31995D0404

95/404/CE: Décision de la Commission, du 19 juillet 1995, relative à une procédure d'application du règlement (CEE) nº 2407/92 du Conseil (Swissair/Sabena) (Les textes en langue française et néerlandaise sont les seuls faisant foi) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

Journal officiel n° L 239 du 07/10/1995 p. 0019 - 0028


DÉCISION DE LA COMMISSION du 19 juillet 1995 relative à une procédure d'application du règlement (CEE) n° 2407/92 du Conseil (Swissair/Sabena) (Les textes en langue française et néerlandaise sont les seuls faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (95/404/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté européenne,

vu le règlement (CEE) n° 2407/92 du Conseil, du 23 juillet 1992, concernant les licences des transporteurs aériens (1), et notamment son article 4 paragraphe 5,

vu la demande présentée par le gouvernement belge,

considérant ce qui suit:

LES FAITS

I

Le 4 mai 1995, l'État belge et Swissair Société anonyme suisse pour la navigation aérienne (Swissair) ont conclu un accord aux termes duquel cette dernière doit acquérir 49,5 % du capital du transporteur aérien belge Sabena Société anonyme (Sabena). Cet accord fixe les modalités et conditions précises de l'acquisition ainsi que les droits et obligations des parties en ce qui concerne la gestion de Sabena.

Par lettre du 12 mai 1995, enregistrée par la Commission le 18 mai, le gouvernement belge a demandé à la Commission, conformément à l'article 4 paragraphe 5 du règlement (CEE) n° 2407/92, de vérifier si, dans le cadre de l'accord précité, Sabena satisfait aux conditions fixées dans cet article, notamment en ce qui concerne la détention de son capital et son contrôle, et d'arrêter une décision à ce sujet. À cette lettre étaient jointes une note technique ainsi que des copies de l'accord avec Swissair et de ses annexes (exhibits), notamment les projets de nouveaux statuts de Sabena et d'un accord de coopération devant être conclu entre les deux transporteurs.

Par lettre supplémentaire du 15 juin 1995, enregistrée par la Commission le 16 juin, le gouvernement belge a informé la Commission que les parties avaient signé le 12 juin 1995 un avenant modifiant sur un certain nombre de points l'accord du 4 mai et le projet d'accord de coopération.

La description faite ci-après de l'ensemble de l'opération entre l'État belge, Swissair et Sabena repose sur les informations qui figurent dans les deux lettres des 12 mai et 15 juin 1995 ainsi que dans leurs annexes.

II

Sabena est une société anonyme de droit belge dont le siège social est à Bruxelles. Elle est pleinement assujettie à la législation générale belge en matière de droit des sociétés. Son objet, tel qu'il est défini dans ses nouveaux statuts, est l'exploitation de services aériens, tant en service intérieur qu'en service international, et celle de services annexes aux transports aériens.

Les actions de Sabena se répartissent actuellement comme suit: l'État belge en détient environ 61,6 %, soit directement, soit indirectement à travers la Société fédérale d'investissement (SFI), qui est un holding public. Air France, à travers sa filiale FINACTA, en détient 37,49 %. Les 0,9 % restants sont entre les mains d'investisseurs institutionnels belges ainsi que, mais marginalement, d'anciens ou actuels salariés de l'entreprise.

L'accord du 4 mai 1995 entre Swissair et l'État belge prévoit trois opérations financières importantes.

Premièrement, SFI rachètera toutes les actions de Sabena actuellement détenues par FINACTA. Cet achat sera financé par un prêt de 4 milliards de francs belges (FB) accordé par Swissair à SFI. À ce prêt seront attachées 691 666 127 options d'achat (warrants) qui, dans certaines circonstances, permettront à Swissair d'acquérir une participation supplémentaire dans Sabena.

Deuxièmement, le capital de Sabena sera augmenté de 9,5 milliards de FB, dont 2 milliards (réparti en 895 323 084 actions) seront souscrits, à l'initiative de l'État belge, par des investisseurs institutionnels belges, 1,5 milliard (répartis en 671 492 313 actions) par SFI et les 6 milliards restants (réparti en 2 685 969 251 actions) par Swissair. À la suite de cette augmentation de capital, Swissair détiendra 49,5 % des actions de Sabena assorties d'un droit de vote, les autres parties se partageant les 50,5 % restants (c'est-à-dire 2 740 283 257 actions, dont 1 834 459 013 au moins seront détenues par l'État belge et SFI). L'accord prévoit en outre que les investisseurs institutionnels agiront à travers une entité unique à vocation particulière constituée en Belgique, dans laquelle les ressortissants belges détiendront une participation majoritaire et sur laquelle ils exerceront un contrôle effectif. L'État belge et SFI concluront avec cette entité une convention d'actionnaires prévoyant certaines modalités de vote et des droits mutuels de préemption pour ce qui est des actions de Sabena. Ces arrangements permettront notamment de faire en sorte que les vues conjointes de l'État belge et de SFI prévalent en toute circonstance sur celles des investisseurs institutionnels.

Troisièmement, Swissair effectuera un apport supplémentaire de 0,5 milliard de FB en échange de 223 830 770 certificats de participation spéciaux émis par Sabena. Ces certificats présenteront les caractéristiques suivantes:

- ils ne représenteront pas le capital social de Sabena,

- ils seront nominatifs,

- ils ne seront pas assortis de droits de vote,

- ils conféreront à leur titulaire le droit au même dividende que des actions ordinaires, lequel ne pourra toutefois être inférieur à 5 % de leur valeur d'émission,

- lors de la liquidation, ils conféreront à leur titulaire le droit au remboursement de leur valeur d'émission initiale avant tout remboursement des actions représentatives du capital, mais à l'exclusion de toute participation à un éventuel boni de liquidation.

