24.7.2023   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

L 185/7


RÈGLEMENT (UE) 2023/1525 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL

du 20 juillet 2023

relatif au soutien à la production de munitions (ASAP)

LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 114 et son article 173, paragraphe 3,

vu la proposition de la Commission européenne,

après transmission du projet d’acte législatif aux parlements nationaux,

vu l’avis du Comité économique et social européen (1),

statuant conformément à la procédure législative ordinaire (2),

considérant ce qui suit:

(1)

La guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine a mis à l’épreuve l’industrie européenne de la défense et le marché européen des équipements de défense et a révélé certaines failles qui compromettent la capacité de cette industrie et de ce marché à répondre de manière sûre et en temps utile, comme il convient, aux besoins urgents des États membres en produits et systèmes de défense, tels que les munitions et les missiles, compte tenu du taux de consommation élevé de ces produits et systèmes lors d’un conflit de haute intensité.

(2)

Depuis le 24 février 2022, l’Union et ses États membres n’ont cessé d’intensifier leurs efforts pour contribuer à répondre aux besoins urgents de l’Ukraine en matière de défense. En outre, dans ce contexte, les chefs d’État ou de gouvernement de l’Union, confrontés à toujours plus d’instabilité, de concurrence stratégique et de menaces pour la sécurité, se sont réunis à Versailles le 11 mars 2022 et ont décidé d’assumer une plus grande responsabilité en ce qui concerne la propre sécurité de l’Union et de prendre de nouvelles mesures décisives pour renforcer la souveraineté européenne. Ils se sont engagés à "renforcer les capacités de défense européennes" et sont convenus d’augmenter les dépenses en matière de défense, d’intensifier la coopération au moyen de projets conjoints et d’acquisition conjointe de capacités de défense, de combler les lacunes, de stimuler l’innovation et de renforcer et de développer l’industrie de la défense de l’Union. La "boussole stratégique pour renforcer la sécurité et la défense de l’Union au cours de la prochaine décennie" (ci-après dénommée "boussole stratégique") a été approuvée par le Conseil le 21 mars 2022, puis par le Conseil européen le 24 mars 2022. La boussole stratégique souligne la nécessité d’accroître les dépenses dans le domaine de la défense et d’investir davantage dans les capacités, tant au niveau de l’Union qu’au niveau national.

(3)

Le 18 mai 2022, la Commission et le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité ont présenté une communication conjointe sur l’analyse des déficits d’investissement dans le domaine de la défense et sur la voie à suivre, soulignant l’existence, au sein de l’Union, de lacunes financières, industrielles et capacitaires dans le domaine de la défense. Le 19 juillet 2022, la Commission a présenté une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la mise en place de l’instrument visant à renforcer l’industrie européenne de la défense au moyen d’acquisitions conjointes (EDIRPA), qui a pour objet de renforcer la collaboration entre les États membres lors de la phase de passation de marchés afin de combler, de manière collaborative, les lacunes les plus urgentes et les plus critiques, en particulier celles engendrées par la réaction à la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine. L’EDIRPA contribuera à renforcer les acquisitions conjointes dans le domaine de la défense et, grâce au financement de l’Union qui y est associé, à consolider les capacités industrielles de l’Union dans le domaine de la défense et l’adaptation de l’industrie de la défense de l’Union aux changements structurels du marché résultant de la hausse de la demande imputable à de nouveaux enjeux, tels que le retour des conflits de haute intensité.

(4)

Compte tenu de la situation en Ukraine et des besoins urgents de ce pays en matière de défense, et notamment en munitions, le Conseil a convenu, le 20 mars 2023, d’une approche à trois niveaux visant à fournir à l’Ukraine un million d’obus d’artillerie dans le cadre d’un effort conjoint au cours des douze prochains mois. Il est convenu de livrer d’urgence à l’Ukraine des munitions sol-sol et des munitions d’artillerie ainsi que, si une demande est présentée dans ce sens, des missiles provenant des stocks existants ou du réagencement des priorités des commandes existantes. Il a en outre invité les États membres à acquérir conjointement auprès de l’industrie européenne de la défense (et de la Norvège) des munitions ainsi que, si une demande est présentée dans ce sens, des missiles, dans le cadre d’un projet existant de l’Agence européenne de défense (AED) ou au titre de projets complémentaires d’acquisition menés par les États membres, afin de reconstituer leurs stocks tout en permettant la poursuite du soutien à l’Ukraine. Pour soutenir ces efforts, le Conseil est convenu de mobiliser des financements appropriés, notamment par l’intermédiaire de la facilité européenne pour la paix (FEP). Le Conseil a en outre chargé la Commission de présenter des propositions concrètes afin de soutenir d’urgence la montée en puissance des capacités de production de l’industrie européenne de la défense, de sécuriser les chaînes d’approvisionnement, de faciliter des procédures efficaces d’acquisition, de combler les lacunes en matière de capacités de production et de promouvoir les investissements, y compris, le cas échéant, en mobilisant le budget de l’Union. Cette promotion des investissements est essentielle pour garantir que les propres besoins de l’Union en matière de sécurité sont satisfaits de manière adéquate à tout moment et que l’industrie de la défense et le marché intérieur de la défense de l’Union sont aptes à faire face aux défis actuels. Il est nécessaire d’agir en parallèle et de manière coordonnée sur ces trois niveaux étroitement liés. Afin d’assurer une mise en œuvre adéquate des trois niveaux, des réunions régulières au niveau des directeurs nationaux de l’armement avec la task-force pour les acquisitions conjointes dans le domaine de la défense [composée des représentants de la Commission, du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) et de l’AED] seront également organisées pour évaluer les besoins et les capacités industrielles ainsi que pour assurer la coordination étroite qui est nécessaire.

(5)

Le 13 avril 2023, le Conseil a adopté une mesure d’assistance d’un montant de 1 000 000 000 EUR au titre de la FEP afin de soutenir les forces armées ukrainiennes, ce qui permet de rembourser aux États membres les coûts des munitions sol-sol et des munitions d’artillerie, et éventuellement des missiles, dont ils ont fait don à l’Ukraine à partir des stocks existants ou à la suite du réagencement des priorités des commandes existantes au cours de la période comprise entre le 9 février et le 31 mai 2023. En ce qui concerne les acquisitions conjointes, à ce jour, 24 États membres et la Norvège ont signé l’accord de projet de l’AED pour l’acquisition collaborative de munitions.

(6)

Les efforts conjoints visant à permettre aux États membres de reconstituer leurs stocks épuisés et de soutenir l’Ukraine ne peuvent être efficaces que si du côté de l’offre, l’Union est en mesure de livrer en temps utile les produits de défense nécessaires. Toutefois, dans un contexte où les stocks s’amenuisent rapidement, où la production dans l’Union frôle sa capacité maximale du fait des commandes des États membres ou de pays tiers et où les prix s’envolent déjà, l’Union a besoin de prendre des mesures supplémentaires de politique industrielle pour assurer une montée en puissance rapide des capacités de fabrication.

(7)

Comme l’ont fait apparaître les travaux de la task-force pour les acquisitions conjointes dans le domaine de la défense sur la coordination des besoins à très court terme en matière d’acquisitions dans le domaine de la défense et le dialogue avec les États membres et les industriels de la défense de l’Union afin de soutenir les acquisitions conjointes en vue de reconstituer les stocks, eu égard notamment au soutien apporté à l’Ukraine, l’industrie de l’Union dispose de capacités de fabrication dans le secteur des munitions sol-sol, des munitions d’artillerie et des missiles (ci-après dénommés "produits de défense concernés"). Cependant, les capacités de production du secteur de l’industrie de la défense de l’Union sont adaptées à des temps où les enjeux étaient différents de ceux auxquels l’Union est confrontée actuellement. Les flux d’approvisionnement ont été adaptés en fonction d’une demande plus modeste, avec un niveau minimal de stocks et une diversification des fournisseurs à l’échelle mondiale afin de réduire les coûts, exposant ainsi le secteur de l’industrie de la défense de l’Union à des dépendances. Par conséquent, dans ce contexte, les capacités de fabrication actuelles et les chaînes d’approvisionnement et de valeur existantes ne permettent pas une livraison sûre et en temps utile de produits de défense permettant de répondre aux besoins des États membres en matière de sécurité et de continuer de soutenir les besoins ukrainiens, ce qui crée des tensions sur le marché des produits de défense concernés ainsi qu’un risque d’effet d’éviction. Une intervention supplémentaire au niveau de l’Union est donc nécessaire.

(8)

Conformément à l’article 173, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’Union doit contribuer à la réalisation de l’objectif consistant à accélérer l’adaptation de l’industrie aux changements structurels. Il semble donc approprié d’aider l’industrie de l’Union à accroître son volume de production, à réduire son délai de production et à remédier aux éventuels goulets d’étranglement ou facteurs susceptibles de retarder ou d’entraver la disponibilité et la fourniture en temps utile des produits de défense concernés.

