22.6.2021   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

L 222/8


RÈGLEMENT D’EXÉCUTION (UE) 2021/1007 DE LA COMMISSION

du 18 juin 2021

modifiant le règlement d’exécution (UE) 2018/274 en ce qui concerne la banque analytique de données isotopiques et les contrôles dans le secteur vitivinicole

LA COMMISSION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

vu le règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) no 352/78, (CE) no 165/94, (CE) no 2799/98, (CE) no 814/2000, (CE) no 1290/2005 et (CE) no 485/2008 du Conseil (1), et notamment son article 89, paragraphe 6,

considérant ce qui suit:

(1)

Le secteur vitivinicole de l’Union est extrêmement vulnérable à la fraude, étant donné que la majeure partie de la production de l’Union repose sur les systèmes de certification de la qualité, à savoir l’appellation d’origine protégée (AOP) et l’indication géographique protégée (IGP), qui accordent une reconnaissance aux produits de qualité et aident les producteurs à mieux commercialiser leurs produits. Les principales violations présumées concernent l’usurpation de l’origine, notamment la commercialisation et l’étiquetage délibérés et illicites d’un vin de moins bonne qualité comme s’il s’agissait d’un vin bénéficiant d’une AOP ou d’une IGP, ou la dilution illégale du vin ou encore l’adjonction illicite de sucre dans le vin. L’incidence économique des activités frauduleuses dans le secteur vitivinicole de l’Union est estimée à 1,3 milliard d’euros par an, soit 3,3 % des ventes du secteur vitivinicole de l’Union. Outre l’incidence économique directe évidente de tels cas de fraude sur le secteur vitivinicole, le risque d’atteinte à la réputation de ce secteur serait potentiellement encore plus élevé dans le cas où un incident frauduleux majeur provoquerait une perte de confiance des consommateurs et des restrictions des échanges, nuisant ainsi aux intérêts généraux du secteur vitivinicole de l’Union.

(2)

Par conséquent, il est nécessaire d’améliorer et de renforcer la lutte contre la fraude dans le secteur vitivinicole de l’Union, notamment en ce qui concerne le fonctionnement de la banque analytique de données isotopiques visée à l’article 39 du règlement délégué (UE) 2018/273 de la Commission (2) et la coordination des responsabilités y afférentes dans les États membres et avec le centre européen de référence pour le contrôle dans le secteur vitivinicole («ERC-CWS»). Cela contribue à la stratégie «De la ferme à la table» pour un système alimentaire équitable, sain et respectueux de l’environnement (3), mise en place par la Commission. Cela contribue en particulier à l’une de ses priorités, à savoir lutter contre la fraude alimentaire tout au long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire, qui invite spécifiquement la Commission à intensifier sa lutte contre la fraude alimentaire afin de créer des conditions de concurrence égales pour les opérateurs et de renforcer les pouvoirs des autorités de contrôle et de répression.

(3)

Les règles relatives à la banque analytique de données isotopiques et les dispositions spécifiques sur les contrôles sont établies dans le règlement d’exécution (UE) 2018/274 de la Commission (4). Il est nécessaire d’adapter le contenu de la banque analytique de données isotopiques afin de mieux refléter la réalité du secteur vitivinicole de l’Union. Si l’on retient la moyenne des cinq dernières années de production vinicole de l’Union, la part des vins bénéficiant d’une AOP ou d’une IGP suit une tendance à la hausse constante, atteignant plus de 60 % de la production totale. Au cours de la campagne de commercialisation 2019/2020, la part était proche de 70 %. Par conséquent, étant donné que, pour les vins bénéficiant d’une AOP ou d’une IGP, il existe un risque de fraude accru, il est nécessaire de prévoir une part plus importante de ces vins dans la banque de données (actuellement, seuls 40 % de l’ensemble des vins de l’Union bénéficiant d’une AOP ou d’une IGP sont enregistrés dans la banque de données).

