31.7.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

L 198/4


RÈGLEMENT (CE) N o 907/2007 DU CONSEIL

du 23 juillet 2007

abrogeant le droit antidumping sur les importations d’urée originaire de Russie, à la suite d’un réexamen des mesures parvenant à expiration au titre de l’article 11, paragraphe 2, du règlement (CE) no 384/96 du Conseil, et clôturant les réexamens intermédiaires partiels de ces importations originaires de Russie au titre de l’article 11, paragraphe 3

LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,

vu le traité instituant la Communauté européenne,

vu le règlement (CE) no 384/96 du Conseil du 22 décembre 1995 relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (1) (ci-après dénommé «règlement de base»), et notamment son article 11, paragraphes 2 et 3,

vu la proposition présentée par la Commission après consultation du comité consultatif,

considérant ce qui suit:

A.   PROCÉDURE

1.   Mesures en vigueur

(1)

En mars 1995, le règlement (CE) no 477/95 du Conseil (2) a institué un droit antidumping définitif sur les importations d’urée originaire de la Fédération de Russie (ci-après dénommée «Russie»). Le montant de ce droit était égal à la différence entre le prix minimum à l’importation de 115 écus par tonne et le prix net franco frontière communautaire, avant dédouanement, dès lors que ce dernier était inférieur au prix minimum à l’importation. L’enquête qui avait conduit à l’instauration de ces mesures est dénommée ci-après «l’enquête initiale». À la suite d’un réexamen des mesures parvenant à expiration au titre de l’article 11, paragraphe 2, du règlement de base, le Conseil a décidé, par le règlement (CE) no 901/2001 (3), que ces mesures devaient être maintenues. Les mesures actuellement en vigueur (ci-après dénommées «les mesures existantes») consistent en un droit variable, calculé sur la base d’un prix minimum à l’importation (PMI) de 115 EUR par tonne. L’enquête de réexamen ayant abouti au maintien des mesures est dénommée ci-après «la précédente enquête de réexamen au titre de l’expiration des mesures».

(2)

En décembre 2003, le Conseil a clôturé, par le règlement (CE) no 2228/2003 (4), un réexamen intermédiaire partiel, ouvert à l’initiative de la Commission en vertu de l’article 11, paragraphe 3, du règlement de base, afin d’examiner l’adéquation de la forme des mesures en vigueur, sans modification des mesures existantes.

2.   Demandes de réexamen

(3)

En août 2005, la Commission a publié un avis relatif à l’expiration prochaine des mesures existantes (5). Le 9 février 2006, la Commission a reçu une demande de réexamen des mesures parvenant à expiration au titre de l’article 11, paragraphe 2, du règlement de base, ainsi qu’une demande de réexamen partiel des mesures, au titre de l’article 11, paragraphe 3, du règlement, limité à la forme des mesures.

(4)

Ces demandes ont été déposées par l’Association européenne des producteurs d’engrais (EFMA) (ci-après dénommée «la partie requérante») pour le compte de producteurs représentant une proportion majeure de la production communautaire totale d’urée, en l’espèce plus de 50 %.

(5)

La partie requérante a fait valoir en apportant des éléments de preuve suffisants à première vue que l’expiration des mesures entraînerait probablement la continuation ou la réapparition du dumping et du préjudice causé à l’industrie communautaire en ce qui concerne les importations d’urée originaire de Russie (ci-après dénommée «le pays concerné»), et que la forme actuelle des mesures ne suffisait pas à contrecarrer les effets préjudiciables du dumping.

(6)

Par ailleurs, le 14 septembre 2006, une demande de réexamen intermédiaire partiel du règlement (CE) no 901/2001 a été reçue de Joint Stock Company «Mineral and Chemical Company EuroChem» («EuroChem»), producteur-exportateur d’urée en Russie soumis aux mesures antidumping en vigueur.

(7)

Dans la demande formulée au titre de l’article 11, paragraphe 3, du règlement de base, EuroChem a fait valoir, en fournissant des éléments de preuve suffisants à première vue, que les circonstances à l’origine de l’institution des mesures avaient changé et que ces changements présentaient un caractère durable. EuroChem a également affirmé, éléments de preuve à l’appui, qu’une comparaison entre ses propres coûts et ses prix à l’exportation révélerait une réduction du dumping à un niveau sensiblement inférieur à celui des mesures actuelles. En conséquence, EuroChem a soutenu que le maintien des mesures à leur niveau actuel, fondé sur la marge de préjudice alors établie, n’était plus nécessaire pour contrebalancer le dumping.

(8)

Ayant déterminé, après consultation du comité consultatif, qu’il existait des éléments de preuve suffisants pour justifier l’ouverture d’un réexamen des mesures parvenant à expiration au titre de l’article 11, paragraphe 2, du règlement de base et de deux réexamens intermédiaires partiels, au titre de l’article 11, paragraphe 3, du règlement de base, la Commission a engagé ces trois réexamens et publié les avis correspondants au Journal officiel de l’Union européenne  (6).

3.   Enquête

3.1.   Période d’enquête

(9)

S’agissant du réexamen au titre de l’expiration des mesures, l’enquête relative à la continuation ou à la réapparition du dumping et du préjudice a porté sur la période allant du 1er avril 2005 au 31 mars 2006 (ci-après dénommée «la période d’enquête»). L’examen des tendances utiles pour apprécier la probabilité d’une continuation ou d’une réapparition du préjudice a couvert la période comprise entre 2002 et la fin de la période d’enquête (ci-après dénommée «la période considérée»). La période de référence du réexamen intermédiaire partiel aux fins de l’enquête sur l’adéquation de la forme des mesures est la même que celle considérée dans le réexamen au titre de l’expiration des mesures. La période d’enquête pour le réexamen intermédiaire partiel limité à l’analyse du dumping concernant «EuroChem» a porté sur la période allant du 1er octobre 2005 au 30 septembre 2006.

3.2.   Parties concernées par l’enquête

(10)

La Commission a officiellement informé les producteurs-exportateurs de Russie, les importateurs et les utilisateurs notoirement concernés et leurs associations, ainsi que les représentants du pays exportateur concerné, la partie requérante et les producteurs communautaires connus, de l’ouverture des deux réexamens. Les parties intéressées ont eu la possibilité de faire connaître leur point de vue par écrit et de demander à être entendues dans le délai fixé dans l’avis d’ouverture.

(11)

La Commission a officiellement informé la partie requérante — EuroChem — et les représentants de la Russie, de l’ouverture du réexamen intermédiaire partiel. Les parties intéressées ont eu la possibilité de faire connaître leur point de vue par écrit et de demander à être entendues dans le délai fixé dans l’avis d’ouverture.

(12)

Toutes les parties intéressées qui en ont fait la demande et ont démontré qu’il existait des raisons particulières de les entendre ont été entendues.

(13)

En ce qui concerne le réexamen au titre de l’expiration des mesures et le réexamen intermédiaire partiel limité à la forme des mesures, au vu du nombre apparemment élevé de producteurs communautaires, d’importateurs dans la Communauté et de producteurs-exportateurs en Russie, il a été jugé opportun, conformément à l’article 17 du règlement de base, d’examiner s’il y avait lieu de recourir à l’échantillonnage. Afin de permettre à la Commission de décider s’il était nécessaire de procéder par échantillonnage et, dans l’affirmative, de sélectionner un échantillon, les parties susmentionnées ont été priées, en application de l’article 17, paragraphe 2, du règlement de base, de se faire connaître dans un délai de 15 jours suivant l’ouverture de l’enquête et de fournir à la Commission les renseignements demandés dans l’avis d’ouverture.

(14)

En ce qui concerne les importateurs dans la Communauté, un seul a fourni les renseignements demandés dans l’avis d’ouverture et exprimé sa volonté de continuer de coopérer avec les services de la Commission. En conséquence, il a été décidé que l’échantillonnage ne serait pas nécessaire pour les importateurs.

