52003DC0600

Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, Comité Économique et Social européen et au Comité des Régions - Un cadre cohérent pour l'aérospatiale - Réaction au rapport STAR 21 /* COM/2003/0600 final */


COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL, AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS - Un cadre cohérent pour l'aérospatiale - Réaction au rapport STAR 21

1. Introduction

Au cours des dernières années, l'Union européenne a formulé des objectifs clairs en vue d'accroître la sécurité et le bien-être économique de ses citoyens. Le Conseil européen de Cologne a reconnu la nécessité d'accomplir des efforts soutenus pour disposer d'une base industrielle et technologique de la défense qui soit compétitive et dynamique, afin d'étayer la capacité de l'Europe à répondre aux crises internationales. Lors du Conseil de Lisbonne, les chefs d'État et de gouvernement ont fixé à l'Union l'objectif stratégique de devenir l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde au cours des dix années suivantes. Le Conseil de Barcelone a insisté sur ce point, indiquant que l'effort global en matière de R & D et d'innovation dans l'Union européenne devait être fortement stimulé. Plus récemment encore, le Conseil de Thessalonique a décidé qu'il était temps de prendre des mesures concrètes dans le domaine de la défense.

Secteur de pointe qui concentre des compétences élevées et opère à la fois dans le domaine civil et dans le domaine militaire, l'industrie aérospatiale européenne est idéalement placée pour apporter une contribution importante à ces objectifs économiques et stratégiques. Elle joue un rôle crucial dans le maintien de la capacité industrielle et technologique de l'Europe en matière de transports, de communications, d'observation, de sécurité et de défense. Une industrie aérospatiale compétitive au niveau mondial est essentielle pour la réalisation des objectifs économiques et politiques de l'Europe.

L'Europe est aujourd'hui confrontée au défi suivant: instaurer un environnement dans lequel son industrie aérospatiale sera encouragée à maintenir et à améliorer sa compétitivité, contribuant ainsi aux objectifs essentiels européens. Telle est la raison de l'institution du groupe consultatif sur l'aérospatiale, composé de représentants éminents de l'industrie ainsi que de membres des institutions communautaires, chargés de jeter un regard nouveau sur le cadre politique et réglementaire actuel de l'aérospatiale en Europe, de relever les carences et de formuler des propositions d'amélioration. Dans son rapport (ci-joint) «Analyse stratégique de l'industrie aérospatiale pour le 21ème siècle (STAR 21)», le groupe présente son évaluation et ses recommandations pour la création d'un marché et d'un cadre politique cohérents.

Ce rapport a été largement commenté et discuté depuis sa publication en juillet 2002 et il a servi à mettre en perspective une série d'importantes initiatives communautaires ayant une incidence sur ce secteur. Il a également permis de s'assurer du soutien de l'industrie pour les initiatives communautaires dans ce domaine.

Le groupe s'est réuni à nouveau en juin 2003 afin d'analyser les progrès réalisés. Il a fait le point sur les initiatives pertinentes les plus importantes qui avaient été lancées par la Commission ou qui étaient en cours d'examen au Conseil, et a constaté avec satisfaction que la Commission mettait l'accent sur la nécessité d'intensifier les efforts en vue d'atteindre les objectifs fixés et sur l'importance de susciter un débat dans les autres institutions communautaires à propos des principaux objectifs politiques dans ce domaine.

Position de la Commission en ce qui concerne l'industrie aérospatiale

Au cours des dix dernières années, la Commission a régulièrement défini l'aérospatiale comme un secteur industriel essentiel nécessitant des politiques de soutien afin d'accroître sa compétitivité à l'échelle mondiale. La communication de 1997 «L'industrie aérospatiale européenne face au défi mondial» (COM (1997)466) était axée sur l'urgence d'une concentration du secteur aérospatial européen, domaine dans lequel des progrès considérables ont été réalisés. Reconnaissant la nécessité d'assurer la compétitivité des industries européennes, et en particulier d'adapter les politiques à la situation spécifique des secteurs industriels, la communication de la Commission «La politique industrielle dans une Europe élargie» (COM (2002)714) a cité l'aérospatiale comme un exemple particulier de secteur dont les activités dépendent de facteurs spécifiques, soulignant l'importance d'un engagement clair de l'UE et des États membres en vue d'améliorer la compétitivité de cette industrie.

Le rapport STAR 21 a attiré l'attention sur la nécessité de développer un marché de la défense plus performant, condition préalable pour accroître encore la compétitivité de l'industrie aérospatiale. Dès 1997, la Commission avait souligné les difficultés auxquelles étaient confrontées les industries européennes liées à la défense et avait appelé à des mesures spécifiques pour renforcer la compétitivité industrielle et préserver la base technologique («Mettre en oeuvre la stratégie de l'Union européenne en matière d'industries liées à la défense» COM (1997)583). Plus récemment, compte tenu des évolutions importantes vers la mise en oeuvre d'une politique européenne de sécurité et de défense (PESD) et de la reconnaissance croissante du fait que la rentabilité impose de mettre en commun les ressources dans les domaines de la R & D et des achats, la Commission a adopté une nouvelle communication, intitulée «Défense européenne - Questions liées à l'industrie et au marché» (COM (2003)113), qui insiste sur l'importance de créer un véritable marché européen des équipements de défense.

Le deuxième domaine critique mis en évidence par le rapport STAR 21 est l'espace; il connaît depuis quelques années de graves difficultés, imputables à un marché des télécommunications déprimé et à une concurrence mondiale accrue. À ce propos, la Commission a fait état, dans sa communication de 2001 «Vers une politique européenne de l'espace» (COM (2001)718), de la nécessité d'une coopération étroite entre l'Agence spatiale européenne (ESA) et l'Union européenne. En outre, à travers son récent Livre vert - Politique spatiale européenne (COM(2003)17), la Commission a entamé, avec l'ESA, un large processus de consultation afin de lancer un débat sur l'utilisation de l'espace à moyen et long terme au profit de l'Europe. Ces discussions conduiront dans le courant de cette année à l'élaboration d'un livre blanc et d'un plan d'action.

Toutes ces communications font mention des désavantages dus à la fragmentation relative du cadre stratégique de l'industrie aérospatiale européenne et de la nécessité que les mesures des pouvoirs publics qui influent sur ce secteur soient cohérentes. Au cours des dernières années, on a observé aux niveaux industriel et politique des développements prometteurs qui, malgré la conjoncture économique difficile que l'on connaît actuellement, ont renforcé la position du secteur; s'ils se confirment, notamment dans le cas de la sécurité et de la défense, on peut espérer de meilleures perspectives d'avenir.

L'objet de la présente communication est de démontrer comment la Commission a déjà répondu aux analyses et aux prescriptions du rapport STAR 21, de définir les étapes à suivre afin de contribuer à créer le cadre nécessaire pour assurer la compétitivité à long terme de l'industrie aérospatiale en Europe et, d'une manière plus générale, de sensibiliser les autres institutions communautaires aux principales questions qui se posent.

2. L'industrie aérospatiale en Europe

Aujourd'hui, la fabrication de gros porteurs civils est l'activité qui contribue le plus au chiffre d'affaires de l'industrie aérospatiale européenne, représentant à elle seule plus de 20 milliards d'euros par an. Ce marché est de nature cyclique, car il dépend des programmes d'achat des compagnies aériennes, lesquels fluctuent considérablement, surtout à une époque où les perspectives économiques sont incertaines et où la sécurité est au coeur des préoccupations partout dans le monde. Dans le secteur militaire, la demande est fonction des budgets de la défense et des politiques d'achat des gouvernements qui, à leur tour, dépendent des développements géopolitiques et de l'évolution de la perception de menaces. Comme les produits de la filière civile et de la filière militaire présentent de nombreux points communs, il est indispensable pour l'industrie que ces deux segments comportent autant de prévisibilité et de stabilité que possible. Elle peut ainsi tirer le meilleur parti de la base de connaissances, optimiser les ressources techniques, humaines et financières et compenser les variations de la demande lorsque l'un des segments traverse des difficultés périodiques.

Pour ce qui est des aspects spécifiques, l'évolution globale du marché des gros porteurs civils et la compétitivité d'Airbus constituent des éléments fondamentaux du développement futur de l'industrie européenne. Le ralentissement général de l'économie, la menace terroriste, la crise irakienne et le SRAS ont fortement freiné cette dynamique. Toutefois, Airbus a moins souffert que Boeing, son principal concurrent international, parvenant à accroître ses parts de marché pour arriver pratiquement à égalité avec celui-ci dans sa gamme de produits actuelle. Cette performance pourrait même s'améliorer à l'avenir en fonction de la réussite du développement et de la mise sur le marché du nouveau très gros porteur A380, dont l'entrée en service est attendue en 2006.

Dans le secteur de la défense, le nombre des nouveaux programmes est réduit, en Europe comme ailleurs dans le monde. S'il est mené à bien comme prévu, le Joint Strike Fighter américain devrait être le programme individuel le plus important, qui façonnera la branche des avions de combat pour les années à venir et pourrait limiter la possibilité de développer de nouveaux produits européens sur ce segment de marché. En ce qui concerne les hélicoptères, l'industrie aérospatiale européenne est solidement établie sur les marchés mondiaux. Des capacités importantes existent également dans le domaine des missiles et des avions sans pilote.

Cependant, l'absence d'un cadre prévisible au niveau européen affecte l'industrie. Par exemple, dans le secteur des avions de transport militaires, la procédure d'achat de l'Airbus A400M a été lourde et complexe. Dans le cas des missiles, le processus de décision des futures munitions de l'Eurofighter Typhoon a connu des problèmes similaires. De telles expériences incitent encore davantage les entreprises européennes à se concentrer sur le marché de la défense des États-Unis, beaucoup plus vaste, et à chercher à conclure des alliances afin de s'assurer l'accès à des commandes nouvelles, d'une importance et d'une continuité telles qu'elles leur permettront de bénéficier d'un flux de recettes stable et d'un rendement acceptable pour leurs actionnaires.

Dans le secteur spatial, la baisse de la demande de communications par satellite a eu des répercussions négatives à la fois sur la branche des satellites et sur celle des lanceurs. Aucune amélioration notable n'est attendue dans les prochaines années. La diminution des commandes qui en a résulté a entraîné une crise grave dans l'industrie spatiale européenne, qui dépend traditionnellement plus que ses concurrentes des marchés commerciaux. En outre, la concurrence internationale - déjà forte sur le marché des lanceurs, où l'Europe affronte les États-Unis, la Russie, la Chine et le Japon -, ne peut que s'accroître maintenant que les fusées Delta 4 et Atlas 5, mises au point par l'armée américaine, peuvent être utilisées pour offrir un nombre important de services de lancement sur le marché commercial.

Conséquences générales

D'autres grands progrès vers une dimension européenne forte sur des segments de marché importants, tels que la défense et l'espace, restent nécessaires pour conserver une industrie aérospatiale européenne compétitive à long terme. L'expérience positive d'Airbus sur le marché des avions civils devrait servir de référence pour d'autres branches du secteur. Une restructuration industrielle, combinée à l'élaboration de programmes communs pertinents s'inscrivant dans un cadre politique cohérent à l'intérieur des frontières européennes, est essentielle pour assurer le succès futur de tous les secteurs de l'aérospatiale.

3. L'initiative STAR 21

Création du groupe consultatif sur l'aérospatiale

Le groupe consultatif européen sur l'aérospatiale a été créé en 2001 pour faire le point sur le cadre politique et réglementaire de l'aérospatiale en Europe, souligner les insuffisances et formuler des propositions d'amélioration. Il comprend sept dirigeants d'entreprises de l'industrie aérospatiale, cinq commissaires européens, le Haut-représentant du Conseil pour la politique étrangère et de sécurité commune, ainsi que deux membres du Parlement européen. Le groupe a présenté ses conclusions au président de la Commission en juillet 2002. Il a procédé en juin 2003 à une analyse des progrès réalisés.

Constatations du rapport STAR 21

Le rapport STAR 21, tout en reconnaissant les progrès réalisés dans un certain nombre de domaines, dont la politique des transports, aboutit à la conclusion essentielle que le cadre politique et réglementaire actuel doit être sensiblement amélioré pour combler le fossé entre les ambitions politiques et économiques de l'Europe et sa capacité à fournir les résultats requis. Il relève plusieurs domaines dans lesquels les institutions européennes, les États membres de l'UE et l'industrie elle-même doivent prendre des mesures afin que l'Europe demeure un producteur de niveau mondial dans le domaine aérospatial.

Le rapport souligne la nécessité d'une cohérence globale et de l'intégration d'une variété d'instruments stratégiques. Il préconise un meilleur accès aux marchés des pays tiers et une application correcte des accords commerciaux, une plus grande mobilité des travailleurs de l'industrie aérospatiale, une coordination accrue des efforts de R & D, surtout dans le secteur de la défense, un rôle moteur de l'UE dans tous les domaines de la réglementation de l'aviation civile, l'achèvement du ciel unique européen et une relation plus étroite entre l'UE et l'Agence spatiale européenne afin de soutenir des initiatives telles que Galileo et la stratégie spatiale européenne.

Dans nombre de ces domaines, par exemple la coordination de la recherche aéronautique civile et la réglementation de l'aviation civile, le rapport met en évidence des progrès notables qui ont déjà été réalisés ou qui le seront à travers la mise en oeuvre des mesures proposées.

Selon le rapport STAR 21, les changements les plus pressants doivent intervenir dans le secteur de la défense, notamment pour ce qui est des surcoûts résultant de la fragmentation des décisions stratégiques en Europe et de l'utilisation des ressources sur une base nationale. Faisant remarquer que la situation actuelle nuit à la compétitive de l'industrie aérospatiale européenne et met en danger l'application de la PESD, ce document appelle à des progrès rapides dans ce domaine, particulièrement afin d'éviter que l'Europe ne doive renoncer à certaines options stratégiques futures pour ce qui est de ses besoins de sécurité à long terme.

4. Questions essentielles du point de vue de la Commission

La Commission se félicite des travaux du groupe consultatif sur l'aérospatiale. Le rapport qu'il a établi contribue de manière importante à mettre en lumière les carences du cadre actuel de l'aérospatiale en Europe et à déterminer les moyens d'assurer la compétitivité mondiale de cette industrie. Tout en couvrant un large éventail de questions dont l'impact et l'urgence varient, les recommandations du rapport STAR 21 indiquent clairement les principaux domaines à traiter. La Commission souscrit pleinement à la principale constatation du rapport, à savoir le fait qu'une industrie aérospatiale qui s'est concentrée à l'échelle européenne a besoin d'un cadre stratégique cohérent comprenant une perspective européenne. En conséquence, dans les domaines relevant de sa compétence, elle continuera à oeuvrer à la mise au point d'un tel cadre et à prôner son développement dans toute la mesure du possible.

Des efforts ont été consentis afin de surmonter la segmentation nationale de l'industrie aérospatiale, qui est un héritage du passé, et des progrès considérables ont été réalisés. Le processus de création d'un cadre européen est toutefois plus avancé sur le versant civil que sur celui de la défense. Pourtant, comme le souligne le rapport STAR 21, les secteurs civil et militaire sont interdépendants et les entreprises doivent être actives dans les deux si elles veulent être compétitives. Faute d'un marché unifié des équipements aérospatiaux liés à la défense et d'une recherche intégrée en Europe, les entreprises européennes risquent d'être de plus en plus attirées par le marché américain, beaucoup plus vaste et susceptible d'offrir des possibilités leur permettant de s'accroître et de conserver une large palette de capacités.

Afin d'assurer la compétitivité à long terme de l'industrie aérospatiale européenne et de mettre en place un cadre cohérent - la Commission en est persuadée - des mesures efficaces doivent être prises pour chacune des principales recommandations de STAR 21, surtout en ce qui concerne la défense, l'espace, la recherche, l'accès au marché et la réglementation européenne de l'aviation civile.

Défense

La branche «défense» du secteur est celle dans laquelle les possibilités de progrès - et la nécessité d'en réaliser - sont les plus grandes. Il manque encore l'un des fondements essentiels d'une industrie européenne compétitive: un marché intérieur performant.

De nombreuses raisons historiques expliquent pourquoi, en matière de défense, c'est encore une orientation nationale qui domine:

- les gouvernements sont les uniques clients de cette industrie. Ils déterminent seuls la demande de produits de défense et définissent les exigences opérationnelles ainsi que les spécifications techniques. Toute production et tout commerce d'armements sont soumis à une autorisation gouvernementale;

- la demande à long terme dépend de l'évolution et de la perception des menaces, qui influent sur l'évaluation des besoins et la planification budgétaire. Les gouvernements perçoivent, réagissent et appliquent leurs politiques respectives de manière différente;

- le rapport qualité-prix n'est pas le seul critère d'une politique d'achat - les compensations, y compris les accords de coopération industrielle, la sécurité d'approvisionnement et les considérations stratégiques peuvent également entrer en ligne de compte;

- les relations entre les gouvernements et les entreprises aérospatiales diffèrent nettement d'un État membre à l'autre pour ce qui est de la part détenue par l'État, du financement de la R &D, des politiques d'achat, etc. ;

- enfin, les intérêts de la défense imposent la confidentialité des informations militaires sensibles et une sécurité d'approvisionnement qui va au-delà de la relation normale client-fournisseur.

Avec le temps, la réticence des États membres à adopter une approche commune au niveau européen pour accroître l'efficacité du secteur de la défense est toutefois devenue un sérieux handicap par rapport aux puissants concurrents de l'industrie européenne, notamment les Américains qui, du fait de la structure ainsi que du volume du budget consacré par les États-Unis à la sécurité et à la défense, ont bien plus de possibilités de mettre au point de nouveaux produits et de bénéficier d'économies d'échelle importantes.

Cette lenteur à mettre en commun les ressources au niveau européen contraste avec les ambitions de l'Europe pour ce qui est de l'élaboration d'une PESD. Étant donné les contraintes financières qui pèsent sur les budgets de la défense dans tous les États membres, la réalisation des objectifs de la PESD dépend, entre autres, d'une amélioration radicale de l'achat et de la production d'équipements de défense. Par rapport aux États-Unis, non seulement l'Europe dépense nettement moins pour sa défense, mais la fragmentation du marché limite encore les capacités opérationnelles dont elle dispose grâce à ces dépenses.

Les changements rapides qui doivent être entrepris exigent que les États membres mettent au point une approche plus européenne, motivée par leur engagement en faveur de la PESD et par le caractère transnational de cette industrie. De l'avis de la Commission, des progrès notables dépendent de la création d'un marché des équipements de défense plus cohérent et de l'adoption d'une politique d'achat qui tienne compte de considérations propres à la défense, comme elle l'a indiqué dans sa communication de mars 2003.

À ce propos, la Commission prend note du fait que le soutien croissant à une dimension européenne accrue se retrouve également dans le projet de traité constitutionnel de la Convention européenne, qui appelle les États membres à «améliorer progressivement leurs capacités militaires» et à instituer une «Agence européenne de l'armement, de la recherche et des capacités militaires [...] pour identifier les besoins opérationnels, promouvoir des mesures pour les satisfaire, contribuer à identifier et, le cas échéant, mettre en oeuvre toute mesure utile pour renforcer la base industrielle et technologique du secteur de la défense, participer à la définition d'une politique européenne des capacités et de l'armement, ainsi que pour assister le Conseil des ministres dans l'évaluation de l'amélioration des capacités militaires.»

À Thessalonique, le Conseil européen a développé cette politique et a souscrit à l'objectif de créer une telle agence intergouvernementale en 2004.