Les deux parties à l'accord sont autorisées, dans certaines conditions et sous réserve de leur droit mutuel de préemption, à céder ou à introduire en bourse tout ou partie de leurs actions dans Sabena. Toutefois, cette cession ou introduction en bourse doit se faire selon des modalités garantissant que Sabena respecte les conditions du règlement (CEE) n° 2407/92. En outre, les statuts de Sabena prévoient que toute cession d'actions sera notifiée au conseil d'administration du transporteur, lequel, pour sa part, s'opposera à cette cession si elle porte atteinte à ces conditions.

III

Parallèlement à la réalisation des opérations décrites au chapitre II ci-dessus, Sabena mettra fin à son lien structurel avec Air France tel qu'il résulte du « protocole d'accord » du 10 avril 1992 et elle sera ensuite dirigée et gérée par les parties à l'accord du 4 mai 1995 selon les règles indiquées ci-après.

Lors de l'assemblée générale de Sabena, les droits de vote correspondent au pourcentage du capital social détenu par chaque partie individuellement. L'assemblée générale décide, à la majorité de 75 % des voix exprimées, de toute modification des statuts de la société (y compris de sa forme juridique ou de son objet social), de toute augmentation ou réduction de son capital social, de même que de toute liquidation, fusion ou scission de la société. En outre, l'assemblée générale est habilitée à statuer, à la majorité simple des voix, sur les points suivants:

- la distribution de dividendes,

- l'approbation des comptes annuels de la société,

- la nomination et la révocation des membres du conseil d'administration et des commissaires-réviseurs,

- le quitus à donner aux membres du conseil d'administration et aux commissaires-réviseurs,

- toute autre question qui lui est déférée par le conseil d'administration en raison d'un conflit d'intérêts d'au moins trois administrateurs.

L'accord du 4 mai 1995 de même que les nouveaux statuts de Sabena prévoient que, à toute réunion de l'assemblée générale, les votes émis par des actionnaires qui, soit n'ont pas la nationalité d'un État membre de la Communauté (ou une nationalité assimilée), soit se trouvent sous le contrôle de personnes ne satisfaisant pas à ce critère de nationalité, seront toujours pris en compte pour moins de 50 % du nombre total des voix.

Sans préjudice des compétences réservées à l'assemblée générale, le conseil d'administration est chargé de déterminer la politique générale de la société et de prendre toutes les décisions de nature stratégique telles que, par exemple, l'adoption du plan d'entreprise (business plan) et le budget annuel, les investissements significatifs en matière de flotte et les modifications significatives de la configuration du réseau. Le conseil d'administration délègue la gestion journalière de la société à un Chief Executive Officer (ci-après CEO), mais cette délégation ne porte pas atteinte à la généralité des compétences du conseil d'administration, lequel conserve donc toujours la responsabilité ultime des décisions. Les parties respectent, de cette façon, les règles générales du droit belge des sociétés.

Le conseil d'administration est composé de douze membres, dont le président, qui statuent à la majorité simple des voix (sous réserve que six membres au moins soient présents ou représentés). Aucun administrateur n'a voix prépondérante. Leur nomination et leur révocation par l'assemblée générale doivent s'effectuer conformément aux règles suivantes prévues dans l'accord du 4 mai 1995:

- cinq administrateurs sont nommés sur proposition de Swissair,

- six administrateurs sont nommés sur proposition des actionnaires belges,

- le président est nommé sur proposition conjointe présentée par les deux groupes d'actionnaires. Si les parties ne peuvent s'accorder sur une proposition conjointe dans un délai préalablement fixé, la proposition de Swissair est prépondérante. En revanche, contrairement aux deux groupes d'administrateurs mentionnés ci-dessus, l'assemblée générale est libre d'accepter ou de rejeter cette proposition,

- tout administrateur autre que le président est révoqué à la demande des actionnaires sur la proposition desquels il a été nommé, sauf si une majorité de 75 % des voix émises à l'assemblée générale s'oppose à cette révocation,

- le président peut être révoqué à tout moment par l'assemblée générale statuant à la majorité des voix.

L'accord prévoit également qu'au minimum le président et les six membres nommés sur proposition des actionnaires belges auront la nationalité d'un État membre de la Communauté ou une nationalité assimilée, afin de permettre à Sabena de conserver sa qualité de transporteur aérien belge dans le cadre de la législation communautaire applicable et des conventions bilatérales de service aérien de la Belgique.

Si un membre du conseil d'administration est révoqué ou, pour toute autre raison, cesse d'occuper ses fonctions, son ou sa remplaçant(e) sera provisoirement coopté sur proposition du groupe d'actionnaires correspondant dans l'attente d'une élection définitive par l'assemblée générale. Toutefois, un nouveau président ne peut être coopté que sur proposition conjointe des deux groupes d'actionnaires. Le gouvernement belge indique dans sa lettre du 12 mai 1995 que, à défaut d'un accord sur une telle proposition conjointe, le poste de président ne peut être pourvu par cooptation et qu'il reste donc provisoirement vacant.

Comme il a déjà été indiqué ci-dessus, la gestion journalière de la société est confiée à un CEO, lequel, pendant la durée de l'avenant du 12 juin 1995, est nommé et révoqué par le conseil d'administration, statuant à la majorité simple sur une proposition conjointe présentée, premièrement, par la majorité du président et des six administrateurs nommés sur proposition des actionnaires belges et, deuxièmement, par la majorité des cinq administrateurs nommés sur proposition de Swissair. Selon l'accord du 4 mai 1995, la fonction de CEO peut être cumulée avec celle de président du conseil d'administration moyennant l'accord des parties. Le gouvernement belge indique dans sa lettre du 12 mai 1995 qu'il n'envisage pas d'autoriser ce cumul lorsque cela aurait pour effet de concentrer l'influence sur la gestion entre les mains d'une personne désignée par Swissair.