(15)

Neuf producteurs communautaires ont dûment complété le formulaire d’échantillonnage et donné formellement leur accord pour continuer de coopérer à l’enquête. Quatre de ces neuf sociétés, dont il a été établi qu’elles étaient représentatives de l’industrie communautaire en ce qui concerne leur volume de production et leurs ventes d’urée dans la Communauté, ont été sélectionnées pour constituer l’échantillon. Les quatre producteurs communautaires inclus dans l’échantillon représentaient 50 % environ de la production totale de l’industrie communautaire, telle que définie dans le considérant 63, pendant la période d’enquête, tandis que les neuf producteurs communautaires susmentionnés représentaient 60 % environ de la production dans la Communauté. Cet échantillon constituait le plus grand volume représentatif de production et de ventes d’urée dans la Communauté, qui pouvait raisonnablement faire l’objet d’une enquête dans les délais impartis.

(16)

Cinq producteurs-exportateurs ont dûment complété le formulaire d’échantillonnage dans le délai prescrit et donné formellement leur accord pour continuer de coopérer à l’enquête. Ces cinq producteurs-exportateurs totalisaient 60 % des exportations totales de la Russie vers la Communauté pendant la période d’enquête.

(17)

Un échantillon de trois producteurs-exportateurs, qui pouvait raisonnablement faire l’objet d’une enquête dans les délais impartis, a été sélectionné en application de l’article 17 du règlement de base, sur la base du plus grand volume d’exportation d’urée réalisé vers la Communauté. Les trois producteurs-exportateurs de l’échantillon totalisaient 50 % des exportations totales de la Russie vers la Communauté pendant la période d’enquête.

(18)

Conformément à l’article 17, paragraphe 2, du règlement de base, les parties concernées ont été consultées sur les échantillons sélectionnés et n’ont pas soulevé d’objection.

(19)

Après l’obtention d’informations supplémentaires, il a été établi ultérieurement que l’un des trois producteurs-exportateurs sélectionnés dans l’échantillon ne figurait en fait pas parmi ceux qui réalisaient le plus grand volume d’exportation vers la Communauté. Celui-ci a donc été exclu de l’échantillon et remplacé par le producteur-exportateur classé quatrième. L’échantillon ainsi modifié représentait 48 % des exportations totales de la Russie vers la Communauté pendant la période d’enquête.

(20)

Des questionnaires ont donc été adressés aux quatre producteurs communautaires retenus dans l’échantillon, aux trois producteurs-exportateurs russes inclus dans l’échantillon, ainsi qu’aux importateurs et utilisateurs qui s’étaient fait connaître.

(21)

Des réponses au questionnaire ont été reçues de la part des quatre producteurs communautaires inclus dans l’échantillon et des trois producteurs-exportateurs de Russie, ainsi que d’un importateur non lié et de sept utilisateurs de la Communauté. En outre, plusieurs importateurs et utilisateurs et leurs associations ont soumis des commentaires sans répondre au questionnaire.

(22)

La Commission a recherché et vérifié toutes les informations jugées nécessaires aux fins de son travail d’analyse et elle a effectué des visites de vérification dans les locaux des sociétés suivantes:

a)

Producteurs communautaires inclus dans l’échantillon

Fertiberia SA, Madrid, Espagne,

Nitrogénmű vek Zrt., Pétfű rdo, Hongrie,

SKW Stickstoffwerke Piesteritz GmbH, Lutherstadt Wittenberg, Allemagne,

Yara SA, Bruxelles, Belgique, et son producteur lié Yara Sluiskil BV, Sluiskil, Pays-Bas.

b)

Producteurs-exportateurs de Russie inclus dans l’échantillon

JSC Mineral and Chemical Company (Eurochem), Moscou, Russie, et ses deux entreprises productrices liées:

OJSC Azot (NAK Azot), Novomoskovsk, Russie, et

OJSC Nevinnomyssky Azot (Nevinka Azot), Nevinnomyssk, Russie,

JSC Minudobrenia, Perm, Russie,

JSC Acron, Velikij Novgorod, Russie.

B.   PRODUIT CONCERNÉ ET PRODUIT SIMILAIRE

1.   Produit concerné

(23)

Le produit concerné est le même que celui défini dans l’enquête initiale et dans la précédente enquête de réexamen au titre de l’expiration des mesures, à savoir l’urée, relevant des codes NC 3102 10 10 et 3102 10 90 et originaire de Russie.

(24)

L’urée est produite principalement à partir de l’ammoniac, lui-même produit à partir de gaz naturel. L’urée se présente sous forme solide ou liquide. L’urée sous forme solide s’utilise dans l’agriculture et l’industrie. L’urée de qualité agricole peut être utilisée soit comme engrais, épandu sur le sol, soit comme complément de l’alimentation animale. L’urée de qualité industrielle est une matière de base pour la fabrication de certains plastiques et colles. L’urée sous forme liquide s’utilise aussi bien comme engrais qu’à des fins industrielles. Bien que l’urée se présente sous différentes formes, celles-ci possèdent pour l’essentiel les mêmes caractéristiques chimiques et peuvent donc être considérées aux fins de la présente procédure comme un seul et même produit.

2.   Produit similaire

(25)

Ainsi qu’il a été établi lors de l’enquête initiale et de la précédente enquête de réexamen au titre de l’expiration des mesures, les enquêtes de réexamen actuelles ont confirmé que le produit concerné et l’urée produite et vendue par les producteurs communautaires sur le marché de la Communauté, ainsi que l’urée produite et vendue sur le marché intérieur russe, possèdent les mêmes caractéristiques chimiques de base et sont réservées pour l’essentiel aux mêmes usages. Aussi sont-elles considérées comme des produits similaires, au sens de l’article premier, paragraphe 4, du règlement de base.

C.   PROBABILITÉ DE CONTINUATION OU DE RÉAPPARITION DU DUMPING

1.   Continuation du dumping pendant la période d’enquête

(26)

Conformément à l’article 11, paragraphe 2, du règlement de base, il a été examiné s’il y avait ou non dumping pendant la période d’enquête et, dans l’affirmative, si l’expiration des mesures était ou non susceptible d’entraîner la continuation du dumping.

1.1.   Remarques générales

(27)

Ainsi qu’il est mentionné dans le considérant 16, cinq producteurs-exportateurs russes d’urée ont coopéré à l’enquête. Ces cinq producteurs représentaient 60 % des exportations d’urée originaire de Russie vers la Communauté pendant la période d’enquête, soit 1,39 million de tonnes. Les importations dans la Communauté du produit concerné originaire de Russie représentaient 16 % de la consommation communautaire, chiffrée à 8,98 millions de tonnes pendant la période d’enquête.

(28)

Aussi le niveau de coopération est-il jugé élevé.

1.2.   Valeur normale

(29)

Il convient de noter que l’un des producteurs-exportateurs contrôle deux sociétés liées, toutes deux produisant et exportant de l’urée. Par conséquent, l’échantillon mentionné au considérant 19 inclut quatre sociétés.

(30)

Dans un premier temps, il a été déterminé, pour chacune des quatre sociétés, si le volume de leurs ventes totales d’urée sur le marché intérieur était ou non représentatif au sens de l’article 2, paragraphe 2, du règlement de base, en l’occurrence si ce volume représentait 5 % ou plus du volume total des ventes du produit concerné exporté vers la Communauté. L’enquête a montré que les quatre sociétés vendaient toutes un volume d’urée représentatif sur le marché intérieur.

(31)

Pour déterminer si ces ventes d’urée sur le marché intérieur étaient effectuées au cours d’opérations commerciales normales, il y avait lieu d’établir le coût de fabrication. À cet égard, il convient d’observer que les coûts d’énergie, notamment de l’électricité et du gaz, entrent pour une part importante dans le coût de fabrication et constituent une part significative du coût total de production. En conséquence, il a été examiné, conformément à l’article 2, paragraphe 5, du règlement de base, si les coûts afférents à la production et à la vente du produit considéré étaient ou non raisonnablement pris en compte dans les registres comptables des parties concernées.

