales.

Les exportations d'armes font actuellement l'objet d'un contrôle. En outre, un projet de loi sur le contrôle des exportations de biens à double usage est en cours d'élaboration. Dès l'adhésion, la Croatie devra se conformer entièrement à la législation correspondante de l'UE dans ce domaine.

En ce qui concerne la capacité administrative, la participation de la Croatie aux mécanismes décisionnels de l'UE dans le domaine commercial et la mise en oeuvre de l'acquis exigeront un renforcement du département de la politique commerciale et des relations économiques extérieures du ministère de l'Économie.

La Croatie a conclu des traités bilatéraux d'investissement avec 50 pays. Avant son adhésion à l'UE, la Croatie devra veiller à ce que le contenu de ces accords soit entièrement compatible avec ses obligations en tant que membre de l'UE et avec l'acquis communautaire. À cet effet, elle devra faire en sorte que les procédures nécessaires pour, le cas échéant, modifier ou dénoncer les accords soient mises en oeuvre suffisamment tôt pour assurer la conformité aux obligations de l'UE à la date de l'adhésion. Ce faisant, la Croatie devra tenir compte de la durée initialement prévue de certains accords, qui est parfois de 20 ans.

En ce qui concerne la politique de développement et les initiatives en matière d'aide humanitaire, la Croatie ne dispose d'aucun cadre juridique applicable à la coopération au développement. À l'exception de quelques projets fragmentés relevant de différents ministères, la seule forme d'aide prévue semble se limiter à des projets humanitaires ciblés en cas de catastrophes humanitaires. La part des réserves nationales de denrées prévue pour l'aide humanitaire s'est élevée à 5,1 millions HRK (671 000 euros) en 2000 et à 433 000 HRK (58 000 euros) en 2001.

La Croatie ne dispose d'aucune une structure spécifique au sein d'un ministère ni d'agence responsable de la politique de développement et il semble qu'il n'existe aucune coordination globale des activités liées au développement entre les différents ministères.

À ce stade, la Croatie ne serait pas en mesure d'assumer son rôle de soutien des objectifs et des instruments de la politique de développement de l'UE, ni de participer à sa mise en oeuvre et à son évolution ultérieure.

Conclusion

En ce qui concerne les relations extérieures, la Croatie devrait être en mesure de satisfaire aux exigences communautaires dans ce domaine à moyen terme, à condition qu'elle renforce la capacité institutionnelle permettant de mettre en oeuvre et d'appliquer effectivement l'acquis. Pour se préparer efficacement à l'adhésion, la Croatie devrait veiller à ce que ses actes et engagements au sein des organisations internationales et dans le cadre des accords internationaux soient conformes à l'accord de stabilisation et d'association ainsi qu'à ses obligations futures résultant de l'acquis.

Chapitre 27 - Politique étrangère et de sécurité commune

L'acquis relatif à la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) repose sur des actes juridiques relevant du «deuxième pilier» et, indirectement, du «premier pilier», notamment des accords internationaux juridiquement contraignants. Il est aussi fondé sur des déclarations et des accords politiques concernant la conduite du dialogue politique dans le cadre de la PESC, l'alignement sur les déclarations de l'UE et l'application éventuelle de sanctions et de mesures restrictives.

Dans l'attente de l'entrée en vigueur de l'accord de stabilisation et d'association, les règles actuellement applicables au dialogue politique régulier entre la Communauté européenne et ses États membres et la République de Croatie figurent dans la déclaration commune du 29 octobre 2001. Des réunions sont régulièrement organisées dans le cadre du dialogue politique au niveau ministériel et se déroulent bien. Au cours de ces réunions, la Croatie s'est montrée très intéressée par la poursuite d'une participation active au dialogue politique avec l'UE.

Au cours des deux dernières années, la Croatie a déclaré unilatéralement qu'elle s'associait à plusieurs positions communes et déclarations de l'Union dans le cadre de la PESC, notamment en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme. Dans l'intervalle, dans le cadre de «l'Agenda de Thessalonique pour les Balkans occidentaux», l'Union invite régulièrement la Croatie à s'aligner sur certaines démarches, déclarations et positions communes de l'Union dans le cadre de la PESC. La Croatie a soutenu la création de la Cour pénale internationale et a ratifié la convention de Rome portant statut de la Cour pénale internationale en 2001. Elle n'a pas signé d'accord bilatéral avec les États-Unis sur le refus de livrer certaines personnes à la Cour pénale internationale.