(9)

Les mesures prises au niveau de l’Union devraient viser à renforcer la compétitivité et la résilience de la base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE) dans le domaine des munitions et des missiles, afin de permettre son adaptation urgente aux changements structurels.

(10)

À cette fin, il convient de mettre en place un instrument destiné à soutenir financièrement le renforcement de l’industrie tout au long des chaînes d’approvisionnement et de valeur liées à la production des produits de défense concernés dans l’Union (ci-après dénommé "instrument").

(11)

La structure spécifique, les conditions d’éligibilité et les critères prévus dans le présent règlement sont propres à cet instrument à court terme et sont déterminés par des circonstances spécifiques et la situation d’urgence actuelle.

(12)

L’instrument sera cohérent avec les initiatives collaboratives de l’Union liées à la défense, comme celles qui existent dans le cadre du Fonds européen de la défense, avec la proposition relative à l’EDIRPA et avec la FEP, et il engendrera des synergies avec d’autres programmes de l’Union. L’instrument est pleinement cohérent avec l’ambition de la boussole stratégique.

(13)

Le règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil (3) (ci-après dénommé "règlement financier") devrait s’appliquer à l’instrument, sauf disposition contraire.

(14)

Conformément à l’article 193, paragraphe 2, du règlement financier, une subvention peut être octroyée à une action déjà entamée, pourvu que le demandeur puisse établir la nécessité du démarrage de l’action avant la signature de la convention de subvention. Toutefois, les frais exposés avant la date de dépôt de la demande de subvention ne sont pas éligibles, sauf dans des cas exceptionnels dûment justifiés. Afin de répondre à l’appel du Conseil du 20 mars 2023 visant à accélérer la livraison des produits de défense concernés, il devrait être possible de prévoir, dans la décision de financement, des contributions financières en ce qui concerne des actions couvrant une période débutant à cette date.

(15)

Le présent règlement établit, pour toute la durée de l’instrument, une enveloppe financière qui constitue le montant de référence privilégiée, au sens du point 18 de l’accord interinstitutionnel du 16 décembre 2020 entre le Parlement européen, le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne sur la discipline budgétaire, la coopération en matière budgétaire et la bonne gestion financière, ainsi que sur de nouvelles ressources propres, comportant une feuille de route en vue de la mise en place de nouvelles ressources propres (4), pour le Parlement européen et le Conseil au cours de la procédure budgétaire annuelle.

(16)

Les possibilités prévues à l’article 73, paragraphe 4, du règlement (UE) 2021/1060 du Parlement européen et du Conseil (5) pourraient être appliquées à condition que le projet respecte les règles énoncées dans ledit règlement et le champ d’application du Fonds européen de développement régional et du Fonds social européen plus tel qu’il est défini, respectivement, dans le règlement (UE) 2021/1058 du Parlement européen et du Conseil (6) et le règlement (UE) 2021/1057 du Parlement européen et du Conseil (7). Conformément à l’article 24 du règlement (UE) 2021/1060, la Commission évalue les programmes nationaux modifiés présentés par l’État membre et formule des observations dans un délai de deux mois à compter de la présentation du programme modifié. Compte tenu de l’urgence de la situation, la Commission devrait s’efforcer d’achever sans retard indu l’évaluation des programmes nationaux modifiés.

(17)

Lorsqu’ils proposent des plans pour la reprise et la résilience modifiés ou nouveaux, conformément à l’article 21 du règlement (UE) 2021/241 du Parlement européen et du Conseil (8), les États membres devraient pouvoir proposer des mesures qui contribuent également aux objectifs de l’instrument, en conformité avec les finalités et les exigences fixées par la décision (UE, Euratom) 2020/2053 du Conseil (9), le règlement (UE) 2020/2094 du Conseil (10) et le règlement (UE) 2021/241. À cet effet, les États membres devraient, en particulier, envisager des mesures liées aux propositions qui ont été soumises dans le cadre d’un appel à propositions au titre de l’instrument et qui ont obtenu un label d’excellence conformément à l’instrument.

(18)

Conformément au règlement financier, au règlement (UE, Euratom) n° 883/2013 du Parlement européen et du Conseil (11) et aux règlements (CE, Euratom) n° 2988/95 (12), (Euratom, CE) n° 2185/96 (13) et (UE) 2017/1939 (14) du Conseil, les intérêts financiers de l’Union doivent être protégés par des mesures proportionnées, y compris par des mesures relatives à la prévention, à la détection et à la correction des irrégularités, notamment la fraude, ainsi qu’aux enquêtes en la matière, au recouvrement des fonds perdus, indûment versés ou mal employés et, s’il y a lieu, à l’application de sanctions administratives. En particulier, conformément aux règlements (Euratom, CE) n° 2185/96 et (UE, Euratom) n° 883/2013, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) a le pouvoir de mener des enquêtes administratives, y compris des contrôles et vérifications sur place, en vue d’établir l’existence éventuelle d’une fraude, d’un acte de corruption ou de toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union. Le Parquet européen est habilité, conformément au règlement (UE) 2017/1939, à mener des enquêtes et à engager des poursuites en matière d’infractions pénales portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, comme le prévoit la directive (UE) 2017/1371 du Parlement européen et du Conseil (15). Conformément au règlement financier, toute personne ou entité qui reçoit des fonds de l’Union doit coopérer pleinement à la protection des intérêts financiers de l’Union, accorder les droits et les accès nécessaires à la Commission, à l’OLAF, à la Cour des comptes et, dans le cas des États membres participant à une coopération renforcée en vertu du règlement (UE) 2017/1939, au Parquet européen, et veiller à ce que tout tiers participant à l’exécution des fonds de l’Union accorde des droits équivalents.

(19)

Les membres de l’Association européenne de libre-échange qui sont membres de l’Espace économique européen (EEE) devraient pouvoir participer à l’instrument en tant que pays associés dans le cadre de la coopération établie au titre de l’accord sur l’Espace économique européen (16), qui prévoit la mise en œuvre de leur participation aux programmes de l’Union sur la base d’une décision adoptée au titre de cet accord. Le présent règlement devrait exiger de ces pays tiers qu’ils accordent à l’ordonnateur compétent, à l’OLAF et à la Cour des comptes les droits et les accès nécessaires au plein exercice de leurs compétences respectives.

(20)

Compte tenu des spécificités de l’industrie de la défense, où la demande provient presque exclusivement d’États membres et de pays associés, lesquels contrôlent aussi l’ensemble de l’acquisition de produits et technologies liés à la défense, y compris les exportations, le fonctionnement du secteur de l’industrie de la défense ne suit pas les règles habituelles et les modèles économiques habituels régissant des marchés plus traditionnels. L’industrie ne réalise donc pas d’importants investissements industriels autofinancés; elle ne le fait qu’à la suite de commandes fermes. La réalisation d’investissements est certes conditionnée par des commandes fermes des États membres, mais la Commission peut intervenir de manière à réduire les risques liés aux investissements industriels, en proposant des subventions et des prêts qui favorisent une adaptation plus rapide aux changements structurels en cours sur le marché. Dans le contexte d’urgence actuel, le soutien de l’Union devrait couvrir jusqu’à 50 % des coûts directs éligibles afin de permettre aux bénéficiaires de mettre en œuvre des actions dès que possible, de réduire les risques liés à leurs investissements et donc de rendre plus rapidement disponibles les produits de défense concernés.

(21)

L’instrument devrait apporter un soutien financier, grâce aux moyens prévus dans le règlement financier, aux actions contribuant à garantir la disponibilité et la fourniture en temps utile des produits de défense concernés, telles que les activités de coordination et de mise en réseau dans le domaine industriel, l’accès au financement pour les entreprises participant à la fabrication des produits de défense concernés, la réservation de capacités, les processus industriels de reconditionnement des produits périmés, l’expansion, l’optimisation, la modernisation, la mise à niveau ou la réaffectation des capacités de production existantes ou la création de nouvelles capacités de production dans ce domaine, ainsi que la formation du personnel.

(22)

Étant donné que l’instrument vise à renforcer la compétitivité et l’efficacité de l’industrie de la défense de l’Union, seules les entités, qu’elles soient publiques ou privées, qui sont établies et ont leurs structures exécutives de gestion dans l’Union ou dans des pays associés devraient pouvoir bénéficier d’un soutien. Ces entités ne devraient pas être soumises au contrôle d’un pays tiers non associé ou d’une entité de pays tiers non associé ou bien elles devraient avoir fait l’objet d’un filtrage au sens du règlement (UE) 2019/452 du Parlement européen et du Conseil (17) et, lorsque cela est nécessaire, de mesures d’atténuation, compte tenu des objectifs visés à l’article 4 du présent règlement. Une entité qui est établie dans un pays tiers non associé ou une entité qui est établie dans l’Union ou dans un pays associé mais qui a ses structures exécutives de gestion dans un pays tiers non associé ne devrait pas pouvoir être éligible en tant que destinataire participant à une action.

