6.12.2021   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

L 433/19


DÉCISION D’EXÉCUTION (UE) 2021/2145 DE LA COMMISSION

du 3 décembre 2021

de ne pas suspendre les droits antidumping définitifs sur les importations de contreplaqué de bouleau originaire de Russie institués par le règlement d’exécution (UE) 2021/1930

LA COMMISSION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

vu le règlement (UE) 2016/1036 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2016 relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de l’Union européenne (1) (ci-après le «règlement de base»), et notamment son article 14, paragraphe 4,

après consultation du comité institué par l’article 15, paragraphe 2, du règlement de base,

considérant ce qui suit:

1.   PROCÉDURE

(1)

Le 14 octobre 2020, la Commission européenne (ci-après la «Commission») a ouvert une enquête antidumping portant sur les importations de contreplaqué de bouleau originaire de Russie conformément à l’article 5 du règlement de base. Le 11 juin 2021, par son règlement d’exécution (UE) 2021/940 (2) (ci-après le «règlement provisoire»), la Commission a institué un droit antidumping provisoire sur les importations de contreplaqué de bouleau originaire de Russie.

(2)

À la suite de l’information provisoire, plusieurs parties ont affirmé qu’un changement des conditions du marché s’était produit après la période d’enquête (du 1er juillet 2019 au 30 juin 2020) et ont fait valoir que l’institution de mesures définitives ne serait pas justifiée compte tenu de ces changements.

(3)

Le 18 août 2021, dans le cadre de l’enquête, la Commission a demandé aux parties intéressées de l’Union de fournir des informations concernant la période postérieure à la période d’enquête (de juillet 2020 à juin 2021) afin d’examiner et d’évaluer l’incidence éventuelle du changement allégué de circonstances sur le marché de l’Union. Des informations ont été reçues des trois producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon, d’un producteur de l’Union non retenu dans l’échantillon, des plaignants et de 63 parties intéressées, y compris des utilisateurs, des importateurs, des associations et d’autres producteurs de l’Union. Les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon ont communiqué les informations demandées concernant certains indicateurs.

(4)

Le 31 août 2021, la Commission a informé toutes les parties intéressées des faits et considérations essentiels sur la base desquels elle envisageait d’instituer un droit antidumping définitif sur les importations de contreplaqué de bouleau originaire de Russie et qui se fondaient sur la situation au cours de la période d’enquête, étant donné que les évolutions alléguées postérieures à la période d’enquête ont été considérées comme étant de nature temporaire. Un délai a également été accordé à toutes les parties pour leur permettre de présenter leurs observations. À la suite de l’information finale, plusieurs parties intéressées ont demandé la suspension des mesures antidumping, conformément à l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base, en se référant aux changements allégués du marché après la période d’enquête qui remettraient en question la nécessité de percevoir des droits après leur institution. Compte tenu des informations disponibles, la Commission a décidé d’examiner s’il était justifié de suspendre les mesures antidumping définitives, le cas échéant, en vertu de l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base.

(5)

Le 11 octobre 2021, la Commission a fait part de son intention de ne pas suspendre les mesures au titre de l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base. Un délai a également été accordé à toutes les parties pour leur permettre de présenter leurs observations.

(6)

Par la suite, le 9 novembre 2021, la Commission a institué des droits antidumping définitifs (3) sur le contreplaqué de bouleau en provenance de Russie, allant de 14,40 % à 15,80 %. Dans le même temps, elle a annoncé qu’une décision relative à une éventuelle suspension serait prise à un stade ultérieur.

2.   EXAMEN DU CHANGEMENT DES CONDITIONS DU MARCHÉ

(7)

L’article 14, paragraphe 4, du règlement de base prévoit la possibilité de suspendre des mesures antidumping dans l’intérêt de l’Union si les conditions du marché ont temporairement changé de façon telle qu’il est improbable que le préjudice reprenne à la suite de la suspension. Il s’ensuit que les mesures antidumping ne peuvent être suspendues que si les circonstances ont changé au point que l’industrie de l’Union ne subit plus de préjudice important.

