15.11.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

L 305/7


RÈGLEMENT D’EXÉCUTION (UE) No 1149/2013 DE LA COMMISSION

du 14 novembre 2013

enregistrant une dénomination dans le registre des appellations d’origine protégées et des indications géographiques protégées [Rillettes de Tours (IGP)]

LA COMMISSION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

vu le règlement (UE) no 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires (1), et notamment son article 52, paragraphe 2,

considérant ce qui suit:

(1)

Le règlement (UE) no 1151/2012 a abrogé et remplacé le règlement (CE) no 510/2006 du Conseil du 20 mars 2006 relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine des produits agricoles et des denrées alimentaires (2).

(2)

Conformément à l’article 6, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement (CE) no 510/2006, la demande d’enregistrement de la dénomination «Rillettes de Tours» déposée par la France, a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne  (3).

(3)

Une déclaration d’opposition, conformément à l’article 7 du règlement (CE) no 510/2006, a été notifiée à la Commission par les Pays-Bas, motivée au titre de l’article 7, paragraphe 3, point a), du règlement (CE) no 510/2006.

(4)

Conformément à l’article 51, paragraphe 3, du règlement (UE) no 1151/2012, la Commission a, par lettre du 12 février 2013, transmis l’objection reçue aux autorités françaises, ouvrant ainsi la période de consultations appropriées de 3 mois.

(5)

Étant donné qu’un accord est intervenu endéans la période susmentionnée, la dénomination «Rillettes de Tours» doit donc être enregistrée.

(6)

Les informations publiées conformément à l’article 50, paragraphe 2, point a), du règlement (UE) no 1151/2012 ont fait l’objet de changements non substantiels. En effet, de façon à prendre en compte les remarques des Pays-Bas concernant les dispositions du paragraphe 3.3 du document unique relatives aux critères exprimés quant à l’origine des porcs mis en œuvre, les autorités françaises ont supprimé dans le cahier des charges ainsi que dans le document unique les paragraphes relatifs à l’origine génétique des porcs. Il est donc necessaire de publier la version modifiée du document unique,

A ADOPTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT:

Article premier

La dénomination figurant à l’annexe I du présent règlement est enregistrée.

Article 2

Le document unique consolidé, reprenant les éléments principaux du cahier des charges, figure à l’annexe II du présent règlement.

Article 3

Le présent règlement entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre.

Fait à Bruxelles, le 14 novembre 2013.

Par la Commission

Le président

José Manuel BARROSO


(1)  JO L 343 du 14.12.2012, p. 1.

(2)  JO L 93 du 31.3.2006, p. 12.

(3)  JO C 183 du 23.6.2012, p. 16.


ANNEXE I

Produits agricoles destinés à la consommation humaine énumérés à l’annexe I du traité:

Classe 1.2.   Produits à base de viande (cuits, salés, fumés, etc.)

FRANCE

Rillettes de Tours (IGP)


ANNEXE II

Document unique consolidé

Règlement (CE) no 510/2006 du Conseil du 20 mars 2006 relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine des produits agricoles et des denrées alimentaires (1)

«RILLETTES DE TOURS»

No CE: FR-PGI-0005-00845-18.1.2011

IGP (X) AOP ( )

1.   Dénomination

«Rillettes de Tours»

2.   État membre ou pays tiers

France

3.   Description du produit agricole ou de la denrée alimentaire

3.1.   Type de produit

Classe 1.2.

Produits à base de viande (cuits, salés, fumés, etc.)

3.2.   Description du produit portant la dénomination visée au point 1

Il s’agit d’un produit de charcuterie cuite tartinable présenté en pot, terrine, verrine appertisée ou pain. En pot ou en terrine, une couche de graisse de porc peut recouvrir le produit afin d’en améliorer la conservation.

Les «Rillettes de Tours» sont obtenues par cuisson longue dans de la graisse de porc, en marmite, de viandes de porc ou de coche, préalablement découpées en morceaux (6 × 6 cm minimum). Ces viandes peuvent être aromatisées de vins blancs ou d’eaux-de-vie de vin. À la préparation est ajouté du sel (non nitrité) et peuvent être ajoutés du poivre, du colorant E150 a ou de l’arôme Patrelle.

Les «Rillettes de Tours» sont de couleur homogène blonde dorée (pentone 142 U) à brune dorée (pentone 161 U).

Les rillettes présentent une texture effilochée et conservant de grosses fibres de viande clairement visibles (plus de 2 cm) ainsi que des morceaux.

L’humidité du produit dégraissé doit être inférieure ou égale à 68 %, ce qui confère au produit une texture sèche.

Les «Rillettes de Tours» présentent également un goût de viande rissolée.

Le produit fini répond en outre à des exigences physico-chimiques portant sur le taux de lipides ≤ 42 % (à HPD 68 %), la teneur en sucres solubles totaux < 0,5 % (à HPD 68 %) et le rapport collagènes/protides ≤ 19 %.