(23)

Les entités établies dans l’Union ou dans un pays associé qui sont contrôlées par un pays tiers non associé ou une entité de pays tiers non associé, et qui n’ont pas fait l’objet d’un filtrage au sens du règlement (UE) 2019/452 et, lorsque cela est nécessaire, de mesures d’atténuation, ne devraient être éligibles en tant que destinataires que si des conditions strictes relatives aux intérêts de l’Union et de ses États membres en matière de sécurité et de défense, telles qu’elles sont établies dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune en vertu du titre V du traité sur l’Union européenne, y compris en ce qui concerne le renforcement de la BITDE, sont remplies. La participation de ces entités ne devrait pas être contraire aux objectifs de l’instrument. Dans ce contexte, il convient d’entendre par contrôle la capacité d’exercer une influence déterminante sur une entité, soit de manière directe, soit de manière indirecte par l’entremise d’une ou de plusieurs entités intermédiaires. Les demandeurs devraient fournir toutes les informations pertinentes sur les infrastructures, les installations, les biens et les ressources devant être utilisés dans le cadre de l’action. Les préoccupations des États membres concernant la sécurité de l’approvisionnement devraient également être prises en considération à cet égard. Compte tenu de l’urgence de la situation découlant de la crise actuelle de l’approvisionnement en munitions, l’instrument devrait tenir compte des chaînes d’approvisionnement existantes.

(24)

Il convient que les infrastructures, les installations, les biens et les ressources des destinataires participant à une action soutenue au titre de l’instrument soient situés sur le territoire d’un État membre ou d’un pays associé pendant toute la durée de l’action.

(25)

L’instrument ne devrait pas financer la montée en puissance des capacités de production de produits de défense concernés qui sont soumis à une restriction imposée par un pays tiers non associé ou une entité de pays tiers non associé limitant la capacité des États membres à utiliser ces produits de défense concernés. Le destinataire devrait veiller à ce que l’action financée par l’instrument permette la livraison des produits en Ukraine.

(26)

En vertu de l’article 85 de la décision (UE) 2021/1764 du Conseil (18), les personnes physiques et les organes et institutions établis dans des pays et territoires d’outre-mer (PTOM) peuvent bénéficier d’un financement, sous réserve des règles et des objectifs de l’instrument ainsi que des dispositions susceptibles de s’appliquer à l’État membre dont relève le PTOM concerné.

(27)

Lors de l’évaluation des propositions soumises par les demandeurs, la Commission devrait accorder une attention particulière à la contribution qu’ils apportent à la réalisation des objectifs de l’instrument. Les propositions devraient notamment être évaluées au regard de leur contribution à l’augmentation, à la montée en puissance, à la réservation ou à la modernisation des capacités de fabrication, ainsi qu’à la reconversion et au perfectionnement professionnels de la main-d’œuvre concernée. Elles devraient également être évaluées par rapport à leur contribution à la réduction du délai de production des produits de défense concernés, notamment par des mécanismes de réagencement des priorités des commandes, à la détection et à l’élimination des goulets d’étranglement tout au long des chaînes d’approvisionnement ainsi qu’au renforcement de la résilience de ces chaînes d’approvisionnement grâce au développement et à la mise en œuvre d’une coopération transfrontière entre les entreprises, en particulier, dans une mesure significative, les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises à moyenne capitalisation opérant dans les chaînes d’approvisionnement concernées.

(28)

Lors de la conception, de l’octroi et de la mise en œuvre du soutien financier de l’Union, la Commission devrait veiller tout particulièrement à ce que ce soutien n’altère pas les conditions de concurrence dans le marché intérieur.

(29)

En outre, la crise résultant de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine a non seulement révélé des lacunes dans le secteur de l’industrie de la défense de l’Union mais a également mis à mal le fonctionnement du marché intérieur des produits de défense. En effet, le présent contexte géopolitique entraîne une augmentation significative de la demande qui affecte le fonctionnement du marché intérieur de la production et de la vente des produits de défense concernés ainsi que de leurs composants dans l’Union. Si certains États membres ont pris ou sont susceptibles de prendre des mesures pour préserver leurs propres stocks dans le cadre de la sécurité nationale, d’autres éprouvent des difficultés à accéder aux biens nécessaires à la fabrication ou à l’acquisition des produits de défense concernés. Parfois, des difficultés d’accès à une matière première ou à un composant spécifique paralysent des chaînes de production toutes entières. Pour assurer le fonctionnement du marché intérieur, il est nécessaire d’établir, de manière coordonnée, des règles harmonisées visant à augmenter la sécurité de l’approvisionnement en produits de défense concernés. Ces mesures devraient prévoir l’accélération des procédures d’octroi des autorisations et la simplification des procédures de passation de marchés. Ces mesures devraient être fondées sur l’article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

(30)

Compte tenu de l’importance de garantir la sécurité de l’approvisionnement en produits de défense concernés, les États membres devraient veiller à ce que toute demande administrative liée à la planification, à la construction et à l’exploitation des installations de production, au transfert d’intrants au sein de l’Union ainsi qu’à la qualification et à la certification des produits finis concernés soit traitée de manière efficace et en temps utile.

(31)

Pour atteindre l’objectif général de politique publique de sécurité, il est nécessaire que les installations de production liées à la production des produits de défense concernés soient mises en place dans les meilleurs délais, tout en réduisant au maximum la charge administrative. Aussi les États membres devraient-ils traiter le plus rapidement possible les demandes liées à la planification, à la construction et à l’exploitation d’usines et d’installations destinées à la production des produits de défense concernés. La priorité devrait être donnée à ces demandes lors de la mise en balance des intérêts juridiques dans un cas d’espèce.

(32)

Compte tenu de l’objectif du présent règlement, et de la situation d’urgence et du contexte exceptionnel de l’adoption du présent règlement, les États membres devraient envisager de recourir aux dérogations liées à la défense prévues par le droit national et le droit de l’Union applicable, au cas par cas, s’ils estiment que le recours à de telles dérogations faciliterait la réalisation dudit objectif. Cela pourrait notamment s’appliquer aux dispositions du droit de l’Union sur les questions d’environnement, de santé et de sécurité, qui est indispensable pour améliorer la protection de la santé humaine et de l’environnement et pour parvenir à un développement durable et sûr. La mise en œuvre de ces dispositions de droit pourrait toutefois aussi générer des obstacles réglementaires limitant la capacité de l’industrie de la défense de l’Union à intensifier la production et la livraison des produits de défense pertinents. Il relève de la responsabilité collective de l’Union et de ses États membres d’examiner d’urgence toute mesure qu’ils pourraient prendre pour atténuer les obstacles éventuels. Aucune mesure de ce type, que ce soit au niveau de l’Union, au niveau régional ou au niveau national, ne devrait compromettre l’environnement, la santé et la sécurité.

(33)

La directive 2009/81/CE du Parlement européen et du Conseil (19) vise à harmoniser les procédures de passation de marchés pour l’attribution de marchés publics dans le domaine de la défense et de la sécurité, ce qui permet de répondre aux exigences de sécurité des États membres et aux obligations découlant du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Ladite directive contient notamment des dispositions spécifiques régissant les situations d’urgence résultant d’une crise, notamment des délais raccourcis pour la réception des offres et la possibilité de recourir à la procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché. Toutefois, l’extrême urgence engendrée par la crise actuelle de l’approvisionnement en munitions pourrait être incompatible même avec ces dispositions dans les cas où deux États membres ou plus ont l’intention de procéder à des acquisitions conjointes. Dans certains cas, la seule solution pour garantir la protection des intérêts de ces États membres en matière de sécurité est d’ouvrir un accord-cadre existant à des pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices des États membres qui n’y étaient pas initialement parties, même si cette possibilité n’avait pas été prévue dans l’accord-cadre initial.

(34)

Conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, les modifications apportées à un marché public doivent être strictement limitées à ce qui est absolument nécessaire au vu des circonstances et respecter dans toute la mesure du possible les principes de non-discrimination, de transparence et de proportionnalité. À cet égard, il devrait être possible de déroger à la directive 2009/81/CE en augmentant les quantités prévues dans l’accord-cadre tout en ouvrant celui-ci aux pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices d’autres États membres. En ce qui concerne ces quantités supplémentaires, ces pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices devraient bénéficier des mêmes conditions que le pouvoir adjudicateur initial ou l’entité adjudicatrice initiale qui a conclu l’accord-cadre initial. En pareil cas, le pouvoir adjudicateur initial ou l’entité adjudicatrice initiale devrait également autoriser tout opérateur économique qui remplit les conditions initialement fixées par le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice dans la procédure de passation de marché pour l’accord-cadre initial, y compris les exigences en matière de sélection qualitative visées aux articles 39 à 46 de la directive 2009/81/CE, à se joindre audit accord-cadre. En outre, des mesures de transparence appropriées devraient être prises pour garantir l’information de toutes les parties potentiellement intéressées. Afin de limiter les effets de ces modifications sur le bon fonctionnement du marché intérieur et d’éviter des distorsions de concurrence disproportionnées, il ne devrait être possible de conclure pareilles modifications des accords-cadres que jusqu’au 30 juin 2025.