Espace

La nécessité d'une approche européenne de l'espace est reconnue depuis longtemps et a conduit à l'institution de l'Agence spatiale européenne (ESA) en 1975. Au sein de l'ESA, les divers États ont mis en commun des pans importants de leurs activités spatiales civiles. À travers les programmes de l'ESA et grâce aux efforts nationaux, l'Europe a pu développer des compétences spatiales considérables et acquérir une capacité industrielle de niveau mondial en matière de lanceurs et de satellites.

En Europe, les programmes spatiaux militaires sont toutefois généralement réalisés de manière nationale ou bilatérale, avec quelques succès majeurs mais des budgets limités (seulement 7 % environ de celui des États-Unis). Des discussions ont visé à rassembler un soutien plus large pour des projets européens menés en collaboration, mais ceux-ci ont donné peu de résultats à ce jour et leur avenir reste incertain. En conséquence, contrairement à ce qui se passe pour les programmes civils, il n'existe encore aucune structure de niveau européen ou multinational chargée des programmes spatiaux liés à la sécurité et à la défense.

Les capacités spatiales européennes sont aujourd'hui menacées en raison du ralentissement brutal et persistant du marché commercial (essentiellement lié aux télécommunications). Dans le passé, le succès de l'industrie européenne sur le marché commercial, qui était alors en expansion, lui a permis d'acquérir suffisamment de masse critique et de concurrencer les entreprises américaines, qui pouvaient pourtant compter sur un marché institutionnel protégé beaucoup plus vaste. La politique et la législation américaine en matière spatiale continuent à influer négativement sur l'achat de lanceurs et de services de lancement étrangers par les États-Unis.

Pour conserver une industrie spatiale européenne et la liberté d'action qui en découle, l'Europe doit définir une approche industrielle et institutionnelle consolidée en vue d'intégrer davantage ses activités liées à l'espace. Dans ce contexte, la mise en oeuvre du projet Galileo constitue une étape importante. Afin de mener à bien la phase de développement (2002/2005), une structure de gestion unique à été instituée (l'entreprise commune Galileo). Le projet Galileo est novateur à plus d'un titre: il est le premier grand partenariat entre le secteur public et le secteur privé au niveau de l'UE, la première exploitation commerciale d'un système mondial de navigation par satellite, et un service visant tout d'abord à satisfaire les besoins des utilisateurs civils. L'ESA assume la responsabilité technique de l'installation de l'infrastructure spatiale. L'octroi d'une concession assurera une relation juridique claire entre le secteur public et une nouvelle entreprise privée constituée pour déployer et exploiter le système Galileo.

À côté de la mise en oeuvre du programme Galileo et des progrès en ce qui concerne l'initiative «Surveillance globale de l'environnement et de la sécurité» (GMES), trois domaines essentiels doivent être traités en parallèle: la relation entre l'ESA et l'UE, une meilleure coordination des programmes civils et de défense au niveau européen, et une affectation efficace des ressources, qui est également la clé de la compétitivité.

Le vaste processus de consultation des parties concernées à propos du Livre vert - Politique spatiale européenne, entamé cette année, a placé ces questions au centre d'une réflexion sur les besoins de l'Europe dans le domaine de l'espace en termes d'objectifs stratégiques plus larges.

Recherche

Toutes les parties intéressées s'accordent à dire que la coordination de la recherche aérospatiale européenne doit être améliorée. Dans nombre d'allocutions, d'accords et de déclarations conjointes, cette coordination apparaît comme le corollaire naturel d'une plus grande intégration industrielle. L'expérience a toutefois montré que la reconnaissance de la nécessité d'une coordination accrue ne suffit pas à elle seule à entraîner les nécessaires modifications du complexe système européen d'acquisition de la technologie aérospatiale. De nouveaux mécanismes devront donc être mis au point pour que cet objectif commun soit réalisé dans la pratique.

Le rapport STAR 21 a recommandé une meilleure coordination des activités de recherche aérospatiale entre les divers niveaux (communautaire, national et régional) et acteurs (institutionnels et industriels) concernés. Pour ce qui est de la recherche aéronautique civile, d'importants progrès ont été réalisés récemment grâce aux travaux du Conseil consultatif pour la recherche aéronautique en Europe (ACARE). En octobre 2002, l'ACARE a présenté ses premiers résultats, sous la forme d'un agenda de recherche stratégique visant à mieux coordonner les activités européennes. De nouveaux travaux suivront en vue de créer un espace européen de la recherche dans ce secteur.

Les problèmes sont les mêmes dans le domaine de la défense et devraient être traités de manière similaire, avec les adaptations requises pour tenir compte des différents rôles et compétences des divers acteurs de la défense. C'est d'autant plus important que les entreprises européennes s'efforcent de concurrencer des entreprises américaines bénéficiant de niveaux nettement plus élevés de dépenses pour la recherche dans le domaine de la défense et que les États membres tentent d'obtenir le meilleur rapport qualité-prix tout en créant un environnement qui permette de conserver des activités de R & D en Europe.

Partant de ces considérations, la Commission se félicite de la décision du Conseil européen de Thessalonique de charger les instances compétentes du Conseil de prendre les mesures nécessaires en vue de créer dans le courant de l'année 2004 une agence intergouvernementale placée sous l'autorité du Conseil et ouverte à la participation de tous les États membres dans le domaine du développement des capacités de défense, de la recherche, des acquisitions et de l'armement.

Cette agence visera à développer les capacités de défense dans le domaine de la gestion des crises, à promouvoir et à renforcer la coopération européenne en matière d'armement, à renforcer la base technologique et industrielle européenne en matière de défense et à créer un marché européen concurrentiel des équipements de défense, ainsi qu'à favoriser, le cas échéant en liaison avec les activités de recherche communautaires, la recherche en vue d'être à la pointe des technologies stratégiques pour les futures capacités de défense et de sécurité, afin de renforcer le potentiel industriel européen dans ce domaine.

Réglementation européenne de l'aviation civile

Aujourd'hui, les secteurs de la construction d'avions civils et des transports aériens opèrent tout deux sur un marché européen ou mondial, mais l'essentiel du système réglementaire européen est toujours organisé au niveau national et coordonné entre les gouvernements. Cette approche dépassée empêche l'industrie aéronautique et ses clients de tirer tous les avantages que le marché intérieur peut leur offrir.

Le rapport STAR 21 a examiné en particulier les carences du système des Autorités conjointes de l'aviation (JAA) et a demandé la création rapide de l'Agence européenne pour la sécurité de l'aviation (EASA). Depuis, d'importants progrès sont intervenus: suite à une proposition de la Commission, le règlement (CE) n° 1592/2002 du Parlement européen et du Conseil, qui établit la base juridique de l'EASA, a été adopté et est entré en vigueur le 7 septembre 2002. La Commission traite actuellement certaines questions organisationnelles majeures pour faire en sorte que l'EASA soit opérationnelle vers la fin de l'année 2003. Parallèlement, des discussions se poursuivent avec l'administration fédérale de l'aviation des États-Unis afin que les certifications accordées par les autorités réglementaires des deux côtés de l'Atlantique soient mutuellement acceptées.

La certification des avions n'est toutefois que l'un des éléments de la création d'un cadre cohérent pour l'aviation civile en Europe. Des progrès dans d'autres domaines essentiels, tels que la sécurité de l'aviation, sont encore nécessaires. Compte tenu de la densité et de l'interdépendance des réseaux de transport aérien en Europe, les questions de sécurité doivent être traitées au niveau européen.

La participation active de la Communauté européenne à des organisations internationales telles que l'OACI est déterminante pour garantir une correspondance efficace entre le système réglementaire européen et les exigences mondiales. L'absence actuelle d'un mécanisme performant de promotion des normes européennes est un handicap pour la compétitivité de l'industrie aérospatiale européenne. Cette participation est vitale pour des programmes tels que Galileo et pour le développement des technologies de gestion du trafic aérien.

La mise en oeuvre du ciel unique européen demandera de profondes modifications technologiques et des investissements dans la modernisation et la consolidation de l'infrastructure de gestion du trafic aérien et des services connexes. L'élaboration d'une interface efficace entre l'aviation civile et militaire sera cruciale pour permettre davantage de souplesse dans l'utilisation de l'espace aérien européen. De tels développements pourraient également faciliter l'harmonisation des exigences militaires.

Les exigences environnementales se traduisent par des pressions considérables en vue de la mise au point d'avions plus sûrs et moins polluants. La Commission européenne et les États membres doivent jouer un rôle renforcé dans les discussions environnementales au niveau mondial. L'industrie aérospatiale doit également s'efforcer d'améliorer les technologies existantes afin de trouver le juste équilibre entre les impératifs environnementaux et la croissance attendue du trafic aérien.

Pour ce qui est des accords relatifs à des services aériens, la Cour de justice des Communautés européennes a récemment estimé que les accords bilatéraux conclus en la matière par les États membres n'étaient pas compatibles avec les compétences communautaires dans des domaines importants. La Cour a identifié trois domaines spécifiques de compétence exclusive de la Communauté: les créneaux horaires dans les aéroports, les systèmes informatisés de réservation et les tarifs intracommunautaires.

Compte tenu de ces circonstances et d'autres éléments qui militent fortement en faveur d'une approche communautaire en matières d'accords relatifs à des services aériens, le 5 juin 2003 le Conseil a convenu d'un train de mesures qui confient à la Commission la responsabilité de mener des négociations essentielles dans le domaine des transports aériens, lui donnant notamment mandat pour entamer des négociations sur un nouvel accord aérien transatlantique.

Le secteur européen de l'aviation devra se concentrer pour pouvoir concourir de manière adéquate au niveau mondial. La nouvelle approche communautaire visant à redéfinir les relations internationales pour tous les États membres facilitera ce processus. Une nouvelle libéralisation des marchés de l'aviation à l'échelle mondiale aura également pour effet d'accroître les perspectives commerciales de l'industrie européenne de l'aviation. L'augmentation de la concurrence renforcera aussi les pressions en vue d'une réduction des coûts d'exploitation à travers, par exemple, l'utilisation d'avions plus performants.

La Commission se félicite de cette évolution et continuera à mettre en oeuvre des mesures destinées à assurer un environnement réglementaire cohérent, qui permette à la fois de bénéficier d'un niveau élevé de sûreté et de sécurité et de promouvoir la compétitivité de l'industrie européenne.

Accès au marché

Les entreprises aérospatiales opèrent sur un marché mondial et sont donc tributaires de l'accès aux marchés et de l'existence de conditions équitables dans le commerce international.

Le commerce des gros porteurs civils est régi par un ensemble d'accords bilatéraux et multilatéraux. L'accord bilatéral de 1992 entre les États-Unis et l'Union européenne concernant le commerce des aéronefs civils gros porteurs réglemente en particulier différentes formes d'aides d'État, telles que le soutien à la recherche et au développement, ou des aides remboursables au démarrage pour les nouveaux programmes. Si l'Europe a respecté les obligations qui lui incombent au titre de cet accord et continuera à le faire, les aides octroyées par les États-Unis dépassent régulièrement le niveau autorisé. La Commission a critiqué cette violation à l'occasion des consultations bilatérales prévues par l'accord et continuera à suivre de près la situation afin de préserver une concurrence ouverte et équitable sur cet important marché.

Pour ce qui est de l'accès aux marchés des équipements de défense, deux difficultés spécifiques touchent les entreprises européennes du fait de la législation en vigueur aux États-Unis: premièrement, le marché américain des équipements de défense est, en lui-même, très difficile d'accès:

- les restrictions américaines à l'achat d'équipements de défense étrangers limitent l'accès de l'industrie européenne au marché des États-Unis. Récemment, le Congrès des États-Unis a proposé de durcir encore ces restrictions, malgré l'opposition du ministère américain de la défense. Une décision dans ce sens serait contraire aux engagements pris par les États-Unis en vertu de l'Accord sur les marchés publics (AMP) conclu en 1994 dans le cadre de l'OMC. En outre, l'application des règles de sécurité américaines impose des charges bureaucratiques considérables, qui pèsent lourdement sur toute participation de contractants étrangers à des programmes américains;

- la politique des États-Unis en ce qui concerne toute coopération entre des entreprises américaines du secteur de la défense et des entreprises étrangères est très restrictive. De plus, les exigences de sécurité américaines dressent des obstacles juridiques aux fusions et autres alliances entre entreprises.

En grande partie du fait de ces restrictions, dans le secteur de la défense, la balance commerciale Union européenne-États-Unis est largement favorable à ces derniers: 24 % des achats européens d'équipements de défense proviennent des États-Unis, alors que seulement 0,5 % des achats américains viennent d'Europe.

Deuxièmement, les autorités américaines peuvent bloquer l'exportation d'équipements européens vers des pays tiers si ces produits contiennent des composants couverts par la réglementation américaine. Par rapport au système européen, ces règles ont une portée plus large et sont plus strictes.

Le plan d'action de Thessalonique contre la prolifération des armes de destruction massive prévoit un certain nombre de mesures visant à accroître l'efficacité du régime européen de contrôle des exportations de biens à double usage. L'application rapide de ces mesures est cruciale pour accroître la crédibilité de l'Europe aux yeux des États-Unis. La Commission a déjà soumis au Conseil des propositions sur la mise en oeuvre du plan d'action de Thessalonique en ce qui concerne le contrôle des exportations de biens à double usage.

Dans son rapport de novembre 2002, la commission sur l'avenir de l'industrie aérospatiale américaine (Commission on the Future of the United States Aerospace Industry) a également souligné l'effet négatif de cette politique pour l'industrie des États-Unis. Elle a appelé à un certain assouplissement des restrictions imposées par les États-Unis aux entreprises étrangères qui souhaitent prendre le contrôle d'entreprises américaines du secteur de la défense et a conclu que «les règles du gouvernement américain en matière d'achats devraient être modifiées afin de favoriser une collaboration accrue avec des entreprises implantées hors des États-Unis et, dans certains cas, une augmentation des achats auprès de celles-ci». À propos de l'intégration de composants commerciaux dans des produits militaires, le rapport préconise une autorisation générale «même s'ils sont fournis par des entreprises étrangères ou si des ressortissants étrangers les mettent en oeuvre».

Cette commission s'est également penchée sur les problèmes posés à son industrie par le système de contrôle des exportations. Elle a déclaré que les «contrôles des exportations offrent actuellement trop peu de sécurité et se traduisent par un manque criant d'efficacité», ajoutant qu'ils «sapent la collaboration entre des entreprises de pays de l'alliance en vue du développement de nouveaux systèmes» et nuisent à «l'un des objectifs centraux de la planification militaire des trente dernières années: l'interopérabilité de l'alliance». Pour remédier à cette situation, la commission suggère de travailler «avec nos alliées afin d'identifier la technologie sensible et de trouver des solutions pour la protéger».

La coopération transatlantique dans le domaine de la défense a été stimulée par la concentration industrielle et l'évolution vers un nombre réduit de programmes, plus perfectionnés techniquement et plus coûteux; elle est également la conséquence naturelle de la mise en oeuvre de capacités de défense conjointes.

Si elle se félicite des signaux positifs provenant des États-Unis et encourage toutes les initiatives transatlantiques visant à entraîner des changements rapides, la Commission estime toutefois que les chances d'obtenir un meilleur accès au marché des équipements de défense des États-Unis et de bénéficier d'une amélioration de leur système de contrôle des exportations seront bien plus grandes si l'Europe se trouve en position de force, ce qui implique d'avoir pris les mesures nécessaires pour assurer l'existence d'une base industrielle très compétitive et attrayante, avec une grande expertise en matière de conception et des programmes couronnés de succès.

5. Prochaines étapes

Le rapport STAR 21 a montré que les progrès les plus importants ont été réalisés dans des domaines où l'on a suivi une approche européenne intégrée. La création de l'EASA afin de surmonter les inconvénients résultants de la méthode intergouvernementale sur laquelle repose actuellement le système des Autorités conjointes de l'aviation constitue un bon exemple en la matière.

On voit ainsi comment l'UE peut jouer un rôle majeur en créant un environnement qui permette à l'industrie aérospatiale de prospérer, alors que l'intégration transfrontalière et les exigences du marché mondial rendent le contexte national de moins en moins adéquat.

La Commission n'ignore pas que l'approche organisationnelle et institutionnelle la plus appropriée peut varier en fonction de la question qui est en jeu. Il se peut que certains problèmes se prêtent mieux à être traités par l'élaboration de politiques communautaires, tandis que d'autres nécessitent une solution reposant sur d'autres structures de l'UE.

Dans cet esprit, la Commission poursuivra ses efforts en vue d'améliorer le cadre politique et réglementaire de l'industrie aérospatiale en Europe. Les États membres conserveront toutefois la responsabilité essentielle d'apporter un soutien sous la forme de programmes de R & D, d'aides remboursables au démarrage et de contributions aux programmes de l'ESA, et resteront aussi les principaux clients de cette industrie, à travers les achats d'armements. Des progrès considérables dépendent donc de leur coopération.

La Commission estime que trois domaines requièrent une attention particulière: la défense, l'espace et la recherche.

Défense

Dans le secteur aérospatial de la défense, le processus de concentration industrielle (qui relève avant tout de la responsabilité des entreprises elles-mêmes) a considérablement progressé; le problème central qui se pose à cette industrie est la fragmentation persistante de la demande d'équipements de défense - les programmes propres à un seul État membre peinent à atteindre des niveaux de production rentables et ceux qui sont mis en oeuvre par plusieurs pays subissent les effets négatifs d'accords complexes de partage du travail, à savoir un accroissement de la bureaucratie et des coûts.

Les États membres devraient favoriser l'harmonisation des exigences dans le domaine militaire et en ce qui concerne d'autres questions relatives à la sécurité, afin de surmonter les problèmes dus à l'orientation nationale du cadre actuel de la défense, à travers une harmonisation de la planification et de l'achat des équipements correspondants. Cette solution répond totalement à l'objectif de la PESD, qui est de promouvoir une plate-forme industrielle et technologique de la défense qui soit compétitive; un premier pas dans cette direction a été fait avec les mesures exposées dans la communication récente de la Commission «Défense européenne - Questions liées à l'industrie et au marché».

Cette communication souligne que la priorité doit être accordée à l'établissement d'un marché des équipements de défense, c'est-à-dire un cadre réglementaire approprié couvrant à la fois les aspects intérieurs et extérieurs, des règles adaptées permettant l'achat de biens et de services à un coût avantageux par les États membres et par la ou les éventuelles futures agences européennes, ainsi que des contrôles des exportations économiquement efficaces, tout en préservant des normes éthiques et en encourageant l'accès réciproque au marché. Elle appelle également à une amélioration de l'efficacité de la recherche, par la coopération, la cohérence de la recherche liée à la défense au niveau européen ainsi que l'exploitation de synergies entre les secteurs civil et militaire.

Par ailleurs, il convient de reconnaître que l'UE constitue un cadre approprié pour l'extension et le développement de certaines des mesures convenues dans le domaine de l'aérospatiale et de la défense par les ministres de la France, de l'Allemagne, de l'Italie, de l'Espagne, de la Suède et du Royaume-Uni dans la lettre d'intention et l'accord-cadre correspondant. Les avantages résultants d'accords sur les droits de propriété intellectuelle, les règles d'exportation communes et la sécurité de l'information seraient fortement accrus si l'ensemble de l'Union européenne était concerné.

De même, plusieurs États membres ont déjà adopté des initiatives conjointes en ce qui concerne les achats et la recherche, par exemple l'OCCAR (Organisme conjoint de coopération en matière d'armement), l'OAEO (Organisation de l'armement de l'Europe occidentale) et l'initiative du Conseil européen des 19 et 20 juin 2003 visant à instituer une agence dans le domaine du développement des capacités de défense, de la recherche, des acquisitions et de l'armement.

