30.4.2005 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
L 110/44 |
DÉCISION DE LA COMMISSION
du 10 décembre 2003
relative à une procédure d'application de l’article 81 du traité CE et de l’article 53 de l'accord EEE
(Affaire COMP/E-2/37.857 — Peroxydes organiques)
[notifiée sous le numéro C(2003) 4570 final et rectificatif C(2004) 4]
(Les textes en langues allemande, anglaise et espagnole sont les seuls faisant foi.)
(2005/349/CE)
Le 10 décembre 2003, la Commission a adopté une décision [C(2003) 4570 final] concernant une procédure d'application de l’article 81 du traité CE et de l’article 53 de l’accord EEE. Le 7 janvier 2004, elle a approuvé par procédure écrite E/2/2004 [C(2004) 4] un rectificatif apporté aux versions allemande et espagnole de ladite décision. Conformément aux dispositions de l’article 21 du règlement no 17 (1), la Commission publie ci-après les noms des parties et l'essentiel de la décision, en tenant compte de l’intérêt légitime des entreprises à ce que leurs secrets d'affaires ne soient pas divulgués. Une version non confidentielle du texte intégral de cette décision peut être consultée dans les langues faisant foi et dans les langues de travail de la Commission sur le site internet de la DG COMP à l’adresse suivante: http://europa.eu.int/comm/competition/index_en.html
I. RÉSUMÉ DE L’INFRACTION
Destinataires et nature de l’infraction
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Les entreprises et/ou associations d’entreprises suivantes sont destinataires de la présente décision:
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À partir de 1971, les entreprises qui étaient à l'époque les principaux producteurs de peroxydes organiques (Akzo Nobel Chemicals International BV et Akzo Nobel Polymer Chemicals BV (ci-après dénommées «Akzo»), Luperox GmbH (qui a ensuite été intégrée à la principale filiale allemande d'Atofina SA) et Peroxid Chemie GmbH & Co. KG) ont conclu un accord continu auquel elles ont pris part, contraire à l'article 81, paragraphe 1, du traité et à l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE, couvrant parfois la totalité et parfois la plus grande partie de l'Union européenne et de l'EEE, aux termes duquel elles se sont entendues sur leurs parts de marché, ont fixé les prix des produits, ont arrêté et mis en œuvre un mécanisme de hausse des prix, se sont réparti la clientèle et ont monté un mécanisme de surveillance et d'exécution de leurs accords. Peroxidos Organicos SA (1975-1999) a pris part à un sous-arrangement spécifique de l'accord global. AC Treuhand AG (1993-1999) a elle aussi été impliquée. |
Durée de l’infraction
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Durée de la participation:
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Le marché des péroxydes organiques
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Un peroxyde organique est une molécule organique contenant un groupe «peroxy» ou une liaison oxygène-oxygène (-O-O-). Les peroxydes organiques (ci-après dénommés «PO») présentent un risque élevé d'explosion et les accidents graves ne sont pas rares dans ce secteur. Ces produits se trouvent sous forme solide (généralement des poudres fines), liquide ou pâteuse. Les PO et mélanges contenant des PO sont utilisés comme accélérateurs, activateurs, catalyseurs, agents de réticulation, agents de vulcanisation, agents de durcissement, initiateurs et promoteurs. Les PO peuvent être distingués à la fois en fonction de leurs trois applications principales et de leurs sept classes. |
(5) |
Les PO jouent un rôle crucial dans l'industrie des plastiques et du caoutchouc où ils ont trois applications principales:
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(6) |
La Commission est arrivée à la conclusion que la portée géographique de ce secteur d’activités était, à tout le moins, celle de l’EEE. En 1999, dernière année complète de l’infraction, l’entente couvrait plus de 90 % du marché EEE du produit en cause, marché dont la valeur totale a été estimée à 250 millions d’euros pour cette même année. |
Modalités de l’entente
(7) |
Un accord principal a été conclu en 1971, initialement entre trois parties [Akzo, Peroxid Chemie et Atofina (alors Luperox)]. Il consistait en sous-arrangements pour les peroxydes organiques pour les hauts polymères et les résines thermodurcissables et était également subdivisé en fonction de critères régionaux. Les sous-arrangements régionaux concernaient la France (jusque 1992), le Royaume-Uni (jusque 1992), l’Espagne (depuis fin 1975) et le reste de l’Europe, suivant les principes et règles essentiels de l'accord global. Pour les PO de réticulation, un autre sous-arrangement a été conclu en 1983, également pour la plupart des pays européens. Ces sous-arrangements se chevauchaient largement avec l'accord principal en ce qui concerne notamment la durée, les mécanismes de contrôle mutuel et de compensation, les parties, les produits, les clients ou les responsables, éléments qui se retrouvent dans chacun des sous-arrangements. |
