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Avis du Comité économique et social sur la "Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2027/97 relatif à la responsabilité des transporteurs aériens en cas d'accident"

Journal officiel n° C 123 du 25/04/2001 p. 0047 - 0050


Avis du Comité économique et social sur la "Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2027/97 relatif à la responsabilité des transporteurs aériens en cas d'accident"

(2001/C 123/09)

Le 23 juin 2000, conformément à l'article 80 paragraphe 2 du traité, le Conseil a décidé de consulter le Comité économique et social sur la proposition susmentionnée.

La section "Transports, énergie, infrastructures, société de l'information", chargée de l'élaboration des travaux du Comité en la matière, a désigné M. Bo Green comme rapporteur. La section a adopté son avis le 9 janvier 2001.

Lors de sa 378e session plénière des 24 et 25 janvier 2001, (séance du 24 janvier 2001), le Comité économique et social a adopté par 79 voix pour et 1 abstention l'avis suivant.

1. Historique

1.1. Le Règlement (CE) n° 2027/97(1) instaurait un régime de responsabilité moderne pour les compagnies aériennes de la Communauté européenne en cas de décès ou de blessure des passagers et garantissait l'uniformité des dispositions applicables aux transporteurs aériens de la Communauté européenne, dans l'attente de la révision de la convention de Varsovie de 1929. Dans son avis de 1996, le Comité soutenait la proposition de règlement de la Commission(2). Le règlement n'a pu toutefois intégrer un certain nombre de points, surtout en ce qui concerne les bagages et les retards; la proposition à l'examen, modifiant le règlement n° 2027/97, tente de remédier à cette situation.

1.2. La convention de Varsovie(3) constitue une étape importante dans l'histoire de la navigation aérienne internationale; elle réglemente notamment les rapports entre les transporteurs aériens et les passagers en matière d'accidents survenant dans le cadre du trafic aérien international. Normalement, la charge de la preuve incombe à la partie demanderesse, mais la convention de Varsovie a eu pour effet de renverser la charge de la preuve. Afin d'atténuer les effets de cette mesure, la responsabilité des transporteurs aériens a été limitée, sauf si le demandeur peut prouver qu'il y a eu négligence grave.

1.3. Depuis 1929, la convention a été modifiée et étendue par une série d'accords; l'on citera notamment le protocole de La Haye de 1955, la convention de Guadalajara de 1961, le protocole de Ciudad de Guatemala de 1971 et les protocoles de Montréal de 1975. Alors que la convention de Varsovie compte plus de 140 pays membres, les accords ultérieurs ne sont pas encore tous entrés en vigueur. Certains parce qu'ils n'ont pas été ratifiés par un nombre suffisant de pays, d'autres parce que les groupes de pays qui y ont adhéré ne sont pas les mêmes d'un accord à l'autre. Toutefois, en ce qui concerne les protocoles de Montréal, seul le protocole n° 3 n'est pas entré en vigueur.

Il existe pour le moment 7 systèmes possibles en vigueur d'après le droit international.

1.3.1. Sur le plan du droit aérien, la conséquence de cette situation est que certains pays ont adhéré uniquement à la convention de Varsovie de 1929, alors que d'autres ont adhéré également à un(e) ou plusieurs convention(s), accord(s) ou protocole(s) ultérieur(s). Si la convention de Varsovie de 1929 fixe la responsabilité des transporteurs à l'index 100, le protocole de La Haye de 1955 atteignait l'index 200, le protocole de Ciudad de Guatemala de 1971 l'index 1200 et les protocoles de Montréal de 1975 l'index 973, ce qui est également le seuil de la convention de Montréal de 1999 récemment adoptée (100000 DTS(4) par passager); les transporteurs ne peuvent ni refuser, ni limiter leur responsabilité pour les dommages causés dans les circonstances décrites dans la convention. Au milieu des années 70, dans les pays industrialisés, l'index des prix à la consommation pour la période correspondante était environ de 900.

1.3.2. La responsabilité des transporteurs aériens, d'après la convention de Varsovie de 1929, est ainsi d'environ 15000 euros, alors que le minimum prévu par la convention de Montréal de 1999 est de 150000 .

1.4. La rapidité de la ratification par les États membres, le 28 mai 1999, de la "convention de Montréal" relative à l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international(5), à la suite de la proposition de modification du règlement (CE) n° 2027/97, contribuera à l'entrée en vigueur, prochainement, de ladite convention (qui doit être ratifiée par au moins 30 États); elle aidera également à la mise à jour et à l'harmonisation de la réglementation communautaire concernant la responsabilité des transporteurs aériens en cas de décès ou de blessure d'un passager. L'on garantit ainsi à court terme une réglementation uniforme pour les transporteurs aériens de la Communauté européenne, applicable au trafic intérieur comme au trafic entre les États membres. À un peu plus long terme, du fait de la concurrence, ce texte contribuera en outre à une amélioration notable pour les passagers dans leurs déplacements entre la Communauté et les pays tiers effectués par des transporteurs n'appartenant pas à la Communauté.