2.1.   Conclusions de l’enquête antidumping

(8)

Au cours de la période considérée (2017-juin 2020), les importations russes ont augmenté de 14 %, atteignant une part de marché de 46 % pendant la période d’enquête, contre 40 % en 2017. Parallèlement, la situation économique de l’industrie de l’Union a affiché une tendance négative pour tous les principaux indicateurs: production (– 14 %), ventes dans l’UE (– 17 %), part de marché (de 47 % à 39 %) et rentabilité (de + 10 % à – 3 %). Dans ce contexte, la Commission a conclu que l’industrie de l’Union a subi un préjudice important du fait des importations faisant l’objet d’un dumping. En ce qui concerne les données postérieures à la période d’enquête, la Commission a considéré que les prix du produit concerné prétendument plus élevés que la normale après la période d’enquête et l’augmentation des prix du transport devraient être temporaires, dans la mesure où ces phénomènes étaient liés à la reprise économique mondiale post-COVID et à la hausse de la demande. Par conséquent, les informations dont dispose la Commission concernant la période postérieure à la période d’enquête n’ont pas modifié les conclusions concernant le préjudice important et le lien de causalité et l’institution de droits a été jugée appropriée.

2.2.   Situation de l’industrie de l’Union après la période d’enquête

(9)

L’analyse des informations supplémentaires demandées par la Commission pour examiner la situation sur le marché de l’Union après la période d’enquête au titre de l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base a montré que la situation de l’industrie de l’Union n’avait pas sensiblement changé par rapport à sa situation pendant la période d’enquête.

(10)

Au cours de la période postérieure à la période d’enquête, les ventes des producteurs de l’Union à des parties indépendantes dans l’Union ont évolué positivement, enregistrant une hausse de 9 % par rapport à la période d’enquête. Toutefois, par rapport à l’année de référence de la période considérée, à savoir 2017, les ventes dans l’UE étaient toujours inférieures de 15 %. De même, le volume de production et les capacités ont évolué positivement depuis la période d’enquête, avec une augmentation de la production de + 11 % et des capacités de production de + 4 %, ce qui a entraîné une hausse de 7 % de l’utilisation des capacités. Néanmoins, par rapport à 2017, les volumes de production et l’utilisation des capacités après la période d’enquête ont diminué respectivement de – 8 % et de – 7 %.

(11)

En ce qui concerne la rentabilité, l’industrie de l’Union a continué à enregistrer des pertes (– 1,1 %) au cours de la période postérieure à la période d’enquête, soit bien en deçà du bénéfice cible établi (9,7 %) fixé au niveau de 2017, étant donné qu’au cours de cette année-là, il a été constaté que l’industrie de l’Union avait fonctionné dans des conditions normales de marché en l’absence de dumping. Cela montre que l’industrie de l’Union n’a que partiellement bénéficié de l’augmentation de la demande, étant donné que la hausse des ventes et des prix a été contrebalancée, dans une large mesure, par la hausse des coûts de production (les matières premières ont été également affectées par la hausse des prix) et par des ajustements tardifs des prix en raison d’obligations contractuelles.

2.3.   Conclusions sur la situation de l’industrie de l’Union après la période d’enquête

(12)

Sur la base de ce qui précède, la Commission a conclu que, si l’industrie de l’Union a bénéficié de l’augmentation de la demande et, dans une certaine mesure, de la hausse des prix sur le marché après la période d’enquête, comme le montre la tendance positive de certains indicateurs (voir les considérants 10 et 11) par rapport à la période d’enquête, ces signes de reprise n’ont pas été suffisamment forts pour inverser la situation préjudiciable de l’industrie de l’Union, comme le montrent les tendances observées par rapport à 2017. En outre, l’industrie de l’Union a continué à enregistrer des pertes au cours de la période postérieure à la période d’enquête. Par conséquent, la Commission a conclu que les éléments de preuve ne démontraient pas que les conditions du marché avaient temporairement changé dans une mesure telle qu’il était improbable que le préjudice reprenne à la suite d’une suspension.

