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Document 52014IE5005

Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Éradiquer l’amiante de l’Union européenne»

OJ C 251, 31.7.2015, p. 13–18 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

31.7.2015   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 251/13


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Éradiquer l’amiante de l’Union européenne»

(2015/C 251/03)

Rapporteur:

Aurel Laurenţiu PLOSCEANU

Corapporteur:

Enrico GIBELLIERI

Le 8 juillet 2014, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l’article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d’élaborer un avis d’initiative sur le thème

«Éradiquer l’amiante de l’Union européenne».

La commission consultative des mutations industrielles (CCMI), chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 28 janvier 2015.

Lors de sa 505e session plénière des 18 et 19 février 2015 (séance du 18 février 2015), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 162 voix pour, 5 voix contre et 10 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

L’éradication complète de toute l’amiante encore présente et de tous les produits contenant de l’amiante doit être un objectif prioritaire de l’Union européenne. C’est aux États membres qu’il revient de définir des plans d’action, mais l’Union européenne devrait en assurer la coordination. À cette fin, le CESE encourage l’Union européenne à collaborer avec les partenaires sociaux et autres parties prenantes aux niveaux européen, national et régional afin d’élaborer et de partager des plans d’action pour la gestion et l’élimination de l’amiante. Ces plans devraient couvrir: l’éducation et l’information, la formation des employés du secteur public, la formation nationale et internationale, des programmes de financement du désamiantage, des activités de sensibilisation se rapportant au désamiantage et à l’élimination des produits contenant de l’amiante (y compris lors de leur élimination des bâtiments), des équipements publics et des sites d’anciennes usines d’amiante; le nettoyage des bâtiments et la construction d’installations pour la destruction de l’amiante et des débris contenant de l’amiante, le suivi de l’efficacité des prescriptions légales existantes, des évaluations de l’exposition du personnel à risque et la protection de la santé.

1.2.

Plusieurs États membres ont mis en place des registres publics répertoriant les bâtiments contenant de l’amiante. Il convient d’encourager les autres États membres à mettre en place de tels registres, afin de fournir des informations pertinentes aux travailleurs et aux employeurs sur les risques liés à l’amiante avant le lancement de travaux de rénovation et qui viendraient s’ajouter aux protections actuelles en matière de santé et de sécurité imposées par le droit de l’Union européenne. Ce recensement pourrait s’effectuer d’abord au niveau local et concerner les bâtiments publics et les infrastructures publiques

À l’heure actuelle, la Pologne est le seul État membre à avoir adopté un plan d’action doté de moyens financiers visant l’élimination complète des ressources d’amiante existant encore dans le pays (1).

1.3.

Son objectif est d’éradiquer l’amiante d’ici la fin de l’année 2032. En se fondant sur ce modèle, l’Union européenne devrait encourager les États membres à lancer des plans d’action et des feuilles de route spécifiques à différents niveaux: local, régional et national. À cet égard, la pleine application des réglementations européennes et nationales en matière d’amiante revêt une importance cruciale. Pour y parvenir, le comité des hauts responsables de l’inspection du travail (CHRIT) et les inspections du travail ont un rôle important à jouer, respectivement au niveau européen et national.

1.4.

Un enseignement à tirer de l’exemple polonais est qu’il est extrêmement important de disposer de financements publics suffisants pour l’élimination de l’amiante. Nous estimons aussi que l’élimination organisée et structurée de l’amiante constitue un mode d’amélioration du développement régional et une amélioration des infrastructures des régions où elle est pratiquée. La Commission européenne devrait envisager d’ouvrir explicitement ses Fonds structurels aux plans d’élimination de l’amiante.

1.5.

Il est demandé instamment à la Commission européenne de réaliser une étude sur les stratégies et systèmes nationaux existants en matière de recensement de l’amiante, ainsi que sur la manière dont ils sont financés.

1.6.