Il incombe également au conseil d'administration de nommer et de révoquer le directeur financier ainsi que les autres membres du comité de direction. Ces nominations sont effectuées sur proposition du CEO ou, dans le cas du directeur financier, de Swissair.

IV

L'accord du 4 mai 1995 pose également certains principes fondamentaux en ce qui concerne la gestion de Sabena et prévoit notamment que la société devra être gérée comme une compagnie aérienne « axée sur le profit et compétitive, devant donner d'elle l'image d'un transporteur de grande qualité » et qu'elle coopérera étroitement avec Swissair. À cet effet, les deux transporteurs signeront un projet d'accord de coopération prévoyant esssentiellement:

- la mise au point de procédures communes de planification et de contrôle sur la base de modèles élaborés par Swissair ainsi que la mise en place d'unités communes de planification dans des domaines tels que les investissements en matériel volant et le développement de la configuration du réseau,

- la mise en place d'unités communes de gestion du système (joint system management functions) chargées de la conception, du choix et de la commercialisation des produits des deux transporteurs ainsi que de la rentabilité globale du réseau,

- l'attribution, dans le cadre de cette coopération, de la responsabilité de la planification et de la gestion opérationnelle de deux zones de desserte (l'Afrique et l'Europe au départ de et vers la Belgique) à Sabena, et des autres zones à Swissair, étant entendu que ces responsabilités seront exercées selon les critères et procédures définis par Swissair,

- le regroupement de certaines parties des activités des deux partenaires dans les domaines du marketing, des systèmes de réservation et de l'organisation des ventes.

Dans le même temps, toutefois, les clauses pertinentes du projet d'accord de coopération prévoient explicitement que chaque transporteur conservera ses propres responsabilités fonctionnelles dans le cadre des procédures communes de planification et de contrôle et que les unités communes présenteront les résultats de leurs travaux au conseil d'administration du transporteur concerné pour obtenir son approbation préalable. Il est stipulé, en particulier, que les unités communes de gestion du système n'impliquent pas une limitation de la responsabilité de chaque transporteur quant à ses propres résultats financiers, ni de délégation de l'autorité décisionnelle, ni de répartition de l'exploitation des dessertes entre les transporteurs. Le gouvernement belge fait valoir dans sa lettre du 12 mai 1995 que le projet d'accord porte essentiellement sur des procédures de coopération au niveau de la planification et de la gestion et qu'il laisse en dernier ressort au conseil d'administration de chaque transporteur le soin de trancher les questions de fond.

L'accord de coopération est réputé conclu pour une durée initiale de dix ans et, sauf s'il y est mis fin par l'une ou l'autre des parties, il est automatiquement reconduit pour des périodes de cinq ans. Les clauses de l'accord portant sur l'application des procédures communes de planification et de contrôle, ainsi que sur les critères et procédures devant être utilisés pour la planification et la gestion opérationnelle des zones de desserte, seront revues par les parties tous les trois ans au moins afin de maximiser l'efficience et la compétitivité des deux transporteurs.

V

Par ailleurs, l'accord du 4 mai 1995 prévoit deux scénarios différents de modification ultérieure de la structure des participations dans Sabena, allant au-delà des droits de cession mentionnés au chapitre II ci-dessus.

Premièrement, l'État belge a la faculté d'acquérir l'ensemble des actions détenues par Swissair si ses intérêts généraux risquent de subir un préjudice majeur et s'il n'est pas remédié à cette situation dans un délai de six mois. Avant la fin de 1998, le prix à payer pour ces actions sera égal à celui initialement payé par Swissair, majoré d'un intérêt. Au-delà de cette date, il sera déterminé par une banque d'affaires internationale à désigner d'un commun accord par les parties.

Deuxièmement, Swissair a la possibilité d'acquérir une majorité des droits de vote de Sabena en exerçant les droits résultant de l'ensemble des warrants attachés au prêt accordé à SFI et, au besoin, d'exiger de l'État belge et de SFI qu'ils vendent une partie de leurs actions et/ou qu'ils s'abstiennent de participer à toute nouvelle augmentation du capital de Sabena. L'exercice de cette option est toutefois subordonné à l'entrée en vigueur d'un accord entre la Communauté et la Suisse ou à une modification unilatérale de la réglementation communautaire applicable qui autoriserait la réalisation de cette opération sans que Sabena perde son statut de transporteur aérien dans le cadre du règlement (CEE) n° 2407/92. En outre, l'option ne peut pas être exercée avant l'an 2000 et pourrait impliquer, si le gouvernement belge le demande, le démembrement de Sabena dans la mesure nécessaire pour que celle-ci conserve sa qualité de transporteur désigné dans le cadre de toute convention de service aérien avec des pays tiers. En raison de ces conditions et de l'incertitude qui en résulte, le gouvernement belge estime que l'option offerte à Swissair d'acquérir la majorité des droits de vote de Sabena ne devrait pas avoir actuellement d'incidence sur la gestion de Sabena et, partant, qu'elle n'est pas couverte par l'actuelle demande de ce gouvernement.

Enfin, il convient d'observer que l'avenant du 12 juin 1995 à l'accord du 4 mai devient automatiquement caduc si, en raison d'une modification du cadre réglementaire, ses dispositions ne sont plus nécessaires pour permettre à Sabena de conserver sa qualité de transporteur communautaire dans le cadre du règlement (CEE) n° 2407/92.

APPRÉCIATION JURIDIQUE

VI

Le règlement (CEE) n° 2407/92 fait partie intégrante, avec les règlements (CEE) n° 2408/92 (1) et n° 2409/92 (2) du Conseil, du troisième « paquet aérien » du 23 juillet 1992 instituant le marché intérieur dans le domaine du transport aérien. D'une part, l'article 3 paragraphe 3 du règlement prévoit qu'aucune entreprise établie dans la Communauté n'est autorisée à fournir des services de transport aérien sur le territoire de la Communauté à moins que la licence d'exploitation appropriée ne lui ait été délivrée. La délivrance et le maintien de cette licence sont, à leur tour, subordonnés au respect par l'entreprise des règles prévues dans le règlement. D'autre part, un transporteur aérien auquel il a été délivré une licence conformément à ces règles bénéficie du libre accès à toutes les routes intracommunautaires en vertu du règlement (CEE) n° 2408/92 - voir décision 93/347/CEE de la Commission (Viva Air) (3).