(35)

Pour être compétitive, innovante et résiliente et pour pouvoir renforcer ses capacités de production, la BITDE doit avoir accès à des financements tant publics que privés. Comme le prévoit la communication de la Commission du 15 février 2022 intitulée "Contribution de la Commission à la défense européenne", les initiatives de l’Union en matière de finance durable demeurent cohérentes avec les efforts déployés par l’Union pour faciliter un accès suffisant de l’industrie européenne de la défense aux financements et aux investissements. Dans ce contexte, le cadre de l’Union pour la finance durable n’empêche pas les investissements dans des activités liées à la défense. L’industrie de la défense de l’Union contribue de manière essentielle à la résilience et à la sécurité de l’Union et, partant, à la paix et à la durabilité sociale. Dans le cadre des initiatives de l’Union sur les politiques en matière de finance durable, les armes controversées soumises à des conventions internationales interdisant leur développement, leur production, leur stockage, leur utilisation, leur transfert et leur livraison, et signées par les États membres, sont considérées comme incompatibles avec les exigences de durabilité sociale. Le secteur de l’industrie de la défense de l’Union fait l’objet d’un contrôle réglementaire étroit mis en œuvre par les États membres pour le transfert et l’exportation de biens militaires et de biens à double usage. Dans cette perspective, un engagement des acteurs financiers nationaux et européens – tels que les banques et institutions nationales de développement – visant à soutenir l’industrie européenne de la défense enverrait un signal fort au secteur privé. Tout en poursuivant pleinement ses autres missions de financement du développement économique et des politiques publiques, y compris la double transition verte et numérique, et conformément à l’article 309 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ainsi qu’à ses statuts, la Banque européenne d’investissement devrait renforcer son soutien à l’industrie européenne de la défense et aux acquisitions conjointes, au-delà du soutien qu’elle apporte actuellement au double usage, lorsque de tels investissements serviraient clairement la mise en œuvre des priorités de la boussole stratégique.

(36)

Les entreprises des chaînes de valeur des produits de défense concernés devraient avoir accès au financement par l’emprunt afin d’accélérer les investissements nécessaires à l’accroissement de leurs capacités de fabrication. L’instrument devrait faciliter l’accès au financement des entreprises de l’Union qui opèrent dans le secteur des munitions et des missiles. Le présent règlement devrait notamment garantir que ces entreprises bénéficient des mêmes conditions que celles qui sont offertes aux autres entreprises, avec la prise en charge de tout coût supplémentaire éventuel qui concernerait spécifiquement le secteur de la défense.

(37)

La Commission devrait pouvoir mettre en place un mécanisme spécifique dans le cadre des activités de facilitation des investissements appelé "Fonds de montée en puissance". Le Fonds de montée en puissance devrait être mis en œuvre en gestion indirecte. À cet égard, la Commission devrait étudier la manière la plus appropriée de mobiliser le budget de l’Union pour débloquer des investissements publics et privés à l’appui de la montée en puissance rapide recherchée, par exemple au moyen d’un mécanisme de mixage, y compris dans le cadre du Fonds InvestEU établi par le règlement (UE) 2021/523 du Parlement européen et du Conseil (20), en étroite coopération avec ses partenaires chargés de la mise en œuvre. Les activités du Fonds de montée en puissance devraient soutenir l’augmentation des capacités de fabrication dans le secteur des munitions et des missiles en offrant des possibilités d’accroître les financements disponibles pour les entreprises tout au long des chaînes de valeur.

(38)

Afin d’assurer des conditions uniformes d’exécution du présent règlement, des compétences d’exécution devraient être conférées à la Commission en ce qui concerne l’adoption du programme de travail et l’attribution d’un financement aux actions sélectionnées. Ces compétences devraient être exercées conformément au règlement (UE) n° 182/2011 du Parlement européen et du Conseil (21).

(39)

Étant donné que l’objectif du présent règlement, à savoir faire face aux répercussions de la crise en matière de sécurité, ne peut pas être atteint de manière suffisante par les États membres mais peut, en raison des dimensions et des effets de l’action proposée, l’être mieux au niveau de l’Union, celle-ci peut prendre des mesures, conformément au principe de subsidiarité consacré à l’article 5 du traité sur l’Union européenne. Conformément au principe de proportionnalité énoncé audit article, le présent règlement n’excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.

(40)

Le présent règlement devrait s’appliquer sans préjudice des règles de concurrence de l’Union, en particulier des articles 101 à 109 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et des actes juridiques qui donnent effet à ces articles.

(41)

Conformément à l’article 41, paragraphe 2, du traité sur l’Union européenne, les dépenses opérationnelles découlant du titre V, chapitre 2, du traité sur l’Union européenne sont à la charge du budget de l’Union, à l’exception des dépenses afférentes à des opérations ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense.

(42)

En vertu des points 22 et 23 de l’accord interinstitutionnel du 13 avril 2016"Mieux légiférer" (22), le présent règlement devrait être évalué sur la base des informations collectées conformément aux exigences spécifiques en matière de suivi, tout en évitant une réglementation excessive et des lourdeurs administratives, en particulier pour les États membres. S’il y a lieu, ces exigences devraient contenir des indicateurs mesurables pour servir de base à l’évaluation des effets du présent règlement sur le terrain. Il convient que la Commission procède à une évaluation du présent règlement au plus tard le 30 juin 2024, en vue notamment de présenter des propositions de modification du présent règlement, le cas échéant.

(43)

Compte tenu du danger imminent pour la sécurité d’approvisionnement provoqué par la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, le présent règlement devrait entrer en vigueur le jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

(44)

Le présent règlement devrait s’appliquer sans préjudice du caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres,

ONT ADOPTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT:

CHAPITRE I

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Article premier

Objet

Le présent règlement établit un ensemble de mesures et définit un budget visant à renforcer de toute urgence la réactivité et la capacité de la base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE) à garantir la disponibilité et la fourniture en temps utile de munitions sol-sol, de munitions d’artillerie ainsi que de missiles (ci-après dénommés "produits de défense concernés"), notamment au moyen des éléments suivants:

a)

un instrument soutenant financièrement le renforcement industriel pour la production des produits de défense concernés dans l’Union, y compris par la fourniture de leurs composants (ci-après dénommé "instrument");

b)

la mise en place de mécanismes, de principes et de règles temporaires destinés à garantir la disponibilité en temps utile et de manière durable des produits de défense concernés pour leurs acquéreurs dans l’Union.

Sur la base d’une évaluation, menée en vertu de l’article 23, des résultats obtenus par la mise en œuvre du présent règlement d’ici au 30 juin 2024, notamment en ce qui concerne l’évolution du contexte en matière de sécurité, la Commission peut envisager l’opportunité d’étendre l’applicabilité de l’ensemble de mesures prévues dans le présent règlement et d’allouer le budget supplémentaire correspondant.

Article 2

Définitions

Aux fins du présent règlement, on entend par:

1)

"matières premières": les matières nécessaires à la production des produits de défense concernés;

2)

"goulet d’étranglement": un point de congestion dans un système de production qui interrompt ou ralentit gravement la production;

3)

"destinataire": une entité avec laquelle un accord ou une convention de financement a été signé ou à laquelle une décision de financement a été notifiée;

4)

"demandeur": une personne physique ou une entité qui a déposé une demande dans le cadre d’une procédure d’attribution d’une subvention;

5)

"contrôle": la capacité d’exercer une influence déterminante sur une entité, soit de manière directe, soit de manière indirecte par l’entremise d’une ou de plusieurs entités intermédiaires;

6)

"structure exécutive de gestion": un organe d’une entité, désigné conformément au droit national et, le cas échéant, placé sous l’autorité du directeur général, qui est habilité à définir la stratégie, les objectifs et l’orientation générale de cette entité et qui assure la supervision et le suivi de la prise de décisions de l’entité en matière de gestion;

7)

"entité": une personne morale constituée et reconnue comme telle en vertu du droit de l’Union, du droit national ou du droit international, qui est dotée de la personnalité juridique et de la capacité à agir en son nom propre, à exercer des droits et à être soumise à des obligations, ou une entité qui est dépourvue de personnalité juridique visée à l’article 197, paragraphe 2, point c), du règlement financier;

8)