(8) |
L'accord principal visait à préserver les parts de marché et à coordonner les hausses de prix; il était fondé sur un «contrat» écrit de 1971. Afin d'atteindre cet objectif, un organisme indépendant (AC Treuhand à partir de 1993) surveillait de près les chiffres de vente détaillés des entreprises participantes, les parties se répartissaient la clientèle et si certaines s'écartaient de la part de marché prévue, des compensations étaient appliquées ou une partie de la clientèle était réattribuée. Des réunions régulières se tenaient pour assurer le bon fonctionnement de l'accord. Ce dernier contenait de nombreux sous-arrangements pour certains produits ou sous-produits ou pour des régions déterminées. Certains de ces sous-arrangements n'ont eu qu'une durée limitée ou ont été intégrés dans d'autres sous-arrangements. Perorsa a été associée à un sous-arrangement espagnol. |
(9) |
Il a été constaté qu’AC Treuhand avait enfreint l’article 81 du traité et l’article 53 de l’accord EEE en organisant des réunions, en faisant office de médiateur en cas de conflits, en proposant des parts de marché et en dissimulant des preuves à charge. Elle a agi comme une association d’entreprises et/ou comme une entreprise. |
(10) |
En 1992, il y a eu des frictions entre les parties à l’entente, qui ont mis un terme à celle-ci à la fin de 1999, n’étant pas parvenues à s’entendre sur les quotas. Certains sous-arrangements ont pris fin plus tard. |
II. AMENDES
Montant de base
(11) |
La Commission considère que les entreprises concernées ont commis une infraction très grave. La nature et la portée géographique de cette infraction sont telles qu’il convient de la qualifier de très grave, qu’il soit ou non possible de déterminer son incidence sur le marché. |
Traitement différencié
(12) |
Dans la catégorie des infractions très graves, l'échelle des amendes disponibles permet d’appliquer aux entreprises un traitement différencié qui tienne compte de leur capacité économique réelle à causer un dommage important à la concurrence, et de fixer le montant de l'amende à un niveau qui lui assure un effet dissuasif suffisant. Akzo, qui contrôle plus de 40 % des marchés en cause dans leur ensemble, est le plus grand producteur et devrait par conséquent être placée dans la première catégorie. Atofina et Peroxid Chemie, dont les parts de marché avoisinent les 20 à 25 %, devraient être classées dans la deuxième catégorie. Perorsa, dont la part de marché en Europe est inférieure à 5 %, devrait être classée dans la troisième catégorie. |
(13) |
Degussa UK Holdings (auparavant dénommée Laporte plc) est depuis le 1er septembre 1992 la société mère de Peroxid Chemie et devrait être classée dans la même catégorie que celle-ci, étant conjointement responsable avec elle de ses activités illicites. |
(14) |
La répartition des responsabilités de Peroxid Chemie et de Degussa UK Holdings en ce qui concerne les amendes est la suivante. Peroxid Chemie a pris part à l’entente du 1er janvier 1971 au 31 décembre 1999 et Degussa UK Holdings est conjointement et solidairement responsable des activités illicites de Peroxid Chemie du 1er septembre 1992 au 31 décembre 1999, soit la période durant laquelle celle-ci lui appartenait à 100 %. |
(15) |
AC Treuhand est classée dans une catégorie distincte. La Commission reconnaît que le fait d’adresser une décision à une entreprise et/ou à une association d’entreprises ayant joué un tel rôle dans une entente constitue, dans une certaine mesure, une nouveauté. Il y a lieu d’en tenir compte lors de la détermination du montant des amendes. À la lumière des considérations qui précèdent, la Commission considère qu’il convient d’infliger à AC Treuhand une amende de 1 000 euros. |
(16) |
Pour tenir compte de la taille et des ressources totales des entreprises et faire en sorte que l’amende ait un effet suffisamment dissuasif, la Commission considère qu’il convient d'ajuster ce montant de départ pour Akzo et Atofina. |
Durée
(17) |
La Commission a établi qu'Akzo, Atochem et Peroxid Chemie avaient enfreint l'article 81, paragraphe 1, du traité du 1er janvier 1971 au 31 décembre 1999, Perorsa du 31 décembre 1975 au moins au 31 décembre 1999, et Degussa UK Holdings du 1er septembre 1992 au 31 décembre 1999, et qu'AC Treuhand avait agi comme une entreprise et/ou comme une association d'entreprises du 28 décembre 1993 au 31 décembre 1999. |
(18) |
Aux fins du calcul de l'amende, la Commission tient compte des mois complets et fixe par conséquent la durée de l'infraction commise par ces entreprises à vingt-neuf ans pour Akzo, Atofina et Peroxid Chemie, à six ans pour AC Treuhand, à sept ans et quatre mois pour Degussa UK Holdings et à vingt-quatre ans pour Perorsa. En ce qui concerne Peroxid Chemie, la période est scindée en deux sous-périodes, celle où elle était seule responsable (vingt et un ans et huit mois) et celle où elle était responsable conjointement avec sa société mère Degussa UK Holdings (sept ans et quatre mois). |