(13)

À la suite de la communication des conclusions de la Commission, certaines parties, dont des producteurs-exportateurs, des importateurs et des utilisateurs, ont contesté la conclusion de l’enquête antidumping en faisant valoir que l’industrie de l’Union n’avait pas subi de préjudice du fait des importations russes, mais en raison d’autres facteurs. Plus précisément, il a été avancé que, après la période d’enquête, l’industrie de l’Union a subi un préjudice du fait des coûts de production et des ajustements tardifs des prix.

(14)

La Commission a rappelé que l’analyse du lien de causalité a fait l’objet d’une procédure antidumping distincte, dans laquelle elle a conclu que les importations faisant l’objet d’un dumping en provenance de Russie avaient causé un préjudice important à l’industrie de l’Union et qu’aucun des autres facteurs, analysés individuellement ou collectivement, n’avait atténué le lien de causalité entre les importations faisant l’objet d’un dumping et le préjudice subi par l’industrie de l’Union au point que ce lien ne serait plus réel et substantiel (4). L’examen des éléments visés à l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base relève d’une autre question (à savoir si le préjudice est susceptible de reprendre en cas de suspension des mesures) et ne peut donner lieu à la réouverture de l’analyse déjà effectuée qui a abouti à l’institution de mesures. Par conséquent, étant donné que l’argument ne faisait pas référence aux conclusions de la Commission dans le cadre de l’article 14, paragraphe 4, il a été rejeté.

(15)

De même, la Commission a fait observer que, dans son analyse des évolutions postérieures à la période d’enquête (section 2.2 ci-dessus), elle n’a pas conclu que la continuation du préjudice était due à la hausse des coûts de production. Au contraire, comme expliqué au considérant 12, l’industrie de l’Union a bénéficié de l’augmentation de la demande et, dans une certaine mesure, des prix plus élevés sur le marché. La Commission a également fait observer que, indépendamment des effets des ajustements tardifs des prix et des coûts de production à la suite des évolutions du marché après la période d’enquête, la constatation d’un préjudice important causé par les importations russes pendant la période d’enquête a été établie dans le règlement d’exécution (UE) 2021/1930 de la Commission sur la base des informations relatives à la période allant de 2017 à juin 2020 et n’a pas été abordée dans le cadre de l’analyse des éléments figurant à l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base. Les arguments en question ont donc été rejetés.

(16)

À la suite de l’information, certaines parties, dont des producteurs-exportateurs, des importateurs et des utilisateurs, ont également fait valoir que la Commission devrait procéder à une analyse prospective de la question de savoir si «les conditions du marché ont temporairement changé de façon telle qu’il est improbable que le préjudice reprenne à la suite de la suspension», conformément à l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base. De même, certaines parties ont également fait valoir que la Commission devrait tenir compte du déséquilibre entre l’offre et la demande tel qu’il a été constaté dans la procédure concernant les importations de produits laminés plats en aluminium originaires de Chine.

(17)

En ce qui concerne l’analyse prospective, la Commission a rappelé que l’analyse des données postérieures à la période d’enquête a conclu que l’industrie de l’Union subissait toujours un préjudice et que, par conséquent, les conditions de la suspension n’étaient pas remplies. Il n’est dès lors pas justifié de procéder à une analyse prospective sur la question de savoir s’il est improbable que le préjudice reprenne à la suite de la suspension, étant donné que l’analyse a montré que l’industrie de l’Union a continué à subir un préjudice important au cours de la période postérieure à la période d’enquête. De même, compte tenu de la continuation du préjudice pour l’industrie de l’Union, l’analyse prospective du déséquilibre entre l’offre et la demande a été jugée injustifiée.

(18)

À la suite de l’information, Segezha Group, un producteur-exportateur, a également fait valoir qu’un droit sous la forme d’un prix minimal à l’importation (ci-après le «PMI») serait la forme la plus justifiée de la mesure. La Commission a rappelé qu’une analyse de la forme des mesures ne relève pas du champ d’application de la présente procédure et a donc rejeté la demande.