En ce qui concerne les obstacles au commerce des équipements de défense, la Commission se félicite de la position prise par la commission américaine sur l'industrie aérospatiale. Elle invite les États-Unis à oeuvrer en vue d'une réalisation rapide des changements nécessaires, ce qui aurait pour effet d'encourager la coopération en matière de défense, d'améliorer l'interopérabilité et de contribuer à réduire l'écart en termes de capacités.

Espace

À la suite de la communication de 2001 «Vers une politique européenne de l'espace», qui mettait l'accent sur la coopération avec l'Agence spatiale européenne, la Commission a adopté un livre vert afin d'encourager la poursuite du débat sur la voie à suivre, en vue de l'élaboration d'un livre blanc traitant de cette question de manière approfondie dans le courant de l'année 2003.

L'absence d'une politique européenne globale de l'espace et sa conséquence, le manque de coordination efficace des activités dans ce domaine, font aujourd'hui craindre que, à cause du récent ralentissement du marché commercial de l'espace, l'industrie de l'UE puisse perdre non seulement des parts de marché face aux États-Unis et aux autres puissances spatiales, mais aussi l'aptitude à préserver les capacités acquises et ce, malgré son excellence technologique. À long terme, on pourrait aboutir à une situation où l'Europe ne disposerait d'aucun choix réel dans un secteur vital.

Les enjeux économiques des activités d'aval (notamment les services par satellite destinés aux transports, le commerce électronique, les autoroutes scientifiques, le télétravail, les services liés aux loisirs et à la culture, les services financiers et, bien entendu, les communications, ainsi que les activités de sécurité et de défense) vont désormais bien au-delà des investissements initiaux dans les structures. De tels services fournissent une dimension ajoutée et sont devenus une ressource importante pour diverses capacités industrielles.

La Commission prendra donc les mesures nécessaires afin de créer l'environnement le plus favorable possible pour que l'industrie conserve et développe encore ses capacités. Cela implique l'élaboration d'une politique européenne globale de l'espace qui tienne compte du caractère stratégique de ce secteur et offre un cadre commun dans lequel l'industrie européenne et les différentes agences nationales ou intergouvernementales concernées puissent optimiser leurs activités.

Le large débat qui a eu lieu au cours du processus de consultation organisé après la publication du livre vert sur l'espace a joué un rôle important dans ce contexte; la Commission développera ces questions dans un livre blanc qui sera présenté au cours de cette année.

Recherche

Au cours des dix dernières années, l'Union a assumé un rôle plus actif dans le financement de la recherche en matière d'aéronautique civile en Europe, et l'industrie a adapté ses structures de recherche afin de tenir compte de cette évolution. Étant donné la longueur des cycles de développement de l'industrie aérospatiale, il importe d'assurer la stabilité à long terme des structures de financement de la recherche.

Comme dans le cas de l'aéronautique civile avec l'agenda de recherche stratégique de l'ACARE, l'Europe bénéficierait grandement de l'existence d'un plan global de R & D pour son industrie aérospatiale de défense. Il faudrait pour cela mettre au point un système rassemblant ceux qui comprennent les questions stratégiques, techniques et commerciales qui vont déterminer l'avenir de l'industrie aérospatiale et ceux qui ont à la fois les capacités requises et un intérêt dans ce secteur - les entreprises elles-mêmes, y compris les PME, les établissements de recherche, etc. - pour que les questions complexes qui se posent puissent être examinées de manière approfondie.

Il faudrait alors fixer les priorités et les objectifs selon une perspective européenne, de manière à faire en sorte que tous les partenaires européens participant à la planification des programmes de recherche liés à la défense s'efforcent de mettre en place un système plus efficace, mieux ciblé et plus concurrentiel à l'échelle mondiale. Les priorités des divers États membres devront peut-être être adaptées en fonction du plan global, de sorte qu'un niveau suffisant d'engagement et des ressources indépendantes seraient indispensables à la réussite.

Outre une meilleure coordination des activités entre les États membres, de nouvelles structures institutionnelles seront nécessaires pour remédier à la fragmentation existante. Dans son projet de traité établissant une constitution pour l'Europe, la Convention européenne a demandé la création d'une «Agence européenne de l'armement, de la recherche et des capacités militaires [...] pour identifier les besoins opérationnels, promouvoir des mesures pour les satisfaire, contribuer à identifier et, le cas échéant, mettre en oeuvre toute mesure utile pour renforcer la base industrielle et technologique du secteur de la défense, participer à la définition d'une politique européenne des capacités et de l'armement, ainsi que pour assister le Conseil des ministres dans l'évaluation de l'amélioration des capacités militaires.» La Commission soutient fermement cette proposition. Un tel organisme contribuerait à surmonter la fragmentation existante et à développer les équipements dont l'Europe aura besoin à l'avenir pour sa sécurité et sa défense.

Pour sa part, comme elle l'a déclaré dans sa récente communication sur la défense, la Commission entend lancer une initiative préparatoire destinée à accroître le potentiel industriel de l'Europe dans le domaine de la recherche en matière de sécurité. Cette initiative visera à explorer les conditions et les mécanismes permettant d'instaurer un environnement plus favorable à la compétitivité scientifique, technologique et industrielle dans ce domaine. Une vision à long terme sera élaborée en étroite coopération avec les parties concernées. La Commission prévoit de présenter une nouvelle communication à ce sujet d'ici la fin de l'année.

6. Conclusion

Les avantages d'une industrie aérospatiale européenne forte ont été soulignés dans des communications précédentes. Des millions de citoyens tirent leurs moyens de subsistance de ce secteur et ses 80 milliards d'euros de chiffres d'affaires constituent une contribution substantielle à la balance commerciale de l'Europe. L'industrie aérospatiale et les technologies associées jouent également un rôle majeur dans le maintien de la position stratégique de l'Europe et de sa capacité de sécurité et de défense; elles contribuent de manière centrale à la compétitivité de tous les secteurs de l'économie, notamment les secteurs émergents liés à la société de l'information.

S'il est vrai que depuis la présentation du rapport STAR 21 des progrès indéniables ont été réalisés dans de nombreux domaines, par exemple l'adoption du règlement instituant l'EASA, la relance du débat sur la défense, une large consultation sur la politique spatiale et la création de l'entreprise commune Galileo, la Commission est persuadée, conformément à sa stratégie en matière de politique industrielle et à sa politique de compétitivité, de la nécessité d'adapter et de développer le cadre existant afin de contribuer à préserver les avantages liés aux capacités aérospatiales européennes pour les générations futures.

Pour ce faire, il faut consentir un effort continu et coordonné axé sur les domaines où le cadre européen de l'aérospatiale est inexistant ou reste insuffisant. Il importe donc d'accorder la priorité à la création effective d'un marché européen des équipements de défense, au lancement d'une action préparatoire réussie sur la recherche dans le domaine de la sécurité, au renforcement des efforts de recherche en matière de défense à travers un plan européen de R & D pour l'industrie aérospatiale de défense, ainsi qu'à la création d'une agence européenne, tout en assurant également la stabilité à long terme des programmes de recherche dans l'aéronautique civile.

D'autres mesures vitales sont l'adoption du livre blanc sur l'espace et la mise en oeuvre rapide d'un plan d'action qui fera de la politique spatiale européenne une réalité, en traitant tous les aspects de ce secteur et en exploitant pleinement les capacités spécifiques de toutes les institutions concernées, ainsi que l'achèvement du ciel unique européen, avec la conclusion d'accords extérieurs sur les transports aériens, et la mise en place d'une EASA pleinement opérationnelle.

Étant donné l'ampleur des défis, une action déterminée est nécessaire pour que les entreprises européennes améliorent encore leur compétitivité sur les marchés mondiaux de l'aérospatiale. La Commission voit donc dans les recommandations du rapport STAR 21 un important point de départ pour déclencher les changements nécessaires; elle appelle les États membres et les autres institutions à soutenir ces grandes orientations et à chercher activement à faire progresser les questions essentielles évoquées.

ANNEXE

Analyse stratégique de l'industrie aérospatiale pour le 21ème siècle

STRATEGIC AEROSPACE REVIEW for the 21st century

(STAR 21)

Créer un marché cohérent et un cadre politique

pour une industrie européenne d'une importance capitale

Juillet 2002

A. COMPOSITION DU GROUPE

Le groupe consultatif européen sur l'aérospatiale a été créé en 2001 pour faire le point sur le cadre politique et réglementaire actuel de l'aérospatiale en Europe, souligner les insuffisances et formuler des propositions d'amélioration. Présidé par Erkki Liikanen, membre de la Commission européenne responsable de la politique d'entreprise, il réunit sept dirigeants d'entreprises de l'industrie aérospatiale, cinq commissaires européens, le Haut-représentant de l'Union européenne pour la politique commune extérieure et de sécurité et deux membres du Parlement européen.

Durant les 12 derniers mois, les membres du groupe consultatif ont procédé à une analyse de la situation en identifiant les éléments essentiels qui détermineront la compétitivité future de l'industrie et sa capacité à contribuer effectivement aux principaux objectifs politiques de l'Europe. Leurs conclusions sont exposées dans le rapport joint en annexe intitulé "Analyse stratégique de l'industrie aérospatiale pour le 21ème siècle" (Strategic Aerospace Review for the 21st Century: STAR 21), que le groupe a présenté à Monsieur Romano Prodi, Président de la Commission européenne, le 16 juillet 2002.

Jean-Paul Béchat: président -directeur général de la SNECMA

Manfred Bischoff: co-président d'EADS

Philippe Busquin: membre de la Commission européenne, responsable de la recherche

Sir Richard Evans: président de BAE Systems

Jean-Luc Lagardère: co-président d'EADS

Pascal Lamy: membre de la Commission européenne, responsable du commerce

Erkki Liikanen: membre de la Commission européenne, responsable de l'entreprise et de la société de l'information

Alberto Lina: ancien président directeur général de CEO Finmeccanica (jusqu'en avril 2002)

Loyola De Palacio: vice-présidente de la Commission européenne, responsable des relations avec le Parlement européen, des transports et de l'énergie

Chris Patten: membre de la Commission européenne, responsable des relations extérieures

Denis Ranque: président directeur général de THALES

Sir Ralph Robins: président de Rolls-Royce

Javier Solana: Haut représentant de l'UE pour la politique étrangère et la sécurité commune

Carlos Westendorp y Cabeza: membre du Parlement européen, président de la commission industrie, commerce extérieur, recherche et énergie

Karl von Wogau: membre du Parlement européen

B. RÉSUMÉ ANALYTIQUE

Besoins de l'Europe

Ces dernières années, les dirigeants de l'Union européenne ont défini des objectifs à long terme ayant des implications majeures pour l'industrie aérospatiale, fixant des buts ambitieux pour la compétitivité européenne mais aussi des objectifs clés pour la politique étrangère et la sécurité commune de l'Union européenne.

Dans son analyse stratégique de l'industrie aérospatiale pour le 21ème siècle (STAR 21), le groupe consultatif européen sur l'aérospatiale estime que ces objectifs ne peuvent être réalisés que si les structures économiques et industrielles de l'Europe sont capables de répondre aux nouvelles exigences. Seule une industrie aérospatiale florissante et compétitive peut garantir une Europe sûre et prospère. Outre sa contribution au développement durable, l'industrie aérospatiale réunit des compétences et des technologies de première importance et représente un moteur important de l'innovation; elle garantit les moyens de fournir des services depuis l'espace et apporte une contribution fondamentale à la sécurité et à la défense, contribuant ainsi à sauvegarder la liberté d'action de l'Europe dans ses politiques extérieures.

Caractéristiques de l'industrie

L'industrie aérospatiale européenne est leader mondial dans plusieurs secteurs clés du marché: son chiffre d'affaires représente un tiers du chiffre d'affaires de l'ensemble de l'industrie aérospatiale mondiale tandis que celui de l'industrie américaine en représente presque la moitié.

La bonne santé de l'industrie repose sur les deux piliers du marché civil et du marché de la défense qui sont à la fois complémentaires et interdépendants. Être présent sur les marchés civils et militaires signifie avoir en commun des compétences et des technologies, bénéficier d'économies d'échelle et tirer avantage de la fourniture d'un large éventail de produits. Les impératifs civils et militaires dépendent de la mise en oeuvre de technologies avancées qui doivent répondre aux différents besoins de clients publics et privés.

L'entrée dans l'industrie aérospatiale est très difficile pour les nouvelles entreprises, notamment au niveau le plus élevé, en raison de l'interdépendance des secteurs civils et militaires ainsi que de la nature hautement cyclique et à forte intensité de capital de cette industrie. Cela signifie également que lorsque la technologie, les compétences et l'infrastructure sont érodées ou disparaissent, elles sont extrêmement difficiles à reconstituer.

En ce qui concerne la concurrence internationale, les entreprises américaines opèrent dans le plus grand marché intérieur du monde et bénéficient d'un cadre opérationnel particulièrement favorable et conçu pour soutenir l'objectif politique déclaré du maintien de la suprématie américaine en aérospatiale. Les liens directs entre les utilisations militaires et civils et les lourds investissements consentis pour financer la recherche et l'innovation dans le secteur de la défense s'exercent clairement à l'avantage de l'industrie américaine en termes de retombées profitables dans des applications aérospatiales civiles. Cet état de fait représente un défi permanent pour l'industrie européenne et ne peut qu'affecter sa position concurrentielle.

Etant donné que pour la majorité des marchés, les entreprises américaines et européennes continueront de répondre aux besoins des clients dans le monde entier, il est indispensable qu'une forte capacité aérospatiale européenne soutienne la concurrence dans un large éventail de produits civils et militaires.

Ces dernières années, une restructuration de grande ampleur s'est engagée en Europe, donnant naissance à une industrie organisée à l'échelle européenne, concurrente mais aussi partenaire de son puissant homologue américain. Toutefois, le cadre politique qui régit ses activités est trop fragmenté. Comme l'industrie aérospatiale elle-même s'est restructurée au niveau européen, il est normal que les facteurs qui vont déterminer sa compétitivité et sa contribution futures soient examinés dans une perspective européenne.

Principales constatations

L'examen de ces facteurs dans une perspective européenne a permis d'identifier quatre principes directeurs :

1. L'aérospatiale joue un rôle fondamental dans la réalisation des objectifs européens de croissance économique, de sécurité et d'amélioration de la qualité de la vie. Elle est directement associée à un divers politiques européennes concernant le commerce, les transports, l'environnement, la sécurité et la défense mais est aussi influencée par celles-ci.

2. Il faut disposer impérativement d'une base industrielle solide et globalement compétitive, offrant à l'Europe les choix et options nécessaires à la prise de ses décisions concernant sa présence et son influence au niveau mondial.

3. L'industrie aérospatiale européenne doit maintenir une forte position concurrentielle lui permettant de jouer pleinement son rôle de partenaire industriel dans le marché mondial de l'aérospatiale.

4. Pour avoir une industrie aérospatiale innovatrice et compétitive, l'Europe doit rester au premier rang de la production de technologies clés.

STAR 21 note que des progrès ont déjà été accomplis dans un certain nombre de domaines mais que le cadre politique et réglementaire actuel est insuffisant pour combler le fossé entre les ambitions de l'Europe et sa capacité à fournir les résultats requis.

Recommandations stratégiques

Les politiques de planification et d'investissement de l'industrie aérospatiale doivent s'inscrire dans une perspective cohérente à long terme. STAR 21 identifie un certain nombre de domaines dans lesquels les institutions européennes, les États membres de l'UE et l'industrie elle-même doivent prendre des mesures afin que l'Europe demeure un grand producteur de niveau mondial dans le domaine aérospatial et dispose, dans les secteurs de la défense, de la sécurité et de l'espace, des capacités lui permettant d'arrêter des choix politiques essentiels et d'être un partenaire efficace pour les pays amis et alliés.

Les principales recommandations de STAR 21 portent sur les marchés mondiaux, le cadre opérationnel, la gouvernance de l'aviation civile, la sécurité et la défense européennes et les capacités spatiales. Dans beaucoup de domaines, par exemple la coordination de la recherche aéronautique civile et la réglementation de l'aviation civile, des progrès importants ont déjà été réalisés ou le seront par la mise en oeuvre des mesures déjà proposées. Dans d'autres secteurs comme, par exemple, la défense, l'espace ou le niveau et la structure de la recherche et de la technologie dans tous les segments du marché, qui sont d'une importance capitale pour le développement de l'industrie, des décisions doivent être prises rapidement afin d'éviter un blocage des options stratégiques pour l'avenir.

En ce qui concerne l'accès aux marchés mondiaux, l'Europe devra s'efforcer d'obtenir des conditions de concurrence équitables favorisant les entreprises les plus compétitives. Cela nécessitera de favoriser l'ouverture des marchés, en recherchant notamment à modifier les pratiques liées à la clause "Buy American" et la convergence des politiques de contrôle des exportations. Dans le même temps, l'Europe doit établir et développer des relations avec les pays tiers, y compris à travers des programmes de coopération internationale.

En ce qui concerne le contexte opérationnel, STAR 21 souligne le rôle fondamental de la recherche pour la compétitivité de l'industrie. Tout en saluant la création du Conseil consultatif pour la recherche aéronautique en Europe (Advisory Council for Aeronautics Research in Europe: ACARE), STAR 21 attire l'attention sur l'énorme défi que représente la mobilisation de quelques 100 milliards d'euros provenant de sources publiques et privées pour le financement d'une stratégie de recherche civile coordonnée durant les vingt prochaines années. Dans un domaine connexe, l'importance des incitations fiscales en tant qu'élément moteur de la recherche est reconnue et c'est un aspect qui mérite une analyse détaillée. Au niveau des ressources humaines, STAR 21 souligne la nécessité de prendre les mesures appropriées, notamment au niveau des États membres, pour assurer la disponibilité d'une main-d'oeuvre mobile et hautement qualifiée.

En ce qui concerne les domaines où des progrès satisfaisants sont enregistrés, le rapport cite en particulier la gouvernance de l'aviation civile ajoutant cependant que l'on ne pourra tirer tous les avantages des développements pertinents qu'en permettant à l'Union européenne de prendre des décisions politiques et de réglementer cette prise de décision. Cela nécessite d'élargir le rôle d'organismes communautaires tels que l'Agence européenne pour la sécurité de l'aviation civile (European Aviation Safety Agency: EASA) ainsi que la conception et la mise en oeuvre d'un programme directeur pour la gestion du trafic aérien en Europe. Cela implique également que la Communauté devienne membre de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) parallèlement à ses États membres.

C'est dans les domaines de la sécurité et de la défense et de la recherche associée que le nécessité de consentir des efforts supplémentaires visant à garantir l'avenir de l'industrie européenne, est la plus pressante.

- Ces efforts doivent permettre l'instauration d'une base industrielle et technologique européenne de grande compétence qui est un préalable essentiel garantissant la compétitivité globale future de l'industrie. Il faut toutefois se pencher d'urgence sur l'inéquation entre les objectifs et les besoins européens d'une part, et le cadre politique au sein duquel l'industrie aérospatiale doit contribuer à la réalisation des capacités nécessaires, d'autre part.

- La mise en place des dispositions permettant de fournir les capacités convenues nécessite un engagement, des ressources et une organisation cohérente. Des progrès encourageants ont récemment été accomplis dans la définition et l'appréciation des capacités nécessaires à la mise en oeuvre de la politique européenne de sécurité et de défense. Comme ce n'est qu'une première étape dans les mesures visant à répondre aux besoins futurs des nouvelles politiques européennes en matière de sécurité, il est indispensable d'engager les ressources financières nécessaires pour la réalisation des programmes et de mettre en place les règles et procédures assurant que ces ressources seront utilement dépensées. Cela implique également d'adopter une approche plus coordonnée de l'armement au niveau européen pour déboucher sur la définition d'une politique européenne en matière d'armement.