La création de décharges pour les déchets d’amiante n’est qu’une solution provisoire au problème, qui est ainsi remis entre les mains des générations futures, car les fibres d’amiante sont pratiquement indestructibles. Aussi le Comité invite-t-il la Commission à faire connaître les systèmes de destruction des produits amiantés (torche à plasma, pyrogazéification, etc.) en référence aux meilleurs techniques disponibles; il convient de promouvoir la recherche et l’innovation pour mettre en œuvre des technologies durables pour le traitement et l’inertage des déchets contenant de l’amiante en vue de leur recyclage, et de leur réutilisation en toute sécurité et de la réduction de la mise en décharge de ces déchets. La Commission devrait prévoir des mesures efficaces pour prévenir la pratique dangereuse consistant à acheminer des déchets d’amiante dans des décharges prévues pour des déchets de construction «tout venant».

1.7.

Les financements de l’Union européenne et les incitations des États membres consentis pour améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments devraient être conditionnés au désamiantage en toute sécurité des bâtiments concernés. Alors que l’Union européenne a élaboré une politique ambitieuse pour l’efficacité énergétique et que la directive révisée sur l’efficacité énergétique devrait inaugurer une stratégie à long terme pour la rénovation des bâtiments dans chaque État membre, cette politique n’est pas combinée avec les stratégies en matière de désamiantage. Il est fortement recommandé de procéder à une telle combinaison, sous la forme d’une politique européenne cohérente intégrant les différents domaines d’action concernés.

Tout plan d’action pour l’élimination de l’amiante devra prendre en compte les qualifications de tous les acteurs concernés par les travaux ou opérations. Cela concerne les travailleurs et les entreprises, les coordinateurs de la santé et de la sécurité au travail, les coordinateurs et inspecteurs des travaux, les conseillers, formateurs, employeurs et autres acteurs. Il est fortement nécessaire et recommandé de prévoir la certification des qualifications des entreprises qui participeront à ces plans d’action.

1.8.

La sécurité de l’élimination de l’amiante dépend fortement du niveau de formation de deux catégories de travailleurs: ceux qui travaillent dans des entreprises spécialisées, et ceux qui exercent une profession ou une activité qui les expose accidentellement à l’amiante.

Étant donné que les petites et moyennes entreprises, qui emploient la majorité des travailleurs européens, paraissent particulièrement vulnérables en ce qui concerne l’application du droit en matière d’hygiène et de sécurité, le CESE demande à la Commission de fournir, en collaboration avec les autorités nationales compétentes, le soutien nécessaire aux mesures et initiatives destinées à assurer la protection de l’ensemble des travailleurs de l’Union. Il est fondamental, à cet égard, que la formation soit de bonne qualité.

1.9.

Le CESE invite la Commission: à élaborer, conjointement avec les partenaires sociaux et d’autres parties prenantes concernées, des programmes et activités de sensibilisation se rapportant aux risques liés à l’amiante et à la nécessité d’une formation appropriée pour tout le personnel susceptible d’être affecté par des MCA, conformément à l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2009/148/CE; à améliorer l’information sur la législation existante en matière d’amiante; et à fournir des guides pratiques sur la façon de respecter cette législation, y compris pour ce qui concerne les citoyens de l’Union européenne.

1.10.

Il convient aussi que la législation de l’Union européenne tienne compte des derniers résultats de la recherche scientifique et médicale et les inclue. Les chercheurs ont aussi découvert récemment que le mésothéliome et le cancer du poumon peuvent être causés par une très faible exposition à l’amiante, avec une longue période de latence. Aussi le CESE invite-t-il instamment la Commission à modifier la recommandation 2003/670/CE afin de refléter les progrès de la recherche médicale et d’inclure les cancers du larynx et des ovaires dans les maladies liées à l’amiante.

1.11.