En mai 2002, la Croatie a souscrit au code de conduite de l'Union européenne sur les exportations d'armes. Elle a adhéré à la plupart des régimes internationaux existants visant à la non-prolifération des armes de destruction massive. Elle n'a pas encore souscrit à l'Arrangement de Wassenaar, au Groupe de l'Australie ni au régime de contrôle de la technologie des missiles mais a manifesté son intention de le faire. Elle participe aux travaux préparatoires relatifs au code de conduite international contre la prolifération des missiles balistiques. Néanmoins, la Croatie doit renforcer les instances compétentes chargées d'appliquer la loi dans le domaine des contrôles internes nécessaires à la mise en oeuvre intégrale des régimes internationaux de non-prolifération et des normes de l'UE correspondantes, notamment ceux ayant trait au contrôle du commerce des armes légères et de petit calibre ainsi que des biens à double usage.

En ce qui concerne les relations avec les pays voisins, certains litiges territoriaux ne sont pas encore résolus (voir le chapitre sur les critères politiques - Relations bilatérales). La Croatie est membre des Nations unies, de l'OSCE et du Conseil de l'Europe. Elle fait également partie, à titre de membre ou d'observateur, de nombreux autres organismes et accords internationaux et participe activement à plusieurs initiatives régionales et sous-régionales (voir le chapitre sur les critères politiques - Relations multilatérales). Elle n'a toutefois pas encore adhéré à toutes les conventions des Nations unies concernées, notamment dans le domaine de la lutte contre le terrorisme.

La Croatie a commencé à participer aux opérations internationales de maintien de la paix et a affecté des observateurs militaires à certaines missions des Nations unies. Elle est en train de désigner les forces qui prendront part à d'autres opérations de maintien de la paix et de préparer les mesures de restructuration nécessaires. Elle s'est déclarée prête à apporter son soutien, à participer et à contribuer aux opérations de gestion civile et militaire des crises dans le cadre de la politique européenne commune en matière de sécurité et de défense (PECSD). Néanmoins, les ressources nécessaires à cet effet n'ont pas encore été affectées.

En ce qui concerne la capacité administrative, la Croatie dispose d'un personnel diplomatique relativement nouveau qui, en dépit de ses ressources limitées, peut compter sur un vaste réseau de missions diplomatiques. Elle compte 55 représentations diplomatiques, 22 représentations consulaires et un bureau d'ambassade à l'étranger et emploie 1 000 personnes. Pour pouvoir travailler dans le cadre des structures PESC de l'UE, la Croatie devra mettre en place les fonctions et les mécanismes nécessaires au sein du ministère des Affaires étrangères. En ce qui concerne l'application des sanctions et des mesures restrictives, elle devra également ajuster sa capacité administrative aux normes de l'UE. Sa capacité administrative globale devra certainement être aussi renforcée en temps utile pour pouvoir satisfaire aux exigences de la politique étrangère et de sécurité commune.

Conclusion

La Croatie a déclaré qu'en tant qu'État membre, elle soutiendra activement et sans réserves la PESC telle qu'elle a été définie, dans un esprit de fidélité et de solidarité mutuelle.

Au vu de l'évaluation de sa politique étrangère et de sécurité à ce jour, on peut attendre de la Croatie qu'elle soit en mesure de satisfaire à ses obligations dans le cadre de la PESC à moyen terme, à condition qu'elle adopte les actes juridiques et administratifs et procède aux ajustements nécessaires à cet effet.

Chapitre 28 - Contrôle financier

L'acquis dans ce domaine est essentiellement composé de principes généraux admis à l'échelle internationale et conformes aux pratiques de l'UE relatifs au contrôle interne des finances publiques, qui doivent être transposés dans les systèmes de contrôle et d'audit de l'ensemble du secteur public. L'acquis exige notamment l'établissement de systèmes efficaces et transparents de gestion et de contrôle financiers, de systèmes d'audit interne qui fonctionnent de manière indépendante, un audit externe indépendant des systèmes de contrôle interne des finances publiques mis en place dans les organismes publics (institution supérieure de contrôle financier), un mécanisme de contrôle financier approprié en ce qui concerne les fonds de l'UE et la capacité administrative nécessaire à une protection efficace et équivalente des intérêts financiers de la CE.