- Bien que certains éprouvent encore des réticences à convenir que des thèmes essentiels comme les marchés de la défense et la recherche associée - qui relèvent traditionnellement de décisions nationales - doivent être également abordés au niveau européen, il est admis de plus en plus que les prises de décisions concernant le niveau des dépenses en matériel d'armement, la définition de nouvelles priorités dans le cadre des budgets de la défense existants et la réponse appropriée à donner aux nouvelles menaces, doivent être considérées dans un contexte européen. Ainsi, différents accords formalisent les efforts visant à améliorer la coordination des programmes de recherche et à adopter des dispositions financièrement plus avantageuses dans la passation de marchés, en renforçant notamment la coopération entre certains États membres.

Indépendamment de l'ambition globale qui doit être définie au niveau politique le plus élevé, l'incapacité à optimiser les dépenses pour l'aérospatiale, notamment pour ses composants clés que sont la recherche et la défense, va limiter les options politiques qui s'offriront à l'Europe dans l'avenir. En dehors du montant global des ressources à déterminer, il est indispensable que les investissements en matière de recherche et de développement soient parfaitement coordonnés et que les marchés soient passés d'une manière rationnelle pour que l'Europe dispose des capacités nécessaires et que l'industrie aérospatiale soit compétitive.

Les progrès accomplis récemment restent insuffisants. Il faut donc explorer tous les moyens disponibles, y compris les mesures qui pourront éventuellement être prises au niveau communautaire afin de lever les obstacles freinant la compétitivité de l'industrie européenne. Compte tenu des spécificités du secteur de la défense et de la sécurité, l'expérience acquise par la Communauté devrait permettre d'arriver à une situation où, dans la pratique, les mêmes produits et procédés issus du progrès technologique et de l'innovation, se prêtent à des applications civiles, militaires et de sécurité.

En ce qui concerne les capacités spatiales, STAR 21 relève avec satisfaction les mesures adoptées pour développer une politique spatiale européenne consolidée ainsi qu'un programme spatial européen disposant de ressources adéquates, conformément à la stratégie commune arrêtée entre l'Agence spatiale européenne (ESA) et la Commission européenne (CE). Le système de positionnement par satellite Galileo doit cependant être mis en oeuvre selon le calendrier prévu, avec le développement d'activités en aval, ce qui permettra au secteur privé de participer dès le début au programme. La mise au point du système de surveillance planétaire (Global Monitoring for Environment and Security: GMES) doit être poursuivie avec le soutien de l'ESA et de programmes communautaires. Il convient également de soutenir sans tarder les capacités européennes de lancement et d'explorer les possibilités d'application de technologies spatiales, notamment en matière de communication et de surveillance, y compris dans les domaines de la sécurité et de la défense.

Les responsables politiques européens sont invités à réfléchir sérieusement aux moyens d'obtenir l'engagement nécessaire à un accroissement des ressources et à l'établissement d'un cadre européen plus cohérent pour atteindre les objectifs politiques actuels et futurs de l'Europe.

Le groupe consultatif européen sur l'aérospatiale souhaite obtenir la plus large réponse possible à son analyse et à ses recommandations. Il attend notamment avec intérêt la réaction des parties les mieux placées pour donner suite à ses recommandations, à savoir les États membres et les institutions communautaires. En fonction de ces réactions et d'autres développements pertinents, le groupe sera toujours disposé à participer à de nouvelles discussions.

C. Analyse stratégique de l'industrie aérospatiale pour le 21ème siècle

1. Réaliser les objectifs à long terme de l'Europe

L'Europe s'engage dans le 21ème siècle avec de grandes ambitions. Elle vise une amélioration de la qualité de la vie et une hausse du niveau de vie, lesquels dépendent à leur tour de son potentiel de concurrence. Conscients du fait que des événements se produisant loin de leurs frontières peuvent avoir une profonde incidence sur leur vie, les citoyens européens souhaitent exercer une plus grande influence sur les affaires mondiales en tant que partenaires appréciés de leurs amis et alliés.

Une industrie aérospatiale florissante est un élément essentiel pour que l'Europe puisse réaliser ses ambitions politiques et économiques. Elle doit disposer de capacités aérospatiales solides pour soutenir la concurrence sur les marchés mondiaux dans un large éventail de produits civils et militaires et sauvegarder sa liberté d'action dans sa politique extérieure. L'industrie aérospatiale s'est restructurée au niveau européen afin que les problèmes qui la concernent soient également abordés dans une perspective européenne.

Ces dernières années, les responsables européens ont défini des objectifs à long terme ayant des implications majeures pour l'industrie aérospatiale et déterminé ce vers quoi devaient tendre la compétitivité économique de l'Europe et sa politique étrangère et de sécurité.

1.1. Compétitivité

Le Sommet de Lisbonne de mars 2000 a fixé comme ambition à l'Europe de devenir l'économie de la connaissances la plus compétitive du monde, en atteignant de nouveaux niveaux de compétitivité d'ici 2010. Le Sommet de Barcelone de 2002 a pris acte des progrès accomplis dans la mise en oeuvre de la stratégie de Lisbonne et lui a donné une nouvelle impulsion. Le développement de l'Espace européen de la recherche qui a fait suite au conseil de Lisbonne a témoigné de l'engagement permanent de l'Europe à renforcer ses capacités technologiques en menant des recherches conjointement et avec plus d'efficacité. Cet engagement a également été réaffirmé à Barcelone.

"L'Union européenne s'est fixée un nouvel objectif stratégique pour la décennie à venir: devenir l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale".

Conclusion du Conseil Européen de Lisbonne, 2000

"Si l'on veut réduire l'écart entre l'UE et ses principaux concurrents, l'effort global en matière de R&D et d'innovation dans l'Union européenne doit être fortement stimulé et l'accent doit être mis plus particulièrement sur les technologies d'avant-garde"

Conclusion du conseil européen de Barcelone, 2002

1.2. Sécurité et défense

Depuis le fin des années 80, la situation géopolitique a changé d'une manière spectaculaire. La fin de la guerre froide, l'impact des conflits régionaux tels que celui qui s'est déroulé dans l'ex-Yougoslavie et l'émergence de la menace terroriste globale conduisant à la guerre en Afghanistan illustrent les nouveaux défis auxquels l'Europe est confrontée.

La nécessité de renforcer le rôle de l'Europe dans un monde en évolution a été exprimée par le traité de Maastricht de 1994 qui établissait la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union européenne (PESC). Cette structure a été précisée par le traité d'Amsterdam de 1997.

Une politique étrangère et de sécurité commune européenne a été lancée par le conseil européen de Cologne en 1999 et des programmes ont été élaborés lors des conseils ultérieurs d'Helsinki, de Feira, de Nice et de Laeken. Aujourd'hui l'Union européenne a convenu de mettre sur pieds les capacités nécessaires pour assurer des missions d'aide humanitaire, de sauvetage, de protection civile, de police, de maintien de la paix et de combat pour le rétablissement de la paix. L'objectif immédiat est la création d'ici 2003 d'une force (60 000 hommes maximum) disponible sur une longue durée et capable d'assumer toutes les missions de Petersberg dans le monde entier et dans un délai de 60 jours.

La réalisation de ces objectifs ambitieux va dépendre de la disponibilité des structures adéquates et de la mise à disposition du matériel nécessaire. Pour protéger son indépendance politique, l'Europe doit renforcer ses capacités industrielles et technologiques, notamment dans le domaine aérospatial.

"L'Union doit disposer d'une capacité d'action autonome soutenue par des forces militaires crédibles, avoir les moyens de décider d'y recourir et être prête à le faire afin de réagir face aux crises internationales..."

"Nous reconnaissons aussi la nécessité d'accomplir des efforts soutenus pour renforcer la base industrielle et technologique de la défense, que nous souhaitons compétitive et dynamique"

Conclusions du conseil européen de Cologne, 1999

1.3. Développer les capacités à la hauteur des ambitions

Ces ambitions ne peuvent être satisfaites que si la structure économique et industrielle européenne est capable de répondre au défi lancé. Cela signifie prévoir l'avenir, anticiper les développement et prendre rapidement les décisions politiques appropriées afin que l'Europe puisse satisfaire ses besoins à moyen et à long terme. Beaucoup reste à faire pour que les capacités de l'Europe parviennent au niveau de ses objectifs politiques.

L'aérospatiale est une industrie accoutumée à regarder loin dans l'avenir: pour une nouvelle génération d'avion, une dizaine d'années ou davantage peuvent s'écouler entre la conception et la réalisation; un projet spatial peut même prendre davantage de temps tandis que l'étude d'un nouveau matériau composite peut s'étaler sur une génération avant que celui-ci ne soit prêt pour une application pratique. Dans le même ordre d'idée, il est indispensable de définir un cadre politique à long terme qui permette à l'industrie aérospatiale d'offrir les capacités requises pour répondre aux objectifs européens. C'est particulièrement vrai du secteur militaire de cette industrie dont l'État est l'unique client.

La bonne santé de l'industrie repose sur les deux piliers du secteur civil et du secteur militaire lesquels sont complémentaires et mutuellement dépendants. Opérer sur les marchés civils et de la défense signifie partager le savoir-faire, les compétences et les produits, bénéficier d'économies d'échelle et des avantages offerts par la fourniture d'une large gamme de produits. Ces deux secteurs s'appuient sur la mise en oeuvre de technologies avancées tout en répondant à la demande de clients publics et privés ayant des besoins différents.

1.4. Analyse de la situation par le rapport STAR 21

Durant les 12 derniers mois, le groupe consultatif européen sur l'aérospatial a procédé à une analyse exhaustive de ces questions et identifié les domaines clés qui détermineront l'avenir de cette industrie. Le groupe se félicite des progrès accomplis mais le cadre politique et réglementaire actuel ne peut résoudre efficacement les grandes disparités entre les aspirations de l'Europe et sa capacité à fournir les résultats requis.

Après évaluation du rôle stratégique joué par l'industrie aérospatiale (chapitre 2) et de son profil (chapitre 3), l'analyse stratégique de l'aérospatiale pour le 21ème siècle (STAR 21) identifie cinq domaines majeurs qui méritent une attention particulière: la concurrence sur les marchés mondiaux (chapitre 4), le cadre opérationnel de l'aérospatiale européenne (chapitre 5), la gouvernance européenne de l'aviation civile (chapitre 6), le besoin vital de capacités de sécurité et de défense européennes (chapitre 7), et le maintien de la présence de l'Europe dans l'espace (chapitre 8).

STAR 21 vise à mieux faire comprendre les questions liés à l'industrie aérospatiale européenne ainsi qu'à susciter une action assurant que cette industrie pourra pleinement contribuer à garantir l'avenir politique et économique de l'Europe. Certaines recommandations impliquent que les décisions politiques correspondantes soient prises rapidement tandis que d'autres pourront être considérées sur un plus long terme mais il est important de veiller à ce que les mesures indispensables soient appliquées. Le suivi et l'évaluation périodique des progrès accomplis dans les domaines examinés par le présent rapport devraient faciliter l'identification des domaines où une nouvelle action est nécessaire.

2. Le Role stratégique de l'Industrie aérospatiale

L'industrie aérospatiale a un rôle stratégique fondamental à jouer dans la réalisation d'une Europe sûre et prospère:

2.1. Générateur de richesses

En 2000, l'industrie aérospatiale européenne employait 429 000 personnes directement et bien davantage indirectement, pour un chiffre d'affaires consolidé de 72 300 millions d'euros. Presque 15 % de ce chiffre d'affaires étaient consacrés à la recherche et au développement. Exportant plus de la moitié de sa production, l'industrie présentait une balance commerciale positive de quelques 1 900 millions d'euros pour l'Union européenne dans son ensemble. L'aérospatiale est dépendante d'une chaîne d'approvisionnement étendue incluant un grand nombre de petites et moyennes entreprises implantées dans la totalité des 15 pays de l'Union. Cette structure industrielle complexe fait de l'aérospatiale l'un des principaux facteur de richesse et d'emploi dans l'ensemble de l'Union européenne.

2.2. Maîtrise de la concurrence mondiale

Pour résister à la concurrence mondiale qui s'exerce dans une large gamme de produits, il est devenu indispensable que l'Europe dispose d'une capacité aérospatiale solide. L'exemple le plus évident est celui des avions Airbus en l'absence desquels, les compagnies aériennes n'auraient pas de possibilités de choix dans le segment du marché le plus important de l'industrie aérospatiale civile. Le choix du fournisseur est également capital pour les programmes d'achat public dans le secteur de la défense et de la sécurité dans la mesure où il permet d'obtenir le meilleur rapport coût qualité.

2.3. Une source de compétences et de technologies d'une importance capitale

L'aérospatiale intègre et encourage le développement d'un large éventail de compétences, de procédés et de technologies d'une importance majeure pour le maintien d'une économie prospère et diversifiée. Les principaux constructeurs dépendent d'un réseau d'entreprises spécialisées de second et troisième rang qui répondent à leurs besoins. Ces entreprises qui exercent leurs activités à différents niveaux de l'industrie, disposent de technologies essentielles pour l'avenir de l'Europe.

2.4. Moteur de l'innovation

L'industrie aérospatiale est un puissant moteur de l'innovation dans l'économie en général. Elle impose des exigences extrêmes à ses produits, requérant simultanément la sécurité et la fiabilité, un faible poids, un coût de production satisfaisant et un impact minimal sur l'environnement, une puissance améliorée et une efficacité élevée. Les technologies mises au point pour les produits aérospatiaux ont des retombées dans un grand nombre de secteurs différents.

2.5. Services assurés depuis l'espace

L'industrie européenne a été à l'origine du développement de nouveaux services qui reposent largement sur des infrastructures spatiales dans les domaines des télécommunications, de la navigation et de l'observation de la terre. Les transports, les télécommunications, les médias et d'autres secteurs de l'économie ainsi que les organismes publics bénéficient de ces capacités et génèrent à leur tour des activités innovatrices en aval.

2.6. Sécurité et défense

L'industrie aérospatiale apporte une contribution capitale aux systèmes nationaux et supra-nationaux de sécurité et de défense. Ses produits qui incluent les avions, les technologies spatiales, l'électronique, les systèmes d'ingénierie et les sous-systèmes, revêtent une grande importance pour la sécurité intérieure et offrent les moyens nécessaires à la réalisation des objectifs politiques dans des régions voisines et plus distantes du globe. Un secteur aérospatial compétitif est vital pour toute nation ou région souhaitant maintenir une pleine souveraineté sur son territoire, exercer une influence politique au-delà de ses frontières et disposer d'un éventail de choix et d'options politiques.

Quatre principes directeur pour l'industrie aérospatiale européenne

2.6.1. L'aérospatiale joue un rôle fondamental dans la réalisation des objectifs européens de croissance économique, de sécurité et d'amélioration de la qualité de la vie. Elle est directement associée à un divers politiques européennes concernant le commerce, les transports, l'environnement, la sécurité et la défense mais est aussi influencée par celles-ci.

2.6.2. ll faut disposer impérativement d'une base industrielle solide et globalement compétitive, offrant à l'Europe les choix et options nécessaires à la prise de ses décisions concernant sa présence et son influence au niveau mondial.

2.6.3. L'industrie aérospatiale européenne doit maintenir une forte position concurrentielle lui permettant de jouer pleinement son rôle de partenaire industriel dans le marché mondial de l'aérospatiale.

2.6.4. Pour avoir une industrie aérospatiale innovatrice et compétitive, l'Europe doit rester au premier rang de la production de technologies clés.

3. L'Industrie Aérospatiale

L'industrie aérospatiale européenne est l'un des leaders mondiaux dans les secteurs des gros porteurs civils, des jets d'affaires, des hélicoptères, des moteurs d'avions et de l'électronique de défense. Elle réalise un tiers de l'activité aérospatiale mondiale en termes de chiffre d'affaires tandis que l'industrie américaine en réalise presque la moitié.

L'entrée dans l'industrie aérospatiale est très difficile pour les nouvelles entreprises, notamment au plus haut niveau. Lorsque la technologie, les compétences et l'infrastructure sont érodées ou disparaissent, elles sont extrêmement difficiles à reconstituer. On ne s'attend donc pas à ce que les nouveaux venus y jouent un rôle de premier plan dans l'avenir prévisible. Dans la majorité des marchés, ce seront les entreprises américaines et européennes qui continueront de répondre aux besoins des clients de par le monde, dans un secteur où la concurrence fait rage .

Certains facteurs essentiels confèrent à l'industrie son caractère spécifique:

- liens étroits entre les activités civiles et militaires

- nature cyclique de l'industrie

- niveau élevé d'intensité de capital

- concentration

- privatisation

- relations États-Unis-Union européenne

3.1. Les liens entre les activités civiles et militaires

Ces deux volets de cette industrie sont intimement liés. Les principales composantes telles que l'électronique, les moteurs et les matériaux ainsi que les processus de fabrication essentiels, recourent aux mêmes technologies. La synergie entre les activités dans les secteurs civil et de défense entraîne des avantages industriels majeurs en créant des économies d'échelle par l'absorption de coûts non récurrents fixés à un niveau élevé. Alors que le secteur aérospatial civil a toujours été dépendant des technologies mises au point pour des applications militaires, les technologies militaires sont de plus en plus dérivées de technologies du secteur civil qui se caractérise par un taux de mise en oeuvre de nouveaux produits beaucoup plus élevé. Le soutien d'une industrie aérospatiale durable qui doit répondre aux besoins des marchés civils est intimement associé au maintien des capacités de cette industrie dans les secteurs de la sécurité et de la défense et inversement.

Les liens entre les secteurs civil et militaire de l'aérospatiale sont insuffisamment compris et reconnus en Europe, comparé notamment aux États-Unis

3.2. La nature cyclique de l'industrie

L'aérospatiale est une industrie hautement cyclique qui dépend essentiellement des décisions des compagnies aériennes en matière d'investissement et de l'évolution fluctuante des programmes de défense. La forte interdépendance entre les secteurs civil et militaire au sein de nombreuses entreprises signifie qu'en dehors des synergies technologiques, les différents cycles des programmes civils et militaires permettent aux entreprises d'équilibrer plus efficacement les ressources qu'elles consacrent au développement.

Le développement de la famille d'appareils Airbus ainsi que sa pénétration croissante du marché a joué un rôle inestimable en contrebalançant la baisse des budgets de la défense dans les années 1990. La récession intervenue dans les transports aériens après les événements du 11 septembre 2001 pourrait représenter un défi similaire mais inversé dans la mesure où les besoins en matière de défense et de sécurité viennent compenser de fait le ralentissement des commandes des compagnies aériennes.

Profitabilité des compagnies aériennes et commandes d'appareils

Résultats d'exploitation Nombre d'appareils

Milliards de dollars courants*) commandés

(Légende de l'encadré à gauche:

Résultats d'exploitation

Commandes

(*) Lignes internationales, résultat d'exploitation après intérêt

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

3.3. Une industrie à forte intensité de capital

L'aérospatiale est une industrie à forte intensité de capital qui investit pour le long terme. Les investissements dans la recherche et la technologie, la mise au point de produits et le chiffre d'affaires consacré aux cellules, moteurs, équipements terrestres et embarqués, dépassent ceux de beaucoup d'autres industries. Dans le même temps, les retours sur investissements sont fondamentalement à long terme et à haut risque, ce qui limite l'appétit des marchés financiers. Il en résulte que le soutien de l'État, notamment le financement de la recherche et du développement, l'octroi de prêts remboursables et l'établissement de partenariats de partage des risques sont devenus une caractéristique essentielle de ce secteur d'activité dans le monde entier.