Il convient de veiller à ce que tous les cas d’asbestose, de mésothéliome et de maladies connexes soient recensés au moyen d’une collecte systématique des données sur les maladies professionnelles et non professionnelles liées à l’amiante, à qualifier et à recenser officiellement les plaques pleurales comme une maladie liée à l’amiante et à établir, avec le concours des observatoires spécialisés, une cartographie fiable de la présence d’amiante. Le personnel médical doit recevoir une formation appropriée pour pouvoir assurer sa mission qui est de délivrer des diagnostics valables.

1.12.

En outre, les institutions européennes devraient diffuser les meilleures pratiques pour ce qui est des lignes directrices et des pratiques à l’échelon national en ce qui concerne les procédures de reconnaissance des maladies liées à l’amiante, ou favoriser la diffusion de ces pratiques.

1.12.1.

Il convient, en particulier, d’améliorer le rôle actif des victimes dans les procédures de reconnaissance. Pour leur permettre d’avoir accès aux informations nécessaires et de faire entendre leur voix, il y a lieu de leur fournir un soutien juridique, financier et personnel. Les associations de victimes de l’amiante doivent être organisées. Cela permettrait d’alléger le fardeau qu’elles supportent à titre personnel dans le cadre de ces procédures de reconnaissance et qui s’ajoute toujours aux souffrances liées à la maladie.

En conséquence, le CESE:

invite les organismes d’assurance et d’indemnisation à adopter une approche commune pour la reconnaissance et l’indemnisation des maladies professionnelles liées à l’amiante,

demande que les procédures de reconnaissance soient simplifiées et facilitées,

reconnaît que, en raison de périodes de latence très longues, les victimes de l’amiante sont souvent incapables de prouver le lien de causalité avec leurs expositions professionnelles à l’amiante,

invite la Commission à soutenir l’organisation de conférences visant à fournir aux groupes de victimes de l’amiante des conseils de professionnels et à apporter un soutien pratique à leurs membres.

1.12.2.

Enfin, le CESE encourage la Commission européenne à coopérer avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Organisation internationale du travail (OIT), les pays tiers ainsi que d’autres organisations internationales afin de promouvoir des niveaux supérieurs d’hygiène et de sécurité au travail au niveau mondial en mettant en évidence, entre autres, les dangers de l’amiante et en promouvant des solutions en vue de protéger la santé, ainsi qu’afin d’améliorer l’information et le soutien aux victimes de maladies liées à l’amiante.

1.12.3.

Étant donné la grande importance de cette question, la commission consultative des mutations industrielles du CESE présentera cet avis lors d’une conférence organisée conjointement avec le Parlement européen, le Comité des régions et la Commission européenne.

2.   Introduction

2.1.

Malgré l’interdiction d’utiliser de l’amiante en Europe (2) (décision de 1999 qui devait être appliquée en 2005), elle y tue toujours des personnes. Alors que tous les types d’amiante sont dangereux et que les risques associés à cette matière ont été documentés et réglementés, et malgré l’interdiction d’utiliser de l’amiante, cette matière se trouve encore dans de nombreux navires, trains, machines, bunkers, tunnels, souterrains, conduites des réseaux publics et privés d’acheminement de l’eau, et, en particulier, dans les bâtiments, dont de nombreux bâtiments publics et privés.

2.2.

D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), on compte chaque année entre 20  000 et 30  000 cas de maladies liées à l’amiante rien que dans l’Union européenne et on s’attend à ce que, d’ici 2030, plus de 3 00  000 citoyens meurent du mésothéliome au sein de l’Union (3). L’on estime par ailleurs que dans le monde, 1 12  000 personnes meurent chaque année de maladies liées à l’amiante (4).

2.3.

L’interdiction d’utiliser de l’amiante en Europe (5) (décision de 1999 qui devait être appliquée en 2005) et la surveillance actuelle des marchés ne garantissent pas qu’il n’y ait pas d’importations d’amiante sur les marchés européens. Cela concerne un large éventail de produits, dont des matériaux de construction, des appareils ménagers, des garnitures de freins automobiles ou des récipients thermos. En se fondant sur la nouvelle approche du système européen de surveillance du marché (6), l’Union européenne pourrait commencer à intenter des actions contre les produits contenant de l’amiante.