Il convient également de noter que, en vertu de la décision n° 7/94 du Comité mixte de l'EEE (4), le règlement (CEE) n° 2407/92 a été inclus dans le champ d'application de l'accord EEE à compter du 1er juillet 1994. Pour l'application de ce règlement, les États membres de l'AELE participant à l'accord EEE (et leurs ressortissants) doivent donc être assimilés aux États membres de la Communauté (et à leurs ressortissants).

C'est dans ce contexte que le présent cas doit être apprécié.

VII

L'article 4 du règlement (CEE) n° 2407/92 énonce quatre conditions de fond auxquelles doit satisfaire l'entreprise titulaire d'une licence d'exploitation:

- son principal établissement et, le cas échéant, son siège doivent être situés dans l'État membre qui délivre la licence,

- son activité principale doit être le transport aérien, exclusivement ou en combinaison avec toute autre activité commerciale comportant l'exploitation d'aéronefs ou la réparation et l'entretien d'aéronefs,

- elle doit être détenue et continuer à être détenue soit directement, soit par participation majoritaire, par des États membres et/ou des ressortissants d'États membres,

- elle doit, à tout moment, être effectivement contrôlée par ces États ou ces ressortissants.

C'est en premier lieu aux autorités nationales qui délivrent la licence qu'il incombe de vérifier si une entreprise individuelle satisfait aux conditions de l'article 4 susmentionnées. Toutefois, le paragraphe 5 de cet article prévoit que la Commission, agissant à la demande d'un État membre, vérifie le respect de ces conditions et arrête, le cas échéant, une décision.

La Commission part du principe que tout État membre, y compris celui chargé de délivrer la licence à l'entreprise en question, peut présenter une demande sur la base de l'article 4 paragraphe 5. Aux fins de cette disposition, la lettre du gouvernement belge, du 12 mai 1995, doit donc être considérée comme une demande d'un État membre, à la suite de laquelle la Commission est tenue d'examiner si, dans le cadre de l'accord du 4 mai 1995 entre l'État belge et Swissair, Sabena satisfait aux conditions prévues à l'article 4. Cet examen ne peut pas porter sur l'option offerte à Swissair d'acquérir la majorité des droits de vote puisque l'exercice de cette option est explicitement subordonné à une modification du cadre réglementaire qui autoriserait Swissair à acquérir une participation majoritaire dans Sabena et le contrôle effectif de cette dernière. Pour les mêmes raisons, cet examen portera sur le texte de l'accord du 4 mai 1995, tel que modifié par l'avenant du 12 juin 1995, et ne tiendra pas compte d'une éventuelle caducité de ce dernier.

Il convient également d'observer que l'opération prévue dans l'accord du 4 mai 1995 est de grande dimension et qu'elle aura donc une incidence notable sur le marché du transport aérien. Par ailleurs, les conditions prévues à l'article 4 n'ont pas encore donné lieu à une interprétation de la part de la Commission ou de la Cour de justice des Communautés européennes. Dans ces circonstances et étant donné qu'il importe tout particulièrement, pour le bon fonctionnement du marché intérieur du transport aérien, que l'article 4 soit appliqué de manière uniforme, la Commission considère qu'il y a lieu d'arrêter une décision en l'espèce.

VIII

En premier lieu, Sabena doit satisfaire aux obligations prévues à l'article 4 paragraphe 1 du règlement (CEE) n° 2407/92 en matière de principal établissement et d'activité principale. On peut observer, à cet égard, que dans le cadre de l'accord du 4 mai 1995, Sabena restera une entité juridique distincte ayant son siège social et son siège administratif en Belgique. En outre, selon les nouveaux statuts de Sabena, l'objet de la société est l'exploitation de services de transport aériens intérieurs et internationaux ainsi que de tous services annexes au transport aérien. La Commission conclut donc que l'accord du 4 mai 1995 n'empêche pas Sabena de satisfaire à ces deux obligations.

IX

En second lieu, la Commission doit vérifier si Sabena satisfait également à l'obligation d'être détenue par participation majoritaire et effectivement contrôlée par des États membres et/ou des ressortissants d'États membres, comme le prévoit l'article 4 paragraphe 2 du règlement (CEE) n° 2407/92.

Ces obligations en matière de participation majoritaire et de contrôle effectif reflètent, au niveau de la Communauté, les restrictions qu'imposent traditionnellement aux transporteurs aériens les accords internationaux en matière de services aériens. Ces restrictions, justifiées à l'origine par des raisons de sécurité nationale, visent aujourd'hui essentiellement à assurer que les droits de trafic échangés dans le cadre de ces accords seront effectivement exploités au bénéfice des parties à ces accords et qu'ils ne seront pas exercés, directement ou à travers des filiales, par des compagnies de pays tiers. En outre, elles empêchent de telles compagnies de pays tiers d'exploiter des services exclusivement à l'intérieur d'un État ou d'un groupe d'États par l'intermédiaire de filiales établies dans cet État ou ce groupe d'États. La Commission estime donc que les dispositions de l'article 4 paragraphe 2 doivent être appliquées dans la même perspective. Il convient à cet égard de tenir compte, en particulier, de l'objectif de protection des intérêts de l'industrie communautaire des transports aériens. Cela implique, notamment, que les compagnies de pays tiers ne doivent pas être autorisées à tirer pleinement avantage, sur une base unilatérale, de la libéralisation du marché intérieur des transports aériens dans la Communauté. En d'autres termes, ces compagnies ne seront autorisées à bénéficier du marché intérieur qu'au moyen de participations respectant les limites en matière de détention du capital et en matière de contrôle prévues à l'article 4 paragraphe 2.