(19) |
La Commission conclut qu’il s’est agi d'une infraction de longue durée (plus de cinq ans) pour AC Treuhand, Akzo, Atofina, Degussa UK Holdings, Peroxid Chemie et Perorsa. En conséquence, elle devrait majorer respectivement le montant de base de l’amende de 245 % dans le cas d’Akzo et d’Atofina, de 207,5 % dans le cas de Peroxid Chemie, de 70 % dans le cas de Peroxid Chemie/ Degussa UK Holding et de 220 % dans le cas de Perorsa. Ces pourcentages résultent d’une majoration de 10 % par an pour les vingt dernières années de l’infraction (1980-1999) et de 5 % par an pour la partie de l’infraction commise entre vingt et un et vingt-neuf ans plus tôt (1971-1979). |
Circonstances aggravantes
(20) |
Des amendes ont été infligées par le passé à Atofina pour sa participation à quatre ententes et à Peroxid Chemie/Degussa UK Holdings pour son implication dans une entente. La récidive sera donc considérée comme une circonstance aggravante. |
(21) |
La Commission estime par conséquent qu’il convient de majorer le montant de base de l’amende à infliger de 50 % dans le cas d’Atofina, de façon à refléter le fait que cette entreprise a déjà fait l’objet de décisions de la Commission dans un nombre considérable d’affaires portant sur des ententes, et de 50 % dans le cas de Degussa UK Holdings et de Peroxid Chemie, afin de tenir compte du fait que ces dernières ont été les destinataires d’une décision antérieure de la Commission dans une affaire d’entente, soit directement (Degussa UK Holdings), soit par l’intermédiaire de l’entreprise à laquelle elle appartenait (Peroxid Chemie). |
Circonstances atténuantes
(22) |
Atofina a étayé les arguments de la Commission tendant à prouver que l’entente avait duré vingt-neuf ans. |
(23) |
Conformément au principe d’équité, il est proposé de retenir une circonstance atténuante spécifique en faveur d’Atofina, à savoir la «coopération en dehors du champ d’application de la communication sur la clémence». Cette circonstance atténuante permettra à cette entreprise de ne pas devoir acquitter une amende plus élevée après avoir coopéré avec la Commission que celle qu’elle aurait dû payer en l’absence d’une telle coopération. |
(24) |
À la lumière de ce qui précède, la Commission estime qu’il convient d’accorder à Atofina une réduction du montant de base de l’amende de 94,19 millions d’euros pour avoir coopéré de façon effective en dehors du champ d’application de la communication sur la clémence. |
Application de la limite de 10 % du chiffre d’affaires
(25) |
La limite de 10 % du chiffre d’affaires mondial posée à l'article 15, paragraphe 2, du règlement no 17 s’applique à Perorsa et Peroxid Chemie. |
Application de la communication sur la clémence de 1996
Non-imposition d'amende ou réduction très importante de son montant («Titre B»: réduction de 75 à 100 %)
(26) |
Akzo bénéficie de l’immunité d’amende pour avoir été la première entreprise à dénoncer l’entente à la Commission. |
Réduction significative du montant de l’amende («Titre D»: réduction de 10 à 50 %)
(27) |
Atofina bénéficie d’une réduction de 50 % pour avoir coopéré à l’enquête de la Commission. Elle a été la première des entreprises pouvant prétendre à une réduction significative du montant de l’amende à coopérer avec la Commission; c’est aussi sa contribution qui a été la plus utile. À l’instar des autres entreprises ayant coopéré avec la Commission, elle n’a pas contesté la matérialité des faits sur lesquels cette dernière fondait ses accusations. |
(28) |
Peroxid Chemie et Degussa UK Holdings bénéficient d’une réduction à hauteur de 25 % pour avoir coopéré à l’enquête de la Commission. Les éléments de preuve qu’elles ont fournis sont arrivés tardivement, et leur coopération a été plus limitée que dans le cas d'Akzo et Atofina. |
(29) |
Perorsa, qui a été la dernière entreprise à avoir coopéré, bénéficie d’une réduction de 15 %. |
Capacité de payer
(30) |
Aucune entreprise n’a déclaré ne pas pouvoir acquitter le montant de l’amende. |
Décision
1) |
Les amendes suivantes sont infligées aux entreprises ci-après:
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2) |
Les entreprises et/ou associations d’entreprises susmentionnées mettent fin sans délai, si elles ne l’ont pas déjà fait, à l’infraction. Elles s'abstiennent de reproduire tout acte ou comportement équivalant à l’infraction constatée en l’espèce et de tout acte ou comportement ayant un objet ou un effet identiques ou analogues à l’infraction. |
(1) JO 13 du 21.2.1962, p. 204. Règlement modifié en dernier lieu par le règlement (CE) no 1/2003 (JO L 1 du 4.1.2003, p. 1).