AVIS
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Comité économique et social européen
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Banque européenne de l’hydrogène
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Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur la Banque européenne de l’hydrogène
[COM(2023) 156 final]
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TEN/805
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Rapporteur: Thomas KATTNIG
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Consultation
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Commission européenne, 02/05/2023
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Base juridique
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Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne
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Compétence
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Section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information»
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Adoption en section
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16/05/2023
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Adoption en session plénière
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14/06/2023
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Session plénière nº
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579
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Résultat du vote
(pour/contre/abstentions)
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162/0/2
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1.Conclusions et recommandations
1.1Le CESE accueille favorablement l’idée de la Commission européenne de créer une Banque européenne de l’hydrogène (BEH) et invite celle-ci, compte tenu des observations et recommandations détaillées qu’il a formulées dans son avis sur la stratégie européenne de l’hydrogène, à préciser les points suivants ou à les prendre en considération, sous l’angle de la politique économique, environnementale et sociale, lors de la conception et de la mise en œuvre de la BEH.
1.2Le CESE souligne que les combustibles fossiles ne doivent pas être subventionnés par des fonds de l’UE. Le principe de «ne pas nuire» doit donc également s’appliquer aux fonds en rapport avec la BEH: l’hydrogène (H2) ne doit bénéficier de financements de l’Union que si l’électricité utilisée pour le produire provient de sources compatibles avec le règlement sur la taxinomie et considérées comme apportant une contribution considérable au processus de décarbonation.
1.3Le financement au titre de la BEH devrait cibler en priorité la production d’hydrogène vert et doit être compatible avec les règles fixées par l’UE concernant l’hydrogène. Le CESE estime que pour gérer le plus efficacement possible la demande et la disponibilité dans les secteurs difficiles à électrifier (notamment celui de l’acier), il convient de faire de la BEH un outil de gestion de la demande. En outre, un mécanisme d’achat conjoint dans les secteurs difficiles à électrifier devrait contribuer à éviter la concurrence intraeuropéenne en matière de prix, en particulier durant la phase de démarrage.
1.4Le CESE n’est pas favorable à ce que les procédés d’électrolyse à forte intensité énergétique soient alimentés en énergie (non renouvelable) par l’intermédiaire des réseaux électriques européens, ce qui ferait augmenter la demande globale d’énergie. Il insiste sur la nécessité d’encourager l’utilisation de l’hydrogène en combinaison avec le développement des sources d’énergie renouvelables, et uniquement là où l’électrification directe n’est pas possible.
1.5En cette période de crises multiples, il est essentiel d’explorer pleinement le potentiel de création d’emplois dans les secteurs en développement. Le CESE demande donc à la Commission de procéder à une analyse qui permettrait de recenser, parmi les compétences des travailleurs actifs dans les industries en déclin, celles qui seraient utiles pour les nouveaux emplois dans le secteur de l’hydrogène.
1.6Le plan REPowerEU prévoit que d’ici à 2030, 10 millions de tonnes d’hydrogène vert seront produites dans l’Union européenne. Il conviendrait en priorité d’accélérer la création et le renforcement des capacités de production européennes afin de parvenir à l’indépendance énergétique et de ne pas contribuer à de nouvelles dépendances stratégiques.
1.7Le CESE est d’avis que lors de l’élaboration des lignes directrices sur l’allocation des fonds de la BEH, il convient de ne pas se focaliser exclusivement sur le rapport coût-efficacité des projets à financer. Il y aurait plutôt lieu d’inclure un certain nombre d’autres critères de qualité, dont des normes de durabilité environnementale et sociale.
1.8Le CESE estime que le système actuel d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE) doit encore être renforcé; il s’agit notamment d’assurer une protection efficace à l’égard des importations (mécanisme d’ajustement aux frontières). Une trajectoire de prix prévisible et moins volatile est susceptible de contribuer à la sécurité des investissements qui s’imposent dans le domaine de l’hydrogène vert. La Commission devrait accorder la priorité absolue à la sécurité des investissements dans le cadre du SEQE-UE, à la suppression des subventions pour le gaz naturel, ainsi qu’au soutien de la recherche, de la technologie et de l’innovation en matière de production et de distribution d’hydrogène vert.