Chacune de ces deux conditions relatives à la participation majoritaire et au contrôle effectif sera examinée séparément ci-après à la lumière des considérations qui précèdent.

X

La Commission estime que le critère de la participation majoritaire est respecté si 50 % au moins, plus une action, du capital du transporteur aérien en question est détenu par des États membres et/ou des ressortissants d'États membres. Le reste des actions peut fort bien être détenu par un ou plusieurs investisseurs de pays tiers, et une telle participation ne doit pas être considérée en soi comme incompatible avec l'article 4 paragraphe 2. Il convient toutefois de souligner que le niveau des participations prises par des investisseurs de pays tiers, de même que la répartition des parts à l'intérieur de chaque groupe d'actionnaires, doivent être pris en considération pour évaluer si le critère du contrôle effectif énoncé dans ce même article est respecté.

La Commission considère en outre que l'article 4 paragraphe 2 se réfère à un concept de détention du capital d'une entreprise qui est essentiellement fondé sur la notion de capitaux propres. Les détenteurs de tels capitaux ont normalement le droit de participer aux décisions qui touchent à la gestion de l'entreprise et peuvent avoir part aux bénéfices résiduels ou, en cas de liquidation, aux actifs résiduels de l'entreprise une fois honorées toutes les autres obligations - voir décision 94/653/CE de la Commission, du 27 juillet 1994, concernant l'augmentation de capital notifiée d'Air France (1). Les conditions d'exercice de ces droits peuvent, bien entendu, varier selon l'accord des parties. C'est pourquoi on ne pourra répondre qu'au cas par cas, à la lumière de tous les éléments pertinents (et notamment les conséquences possibles du respect du critère du contrôle effectif), à la question de savoir si un type particulier de capital peut être considéré comme des fonds propres et doit donc être pris en compte pour la détention du capital au sens de l'article 4 paragraphe 2. Si, toutefois, des capitaux ne confèrent pas de manière significative à leurs détenteurs l'un ou l'autre des droits susmentionnés, il n'y aura pas lieu, d'une manière générale, de les prendre en considération pour déterminer qui détient le capital d'une entreprise.

Dans le cas présent, l'accord du 4 mai 1995 prévoit des opérations financières ayant pour effet d'attribuer 2 685 969 251 actions - soit 49,5 % des actions de Sabena assorties d'un droit de vote - à Swissair, laquelle, aux fins du règlement (CEE) n° 2407/92, doit être considérée comme une compagnie de pays tiers (Swissair est elle-même soumise, en vertu de la législation suisse applicable, à des restrictions en matière de contrôle et de détention du capital). Les 2 740 283 257 actions restantes - soit 50,5 % des actions de Sabena assorties d'un droit de vote - seront détenues par l'État belge, par SFI, par des investisseurs institutionnels belges ainsi que par d'anciens ou actuels salariés de l'entreprise. 2 729 782 097 au moins de ces dernières actions et, ainsi, plus de 50 % du nombre total d'actions assorties d'un droit de vote, seront détenues par l'État belge, par SFI et par les investisseurs institutionnels participant à l'augmentation de capital.

L'accord du 4 mai 1995 prévoit également que Swissair recevra 223 830 770 certificats de participation spéciaux en échange d'un apport supplémentaire de 0,5 milliard de FB à une réserve non distribuable de Sabena. Toutefois, ces certificats ne seront pas assortis d'un droit de vote et ne conféreront pas non plus à leur détenteur des droits sur les actifs résiduels de la société en cas de liquidation. Dans une telle situation, ils seraient au contraire remboursés à leur prix d'émission initial, avant tout remboursement du capital social. En outre, ils donnent droit en général à une rémunération minimale de 5 % sur leur valeur d'émission et excluent ainsi une grande partie des risques financiers pour leur détenteur. La Commission est donc d'avis que ces certificats de participation spéciaux sont essentiellement des capitaux empruntés et que, dans le présent contexte, ils ne constituent pas des capitaux propres. Par conséquent, ils ne doivent pas être ajoutés aux actions de Sabena assorties d'un droit de vote lors de l'évaluation de la détention du capital de l'entreprise au regard de l'article 4 paragraphe 2.

Il convient enfin d'observer, dans ce contexte, que Swissair recevra 691 666 127 warrants en échange du prêt qui sera accordé à SFI. Ces warrants autoriseront leur détenteur à acheter ultérieurement d'autres actions de Sabena. Toutefois, l'accord du 4 mai 1995 prévoit explicitement que, sauf modification du cadre réglementaire qui autoriserait Swissair à acquérir une participation majoritaire et le contrôle effectif de Sabena, Swissair ne peut pas exercer les droits que lui confèrent ces warrants pour porter sa participation dans Sabena au-delà du niveau initialement envisagé de 49,5 %. Ainsi, l'exercice des droits correspondent à ces warrants est assorti des mêmes conditions et restrictions que l'exercice de l'option d'achat de la majorité des actions de Sabena offerte à Swissair. Par conséquent, pour autant qu'il ait été possible d'en juger dans le cadre de la présente procédure, ces warrants ne peuvent pas affecter la détention du capital de Sabena.

Au vu de ce qui précède, la Commission conclut que, dans le cadre de l'accord du 4 mai 1995, Sabena satisfait à la condition de participation majoritaire prévue à l'article 4 paragraphe 2 première phrase.