3.3.   Matières premières (uniquement pour les produits transformés)

Les coches doivent bénéficier d’un repos, de minimum 15 jours, entre le sevrage et l’abattage. L’âge minimal d’abattage est de 172 jours, une mise à jeun de 12 heures avant le départ à l’abattoir est obligatoire. Pour les carcasses de porcs, un poids chaud de minimum 85 kg est exigé. Ces points visent à renforcer la qualité gustative des viandes.

Les morceaux de jambon et de filet (carré et milieu exclusivement) doivent représenter au moins 25 % du maigre, pour une meilleure qualité au produit fini. Les autres viandes proviennent de l’épaule, l’échine (entre la première et la cinquième côte de la longe), la poitrine (à l’exclusion des mamelles).

Pour renforcer les qualités sanitaires et gustatives, l’approvisionnement doit se faire en viande fraîche. Les viandes fraîches doivent représenter au minimum 75 % de la totalité des viandes utilisées pour une fabrication. Les viandes congelées l’ont été au maximum pendant un mois, à une température de – 18 °C, par le fabricant de rillettes. L’achat de viandes congelées est interdit.

Les vins, utilisables de manière facultative, sont uniquement des vins blancs issus de cépage chenin. Ce cépage a la particularité d’être sec et tendre.

Le vin garde quelques grammes de sucres résiduels, qui lui apportent un moelleux en fin de bouche, qui contrastent avec le côté salé des «Rillettes de Tours». Le chenin a un caractère aromatique minéral et calcaire qui donne un équilibre avec le côté fumé et salé des «Rillettes de Tours». De plus, la fraîcheur, l’acidité et l’arôme de fruit créent un équilibre avec le gras des rillettes et révèlent ses saveurs.

Les eaux-de-vie de vin sont facultatives.

Aucune limite géographique n’est fixée quant à l’origine des vins et eaux-de-vie de vin.

3.4.   Aliments pour animaux (uniquement pour les produits d’origine animale)

3.5.   Étapes spécifiques de la production qui doivent avoir lieu dans l’aire géographique délimitée

Les étapes de fabrication des «Rillettes de Tours» suivantes sont réalisées dans l’aire géographique définie au point no 4: la préparation des viandes, le rissolage, la cuisson, la phase de repos, la cuisson finale.

3.6.   Règles spécifiques applicables au tranchage, râpage, conditionnement, etc.

3.7.   Règles spécifiques d’étiquetage

Le nom de l’IGP «Rillettes de Tours» doit figurer sur l’étiquette.

L’étiquetage, en plus des mentions obligatoires prévues par la réglementation, comporte les éléments suivants:

1)

la marque commerciale;

2)

le logo IGP de l’Union européenne;

3)

le nom et les coordonnées d’un destinataire des réclamations.

4.   Description succincte de la délimitation de l’aire géographique

L’aire géographique retenue pour la fabrication et le conditionnement initial des «Rillettes de Tours» est délimitée en fonction des éléments suivants:

cette zone, centrée sur Tours, correspond à l’aire de diffusion de la recette des «Rillettes de Tours». Au-delà des limites de l’aire géographique, la recette des rillettes n’est plus la même. À cela s’ajoute la barrière naturelle que représente la forêt de Bercé, entre la Sarthe et l’Indre-et-Loire,

l’aire géographique ainsi définie se rapproche de l’ancienne province de Touraine.

Cette aire est constituée du département de l’Indre-et-Loire (37) et des cantons limitrophes situés dans les départements limitrophes de l’Indre-et-Loire, à l’exception de ceux de la Sarthe (72).

5.   Lien avec l’aire géographique

Le lien avec l’aire géographique est basé sur les qualités spécifiques des «Rillettes de Tours» résultant de la mise en œuvre, durant les étapes de leur fabrication, d’un savoir-faire issu de la tradition et qui demeure localisé en Touraine. Ce savoir-faire et les qualités spécifiques du produit lui confèrent une réputation très liée, dans l’esprit du consommateur, à l’aire géographique.

5.1.   Spécificité de l’aire géographique

Des facteurs climatiques

La Touraine se caractérise par un climat doux mais relativement humide, qui a empêché le développement de charcuteries séchées naturellement comme on le voit dans le sud de la France. C’est à cause de ce climat que les rillettes sont conservées grâce à la cuisson. Ce climat est en revanche propice à la vigne, d’où une importante production de vins qui a influencé, elle aussi, l’aromatisation des «Rillettes de Tours».

Des facteurs humains

Les paysans tourangeaux fabriquaient des rillettes dès le Moyen Âge. Il s’agissait, jusqu’à la fin du 18e siècle, d’une production très localisée dans le monde rural tourangeau et dans certaines fermes du Maine.

Au début du 19e siècle, les artisans charcutiers locaux reprennent cette recette paysanne, l’adaptent à leur savoir-faire et la transmettent de génération en génération. En Touraine, les rillettes deviennent alors les «Rillettes de Tours».

Une des principales évolutions est l’utilisation non plus de restes mais de véritables morceaux de viandes dans la fabrication des rillettes. Le développement de nouveaux moyens de conservation, l’utilisation de la cuisson à découvert donnant un produit de texture assez sèche, vont permettre de réduire la part de graisse et d’augmenter la part de viande dans les rillettes, en faisant ainsi un produit plus noble. C’est ce savoir-faire typique de la ville de Tours et de la Touraine que les artisans vont développer. Il faut attendre 1865 pour que cette préparation apparaisse dans certains ouvrages de la profession.