"informations classifiées": les informations ou le matériel, de tout type, dont la divulgation non autorisée pourrait causer, à des degrés divers, un préjudice aux intérêts de l’Union ou d’un ou de plusieurs des États membres, et qui portent un marquage de classification de l’UE ou un marquage de classification correspondant, tel qu’il est établi dans l’accord entre les États membres de l’Union européenne, réunis au sein du Conseil, relatif à la protection des informations classifiées échangées dans l’intérêt de l’Union européenne (23);

9)

"informations sensibles": les informations et les données qui doivent être protégées contre tout accès ou toute divulgation non autorisés en raison d’obligations prévues dans le droit de l’Union ou dans le droit national ou afin de protéger la vie privée ou la sécurité d’une personne physique ou morale;

10)

"entité de pays tiers non associé": une entité qui est établie dans un pays tiers non associé ou, lorsqu’elle est établie dans l’Union ou dans un pays associé, qui a ses structures exécutives de gestion dans un pays tiers non associé;

11)

"délai de production": la période comprise entre le moment où un bon de commande a été passé et celui où le fabricant a exécuté la commande;

12)

"produits de défense concernés": les munitions sol-sol et les munitions d’artillerie ainsi que les missiles;

13)

"opération de mixage": une action soutenue par le budget de l’Union, y compris dans le cadre d’un mécanisme ou d’une plateforme de mixage au sens de l’article 2, point 6, du règlement financier, qui combine des formes d’aide non remboursable ou des instruments financiers issus du budget de l’Union et des formes d’aide remboursable provenant d’institutions financières de développement ou d’autres institutions financières publiques, ainsi que d’institutions financières commerciales et d’investisseurs commerciaux;

14)

"label d’excellence": un label de qualité démontrant qu’une proposition soumise dans le cadre d’un appel à propositions au titre de l’instrument a dépassé tous les seuils d’évaluation établis dans le programme de travail, mais n’a pas pu être financée en raison de l’insuffisance du budget disponible dans le programme de travail pour cet appel à propositions, et pourrait recevoir un soutien d’autres sources de financement de l’Union ou nationales.

Article 3

Pays tiers associés à l’instrument

L’instrument est ouvert à la participation des membres de l’Association européenne de libre-échange qui sont membres de l’Espace économique européen (ci-après dénommés "pays associés"), conformément aux conditions fixées dans l’accord sur l’Espace économique européen.

CHAPITRE II

L’INSTRUMENT

Article 4

Objectifs de l’instrument

1.   L’instrument a pour objectif de favoriser l’efficacité et la compétitivité de la base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE) afin de soutenir la montée en puissance de la capacité de production et la fourniture en temps utile des produits de défense concernés par un renforcement industriel.

2.   Le renforcement industriel consiste notamment à initier et à accélérer l’adaptation de l’industrie aux changements structurels rapides imposés par la crise d’approvisionnement affectant les produits de défense concernés qui sont nécessaires pour la reconstitution rapide des stocks de munitions et de missiles des États membres et de l’Ukraine. Ceci comprend l’amélioration de la capacité d’adaptation des chaînes d’approvisionnement pour les produits de défense concernés et l’accélération d’une telle adaptation, la création de capacités de fabrication ou leur montée en puissance, et une réduction du délai de production pour les produits de défense concernés dans l’ensemble de l’Union, notamment grâce à l’intensification et à l’élargissement de la coopération transfrontière entre les entités concernées.

Article 5

Budget

1.   L’enveloppe financière pour l’exécution de l’instrument pour la période du 25 juillet 2023 au 30 juin 2025 est établie à 500 millions d’euros en prix courants.

2.   Dans les limites de l’enveloppe financière visée au paragraphe 1 du présent article, un montant maximal de 50 millions d’euros peut être utilisé comme opération de mixage dans le cadre du Fonds de montée en puissance prévu à l’article 15.

3.   L’enveloppe financière visée au paragraphe 1 peut également être consacrée à l’assistance technique et administrative apportée à l’exécution de l’instrument, sous la forme notamment d’activités de préparation, de suivi, de contrôle, d’audit et d’évaluation, y compris de systèmes informatiques internes.

4.   Les engagements budgétaires pour des activités dont la réalisation s’étend sur plus d’un exercice peuvent être fractionnés sur plusieurs exercices en tranches annuelles.

5.   Le budget de l’instrument peut être renforcé lorsque cela est nécessaire ou lorsque l’applicabilité du présent règlement est prolongée conformément à l’article 1er, deuxième alinéa.

Article 6

Financement cumulé et alternatif

1.   L’instrument est mis en œuvre en synergie avec d’autres programmes de l’Union. Une action ayant reçu une contribution au titre de l’instrument peut aussi recevoir une contribution au titre d’un autre programme de l’Union, pour autant que les contributions ne couvrent pas les mêmes coûts. Les règles du programme de l’Union concerné s’appliquent à la contribution qu’il apporte à l’action. Le financement cumulé ne dépasse pas le total des coûts éligibles de l’action. Le soutien au titre des différents programmes de l’Union peut être calculé au prorata, conformément aux documents énonçant les conditions du soutien.

2.   Pour se voir octroyer un label d’excellence, les actions doivent respecter les conditions cumulatives suivantes:

a)

elles ont fait l’objet d’une évaluation dans le cadre d’un appel à propositions au titre de l’instrument;

b)

elles respectent les exigences minimales de qualité de cet appel à propositions; et

c)

elles ne sont pas financées au titre de cet appel à propositions en raison de contraintes budgétaires.

3.   Lorsqu’ils proposent des plans pour la reprise et la résilience modifiés ou nouveaux conformément au règlement (UE) 2021/241, les États membres peuvent inclure des mesures qui contribuent également aux objectifs de l’instrument, notamment des mesures liées à des propositions soumises dans le cadre d’un appel à propositions au titre de l’instrument qui ont obtenu un label d’excellence.

4.   L’article 8, paragraphe 5, s’applique par analogie aux actions financées conformément au présent article.

Article 7

Formes de financement de l’Union

1.   L’instrument est mis en œuvre en gestion directe et, en ce qui concerne la gestion du Fonds de montée en puissance prévu à l’article 15 du présent règlement, en gestion indirecte avec les organismes visés à l’article 62, paragraphe 1, point c), du règlement financier. L’instrument peut fournir un financement sous l’une ou l’autre des formes prévues par le règlement financier, y compris sous la forme d’instruments financiers dans le cadre d’opérations de mixage. Les opérations de mixage sont effectuées conformément au titre X du règlement financier, au règlement (UE) 2021/523 et à l’article 15 du présent règlement.

2.   Par dérogation à l’article 193, paragraphe 2, du règlement financier, les contributions financières peuvent, lorsque cela est pertinent et nécessaire à la mise en œuvre d’une action, couvrir des actions entamées avant la date de soumission de la proposition pour ces actions, à condition que ces actions n’aient pas débuté avant le 20 mars 2023 et n’aient pas été achevées avant la signature de la convention de subvention.

Article 8

Actions éligibles

1.   Seules les actions mettant en œuvre les objectifs énoncés à l’article 4 sont éligibles à un financement.

2.   L’instrument apporte un soutien financier aux actions visant à remédier aux goulets d’étranglement recensés dans les capacités de production et les chaînes d’approvisionnement en vue de sécuriser et d’accélérer la production des produits de défense concernés afin de garantir l’approvisionnement effectif en produits de défense concernés et leur disponibilité en temps utile.

3.   Les actions éligibles portent sur une ou plusieurs des activités suivantes et sont exclusivement liées aux capacités de production des produits de défense concernés, y compris leurs composants et matières premières correspondantes, dans la mesure où ils sont destinés ou utilisés entièrement pour la production de produits de défense concernés:

a)

l’optimisation, l’expansion, la modernisation, la mise à niveau ou la réaffectation de capacités de production existantes, ou la création de nouvelles capacités de production, en rapport avec les produits de défense concernés ou leurs composants et matières premières correspondantes, dans la mesure où ces composants et matières premières sont utilisés comme intrants directs pour la production des produits de défense concernés, notamment en vue d’accroître la capacité de production ou de réduire les délais de production, y compris via l’achat ou l’acquisition des machines-outils nécessaires et de tout autre intrant nécessaire;

b)

la mise en place de partenariats industriels transfrontières, notamment au moyen de partenariats public-privé ou d’autres formes de coopération industrielle, dans le cadre d’un effort industriel conjoint, y compris des activités visant à coordonner l’approvisionnement en composants et en matières premières correspondantes ou leur réservation, dans la mesure où ces composants et matières premières sont utilisés comme intrants directs pour la production des produits de défense concernés, ainsi qu’à coordonner des capacités de production et des plans de production;

c)

la constitution et la mise à disposition de capacités de fabrication réservées pour les produits de défense concernés, leurs composants et matières premières correspondantes, dans la mesure où ces composants et matières premières sont utilisés comme intrants directs pour la production de produits de défense concernés, conformément aux volumes de production commandés ou prévus;

d)

les essais, y compris les infrastructures nécessaires, et, le cas échéant, la certification du reconditionnement des produits de défense concernés en vue de remédier à leur obsolescence et de les rendre utilisables par les utilisateurs finaux;

e)

la formation, la reconversion ou le perfectionnement professionnels du personnel en rapport avec les activités visées aux points a) à d);

f)

l’amélioration de l’accès au financement pour les opérateurs économiques concernés actifs dans la production ou la mise à disposition des produits de défense concernés, par la compensation de tout coût supplémentaire découlant spécifiquement du secteur de l’industrie de la défense, pour les investissements liés aux activités visées aux points a) à e).