Dans le domaine du contrôle interne des finances publiques (CIFP), la Croatie n'a pas encore mis en place une structure globale de contrôle basée sur la responsabilité des gestionnaires et un audit interne fonctionnant de manière indépendante. La législation primaire définissant le concept d'audit interne est la loi sur le budget. Le contrôle ex-ante s'effectue dans le cadre des règlements de mise en oeuvre du système du Trésor public (compte unique de trésorerie). La situation actuelle est caractérisée par un certain cloisonnement des responsabilités, des lacunes en matière de communication et d'information, l'inexistence d'un contrôle financier ex-ante obligatoire dans les institutions gérant les fonds publics et l'absence d'une législation harmonisée sur les compétences en matière de contrôle et d'audit. La direction d'audit interne et de contrôle au sein du ministère des Finances est responsable du développement et de l'harmonisation des concepts CIFP. La mise en place d'unités d'audit interne opérationnelles et fonctionnant de manière indépendante constituera le principal défi administratif dans ce domaine.

L'audit externe relève de l'Office national de vérification et repose sur la loi de 1993 sur la vérification des comptes de l'État. Les audits portent sur toutes les dépenses publiques financées par le budget de l'État, les fonds publics et les budgets des entités locales et régionales autonomes. La loi sur la vérification des comptes de l'État devrait prévoir l'audit externe des fonds de UE mais ce n'est pas encore le cas. L'Office national de vérification procède à des audits financiers, des audits de systèmes et des audits de performances. Il s'agit d'un organe autonome. Cependant, dans la mesure où son budget fait partie intégrante du budget de l'État, il faudra déployer des efforts pour accroître son indépendance budgétaire. Sa capacité administrative, notamment en termes de ressources humaines, devra également être renforcée.

En ce qui concerne le contrôle des fonds de l'UE, des mécanismes efficaces de suivi, de contrôle et d'audit des fonds de UE devront être mis en place. Il n'existe toujours aucun système applicable aux titres, aux dettes et aux recouvrements.

La Croatie en est au premier stade des travaux législatifs et administratifs préparatoires relatifs à la protection des intérêts financiers de la CE. Les procédures existantes et les compétences réparties entre les différents organes concernés portent essentiellement sur les procédures pénales dans les affaires de fraude (présumée) et, dans une moindre mesure, sur d'autres irrégularités. Il n'y a aucune institution ni organisme spécifique en matière d'enquête et/ou de traitement des cas d'irrégularités mais plusieurs organes existants exercent des responsabilités à cet égard. Il conviendra de définir et d'appliquer des procédures efficaces pour la détection, le traitement et le suivi financier et administratif/juridique des irrégularités et de mettre en place les méthodes de coordination nécessaires à cet effet.

Conclusion

La Croatie doit encore développer des politiques générales et un cadre législatif cohérent dans ce domaine. Les capacités administratives, notamment des unités d'audit interne fonctionnant de manière indépendante dans les institutions publiques, doivent être créées ou améliorées et un personnel compétent doit être formé. L'Office national de vérification dispose d'une base juridique et organisationnelle lui permettant de devenir un organe d'audit externe compétent mais il doit encore être renforcé. Dans le domaine du contrôle des fonds de l'UE, il y aura lieu de mettre en place un mécanisme efficace de suivi, de contrôle et de vérification de ces fonds. Il faudra également que la capacité administrative soit suffisante pour assurer une protection efficace et équivalente des intérêts financiers de la CE.

Si la Croatie poursuit ses efforts pour réorganiser et renforcer ses capacités en matière de contrôle financier public interne, d'audit externe et de lutte contre la fraude, elle devrait pouvoir satisfaire aux exigences de l'UE dans ce domaine à moyen terme.

Chapitre 29 - Dispositions financières et budgétaires

L'acquis dans ce domaine couvre les règles qui régissent les ressources nécessaires au financement du budget de la CE («ressources propres»). Ces ressources propres se composent principalement de contributions des États membres fondées sur des ressources propres traditionnelles provenant des droits de douane, des prélèvements agricoles et des cotisations «sucre»; de la TVA ; et du revenu national brut (RNB). Les États membres sont tenus de mettre en place les capacités administratives appropriées pour coordonner et assurer correctement le calcul, la perception, le versement et le contrôle des ressources propres et pour en rendre compte à l'UE en vue de la mise en oeuvre des règles applicables aux ressources propres. L'acquis dans ce domaine lie directement les États membres et n'exige pas de transposition en droit national.