2.4.

L’Union européenne dispose d’un corpus législatif complet en matière d’amiante, pour ce qui est de son interdiction, des valeurs limites et de la protection des travailleurs. Outre l’interdiction de l’utilisation et de la commercialisation de l’amiante, des valeurs limites ont été fixées, une directive spécifique de l’Union européenne réglemente les conditions de travail relativement à l’amiante (7), et la certification des entreprises, l’information et la formation des travailleurs sont obligatoires. Toutefois, les dispositions de l’Union européenne restent souvent très générales et donnent lieu à des mises en application divergentes. De plus, il manque toujours certains éléments, par exemple des dispositions spécifiques concernant le niveau de formation des différents intervenants ou des dispositions relatives à l’enregistrement des sources d’amiante.

2.5.

À ce stade, il faut préciser qu’un rapport d’initiative du Parlement européen, adopté en mars 2013 (8), énumère de manière exhaustive les différents problèmes et domaines politiques liés à la question de l’amiante et présente une liste de 62 demandes spécifiques adressées aux décideurs de l’Union européenne et des États membres.

2.6.

Il faut aujourd’hui prendre acte du fait que, bien que de nombreux pays aient interdit son utilisation, la production annuelle d’amiante dans le monde atteint des niveaux toujours aussi élevés. Simplement, le commerce de l’amiante et son utilisation sont passés des pays industrialisés aux pays émergents. Le commerce florissant de l’amiante à l’échelle internationale s’accompagne de l’activité influente d’un lobby mondial de l’amiante, qui utilise, aux fins de sa propagande, les recherches de quelques scientifiques complaisants. À cet égard, il faut aussi noter que l’Europe continue de procéder à des investissements financiers dans les activités de l’amiante à l’échelle mondiale. Elle continue aussi d’exporter de l’amiante, lorsqu’elle expédie des navires à des fins de démantèlement dans d’autres régions du monde. Il faut aussi noter que des navires transportant une cargaison d’amiante en transit peuvent encore accoster, utiliser des infrastructures portuaires et procéder à un entreposage temporaire dans l’Union européenne.

2.7.

Il est d’une importance capitale de disposer de conditions homogènes à l’échelle mondiale en ce qui concerne l’amiante et, à cet égard, l’Union européenne devrait jouer un rôle déterminant pour interdire l’utilisation de toutes les formes d’amiante dans le monde. À cet égard, l’Europe peut faire bénéficier les autres régions du monde de ses connaissances relatives aux effets de l’amiante sur la santé, à sa substitution par d’autres matériaux et à son élimination en toute sécurité. Il est nécessaire que l’Union européenne s’engage plus résolument avec des organisations internationales afin de lancer des instruments permettant d’identifier le marché de l’amiante comme un marché dangereux et que l’inscription de l’amiante chrysotile à l’annexe III de la convention de Rotterdam (9) soit une priorité absolue.

3.   Évolutions spécifiques

3.1.

Selon une étude publiée en 2011 (10), une proportion considérable de l’environnement bâti existant de l’Union européenne a plus de 50 ans d’âge. Plus de 40 % des bâtiments résidentiels ont été construits avant les années 1960. La construction a connu un véritable boom entre 1961 et 1990, période durant laquelle, dans presque tous les États membres, le parc immobilier a plus que doublé et l’amiante a été largement utilisée.

3.2.

Selon cette même étude, la consommation énergétique de ces bâtiments correspond à 40 % des besoins énergétiques finaux de l’Europe. Il s’agit donc du secteur le plus consommateur, suivi par celui des transports, lequel représente 33 % du total. Parallèlement, dans le cadre de sa feuille de route vers une économie compétitive à faible intensité de carbone à l’horizon 2050, l’Union européenne s’est engagée à réduire de 80 à 95 % ses émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050 (11).