4.   Les actions suivantes ne sont pas éligibles au financement au titre de l’instrument:

a)

les actions relatives à la production de biens ou la livraison de services qui sont interdites par le droit international applicable;

b)

les actions relatives à la production d’armes létales autonomes sans la possibilité d’un contrôle humain significatif sur les décisions de sélection et d’engagement prises dans le cadre de frappes visant des êtres humains;

c)

les actions ou parties d’actions qui sont déjà entièrement financées par d’autres sources publiques ou privées.

5.   Lorsqu’elle conclut des accords avec différents destinataires, la Commission veille à ce que l’instrument ne serve à financer que des activités qui bénéficient exclusivement aux capacités de production des produits de défense concernés, ou de leurs composants et matières premières correspondantes, dans la mesure où ils sont entièrement destinés ou utilisés pour la production de produits de défense concernés.

Article 9

Taux de financement

1.   L’instrument finance jusqu’à 35 % des coûts éligibles d’une action éligible liée aux capacités de production de produits de défense concernés, et jusqu’à 40 % des coûts éligibles d’une action éligible liée aux capacités de production des composants et des matières premières, dans la mesure où ils sont entièrement destinés ou utilisés pour la production de produits de défense concernés.

2.   Par dérogation au paragraphe 1, une action peut bénéficier d’un taux de financement majoré de 10 points de pourcentage supplémentaires lorsqu’elle remplit l’un des critères suivants:

a)

lorsque les demandeurs démontrent une contribution à la création d’une nouvelle coopération transfrontière entre des entités établies dans des États membres ou des pays associés, telle qu’elle est décrite à l’article 8, paragraphe 3, point b);

b)

lorsque les demandeurs s’engagent à donner la priorité, pour la durée de l’action, aux commandes découlant de:

i)

l’acquisition conjointe des produits de défense concernés par au moins trois États membres ou pays associés; ou

ii)

l’acquisition de produits de défense concernés par au moins un État membre en vue de leur transfert vers l’Ukraine; ou

c)

lorsque le bénéficiaire est une PME ou une entreprise à moyenne capitalisation établie dans un État membre ou un pays associé, ou lorsque la majorité des bénéficiaires participant à un groupement sont des PME ou des entreprises à moyenne capitalisation établies dans des États membres ou des pays associés.

L’engagement visé au premier alinéa, point b), s’applique à l’acquisition de tout produit bénéficiant directement ou indirectement d’un soutien au titre de l’instrument.

La majoration du taux de financement visée au premier alinéa est fixée à 10 points de pourcentage supplémentaires, même lorsque plus d’un des critères énoncés aux points a), b) et c) dudit alinéa sont remplis.

Par dérogation au paragraphe 1 du présent article, le soutien accordé au titre de l’instrument peut couvrir jusqu’à 100 % des coûts éligibles d’une activité visée à l’article 8, paragraphe 3, point f).

3.   Les destinataires démontrent que les coûts d’une action qui ne sont pas couverts par le soutien de l’Union doivent être couverts par d’autres moyens de financement.

Article 10

Entités éligibles

1.   Les destinataires participant à une action soutenue au titre de l’instrument sont des entités, qu’elles soient publiques ou privées, qui sont établies et ont leurs structures exécutives de gestion dans l’Union ou dans un pays associé. Ces destinataires ne sont pas soumis au contrôle d’un pays tiers non associé ou d’une entité de pays tiers non associé ou bien ils ont fait l’objet d’un filtrage au sens du règlement (UE) 2019/452 et, lorsque cela est nécessaire, de mesures d’atténuation, compte tenu des objectifs visés à l’article 4 du présent règlement.

2.   Une entreprise établie dans l’Union ou dans un pays associé qui est contrôlée par un pays tiers non associé ou une entité de pays tiers non associé et qui n’a pas fait l’objet d’un filtrage au sens du règlement (UE) 2019/452 et, lorsque cela est nécessaire, de mesures d’atténuation n’est éligible en tant que destinataire participant à une action soutenue au titre de l’instrument que si des garanties, approuvées par l’État membre ou le pays associé dans lequel l’entreprise est établie, sont mises à la disposition de la Commission conformément aux procédures nationales.

Les garanties fournissent des assurances selon lesquelles la participation de cette entreprise à une action ne serait contraire ni aux intérêts de l’Union et de ses États membres en matière de sécurité et de défense tels qu’ils sont définis dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune en application du titre V du traité sur l’Union européenne, ni aux objectifs énoncés à l’article 4 du présent règlement.

Les garanties attestent, en particulier, que, aux fins d’une action, des mesures sont en place pour que:

a)

le destinataire soit en mesure de réaliser l’action et de produire des résultats sans aucune restriction concernant ses infrastructures, ses installations, ses actifs, ses ressources, sa propriété intellectuelle ou son savoir-faire nécessaires aux fins de l’action, et sans aucune restriction portant atteinte à ses capacités et normes nécessaires à la réalisation de l’action; et

b)

un pays tiers non associé ou une entité de pays tiers non associé ne puisse pas avoir accès aux informations sensibles ou classifiées relatives à l’action et que les salariés ou les autres personnes participant à l’action disposent d’une habilitation de sécurité nationale délivrée par un État membre ou un pays associé, s’il y a lieu.

3.   Si l’État membre ou le pays associé dans lequel l’entreprise est établie le juge opportun, des garanties supplémentaires peuvent être fournies.

4.   Les États membres adressent à la Commission une notification concernant les mesures d’atténuation appliquées au sens du règlement (UE) 2019/452 qui sont visées au paragraphe 1 du présent article ou les garanties visées au paragraphe 2 du présent article. Des informations complémentaires sur les mesures d’atténuation appliquées ou les garanties sont mises à la disposition de la Commission sur demande. La Commission communique au comité visé à l’article 16 toute notification qui lui a été adressée conformément au présent paragraphe.

5.   Les infrastructures, les installations, les biens et les ressources des destinataires participant à une action qui sont utilisés aux fins d’une action soutenue au titre de l’instrument sont situés sur le territoire d’un État membre ou d’un pays associé pendant toute la durée de l’action.

6.   L’instrument n’apporte pas de soutien financier à la montée en puissance des capacités de production de produits de défense concernés qui sont soumis à une restriction imposée par un pays tiers non associé ou une entité de pays tiers non associé limitant la capacité des États membres à les utiliser. Le destinataire met tout en œuvre pour que l’action financée au titre de l’instrument permette la livraison des produits en Ukraine.

Article 11

Critères d’attribution

Chaque proposition soumise par un demandeur est évaluée sur la base d’un ou de plusieurs des critères suivants, qui permettent de mesurer la contribution des actions concernées au renforcement industriel recherché pour favoriser l’efficacité et la compétitivité globale de la BITDE en ce qui concerne les produits de défense concernés:

a)

l’augmentation des capacités de production dans l’Union: la contribution de l’action à l’augmentation, à la montée en puissance ou à la réservation des capacités de fabrication, à leur modernisation ou à la reconversion et au perfectionnement professionnels de la main-d’œuvre concernée;

b)

la réduction du délai de production: la contribution de l’action à la satisfaction, en temps utile, de la demande exprimée dans le cadre de la passation de marché sous l’angle de la réduction des délais de production, y compris par des mécanismes de réagencement des priorités des commandes;

c)

l’élimination des goulets d’étranglement en matière d’approvisionnement et de production: la contribution de l’action à la détermination rapide et à l’élimination rapide et durable de tout goulet d’étranglement concernant l’approvisionnement (matière première ou tout autre intrant) ou la production (capacité de fabrication);

d)

la résilience grâce à la coopération transfrontière: la contribution de l’action à la mise en place et à la mise en œuvre de la coopération transfrontière entre des entreprises établies dans des États membres ou des pays associés différents, en y faisant participer en particulier, de manière significative, des PME ou des entreprises à moyenne capitalisation en tant que destinataires, sous-traitants ou autres entreprises dans la chaîne d’approvisionnement;

e)

soutien à l’acquisition: la démonstration apportée par les demandeurs du lien entre l’action et les nouvelles commandes résultant de l’acquisition conjointe de produits de défense concernés par au moins trois États membres ou pays associés, en particulier si l’acquisition a lieu dans un cadre défini par l’Union;

f)

la qualité du plan de mise en œuvre de l’action, y compris en ce qui concerne ses processus et son suivi.

