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Document 52021AB0037

Avis de la Banque Centrale Européenne du 30 novembre 2021 sur une proposition de règlement visant à élargir les exigences de traçabilité aux transferts de crypto-actifs (CON/2021/37) 2022/C 68/02

CON/2021/37

OJ C 68, 9.2.2022, p. 2–4 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, GA, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

9.2.2022   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 68/2


AVIS DE LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE

du 30 novembre 2021

sur une proposition de règlement visant à élargir les exigences de traçabilité aux transferts de crypto-actifs

(CON/2021/37)

(2022/C 68/02)

Introduction et fondement juridique

Les 14 et 20 octobre 2021, la Banque centrale européenne (BCE) a reçu des demandes de consultation de la part du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne, respectivement, portant sur une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs (refonte) (1) (ci-après la « proposition de règlement »).

La BCE a compétence pour émettre un avis en vertu de l’article 127, paragraphe 4, et de l’article 282, paragraphe 5, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, étant donné que la proposition de règlement contient des dispositions ayant une incidence sur les missions fondamentales du Système européen de banques centrales (SEBC) qui consistent à mettre en œuvre la politique monétaire de l’Union et à promouvoir le bon fonctionnement des systèmes de paiement en vertu de l’article 127, paragraphe 2, premier et quatrième tirets du traité, sur la contribution du SEBC à la stabilité du système financier telle que visée à l’article 127, paragraphe 5, du traité, et sur le cours légal des billets de banque en euros tel que visé à l’article 128, paragraphe 1, du traité. Conformément à l’article 17.5, première phrase, du règlement intérieur de la Banque centrale européenne, le présent avis a été adopté par le conseil des gouverneurs.

Observations générales

La BCE salue l’initiative de la Commission européenne visant à élargir les exigences de traçabilité aux crypto-actifs au moyen de la proposition de règlement, qui fait partie d’un ensemble de mesures (2) en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT) adopté par la Commission le 20 juillet 2020.

Étant donné que les transferts de crypto-actifs sont exposés à des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme similaires à ceux entourant les transferts de fonds électroniques, les prestataires de services sur crypto-actifs devraient être soumis au même niveau d’exigences en matière de LBC/FT que les autres entités assujetties. La BCE accueille donc favorablement la proposition de règlement, qui constitue un moyen d’établir des conditions de concurrence équitables pour les prestataires de services sur crypto-actifs.

La BCE salue la proposition d’aligner le cadre juridique de l’UE sur les recommandations du Groupe d’action financière (GAFI), en particulier la recommandation 16 (3), dans la mesure où elle atténue davantage les risques en matière de LBC/FT associés aux transferts de crypto-actifs, établissant ainsi des conditions de concurrence équitables entre les transferts en monnaies officielles et les transferts de crypto-actifs afin de prévenir l’utilisation abusive de ces derniers à des fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. S’il convient d’établir des conditions de concurrence équitables en ce qui concerne le degré des exigences en matière de LBC/FT applicables aux prestataires de services sur crypto-actifs, les exigences particulières devraient tenir compte des risques associés aux caractéristiques technologiques des crypto-actifs et des transferts de crypto-actifs. Par exemple, les exigences relatives à la traçabilité des transferts de crypto-actifs devraient prendre en compte les spécificités des technologies sous-tendant ces transferts.

Aux fins d’atténuer efficacement les risques en matière de LBC/FT, la proposition de règlement devrait être précisée pour ne laisser aucun doute sur la prise en compte des transactions entre portefeuilles hébergés et non hébergés, de sorte que doivent être collectées et stockées exactement les mêmes informations que pour les autres transferts de crypto-actifs. En outre, l’évolution du marché ainsi que les activités de blanchiment de capitaux impliquant des crypto-actifs et opérées sans recourir à des prestataires de services ou dans le cadre d’échanges entre pairs décentralisés devraient également faire l’objet d’un suivi attentif de la part de la Commission et des autorités nationales concernées, et de nouvelles mesures législatives devraient être proposées, si nécessaire, en cas d’augmentation significative du volume de transactions et d’utilisation accrue de ces actifs pour des activités illicites dans ce segment.

Enfin, compte tenu de l’évolution rapide des technologies dans le domaine des crypto-actifs, il importe de suivre de près la mise en œuvre du cadre en collaboration avec les autorités concernées et, le cas échéant, le secteur privé.

1.   Définition des crypto-actifs et champ d’application de la proposition de règlement

1.1

La proposition de règlement utilisera la définition de « crypto-actif » figurant dans la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur les marchés de crypto-actifs, et modifiant la directive (UE) 2019/1937 (4), présentée par la Commission (ci-après la « proposition de règlement sur les marchés de crypto-actifs »). Comme la BCE l’a déjà relevé (5), la proposition de règlement sur les marchés de crypto-actifs contient une définition des crypto-actifs large et axée sur la technologie. La BCE comprend qu’il s’agit d’une définition très générale et que, par conséquent, la proposition de règlement vise à étendre les exigences de traçabilité à tous les crypto-actifs, quelle que soit la technologie sous-jacente (technologie des registres distribués ou autre) utilisée pour leur émission.

1.2

S’agissant du champ d’application de la proposition de règlement, la BCE comprend que, à l’instar de celui de la proposition de règlement sur les marchés de crypto-actifs, il n’est pas destiné à couvrir les crypto-actifs émis par des banques centrales agissant en leur qualité d’autorité monétaire. Toutefois, dans un souci de sécurité juridique et afin d’aligner pleinement le champ d’application de la proposition de règlement sur celui de la proposition de règlement sur les marchés de crypto-actifs, la BCE propose d’indiquer explicitement ce point dans les considérants et les dispositions de la proposition de règlement.