3.3.

Cela signifie que la rénovation de l’environnement bâti présente un potentiel important sur les deux plans, à savoir améliorer la performance énergétique des bâtiments, en réalisant par là-même les objectifs de la feuille de route de l’Union européenne pour 2050, et en profiter pour éliminer l’amiante.

3.4.

Pour ce faire, il faudra toutefois une stratégie coordonnée et une coopération étroite en matière de politiques et de programmes de financement, tant au niveau de l’Union européenne qu’au niveau national. Des investissements financiers novateurs sont également indispensables pour stimuler les investissements privés.

3.5.

À cet égard, l’on attend de l’Union qu’elle joue un rôle de soutien et de coordination. En outre, certains domaines d’action nécessitent une meilleure coordination: il s’agit de la formation professionnelle, du recensement et de la reconnaissance des maladies liées à l’amiante.

4.   Avancées au niveau national

4.1.

Malgré l’interdiction, des millions de tonnes d’amiante se trouvent encore dans des bâtiments et tous les États membres n’ont pas encore instauré de registre indiquant leur emplacement ni la quantité d’amiante à éliminer. Il nous manque dès lors un point de référence adéquat pour traiter de manière appropriée toutes les ressources en amiante encore présentes en Europe.

4.2.

À l’heure actuelle, la Pologne est le seul État membre à avoir adopté un programme pour éliminer, sur tout son territoire, l’ensemble de l’amiante existante; la valeur estimée de ce programme est de 10 milliards d’euros d’ici à 2030, avec un calendrier précis et un financement correspondant qui combine des moyens publics (État, programmes de l’Union européenne) et privés (propriétaires, associations territoriales, etc.). Il convient de lancer ce type d’initiative dans tous les pays de l’Union européenne (12).

4.3.

En France, il a été établi que 3 millions de logements sociaux — sur les 15 millions que représente l’ensemble du parc de logement social français — présentent des problèmes liés à l’amiante, les coûts estimés des travaux qui seraient nécessaires à leur réhabilitation s’élevant à 15 milliards d’euros. Le coût estimatif par unité est de 15  000 à 20  000 EUR. Et à Paris, il conviendra de surveiller de près les travaux préparatoires au désamiantage de l’emblématique Tour Montparnasse.

4.4.

De son côté, le Royaume-Uni a lancé une campagne pour éradiquer l’amiante dans tous les établissements scolaires. L’une des raisons est que les enseignants du pays présentent un taux accru de mésothéliome (13).

4.5.

En Lituanie, un programme de remplacement des toitures en amiante a commencé en 2012. Il est mis en œuvre par le ministère de l’agriculture. Les bénéficiaires potentiels sont des villageois, et l’aide financière maximale qu’ils peuvent recevoir pour un projet est de 6  000 LTL (1  740 EUR). Les fonds européens et le budget national financent jusqu’à 50 % du total des coûts éligibles du projet.

5.   Actions de formation

5.1.

Concernant l’amiante, un problème majeur est celui des connaissances — ou plutôt, du manque de connaissances. De nombreux travailleurs sont exposés à l’amiante dans le cadre de leur travail, en particulier dans les secteurs de la maintenance et de la décontamination, mais beaucoup d’autres sont potentiellement concernés (couvreurs, électriciens, chauffagistes, travailleurs dans le domaine du recyclage, coordinateurs de la santé et de la sécurité au travail, inspecteurs du travail, et beaucoup d’autres). La législation existante fait déjà obligation aux employeurs de prévoir une formation appropriée pour tous les travailleurs qui sont exposés ou susceptibles d’être exposés à de la poussière provenant de l’amiante ou de matériaux contenant de l’amiante. Toutefois, l’interdiction d’utiliser différents types de matériaux s’accompagne d’une perte progressive de nos connaissances sur les risques qu’ils présentent, leurs caractéristiques et leur apparence visuelle. Alors que de nombreux États membres ont dispensé des formations aux ouvriers dans le domaine de la démolition, de la construction et de l’entretien, ainsi qu’à d’autres personnes chargées de l’élimination de matériaux contenant de l’amiante (MCA), nous ne disposons pas encore de normes suffisantes applicables dans toute l’Europe.