La Commission octroie, par la voie d’actes d’exécution, le financement au titre du présent règlement. Ces actes d’exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d’examen visée à l’article 16, paragraphe 3.

Article 12

Programme de travail

1.   L’instrument est mis en œuvre au moyen d’un programme de travail conformément à l’article 110 du règlement financier. Le programme de travail mentionne, le cas échéant, le montant total réservé à des opérations de mixage.

2.   Le programme de travail énonce les priorités de financement compte tenu des travaux de la task-force pour les acquisitions conjointes dans le domaine de la défense.

3.   La Commission adopte, par la voie d’un acte d’exécution, le programme de travail visé au paragraphe 1 du présent article. Cet acte d’exécution est adopté en conformité avec la procédure d’examen visée à l’article 16, paragraphe 3.

CHAPITRE III

SÉCURITÉ D’APPROVISIONNEMENT

Article 13

Accélération de la procédure d’octroi des autorisations afin de garantir la disponibilité et la fourniture en temps utile des produits de défense concernés

1.   Les États membres veillent à ce que les demandes administratives liées à la planification, à la construction et à l’exploitation des installations de production, au transfert d’intrants au sein de l’Union ainsi qu’à la qualification et à la certification des produits finis soient traitées de manière efficiente et en temps utile. À cette fin, toutes les autorités nationales concernées veillent à ce que ces demandes fassent l’objet du traitement le plus rapide possible d’un point de vue légal.

2.   Les États membres veillent à ce que, dans le cadre du processus de planification et d’octroi des autorisations, la priorité soit donnée à la construction et à l’exploitation d’usines et d’installations destinées à la production des produits de défense concernés lors de la mise en balance des intérêts juridiques dans un cas d’espèce.

Article 14

Facilitation des acquisitions conjointes pendant la crise de l’approvisionnement en munitions

1.   Lorsqu’au moins deux États membres concluent un accord pour acquérir conjointement des produits de défense concernés et que l’extrême urgence découlant de la crise provoquée par la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine empêche de recourir à l’une ou l’autre des procédures prévues par la directive 2009/81/CE pour conclure un accord-cadre, les règles prévues dans le présent article peuvent être appliquées.

2.   Par dérogation à l’article 29, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive 2009/81/CE, un pouvoir adjudicateur ou une entité adjudicatrice peut modifier un accord-cadre existant qui a été conclu selon l’une des procédures prévues à l’article 25 de ladite directive de sorte que ses dispositions puissent s’appliquer aux pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices qui ne sont pas initialement parties à l’accord-cadre.

3.   Par dérogation à l’article 29, paragraphe 2, troisième alinéa, de la directive 2009/81/CE, un pouvoir adjudicateur ou une entité adjudicatrice peut apporter des modifications substantielles aux quantités fixées dans un accord-cadre existant dans la mesure où cela est strictement nécessaire à l’application du paragraphe 2 du présent article. Lorsque les quantités fixées dans un accord-cadre existant sont substantiellement modifiées en application du présent paragraphe, tout opérateur économique qui remplit les conditions initialement fixées par le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice dans le cadre de la procédure de passation de marché public pour l’accord-cadre, y compris les exigences en matière de sélection qualitative visées aux articles 39 à 46 de la directive 2009/81/CE, a la possibilité de se joindre audit accord-cadre. Le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice ouvre cette possibilité au moyen d’un avis ad hoc publié au Journal officiel de l’Union européenne.

4.   Le principe de non-discrimination s’applique aux accords-cadres visés aux paragraphes 2 et 3 en ce qui concerne les quantités supplémentaires, en particulier aux relations entre les pouvoirs adjudicateurs ou les entités adjudicatrices des États membres visés au paragraphe 1.

5.   Les pouvoirs adjudicateurs ou les entités adjudicatrices qui ont modifié un marché dans les cas visés aux paragraphes 2 et 3 du présent article publient un avis à cet effet au Journal officiel de l’Union européenne. Cet avis est publié conformément à l’article 32 de la directive 2009/81/CE.

6.   Les pouvoirs adjudicateurs ou les entités adjudicatrices ne peuvent pas recourir au présent article de façon abusive ou de manière à empêcher, à restreindre ou à fausser la concurrence.

7.   Les modifications introduites dans les accords-cadres en vertu du présent article sont conclues au plus tard le 30 juin 2025.

CHAPITRE IV

DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES APPLICABLES À L’ACCÈS AU FINANCEMENT

Article 15

Fonds de montée en puissance

1.   Afin de mobiliser les investissements nécessaires pour accroître les capacités de fabrication, d’en réduire les risques et de les accélérer, un mécanisme de mixage proposant des solutions de prêt peut être mis en place (ci-après dénommé "Fonds de montée en puissance").

2.   Les objectifs spécifiques poursuivis par le Fonds de montée en puissance sont les suivants:

a)

améliorer l’effet de levier des dépenses à la charge du budget de l’Union et renforcer l’effet multiplicateur pour attirer des financements du secteur privé;

b)

apporter un soutien aux entreprises qui rencontrent des difficultés à accéder au financement et répondre à la nécessité de soutenir la résilience de l’industrie de la défense de l’Union;

c)

accélérer les investissements dans le domaine de la fabrication des produits de défense concernés et mobiliser des financements tant du secteur public que du secteur privé, tout en renforçant la sécurité de l’approvisionnement pour l’ensemble de la chaîne de valeur de l’industrie de la défense de l’Union;

d)

améliorer l’accès au financement pour les investissements liés aux activités visées à l’article 8, paragraphe 3, points a) à e).

CHAPITRE V

DISPOSITIONS FINALES

Article 16

Comité

1.   La Commission est assistée par un comité. Ledit comité est un comité au sens du règlement (UE) n° 182/2011.

2.   L’AED est invitée à faire part de son point de vue et à apporter son expertise au comité en qualité d’observateur. Le SEAE est également invité à prêter assistance au comité dans ses travaux.

3.   Lorsqu’il est fait référence au présent paragraphe, l’article 5 du règlement (UE) n° 182/2011 s’applique.

Lorsque le comité n’émet aucun avis, la Commission n’adopte pas le projet d’acte d’exécution, et l’article 5, paragraphe 4, troisième alinéa, du règlement (UE) n° 182/2011 s’applique.

Article 17

Sécurité des informations

1.   La Commission protège les informations classifiées reçues en lien avec la mise en œuvre du présent règlement conformément aux règles en matière de sécurité énoncées dans la décision (UE, Euratom) 2015/444 de la Commission (24).

2.   La Commission utilise les systèmes d’échange sécurisés existants ou mis en place afin de faciliter l’échange d’informations sensibles et classifiées entre la Commission, le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, l’AED et les États membres et, s’il y a lieu, avec les entités faisant l’objet des mesures prévues par le présent règlement. Ce système tient compte de la réglementation nationale des États membres en matière de sécurité.

Article 18

Confidentialité et traitement des informations

1.   Les informations reçues dans le cadre de l’application du présent règlement ne sont utilisées qu’aux fins pour lesquelles elles ont été demandées.

2.   Les États membres et la Commission assurent la protection des secrets d’affaires et d’autres informations sensibles et classifiées obtenues et produites en application du présent règlement conformément au droit de l’Union et aux droit nationaux respectifs.

3.   Les États membres et la Commission veillent à ce que les informations classifiées fournies ou échangées au titre du présent règlement ne soient pas déclassées ou déclassifiées sans le consentement préalable écrit de l’autorité d’origine.

4.   La Commission ne partage aucune information d’une manière qui puisse conduire à l’identification d’une entité lorsque le partage des informations est susceptible d’entraîner pour cette entité une atteinte à sa réputation, un préjudice commercial ou la divulgation de secrets d’affaires.

Article 19

Protection des données à caractère personnel

1.   Le présent règlement s’entend sans préjudice des obligations des États membres en matière de traitement des données à caractère personnel au titre du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil (25) et de la directive 2002/58/CE du Parlement européen et du Conseil (26), ou des obligations incombant, dans l’exercice de leurs responsabilités, à la Commission et, s’il y a lieu, aux autres institutions, organes et organismes de l’Union en ce qui concerne le traitement des données à caractère personnel au titre du règlement (UE) 2018/1725 du Parlement européen et du Conseil (27).

2.   Les données à caractère personnel ne peuvent pas être traitées ni communiquées sauf lorsque cela est absolument nécessaire aux fins du présent règlement. Dans de tels cas, les règlements (UE) 2016/679 et (UE) 2018/1725 s’appliquent, selon les besoins.

3.   Lorsque le traitement de données à caractère personnel n’est pas absolument nécessaire à la mise en œuvre des mécanismes établis dans le présent règlement, les données à caractère personnel sont rendues anonymes de manière que la personne concernée ne soit pas identifiable.