Conformément à la loi douanière, la Croatie adopte chaque année un règlement concernant le tarif douanier qui est appliqué par l'administration douanière. L'administration prélève des droits de douane, la TVA sur les importations et des droits spécifiques à l'importation. Les créances à recouvrer et recouvrées sont classées dans des registres distincts. Les questions financières et budgétaires sont du ressort du ministère des Finances.

Les comptes nationaux et les données PNB/RNB fournis sont fondés sue les définitions et les règles comptables du Système européen de comptes économiques intégrés 95 (SEC 95). Les comptes nationaux ne sont pas tout à fait ajustés pour tenir compte de l'économie non observée.

Conclusion

Aucune différence significative n'existe entre le système croate et celui de l'UE en ce qui concerne les principes fondamentaux et les institutions dans les domaines politiques sous-jacents liés à l'application du système des ressources propres. Si elle poursuit ses efforts d'alignement sur les chapitres de l'acquis concernés, notamment la douane, la fiscalité, les statistiques et le contrôle financier, la Croatie ne devrait pas rencontrer de difficultés particulières pour satisfaire aux exigences du système des ressources propres à moyen terme.

C. RÉSUMÉ ET CONCLUSION

La Croatie a présenté sa demande d'adhésion à l'Union européenne le 21 février 2003.

Conformément aux dispositions de l'article 49 du traité, la Commission a, à la demande du Conseil, élaboré un avis sur la demande d'adhésion de la Croatie.

La Croatie se prépare à l'adhésion sur la base de l'accord de stabilisation et d'association signé le 29 octobre 2001 et de l'accord intérimaire entré en vigueur en mars 2002.

Pour rédiger son avis, la Commission a tenu compte de «l'Agenda de Thessalonique pour les Balkans occidentaux» adopté par le Conseil européen en juin 2003, où l'UE précisait «qu'il appartient aux pays des Balkans occidentaux de déterminer à quel rythme ils poursuivront leur progression vers l'UE, qui dépendra des résultats obtenus en ce qui concerne la mise en oeuvre des réformes, conformément aux critères établis par le Conseil européen de Copenhague de 1993 et à la conditionnalité prévue dans le cadre du PSA.»

Le Conseil européen de Copenhague, en juin 1993, a indiqué que les pays candidats d'Europe centrale et orientale qui le désirent pourront devenir membres de l'Union européenne à condition:

- qu'ils aient des institutions stables garantissant la démocratie, la primauté du droit, les droits de l'homme, le respect des minorités et leur protection,

- qu'ils soient dotés d'une économie de marché viable et qu'ils aient la capacité à faire face à la pression concurrentielle et aux forces du marché à l'intérieur de l'Union,

- qu'ils aient la capacité d'en assumer les obligations, et notamment de souscrire aux objectifs de l'union politique, économique et monétaire.

Pour évaluer les progrès réalisés dans ces domaines, la Commission a tenu compte de la capacité de la Croatie, sur le plan administratif et juridique, d'appliquer et de mettre en oeuvre l'acquis.

La Commission a également pris en considération les conditions de participation au processus de stabilisation et d'association définies par le Conseil le 29 avril 1997. Parmi ces conditions figurent la coopération avec le Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), la coopération régionale et d'autres questions connexes.

Pour préparer l'avis, la Commission a appliqué la même méthode que celle utilisée dans les avis précédents. Elle a analysé la situation actuelle ainsi que les perspectives à moyen terme. Pour rédiger sa recommandation relative à l'ouverture des négociations d'adhésion, elle a attaché une attention particulière à la capacité existante de la Croatie de satisfaire aux critères politiques.

1. Critères politiques

La Croatie dispose d'institutions démocratiques stables qui fonctionnent correctement, respectent les limites de leurs compétences et coopèrent entre elles. Les élections de 2000 et 2003 ont été libres et équitables. L'opposition joue un rôle normal dans le fonctionnement des institutions.