(32)

L’enquête a montré qu’il n’y avait pas lieu de penser que les coûts de l’électricité n’étaient pas raisonnablement pris en compte dans les registres. À cet égard, il convient d’observer, entre autres, que les tarifs de l’électricité payés par les producteurs russes pendant la période d’enquête étaient conformes aux prix du marché mondial, par comparaison avec d’autres pays comme le Canada ou la Norvège. En revanche, il n’en va pas de même pour les tarifs du gaz.

(33)

En effet, s’agissant des fournitures de gaz, il a été établi, sur la base de chiffres publiés par des sources internationalement reconnues spécialisées dans les marchés énergétiques, que le tarif acquitté par les producteurs russes était anormalement bas. À titre d’exemple, ces prix représentaient un cinquième du prix à l’exportation du gaz naturel en provenance de Russie et étaient également nettement plus faibles que les prix payés par les producteurs communautaires. À cet égard, toutes les données disponibles indiquent que les prix intérieurs du gaz en Russie sont des prix régulés, qui sont très inférieurs aux prix du marché payés sur les marchés du gaz naturel non régulés. Les coûts du gaz n’étant pas raisonnablement pris en compte dans les registres comptables des quatre sociétés, il y avait lieu de les ajuster, conformément à l’article 2, paragraphe 5, du règlement de base. Le coût de fabrication des sociétés incluses dans l’échantillon a donc été ajusté en conséquence.

(34)

En l’absence de prix du gaz non faussés sur le marché intérieur russe et conformément à l’article 2, paragraphe 5, du règlement de base, les prix du gaz ont dû être calculés sur une autre base raisonnable, y compris au moyen d’informations provenant d’autres marchés représentatifs. Le prix ajusté a été établi à partir du prix moyen du gaz russe lorsque celui-ci est exporté à la frontière germano-tchèque (Waidhaus), net de frais de transport. Principale plaque tournante pour les ventes de gaz russe à l’Union européenne, laquelle est à la fois le principal débouché du gaz russe et applique des tarifs qui reflètent raisonnablement les coûts de revient, Waidhaus peut être considérée comme un marché représentatif.

(35)

Après ajustement des coûts de fabrication selon la procédure ci-dessus, il ne restait plus que deux sociétés qui réalisaient des ventes représentatives sur le marché intérieur au cours d’opérations commerciales normales. En conséquence, la valeur normale pour ces deux sociétés a été établie sur leurs ventes du produit similaire sur le marché intérieur, conformément à l’article 2, paragraphe 2, du règlement de base.

(36)

Pour les deux autres sociétés, la valeur normale a été calculée sur la base des prix de vente sur le marché intérieur des deux producteurs réalisant des ventes représentatives sur le marché intérieur au cours d’opérations commerciales normales, mentionnées dans le considérant 35, conformément à l’article 2, paragraphe 1, du règlement de base. Pour des raisons de confidentialité, cette information n’a pas pu être communiquée avec plus de précision étant donné que l’une des deux sociétés, auprès de laquelle des renseignements ont été obtenus, est liée à une société pour laquelle la valeur normale a été établie. Par conséquent, si les informations avaient été divulguées, il aurait été possible pour cette société de reconstruire les données commerciales confidentielles de l’autre société.

1.3.   Prix à l’exportation

(37)

Dès lors que le produit concerné était exporté à des clients indépendants dans la Communauté, le prix à l’exportation a été établi conformément à l’article 2, paragraphe 8, du règlement de base, en l’espèce sur la base des prix à l’exportation réellement payés ou à payer.

(38)

S’agissant d’un producteur-exportateur dont les ventes étaient réalisées par l’intermédiaire d’un opérateur commercial lié établi en Suisse, le prix à l’exportation a été calculé sur la base des prix de revente de cet opérateur lié à des clients indépendants. Des ajustements ont été opérés pour tenir compte de tous les coûts supportés par l’opérateur commercial entre l’achat et la revente, notamment les frais de transport et de vente, les frais généraux et les dépenses administratives, ainsi qu’une marge bénéficiaire raisonnable.

1.4.   Comparaison

(39)

La valeur normale et le prix à l’exportation ont été comparés sur une base départ usine. Afin de garantir une comparaison équitable entre la valeur normale et le prix à l’exportation, des ajustements ont été opérés pour tenir dûment compte des différences affectant les prix et leur comparabilité, conformément à l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base. En conséquence, des ajustements ont été opérés, s’il y avait lieu, au titre des différences dans les frais de transport, de manutention, de chargement et dans les coûts accessoires, dans les coûts du crédit, les commissions et les frais d’emballage, le tout étant étayé par des justificatifs vérifiés.

1.5.   Continuation du dumping

(40)

La marge de dumping a été établie, pour chaque producteur-exportateur, sur la base d’une comparaison entre une valeur normale moyenne pondérée et un prix à l’exportation moyen pondéré, conformément à l’article 2, paragraphes 11 et 12, du règlement de base.

(41)

L’enquête a montré qu’il y avait bien eu dumping pendant la période d’enquête, pour l’essentiel à un niveau inférieur à celui constaté dans la précédente enquête de réexamen au titre de l’expiration des mesures. Les marges de dumping, exprimées en pourcentage du prix caf frontière communautaire, droits non acquittés, sont néanmoins substantielles et comprises dans une fourchette de 6 % à 23 %.

2.   Probabilité de continuation du dumping

2.1.   Effet de la suppression des mesures existantes sur les importations faisant l’objet d’un dumping

(42)

Ainsi qu’il est mentionné au considérant 1, les mesures en vigueur se présentent sous la forme d’un PMI de 115 EUR par tonne. Si ce PMI a initialement influé sur les prix des exportations russes d’urée vers la Communauté, ces derniers sont nettement supérieurs au PMI depuis 2003, ainsi qu’il est mentionné dans le considérant 67, et les prix moyens des exportations russes étaient supérieurs de 68 % au PMI pendant la période d’enquête.

(43)

En conséquence, il peut être conclu que les mesures actuellement en vigueur n’ont pas eu d’impact sur les prix et sur les volumes des exportations d’urée originaire de Russie. Il s’ensuit que l’abrogation de ces mesures n’aurait probablement pas d’effet sur les prix ou les volumes des exportations d’urée originaire de Russie.

(44)

Nonobstant ce qui précède, les effets possibles i) de la capacité de réserve russe existante et d’une éventuelle capacité supplémentaire et ii) la probabilité d’une réorientation d’autres ventes vers la Communauté ont également fait l’objet d’un examen pendant l’enquête, ainsi qu’il est exposé ci-après.

2.2.   Capacité de réserve

(45)

Dans sa demande de réexamen, la partie requérante a présenté des faits établissant que neuf nouveaux projets au total allaient créer une nouvelle capacité de production substantielle en Russie, entre 2005 et 2007, à la suite de la rénovation, de la modernisation et du dégoulottage de certaines unités de production, soit une augmentation de la capacité de production existante d’au moins 10 %.

2.2.1.   Producteurs ayant coopéré

(46)

Les effets possibles de la capacité de réserve existante ont été analysés. Les producteurs russes inclus dans l’échantillon ont pu accroître leur capacité de production d’environ 5 %, alors qu’ils augmentaient leur production d’environ 15 % pendant la période considérée. Leur capacité de réserve nominale a donc diminué nettement, passant ainsi à 170 000 tonnes, soit approximativement 6 % de leur capacité de production:

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Capacité

2 567 648

2 567 648

2 567 648

2 640 100

2 686 591

Production

2 179 525

2 213 096

2 364 564

2 537 327

2 516 367

Capacité de réserve

388 123

354 552

203 084

102 773

170 224

(47)

Au total, cinq des neuf projets mentionnés dans la demande de réexamen concernaient des producteurs-exportateurs ayant coopéré. Deux projets étaient d’ores et déjà achevés pendant la période considérée et n’apportent donc pas de capacité supplémentaire par rapport à la période d’enquête. Pour l’un des projets de la liste, seule une augmentation de capacité négligeable a pu être établie.