Article 20

Audits

Les audits portant sur l’utilisation de la contribution de l’Union réalisés par des personnes ou des entités, y compris par des personnes ou des entités autres que celles mandatées par les institutions, organes ou organismes de l’Union, constituent la base de l’assurance globale en vertu de l’article 127 du règlement financier. La Cour des comptes examine les comptes de la totalité des recettes et dépenses de l’Union conformément à l’article 287 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

Article 21

Protection des intérêts financiers de l’Union

Lorsqu’un pays associé participe à l’instrument par la voie d’une décision adoptée au titre de l’accord sur l’Espace économique européen, le pays associé accorde à l’ordonnateur compétent, à l’OLAF et à la Cour des comptes les droits et accès nécessaires au plein exercice de leurs compétences respectives. Dans le cas de l’OLAF, ces droits comprennent le droit d’effectuer des enquêtes, y compris des contrôles et vérifications sur place, comme le prévoit le règlement (UE, Euratom) n° 883/2013.

Article 22

Information, communication et publicité

1.   Les destinataires d’un financement de l’Union font état de l’origine des fonds et assurent la visibilité du financement de l’Union, en particulier lorsqu’il s’agit de promouvoir les actions et leurs résultats, en fournissant des informations ciblées cohérentes, efficaces et proportionnées à divers publics, notamment aux médias et au grand public.

2.   La Commission met en œuvre des actions d’information et de communication relatives à l’instrument, aux actions entreprises au titre de l’instrument et aux résultats obtenus.

3.   Les ressources financières allouées à l’instrument contribuent à la communication institutionnelle sur les priorités politiques de l’Union, dans la mesure où ces priorités sont liées aux objectifs visés à l’article 4.

4.   Les ressources financières allouées à l’instrument peuvent contribuer à l’organisation d’activités de diffusion, d’événements de mise en relation et d’activités de sensibilisation, visant en particulier à ouvrir les chaînes d’approvisionnement pour favoriser la participation transfrontière des PME.

Article 23

Évaluation

1.   Au plus tard le 30 juin 2024, la Commission élabore un rapport évaluant la mise en œuvre des mesures établies dans le présent règlement et leurs résultats, ainsi que l’opportunité d’étendre leur applicabilité et de prévoir leur financement, au vu notamment de l’évolution du contexte en matière de sécurité. Le rapport d’évaluation est fondé sur des consultations des États membres et des principales parties prenantes et est communiqué au Parlement européen et au Conseil.

2.   Compte tenu du rapport d’évaluation, la Commission peut proposer toute modification appropriée du présent règlement, notamment en vue de continuer à faire face à tout risque persistant lié à l’approvisionnement en produits de défense concernés.

Article 24

Entrée en vigueur et application

Le présent règlement entre en vigueur le jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

Le présent règlement est applicable jusqu’au 30 juin 2025. Cela n’affecte ni la poursuite ni la modification des actions engagées en vertu du présent règlement, ni les actions nécessaires à la protection des intérêts financiers de l’Union.

Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre.

Fait à Bruxelles, le 20 juillet 2023.

Par le Parlement européen

La présidente

R. METSOLA

Par le Conseil

Le président

P. NAVARRO RÍOS


(1)  Avis du 14 juin 2023 (non encore paru au Journal officiel).

(2)  Position du Parlement européen du 13 juillet 2023 (non encore parue au Journal officiel) et décision du Conseil du 20 juillet 2023.

(3)  Règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil du 18 juillet 2018 relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union, modifiant les règlements (UE) n° 1296/2013, (UE) n° 1301/2013, (UE) n° 1303/2013, (UE) n° 1304/2013, (UE) n° 1309/2013, (UE) n° 1316/2013, (UE) n° 223/2014, (UE) n° 283/2014 et la décision n° 541/2014/UE, et abrogeant le règlement (UE, Euratom) n° 966/2012 (JO L 193 du 30.7.2018, p. 1).

(4)  JO L 433 I du 22.12.2020, p. 28.

(5)  Règlement (UE) 2021/1060 du Parlement européen et du Conseil du 24 juin 2021 portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen plus, au Fonds de cohésion, au Fonds pour une transition juste et au Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture, et établissant les règles financières applicables à ces Fonds et au Fonds "Asile, migration et intégration", au Fonds pour la sécurité intérieure et à l’instrument de soutien financier à la gestion des frontières et à la politique des visas (JO L 231 du 30.6.2021, p. 159).

(6)  Règlement (UE) 2021/1058 du Parlement européen et du Conseil du 24 juin 2021 relatif au Fonds européen de développement régional et au Fonds de cohésion (JO L 231 du 30.6.2021, p. 60).

(7)  Règlement (UE) 2021/1057 du Parlement européen et du Conseil du 24 juin 2021 instituant le Fonds social européen plus (FSE+) et abrogeant le règlement (UE) n° 1296/2013 (JO L 231 du 30.6.2021, p. 21).

(8)  Règlement (UE) 2021/241 du Parlement européen et du Conseil du 12 février 2021 établissant la facilité pour la reprise et la résilience (JO L 57 du 18.2.2021, p. 17).

(9)  Décision (UE, Euratom) 2020/2053 du Conseil du 14 décembre 2020 relative au système des ressources propres de l’Union européenne et abrogeant la décision 2014/335/UE, Euratom (JO L 424 du 15.12.2020, p. 1).

(10)  Règlement (UE) 2020/2094 du Conseil du 14 décembre 2020 établissant un instrument de l’Union européenne pour la relance en vue de soutenir la reprise à la suite de la crise liée à la COVID-19 (JO L 433 I du 22.12.2020, p. 23).

(11)  Règlement (UE, Euratom) n° 883/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 septembre 2013 relatif aux enquêtes effectuées par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) et abrogeant le règlement (CE) n° 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil et le règlement (Euratom) n° 1074/1999 du Conseil (JO L 248 du 18.9.2013, p. 1).

(12)  Règlement (CE, Euratom) n° 2988/95 du Conseil du 18 décembre 1995 relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO L 312 du 23.12.1995, p. 1).

(13)  Règlement (Euratom, CE) n° 2185/96 du Conseil du 11 novembre 1996 relatif aux contrôles et vérifications sur place effectués par la Commission pour la protection des intérêts financiers des Communautés européennes contre les fraudes et autres irrégularités (JO L 292 du 15.11.1996, p. 2).

(14)  Règlement (UE) 2017/1939 du Conseil du 12 octobre 2017 mettant en œuvre une coopération renforcée concernant la création du Parquet européen (JO L 283 du 31.10.2017, p. 1).

(15)  Directive (UE) 2017/1371 du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2017 relative à la lutte contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union au moyen du droit pénal (JO L 198 du 28.7.2017, p. 29).

(16)  JO L 1 du 3.1.1994, p. 3.

(17)  Règlement (UE) 2019/452 du Parlement européen et du Conseil du 19 mars 2019 établissant un cadre pour le filtrage des investissements directs étrangers dans l’Union (JO L 79 I du 21.3.2019, p. 1).

(18)  Décision (UE) 2021/1764 du Conseil du 5 octobre 2021 relative à l’association des pays et territoires d’outre-mer à l’Union européenne, y compris les relations entre l’Union européenne, d’une part, et le Groenland et le Royaume de Danemark, d’autre part (décision d’association outre-mer, y compris le Groenland) (JO L 355 du 7.10.2021, p. 6).

(19)  Directive 2009/81/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 relative à la coordination des procédures de passation de certains marchés de travaux, de fournitures et de services par des pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices dans les domaines de la défense et de la sécurité, et modifiant les directives 2004/17/CE et 2004/18/CE (JO L 216 du 20.8.2009, p. 76).

(20)  Règlement (UE) 2021/523 du Parlement européen et du Conseil du 24 mars 2021 établissant le programme InvestEU et modifiant le règlement (UE) 2015/1017 (JO L 107 du 26.3.2021, p. 30).

(21)  Règlement (UE) n° 182/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2011 établissant les règles et principes généraux relatifs aux modalités de contrôle par les États membres de l’exercice des compétences d’exécution par la Commission (JO L 55 du 28.2.2011, p. 13).

(22)  JO L 123 du 12.5.2016, p. 1.

(23)  JO C 202 du 8.7.2011, p. 13.

(24)  Décision (UE, Euratom) 2015/444 de la Commission du 13 mars 2015 concernant les règles de sécurité aux fins de la protection des informations classifiées de l’Union européenne (JO L 72 du 17.3.2015, p. 53).

(25)  Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données) (JO L 119 du 4.5.2016, p. 1).

(26)  Directive 2002/58/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2002 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques (directive vie privée et communications électroniques) (JO L 201 du 31.7.2002, p. 37).

(27)  Règlement (UE) 2018/1725 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions, organes et organismes de l’Union et à la libre circulation de ces données, et abrogeant le règlement (CE) n° 45/2001 et la décision n° 1247/2002/CE (JO L 295 du 21.11.2018, p. 39).