Il n'y a pas de problème majeur en ce qui concerne la garantie d'un État de droit et le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La Croatie doit toutefois prendre des mesures pour que les droits des minorités, notamment de la minorité serbe, soient entièrement respectés. Elle devrait accélérer la mise en oeuvre de la loi constitutionnelle sur les minorités nationales et intensifier ses efforts pour faciliter le retour des réfugiés serbes de Serbie et de Bosnie-Herzégovine. Des améliorations significatives doivent être apportées au fonctionnement du système judiciaire. L'efficacité de la lutte contre la corruption doit être renforcée.

La coopération de la Croatie avec le Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie s'est considérablement améliorée au cours des derniers mois. En avril 2004, le Procureur de l'État a déclaré que la Croatie coopérait désormais entièrement avec le PTIY. La Croatie doit maintenir son entière coopération et prendre toutes les mesures nécessaires pour que le dernier inculpé soit localisé et transféré au TPIY de La Haye. La Croatie a toujours des engagements en matière de coopération régionale; des efforts soutenus sont nécessaires dans ce domaine. Cela vaut particulièrement pour la résolution des questions frontalières avec les pays voisins, dans le respect des normes internationales en matière de règlement des litiges, et des problèmes découlant de la déclaration unilatérale de «zone écologique et de pêche» protégée dans la mer Adriatique.

2. Critères économiques

La Croatie peut être considérée comme dotée d'une économie de marché qui fonctionne. Elle devrait être en mesure de faire face à la pression concurrentielle et aux forces du marché à l'intérieur de l'Union à moyen terme, pour autant qu'elle continue à mettre en oeuvre son programme de réforme, en vue de surmonter certaines faiblesses persistantes.

En Croatie, il y a un consensus politique croissant concernant les objectifs fondamentaux de la politique économique. La Croatie est parvenue à créer un environnement macroéconomique d'une grande stabilité et à maintenir un faible taux d'inflation. La stabilité économique renforcée et les réformes structurelles entreprises jusqu'à présent permettent le fonctionnement des mécanismes du marché. Cela vaut notamment pour la libéralisation du commerce et des prix et, dans une moindre mesure, pour la privatisation. La Croatie est caractérisée par une population active dotée d'un assez bon niveau de formation et par de bonnes infrastructures routières et de télécommunications. Le pays dispose d'un secteur bancaire bien développé et d'une industrie touristique concurrentielle. L'économie de la Croatie est déjà bien intégrée à l'Union.

Cependant, le fonctionnement des mécanismes du marché doit encore être amélioré. Il conviendrait notamment de renforcer l'efficacité de l'appareil judiciaire, d'alléger les lourdes charges qui pèsent sur l'administration et de remédier à l'absence d'un registre cadastral et foncier complet. La restructuration et la privatisation des entreprises ont été plus lentes que prévu et certaines grandes entreprises auparavant détenues collectivement continuent de jouer un rôle important dans l'économie. Les secteurs de la construction navale et de l'agriculture doivent notamment être modernisés. Les réformes à apporter au système fiscal, au régime de la sécurité sociale et à la fonction publique ne sont pas encore achevées; quant à l'assainissement budgétaire, il doit être poursuivi avec détermination. L'intégration complète dans le marché unique et l'adoption de l'acquis communautaire risquent, au stade actuel, de poser des difficultés à plusieurs secteurs lorsqu'ils devront faire face à la concurrence à l'intérieur du marché unique. En remédiant aux insuffisances constatées, l'investissement, la croissance et, partant, la compétitivité de la Croatie s'en trouveraient améliorés.

3. Capacité à assumer les autres obligations liées à l'adhésion

La capacité de la Croatie à assumer les autres obligations incombant à un État membre a été évaluée au regard des indicateurs suivants:

- les obligations énoncées dans l'accord de stabilisation et d'association, notamment celles déjà en vigueur dans le cadre de l'accord intérimaire, qui ont trait à des domaines tels que la libre circulation des marchandises, la concurrence et les droits de propriété intellectuelle et industrielle;

- les progrès accomplis en matière d'adoption, de mise en oeuvre et d'application de l'acquis.

Le processus de ratification de l'accord de stabilisation et d'association avec la Croatie n'est pas terminé. La Croatie a progressé dans la mise en oeuvre de l'accord intérimaire, mais il convient d'accorder une attention particulière au respect des délais prévus. La Croatie a également pris des mesures importantes en vue de se conformer aux obligations futures liées à l'accord de stabilisation et d'association (ASA).