(4)

Le prélèvement des raisins ainsi que les opérations et analyses nécessaires à la production de données pour la banque analytique de données isotopiques nécessitent un niveau élevé de ressources susceptible d’entraîner des retards dans la fourniture de ces données. Afin de surmonter les difficultés pour fournir en temps utile des informations complètes, les États membres devraient être autorisés à décider que les échantillons des raisins cultivés pour la production de vins bénéficiant d’une AOP ou d’une IGP peuvent être prélevés par l’entité gestionnaire de l’AOP ou de l’IGP, en coordination avec les laboratoires désignés, lorsque les laboratoires désignés ne disposent pas des ressources suffisantes pour procéder eux-mêmes à l’échantillonnage. La coopération entre ces organismes, le ERC-CWS et les laboratoires désignés des États membres sera essentielle dans la lutte contre les pratiques frauduleuses ayant une incidence sur les vins bénéficiant d’une AOP ou d’une IGP qui constituent la majeure partie de la production de vin de l’Union.

(5)

Les données isotopiques manquantes et les ensembles de données incomplets peuvent occasionner des retards dans les enquêtes sur des cas présumés de fraude dans le secteur vitivinicole voire contrecarrer l’issue de ces enquêtes, ce qui pourrait entraîner la mise sur le marché de vins de contrefaçon. Cette absence de données menace non seulement la réputation des vins de l’Union, mais peut également avoir une incidence sur le montant des droits d’accises appliqués. Cela crée un risque que des taxes soient appliquées à des catégories de vins mal étiquetées. Il est donc nécessaire d’améliorer le cadre juridique actuel pour la banque analytique de données isotopiques afin de veiller à ce qu’elle soit mise à jour dans un délai donné et d’assurer ainsi une meilleure protection contre la fraude dans le secteur vitivinicole de l’Union. Compte tenu de certains problèmes d’attribution dans certains États membres, il est également nécessaire de préciser quelles parties concernées ont le droit d’accéder aux échantillons et aux dossiers.

(6)

Afin d’améliorer les procédures régissant les enquêtes sur les soupçons de fraude concernant un lot de vin, il convient de renforcer les règles en vigueur. Il convient de fixer des délais à l’expiration desquels toutes les données pertinentes disponibles nécessaires pour vérifier si le vin suspect est conforme à la réglementation de l’Union dans le secteur vitivinicole devraient avoir été fournies à l’autorité compétente du territoire où se situe le lieu de déchargement. Il convient de clarifier davantage le rôle des entités chargées des différentes étapes de la procédure d’enquête.

(7)

Les ensembles de données de mesures isotopiques et les résultats connexes de la banque analytique de données isotopiques ne sont pas divulgués au public. Cela se justifie par la crainte que le fait de rendre publiques ces informations fournirait des renseignements aux fraudeurs qui pourraient les exploiter à leur avantage. En outre, l’utilisation abusive de ces informations ternirait la réputation de certains vins. Toutefois, il devrait être possible de rendre publiques certaines données anonymisées sur des cas de fraude en publiant un rapport annuel contenant les principaux résultats des contrôles dans le secteur vitivinicole, sur la base de l’utilisation de la banque de données. Il convient donc de préciser davantage les règles relatives à l’élaboration du rapport annuel.

(8)

Des difficultés ont été rencontrées lors des vérifications et des contrôles des produits vitivinicoles transportés en vrac, car ces produits sont plus exposés à des manipulations frauduleuses que les produits déjà mis en bouteilles, munis d’un dispositif de fermeture non récupérable et revêtus d’étiquettes. Par conséquent, dans les cas où l’autorité compétente n’est pas informée en temps utile, au moyen d’un système informatisé ou d’un système d’information, de l’arrivée d’un lot de produits vitivinicoles transportés en vrac, il convient de prendre des mesures pour que l’autorité compétente du lieu de déchargement soit en mesure d’effectuer les contrôles nécessaires avant que le produit ne quitte les locaux du destinataire. Lorsque l’autorité compétente décide de ne pas effectuer ces contrôles, le destinataire devrait être autorisé à expédier immédiatement le produit de ses locaux.