3.4. Concentration de l'industrie européenne

L'industrie aérospatiale poursuit sa concentration. Ce processus s'est engagé d'abord aux États-Unis- faisant par exemple de Boeing l'unique constructeur américain d'avions civils gros porteurs- puis s'est étendu à l'Europe, reflétant l'appel lancé en décembre 1997 par les dirigeants français, allemands et britanniques en faveur d'un regroupement industriel majeur. Les entreprises ont pris conscience de la nécessité de combiner leurs ressources dans de nouvelles configurations afin de relever les défis de la concurrence mondiale et de répondre aux commandes issues de projets transnationaux civils et militaires, lesquels s'appuient de plus en plus sur une base paneuropéenne.

Ce processus a entraîné une restructuration industrielle majeure à l'intérieur des frontières européennes. La conception et la production d'avions de ligne, d'appareils militaires, d'hélicoptères, de missiles, de satellites et de moteurs d'avions sont dorénavant entre les mains de grandes entreprises opérant au niveau européen telles que Airbus, Astrium et MBDA.

3.5. Privatisation

Dans plusieurs pays, les relations entre les gouvernements et les entreprises aérospatiales ont notablement changé. Les anciennes entreprises nationales sont aujourd'hui partiellement ou totalement privatisées, cotées en bourse et tenues de verser des dividendes à leurs actionnaires privés. Comme ces entreprises ne peuvent vivre du seul marché national, elles développent des stratégies à long terme faisant un usage optimum de leurs ressources et leur procurant un accès au marché mondial. Cela conduit fréquemment les entreprises européennes à renforcer leurs liens non européens par des rachats d'entreprises, des fusions ou des investissements sortants, lesquels sont susceptibles de conduire à leur tour à la disparition d'une capacité européenne dans certains secteurs, voire de menacer la sécurité d'approvisionnement de l'Europe. Cette démarche peut être fortement influencée par l'accès à un financement ou à des régimes fiscaux plus attrayants.

La mobilité des programmes industriel et de recherche face à des régimes de soutien internationaux différents pose un défi majeur aux responsables politiques européens. Des entreprises telles que BAE Systems, Rolls-Royce, SNECMA et THALES offrent des exemples d'entreprises européennes menant des activités de grande ampleur dans le reste du monde.

3.6. Relations États-Unis-Union européenne

Les entreprises aérospatiales américaines réalisent pratiquement la moitié du chiffre d'affaires global de l'industrie. Les ventes de l'industrie européenne atteignent un peu plus des deux-tiers de celles des constructeurs américains. La dominance globale de l'industrie américaine est particulièrement évidente au niveau du contractant principal.

Cette structure industrielle reflète les avantages du contexte aérospatial américain. Les entreprises américaines opèrent sur le marché intérieur unique le plus important du monde. Elles bénéficient également d'un cadre opérationnel hautement favorable conçu pour soutenir un objectif politique déclaré depuis plusieurs décennies qui est le maintien de la suprématie américaine dans l'aérospatiale.

Légende du graphique

PRINCIPALES ENTREPRISES DE L'INDUSTRIE AÉROSPATIALE

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

Chiffre d'affaires 2000 en millions de dollars

(données du chiffre d'affaires dans le secteur aérospatial)

Encadré:

Etats-Unis

UE

autres

Il est évident que les objectifs politiques européens diffèrent de ceux des États-Unis. Cela est illustré par le fait que les achats des administrations publiques auprès de l'industrie aérospatiale n'ont pas du tout la même ampleur. Le ministère de la défense et les services gouvernementaux américains ont acheté pour 60 300 millions de dollars de biens et de services aux constructeurs américains en 2000, comparés aux 15 900 millions de dollars dépensés par les 15 États membres de l'Union européenne pour des contrats européens.

Un autre aspect avantageux de la politique américaine sont les retombées de la recherche et du développement militaires au profit des programmes d'avions civils, telles que, par exemple, la conception directe d'avions civils à partir de projets militaires.

Retombées de programmes militaires dans le domaine civil aux États-Unis

Le B 707 et le B 747 sont des exemples de transfert direct de concepts d'appareil militaire en des projets civils. En effet, les bureaux d'études qui avaient conçu le ravitailleur KC-135 et soumissionné pour le marché de l'avion de transport militaire ayant abouti au C-5A, ont développé des avions civils à partir de leurs projets militaires. Un autre exemple est celui de l'avion de transport de fret MD-17 dérivé du C-17. Les outils de conception mis en oeuvre par Boeing dans l'élaboration de son offre pour le marché du Joint Strike Fighter devaient également servir à des programmes civils, selon le directeur général de la société. Dans le domaine des moteurs aéronautiques, la technologie des turbines mises au point grâce à un financement de l'État et destinées à des moteurs civils et militaires, pourrait trouver un marché plus important dans le secteur civil que dans le secteur militaire.

Les entreprises européennes ne peuvent se permettre d'ignorer l'énorme marché potentiel américain. Elles doivent repenser leurs investissements futurs. L'intense concurrence transatlantique qui existe notamment entre Airbus et Boeing, ne doit cependant pas occulter le niveau élevé de coopération transatlantique. C'est particulièrement vrai des produits aérospatiaux civils. La sous-traitance et les passations de marché, la production, les entreprises communes et les fusions de part et d'autre de l'Atlantique sont des développements naturels d'une industrie opérant sur les marchés mondiaux. On s'attend et on est favorable à ce que ces liens prennent encore plus d'importance dans l'avenir.

La relation transatlantique

* Airbus achète de grandes quantités d'équipements aux États-Unis notamment des moteurs (GE et P&W) et des systèmes. De ce fait, plus de 40 % des composants d'un nouveau modèle d'avion Airbus pourraient bien être fabriqués aux États-Unis. La mise au point de l'A380 pourrait faire travailler jusqu'à 60 000 personnes dans ce pays.

* Des entreprises européennes mettent au point et produisent des composants et des sous-systèmes de première importance pour Boeing.

* Les constructeurs de moteurs européens tels que Rolls-Royce, SNECMA, MTU et FiatAvio participent à des programmes de conception de moteur dans l'Union européenne et aux États-Unis, même lorsqu'il s'agit de moteurs en concurrence.

* CFMI, filiale à 50/50 de la SNECMA et de GE, fabrique une gamme de moteurs aéronautiques très performants.

* THALES et Raytheon ont créé une société mixte basée aux États-Unis (TRS) en 2001.

* BAE Systems réalise un chiffre d'affaires global de 4 milliards de dollars aux États-Unis. L'entreprise participera à hauteur de 8 % au programme du Joint Strike Fighter (JSF) ainsi qu'à son développement.

* Rolls-Royce mène des activités de grande ampleur aux États-Unis et participera également à la mise au point du JSF.

4. La Concurrence sur les Marchés mondiaux

Des conditions équitables dans le commerce international et l'accès aux marchés sont des préalables à la croissance de l'industrie aérospatiale dans un environnement concurrentiel.

4.1. Des conditions de concurrence équitables

Opérant dans un marché mondial, l'industrie aérospatiale européenne affronte une forte concurrence de la part d'entreprises implantées dans d'autres parties du monde, principalement aux États-Unis. En raison du profil de cette industrie, les gouvernements y ont toujours joué un rôle central. L'aide publique revêt différentes formes telles que la protection des marchés nationaux, le soutien aux exportations, la fiscalité ou le financement direct/indirect. Dans ce contexte, il est indispensable de respecter un juste équilibre dans l'application des pratiques et des règles en matière d'aide internationale pour garantir des conditions de concurrence équitables.

Les accords commerciaux internationaux jouent un rôle fondamental à cet égard. Dans le cas des avions civils, deux accords sont prédominants: l'accord de 1979 du GATT relatif au commerce des aéronefs civils et l'Accord bilatéral de 1992 entre les États-Unis et l'Union européenne concernant le commerce des aéronefs civils gros porteurs. Cet accord réglemente précisément les formes et le niveau d'aide de l'État pour les deux parties, prévoit des règles de transparence et engage les parties à éviter les litiges commerciaux.

La reconnaissance mutuelle et le respect des obligations découlant du commerce international y compris la mise en oeuvre des règles de l'OMC, sont indispensables à l'instauration d'une concurrence équilibrée entre les entreprises aérospatiales du monde entier.

L'accès aux marchés peut être notablement entravé par des obstacles à l'importation et à l'exportation dressés par des entreprises étrangères. Ce problème se pose en particulier lorsque le marché protégé est très vaste, comme celui de la défense américaine. Les fabricants européens sont confrontés à deux problèmes spécifiques à la politique américaine:

4.1.1. En raison des réglementations restrictives intégrées à de nombreux textes législatifs au niveau fédéral et à celui des différents États, telles que les Defense Federal Acquisition Regulations, le marché américain est d'un accès difficile. Dans la pratique, c'est un exemple de la politique dite "Buy American" (Achetez américain).

En 2001, le congrès américain a adopté une législation limitant explicitement le choix d'approvisionnement du ministère de la défense aux avions de l'entreprise Boeing (Section 8159 de la Defense Appropriation Bill - HR 3338). Ce texte législatif ou réglementaire excluait de fait l'achat d'un avion ravitailleur de la société Airbus, quand bien même celle-ci offrait un produit compétitif.

Dans le proche avenir, toute charge utile d'origine américaine devra être emportée par un lanceur fabriqué aux États-Unis sauf dérogation accordée par le Président ou son représentant désigné.

4.1.2. Les États-Unis appliquent des règles d'exportation très strictes qui interdisent la libre exportation d'équipement par des pays étrangers si cet équipement inclut des composants auxquels s'appliquent les règlements militaires et les règlements relatifs à l'exportation de biens à double usage des États-Unis. Ces contrôles à l'exportation sont actuellement reconsidérés par les autorités américaines, mais seulement de manière bilatérale avec des pays sélectionnés tels que l'Australie, le Canada et le Royaume-Uni.

À mesure que l'industrie européenne revêt un caractère plus transnationale, les règles américaines en matière de contrôle de l'exportation doivent être assouplies par l'instauration d'un dialogue réunissant autant de pays européens que possible. Ce dialogue transatlantique doit s'appuyer initialement sur les discussions bilatérales qui se déroulent actuellement au niveau de l'industrie avec six pays européens (Royaume-Uni, France, Allemagne, Italie, Espagne et Suède), signataires de l'accord cadre sur la restructuration de l'industrie européenne de la défense, établi en 2000 par une lettre d'intention relative à la coopération dans le domaine de la défense.

* L'envoi en Chine d'un satellite Astrium APR3 qui devait être lancé par une fusée chinoise en juillet 2001 a été bloqué par la délivrance tardive de l'autorisation d'exportation par les autorités américaines étant donné que le satellite comprenait des composants américains. Six récepteurs sur le satellite devaient être utilisés par un opérateur chinois.

* Lorsque des avions de combat fabriqués aux États-Unis et devant être équipés de systèmes de guerre électronique non américains sont exportés, ces systèmes doivent être installés par le contractant américain qui doit également fournir certains composants essentiels. L'armée de l'air américaine doit pouvoir contrôler l'ensemble des capacités du système et en approuver l'installation.

* Dassault aviation s'est vu refuser la licence d'intégration du missile air air AMRAAM sur le Rafale proposé à la Corée du sud, ce qui a réduit l'intérêt de l'offre de l'avionneur dans la compétition en cours avec des concurrents américains.

Bien que les associations des industries européennes et américaines collaborent pour résoudre certains de ces problèmes, il faut qu'il y ait une réelle volonté politique et que les gouvernements s'investissent si l'on veut progresser. Les barrières commerciales doivent être assouplies pour garantir un accès équitable et réciproque aux marchés .

4.2. Développement de la coopération internationale

Les experts prédisent une évolution significative des types de demandes régionales au cours des prochaines décennies. Pratiquement la moitié de la demande d'avions civiles au cours des vingt prochaines années devrait émaner de marchés extérieurs aux marchés importants mais relativement bien développés des États-Unis et de l'Europe.

Dans le monde entier, l'accès au marché est déterminé par des facteurs commerciaux tels que la qualité, le prix et le service mais aussi de l'établissement de relations politiques et diplomatiques plus générales. Étant donné son rôle dans les relations internationales, l'Union européenne détient une responsabilité majeure pour ces questions. Les accords de coopération aéronautique entre l'Union européenne et la Chine et entre l'Union européenne et l'Inde sont des exemples de renforcement de relations. Un autre exemple est le projet de coopération Union européenne-Asie dans le domaine de l'aviation civile, qui vient d'être engagé.

L'évolution des structures du marché aura un impact sur la structure de l'industrie aérospatiale. Pour mieux accéder aux marchés en développement, il pourrait s'avérer nécessaire d'y transférer les capacités de fabrication. Comme c'est essentiellement la fabrication à faible valeur ajoutée qui d'abord pourrait s'installer sur ces marchés, les pays disposant d'une industrie aérospatiale établie devront se concentrer sur les technologies sophistiquées.

Une approche horizontale associant des produits compétitifs et leur commercialisation bien organisée par l'industrie au renforcement des relations politiques, a montré son importance pour l'amélioration de la position de l'industrie aérospatiale sur les marchés mondiaux. Les politiques européennes ont un rôle majeur à jouer à cet égard.

Recommandations du rapport STAR 21 concernant les marchés mondiaux

* Établir des conditions de concurrence équitables permettant à l'industrie européenne de soutenir la concurrence sur les marchés mondiaux.

* Améliorer l'accès aux marchés mondiaux, notamment celui des États-Unis.

* Rechercher des accords plus généraux permettant de simplifier les contrôles des exportations de produits comprenant des composants américains.

* Assurer la réciprocité équitable en matière d'accès aux marchés.

* Poursuivre le développement de programmes de coopération internationale.

5. Le cadre operationnel de l'industrie aerospatiale europeene

Une grande diversité de politiques s'appliquent au cadre opérationnel de l'industrie aérospatiale européenne. Certaines émanent de l'Union européenne, d'autres sont largement déterminées au niveau national. Les domaines d'intérêt majeur pour l'industrie sont la politique de concurrence, la fiscalité, les compétences et la mobilité, l'élargissement et la recherche.

5.1. Politique de concurrence

Le processus de restructuration des industries de la défense et de l'aérospatiale a entraîné la multiplication de fusions et d'autres accords de coopération entre les entreprises de l'Union européenne. Celles-ci sont passées d'une phase de regroupement au niveau national à une phase de concentration au niveau européen. Cette évolution permet à l'industrie européenne de répondre aux exigences de la concurrence dynamique et de renforcer sa compétitivité dans les secteurs civils et militaires.

La politiques de concurrence de l'Union européenne et en particulier le règlement sur le contrôle des opérations de concentration offre un cadre précis et la possibilité d'arrêter rapidement des décisions, facilitant ces concentrations et les accords de coopération entre les entreprises qui ne remettent pas en question la concurrence effective. Par ailleurs, le contrôle par l'Union européenne des aides de l'État permet de distinguer les aides pour la recherche et la mise au point de technologies des aides illégales visant à protéger des entreprises non compétitives.

L'application de la politique de l'Union européenne en matière de concurrence à l'aérospatiale nécessite la prise en considération de caractéristiques particulières dans des cas individuels. Ces caractéristiques portent sur des spécificités telles que la définition du marché, la dominance possible ou l'influence négative sur l'innovation future. En ce qui concerne les activités liées à la défense, les aspects pertinents pourraient notamment inclure:

- Des limites fixées par les gouvernements nationaux à l'étendue géographique des marchés par l'application de règles de passation des marchés et de procédures administratives (bien que la concurrence puisse s'exercer de plus en plus au niveau européen, voire au niveau mondial).

- L'exercice du pouvoir d'achat compensateur de l'État en tant que client unique.

- Des exemples dans lesquels l'Europe ne peut soutenir qu'une entité unique capable d'affronter la concurrence mondiale dans une phase d'intégration paneuropéenne et mondiale.

5.2. Mesures fiscales d'encouragement à l'innovation

Dans le contexte plus large du dosage des politiques, les mesures fiscales d'encouragement à l'investissement dans la recherche favorisent les innovations dont les résultats ne sont pas immédiats. Ces concessions fiscales font partie des régimes fiscaux des entreprises nationales. Elles varient largement à l'intérieur de l'Europe et par rapport au reste du monde. Elles représentent un important instrument politique servant à promouvoir l'innovation dans les industries qui consentent de gros investissements en matière de recherche et de technologies telles que l'aérospatiale.

Au Canada, la R&D qui remplit les conditions requises attire un avoir fiscal proportionnel qui est déduit de l'impôt appliqué aux bénéfices de l'année. Certaines provinces appliquent des mesures fiscales supplémentaires. Par exemple, le Québec accorde un avoir fiscal proportionnel au montant dépensé en R&D appliquée aux salaires dans la Province.

Les pays européens doivent reconnaître l'impact des avantages fiscaux accordés à la recherche sur les décisions de l'industrie en matière d'investissement (secteur bénéficiaire et volume d'investissement).

Un moyen utile serait d'analyser l'impact des différents régimes fiscaux sur l'industrie aérospatiale en Europe et de les comparer aux juridictions en dehors de l'Europe. L'étalement dans le temps de la recherche qui caractérise les industries de haute technologie et la nature pan-européenne de l'industrie aérospatiale doivent être pris en considération, étant donné que des différences substantielles entre les régimes fiscaux appliqués à la recherche en Europe risquent également de fausser les décisions en matière d'investissement. Il convient d'examiner les possibilités d'appliquer des mesures fiscales d'encouragement et d'autres mesures similaires pour promouvoir l'innovation à l'échelle européenne en coordonnant, si nécessaire, les mesures prises au niveau national afin d'éviter toute distorsion de concurrence.

5.3. Sauvegarde des compétences

Un "manque de compétences" en aérospatiale pourrait se révéler un obstacle majeur à la croissance et à la compétitivité future de l'industrie en Europe. L'évolution rapide de la technologie et le renforcement de la concurrence soulignent le besoin d'une force de travail créatrice, innovatrice et adaptable. La sauvegarde ainsi que le développement d'une base de compétence solide en Europe sera un élément déterminant du maintien de la compétitivité mondiale et de la poursuite des investissements en Europe. La performance globale des systèmes d'enseignement et de formation doit donc être améliorée dans une perspective d'apprentissage tout au long de la vie afin d'offrir un meilleur équilibre entre la formation professionnelle initiale et la formation continue ainsi que de créer des liens entre différents contextes d'apprentissage. Il conviendrait en conséquence de faire pleinement usage des connaissances et des compétences acquises dans des conditions formelles et informelles. Les signes montrant que le recrutement de personnel hautement qualifié devient plus difficile suscitent des préoccupations particulières.

Initiatives visant à améliorer la base de compétences aérospatiales en Europe

Task-Force "Programme de qualification" de la ville de Hambourg: Des industries régionales aéronautiques et aérospatiales, l'Office fédéral de l'emploi, les institutions d'enseignement et la ville de Hambourg ont élaboré en commun des programmes de formation complémentaires dans le domaine de l'aérospatiale en vue de développer une force de travail qualifiée à long terme.

Le programme de qualification englobe des programmes d'apprentissage généraux ("électricien aéronautique" et "mécanicien aéronautique") ainsi que des programmes de formation professionnelle avancée personnalisée. En février 2002, la première classe de technologie aéronautique a débuté à l'école publique de formation professionnelle de Hambourg dans des matières comme l'ingénierie des produits et la technologie aéronautique. Cette formation a été conçue pour des spécialistes ayant déjà plusieurs années d'expérience en aérospatiale. Un programme d'enseignement de l'anglais technique, de la législation aéronautique et de la technologie aéronautique - soutenu par le Fonds social européen et la ville de Hambourg - a été mis au point spécifiquement à l'intention du personnel des petites et moyennes entreprises fournisseurs. L'université des sciences appliquées de Hambourg propose divers programmes relatifs à la "construction aéronautique" y compris un programme d'enseignement post-universitaire à l'intention des ingénieurs salariés qui ne travaillent pas encore dans le domaine aéronautique. L'université technique de Hambourg-Harbourg a mis au point des modules de formation à l'intention des jeunes spécialistes qui travaillent déjà dans le secteur aérospatial, avec le soutien de l'Union européenne.