La Croatie a consenti des efforts notables pour aligner sa législation sur l'acquis, notamment dans les domaines liés au marché intérieur et au commerce. Ces efforts demandent à être poursuivis énergiquement. Les capacités administratives sont inégales et la mise en oeuvre de la législation doit encore être améliorée. La Croatie doit poursuivre l'alignement de sa législation tout en renforçant les structures administratives et judiciaires nécessaires à la mise en oeuvre et à l'application efficaces de l'acquis.

Si elle poursuit ses efforts, la Croatie ne devrait pas avoir de difficultés majeures à appliquer l'acquis à moyen terme dans les domaines suivants: union économique et monétaire; statistiques; politique industrielle; petites et moyennes entreprises; science et recherche; éducation et formation; culture et audiovisuel; relations extérieures; politique étrangère et de sécurité commune; dispositions financières et budgétaires.

La Croatie devra aller de l'avant dans l'alignement de sa législation sur l'acquis, en vue de sa mise en oeuvre et de son application efficaces à moyen terme dans les domaines suivants: libre circulation des capitaux; droit des sociétés; pêche; transports; énergie; protection des consommateurs et de la santé; union douanière; contrôle financier.

La Croatie devra fournir des efforts considérables et soutenus pour aligner sa législation sur l'acquis, en vue de sa mise en oeuvre et de son application efficaces à moyen terme dans les domaines suivants: libre circulation des marchandises; libre circulation des personnes; libre prestation de services; concurrence; agriculture; fiscalité; politique sociale et emploi; télécommunications et technologies de l'information; politique régionale; justice et affaires intérieures.

Pour ce qui est de l'environnement, des efforts très importants devront être fournis, dont des investissements massifs et un renforcement des capacités administratives, en vue de la mise en oeuvre de la législation. La législation en la matière ne pourra être en parfaite conformité avec l'acquis qu'à longue échéance et une augmentation des investissements sera nécessaire à cette fin.

CONCLUSION

- La Croatie est une démocratie qui fonctionne et qui dispose d'institutions garantissant la primauté du droit. Aucun problème grave n'y vient entacher le respect des droits fondamentaux. En avril 2004, le procureur du TPIY a déclaré que la Croatie coopérait désormais pleinement avec le TPIY. La Croatie doit continuer dans cette voie et prendre toutes les dispositions nécessaires pour que le dernier inculpé soit localisé et transféré au TPIY. La Croatie doit faire des efforts supplémentaires dans les domaines des droits des minorités, du retour des réfugiés, de la réforme du système judiciaire, de la coopération régionale et de la lutte contre la corruption. La Commission confirme, dès lors, que la Croatie satisfait aux critères politiques énoncés par le Conseil européen de Copenhague, en 1993, ainsi qu'aux conditions du processus de stabilisation et d'association définies par le Conseil en 1997.

- La Croatie peut être considérée comme dotée d'une économie de marché qui fonctionne. Elle devrait être en mesure de faire face à la pression concurrentielle et aux forces du marché à l'intérieur de l'Union à moyen terme, pour autant qu'elle continue à mettre en oeuvre son programme de réforme, en vue de surmonter certaines faiblesses persistantes.

- La Croatie sera en mesure d'assumer à moyenne échéance les autres obligations liées à l'adhésion, sous réserve qu'elle consente des efforts considérables en termes d'alignement de sa législation sur l'acquis et veille à sa mise en oeuvre et à son application. Toutefois, la législation en matière d'environnement ne pourra être en parfaite conformité avec l'acquis qu'à longue échéance et une augmentation des investissements sera nécessaire à cet effet.

À la lumière de ces éléments, la Commission recommande que des négociations d'adhésion à l'Union européenne soient ouvertes avec la Croatie.

Afin d'aider la Croatie dans ses préparatifs aux négociations d'adhésion, il conviendra d'entreprendre un exercice d'évaluation exhaustif. La Commission recommande également que l'Union européenne élabore une stratégie de préadhésion pour la Croatie. Elle prépare actuellement les propositions nécessaires à cette fin.

Le présent avis est assorti d'un projet de partenariat européen avec la Croatie, qui recense l'ensemble des questions que le pays devra aborder en priorité dans sa préparation à l'adhésion. La Commission rendra périodiquement compte au Conseil des progrès réalisés par la Croatie dans ses préparatifs d'adhésion à l'Union européenne.

ANNEXE

ANNEXE I - STATISTIQUE

Sauf indication contraire, les données contenues dans la présente annexe proviennent du Bureau central des statistiques de Croatie.