5.2.

L’intégrité physique fait partie des droits humains fondamentaux, qui sont consacrés notamment par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Les politiques de l’Union européenne doivent être conçues de sorte à protéger ce droit. Cela concerne, au premier chef, les politiques de santé publique et les politiques en matière de santé et de sécurité au travail, mais aussi les domaines d’action ayant trait à la problématique de l’exposition potentielle à l’amiante et du mode de traitement de celle-ci.

5.3.

Un autre sujet d’inquiétude est de savoir si les ingénieurs civils, les architectes et les employés de sociétés non spécialisées dans le désamiantage disposent de connaissances appropriées. Le CESE invite la Commission à mettre en place un groupe de travail, conjointement avec les États membres, pour développer des qualifications minimales obligatoires en matière d’amiante et fournir des qualifications en matière d’amiante pour la formation des travailleurs de ces professions.

5.4.

C’est un problème qui a été abordé par les partenaires sociaux du secteur européen de la construction (Fédération de l’industrie européenne de la construction et Fédération européenne des travailleurs du bâtiment et du bois), lesquels ont créé des modules d’information sur l’amiante (14) pour cette deuxième catégorie de travailleurs. En dehors du cadre du dialogue social, il existe un autre projet financé par l’Union européenne (projet ABClean, dans le cadre du programme Leonardo da Vinci), qui élabore du matériel pédagogique pour les cours de formation des formateurs (15).

6.   Résultats de la mini-audition publique

6.1.

Les personnes qui souffrent de différentes maladies liées à l’amiante sont bien trop nombreuses en Europe. La plupart de ces maladies sont d’origine professionnelle, mais ce n’est pas le cas de toutes, loin s’en faut. Les femmes au foyer qui lavaient les vêtements de travail de leur époux étaient également exposées aux fibres d’amiante, de même que leurs enfants. Au Royaume-Uni, une campagne a mis en évidence que 80 % des établissements scolaires sont encore aujourd’hui contaminés par l’amiante. Cette situation pourrait facilement engendrer une nouvelle génération de victimes de l’amiante, surtout compte tenu des recherches scientifiques les plus récentes sur la question des niveaux d’exposition et des périodes de latence et de l’évolution des maladies. De plus, il est prouvé que les diverses maladies liées à l’amiante peuvent être causées par de très faibles taux d’exposition, associés à une longue période de latence. L’exposition à l’amiante est donc, dans plusieurs États membres, une menace pour l’ensemble de la population.

6.2.

En outre, en raison de la très longue période de latence et du manque partiel d’informations au sein du personnel médical, il est fréquent que les prestataires de soins de santé ne fournissent pas une aide ni des informations appropriées aux victimes en temps opportun.

6.3.

Assurer l’élimination en toute sécurité est un volet important de tout plan d’élimination. Si cet aspect est négligé, une exposition accidentelle à l’amiante se produira fatalement. Par exemple, en Suisse, c’est dans le secteur du recyclage qu’on a mesuré le plus fort taux d’exposition à l’amiante.

6.4.

Pour protéger les citoyens et les travailleurs, une condition préalable est de disposer d’une surveillance des marchés qui fonctionne pour empêcher l’importation de matériaux contenant de l’amiante sur les marchés européens.

6.5.

Pour ce qui est du caractère létal de toutes les formes d’amiante, l’Union européenne agit en s’appuyant sur des bases juridiques communes solides. La directive 1999/77/CE dispose qu’«il n’a pas encore pu être déterminé de seuil d’exposition au-dessous duquel l’amiante chrysotile n’entraîne pas de risque de cancer» et qu’«un moyen efficace de protection de la santé est d’interdire l’utilisation des fibres d’amiante chrysotile et des produits qui en contiennent».

