30.4.2004   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 117/52


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur l'application aux institutions et organes de la CE des dispositions de la convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public et l'accès à la justice dans le domaine de l'environnement»

(COM(2003) 622 final — 2003/0242 COD)

(2004/C 117/13)

Le 7 novembre 2003, le Conseil a, conformément à l'article 175, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne, décidé de consulter le Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur l'application aux institutions et organes de la CE des dispositions de la convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public et l'accès à la justice dans le domaine de l'environnement» (COM(2003) 622 final — 2003/0242 COD).

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 4 mars 2004 (rapporteuse: Mme SÁNCHEZ MIGUEL).

Lors de sa 408ème session plénière des 28 et 29 avril 2004 (séance du 29 avril 2004), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 68 voix pour, 6 voix contre et 7 abstentions.

1.   Introduction

1.1

La politique environnementale de l'UE, telle que visée à l'article 6 du traité CE, et, en particulier, l'objectif communautaire de promotion du développement durable, rendent indispensable que les citoyens européens se sentent impliqués dans toutes les activités destinées à les faire connaître et à les mettre en oeuvre. Pour cette raison, la DG Environnement a — par divers instruments, dispositions réglementaires, communications, conférences, etc. — renforcé l'information des parties intéressées ainsi que leur participation à cette politique.

1.2

Les instruments utilisés jusqu'à présent consistaient essentiellement à instaurer des règles pour l'information et la participation des citoyens et, dans une moindre mesure, pour l'accès à la justice concernant les normes applicables aux différents domaines que couvre la politique environnementale.

1.3

Aux termes de l'article 175, paragraphe 1, du traité CE, l'adoption de mesures permettant de garantir les objectifs de la politique environnementale relève de la compétence de la Commission. Il s'agit donc d'orienter la participation des citoyens de manière à ce qu'elle favorise et améliore la protection de l'environnement. Il convient de noter que cet instrument d'information et de consultation s'applique déjà à d'autres politiques communautaires, notamment la PAC et la politique industrielle. Compte tenu de l'impact de ces politiques sur le développement durable, il est primordial que la connaissance et la mise en oeuvre transparente de ces politiques dépassent le cercle des parties intéressées, grâce à une diffusion de l'information à l'ensemble des citoyens.

1.4

Les instruments normatifs ayant contribué à ce jour au développement de l'information et de la participation des citoyens à la problématique de l'environnement sont les suivants:

Règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (1);

Directive 2003/4/CE concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement (2);

Directive 2003/35/CE prévoyant la participation du public lors de l'élaboration de certains plans et programmes relatifs à l'environnement (3).

1.5

La signature, en 1998, par la Communauté européenne, de la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement (convention d'Aarhus) réaffirme l'objectif visant à accroître l'implication des citoyens européens dans les questions environnementales dans le but de renforcer leur participation à la conservation et à la protection de l'environnement et, partant, d'influencer le développement durable de l'espace européen.

1.6

La situation juridique actuelle, qui résulte de l'absence de ratification de la convention d'Aarhus par tous les États membres (4), impose une double intervention. Premièrement, il y a lieu de créer un instrument législatif (règlement) qui permet l'application totale aux institutions et organes de la CE des dispositions de la convention relatives à l'accès à l'information, à la participation du public au processus décisionnel et à l'accès à la justice. Deuxièmement, il y a lieu de compléter les dispositions destinées aux États membres par le biais d'une proposition de directive qui doit intégrer uniquement la partie concernant l'accès à la justice.

2.   Contenu de la proposition de règlement

2.1

La proposition de règlement à l'examen a pour objet l'application du contenu de la convention d'Aarhus aux organes compétents de l'UE grâce à l'introduction des dispositions nécessaires relatives à l'accès à l'information, à la participation et à l'accès à la justice dans le domaine de l'environnement. À cette fin, il définit les concepts servant à délimiter son champ d'application ainsi que les organes de référence soumis aux obligations précisées ci-après. Il importe de distinguer parmi les définitions celle relative au droit environnemental.

2.2

L'accès à l'information sir l'environnement, traité dans les articles 3 à 7, intègre le contenu du règlement no 1049/2001, qui s'applique désormais aux autres organes de l'UE investis de compétences en matière d'environnement, et n'est donc plus limité au Parlement européen, au Conseil et à la Commission. L'information sur l'environnement se présente comme une obligation imposée aux différents organes assumant des responsabilités en la matière, qui sont tenus de se doter des moyens les plus appropriés pour assurer l'information du public et veiller à sa mise à jour permanente par quelque mode de communication disponible que ce soit, mais de préférence par le biais des réseaux de télécommunications publics. Les parties intéressées pourront ainsi disposer à temps d'une information suffisante. Les critères suivants doivent être observés:

qualité et actualisation de l'information;

accessibilité des parties intéressées à l'information, de sorte que les demandes d'information soient rapidement satisfaites;

coopération entre toutes les autorités compétentes en matière d'information face à des situations d'urgence sur le plan environnemental.