En Italie, des initiatives similaires ont été prises conjointement par l'industrie, les universités et l'administration, notamment dans les régions de Turin, Naples et Pise. Elles englobent des programmes de formation générale et professionnelle.

Les mesures visant à répondre à la menace d'un déficit en compétences nécessitent en conséquence:

- Une coopération accrue entre un large éventail d'acteurs concernés, y compris les organismes publics et les partenaires industriels à différents échelons, pour concevoir et mettre en application des mesures visant à améliorer la transparence et la reconnaissance des diplômes et des certificats ainsi que la qualité globale de l'enseignement et de la formation professionnelle en Europe, en termes de niveau et de réputation. Ces mesures doivent inclure des programmes d'apprentissage tout au long de la vie et des programmes de formation professionnelle.

- Une mise en relation effective des instituts de recherche et du système de formation.

5.4. Faciliter la mobilité

À mesure que l'industrie européenne se concentre, la mobilité du personnel devient un facteur significatif. Bien que les salariés puissent être appelés à s'installer dans un autre pays à mesure que les tâches se déplacent, l'absence d'un ensemble commun de législations et de réglementations du travail en Europe et la reconnaissance limitée des diplômes universitaires étrangers opposent des obstacles majeurs à une telle mobilité transfrontalière. Les entreprises de l'industrie aérospatiale européenne menant des activités dans plusieurs États membres ressentent les effets de ces incohérences. Les programmes transfrontaliers comme Eurofighter requièrent une mobilité considérable du personnel entre les centres de production spécialisés implantés dans divers pays européens. Les périodes d'exonération d'impôt sont brèves et le caractère bilatéral des accords existants ne reflète pas la réalité d'une industrie réellement européenne.

La Commission européenne a examiné ces questions dans le cadre de son récent plan d'action en matière de compétences et de mobilité et réclamé que des mesures soient prises sans tarder en vue de lever les obstacles pratiques, administratifs et juridiques à la mobilité. La nécessité d'améliorer la reconnaissance des qualifications par le développement d'une confiance mutuelle et de la transparence a été soulignée comme action prioritaire à mener au niveau européen. À cet effet, un processus de coopération accrue entre les États membres, d'autres pays européens et les partenaires sociaux a été engagé en application du mandat conféré par le conseil européen de Barcelone en mars 2002.

La Commission a également souligné l'effet négatif qui pouvait résulter des régimes de pension et de sécurité sociale existants.

Toutefois, comme des systèmes communs européens de fiscalité et de sécurité sociale ne devraient pas apparaître dans le proche avenir, il faut trouver des solutions reflétant la nature particulière de l'industrie aérospatiale afin d'améliorer la situation actuelle. En ce qui concerne les régimes fiscaux, il n'existe à ce jour que des accords bilatéraux entre les divers États membres (par exemple, France-Allemagne) et ceux-ci sont limités dans le temps. Ils permettent au salarié transféré de s'acquitter de ses impôts dans son pays de résidence. En ce qui concerne les régimes de sécurité sociale, il existe un système de coordination communautaire garantissant les droits de sécurité sociale aux personnes déménageant à l'intérieur de l'Union et déterminant les régimes auxquels elles sont soumises. C'est en principe le régime de l'État membre où elles travaillent. Il existe toutefois des exceptions comme les affectations de personnel d'un État membre dans un autre (pour des périodes allant jusqu'à douze ou vingt-quatre mois). Ce système de coordination est actuellement réexaminé et devrait être simplifié et adapté aux nouvelles situations.

L'habilitation de sécurité du personnel travaillant sur des programmes de défense dans différents États membres pose d'autres problèmes. Les législations nationales existantes n'ont pas encore été adaptées à la nature transfrontalière des principaux programmes aérospatiaux. Ces réglementations doivent être optimisées pour prévenir toute charge bureaucratique inutile.

L'habilitation de sécurité du personnel travaillant sur des programmes multinationaux tels que Eurofighter est compliquée par les différentes procédures et différents délais appliqués par les pays d'origine qui doivent délivrer l'habilitation aux personnes concernées. La lettre d'intention et l'accord-cadre sur la restructuration de l'industrie de l'armement qui en a résulté, ont offert une certaine assistance pour le personnel visiteur mais l'habilitation délivrée ne satisfait pas aux prescriptions de l'OTAN.

Pour faciliter la mobilité transfrontalière de la main-d'oeuvre de l'industrie aérospatiale européenne, plusieurs mesures sont nécessaires:

- Les périodes d'affectation prévues par les régimes de sécurité sociale doivent être étendues. L'expérience d'Airbus suggère qu'une période d'au moins 12 ans serait appropriée.

- Les accords bilatéraux existants entre les régimes de sécurité sociale de chaque État membre doivent être adaptés à un contexte européen plus vaste.

- Le personnel de l'industrie aérospatiale travaillant à des projets militaires dans différents pays européens doit être soumis à des procédures d'habilitation de sécurité harmonisées.

5.5. Élargissement de l'Union européenne

L'adhésion des pays d'Europe centrale et orientale à l'Union européenne présente à la fois des défis et des opportunités pour le secteur aérospatial européen. Des pays comme la Pologne, la République tchèque et la Roumanie disposent de longue date d'une industrie aérospatiale. Des entreprises de l'Union européenne ont déjà développé des relations commerciales spécifiques avec des entreprises locales. Les possibilités de partage de risques et de partenariat dans le cadre de nouveaux programmes font également l'objet de discussion.

Le dialogue ne peut être renforcé qu'en partageant des normes communes. La coopération est déjà engagée avec les industries aérospatiale de la Pologne et de la République tchèque pour partager les connaissances approfondies et les meilleures pratiques dans des domaines tels que le contrôle de qualité, la normalisation et la navigabilité. La reconnaissance mutuelle dans ces domaines et la conformité aux normes de l'Union européenne sont des préalables à l'établissement de relations commerciales plus étroites.

Une initiative en faveur de la formation à la législation de l'aviation civile européenne et aux prescriptions communes en matière de navigabilité (Joint Airworthiness Requirements: JAR) dans les pays d'Europe centrale et orientale a été lancé avec le soutien de la Commission européenne en mars 2002.

Il s'agit de développer des partenariats commerciaux et industriels à long terme favorisant l'établissement d'une solide collaboration et d'une intégration étroite avec l'industrie européenne et d'aider l'industrie de ces pays à devenir un partenaire efficace dans le secteur aérospatial. L'Union européenne devrait examiner les moyens de favoriser ce processus d'intégration en soutenant, par exemple, une formation en langues étrangères ou en gestion.

5.6. La recherche aéronautique civile: condition d'une viabilité à long terme

L'aérospatiale implique des engagements de recherche significatifs à long terme étant donné que c'est de l'innovation d'aujourd'hui que dépend la compétitivité future. Plus de la moitié des États membres de l'Union européenne soutiennent des programmes nationaux de recherche aéronautique alors que le financement au niveau européen revêt une importance croissante. Les programmes cadre de recherche européens représentent aujourd'hui quelques 30 % de la totalité des dépenses publiques dans le domaine de la recherche aéronautique civile en Europe.

Toutefois, la structure pan-européenne de l'industrie aérospatiale et l'importance des projets transfrontaliers ne se reflètent pas encore dans la stratégie de financement de la recherche en Europe. Le 6ème programme cadre européen qui s'étend sur plus de cinq ans, propose d'allouer 1 075 millions d'euros à la recherche aéronautique et spatiale mais les États membres continueront également de financer leurs programmes nationaux. Il convient d'améliorer la coordination des différents programmes de recherche afin de réduire la fragmentation actuelle des activités de recherche civile en aéronautique et de limiter au minimum les activités faisant double emploi. Comme les niveaux de financement sont calculés au plus juste, ces efforts sont essentiels pour garantir les ressources nécessaires aux projets de recherche majeurs.

En janvier 2001, le "groupe des personnalités" formé à l'instigation du commissaire à la recherche, Philippe Busquin, a présenté son analyse de la situation actuelle ("Aéronautique européenne: perspectives pour 2020" - Visions 2020) soulignant la nécessité d'agir. Le rapport réclamait la création d'un espace européen de la recherche aéronautique, basé sur des priorités fixées en commun par l'ensemble des parties. Les premières étapes concrètes ont été réalisées grâce aux travaux du Conseil consultatif pour la recherche aéronautique en Europe (Advisory Council for Aeronautical Research in Europe: ACARE).

L'ACARE a pour mission d'élaborer et de gérer un calendrier stratégique pour la recherche qui sera appliqué par l'ensemble des partenaires européens lors de la planification de leurs programmes de recherche aux niveaux national et européen, afin que ceux-ci répondent aux objectifs fixés par le groupe des personnalités. ACARE recommandera également des mesures visant à optimiser la mise en oeuvre des infrastructures de recherche existantes et à améliorer les politiques de l'enseignement pour attirer la main-d'oeuvre dont le secteur a besoin.

Outre l'amélioration des mécanismes de recherche et d'acquisition de technologies, combinés à un partage plus efficace et plus effectif des tâches, une augmentation générale des ressources est nécessaire. Le groupe de personnalités a estimé qu'au cours des vingt prochaines années, quelques 100 milliards d'euros d'origines publiques et privées seront nécessaires pour satisfaire les besoins de la société et faire de l'industrie européenne un leader mondial dans l'aéronautique civile. Cette évolution ira dans le sens de l'engagement général pris par les leaders européens au sommet de Barcelone en vue de favoriser les efforts de recherche, de développement et d'innovation en Europe et de combler l'écart de l'Union européenne avec ses principaux concurrents.

Les objectifs fixés dans le rapport "Vision pour 2020" pour répondre aux défis dans le domaine de la sécurité, de l'environnement et du fonctionnement de l'industrie sont très rigoureux et ne peuvent être réalisés que par des technologies de pointe qui devront faire l'objet d'études approfondies et être pleinement validées avant d'être mises ne production. Cela nécessitera une augmentation substantielle des dépenses pour la recherche aéronautique civile jusqu'à un montant total de 100 milliards d'euros d'ici 2020. Cet investissement s'inscrit dans le cadre de l'augmentation des dépenses européennes en matière de R&D et d'innovation pour atteindre 3 % du PIB d'ici 2010 et qui a été réclamée lors du sommet de Barcelone en 2002 ainsi que dans la perspective d'une expansion de la recherche aéronautique civile aux États-Unis durant la même période.

5.6.1. Recommandations de STAR 21 concernant l'amélioration du cadre d'activité

- La mise en oeuvre de la politique de concurrence européenne doit se poursuivre en tenant compte des caractéristiques particulières de l'aérospatiale, notamment des activités liées à la défense.

- L'impact des différents régimes fiscaux visant à promouvoir l'innovation dans le monde doit être analysé. Les possibilités d'appliquer des incitations fiscales et d'autres mesures de promotion de l'innovation à l'échelle européenne doivent être envisagées, en coordonnant si nécessaire les mesures nationales afin d'éviter toute distorsion de la concurrence.

- Les besoins d'une main-d'oeuvre qualifiée à long terme en matière d'éducation et de formation doivent être reconnus.

- La mobilité transfrontalière doit être facilitée. Les obstacles existants, en particulier, ceux liés aux régimes de sécurité sociale et aux procédures d'habilitation de sécurité pour la participation aux projets de défense doivent être surmontés.

- Des programmes de formation pratique doivent être développés dans les pays en voie d'adhésion afin d'accélérer leur intégration industrielle.

- Les principaux partenaires doivent définir des priorités à long terme pour la recherche aéronautique civile. Les futurs programmes de recherche menés aux niveaux européen, national, régional et industriel, doivent être mieux coordonnés et bénéficier d'une planification conjointe, le cas échéant.

- Il convient de prévoir l'allocation de ressources publiques suffisantes pour soutenir une stratégie de recherche à long terme dans le secteur de l'aéronautique civil, nécessitant un investissement total estimé à 100 milliards d'euros pour les vingt prochaines années, financé par des capitaux d'origines publiques et privées.

6. Gouvernance Européenne de l'Aviation civile

On croyait à l'origine que la Communauté européenne pourrait se limiter à créer le marché intérieur des services de transports aériens et laisser les autres aspects réglementaires aux États membres mais cette approche a créé un environnement inutilement complexe pour l'ensemble de l'industrie. Pris entre la réglementation des États membres et la réglementation européenne, cet environnement pèse sur l'efficacité du système des transports aériens européens. L'expérience montre qu'il affaiblit également l'influence de l'Europe dans les organismes internationaux.

Le moment est donc venu de définir un cadre réglementaire réellement intégré pour l'aviation civile en mettant notamment l'accent sur des domaines clés tels que la gestion du trafic aérien, la réglementation en matière de sécurité, les normes de sécurité et de protection de l'environnement. À plus long terme, il devrait en résulter l'adhésion de la Communauté européenne à l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), dans le cadre général des Nations-Unies, ce qui permettrait à l'Union européenne et à ses États membres de défendre leurs intérêts dans ce forum.

6.1. La gestion du trafic aérien et le Ciel unique européen

L'encombrement et la gestion inadaptée des cieux européens entravent notablement l'efficacité des compagnies aériennes européennes, ce qui influe négativement sur l'économie de l'industrie aérospatiale. La diminution de productivité du matériel mis en oeuvre sur des lignes européennes essentiellement de courtes distances, aggrave le fardeau des coûts de propriété, réduisant les profits et augmentant les tarifs tandis que les retards associés sont de plus en plus mal supportés par les passagers. Un groupe de haut niveau présidé par le vice président de la Commission, Mme Loyola de Palacio, a déjà réclamé l'instauration d'une autorité réglementaire indépendante et puissante, capable de gérer l'espace aérien européen par-delà les frontières nationales. Le groupe a également souligné l'importance du recours aux nouvelles technologies. Sur cette base, la Commission européenne a proposé en octobre 2001 un ensemble de mesures pour la gestion du trafic aérien, lesquelles sont actuellement examinées par le Conseil et le Parlement européen.

La mise en oeuvre de ces recommandations aiderait à surmonter les retards chroniques qui affectent déjà le transport aérien européen et pourraient l'affecter encore davantage dans l'avenir en raison de sa croissance prévue.

Le coût total des retards enregistrés en Europe en 2000 a été estimé entre 2,9 et 4 milliards d'euros. Plus du quart des vols ont été retardés et le retard moyen était de 43 minutes. 40 % de ces retards ont été attribués à la gestion du trafic aérien.

L'industrie aérospatiale européenne a déjà développé des technologies et des concepts opérationnels avancés qui pourraient contribuer à la mise en oeuvre d'un système de gestion cohérente du trafic aérien européen (Air Traffic Management: ATM) susceptible d'opérer conjointement avec les systèmes présents dans d'autres parties du monde.

L'Industry Consultation Group constituerait un forum approprié pour la mise au point de spécifications techniques conjointement avec l'industrie. Il pourrait proposer des solutions au nom de l'industrie et d'autres parties intéressées dans le cadre de l'initiative Ciel unique. Cette instance devrait être mise en place sans retard. et les différentes activités devraient être intégrées en un plan directeur global.

Pour exercer une plus grande influence au sein des organismes internationaux, il est essentiel que l'Europe adopte une approche de la gestion du trafic aérien qui fasse preuve de son efficacité.

6.2. Une autorité réglementaire unique en matière de sécurité

Ce sont les organismes nationaux qui s'occupent de la sécurité du transport aérien, y compris de la certification des appareils et des composants. Ces activités sont coordonnées par le système des Autorités conjointes de l'aviation (Joint Aviation Authorities: JAA). Les JAA est un cadre institutionnalisé au sein duquel les administrations de l'aviation civile européennes examinent et harmonisent les politiques nationales. Ce n'est pas un organisme juridique habilité à prendre des décisions contraignantes.

L'industrie s'étant regroupée au niveau européen, cette approche intergouvernementale n'est plus d'actualité. Elle impose des fardeaux bureaucratiques à l'industrie sans améliorer les niveaux de sécurité. La proposition de la Commission européenne pour une réglementation établissant des règles communes dans l'aviation civile et la création de l'Agence européenne pour la sécurité de l'aviation (European Aviation Safety Agency: EASA) qui attend son adoption définitive par le Conseil des ministres et le Parlement européen, est une mesure capitale. Contrairement au système JAA, cette réglementation permettra à une entité unique de prendre des décisions contraignantes.

Disposant du pouvoir de décision nécessaire, bénéficiant d'une délégation de compétence appropriée des États membres et dotée d'une organisation lui conférant une efficacité opérationnelle, l'EASA devrait entrer en fonction le plus rapidement possible en tant que service central de certification et des accords devraient être conclus afin de lui permettre de s'appuyer sur la coopération traditionnelle instaurée avec d'autres pays européens et les principaux organismes réglementaires tels que l'administration fédérale de l'aviation des États-Unis (Federal Aviation Administration: FAA).

Les autorités nationales pourraient cependant poursuivre leurs propres objectifs politiques dans des domaines qui ne sont pas encore couverts par la réglementation EASA. Il s'agit des opérations aériennes, de la délivrance des licences du personnel navigant technique et de la réglementation de la sécurité des aéroports et du trafic aérien. L'industrie souhaite que l'on mette en place un organisme qui, à terme, sera en mesure de jouer un rôle fondamental sur la scène internationale, actuellement dominée par la FAA et améliorant ainsi la position stratégique de l'Europe à mesure que les liens industriels transatlantiques se développent. Dans une perspective à long terme, cela pourrait conduire à la réglementation des aspects de sécurité dans un cadre organisationnel transatlantique, mais pour obtenir l'établissement de règlements équitables, l'Europe doit disposer d'un poids suffisant lui permettant de faire jeu égal avec la FAA.

Le mandat de l'EASA doit donc être rapidement étendu afin d'englober les responsabilités actuellement dévolues aux organismes nationaux dans chaque État membre.

6.3. Assurer la sécurité du transport aérien

À la suite des événements du 11 septembre 2001, les États membres ont pris conscience de leur interdépendance et de la nécessité de développer leur coopération afin de protéger efficacement l'aviation civile contre les menaces terroristes.

Dans une première étape, la Communauté a été chargée de veiller à l'établissement ainsi qu'à l'application de normes de prévention communes, mais il faut encore adapter les moyens de prévention à la menace, en utilisant les ressources que les nouvelles technologies peuvent offrir dans des domaines tels que la sécurité du poste de pilotage et le cryptage.

Ces actions doivent être étroitement coordonnées avec les États-Unis afin que les mesures préventives décidées de part et d'autre de l'Atlantique soient compatibles et n'imposent pas de difficultés insolubles à l'industrie. Une nouvelle plate-forme d'opportunités s'ouvrirait ainsi à la technologie européenne qui, comme l'industrie américaine, propose activement des solutions.

6.4. Approche européenne des problèmes de l'environnement

L'aviation affecte l'environnement principalement par le bruit des aéronefs et les émissions de gaz des moteurs. Le bruit des aéronefs est essentiellement un problème local. C'est un obstacle majeur à l'extension future d'un grand nombre d'aéroports et donc à la croissance de la capacité du système de transport aérien. Les émissions gazeuses de l'aviation ont représenté 2% des émissions totales de CO2 en 1992 et devraient augmenter à environ 3% dans le total global en 2015. D'autres émissions, notamment de NOx, ont des implications sur la qualité de l'air local et le changement climatique, et l'altitude à laquelle ces émissions se produisent tend à en augmenter l'effet radiatif (réchauffement global).