(9)

Il y a donc lieu de modifier le règlement d’exécution (UE) 2018/274 en conséquence.

(10)

Les mesures prévues par le présent règlement sont conformes à l’avis du comité de l’organisation commune des marchés agricoles,

A ADOPTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT:

Article premier

Le règlement d’exécution (UE) 2018/274 est modifié comme suit:

1)

L’article 27 est modifié comme suit:

a)

le paragraphe 1 est remplacé par le texte suivant:

«1.   Aux fins de l’établissement de la banque analytique de données isotopiques visée à l’article 39 du règlement délégué (UE) 2018/273, les États membres veillent à ce que des échantillons de raisins frais à analyser par les laboratoires désignés des États membres soient prélevés, traités et transformés en vin conformément aux instructions énoncées à l’annexe III, partie I, du présent règlement.»

b)

le paragraphe 3 est remplacé par le texte suivant:

«3.   Le nombre d’échantillons à prélever chaque année pour la banque de données est indiqué à l’annexe III, partie II. La sélection des échantillons tient compte à la fois de la situation géographique des vignobles dans les États membres énumérés à l’annexe III, partie II, et de la proportion de vins bénéficiant d’une AOP ou d’une IGP par État membre ou région. Chaque année, 25 % des prélèvements au moins sont effectués sur les parcelles où ont été effectués les prélèvements de l’année précédente.»

c)

le paragraphe suivant est inséré:

«3   bis. Les États membres peuvent décider, le cas échéant, que les échantillons de raisins cultivés pour la production de vins bénéficiant d’une AOP ou d’une IGP peuvent être prélevés par l’entité gestionnaire de l’AOP ou de l’IGP. Dans ce cas, l’échantillonnage est coordonné par les laboratoires désignés des États membres conformément aux instructions énoncées à l’annexe III, partie I, section A.»

d)

le paragraphe 6 est remplacé par le texte suivant:

«6.   Les laboratoires transmettent au ERC-CWS par voie électronique les données recueillies, accompagnées d’une copie du rapport d’analyse, des résultats et de l’interprétation des analyses, ainsi qu’une copie de la fiche signalétique, au plus tard le [31 octobre] de l’année qui suit celle de la récolte des raisins.»

e)

au paragraphe 7, le point e) est remplacé par le texte suivant:

«mettent les dossiers, sans délais ou frais excessifs, à la disposition de ceux qui ont généré les informations contenues dans les dossiers, en vue, le cas échéant, d’en faire rectifier les inexactitudes.»

2)

L’article 28 est modifié comme suit:

a)

le titre est remplacé par le texte suivant:

«Communication des informations contenues dans la banque analytique de données en cas de soupçon de non-respect de la réglementation de l’Union dans le secteur vitivinicole»;

b)

le paragraphe 2 est remplacé par le texte suivant:

«2.   Quand cela est nécessaire à des fins scientifiques, statistiques, de contrôle ou judiciaires dans des cas dûment justifiés et sur demande, les informations visées au paragraphe 1, lorsqu’elles sont représentatives, peuvent être mises à la disposition des autorités compétentes désignées par les États membres pour assurer le respect de la réglementation de l’Union dans le secteur vitivinicole ainsi que des juridictions nationales. Ces informations ne sont utilisées qu’aux fins pour lesquelles elles sont demandées et sont considérées comme confidentielles.»

c)

le paragraphe suivant est inséré:

«2 bis.   Dans le cas d’un contrôle effectué dans un État membre, pour lequel des données de référence provenant de la banque analytique de données isotopiques relatives au vin produit dans un autre État membre sont nécessaires, l’autorité compétente de l’État membre demande au ERC-CWS de contacter le laboratoire désigné de l’État membre dans lequel le vin faisant l’objet de l’enquête est produit, afin de vérifier les soupçons à l’aide de toutes les données pertinentes disponibles. Ce laboratoire désigné vérifie, dans un délai d’un mois à compter de la date de réception de la demande, si le vin en question est conforme à la réglementation de l’Union dans le secteur vitivinicole. Si ce délai ne peut pas être respecté pour des raisons dûment justifiées, le laboratoire désigné en informe le ERC-CWS en conséquence et le ERC-CWS:

i)

extrait les données de mesures isotopiques de référence pertinentes relatives au vin en question de la banque analytique de données isotopiques et les communique à l’instance requérante; ou

ii)

si les données de mesures isotopiques de référence pertinentes ne peuvent pas être extraites de la banque analytique de données isotopiques, mais les échantillons requis sont mis à la disposition du ERC-CWS à sa demande, fournit à l’instance requérante une assistance analytique, y compris les résultats des données de mesures isotopiques pertinentes relatives au vin en question,

dans un délai d’un mois à compter du moment où il apparaît clairement que le délai initial ne peut pas être respecté. Dans les deux cas, les données de mesures isotopiques pertinentes sont interprétées et fournies au plus tard dans un délai de deux mois à compter de la date de réception de la demande par l’autorité compétente de l’État membre où le vin suspect a été produit.»

d)

le paragraphe suivant est ajouté:

«4.   Le ERC-CWS publie un rapport annuel, de manière anonyme, sur les principaux résultats des demandes reçues conformément aux paragraphes 1 et 2 et sur les principales conclusions des contrôles effectués par les États membres sur leur territoire en utilisant la banque analytique de données isotopiques. Le ERC-CWS veille à ce que ce rapport ne contienne aucune information sensible d’un point de vue commercial. Ces conclusions sont communiquées au ERC-CWS avant la fin du mois de mars de l’année qui suit la période couverte par le rapport, et le ERC-CWS publie le rapport dans un délai de deux mois.»

e)

l’article suivant est inséré:

«Article 32 bis

Contrôles des produits vitivinicoles non conditionnés

Dans le cas des importations de produits vitivinicoles non conditionnés qui ne sont pas couverts par un système informatisé ou un système d’information visé à l’article 14, paragraphe 1, du règlement délégué (UE) 2018/273, afin de permettre des contrôles, l’autorité compétente de l’État membre où se situe le lieu de déchargement peut demander aux destinataires des lots de produits vitivinicoles non conditionnés de conserver ces lots sur le lieu de déchargement dans leurs locaux pendant une période maximale de dix jours ouvrables. Les destinataires n’expédient, ne transfèrent et ne manipulent pas un lot qui a fait l’objet d’un échantillonnage par l’autorité compétente au cours de cette période jusqu’à ce qu’ils soient informés du résultat des contrôles.

À la demande des destinataires, l’autorité compétente, lorsqu’elle décide de ne pas effectuer de contrôles du lot en question, autorise l’expédition du lot avant la fin de la période visée au premier alinéa.»

Article 2

Le présent règlement entre en vigueur le septième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre.

Fait à Bruxelles, le 18 juin 2021.

Par la Commission

La présidente

Ursula VON DER LEYEN


(1)  JO L 347 du 20.12.2013, p. 549.

(2)  Règlement délégué (UE) 2018/273 de la Commission du 11 décembre 2017 complétant le règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le régime d’autorisations de plantations de vigne, le casier viticole, les documents d’accompagnement et la certification, le registre des entrées et des sorties, les déclarations obligatoires, les notifications et la publication des informations notifiées, complétant le règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les contrôles et les sanctions applicables, modifiant les règlements (CE) no 555/2008, (CE) no 606/2009 et (CE) no 607/2009 de la Commission et abrogeant le règlement (CE) no 436/2009 de la Commission et le règlement délégué (UE) 2015/560 de la Commission (JO L 58 du 28.2.2018, p. 1).

(3)  COM(2020) 381 final.

(4)  Règlement d’exécution (UE) 2018/274 de la Commission du 11 décembre 2017 portant modalités d’application du règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le régime d’autorisations de plantations de vigne, la certification, le registre des entrées et des sorties, les déclarations et les notifications obligatoires, et du règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les contrôles y relatifs, et abrogeant le règlement d’exécution (UE) 2015/561 de la Commission (JO L 58 du 28.2.2018, p. 60).