(19)

À la suite de l’information, Syktyvkar Plywood Mill, un producteur-exportateur russe retenu dans l’échantillon, a fait valoir que les informations fournies par des parties intéressées autres que les producteurs de l’Union n’étaient pas mentionnées par la Commission dans le document d’information. La Commission a rappelé qu’il n’y avait pas d’obligation de faire référence, dans son document d’information, à toutes les observations de toutes les parties intéressées, étant donné que les motifs de ses conclusions étaient dûment détaillés et expliqués. La Commission a néanmoins noté que toutes les allégations et observations des parties intéressées avaient été dûment examinées et prises en considération lors de l’analyse d’une éventuelle suspension au titre de l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base.

(20)

À la suite de l’information, certaines parties intéressées ont fait valoir que l’institution de mesures serait contraire à l’intérêt de l’Union. La Commission a rappelé que l’intérêt de l’Union en ce qui concerne l’institution de mesures avait déjà été dûment analysé dans le cadre de la procédure antidumping [en particulier, les considérants 213 à 236 du règlement d’exécution (UE) 2021/1930, constatant qu’il n’existait aucune raison impérieuse de conclure qu’il n’était pas dans l’intérêt de l’Union d’instituer des mesures sur les importations de contreplaqué de bouleau originaire de Russie]. Il est en outre rappelé qu’en vertu de l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base, l’analyse de l’intérêt de l’Union ne devient pertinente que si l’industrie de l’Union ne subit plus de préjudice et s’il est improbable que le préjudice reprenne à la suite de la suspension. Étant donné que l’analyse des évolutions postérieures à la période d’enquête a permis de conclure que l’industrie de l’Union continuait de subir un préjudice et que, par conséquent, les conditions de la suspension n’étaient pas remplies, la Commission n’a pas jugé nécessaire d’évaluer l’intérêt de l’Union au titre de l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base.

(21)

À la suite de l’information, certaines parties intéressées ont fait valoir que la Commission devait suspendre les mesures définitives sur les panneaux de forme carrée. Premièrement, la Commission a fait observer que l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base prévoyait la suspension des mesures instituées sur les importations du produit concerné dans son ensemble et non sur une partie de celui-ci. La Commission a également noté que la demande d’exclusion concernant les panneaux de forme carrée avait été traitée dans le cadre de la procédure antidumping parallèle, qui a rejeté la demande d’exclusion des panneaux de forme carrée (5). Cet argument a par conséquent été rejeté.

3.   CONCLUSION

(22)

Étant donné que l’examen des évolutions postérieures à la période d’enquête a montré que l’industrie de l’Union continuait de souffrir d’une situation préjudiciable, la Commission n’a pas pu conclure que les conditions du marché avaient temporairement changé au point qu’il était improbable que le préjudice reprenne à la suite d’une suspension, et qu’il serait dans l’intérêt de l’Union de suspendre les mesures conformément à l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base. La présente décision est sans préjudice du droit de la Commission de prendre une décision en vertu de l’article 14, paragraphe 4, du règlement de base en cas de changement des conditions du marché à l’avenir.

(23)

Par conséquent, la Commission a décidé de ne pas suspendre les droits antidumping sur les importations de contreplaqué de bouleau en provenance de Russie institués par le règlement d’exécution (UE) 2021/1930,

A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Les conditions de suspension du droit antidumping définitif institué par l’article 1er du règlement d’exécution (UE) 2021/1930 sur les importations de contreplaqué de bouleau originaire de Russie, telles que prévues à l’article 14, paragraphe 4, du règlement (UE) 2016/1036, ne sont pas remplies.

Article 2

La présente décision entre en vigueur le jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

Fait à Bruxelles, le 3 décembre 2021.

Par la Commission

La présidente

Ursula VON DER LEYEN


(1)  JO L 176 du 30.6.2016, p. 21.

(2)  Règlement d’exécution (UE) 2021/940 de la Commission du 10 juin 2021 instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de contreplaqué de bouleau originaire de Russie (JO L 205 du 11.6.2021, p. 47).

(3)  Règlement définitif: règlement d’exécution (UE) 2021/1930 de la Commission du 8 novembre 2021 instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de contreplaqué de bouleau originaire de Russie (JO L 394 du 9.11.2021, p. 7).

(4)  Voir le considérant 203 du règlement définitif [règlement d’exécution (UE) 2021/1930].

(5)  Voir les considérants 27 à 29 du règlement définitif [règlement d’exécution (UE) 2021/1930].