Des facteurs économiques

La Touraine possède un tissu industriel peu développé. Cela occasionne un faible développement du secteur charcutier resté globalement très artisanal en Touraine, et du commerce des «Rillettes de Tours» et par conséquent la conservation de son caractère artisanal marqué.

Les «Rillettes de Tours» demeurent aujourd’hui présentes chez les charcutiers qui transmettent leur recette aux apprentis.

5.2.   Spécificité du produit

La cuisson des «Rillettes de Tours» est effectuée à découvert dans une marmite largement ouverte. Elle est longue et se déroule traditionnellement en trois phases: le rissolage des viandes en début de cuisson (de 15 min à 1 h pour une température comprise entre 95 °C et 115 °C), puis une phase de cuisson lente (de 5 h 30 à 12 h pour une température comprise entre 65 °C et 95 °C), et enfin une phase de cuisson courte et énergique, ou coup de feu final (de 10 min à 20 min pour une température comprise entre 95 °C et 115 °C).

Le rissolage des morceaux de maigre en début de cuisson et la cuisson longue à découvert, spécifiques aux «Rillettes de Tours», provoquent, outre la déshydratation du produit, la production de substances gustatives et aromatiques notamment liées aux réactions chimiques de Maillard et caractéristiques du goût de viande rissolée.

La cuisson longue dans leur propre graisse des morceaux de viande permet l’obtention d’un produit confit. La séparation des morceaux ne s’obtient que par la cuisson, sans dilacération ni battage. Le produit conserve donc des fibres longues.

Enfin, la texture sèche des «Rillettes de Tours», originellement induite par le souci de leur conservation, est conférée par ce procédé traditionnel de cuisson à découvert dans une marmite offrant une grande surface d’évaporation. La pratique du coup de feu final a également toujours eu pour but de favoriser l’évaporation en fin de fabrication.

5.3.   Lien causal entre l’aire géographique et la qualité ou les caractéristiques du produit (pour les AOP), ou une qualité spécifique, la réputation ou une autre caractéristique du produit (pour les IGP)

Le lien avec l’aire géographique est basé à la fois sur le savoir-faire issu de la tradition et localisé en Touraine, qui a donné naissance aux qualités spécifiques des «Rillettes de Tours», et à la fois sur une réputation très liée, dans l’esprit du consommateur, à l’aire géographique.

Le savoir-faire

La faible teneur en humidité qui favorisait initialement la conservation des «Rillettes de Tours» dans une région dont le climat est humide, a permis par la suite de développer sa commercialisation au-delà des limites de la Touraine et explique notamment sa réputation assise sur une texture plus sèche que les rillettes préparées dans les régions voisines.

Le maintien de la texture sèche au fil du temps peut également s’expliquer par la moindre préoccupation liée au rendement de fabrication chez des producteurs majoritairement artisanaux. Le rendement est inférieur à 80 %, ce qui est nettement inférieur à bien d’autres rillettes.

Le faible taux d’humidité des rillettes de Tours permet de les élaborer sans recourir à l’utilisation de conservateurs dont l’usage est pourtant autorisé par la législation.

Avec le tissu fortement artisanal évoqué précédemment, et une transmission effectuée essentiellement par le biais de l’apprentissage, le savoir-faire des fabricants de rillettes en Touraine est resté très localisé. En effet, l’apprentissage dans l’artisanat se fait essentiellement au sein d’un même département ou à proximité.

La conservation d’un fort lien à l’aire géographique est confirmée par le fait que 90 % des lauréats des concours des «Rillettes de Tours» sont issus de cette aire.

La réputation

Les spécificités propres aux «Rillettes de Tours» leur ont permis d’acquérir une réputation bien ancrée. Ce sont ces premières rillettes artisanales vantées par le Tourangeau Balzac dans son roman de 1835, Le Lys dans la Vallée.

Les «Rillettes de Tours» bénéficieront dès le début du 20e siècle d’un engouement certain à l’échelon national. En 1933, Curnonsky, dans son ouvrage Les trésors gastronomiques de la France, mentionne: «La charcuterie de Touraine a acquis une renommée universelle et légitime: les rillettes de Tours ont fait le tour du monde.»

Un concours des meilleures rillettes de Tours est organisé chaque année en Touraine. Cette distinction est très recherchée puisqu’une trentaine d’artisans y participent chaque année. En 2011, le Concours général agricole de Paris a consacré la réputation du produit en ouvrant une section spécifique «Rillettes de Tours».

Référence à la publication du cahier des charges

[article 5, paragraphe 7, du règlement (CE) no 510/2006]

https://www.inao.gouv.fr/fichier/CDCIGPRillettesdeToursV2.pdf


(1)  JO L 93 du 31.3.2006, p. 12. Remplacé par le règlement (UE) no 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires (JO L 343 du 14.12.2012, p. 1).