(48)

S’agissant des deux projets les plus importants, qui représentent l’essentiel de l’augmentation de capacité mentionnée dans le considérant 46, il a été établi que la société n’investit pas seulement dans des capacités de production d’urée, mais aussi dans des installations de production en aval, pour des produits comme les résines urée-formaldéhyde et les solutions d’urée et de nitrate d’ammonium. Ces projets sont à un stade avancé, ou ont été achevés dès la fin de la période d’enquête. Il y a donc tout lieu de supposer que la majeure partie de la capacité créée par les projets ne sera pas vendue à des clients indépendants, mais utilisée exclusivement comme matière de base pour les productions en aval. Cette partie n’est donc pas prise en considération dans le paragraphe suivant.

(49)

Il découle de ce qui précède que les trois projets fourniraient une capacité supplémentaire, disponible à la vente à des clients indépendants, estimée à 150 000-200 000 tonnes environ. Cette fourchette correspond à 10 %-15 % des exportations russes totales vers la Communauté pendant la période d’enquête, soit une part de marché potentielle de 1,5 %-2 % du marché communautaire.

2.2.2.   Producteurs n’ayant pas coopéré

(50)

La capacité de réserve globale, en pourcentage de la capacité de production en Russie, est conforme à la capacité de réserve établie pour les producteurs ayant coopéré, selon les informations soumises par la partie requérante. Par conséquent, il est estimé que les producteurs n’ayant pas coopéré disposent eux aussi d’une capacité de réserve d’environ 5 % de la capacité de production, évaluée à environ 140 000 tonnes durant la période d’enquête.

(51)

Au total, quatre des neuf projets mentionnés dans la demande de réexamen concernaient des producteurs-exportateurs n’ayant pas coopéré. Ces projets ont été évalués à partir des faits disponibles. Pour l’un des projets, il a été constaté qu’il ne portait pas sur le produit concerné, mais sur du méthanol. Un autre projet était déjà terminé pendant la période considérée et n’apporte donc pas de capacité supplémentaire par rapport à la période d’enquête. Un troisième concernait un investissement mineur de moins d’un million d’euros par an et est donc réputé ne pas avoir un impact quantifiable sur la capacité de production russe. S’agissant du quatrième et dernier projet, il était susceptible d’augmenter la capacité de production d’environ 100 000 tonnes (soit 7 % environ des exportations russes totales vers la Communauté pendant la période d’enquête, ou une part de marché potentielle de 1 % du marché communautaire).

2.2.3.   Conclusion sur la capacité de réserve

(52)

L’enquête a montré que la capacité supplémentaire disponible à moyen terme sera de l’ordre de 500 000 tonnes. Or, étant donné qu’une partie importante de cette quantité supplémentaire résultant de la rénovation, de la modernisation et du dégoulottage de certaines unités de production sera utilisée de façon captive comme matière de base pour la fabrication de produits en aval, la conclusion est que seule la moitié à peu près de cette quantité sera disponible à la vente à des clients indépendants.

(53)

Étant donné que le marché intérieur russe est de dimension restreinte et que rien n’indique que cet état de fait puisse changer à l’avenir, toute augmentation de la production sera destinée à l’exportation. Le taux d’utilisation nominal de la capacité des producteurs russes approchant 95 %, les quantités supplémentaires disponibles à l’exportation sont réduites.

(54)

La capacité de réserve existante et la capacité supplémentaire non captive qui devraient être créées dans un proche avenir représentent ensemble quelque 550 000-600 000 tonnes, ce qui correspond à approximativement 40 % des exportations totales de la Russie vers la Communauté durant la période d’enquête, soit une part potentielle de 6 % environ du marché communautaire. Toutefois, selon les prévisions de consultants spécialisés dans le secteur des engrais, fournies par la partie requérante, la demande mondiale d’urée devrait augmenter au même rythme que la capacité de production mondiale. Par conséquent, les quantités supplémentaires disponibles à l’exportation pourraient être orientées quasi automatiquement vers les régions où il existe une demande supplémentaire. Il est donc probable que les exportations russes vers la Communauté n’augmentent de façon significative que s’il existe un accroissement équivalent de la demande; en d’autres termes, ces exportations supplémentaires ne devraient pas avoir d’impact négatif sur le niveau des prix sur le marché communautaire.

(55)

En conséquence, il n’y a pas lieu de conclure que la capacité de réserve de la Russie affectera le volume des exportations russes faisant l’objet d’un dumping en direction de la Communauté.

2.3.   Probabilité d’une réorientation d’autres ventes vers la Communauté

(56)

Pendant la période d’enquête, les prix départ usine à l’exportation vers la Communauté des producteurs-exportateurs inclus dans l’échantillon étaient entre 1 % et 5 % inférieurs aux prix à l’exportation vers d’autres pays tiers. Les prix sur le marché intérieur étaient également supérieurs aux prix à l’exportation vers la Communauté, en particulier pour les sociétés situées dans des régions reculées, en raison de disparités importantes dans les frais de transport.

(57)

La partie requérante fait valoir qu’il existe d’importants investissements dans la capacité de production d’urée, principalement en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Ces capacités supplémentaires seraient présumées réduire les débouchés des exportateurs russes sur les autres marchés et entraîner une augmentation des quantités d’urée exportées vers la Communauté. Cependant, il a été établi, à partir des prévisions mentionnées dans le considérant 54, que ces investissements n’auraient pas d’incidence majeure sur l’équilibre entre l’offre et la demande au niveau mondial puisque la demande mondiale devrait augmenter au même rythme que la capacité de production mondiale.

(58)

En conséquence, il n’y a pas lieu de conclure qu’une réorientation d’autres ventes vers la Communauté affectera le volume des exportations russes faisant l’objet d’un dumping en direction de la Communauté.

2.4.   Conclusion sur la probabilité de continuation du dumping

(59)

Sur le fondement de l’analyse ci-devant et compte tenu en particulier de l’absence d’impact des mesures actuelles sur les prix à l’exportation vers la Communauté, il y a lieu de conclure qu’il existerait une probabilité de continuation du dumping dans l’hypothèse d’une abrogation des mesures.

D.   DÉFINITION DE L’INDUSTRIE COMMUNAUTAIRE

(60)

Dans la Communauté, le produit similaire est fabriqué par seize producteurs, dont la production est réputée constituer la production communautaire totale, au sens de l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base. Huit de ces seize producteurs sont devenus des producteurs communautaires du fait de l’élargissement de l’Union européenne en 2004.

(61)

Sur les seize producteurs communautaires, neuf sociétés ont coopéré à l’enquête, toutes étant mentionnées dans la demande de réexamen. Trois autres producteurs se sont fait connaître dans les délais impartis et ont envoyé les renseignements demandés aux fins de la sélection de l’échantillon. Toutefois, ils n’ont pas proposé de coopérer plus avant. Aucun producteur n’a émis d’objection à la demande de réexamen.

(62)

Les neuf producteurs ayant donné leur accord pour coopérer sont les suivants:

Achema AB (Lituanie),

AMI Agrolinz Melamine International GmbH (Autriche),

Chemopetrol, a.s. (République tchèque),

Duslo, a.s. (République slovaque),

Fertiberia SA (Espagne),

Grande Paroisse SA (France),

Nitrogénmű vek Zrt. (Hongrie),

SKW Stickstoffwerke Piesteritz GmbH (Allemagne),

Yara: groupe consolidé constitué de Yara France SA (France), Yara Italia S.p.a. (Italie), Yara Brunsbuttel GmbH (Allemagne) et Yara Sluiskil B.V. (Pays-Bas) (7).

(63)

Étant donné que ces neuf producteurs communautaires totalisaient 60 % environ de la production communautaire totale pendant la période d’enquête, ceux-ci sont considérés comme représentant une proportion majeure de la production communautaire totale du produit similaire. En conséquence, ils sont réputés constituer l’industrie communautaire, au sens des articles 4, paragraphe 1, et 5, paragraphe 4, du règlement de base, et sont dénommés ci-après l’«industrie communautaire». Les sept autres producteurs communautaires n’ayant pas coopéré sont dénommés ci-après les «autres producteurs communautaires».