Les données présentées ci-dessous ont été rassemblées en utilisant, dans la mesure du possible, des définitions et des normes de l'Union européenne, qui diffèrent des pratiques nationales dans de rares cas. Des différences peuvent parfois survenir entre ces données et celles présentées dans d'autres chapitres de l'avis, généralement basées sur la réponse de la Croatie aux questionnaires envoyés en juillet 2003.

Les notes méthodologiques expliquent le contenu et les particularités des données statistiques présentées dans cette annexe. Ces données correspondent aux informations disponibles en janvier 2004.

DONNÉES DE BASE

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Les données 2001 sur la population sont basées sur le recensement réalisé le 31 mars 2001.

DÉMOGRAPHIE

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COMPTES NATIONAUX

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Pour 2002, les données correspondent à la somme des comptes trimestriels.

La dernière donnée officielle pour le PIB estimé en PPA est de 8 267 USD pour l'année 1999. Ce calcul a été effectué par l'OCDE et publié dans «Purchasing Power Parities and Real Expenditure», année de référence 1999. Les prochaines données officielles pour la Croatie porteront sur l'année 2002. Les PPA pour les pays tiers ne sont disponibles que tous les trois ans, les années intermédiaires devant être estimées, généralement par les organisations internationales. Dans le cas présent, les données manquantes ont été estimées par le Bureau des statistiques de la Croatie.

Les variations de stocks pour 2002 correspondent à une première estimation. Les chiffres définitifs ne seront disponibles qu'une fois le PIB de 2002 établi.

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TAUX D'INFLATION

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BALANCE DES PAIEMENTS

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Les sources de données étant limitées, la Banque centrale croate utilise l'USD et la kuna croate pour sa balance des paiements. Les chiffres fournis dans ce tableau sont le résultat de la conversion en euros d'une balance des paiements présentée en kunas.

FINANCES PUBLIQUES

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Les données sur le déficit ou l'excédent des administrations publiques portent aussi sur le secteur public consolidé. La méthodologie des SFP (statistiques des finances publiques) de 1986 est utilisée, à l'exception des données sur les recettes des privatisations, qui sont exclues du revenu et reclassées au titre du financement de la balance.

Les données sur la dette publique en 2002 comprennent les données sur le gouvernement central, les gouvernements locaux, la banque croate pour la reconstruction et le développement, ainsi que sur les garanties. Les données sur les années antérieures ne sont pas entièrement comparables à celles de 2002, en raison de différences méthodologiques. La reconstruction des données correspondant à ces années est en cours.

Les données sur les dépenses publiques en 2002 correspondent à une première estimation. Les chiffres définitifs ne seront disponibles qu'une fois le PIB de 2002 établi.

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INDICATEURS FINANCIERS

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COMMERCE EXTÉRIEUR

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Les valeurs des exportations, des importations et de la balance commerciale pour 1998 et 1999 ont été calculées sur la base des taux de change de la Banque centrale de Croatie, au dernier jour de l'année. Le taux de change pour 1998 était de 1 euro = 7,3291 kunas et, pour 1999, de 1 euro = 7,679009 kunas. Pour la période 2000-2002, les valeurs ont été recalculées en euros sur la base des taux de change courants journaliers de la Banque centrale croate (taux moyen) en vigueur le jour de perception des droits de douane.

Les termes de l'échange ont été calculés sur la base des valeurs des exportations et des importations exprimées en USD.

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MARCHÉ DU TRAVAIL

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Taux de chômage au niveau du comté (NUTS III) au 31 mars, d'après des sources administratives. Les données ne sont donc pas comparables au taux de chômage communiqué par l'EFT (enquête sur les forces de travail). Les données sur les comtés ne font pas état des personnes employées dans la police et la défense.

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INFRASTRUCTURES

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INDUSTRIE ET AGRICULTURE

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NIVEAU DE VIE

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Les abonnements à des services de téléphonie mobile portent sur les utilisateurs de services prépayés et postpayés.

Les abonnements à Internet incluent les abonnés via un modem ou des lignes louées.

ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

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Les chiffres sur l'enseignement supérieur représentent le pourcentage d'étudiants présents dans l'enseignement supérieur par rapport à la population totale des 18-24 ans. Le nombre total des 18-24 ans est une estimation (sauf pour 2001).

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