2.3

L'article 8 porte sur la participation du public et définit les conditions selon lesquelles les citoyens ont le droit de participer à l'élaboration des plans et programmes relatifs à l'environnement, qui est réalisée par une institution ou un organe communautaire et est requise par une disposition juridique. Cet article permet d'associer le public susceptible de participer ainsi que les organisations environnementales aux phases initiales précédant l'adoption des plans et programmes.

2.4

L'accès à la justice sera possible pour toute personne qui possède le droit d'ester en justice. En d'autres termes, seules les organisations reconnues au sens des articles 12 et 13 seront habilitées à engager des poursuites judiciaires devant la Cour de justice des CE. Toutefois, aux termes de l'article 9 concernant la légitimation des personnes qualifiées, une demande de réexamen des actes administratifs émanant des institutions communautaires peut être introduite, qui, si elle est justifiée, peut suspendre tous les actes contrevenant au droit de l'environnement et ce, avant une éventuelle action en justice.

3.   Observations générales

3.1

Le CESE a affirmé à plusieurs reprises que l'instrument le plus approprié dont dispose l'UE pour l'application de la législation environnementale est l'implication des citoyens dans la politique de développement durable, qui doit reposer sur la transparence et le contrôle du respect, par tous, des normes établies à cet effet, tout en garantissant la protection des informations confidentielles. L'accès à l'information, la participation à l'élaboration des plans et programmes relatifs à l'environnement et l'accès ultérieur à la justice sont les instruments qui permettront non seulement une meilleure application des dispositions juridiques, mais également une plus grande sensibilisation et une meilleure éducation des citoyens en ce qui concerne la conservation et l'utilisation des ressources naturelles existantes.

3.2

Si, à l'aube de cette étape nouvelle marquée par l'adhésion prochaine de dix nouveaux pays, les nouvelles dispositions d'harmonisation proposées par la Commission sont les bienvenues, il convient néanmoins d'insister auprès des pays européens signataires de la convention d'Aarhus pour qu'ils procèdent à sa ratification. Cette convention devrait également être ratifiée par la Communauté européenne, ce qui augmenterait le nombre d'instruments en faveur de la protection de l'environnement à l'échelle mondiale, en particulier les conventions internationales.

3.3

Ce nouvel instrument juridique complète l'application de la convention d'Aarhus, créant ainsi un instrument juridique à l'intention des autorités communautaires. La nécessité de cet instrument découle des conséquences transfrontalières de nombreuses dispositions environnementales. Dans de nombreux cas, c'est à l'autorité communautaire qu'il incombera en effet de régler les questions d'application. Dans l'accomplissement de cette tâche, il est fondamental de souligner le rôle de l'Agence européenne pour l'environnement, qui fonctionne comme une base centrale d'information et de contrôle du respect de la législation environnementale dans l'ensemble de l'UE.

3.4

Tout en accueillant favorablement les dispositions proposées, le Comité juge utile de souligner et de clarifier certains points essentiels dans la perspective de la pleine réalisation de l'objectif poursuivi.

3.4.1

Les définitions énoncées dans la proposition à l'examen, qui sont extraites de la convention d'Aarhus, varient quelque peu par rapport à celles contenues dans cette convention. Signalons notamment:

3.4.1.1

Le concept d'entité qualifiée, introduit dans les deux propositions, ne figure pas dans la convention d'Aarhus, qui parle uniquement de «public concerné» et reconnaît sous cette expression toutes les organisations qui oeuvrent en faveur de la protection de l'environnement, sans que celle-ci soit nécessairement leur «objectif unique». Il est seulement demandé à ces organisations qu'elles respectent le cadre légal en matière d'association de chaque État membre. Il est évident que d'autres organisations sans but lucratif, telles que des syndicats, des organisations socioéconomiques et socioprofessionnelles, des organisations de consommateurs, etc., réalisent un important travail environnemental au niveau local, régional, national et européen.

3.4.1.2

La proposition de règlement, se référant au règlement (CE) no 1049/2001, parle d'institutions et d'organes communautaires au sens large. Le CESE en fait donc partie.

3.4.1.3

Un aspect important à souligner est l'existence de différences, du fait d'un problème linguistique, en ce qui concerne les domaines couverts par le droit de l'environnement. Le CESE recommande de vérifier d'un point de vue linguistique certains alinéas très importants, en particulier le point v). Il serait opportun de prendre en compte la nécessité d'un libellé identique pour tous les alinéas qui, en tant qu'exigences minimales, permettent d'harmoniser la protection de l'environnement.

3.4.2

Procédures en matière d'environnement. Il faudrait tenir compte de ce que l'article 9, paragraphe 5, de la convention d'Aarhus, énonce clairement que chaque partie, en l'occurrence les organes communautaires, doit veiller à ce que le public «soit informé» de la possibilité d'engager des procédures de recours, et «envisager la mise en place de mécanismes appropriés d'assistance» visant à éliminer ou à réduire les obstacles financiers ou autres qui entravent l'accès à la justice dans le domaine de l'environnement.