(64)

Ainsi qu’il est indiqué plus haut, un échantillon de quatre sociétés a été sélectionné. Tous les producteurs communautaires inclus dans l’échantillon ont coopéré et retourné le questionnaire dans les délais. En outre, les cinq autres producteurs ayant coopéré ont dûment fourni certaines informations d’ordre général en vue de l’analyse du préjudice.

E.   SITUATION SUR LE MARCHÉ COMMUNAUTAIRE

1.   Consommation sur le marché communautaire

(65)

La consommation communautaire apparente d’urée a été établie à partir des données soumises par la partie requérante et de chiffres d’Eurostat, portant sur la totalité des importations de l’Union européenne. Compte tenu de l’élargissement de l’Union européenne en 2004, la consommation a été calculée, dans un souci de clarté et de cohérence de l’analyse, sur la base du marché de l’Union européenne-25 sur l’ensemble de la période considérée. Cette enquête ayant été ouverte avant le nouvel élargissement de la Communauté à la Bulgarie et à la Roumanie, l’analyse se limite à la situation dans l’Union européenne-25.

(66)

La consommation communautaire a augmenté de 4 % entre 2002 et la période d’enquête.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Consommation communautaire totale en tonnes

8 651 033

8 945 707

8 954 402

8 873 804

8 978 696

Indice (2002 = 100)

100

103

104

103

104

2.   Volume, part de marché et prix des importations de Russie

(67)

Le volume, la part de marché et le prix moyen des importations de Russie ont évolué ainsi qu’il ressort du tableau ci-après. Les tendances de volume et de prix sont calculées à partir de chiffres d’Eurostat.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Volume des importations

(en tonnes)

1 375 543

1 429 565

1 783 742

1 404 863

1 393 277

Indice (2002 = 100)

100

104

130

102

101

Part de marché

16 %

16 %

20 %

16 %

16 %

Prix des importations

(en euros/tonne)

119

133

154

180

193

Indice (2002 = 100)

100

112

129

151

162

(68)

Le volume des importations de Russie ainsi que leur part de marché sont restés relativement stables sur toute la période considérée, à l’exception d’un pic en 2004, imputable à la constitution de stocks dans les 10 futurs États membres avant l’élargissement de l’Union européenne au 1er mai 2004. Les prix des importations russes ont augmenté de 119 à 193 EUR par tonne pendant la période considérée. Cette évolution témoigne de l’existence de conditions de marché favorables, évoquées également dans le considérant 85.

(69)

Les prix russes à l’importation montrent que depuis le début de la période considérée (2002), les producteurs russes exportent vers la Communauté à un niveau de prix bien supérieur au prix à l’importation minimum de 115 EUR par tonne.

(70)

Aux fins du calcul du niveau de sous-cotation des prix pendant la période d’enquête, les prix départ usine de l’industrie communautaire aux clients non liés ont été comparés aux prix caf frontière communautaire des producteurs-exportateurs ayant coopéré du pays concerné, dûment corrigés pour rendre compte d’un prix au débarquement. La comparaison a montré que les importations de Russie n’étaient pas sous-cotées par rapport aux prix de l’industrie communautaire.

3.   Importations en provenance d’autres pays

(71)

L’évolution du volume des importations en provenance d’autres pays tiers pendant la période considérée est présentée dans le tableau ci-après. Les tendances de volume et de prix sont également calculées à partir de chiffres d’Eurostat.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Volume des importations en provenance d’Égypte (en tonnes)

579 830

629 801

422 892

385 855

457 056

Part de marché

7 %

7 %

5 %

4 %

5 %

Prix des importations en provenance d’Égypte (en euros/tonne)

149

163

178

220

224

Volume des importations en provenance de Roumanie (en tonnes)

260 298

398 607

235 417

309 195

239 335

Part de marché

3 %

4 %

3 %

3 %

3 %

Prix des importations en provenance de Roumanie (en euros/tonne)

123

142

175

197

209

Volume des importations en provenance de Croatie (en tonnes)

126 400

179 325

205 921

187 765

187 362

Part de marché

1 %

2 %

2 %

2 %

2 %

Prix des importations en provenance de Croatie (en euros/tonne)

125

135

145

172

177

Volume des importations en provenance de tous les autres pays non mentionnés ci-dessus (en tonnes)

663 940

605 063

536 345

580 311

492 659

Part de marché

8 %

7 %

6 %

7 %

5 %

Prix des importations en provenance de tous les autres pays non mentionnés ci dessus (en euros/tonne)

128

172

169

206

216

(72)

Il convient d’observer que l’Égypte et la Roumanie ont toutes deux réduit leur volume d’exportation entre 2002 et la période d’enquête, tandis que le volume d’exportation de la Croatie est passé de 126 mille tonnes en 2002 à 187 mille tonnes pendant la période d’enquête. Toutefois, la part du marché communautaire détenue par la Croatie est restée stable à 1-2 %. S’agissant du prix des exportations, l’Égypte a exporté vers la Communauté à des prix supérieurs à ceux de l’industrie communautaire sur l’ensemble de la période considérée, de même que la Roumanie à compter de 2004. En revanche, les prix de la Croatie ont été inférieurs à ceux de l’industrie communautaire sur l’ensemble de la période considérée. Pour autant, la Croatie n’a pas augmenté sa part sur le marché communautaire pendant la période considérée. Il convient de noter que les importations en provenance de Croatie sont soumises, depuis janvier 2002, à un droit antidumping de 9,01 EUR par tonne, en vertu du règlement (CE) no 92/2002 du Conseil (8).

4.   Situation économique de l’industrie communautaire

(73)

En application de l’article 3, paragraphe 5, du règlement de base, la Commission a procédé à une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents qui influent sur la situation de l’industrie communautaire.

4.1.   Remarques préliminaires

(74)

Lorsqu’il est procédé par échantillonnage, conformément à la pratique établie, certains indicateurs de préjudice (production, capacité de production, productivité, stocks, volume des ventes, part de marché, croissance et emploi) sont analysés pour l’industrie communautaire considérée dans son ensemble, tandis que les indicateurs de préjudice relatifs aux performances de chaque société (prix, rentabilité, salaires, investissements, rendement des investissements, flux de liquidités, aptitude à mobiliser des capitaux) sont évalués à partir des informations recueillies auprès des producteurs communautaires inclus dans l’échantillon.

4.2.   Données relatives à l’industrie communautaire dans son ensemble

a)    Production

(75)

Le volume de production totale de l’industrie communautaire, y compris la production destinée à un usage captif, est demeuré stable à 4,3 millions de tonnes entre 2002 et la période d’enquête, si l’on excepte un léger accroissement temporaire en 2003. Dans le chiffre de production totale, la part de la production destinée à un usage captif est elle aussi demeurée quasiment stable, à quelque 20 % de la production totale, ce qui montre que le tableau d’ensemble du préjudice subi par l’industrie communautaire ne peut pas s’en trouver modifié.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Production de l’industrie communautaire (en tonnes)

4 311 986

4 540 021

4 331 387

4 369 705

4 322 214

Indice (2002 = 100)

100

105

100

101

100

Production de l’industrie communautaire destinée à des transferts captifs

832 919

837 701

842 643

899 173

893 573

Indice (2002 = 100)

100

101

101

108

107

En % de la production totale

19,3 %

18,5 %

19,5 %

20,6 %

20,7 %

b)    Capacité de production et taux d’utilisation des capacités

(76)

La capacité de production a augmenté légèrement entre 2002 et la période d’enquête (5 %). Compte tenu du fait que le volume de production de l’industrie communautaire est demeuré stable, le taux d’utilisation des capacités de production a diminué légèrement pendant la période considérée, passant de 84 % en 2002 à 81 % pendant la période d’enquête. Cependant, ainsi qu’il avait déjà été constaté dans la précédente enquête de réexamen au titre de l’expiration des mesures, l’ammoniac utilisé pour produire de l’urée peut également l’être pour produire d’autres engrais. En conséquence, le taux d’utilisation des capacités de production de l’urée peut également être affecté par le développement d’autres engrais, et il est donc moins pertinent comme indicateur de préjudice.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Capacité de production de l’industrie communautaire (en tonnes)