2.   Référence à des monnaies officielles

La proposition de règlement contient des références au terme « monnaies fiat » (6). Conformément aux traités et au droit monétaire de l’Union, l’euro est la monnaie unique de la zone euro, c’est-à-dire celle des États membres ayant adopté l’euro en tant que monnaie. En ce qui concerne les États membres qui n’ont pas adopté l’euro en tant que monnaie, les traités se réfèrent systématiquement aux monnaies de ceux-ci. Les traités ne désignent nulle part l’euro ou les monnaies des États membres comme des monnaies « fiat ». En conséquence, il n’est pas opportun de faire référence, dans un texte juridique de l’Union, à des « monnaies fiat ». La proposition de règlement devrait plutôt faire référence à des « monnaies officielles » (7).

3.   Date d’application de la proposition de règlement

L’alignement de la date d’application de la proposition de règlement sur celle de la proposition de règlement sur les marchés de crypto-actifs serait utile, du point de vue de la stabilité systémique et financière, afin de garantir que la proposition de règlement s’applique aux transferts de crypto-actifs le plus tôt possible, plutôt que d’attendre l’entrée en vigueur de l’ensemble des mesures restantes en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux. Comme l’a relevé la Commission, jusqu’à présent, les transferts d’actifs virtuels sont restés en dehors du champ d’application de la législation de l’Union sur les services financiers, exposant les détenteurs de crypto-actifs à des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, étant donné que les flux d’argent illicite peuvent avoir lieu par transferts de crypto-actifs et nuire à l’intégrité, à la stabilité et à la réputation du secteur financier (8). Un certain nombre d’États membres a déjà légiféré sur ce point (9).

Lorsque la BCE recommande de modifier la proposition de règlement, des suggestions de rédaction particulières, accompagnées d’une explication, figurent dans un document de travail technique distinct. Le document de travail technique est disponible en anglais sur le site internet EUR-Lex.

Fait à Francfort-sur-le-Main, le 30 novembre 2021.

La présidente de la BCE

Christine LAGARDE


(1)  COM(2021) 422 final.

(2)  Cet ensemble de mesures comprend également : a) une proposition de règlement relatif à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme (COM(2021) 420 final) ; b) une proposition de directive relative aux mécanismes à mettre en place par les États membres pour prévenir l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme et abrogeant la directive (UE) 2015/849 (COM(2021) 423 final) ; et c) une proposition de règlement instituant l’Autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et modifiant les règlements (UE) no 1093/2010, (UE) no 1094/2010 et (UE) no 1095/2010 (COM(2021) 421 final).

(3)  Voir les recommandations du GAFI. Disponibles sur le site internet du GAFI à l’adresse suivante : https://www.fatf-gafi.org

(4)  COM(2020) 593 final.

(5)  Voir la note de bas de page 12 de l’avis de la Banque centrale européenne du 19 février 2021 sur une proposition de règlement sur les marchés de crypto-actifs, et modifiant la directive (UE) 2019/1937 (CON/2021/4) (JO C 152 du 29.4.2021, p. 1). Tous les avis de la BCE sont publiés sur EUR-Lex.

(6)  Voir les considérants 8 et 27 de la proposition de règlement.

(7)  Voir le point 2.1.5 de l’avis CON/2021/4 et le point 1.1.3 de l’avis de la Banque centrale européenne du 12 octobre 2016 sur une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive (UE) 2015/849 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme et modifiant la directive 2009/101/CE (CON/2016/49) (JO C 459 du 9.12.2016, p. 3).

(8)  Voir l’exposé des motifs, section 1, premier point, huitième alinéa de la proposition de règlement.

(9)  Par exemple, le 1er octobre 2021 est entrée en vigueur une ordonnance du ministère allemand des Finances sur les obligations de vigilance renforcées pour le transfert de crypto-actifs (Verordnung über verstärkte Sorgfaltspflichten bei dem Transfer von Kryptowerten vom 24. September 2021 (BGBI. I S. 4465)). Selon l’ordonnance, les prestataires de services sur crypto-actifs transférant des crypto-actifs pour le compte d’un preneur d’ordre doivent transmettre simultanément et en toute sécurité au prestataire de services sur crypto-actifs agissant pour le compte du bénéficiaire le nom, l’adresse et le numéro de compte (par exemple, la clé publique) du donneur d’ordre, ainsi que le nom et le numéro de compte (par exemple, la clé publique) du bénéficiaire. Le prestataire de services sur crypto-actifs agissant pour le compte du bénéficiaire doit veiller à recevoir et stocker les informations de l’initiateur et du bénéficiaire. La traçabilité complète des parties impliquées dans un transfert de crypto-actifs est conçue comme un instrument de prévention, de détection et d’enquête en matière de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, ainsi que de surveillance en matière de contournement de sanctions. L’ordonnance impose également aux entités assujetties de veiller à ce que les informations sur le bénéficiaire ou l’initiateur d’un transfert soient collectées lorsque le transfert est effectué à partir d’un portefeuille électronique ou vers un portefeuille électronique qui n’est pas géré par un prestataire de services sur crypto-actifs, même s’il n’existe aucun risque de transfert de données.


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