4.   Observations particulières

4.1   Règlement sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement

4.1.1

Le CESE estime que la proposition de règlement renforce les mesures de large portée que la Commission a prises pour la réalisation effective des objectifs environnementaux et, il est tout particulièrement d'avis que c'est l'instrument approprié pour faciliter l'information, la participation et l'accès à la justice des citoyens européens, à travers leurs organisations sociales, économiques et environnementales vis-à-vis des institutions et des organes communautaires, y compris les agences ou offices publics créés en vertu ou sur la base du traité CE, sauf s'ils agissent dans l'exercice de pouvoirs judiciaires ou législatifs, afin que non seulement la Commission mais également toutes les institutions au sens le plus large du terme soient responsables devant les citoyens en la matière, comme prévu dans le règlement CE no 1049/2001.

4.1.2

L'intégration de l'instance «entités qualifiées» en ce qui concerne l'accès à la justice, tandis que pour l'information et la participation il est toujours renvoyé à celle du «public», comme dans la convention d'Aarhus, est d'importance cruciale. L'intégration de cette nouvelle instance nous semble en principe appropriée en ce qu'elle facilite l'accès à la justice, dès lors que ces entités n'ont pas à faire valoir un intérêt suffisant ni à alléguer une atteinte à un droit pour pouvoir y accéder. Le CESE souhaite néanmoins mettre en évidence un problème, à savoir le caractère restrictif des critères qui excluent l'habilitation des entités n'ayant pas pour objectif unique la protection de l'environnement. En ce sens, il serait plus adapté à la situation européenne de pouvoir qualifier d'autres organisations qui, parmi d'autres objectifs socio-économiques, ont également une compétence dans le domaine de la protection de l'environnement.

4.1.3

En ce qui a trait à la participation du public à la préparation des plans et programmes, comme prévu à l'article 8, le CESE rappelle tout d'abord la restriction que peut supposer la référence aux ONG qui défendent l'environnement, référence qui bien que n'étant pas limitative comme dans le cas de la définition de l'entité qualifiée, pourrait néanmoins aboutir au même résultat, ne serait-ce que par inertie procédurale. Le CESE rappelle également sa demande de voir élargir le concept à toutes les organisations qui comptent parmi leurs finalités la défense de l'environnement. Par ailleurs, il y a lieu d'inclure à l'article 8, l'obligation pour les institutions communautaires de rendre publics les résultats de la participation. Le CESE souscrit à l'extension de l'accès aux informations environnementales et de la participation du public à l'élaboration de plans et de programmes en matière environnementale par les institutions et les organes communautaires, comme prévu par la convention d'Aarhus. Afin que ces organes puissent opérer en garantissant une participation effective et que les résultats de celle-ci soit dûment pris en considération, il recommande de faire connaître de manière transparente et complète les critères de financement des activités énumérées dans l'annexe de la convention ainsi que les délibérations relatives aux OGM et aux substances chimiques, eu égard à la sensibilité particulière des citoyens sur la sécurité environnementale et sur la protection de la santé liée à ces questions.

4.1.4

Le Titre IV qui régit l'accès à la justice en matière d'environnement, peut, du point de vue de la Convention d'Aarhus, avoir un effet de distorsion de l'objectif poursuivi, dès lors qu'il le limite aux seules entités qualifiées, tant pour ce qui est du réexamen interne des actions administratives que des actions en justice. Tout en comprenant que cette limitation est inspirée par un souci de simplification procédurale, il nous semble qu'il devrait suffire, qu'il s'agisse du réexamen ou des actions en justice, dans la sphère communautaire, de démontrer l'intérêt et la compétence dans la réclamation.

4.1.5

Le CESE n'est pas d'avis que les entités qualifiées doivent exercer leurs activités dans plusieurs États membres.

4.1.6

L'article 12 d) du règlement prévoit qu'une entité qualifiée doit faire certifier ses comptes annuels par un expert-comptable agréé. En vertu du principe de subsidiarité, il conviendrait de laisser aux États membres le contrôle du respect des règles de comptabilité nationale correspondant à ces organisations.

4.1.7

Le CESE estime qu'afin de réduire les coûts des actions intentées par un demandeur pour faire respecter ses droits par l'État, ces coûts devraient être fixés en fonction des intérêts en litige et des aides financières, comme le prévoit la convention d'Aarhus.

Bruxelles, le 29 avril 2004.

Le Président

du Comité économique et social européen

Roger BRIESCH


(1)  JO L 145 du 31.5.2001, p. 43. La communication de la Commission intitulée «Vers une culture renforcée de consultation et de dialogue — Principes généraux et normes minimales applicables aux consultations engagées par la Commission avec les parties intéressées» (COM(2002) 704 final du 11.12.2002), a également été approuvée.

(2)  JO L 41 du 14.2.2003, p. 26.

(3)  JO L 156 du 25.6.2003, p. 17.

(4)  Elle a été ratifiée par les pays suivants: Portugal, Belgique, France, Danemark et Italie.