5 109 600

5 153 906

5 156 743

5 402 760

5 362 590

Indice (2002 = 100)

100

101

101

106

105

Taux d’utilisation des capacités de production de l’industrie communautaire

84 %

88 %

84 %

81 %

81 %

Indice (2002 = 100)

100

104

100

96

96

c)    Stocks

(77)

Le niveau des stocks de clôture de l’industrie communautaire a été volatil pendant la période considérée. Une augmentation de 27 % a été enregistrée de 2002 à 2005, mais elle a été suivie d’une diminution brutale au cours des trois derniers mois de la période d’enquête (janvier à mars 2006). Cette forte volatilité des niveaux de stocks peut s’expliquer par le caractère saisonnier des ventes et par le fait que l’urée destinée à un usage captif est stockée avec l’urée vendue sur le marché libre. Aussi le niveau des stocks est-il considéré comme un indicateur de préjudice moins pertinent.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Stocks de clôture de l’industrie communautaire (en tonnes)

253 853

238 888

262 194

322 766

223 941

Indice (2002 = 100)

100

94

103

127

88

d)    Volume des ventes

(78)

Les ventes de l’industrie communautaire sur le marché communautaire ont reculé légèrement (3 %), entre 2002 et la période d’enquête.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Volume des ventes de l’industrie communautaire dans la Communauté

(en tonnes)

3 155 215

3 242 758

3 054 663

2 996 471

3 048 955

Indice (2002 = 100)

100

103

97

95

97

e)    Part de marché

(79)

La part de marché détenue par l’industrie communautaire a également légèrement reculé pendant la période considérée, de 36,5 % en 2002 à 34,0 % pendant la période d’enquête.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Part de marché de l’industrie communautaire

36,5 %

36,3 %

34,1 %

33,8 %

34,0 %

Indice (2002 = 100)

100

99

93

93

93

f)    Croissance

(80)

L’industrie communautaire a cédé une fraction de sa part de marché (2,5 points de pourcentage) sur un marché en légère hausse (4 %) sur la période considérée. La part de marché cédée n’a pas été reprise par les importations russes car, ainsi qu’il est indiqué dans le considérant 67, la part de marché des importations russes est demeurée stable entre 2002 et la période d’enquête. Compte tenu également du fait que la part de marché des importations en provenance d’autres pays a diminué de 3,5 points de pourcentage, la conclusion qui s’impose est que la part de marché cédée par l’industrie communautaire a été reprise par d’autres producteurs communautaires.

g)    Emploi

(81)

Le niveau de l’emploi dans l’industrie communautaire a reculé de 6 % entre 2002 et la période d’enquête, tandis que la production progressait légèrement, ce qui témoigne d’un accroissement de la productivité.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Emploi dans l’industrie communautaire

(produit concerné)

1 233

1 228

1 157

1 161

1 164

Indice (2002 = 100)

100

100

94

94

94

h)    Productivité

(82)

La production annuelle par salarié de l’industrie communautaire a progressé de 6 % entre 2002 et la période d’enquête, compte tenu d’une baisse de la même ampleur du niveau de l’emploi et d’une stabilité de la production de l’industrie communautaire.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Productivité de l’industrie communautaire (en tonnes/salarié)

3 497

3 697

3 744

3 764

3 713

Indice (2002 = 100)

100

106

107

108

106

i)    Ampleur de la marge de dumping

(83)

S’agissant de l’impact sur l’industrie communautaire de l’ampleur de la marge réelle de dumping établie pour la période d’enquête, compte tenu du fait que i) le volume des importations de Russie est demeuré à un niveau relativement stable sur la période considérée, ii) que les prix des importations russes ont progressé de manière significative sur toute la même période, iii) qu’il n’y a pas eu sous-cotation des prix pendant la période d’enquête, et compte tenu de iv) la situation financière globale de l’industrie communautaire, cet impact est considéré comme non significatif et cet indicateur est jugé non pertinent.

j)    Redressement à la suite des pratiques de dumping antérieures

(84)

Les indicateurs analysés ci-devant et ci-après montrent à l’évidence une amélioration significative de la situation économique et financière de l’industrie communautaire.

4.3.   Données relatives aux producteurs communautaires inclus dans l’échantillon

a)    Prix de vente et facteurs influant sur les prix du marché intérieur

(85)

Le prix de vente unitaire moyen des producteurs de l’industrie communautaire inclus dans l’échantillon à des clients non liés a considérablement augmenté entre 2002 et la période d’enquête, témoignant par là même des conditions favorables prévalant sur le marché international de l’urée pendant la même période.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Prix unitaire des producteurs de l’échantillon sur le marché de la Communauté (en euros/tonne)

137

149

164

188

199

Indice (2002 = 100)

100

109

120

137

145

b)    Salaires

(86)

Le coût annuel de la main-d’œuvre par salarié a connu une hausse modérée de 11 % entre 2002 et la période d’enquête.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Coût annuel de la main-d’œuvre par salarié des producteurs de l’échantillon

(en milliers d’euros)

47

50

50

52

52

Indice (2002 = 100)

100

106

106

111

111

c)    Investissements

(87)

Le flux annuel des investissements dans le produit similaire consentis par les quatre producteurs de l’échantillon a connu une évolution positive pendant la période considérée, c’est-à-dire qu’il a progressé de 10 % entre 2002 et la période d’enquête, en dépit de quelques fluctuations.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Investissements nets des producteurs de l’échantillon (en milliers d’euros)

116 186

114 079

128 191

140 967

128 259

Indice (2002 = 100)

100

98

110

121

110

d)    Rentabilité et rendement des investissements

(88)

La rentabilité des producteurs inclus dans l’échantillon présente une amélioration significative entre 2002 et la période d’enquête, où elle a atteint 16,9 %. À cet égard, il convient d’observer qu’il avait été établi, dans l’enquête initiale, qu’il était possible de réaliser une marge bénéficiaire de 5 % en l’absence de tout dumping préjudiciable. Le rendement des investissements, qui correspond au bénéfice exprimé en pourcentage de la valeur comptable nette des investissements, a suivi dans les grandes lignes la même évolution que la rentabilité: il a plus que triplé pendant la période considérée.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Rentabilité des ventes des producteurs de l’échantillon à des clients indépendants dans la Communauté (en % des ventes nettes)

7,3 %

10,9 %

17,7 %

18,4 %

16,9 %

Indice (2002 = 100)

100

149

242

252

232

Rendement des investissements des producteurs de l’échantillon (bénéfice en % de la valeur comptable nette des investissements)

13,3 %

27,2 %

45,7 %

47,0 %

45,9 %

Indice (2002 = 100)

100

205

344

353

345

e)    Flux de liquidités et aptitude à mobiliser des capitaux

(89)

Les flux de liquidités ont plus que triplé pendant la période considérée. Cette évolution est conforme à celle de la rentabilité et du rendement des investissements pendant la période considérée.

 

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Flux de liquidités des producteurs de l’échantillon (en milliers d’euros)

30 283

52 110

84 340

99 110

105 287

Indice (2002 = 100)

100

172

279

327

348

(90)

L’enquête n’a pas révélé de difficultés chez les producteurs communautaires inclus dans l’échantillon à mobiliser des capitaux.

5.   Conclusion

(91)

La part de marché de l’industrie communautaire a légèrement reculé, de même que son volume de ventes sur le marché communautaire, entre 2002 et la période d’enquête. Toutefois, la situation financière globale de l’industrie communautaire s’est extrêmement améliorée pendant la période considérée, par rapport à la période antérieure à la précédente enquête de réexamen au titre de l’expiration des mesures, laquelle avait abouti en 2001 au maintien des mesures existantes, en vigueur depuis 1995.