XI

Le « contrôle effectif » est défini à l'article 2 point g) du règlement (CEE) n° 2407/92 comme étant:

« une relation constituée par des droits, des contrats ou de tout autre moyen qui, soit séparément soit conjointement et compte tenu des circonstances de droit et de fait du cas d'espèce, confèrent la possibilité d'exercer directement ou indirectement une influence déterminante sur une entreprise, grâce notamment à:

a) un droit de jouissance sur tout ou partie des actifs d'une entreprise;

b) des droits ou des contrats conférant une influence déterminante sur la composition, le vote ou les décisions des organes d'une entreprise ou conférant par ailleurs une influence déterminante sur la conduite des affaires de l'entreprise. »

Comme on l'a vu au chapitre IX ci-dessus, la Commission considère que cette définition du contrôle effectif doit être interprétée et appliquée dans le contexte général de l'article 4 paragraphe 2. En particulier, chaque cas individuel doit être apprécié à la lumière de l'objectif de protection des intérêts de l'industrie communautaire des transports aériens, ce qui suppose, notamment, que les compagnies de pays ties ne doivent pas être autorisées à tirer pleinement avantage, sur une base unilatérale, de la libéralisaton du marché intérieur des transports aériens dans la Communauté. En d'autres termes, de telles compagnies de pays tiers ne seront autorisées à bénéficier du marché intérieur que la voie de participations respectant les limites en matière de détention du capital et de contrôle prévues à l'article 4 paragraphe 2.

Dans la même optique, l'article 4 paragraphe 2 impose que le contrôle effectif soit exercé par des États membres et/ou des ressortissants d'États membres. Ce contrôle peut être exercé individuellement ou avec d'autres États membres ou ressortissants d'États membres. En revanche, aussi bien le libellé que les objectifs précités de l'article 4 paragraphe 2 excluent que le contrôle effectif soit exercé avec des personnes physiques ou morales de pays tiers. Ces pesonnes physiques ou morales ne doivent donc pas exercer une influence déterminante, au sens de l'article 2 point g), sur le transporteur concerné.

Eu égard à ce qui précède, la Commission estime que, fondamentalement, l'article 4 paragraphe 2 impose que les États membres et/ou les ressortissants d'États membres disposent en dernier ressort, soit individuellement, soit avec d'autres États membres ou ressortissants d'États membres, du pouvoir de décision sur la gestion du transporteur en question. Ils doivent pouvoir, soit directement, soit indirectement par des nominations aux organes dirigeants du transporteur, décider en dernier ressort sur des questions aussi importantes que, par exemple, le plan d'entreprise, le budget annuel ou tout grand projet d'investissement ou de coopération. Cette capacité ne doit pas être tributaire du soutien de personnes physiques ou morales de pays tiers. Il convient cependant de rappeler que l'article 2 point g) prescrit que ces principes généraux doivent être appliqués en tenant compte des circonstances de droit et de fait de cas d'espèce. Cela implique que chaque cas individuel doit être apprécié en fonction de ses caractéristiques propres et que, d'une manière plus générale, le critère du contrôle effectif ne peut être appliqué qu'au cas par cas.

C'est sur cette base qu'il convient d'examiner si, dans le cadre de l'accord du 4 mai 1995, Sabena satisfait au critère du contrôle effectif.

Convention de vote entre les actionnaires belges La Commission observe tout d'abord que l'État belge, SFI et les investisseurs institutionnels belges participant à l'augmentation de capital, lesquels détiendront conjointement la majorité des actions de Sabena assorties d'un droit de vote, seront liés par une convention d'actionnaires prévoyant des modalités de vote destinées à garantir que les vues conjointes de l'État belge et de SFI prévaudront dans tous les cas. Dans la pratique, les actionnaires majoritaires de Sabena agiront donc toujours comme une seule et même entité et seront donc en mesure d'empêcher Swissair de tirer avantage de l'existence de plusieurs actionnaires du côté belge.

Gestion de Sabena En ce qui concerne la gestion de Sabena, il convient en premier lieu de remarquer que c'est le conseil d'administration qui assumera la responsabilité première de la gestion de l'entreprise. L'accord du 4 mai 1995 prévoit en effet que le conseil d'administration « est investi des pouvoirs les plus étendus pour déterminer la politique générale de la société et prendre toutes les décisions de nature stratégique y compris (sans que l'énumération qui suit soit limitative) l'adoption du plan d'entreprise de Sabena et le budget annuel de la société, les investissements significatifs en matière de flotte et les modifications significatives de la configuration du réseau ». En outre, la délégation envisagée de la gestion journalière de la société au CEO se fait « sans préjudice de la généralité des compétences que la loi belge réserve au conseil d'administration ». La Commission considère, par conséquent, que la composition et les règles de vote du conseil d'administration revêtent une importance primordiale en l'espèce.

Le conseil d'administration de Sabena sera composé de douze administrateurs qui décideront sur toutes les questions à la simple majorité des voix. Les actionnaires belges pourront désigner et, le cas échéant, révoquer six membres, qui seront tous des ressortissants d'États membres, tandis que Swissair aura les mêmes droits pour cinq autres membres. De ce fait, seuls les administrateurs représentant les actionnaires belges seront en mesure conjointement d'opposer un veto aux décisions du conseil d'administration sans devoir pour cela compter sur l'appui d'autres administrateurs.

La nomination et la révocation éventuelle du douzième membre et président du conseil d'administration, lequel doit également être un ressortissant d'un État membre, sont régies par des dispositions particulières. Ce douzième membre doit être désigné sur proposition conjointe présentée par les deux groupes d'actionnaires ou, s'ils ne peuvent pas se mettre d'accord sur cette proposition commune, sur proposition de Swissair. Toutefois, l'accord du 4 mai 1995 prévoit explicitement que l'assemblée générale est libre d'accepter ou de rejeter cette proposition et qu'elle peut à tout moment révoquer, à la majorité des voix, le président nommé. Puisque les actionnaires belges détiendront la majorité absolue des voix à l'assemblée générale, ce sont eux qui décideront en dernier ressort du choix du président. Qui plus est, ils pourront à tout moment exiger sa révocation.