6.6.

Les maladies liées à l’amiante peuvent entraîner, et de fait entraînent souvent, une mort particulièrement lente et douloureuse. Un rapport d’Eurogip (16) et un autre consacré à un projet conjoint de la FETBB (Fédération européenne des travailleurs du bâtiment et du bois), de la CES (Confédération européenne des syndicats) et de l’IBAS (Secrétariat international Ban Asbestos) ont mis en évidence la situation actuelle en matière de reconnaissance et d’indemnisation pour les maladies liées à l’amiante, au regard de la réglementation des États membres d’Europe centrale et orientale (17). Si les principales maladies liées à l’amiante sont, en principe, reconnues dans la plupart des États membres, il arrive trop souvent que des victimes luttent encore pour la reconnaissance de leur situation, sans succès.

Les rapports susmentionnés révèlent par ailleurs que les dispositions et procédures nationales en matière de reconnaissance et d’indemnisation sont très disparates. Bien souvent, l’aide et les orientations dont les victimes ont besoin n’existent pas.

Bruxelles, le 18 février 2015.

Le Président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Ministère polonais de l’économie; programme d’élimination de l’amiante en Pologne 2009-2032 — Annexe à la résolution no 39/2010 du Conseil des ministres du 15 mars 2010.

(2)  Directive 1999/77/CE.

(3)  http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs343/fr/

(4)  http://www.efbww.org/pdfs/Presentation%20Mr%20Takala.pdf

(5)  Directive 1999/77/CE.

(6)  http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2013:0075:FIN:FR:PDF; COM(2013) 75 final, voir notamment l’article 12.

(7)  Directive 83/477/CEE du 19 septembre 1983 modifiée par la directive 91/382/CEE du 25 juin 1991 et par la directive 98/24/CE du 7 avril 1998.

(8)  Résolution du Parlement européen du 14 mars 2013 sur les risques liés à l’amiante pour la santé au travail et les perspectives d’élimination complète de l’amiante encore existante [2012/2065(INI)].

(9)  Cette convention, entrée en vigueur le 24 février 2004, a pour but d’encourager le partage des responsabilités et la coopération entre parties dans le domaine du commerce international de certains produits chimiques dangereux, afin de protéger la santé des personnes et l’environnement contre des dommages éventuels, et afin de contribuer à l’utilisation écologiquement rationnelle de ces produits en facilitant l’échange d’informations sur leurs caractéristiques, en instituant un processus national de prise de décision applicable à leur importation et à leur exportation et en assurant la communication de ces décisions aux parties. http://www.pic.int/LaConvention/Aperçu/TextedelaConvention/tabid/1786/language/fr-H/Default.aspx

(10)  BPIE (Building Performance Institute Europe), Europe’s buildings under the microscope (Les bâtiments de l’Europe vus au microscope), octobre 2011.

(11)  Directive 2010/31/CE du 17 mai 2010.

(12)  Annexe à la résolution no 39/2010 du Conseil des ministres du 15 mars 2010.

(13)  http://www.asbestosexposureschools.co.uk/pdfnewslinks/INCREASING%20MESOTHELIOMA%20DEATHS%20AMONGST%20SCHOOL%20STAFF%20AND%20FORMER%20PUPILS%20%2017%20JAN%2015.pdf

(14)  http://www.efbww.org/default.asp?Issue=Asbestos&Language=FR et http://www.fiec.eu/en/library-619/other-publications.aspx

(15)  http://www.abcleanonline.eu/Project.aspx

(16)  http://www.eurogip.fr/en/publications-d-eurogip/130-asbestos-related-occupational-diseases-in-europe-recognition-statistics-specific-systems

(17)  http://www.efbww.org/default.asp?Issue=Asbestos diseases&Language=EN


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