1.4.1. Cette manière d'agir est compatible avec l'article 307 du traité et peut aider les États membres, le cas échéant, à adopter une attitude commune. Il est de plus conformé à l'article 55 de la convention de Montréal de 1999, qui prévoit que la convention prévaut sur les autres réglementations (Varsovie, etc.).

1.5. La convention de Montréal de 1999 entérine un principe qui, de manière générale dans le domaine des transports, ne cesse de gagner en influence au sein de la Communauté européenne, à savoir qu'en cas de défaillance dans le domaine de la sécurité, la responsabilité d'apporter la charge de la preuve incombe à celui qui a une influence directe dans ce domaine.

2. Proposition de la Commission

2.1. La convention de Montréal établit un cadre juridique modernisé et uniforme pour régir la responsabilité des compagnies aériennes de la Communauté européenne en cas de dommages causés aux passagers, aux bagages et aux marchandises lors de voyages internationaux.

2.2. La convention de Montréal et le règlement (CE) n° 2027/97 prévoient le même système de base de responsabilité en cas de décès ou de blessures des passagers. Par conséquent, l'adoption des dispositions de la convention de Montréal à l'intérieur de la Communauté n'aura pas d'effet nuisible pour les normes européennes. À un niveau détaillé, néanmoins, une révision des règles communautaires est nécessaire afin d'apporter les modifications suivantes:

2.2.1. Ajouter une référence à la convention de Montréal en plus de la référence existante à la convention de Varsovie pour que la nouvelle convention devienne un point de repère et que le règlement suive les évolutions.

2.2.2. Aligner les dispositions relatives à la responsabilité, l'exonération et la compensation en cas de décès ou de blessure exactement sur les textes des dispositions équivalentes de la convention de Montréal, pour que le régime applicable aux transporteurs communautaires soit uniforme, indépendamment du caractère international, intracommunautaire ou interne du trajet.

2.2.3. Actualiser les dispositions relatives aux avances à titre de compensation et au montant à verser en cas de décès d'un passager.

2.2.4. Améliorer et simplifier les dispositions sur l'information des passagers afin de se concentrer sur des domaines intéressant réellement ces derniers.

2.2.5. La principale nouveauté dans la proposition de règlement modifiant le règlement (CE) n° 2027/97 est l'instauration, avec la convention de Montréal, d'un régime uniforme pour tous les types de responsabilité à l'égard des passagers et de leurs bagages sur tous les vols, ainsi que pour les dommages occasionnés par des retards, ce qui n'est pas le cas jusqu'ici du règlement (CE) n° 2027/97.

3. Observations générales

3.1. Le règlement (CE) n° 2027/97 et la proposition de règlement à l'examen diffèrent sur plusieurs points du système de Varsovie en ce sens que le règlement distingue entre les transporteurs aériens communautaires et les transporteurs établis en dehors de la Communauté. Le système de Varsovie, en revanche, distingue sur le plan opérationnel entre trafic aérien national et international. Toutefois, la Communauté ne faisant pas partie du système de Varsovie, le règlement (CE) n° 2027/97 et la proposition de règlement à l'examen ne peuvent pas être en contradiction avec les obligations internationales de la Communauté.

3.1.1. Dans une affaire portée devant la Haute Cour de justice, en Angleterre, par l'IATA, le juge a estimé que le Règlement était une source de conflits pour les États membres eu égard à leurs obligations antérieures vis-à-vis des autres États signataires de la convention de Varsovie; il a toutefois refusé de renvoyer l'affaire devant la Cour de justice européenne.

3.1.2. S'ajoute à cela le fait qu'il est loin d'être établi qu'il y ait le moindre problème entre le système de Varsovie et le règlement, aucun des États ayant adhéré à la Convention de Varsovie n'ayant entamé d'action à cet égard.

3.1.3. Même si l'existence d'un tel conflit devait être établie, cela n'invaliderait pas pour autant le règlement (CE) n° 2027/97. Si la ratification de la convention de Montréal n'était pas imminente, les États membres pourraient en revanche être obligés de dénoncer la Convention de Varsovie, mais uniquement au cas où un tel conflit serait constaté à la demande d'un État ayant ratifié la convention de Varsovie.

3.1.4. À l'exception du Royaume-Uni, la décision de la Haute Cour britannique n'a donc aucune valeur juridique dans les 14 autres États membres. Ce n'est que dans ce pays que la décision peut, le cas échéant, créer de facto une insécurité juridique. En ce qui concerne les transporteurs et les citoyens communautaires, l'on ne voit en revanche aucune raison de ne pas appliquer le règlement, dont les dispositions relatives à la responsabilité ne s'appliquent pas aux transporteurs aériens qui ne sont pas établis dans la Communauté. Seule s'applique à ces derniers l'exigence relative à l'information des passagers, ce qui ne semble pas en contradiction avec la Convention de Varsovie.