La Commission est donc d'avis que, s'il est vrai que toute proposition pour la nomination du président doit recevoir l'aval de Swissair, ce président, pour pouvoir exercer ses fonctions, devra pouvoir compter d'une manière déterminante sur le soutien permanent des actionnaires belges. La position des actionnaires belges est encore renforcée par le fait que, dans le cas exceptionnel d'un désaccord persistant entre les parties, leurs représentants disposeront de la majorité absolue au conseil d'administration et qu'ils pourront ainsi se passer de tout autre appui pour prendre des décisions de manière autonome. Par conséquent, le mécanisme décisionnel prévu par l'accord du 4 mai 1995 garantit que les intérêts des actionnaires belges prévaudront en dernier ressort lors des décisions prises par le conseil d'administration.

Deuxièmement, il convient de tenir compte du fait que le CEO n'assumera la responsabilité de la gestion journalière de la société que dans les limites fixées par le conseil d'administration et que ce dernier peut se réserver le droit de trancher en dernier ressort. De ce fait, on peut considérer que, au regard du critère de contrôle effectif prévu à l'article 4 paragraphe 2, la délégation de compétences au CEO revêt une importance secondaire par rapport au rôle du conseil d'administration. Tout renforcement éventuel de la position du CEO du fait d'un cumul de sa fonction avec celle du président du conseil d'administration est subordonné à l'accord de l'État belge. À cet égard, la Commission prend acte de l'intention du gouvernement belge de ne pas autoriser ce cumul lorsqu'il aboutirait à concentrer l'influence sur la gestion de l'entreprise entre les mains d'un administrateur désigné par Swissair. En tout état de cause, les dispositions régissant la nomination du CEO garantissent que les actionnaires belges disposent du pouvoir d'opposer leur veto à tous les stades de la procédure de sélection pour ce poste.

En troisième lieu, l'accord du 4 mai 1995 ne confère que des pouvoirs très limités à l'assemblée générale des actionnaires de Sabena. À l'exception des pouvoirs de nomination et de révocation éventuelle du président du conseil d'administration, examinés plus haut, le rôle de l'assemblée des actionnaires se limite à la protection des intérêts essentiels des investisseurs et n'interfère pas avec la gestion de la société. En outre, la plupart des questions devant être soumises à l'assemblée générale peuvent être tranchées à la simple majorité des voix et, de ce fait, par une action conjointe des actionnaires belges. Swissair ne conserve de droits de veto que pour la modification des statuts de Sabena, l'augmentation ou la réduction du capital social de cette dernière ainsi que pour la liquidation, la fusion ou la scission de la société. En tout état de cause, ces droits de veto ne font que traduire une protection normale des participations minoritaires, telle qu'elle est prescrite par le droit des sociétés dans la plupart des États membres dont la Belgique. La Commission considère donc que les droits de veto dont bénéficie Swissair lors de l'assemblée générale des actionnaires de Sabena n'ont aucune incidence en l'espèce.

Compte tenu de ce qui précède, la Commission conclut que les modalités de gestion de Sabena prévues par l'accord du 4 mai 1995 ne portent pas atteinte au pouvoir décisionnel ultime des actionnaires belges et ne confèrent donc pas à Swissair des prérogatives qui, en soi, seraient incompatibles avec le critère de contrôle effectif imposé par l'article 4 paragraphe 2.

Projet d'accord de coopération Pour ce qui est de la coopération entre Swissair et Sabena, il convient tout d'abord d'observer que les deux transporteurs concluront un accord global de coopération d'une durée initiale de dix ans, qui sera automatiquement reconduit pour de nouvelles périodes de cinq ans. Il faut donc considérer que la coopération s'inscrit dans une stratégie à long terme et qu'elle implique des modifications structurelles pour les deux parties.

La Commission considère d'une manière générale que, sans préjudice d'autres dispositions du droit communautaire, l'article 4 paragraphe 2 n'a pas pour objet d'empêcher des transporteurs aériens de la Communauté de coopérer avec des transporteurs de pays tiers sur la base d'une stratégie à long terme. Cette disposition ne doit pas être interprétée comme interdisant à un transporteur communautaire de limiter sa liberté commerciale dans le cadre d'une telle coopération. Le respect du critère du contrôle effectif par le transporteur ne sera compromis que si le transporteur du pays tiers a le pouvoir, dans le cadre de cette coopération, de substituer de manière déterminante ses propres décisions à celles des organes de gestion de son partenaire communautaire. Il y a donc lieu d'apprécier si les clauses de l'accord de coopération qui sera conclu entre Swissair et Sabena prévoient un tel transfert de pouvoirs décisionnels.

Le projet d'accord de coopération annexé à l'accord du 4 mai 1995 impose à Sabena de suivre certaines procédures de planification et de contrôle mises au point par Swissair et de respecter les critères et procédures définies par Swissair pour certaines activités de planification et de gestion opérationnelle. Par ailleurs, Swissair sera chargée de la planification et de la gestion opérationnelle pour certaines zones actuellement desservies par Sabena telles que par exemple, les liaisons vers l'Amérique du Nord. Toutefois, les clauses correspondantes du projet d'accord de coopération stipulent expressément que toute proposition substantielle émanant des unités de programmation conjointe sera soumise au conseil d'administration du transporteur concerné pour approbation préalable. De même, toute attribution de responsabilité en matière de planification et de gestion opérationnelle ne doit pas être interprétée comme impliquant une délégation du pouvoir décisionnel ou une répartition, entre les transporteurs, des liaisons effectivement exploitées. Sur la base des informations et des documents fournis par le gouvernement belge, la Commission estime donc que les obligations précitées faites à Sabena dans le cadre du projet d'accord de coopération paraîssent être essentiellement de nature procédurale et qu'elles ne comportent aucun transfert à Swissair de pouvoirs de décision sur des points importants.