(92)

Pendant la période considérée, la rentabilité des producteurs inclus dans l’échantillon s’est considérablement accrue, dépassant nettement, chaque année de cette période, le niveau de rentabilité défini comme objectif de bénéfice dans l’enquête initiale. De même, le rendement des investissements et les flux de liquidités ont fortement progressé. Le volume de production de l’industrie communautaire est resté stable. Les prix de vente des producteurs de l’échantillon ont connu une évolution positive sur l’ensemble de la période considérée. Les salaires ont suivi une hausse modérée et l’industrie communautaire continue d’investir.

(93)

Il convient d’observer que l’évolution extrêmement positive de la rentabilité de l’industrie communautaire est intervenue dans un contexte de prix des exportations russes vers la Communauté nettement supérieurs au PMI, quoique faisant l’objet d’un dumping. En conséquence, les prix des exportations russes n’ont pas affecté l’industrie communautaire pendant toute la période considérée.

(94)

Après avoir reçu communication des conclusions de la Commission, la partie requérante a affirmé que la rentabilité à long terme, mesurée par la marge bénéficiaire, de l’industrie de l’urée devrait atteindre un niveau de 25 % après impôt, ce qui se traduirait par un bénéfice avant impôt sur le chiffre d’affaires d’environ 36 %. La partie requérante prétend que cela se justifie par le coût d’établissement d’un nouveau complexe de production de l’ammoniac/l’urée, qui nécessiterait un rendement des investissements de 11 % (supposé être équivalent au bénéfice avant impôt sur le chiffre d’affaires de 36 %). À cet égard, il convient de noter que la partie requérante n’a jamais revendiqué un objectif de bénéfice aussi élevé dans le cadre de la présente procédure et que lors de l’enquête initiale, une marge bénéficiaire de 5 % susceptible d’être dégagée en l’absence de dumping préjudiciable a été établie. En outre, le tribunal de première instance, dans son arrêt rendu dans l’affaire T-210/95, a rappelé que «… la marge bénéficiaire devant être retenue par le Conseil pour calculer le prix indicatif de nature à éliminer le préjudice en cause doit être limitée à la marge bénéficiaire que l’industrie communautaire pourrait raisonnablement escompter dans des conditions normales de concurrence, en l’absence des importations faisant l’objet d’un dumping» (9). Dans la même affaire, le tribunal a confirmé que: «… [l’] argument […], selon lequel la marge bénéficiaire devant être retenue par les institutions communautaires doit être celle nécessaire pour assurer la survie de l’industrie communautaire et/ou une rémunération adéquate de son capital, ne trouve aucun fondement dans le règlement de base» (10). En effet, dans la présente affaire, la partie requérante n’a pas apporté la preuve qu’en l’absence d’importations faisant l’objet d’un dumping, l’industrie communautaire aurait été en mesure d’atteindre les niveaux de rendement requis. La partie requérante n’a pas non plus indiqué la marge bénéficiaire que l’industrie communautaire aurait pu obtenir en l’absence d’importations en dumping. Cet argument a donc été rejeté.

(95)

Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure qu’il n’y a pas eu poursuite du préjudice matériel à l’industrie communautaire.

F.   PROBABILITÉ DE RÉAPPARITION DU PRÉJUDICE

(96)

Étant donné qu’il n’y a pas eu continuation du préjudice matériel occasionné par les importations depuis le pays concerné, l’analyse s’est concentrée sur la probabilité de réapparition d’un préjudice matériel en cas d’abrogation des mesures existantes. À cet effet, l’absence d’impact des mesures existantes sur le volume et le prix des importations depuis la Russie a été analysée. En outre, les effets possibles de la capacité de réserve russe existante et d’éventuelles nouvelles capacités de production, ainsi que la probabilité d’une réorientation d’autres ventes des producteurs russes vers la Communauté, ont été soumis à examen.

1.   Absence d’impact des mesures existantes sur le volume et le prix des importations

(97)

Ainsi qu’il ressort du tableau ci-après, les prix des exportations russes du produit concerné vers la Communauté ont toujours été supérieurs, depuis 2002, au PMI fixé à 115 EUR par tonne, cependant qu’ils se situaient nettement au-dessus de ce dernier entre 2003 et la fin de la période considérée. Les prix moyens des exportations russes vers le marché communautaire étaient supérieurs de 68 % au PMI pendant la période d’enquête. Ces faits confirment à l’évidence que depuis 2003 au moins, les mesures existantes n’ont pas eu d’effet sur les prix des exportations russes.

 

Prix unitaire moyen (en euros/tonne)

2002

2003

2004

2005

Période d’enquête

Prix moyen des exportations russes

119

133

154

180

193

PMI

115

115

115

115

115

Surcote des prix russes par rapport au PMI (en %)

3 %

16 %

34 %

56 %

68 %

Source: Eurostat (pour les prix des exportations russes)

(98)

Aussi, toute chose étant égale par ailleurs, il n’y a aucune raison pour que les producteurs-exportateurs russes appliquent des prix inférieurs dans l’hypothèse d’une abrogation des mesures existantes, étant donné qu’ils ont pu auparavant maintenir des prix nettement supérieurs.

(99)

De surcroît, ainsi qu’il ressort du considérant 67, les exportateurs russes ont maintenu leur volume d’exportation vers le marché communautaire à un niveau relativement stable sur l’ensemble de la période considérée, alors même que les mesures existantes n’ont eu aucun effet concret sur les prix des exportations depuis 2002 et qu’elles n’ont donc pas constitué un obstacle à une augmentation des exportations russes.

(100)

En conséquence, toute chose étant égale par ailleurs, il est peu probable que les producteurs-exportateurs russes écoulent des volumes supplémentaires sur le marché communautaire dans l’hypothèse d’une abrogation des mesures existantes, étant donné que celles-ci n’ont pas eu d’effet sur le volume des exportations russes.

(101)

En conséquence, il est conclu que les mesures existantes n’ayant pas eu d’effet ni sur les prix des exportations pratiqués par les exportateurs russes ni sur les prix payés par les importateurs communautaires pour ces mêmes importations, ni encore sur les quantités des exportations russes vers la Communauté, il est peu probable que l’abrogation desdites mesures ait un impact sur les prix ou les quantités. Aussi le retrait des mesures n’aurait-il aucun impact sur la situation de l’industrie communautaire. En conséquence, il n’y a pas lieu de conclure qu’il existerait une probabilité de réapparition du préjudice à l’industrie communautaire en cas d’abrogation des mesures existantes.

(102)

Nonobstant la conclusion qui précède, les différentes allégations de l’industrie communautaire eu égard aux effets possibles de la capacité de réserve existante russe et d’éventuelles nouvelles capacités de production, et à la probabilité d’une réorientation d’autres ventes des producteurs russes vers la Communauté, ont fait également l’objet d’un examen dans le cadre de l’enquête, ainsi qu’il est exposé ci-après.

2.   Capacité de réserve russe

(103)

Ainsi qu’il est exposé aux considérants 46 et 50, aucun des producteurs russes inclus dans l’échantillon ne disposait d’une capacité de réserve significative pendant la période d’enquête et la capacité de réserve globale de l’ensemble des producteurs russes a été estimée de l’ordre de 5 %. À cet égard, les conclusions de l’enquête sont pleinement conformes avec ce que fait valoir la partie requérante.

(104)

Ainsi qu’il a déjà été précisé au considérant 52, il a été établi que les neufs projets mentionnés par la partie requérante ne devraient pas avoir d’effet négatif notable sur le marché communautaire, puisqu’une part importante de cette capacité supplémentaire créée par ces projets sera utilisée de façon captive. En outre, comme indiqué au considérant 54, les exportations russes vers la Communauté seraient susceptibles d’augmenter en quantité significative uniquement en cas de hausse équivalente de la demande, auquel cas ces exportations additionnelles ne devraient pas avoir d’effet négatif sur le niveau des prix sur le marché communautaire.