3.1.5. Dans ce contexte, le Comité fait siennes les estimations de la Commission.

3.2. L'adoption de la proposition de modification du règlement (CE) n° 2027/97 donnera aux passagers une plus grande certitude quant à leurs droits et garantira une parfaite conformité du régime communautaire aux nouvelles règles internationales prévues par la convention de Montréal.

3.3. Le Comité appelle de ses voeux la création d'une pression au niveau international en faveur d'une entrée en vigueur rapide de la convention de Montréal de 1999, et invite notamment les États membres à ratifier ladite convention sans délai. Il convient toutefois de garder présent à l'esprit que pendant un certain temps, en ce qui concerne les vols entre la Communauté et les pays tiers, le système de la convention de Varsovie restera en vigueur parallèlement à la convention de Montréal.

3.4. Le Comité estime avec la Commission que le règlement révisé doit entrer en vigueur le plus tôt possible, soit dès que le processus législatif communautaire et la nécessaire adaptation de l'industrie aérienne le permettront.

3.5. Une entrée en vigueur du règlement communautaire avant celle de la Convention de Montréal pouvant créer une certaine confusion concernant les obligations des transporteurs de la Communauté, le Comité estime avec la Commission qu'il y a lieu de faire en sorte que les deux textes entrent en vigueur simultanément.

4. Observations particulières

4.1. Article 2, alinéa c)

Le CES approuve la nouvelle formulation proposée, plus claire.

4.2. Article 2, alinéa f)

De l'avis du Comité, il y a lieu d'ajouter à la proposition de modification de l'article 2, alinéa f), les protocoles complémentaires signés à Montréal, dans la mesure où pour les pays qui y ont adhéré, ces instruments modifient le texte original et le texte modifié de la convention de Varsovie.

4.3. Article 3, paragraphe 2

Même si la précision proposée relativement à l'obligation de sécurité pour les transporteurs aériens, en vertu de l'article 7 du règlement (CEE) n° 2407/92(6), est conforme à l'article 50 de la convention de Montréal de 1999, le Comité estime que, pour des raisons pratiques, cette obligation doit être mieux précisée à l'intérieur de la Communauté.

4.4. Article 5, paragraphe 3

Le Comité attire l'attention sur le fait qu'à la suite de la proposition de suppression du paragraphe 3 de l'article 3, il y a lieu de corriger en conséquence la référence à cet article dans le texte de l'article 5 paragraphe 3 du règlement (CE) n° 2027/97.

4.5. Article 6

Le Comité estime décisif le fait que tous les transporteurs aériens communautaires soient obligés de fournir aux consommateurs une "information adéquate ... en termes simples et intelligibles" sur le type de responsabilité auquel ils sont soumis par la loi.

4.6. Article 7 du règlement (CE) n° 2027/97

De l'avis du Comité, il y a lieu de fixer le délai d'établissement du rapport de la Commission de telle sorte que les conclusions de ce rapport puissent être utilisées conformément aux délais prévus par la convention de Montréal à l'article 24 sur la réévaluation des limites de la responsabilité.

4.7. S'agissant de la compensation en cas de perte, de dommage ou de retard des bagages, le Comité estime toutefois que fixer la limite de la responsabilité à 100000 DTS est insuffisant. Il semble peu réaliste d'attendre du passager moyen qu'il élabore une déclaration d'intérêt particulier pour une livraison au lieu de destination.

Le Comité admet toutefois que, sur ce point précis, la proposition à l'examen visant à modifier le règlement (CE) n° 2027/97 fait double emploi avec les dispositions correspondantes de la Convention de Montréal.

5. Conclusion

Sous réserve des observations formulées ci-dessus, le Comité économique et social approuve la proposition de règlement COM(2000) 340 final du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2027/97 relatif à la responsabilité des transporteurs aériens en cas d'accident Dans le même temps, le Comité invite les États membres à ratifier au plus tôt la convention de Montréal de 1999.

Bruxelles, le 24 janvier 2001.

Le Président

du Comité économique et social

Göke Frerichs

(1) JO L 285 1997, p. 1-3.

(2) JO C 212 1996, p. 38-40.

(3) Sur la convention de Varsovie et sur les récentes modifications, voir l'article 55 de l'annexe A à la proposition de décision du Conseil concernant l'approbation par les Communautés européennes de la convention pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international (convention de Montréal), COM(2000) 446 final du 14 juillet 2000.

(4) Le droit de tirage spécial ou DTS est une unité monétaire internationale définie par le Fonds monétaire international. 1 DTS = 1,44 euro au 26 avril 2000.

(5) Sur la convention de Varsovie et sur les récentes modifications, voir l'article 55 de l'annexe A à la proposition de décision du Conseil concernant l'approbation par les Communautés européennes de la convention pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international (convention de Montréal), COM(2000) 446 final du 14 juillet 2000.

(6) JO L 240 1992, pp. 1-7.