Des mesures importantes ont déjà été prises pour réduire le bruit et les émissions engendrées par les aéronefs mais il est indispensable de poursuivre les efforts en vue de les réduire encore davantage pour assurer le développement durable de l'industrie. Vision 2020 a déjà fixé les objectifs auxquels le développement des aéronefs et des moteurs doit parvenir dans les vingt prochaines années, le but recherché étant une diminution de moitié de la consommation de carburant spécifique et une réduction des émissions de NOx de 80%.

L'aviation est une industrie mondiale. Pour éviter les distorsions de concurrence entre les compagnies aériennes et entre les constructeurs, les problèmes de l'environnement doivent être examinés au niveau global, dans le cadre de l'OACI. L'Europe et ses États membres doivent s'efforcer de conforter leur rôle au sein de cette structure afin d'exercer une influence effective sur les processus de prise de décision associés.

Recommandations de STAR 21 pour une meilleure gouvernance de l'aviation civile

Il convient de créer sans tarder une organisation européenne puissante chargée de conduire la politique globale du secteur. L'influence de l'Europe devra être étendue au-delà de ses frontières en collaborant avec les administrations de l'aviation civile dans le monde entier. Les principales recommandations pour atteindre ces objectifs sont les suivantes :

* Administration de l'aviation civile: l'Union européenne doit agir en tant que décideur politique et autorité de réglementation dans tous les domaines de l'aviation civile et s'exprimer d'une seule voix au nom de l'Europe dans toutes les organisations internationales pertinentes et plus particulièrement au sein de l'OACI. Cela devrait aboutir en définitive à la participation de la Communauté à ces instances, conjointement avec ses États membres. Une agence européenne pour la sécurité de l'aviation, disposant des pleins pouvoirs, et dont le mandat serait rapidement étendu, est un premier pas en ce sens.

* Gestion du trafic aérien: un plan directeur pour la mise en oeuvre de l'initiative "Ciel unique européen" doit être développé dans la structure actuellement soumise aux délibérations du Parlement européen et du Conseil.

7. Besoin vital de Capacités de Défense et de Sécurité européénnes

L'une des premières responsabilités d'un gouvernement est de protéger ses citoyens. On admet aujourd'hui que dans beaucoup de circonstances, cette sécurité doit être assurée au niveau européen. Les événements se produisant en dehors des frontières de l'Union européenne peuvent avoir de sérieuses répercussions dans l'Union. Les turbulences des Balkans ont provoqué des mouvements migratoires majeurs ayant un impact direct sur les pays de l'UE tandis que les événements du 11 septembre 2001, ont démontré la nécessité de se préparer à de nouveaux types de menaces, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des frontières.

Les pays européens ont abordé ces besoins de sécurité et de défense sous trois angles différents mais interdépendants:

- Les engagements pris par les États membres en matière de défense du territoire national continuent de jouer un rôle majeur dans leur politique de sécurité et de défense.

- Onze États membres de l'UE sont également membres de l'OTAN qui accorde une priorité élevée à la nécessité de renforcer les capacités des alliés européens afin qu'ils puissent pleinement exercer leur rôle de partenaires effectifs de l'Alliance.

- Conformément au traité sur l'Union européenne, les États membres de l'UE sont convenus de définir et de mettre en oeuvre une politique étrangère et de sécurité commune incluant l'établissement progressif d'une politique européenne de sécurité et de défense (PESD), renforçant ainsi l'identité et l'indépendance européenne afin de promouvoir la paix, la sécurité et le progrès en Europe et dans le monde.

Chacune des ces trois approches appelle des solutions technologiques de plus en plus contraignantes. Les événements du 11 septembre 2001 ont fait ressortir la nécessité de prendre des mesures de plus grande ampleur pour protéger les citoyens sur les fronts civils et militaires et rendu la tâche encore plus difficile . Pour mieux répondre à ces besoins de protection civile et de défense visés par le traité de l'UE, l'Europe doit disposer des capacités adaptées à cette réalité. C'est le secteur de l'aérospatiale qui est appelé à les fournir dans une large mesure.

L'objectif global européen ou objectif d'Helsinki identifie déjà les moyens nécessaires pour déployer la force de réaction rapide forte de 60 000 hommes. Il est trop tôt pour émettre des hypothèses sur les autres buts que devraient fixer les États membres de l'Union européenne pour la politique européenne de sécurité et de défense, mais il est clair que les engagements pris dans le contexte de l'OTAN et au niveau national, impliquent de nouvelles exigences majeures dans une perspective à moyen et long terme, compte tenu du fait que les forces déployées seraient disponibles pour une mise en oeuvre au niveau national, à la demande de l'OTAN ou à celle de l'Union européenne.

Objectif européen

"Un objectif global européen sera adopté de sorte que des moyens militaires prêts à être déployés et des objectifs de capacité collective en matière de commandement et de contrôle, de renseignements et de capacités de projection seront mis au point rapidement et ce grâce à la coordination volontaire des efforts nationaux et multinationaux, afin de mener à bien l'ensemble des missions dites de Petersberg"

Conclusions du conseil européen d'Helsinki, 1999

7.1. Évaluer le retard de capacité ("capability gap")

Les préoccupations immédiates de l'UE sont la gestion de crise à travers l'éventail complet des missions dites de Petersberg: opérations humanitaires et de secours, fonctions de maintien de la paix et missions des forces de combat dans la gestion des crises y compris l'instauration de la paix. En parallèle, les États membres concernés fourniront les moyens de défense nécessaires pour protéger les intérêts nationaux, européens et transatlantiques dans le cadre de l'architecture de sécurité existante, en particulier l'OTAN.

La nécessité d'accroître les capacités pour répondre à l'objectif global européen est pleinement reconnue au niveau de l'Union européenne et étroitement associée à l'avenir de son industrie aérospatiale. Les États membres de l'Union européenne ont fait part de leur détermination à améliorer leurs capacités opérationnelles dans le cadre du plan d'action sur les capacités européennes (European Capabilities Action Plan: ECAP) afin de pouvoir mener à bien toutes les missions de Petersberg, en ce qui concerne notamment la disponibilité, la déployabilité, la durabilité et l'interopérabilité. Plus précisément, ils ont convenu de poursuivre leurs efforts dans les domaines du commandement, du contrôle, des communications et de l'information (C3I) ainsi que dans les transports stratégiques aériens et maritimes.

Des capacités de commandement, de contrôle et d'information, utilisant des moyens tels que des aéronefs de surveillance sans pilote et des systèmes de communication par satellite sont indispensables à l'Europe pour mener à bien les missions de Petersberg y compris la gestion de crise dans des pays voisins (dans les Balkans par exemple) ou ailleurs dans le monde.

Les transports aériens stratégiques permettent aux responsables politiques européens de transférer rapidement des forces à des destinations plus éloignées pour le maintien de la paix ou des interventions ainsi que d'offrir des moyens d'évacuation rapide de régions troublées du monde en réduisant le nombre des victimes au maximum.

Il a été décidé que dans le cadre de l'Union européenne, la définition progressive d'une politique de défense commune bénéficierait du soutien des États membres qui coopéreront entre eux, le cas échéant, dans le domaine de l'armement. Le conseil européen de Laeken qui s'est tenu en décembre 2001 a reconnu la nécessité de mieux harmoniser les besoins militaires et la planification de l'achat d'armement, notant que l'Union européenne et les ministres responsables rechercheront des solutions et de nouvelles formes de coopération pour développer les capacités nécessaires en faisant un usage optimum des ressources disponibles.

L'aérospatiale joue ainsi un rôle fondamental, en ce qui concerne les applications de défense mais pour apporter une solution au "capability gap" - une étape essentielle pour la crédibilité de la politique européenne de sécurité et de défense.

7.2. Un défi pour l'Europe

Les budgets de la défense des pays européens doivent être dépensés d'une manière plus cohérente. Les mécanismes de coordination et de coopération traditionnels entre les européens manquent d'efficacité. Les besoins militaires européens ne sont pas harmonisés, les marchés et les achats sont en conséquence fragmentés et trop limités pour permettre à l'industrie de développer des productions de longue durée et devenir plus compétitive.

Une conséquence de la fragmentation du marché de la défense est que la recherche et la technologie ne sont ni partagées ni suffisamment importantes pour permettre à l'industrie européenne d'exploiter les meilleures technologies d'une manière cohérente. Alors que les entreprises européennes doivent cofinancer une grande partie de leurs travaux de recherche et de développement militaires, la R & D de l'industrie américaine bénéficie d'un soutien politique total, comme cela a été réaffirmé en mai 2001.

Cette combinaison de facteurs impose d'énormes contraintes à l'industrie européenne dans ses efforts pour rester compétitive sur les principaux marchés. L'enveloppe supplémentaire de 40 milliards de dollars que le gouvernement américain a accordé essentiellement à son industrie de la défense à la suite des événements du 11 septembre 2001, parallèlement au budget de plus de 400 milliards de dollars proposé pour l'exercice 2003, risquent encore d'aggraver cette situation.

Le profond déséquilibre entre les États-Unis et l'Europe fausse la concurrence mais complique également toute coopération ou partenariat de part et d'autre de l'Atlantique.

Pour mener une politique étrangère et de sécurité crédible, l'Europe doit disposer de capacités de défense appropriées. Quinze à vingt ans sont nécessaires pour développer des systèmes militaires de l'évaluation technologique à la mise en oeuvre opérationnelle. Dans des domaines où aucun programme de R&D d'importance n'est mené, l'Europe n'aura pas d'autre choix que de renoncer à une capacité opérationnelle ou de dépendre de fournisseurs non européens.

Les récents événements soulignent l'importance de disposer, pour la gestion de crises civiles et militaires, de moyens efficaces et rapides d'information, de commandement et de contrôle ainsi que de systèmes d'armes précis ne provoquant aucun effet collatéraux. De telles exigences appellent des solutions complexes et innovatrices dont le développement peut nécessiter des tests de faisabilité et des démonstrateurs, débouchant sur une nouvelle génération d'équipement dans des domaines clés tels que la recherche et le sauvetage, la reconnaissance, les systèmes C3I, les véhicules aériens sans pilote et les munitions intelligentes. Si l'Europe n'entretient pas de telles capacités et ne les développe pas davantage, le risque est grand que sa capacité d'action sera déterminée par les États-Unis à travers leur dominance de la fourniture de certain type de matériel ou de maintenance de systèmes déjà livrés.

Si les États membres de l'UE ne renforcent pas leur engagement vis-à-vis de leur industrie aérospatiale et n'abordent pas ces problèmes au niveau européen, le risque est grand que la capacité de l'Union à mener à bien les missions de Petersberg s'en trouvera limitée, sans parler des obligations des États membres vis-à-vis de l'OTAN.

Le nouvel environnement électronique

La nature de la guerre subit un changement fondamental entraîné par la nécessité de faciliter au maximum le déploiement efficace de forces militaires, d'accroître la surveillance contre la menace du terrorisme, d'apporter une réponse adaptée à cette menace et de reconnaître la nécessité vitale de limiter le nombre des victimes militaires et civiles dues à une action militaire au minimum. Ce scénario implique la mise en oeuvre de systèmes aériens sans pilote pour la surveillance et la projection de force.

La technologie requise pour cette nouvelle capacité est en grande partie générique. Le déploiement de système sans pilote peut offrir un moyen fiable et peu coûteux de surveillance et de gestion des données pour la protection des pêches, les patrouilles aux frontières et le maintien de l'ordre, la recherche et les secours civils et de nombreuses autres applications représentant un marché potentiel considérable. Les besoins en matière d'applications civiles et militaires peuvent et doivent être satisfaits par l'industrie aérospatiale européenne.

Les États-Unis sont les plus avancés dans la mise en place de cet environnement électronique et le développement ainsi que le déploiement de systèmes sans pilote. Si l'Europe n'arrive pas à bâtir une capacité indépendante dans ce domaine, au moins à un niveau plus limité mais financièrement abordable, elle ne sera guère en mesure de participer de manière significative à des opérations militaires avec les États-Unis, voire, ce qui est plus important encore, de monter des opérations indépendantes. L'élément essentiel en l'occurrence est l'interopérabilité entre les pays européens ainsi qu'avec les États-Unis et l'OTAN.

7.3. Une nouvelle approche des besoins de l'Europe en matière de défense

De tous les secteurs économiques, celui des équipements de défense est le seul de l'Union européenne a rester largement déterminé par les politiques nationales. Les besoins futurs et les achats destinés à répondre aux besoins actuels sont fréquemment définis à un niveau purement national, en ne tenant guère compte des intérêts communs. Cette manière de procéder coûteuse et inefficace, se traduit par des activités faisant double emploi double et par l'augmentation des coûts, alors que les budgets sont réduits.

- Un marché fragmenté interdit à l'Europe les économies d'échelle nécessaires à la réduction des coûts, au financement de la R&D et à la mise en oeuvre effective des technologies.

- Les méthodes traditionnelles de coopération en Europe ne présentent pas le meilleur rapport qualité-prix.

La définition d'objectifs communs en matière de politique étrangère et la coopération dans le cadre d'opérations de sécurité doivent être complétées par des objectifs communs et la coopération en matière de conception et d'acquisition des outils. Il convient d'accélérer l'harmonisation des besoins militaires et la planification des achats d'armement, conformément aux recommandations du sommet de Laeken de 2001, en vue de développer une politique d'armement exhaustive au niveau européen. Des initiatives pour l'achat commun d'équipement par des organismes tels que l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (Joint Armaments Cooperation Organisation: OCCAR) et le Groupe des armements de l'Europe occidentale (Western European Armaments Group: WEAG) doivent être mises en oeuvre plus rapidement.

La rationalisation des dépenses ne suffira cependant pas pour répondre aux besoins du nouvel agenda de sécurité. Des ressources supplémentaires seront nécessaires et ces nouvelles demandes arrivent précisément au moment où plusieurs gouvernements européens ont entrepris de réorganiser leurs forces armées en vue de les adapter à un nouvel environnement stratégique où les besoins militaires sont différents. Toutefois, la restructuration coûte chère et des économies potentielles ne vont pas se matérialiser dans un proche avenir. L'approche exhaustive de la gestion de crise qui est l'une des caractéristiques de la politique étrangère et de sécurité commune va nécessiter de nouvelles capacités coûteuses, notamment en ce qui concerne le maintien de l'ordre.

La liberté d'action de l'Europe a un prix qui est de doter les forces armées européennes de l'équipement approprié et de créer une base industrielle et technologique solide. C'est la raison pour laquelle les décisions concernant les dépenses nationales en matière d'équipements de défense, la redéfinition des priorités dans le cadre des budgets de défense existants et la réponse appropriée à donner aux nouvelles menaces, doivent être abordées dans un contexte européen. En outre, les engagements limités en faveur d'une participation à des projets communs de R&D dans le domaine de la défense, doivent être étendus pour inclure de grands programmes de démonstration menés en collaboration et rassemblant les activités de différents États membres afin que la recherche dans le secteur de la défense soit solidement encadrée.

L'engagement des États membres et de l'UE à élaborer une structure de défense efficace qui réponde aux nouvelles stratégies et priorités de l'Europe et devienne de plus en plus autonome, nécessite un processus d'armement européen comprenant :

- La formulation d'une politique d'armement européenne commune reposant sur une base industrielle et technologique de défense durable, comprenant l'élaboration de programmes de R&D efficaces pour répondre aux besoins de défense et de sécurité identifiés par la politique étrangère et de sécurité commune ainsi que l'amélioration des capacités européennes au sein de l'Alliance nord-Atlantique.

- La promotion au niveau de chaque État membre d'accords de coopération militaire rationnels basés sur les meilleurs exemples tirés de la lettre d'intention et de l'accord cadre sur la restructuration de l'industrie européenne de l'armement qui en a résulté.

- La création d'une structure cohérente permettant de façonner un marché européen intégré de l'équipement de défense dans lequel l'industrie pourra exploiter les économies d'échelle et fournir à un prix abordable les matériels et services requis par les politiques communes européennes et le marché de l'exportation.

Toutefois, de telles améliorations structurelles ne suffiront pas, en elle-même, pour offrir les nouvelles capacités permettant de répondre aux objectifs stratégiques des dirigeants européens. Les engagements toujours plus étendus des pays européens en matière de défense et de sécurité nécessitent une augmentation des ressources allouées. La conclusion inévitable est que les dépenses globales doivent être augmentées.

7.4. Un marché intérieur des équipements de défense

Etant donné que la compétitivité de l'industrie aérospatiale et militaire européenne est un élément vital de la crédibilité des objectifs de sécurité et de défense européens, les instruments existants doivent être utilisés à chaque fois que cela permet d'éliminer les politiques et pratiques empêchant les entreprises de défense européennes de travailler plus efficacement.

La concentration de l'industrie européenne aérospatiale et de l'armement va de pair avec l'augmentation des transferts de produits, de composants, de biens intermédiaires et de matières premières entre des entreprises indépendantes liées par une relation client/fournisseur ou entre des entreprises ou usines appartenant au même groupe. Dans tous les cas, il est important de veiller à ce que la circulation des biens à l'intérieur du marché unique ne compromette pas la compétitivité des entreprises européennes restructurées. Tout comme la simplification administrative, cela signifie appliquer des procédures permettant aux marchandises et aux composants de circuler plus rapidement, ce qui est une nécessité pour la gestion moderne et flexible des entreprises.

Des mesures visant à faciliter la libre circulation des produits d'armement en simplifiant les contrôles associés aux transferts intra-communautaire et l'harmonisation des droits de douane sont un préalable à l'établissement du marché unique intégré qui constitue un élément essentiel de la valeur ajoutée de la dimension européenne.

Les politiques définies pour le marché unique dans lesquelles l'Union européenne dispose d'une grande expérience réglementaire, telles que les dispositions régissant la passation de marchés publics, peuvent être reprises pour la création d'un marché unique de l'armement, notamment dans le contexte de l'élaboration d'une politique européenne de l'armement qui tienne compte des caractéristiques particulières de ce type de matériel.

Soutenant cette approche, le Parlement européen a adopté en avril 2002 une résolution relative aux industries européennes de la défense, réitérant son point de vue selon lequel une industrie européenne de l'armement forte, efficace et viable, ainsi qu'une politique de commandes efficace, sont vitales pour le développement de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD). Il a également réaffirmé son soutien au plan d'action figurant dans la communication de la Commission de 1997 "Mettre en oeuvre la stratégie de l'Union européenne en matière d'industries liées à la défense", qui réclamait une restructuration urgente du secteur et la création d'un marché européen de l'armement.

En demandant qu'un plan d'action actualisé soit soumis au Conseil et au Parlement le plus rapidement possible, le Parlement a invité la Commission à examiner dans quelle mesure la politique commerciale commune et les disciplines relatives au marché unique doivent être appliquées aux industries de la défense, à la possibilité d'instituer un organisme industriel et multiinstitutionnel de la défense pour mettre en commun et coordonner la recherche dans ce domaine à l'instar d'ACARE, ainsi qu'à déterminer si de nouvelles mesures sont nécessaires pour faciliter la création de sociétés transnationales et intégrer les industries des pays en voie d'adhésion.

Pour le long terme, la convention sur l'avenir de l'Union européenne offre la possibilité d'identifier les dispositions institutionnelles et opérationnelles les plus efficaces pour réaliser les objectifs de l'Union dans le secteur de la défense et améliorer ainsi la compétitivité de l'industrie européenne de l'aérospatial et de la défense.

Recommandations de STAR 21 dans le secteur de la défense

* Objectif ultime: une politique européenne de la défense offrant le cadre nécessaire pour les marchés européens des matériels de sécurité et de défense et favorisant l'établissement d'une base technologique et industrielle durable et compétitive.

* Harmonisation des besoins militaires et la planification des budgets d'équipement et des achats d'armement.

* Augmentation des ressources utilisées d'une manière plus rationnelle et encouragement des programmes menés en collaboration, avec une répartition plus efficace des tâches entre les États membres.