Il y a lieu également de noter que les principales clauses du projet d'accord de coopération seront réexaminées par les deux parties tous les trois ans au moins. Sabena a ainsi la possibilité d'influer sur les critères et les procédures à respecter dans la coopération avec Swissair.

La Commission arrive donc à la conclusion que le projet d'accord de coopération ne comporte, en l'état actuel, aucune disposition qui soit incompatible avec le critère du contrôle effectif énoncé à l'article 4 paragraphe 2.

Considérations générales Il convient enfin de replacer les différents éléments examinés dans les paragraphes qui précèdent et l'ensemble de l'opération dans leur contexte respectif.

En premier lieu, l'État belge a la possibilité de neutraliser l'ensemble de l'opération en exerçant son option d'achat sur toutes les actions qui seront détenues par Swissair. Il est certes probable que cette éventualité ne sera sérieusement envisagée qu'en cas de divergences de vue inconciliables entre les parties, mais elle n'en représente pas moins une menace susceptible d'amener systèmatiquement Swissair à éviter toute action de nature à porter atteinte aux intérêts essentiels de l'État belge. De même, l'accord du 4 mai 1995 impose explicitement à Swissair d'éviter le plus possible toute action susceptible de compromettre le statut de Sabena en tant que transporteur aérien communautaire dans le cadre du règlement (CEE) n° 2407/92. En outre, plusieurs clauses de l'accord, notamment celles sur d'éventuels transferts d'actions, stipulent qu'aucune des deux parties ne peut exercer ses droits à ce titre si, ce faisant, ce statut de Sabena se trouverait compromis. La Commission considère que tous ces élements constituent des garanties supplémentaires contre une dilution possible du pouvoir décisionnel ultime des actionnaires belges dans la gestion de Sabena.

Deuxièmement, la Commission estime que, pour évaluer les conséquences d'une participation substantielle d'un transporteur aérien de pays tiers dans un transporteur communautaire, il faut également tenir compte du contexte plus large dans lequel s'inscrit cet investissement et, en particulier, des relations que la Communauté entretient avec le pays tiers en question dans le domaine de l'aviation. Ces considérations supplémentaires s'imposent au regard de l'objectif par les critères de participation majoritaire et de contrôle, qui a été examiné au chapitre IX ci-dessus, de protéger les intérêts de l'industrie communautaire des transports aériens. Cela implique, notamment, que les compagnies de pays tiers ne doivent pas être autorisées à tirer pleinement avantage, sur une base unilatérale, de la libéralisation du marché intérieur des transports aériens dans la Communauté.

Les règles suisses en matière de propriété et de contrôle des transporteurs aériens imposent que 60 % au moins du capital social d'un transporteur et que deux tiers au moins des sièges de ses organes dirigeants soient détenus par des ressortissants suisses ou toutes autres personnes assimilées en vertu d'accords internationaux. Ces exigences sont largement comparables à celles de l'article 4 paragraphe 2 du règlement (CEE) n° 2407/92. Ainsi, tant la législation suisse que la législation communautaire prévoient la possibilité que des arrangements plus libéraux soient conclus avec des pays tiers sur une base de réciprocité. Sur ce dernier point, il convient de noter que le 14 mars 1995, le Conseil de l'Union européenne a arrêté une décision autorisant la Commission a négocier un accord global en matière de transports aériens entre la Communauté et la Suisse. Cette décision prévoit, sous réserve de certaines exceptions, l'extension à la Suisse des règles régissant le marché intérieur de la Communauté dans le domaine des transports aériens.

Dans ce contexte plus général, les accords entre l'État belge et Swissair examinés dans le cadre de la présente décision paraîssent être essentiellement de nature transitoire. Ils offrent une solution provisoire, jusqu'à ce que soient levées, sur une base de réciprocité, les restrictions qui existent actuellement en matière de propriété et de contrôle entre la Suisse et la Communauté. L'élimination ultérieure de ces restrictions est déjà anticipée dans l'accord entre les parties du 4 mai 1995, puisqu'il prévoit explicitement pour Swissair l'option d'acquérir une participation majoritaire dans Sabena.

Globalement, les éléments complémentaires examinés dans le présent chapitre apportent donc de nouveaux arguments permettant de conclure que, dans le cadre de l'accord du 4 mai 1995, Sabena est effectivement contrôlée par ses actionnaires belges.

XII

Sur la base des considérations qui précèdent ainsi que des informations et documents fournis par le gouvernement belge par ses lettres des 12 mai et 15 juin 1995, la Commission conclut que, au vu des clauses de l'accord notifié du 4 mai 1995 conclu entre l'État belge et Swissair, tel que modifié par l'avenant du 12 juin 1995, Sabena satisfait aux conditions de l'article 4 du règlement (CEE) n° 2407/92 et qu'il y a lieu d'arrêter une décision en ce sens,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Au vu des clauses de l'accord notifié du 4 mai 1995 conclu entre l'État belge et Swissair, tel que modifié par l'avenant du 12 juin 1995, Sabena satisfait aux conditions de l'article 4 du règlement (CEE) n° 2407/92.

Article 2

Le royaume de Belgique est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 19 juillet 1995.

Par la Commission Neil KINNOCK Membre de la Commission

(1) JO n° L 240 du 24. 8. 1992, p. 8.

(2) JO n° L 240 du 24. 8. 1992, p. 15.

(3) JO n° L 140 du 11. 6. 1993, p. 51.

(4) JO n° L 160 du 28. 6. 1994, p. 1.

(1) JO n° L 254 du 30. 9. 1994, p. 73 (p. 84, colonne de droite, en haut).

(1) JO n° L 240 du 24. 8. 1992, p. 1.

(1) JO n° L 240 du 24. 8. 1992, p. 8.

(2) JO n° L 240 du 24. 8. 1992, p. 15.

(3) JO n° L 140 du 11. 6. 1993, p. 51.

(4) JO n° L 160 du 28. 6. 1994, p. 1.

(1)