(105)

Au vu de ce qui précède, il est conclu que les producteurs russes ne disposeront que de quantités supplémentaires limitées disponibles à la vente, à la suite de la rénovation, de la modernisation et du dégoulottage de certaines unités de production. Il s’ensuit que la capacité de réserve des producteurs russes ne leur permettrait pas d’accroître leurs exportations vers le marché communautaire de façon significative.

3.   Probabilité d’une réorientation d’autres ventes vers la Communauté

(106)

Ainsi qu’il ressort du considérant 67, les importations en provenance de Russie vers le marché communautaire sont demeurées relativement stables sur l’ensemble de la période considérée et représentaient une part de marché de 16 % de la consommation communautaire sur l’ensemble de la période considérée, si l’on excepte un pic en 2004 (à quelque 20 %). Cette stabilité a été observée alors même que les mesures existantes n’ont eu aucun effet concret sur les prix et les volumes des exportations sur l’ensemble de la période considérée et qu’elles n’ont donc pas constitué un obstacle à un accroissement des exportations russes, ainsi qu’il est exposé plus haut.

(107)

L’enquête a montré que pendant la période d’enquête, les prix départ usine des exportations des producteurs-exportateurs vers la Communauté étaient inférieurs de 1 % à 5 % aux prix des exportations à destination d’autres pays tiers. Ainsi qu’il est indiqué au considérant 56, les prix départ usine des ventes russes sur le marché intérieur étaient eux aussi supérieurs aux prix des exportations vers la Communauté, en particulier pour les sociétés situées dans des régions reculées, en raison des disparités importantes dans les frais de transport évoquées précédemment. En vertu de quoi, il y a lieu de conclure qu’en matière de prix, le marché communautaire ne présente pas un intérêt particulier par rapport à d’autres grands marchés pour les producteurs russes.

(108)

Par ailleurs, ainsi qu’il est mentionné dans le considérant 57, la partie requérante a fait valoir que la production provenant de capacités supplémentaires en cours de construction, notamment en Afrique du Nord (Algérie et Égypte) et au Moyen-Orient (Iran), pèserait sur les prix mondiaux, réduisant ainsi la capacité de pénétration des exportateurs russes sur ces marchés et les conduisant à accroître leur volume d’exportation vers le marché communautaire. À cet égard, il a été établi, à partir des prévisions mentionnées dans le considérant 54, que ces investissements n’auraient pas d’incidence majeure sur l’équilibre entre l’offre et la demande au niveau mondial, puisque la demande mondiale devrait augmenter au même rythme que la capacité de production mondiale. De surcroît, l’enquête a montré que les Russes ont d’ores et déjà perdu des parts importantes sur les marchés asiatique (particulièrement en République populaire de Chine) et africain, et qu’ils résistent assez bien aux pressions s’exerçant sur les marchés d’Amérique latine. Compte tenu des prévisions d’équilibre entre l’offre et la demande mondiales, le scénario selon lequel les producteurs-exportateurs russes pourraient perdre de nouvelles parts de marché partout, sauf en Europe, semble peu probable.

(109)

La partie requérante a avancé que l’avantage de coût injuste dont bénéficient les producteurs russes du fait de l’existence de la double tarification du gaz pourrait conduire à une sous-cotation des prix de la part des exportateurs russes, entre autres, si le rapport entre l’offre et la demande au niveau international devenait défavorable. Si cette hypothèse ne peut être écartée car l’enquête a monté que la structure des coûts des exportateurs russes est effectivement faussée de façon significative par la double tarification du gaz pratiquée par la Russie, la sous-cotation potentielle ne serait pas une conséquence directe de la suppression des mesures, mais serait due à d’autres motifs.

(110)

En conséquence, il n’y a pas lieu de conclure que les producteurs russes auraient l’intention de réorienter vers la Communauté une part importante du volume actuellement exporté vers des pays tiers ou vendu sur le marché intérieur, voire de baisser leurs prix du fait de la suppression des mesures, même si l’on ne peut exclure cette éventualité mais pour d’autres motifs.

4.   Conclusion sur la probabilité d’une réapparition du préjudice

(111)

Ainsi qu’il a été exposé ci-devant, les mesures existantes n’ont pas eu d’effet ni sur les prix des exportations pratiqués par les exportateurs russes, ni sur les prix payés par les importateurs communautaires pour ces mêmes importations. Parallèlement et en dépit de la continuation du dumping sur les importations de Russie, l’industrie communautaire n’a pas subi de préjudice. L’abrogation des mesures existantes n’aura donc pas d’effet sur le prix ou le volume des exportations russes et par conséquent, pas d’effet sur la situation de l’industrie communautaire.

(112)

De surcroît, l’analyse des autres facteurs exogènes que fait valoir la partie requérante ne remet pas en cause la conclusion ci-dessus, puisqu’il n’est même pas fait mention de l’éventualité raisonnable d’une augmentation du volume et d’une baisse du prix des importations russes vers la Communauté, du fait de ces facteurs exogènes.

(113)

En vertu de ce qui précède, il n’y a pas lieu de conclure qu’il existerait une probabilité de réapparition du préjudice subi par l’industrie communautaire dans l’hypothèse où les mesures existantes seraient abrogées.

G.   MESURES ANTIDUMPING

(114)

Toutes les parties intéressées ont été informées des faits et considérations essentiels sur la base desquels il était envisagé de recommander l’abrogation des mesures existantes. Elles ont également bénéficié d’un délai pour soumettre leurs observations en réponse à cette information.

(115)

Il s’ensuit que, ainsi qu’en dispose l’article 11, paragraphe 2, du règlement de base, il convient d’abroger les mesures antidumping applicables aux importations d’urée originaire de Russie et de clôturer la procédure.

(116)

Compte tenu de la situation décrite au considérant 109, à savoir que la structure des coûts des exportateurs russes est effectivement faussée de façon significative par la double tarification pratiquée par la Russie, il a été jugé nécessaire de suivre attentivement l’évolution des importations d’urée originaire de Russie, en vue de permettre une réaction prompte et appropriée en cas de nécessité.

(117)

Puisque conformément aux considérants qui précèdent, il convient d’abroger les mesures et de clôturer la procédure, il convient également de clôturer le réexamen intermédiaire partiel relatif à l’adéquation de la forme des mesures et le réexamen intermédiaire partiel limité à l’analyse du dumping concernant «EuroChem»,

A ARRÊTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT:

Article premier

Le droit antidumping sur les importations d’urée, relevant des codes NC 3102 10 10 et 3102 10 90 et originaire de Russie, est abrogé et la procédure concernant ces importations est clôturée.

Article 2

Les réexamens intermédiaires partiels des mesures antidumping applicables aux importations d’urée, relevant des codes NC 3102 10 10 et 3102 10 90 et originaire de Russie, sont clôturés.

Article 3

Le présent règlement entre en vigueur le jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre.

Fait à Bruxelles, le 23 juillet 2007.

Par le Conseil

Le président

L. AMADO


(1)  JO L 56 du 6.3.1996, p. 1. Règlement modifié en dernier lieu par le règlement (CE) no 2117/2005 (JO L 340 du 23.12.2005, p. 17).

(2)  JO L 49 du 4.3.1995, p. 1.

(3)  JO L 127 du 9.5.2001, p. 11.

(4)  JO L 339 du 24.12.2003, p. 1.

(5)  JO C 209 du 26.8.2005, p. 2.

(6)  JO C 105 du 4.5.2006, p. 12. JO C 23 du 1.2.2007, p. 8.

(7)  Il convient de noter que par rapport à l’enquête initiale et à la précédente enquête de réexamen au titre de l’expiration des mesures, les sociétés «Hydro Agri» ont été rebaptisées «Yara».

(8)  JO L 17 du 19.1.2002, p. 1. Règlement modifié en dernier lieu par le règlement (CE) no 73/2006 (JO L 12 du 18.1.2006, p. 1).

(9)  Affaire T-210/95 EFMA contre Conseil [1995] REC II-3291, paragraphe 60.

(10)  Ibid. paragraphe 59.