* Harmonisation des dépenses pour la recherche dans le secteur de la défense entre les États membres.

* Mesures visant à l'établissement d'un marché européen de l'équipement de défense et d'une agence d'armement responsable d'un large éventail d'activités liées à l'acquisition, à la recherche et au développement communs, à l'achat d'équipements disponibles dans le commerce, etc.

* Promotion d'actions menées à l'échelle communautaire, à l'exemple de l'accord cadre pour la restructuration de la défense.

* Élimination des insuffisances identifiées dans l'objectif global européen et dans les objectifs de capacité collective.

8. Sauvegarder le Role de l'Europe dans l'Espace

Au cours des 40 dernières années, l'Europe a développé d'importantes capacités spatiales grâce à ses engins spatiaux et ses lanceurs et à l'infrastructure terrestre nécessaire à leur mise en oeuvre. Ce sont des outils essentiels pour le bien-être et la sécurité des citoyens européens. Ils sont indispensables à de nombreuses applications dans les domaines civils et militaires et leur importance continue de croître rapidement. Les applications spatiales apportent une contribution essentielle et toujours plus importante aux politiques européennes en matière d'environnement, de transport, d'agriculture et de développement. La politique étrangère et de sécurité commune en constante évolution et la mise en oeuvre des missions de Petersberg requièrent également des capacités nécessitant l'emploi des technologies spatiales.

Ces applications dépendent des capacités de l'Europe dans trois domaines interdépendants:

- L'utilisation de l'espace pour l'observation de la terre, la navigation, les télécommunications

- la science spatiale

- l'accès à l'espace

8.1. Importance des applications spatiales

L'importance stratégique de l'espace pour l'Europe est largement reconnue. l'Agence spatiale européenne (European Space Agency: ESA) a été créée en 1975 pour favoriser la collaboration européenne dans les activités de l'espace civil ; elle a notamment pour mission de faciliter la compréhension de la terre et de l'univers en concevant et en appliquant des programmes spécifiques. Grâce à ces programmes multilatéraux, combinés aux efforts déployés au plan national, l'Europe a développé des capacités importantes en matière d'engins spatiaux. De façon similaire, la famille des lanceurs Ariane a été développée pour offrir un accès autonome à l'espace.

La surveillance par satellite permet de suivre l'évolution du temps et des phénomène environnementaux et aidera à définir, à mettre en oeuvre ainsi qu'à surveiller les engagements internationaux de l'Europe tels que le Protocole de Kyoto à la Convention cadre des Nations-Unies sur le changement climatique. Le positionnement global apportera des améliorations majeures à la sécurité, à l'efficacité et à l'inter modalité des transports européens en fournissant des informations précises de localisation et de navigation. Les services de télécommunications par satellite ont le potentiel d'améliorer les systèmes de communication en Europe.

En 2000, la Commission européenne et l'ESA ont défini une stratégie européenne commune pour l'espace et créé une task-force CE/ESA. Deux programmes conjoints seront particulièrement importants dans le proche avenir, le système de positionnement global Galileo et le système de surveillance global de l'environnement et de sécurité (Global Monitoring for Environment and Security:GMES).

Galileo est un programme européen de radionavigation par satellite reposant sur une constellation de 30 satellites autour du globe et de stations de réception terrestres locales pour offrir des services aux utilisateurs dans pratiquement n'importe quel point de la terre. Il sera compatible avec le GPS et complétera ce système exploité par le ministère de la défense des États-Unis. Les ministres de l'Union européenne ont approuvé la phase de développement du projet qui se déroulera jusqu'en 2005 et sera suivie par des phases de mise en oeuvre et d'exploitation. Le début d'exploitation visé est 2008.

GMES est une initiative européenne lancée en 1998 qui bénéficiera des facilités de recherche par satellite existantes et prévues pour créer un système opérationnel d'informations d'origine spatiale. La surveillance s'appliquera au changement global, aux pressions sur l'environnement, avec d'éventuelles applications de sécurité qui pourraient être requises par la politique étrangère et de sécurité commune.

8.2. Les défis que doit relever l'industrie spatiale européenne

Les activités spatiales comprennent des applications d'intérêt purement commercial dans le secteur civil, en particulier les satellites de télécommunication. Au cours des dix dernières années, le secteur spatial européen a largement investi en vue de profiter de la croissance significative générée par ce marché commercial alors qu'aux États-Unis, les programmes réalisant des profits ont été essentiellement de nature institutionnelle. Le récent déclin rapide du marché des télécommunications - et par voie de conséquence, du marché des lanceurs spatiaux - met l'avenir de l'industrie spatiale européenne en danger. Ce déclin coïncide avec une réduction des budgets nationaux consacrés à l'espace qui menace le financement des programmes de l'Agence spatiale en Europe.

La forte dépendance de l'industrie spatiale européenne vis-à-vis du marché commercial contraste avec la situation aux États-Unis où les recettes proviennent pour l'essentiel de programmes financés par l'État. L'augmentation des investissements publics américains dans l'industrie spatiale de ce pays continuera d'exercer une pression sur l'industrie européenne - la dominance mondiale dans le secteur des applications et des équipements spatiaux est un objectif politique déclaré des États-Unis.

Les chiffres soulignent cette situation: en 1999, le chiffre d'affaires réalisé par les sociétés aérospatiales américaines dans les activités spatiales a atteint 33 700 millions d'euros dont 26 000 millions - soit plus des trois-quarts - ont été financés par le ministère de la défense et par la NASA. De leur côté, les entreprises européennes ont réalisé un chiffre d'affaires de moins de 5 500 millions d'euros dont seulement la moitié provenant de sources institutionnelles, le reste obtenu sur le marché commercial concurrentiel.

Par ailleurs, des programmes de défense ont été menés au plan national ou bilatéral (et rarement au plan multilatéral) en Europe et ont enregistré quelques succès majeurs mais avec des budgets limités, représentant moins de 5 % du budget total américain pour l'industrie, même en étant combinés. Les efforts consentis pour mieux soutenir les projets européens menés en collaboration n'ont pas encore donné de résultats et leur avenir demeure incertain. Il en résulte que contrairement aux programmes spatiaux civils, il n'existe pas encore de structures au niveau européen ou multilatéral pour répondre aux besoins des États membres en matière de technologie spatiale appliquée à la sécurité et à la défense.

Si l'Europe ne répond pas à ces défis, les conséquences seront graves et peut-être même irréversibles. Elle pourrait perdre son indépendance dans les technologies stratégiques et commerciales essentielles, mises en oeuvre dans des applications civiles et militaires telles que la navigation, les communications ou l'observation de la terre, ainsi que dans l'accès à l'espace. Le choix des options politiques par l'Union européenne et son rôle industriel majeur dans ce domaine stratégique de haute technologie seraient menacés et déterminés par des influences extérieures. L'Union européenne pourrait à son tour perdre sa position dans les secteurs commerciaux et de services qui dépendent des capacités spatiales.

8.3. Nécessité d'une politique spatiale dynamique

Une politique spatiale européenne à long terme dynamique telle que préconisée par la stratégie conjointe CE/ESA doit comprendre certains éléments fondamentaux:

Galileo: Le Conseil de l'Union européenne ayant donné le coup d'envoi au programme Galileo, la prochaine étape est la réalisation de l'infrastructure nécessaire puis l'entrée en service et l'exploitation. Une attention particulière doit être accordée à la mise en oeuvre, en identifiant clairement l'infrastructure additionnelle ainsi que les services requis par le projet en termes de financement public pour l'infrastructure et la participation de l'industrie pour les services.

Galileo va apporter de multiples avantages aux industries aérospatiales et à l'économie européenne en général et la maintenir au plus haut niveau des technologies spatiales. Il offrira également un système utilisable dans le monde entier, complémentaire d'autres systèmes de navigation et pouvant servir, le cas échéant, de système de repli.

GMES: cette initiative de première importance doit être développée rapidement afin que l'Europe dispose d'une capacité de surveillance globale indépendante, autonome et opérationnelle répondant à ses besoins stratégiques en matière de surveillance de l'environnement et de sécurité.

Conformément à la résolution du conseil de décembre 2001, le programme GMES complet doit être établi vers le début de 2004 afin d'offrir une capacité opérationnelle et durable d'ici 2008. Dans une première étape, des prototypes à grande échelle seront élaborés grâce à l'interconnexion des infrastructures spatiales et terrestres, avec le soutien des budgets nécessaires accordés au titre du programme-cadre européen de recherche et des programmes de l'ESA et des mesures en vue de l'établissement d'une structure institutionnelle appropriée pour le recueil et la fourniture d'informations d'origine spatiale concernant l'environnement et la sécurité.

Réaliser les objectifs de l'UE en matière de sécurité : les applications spatiales pourraient servir à la réalisation de divers objectifs relevant de la politique étrangère et de sécurité commune en venant compléter les ressources de chaque État membre, notamment en matière de recherche, de communication et de vérification d'informations, mais une approche intégrée devra être adoptée par toutes les parties intéressées - États membres, Commission européenne et OTAN - afin de développer des capacités spécifiques ou partagées. Les priorités sont les suivantes:

- utiliser l'infrastructure actuelle et prévue qui est essentiellement nationale, incluant le centre satellitaire de l'Union européenne, pour soutenir les missions de Petersberg en matière d'aide humanitaire, de sauvetage et de maintien de la paix. Les éléments de sécurité du système GMES doivent être conçus pour répondre à cet objectif.

- poursuivre le développement d'une capacité d'information spatiale dans le domaine de la défense et de la sécurité pour des tâches de surveillance, de reconnaissance, de commande et de contrôle, de télécommunications et de positionnement, en tirant partie des atouts européens dans le domaine spatial et en élargissant l'expérience acquise avec le centre satellitaire

- encourager l'OTAN à envisager une solution européenne lors de la commande de satellites de télécommunications militaires et pour répondre à ses besoins en matière de lanceurs.

La science et la R&D dans le domaine spatial: la science dans le domaine spatial doit être soutenue dans ses différentes composantes telles que l'exploration spatiale, les sciences de la terre et les sciences de la micro-gravité (par exemple la recherche en biotechnologie) ainsi que dans ses applications basées notamment sur un traitement de données et sur des modèles innovateurs, nécessaires à la mise au point de nouvelles missions et de nouveaux services spatiaux opérationnels. Les agences spatiales et l'Union européenne doivent apporter leur soutien à des démonstrateurs à grande échelle intégrant les diverses technologies spatiales et terrestres.

Soutenir les capacités de lancement européennes: une capacité de lancement indépendante et compétitive permettant d'accéder à l'espace est un préalable à l'établissement d'une politique spatiale européenne consolidée et à une exploitation fructueuse de l'espace. Malheureusement, en raison de la diminution notable des mises en orbite de satellites de télécommunications qui représentent l'essentiel du marché d'Ariane, les lancements commerciaux ainsi que le nombre limité des contrats de lancement passés par les gouvernements européens ne suffisent pas au maintien d'une activité commerciale viable pour le système Ariane. Le soutien public de l'ESA et des États membres de l'UE est donc d'une importance capitale pour la modernisation du lanceur Ariane, pour des innovations et de nouvelles installations de lancement, alors que l'industrie s'efforce de réduire les coûts et d'améliorer l'efficacité de la production. L'Europe doit agir rapidement afin de soutenir la concurrence de l'industrie des lanceurs américains qui bénéficie d'un soutien public.

Cadre CE/ESA: après avoir élaboré une stratégie globale dans le court et moyen terme, la CE et l'ESA doivent l'appliquer le plus rapidement possible. Pour définir un programme spatial européen, la CE/ESA doit également développer une approche à long terme disposant d'un financement adéquat et établissant les mécanismes institutionnels appropriés, qui tienne pleinement compte des besoins des utilisateurs et offre la visibilité nécessaire aux utilisateurs, aux investisseurs et aux pays tiers.

Recommandations de STAR 21 dans le domaine spatial

Il est recommandé:

* De mettre au point une politique spatiale européenne consolidée conforme à la communication ESA/CE sur l'espace et incluant un plan d'action et un financement adéquat.

* De déployer Galileo dans les délais prévus en consacrant les ressources nécessaires à sa promotion dans le monde entier et au développement d'activités en aval, permettant au secteur privé de participer dès le début du programme.

De mettre au point le système GMES offrant une capacité de surveillance globale autonome, grâce à un soutien substantiel des programmes CE et ESA.* De développer une capacité de surveillance, de reconnaissance, de commande et contrôle y compris de télécommunications et de positionnement pour un système de défense et de sécurité spatial basé en Europe.

* D'adapter l'aide publique au maintien d'un accès indépendant et compétitif de l'Europe à l'espace.

* D'adapter le soutien public à la science spatiale et au développement de ses applications.

* De soutenir des démonstrateurs à grande échelle intégrant les diverses technologies terrestres et spatiales.

9. Remarques de conclusion

Le groupe consultatif sur l'aérospatiale estime que ce secteur est dans une phase critique. Comme cette industrie doit opérer dans une perspective à long terme de vingt à trente ans, la stratégie politique définie aujourd'hui et les ressources allouées maintenant vont déterminer les perspectives et les performances de l'industrie pour les décennies à venir. Dans un marché mondial extrêmement compétitif où les entreprises américaines bénéficient d'un vaste marché intérieur et d'un soutien sans faille de leur gouvernement, l'Europe doit disposer de possibilités comparables lui permettant de maintenir ses objectifs si elle veut demeurer un centre d'excellence florissant dans le domaine aérospatial. Dans le cas contraire, l'Europe risque de perdre des capacités vitales.

Cela ne signifie pas que l'Union européenne doive tenter d'égaler les niveaux de dépenses des États-Unis dans le domaine de l'aérospatiale et de la défense. Ces niveaux différeront nécessairement en raison des visions, des objectifs et des priorités stratégiques respectifs et du choix des instruments nécessaires pour les réaliser. Néanmoins, les choix politiques qui doivent être définis en fonction du rôle et de l'influence de l'Europe dans le monde sont inséparablement associés à sa capacité de garantir les moyens permettant de réaliser ses objectifs. Seule une industrie aérospatiale européenne compétitive peut offrir de tels moyens.

Le groupe espère la plus large réponse possible à son analyse et à ses recommandations. Il attend en particulier les commentaires des parties les mieux placées pour donner effet à ses recommandations, c'est-à-dire les États membres et les institutions communautaires. En fonction des réactions et d'autres développements pertinents, le groupe est prêt à poursuivre le débat sur ce thème.

9.1. Résumé des recommandations de STAR 21

La compétition sur les marchés mondiaux

Il est recommandé :

- D'établir des conditions de concurrence équitables permettant à l'industrie européenne de soutenir la concurrence sur les marchés mondiaux.

- D'améliorer l'accès aux marchés mondiaux, notamment celui des États-Unis.

- De rechercher des accords plus généraux permettant de simplifier les contrôles à l'exportation de produits comprenant des composants américains.

- D'assurer la réciprocité équitable en matière d'accès aux marchés.

- De poursuivre le développement de programmes de coopération internationale.

Le cadre d'activité de l'industrie aérospatiale européenne

- La mise en oeuvre de la politique de concurrence européenne doit se poursuivre en tenant compte des caractéristiques particulières de l'aérospatiale, notamment des activités liées à la défense.

- L'impact des différents régimes fiscaux visant à promouvoir l'innovation dans le monde doit être analysé. Les possibilités d'appliquer des incitations fiscales et d'autres mesures de promotion de l'innovation à l'échelle européenne doivent être envisagées, en coordonnant si nécessaire les mesures nationales afin d'éviter toute distorsion de la concurrence.

- Les besoins d'une main-d'oeuvre qualifiée à long terme en matière d'éducation et de formation doivent être reconnus.

- La mobilité transfrontalière doit être facilitée. Les obstacles existants, en particulier, ceux liés aux régimes de sécurité sociale et aux procédures d'habilitation de sécurité pour la participation aux projets de défense doivent être surmontés.

- Des programmes de formation pratique doivent être développés dans les pays en voie d'adhésion afin d'accélérer leur intégration industrielle.

- Les principaux partenaires doivent définir des priorités à long terme pour la recherche aéronautique civile. Les futurs programmes de recherche menés aux niveaux européen, national, régional et industriel, doivent être mieux coordonnés et bénéficier d'une planification conjointe, le cas échéant.

- Il convient de prévoir l'allocation de ressources publiques suffisantes pour soutenir une stratégie de recherche à long terme dans le secteur de l'aéronautique civil, nécessitant un investissement total estimé à 100 milliards d'euros pour les vingt prochaines années, financé par des capitaux d'origines publiques et privées.

La gouvernance européenne de l'aviation civile

Il convient de créer sans tarder une organisation européenne puissante chargée de conduire la politique globale du secteur. L'influence de l'Europe devra être étendue au-delà de ses frontières en collaborant avec les administrations de l'aviation civile dans le monde entier. Les principales recommandations pour atteindre ces objectifs sont les suivantes:

- Administration de l'aviation civile: l'Union européenne doit agir en tant que décideur politique et autorité de réglementation dans tous les domaines de l'aviation civile et s'exprimer d'une seule voix au nom de l'Europe dans toutes les organisations internationales pertinentes et plus particulièrement au sein de l'OACI. Cela devrait aboutir en définitive à la participation de la Communauté à ces instances, conjointement avec ses États membres. Une agence européenne pour la sécurité de l'aviation, disposant des pleins pouvoirs, et dont le mandat serait rapidement étendu, est un premier pas en ce sens.

- Gestion du trafic aérien: un plan directeur pour la mise en oeuvre de l'initiative "Ciel unique européen" doit être développé dans la structure actuellement soumise aux délibérations du Parlement européen et du Conseil.

Le secteur de la défense et de la sécurité

Il est recommandé :

- D'appliquer comme objectif ultime, une politique européenne de la défense offrant le cadre nécessaire pour les marchés européens des matériels de sécurité et de défense et favorisant l'établissement d'une base technologique et industrielle durable et compétitive.

- D'harmoniser les besoins militaires et de planifier les budgets d'équipement et les achats d'armement.

- D'augmenter les ressources en les utilisant d'une manière plus rationnelle et d'encourager l'exécution de programmes en collaboration, avec une répartition plus efficace des tâches entre les États membres.

- D'harmoniser les dépenses de recherche dans le secteur de la défense entre les États membres.

- De prendre des mesures visant à l'établissement d'un marché européen de l'équipement de défense et d'une agence d'armement responsable d'un large éventail d'activités liées à l'acquisition, à la recherche et au développement communs, à l'achat d'équipements disponibles dans le commerce, etc.

- De promouvoir des actions à l'échelle communautaire, à l'exemple de l'accord cadre pour la restructuration de la défense.

- D'éliminer les insuffisances identifiées dans l'objectif global européen et dans les objectifs de capacité collective.

Le domaine spatial

Il est recommandé :

- De mettre au point une politique spatiale européenne consolidée conforme à la communication ESA/CE sur l'espace et incluant un plan d'action et un financement adéquat.

- De déployer Galileo dans les délais prévus en consacrant les ressources nécessaires à sa promotion dans le monde entier et au développement d'activités en aval, permettant au secteur privé de participer dès le début du programme.

De mettre au point le système GMES offrant une capacité de surveillance globale autonome, grâce à un soutien substantiel des programmes CE et ESA.- De développer une capacité de surveillance, de reconnaissance, de commande et contrôle y compris de télécommunications et de positionnement pour un système de défense et de sécurité spatial basé en Europe.

- D'adapter l'aide publique au maintien d'un accès indépendant et compétitif de l'Europe à l'espace.

- D'adapter le soutien public à la science spatiale et au développement de ses applications.

- De soutenir des démonstrateurs à grande échelle intégrant les diverses technologies terrestres et spatiales.