1.9Le CESE souligne que des exigences élevées en matière de sécurité technique doivent s’appliquer à l’utilisation de l’hydrogène, en particulier dans les installations d’exploitation, et que des obligations et un suivi seront nécessaires pour recenser et réduire les risques.
1.10Le CESE déplore que la mise en œuvre de la stratégie dans les différents secteurs n’ait pas fait l’objet d’une réflexion suffisante et réclame une plus grande participation des citoyens à ce processus de transformation, tant au niveau des entreprises qu’au niveau politique. Il invite en outre la Commission à évaluer l’incidence du développement de l’hydrogène vert sur la facture énergétique des ménages.
1.11Le CESE recommande à la Commission de clarifier les périodes de transition pour l’industrie en fonction des besoins sectoriels, sur la base de trajectoires et d’objectifs de réduction des émissions. Il y a lieu de soutenir les industries de l’acier, du ciment et de la chimie dans la transformation de leurs systèmes énergétiques et de leurs méthodes de production, ainsi que certains segments du secteur des transports. Le Comité souligne que sans cela, ces industries grandes émettrices de CO2 pourraient ne pas survivre au changement.
1.12Le CESE est d’avis que la BEH, en coordination avec les États membres et leurs autorités et avec d’autres instruments et organismes de financement européens, devrait veiller à coordonner les fonds de manière à en garantir l’utilisation optimale, tout en évitant le surfinancement.
1.13Le CESE est d’avis que la BEH devrait inclure des dispositions similaires à celles de la loi américaine sur la réduction de l’inflation en ce qui concerne les salaires en vigueur, le développement de la main-d’œuvre et les stages.
1.14Le CESE partage l’idée sous-tendant la BEH selon laquelle il convient de mettre en place des mesures incitatives pour favoriser l’émergence d’un marché de l’hydrogène. Le durcissement prévu des règles en vue d’une dissociation des structures de propriété des sociétés verticalement intégrées briserait l’élan de nombreux projets municipaux, ce qui entraverait la montée en puissance de l’hydrogène et mettrait rapidement fin aux projets de services municipaux intégrés au niveau local.
1.15Le CESE demande que les programmes de financement de la BEH ne pénalisent pas les entreprises publiques et municipales par rapport aux sociétés commerciales.
1.16Le CESE est d’avis que l’Europe ne pourra réussir sa transition énergétique que si le commerce mondial des matières premières, et en particulier de l’énergie, repose également sur les principes de durabilité écologique et sociale et la promotion des sources d’énergie renouvelables.
2.Contexte
2.1La communication relative à la BEH expose des idées générales sur la conception de cette dernière en tant qu’instrument financier permettant de lancer et de promouvoir la production et l’importation d’hydrogène vert au sein de l’UE, ainsi que le financement public et privé de telles démarches et, partant, la création de marchés et de chaînes de valeur en la matière. La BEH n’est donc pas une banque. L’initiative définit quatre piliers de la BEH qui devraient être opérationnels d’ici la fin de l’année 2023. L’idée est que la BEH comblera l’écart de coût entre l’hydrogène vert et les combustibles fossiles pour les premiers projets en instaurant un système de mise aux enchères et le paiement d’un prix forfaitaire par kilogramme d’hydrogène produit pour une durée maximale de dix ans. Il est prévu de mettre en place un système visant à garantir la transparence et la coordination en matière de disponibilité, comprenant notamment des arrangements ou des accords avec des pays tiers en vue d’acquérir de l’hydrogène.
2.2La communication n’établit pas de lien clair entre, d’une part, la politique de l’UE en matière d’hydrogène et son approche stratégique de l’autonomie ouverte et, d’autre part, la politique industrielle et de concurrence de l’Union. Elle ne contient que peu d’informations sur l’utilisation des moyens financiers du Fonds pour l’innovation, la réaffectation prévue des ressources et la relation attendue entre les investissements publics et privés. De même, elle ne fixe aucune priorité en ce qui concerne la production, l’utilisation et la distribution d’hydrogène vert.
2.3Dotée d’un budget de 3 milliards d’euros, la BEH devrait contribuer au développement d’un marché de l’hydrogène, à la diminution de la dépendance à l’égard des combustibles fossiles et à la réduction des émissions de gaz à effet de serre en vue d’atteindre le zéro émission nette d’ici à 2040. Les investissements nécessaires au développement de la production d’hydrogène ont été estimés à entre 335 et 471 milliards d’euros, ce qui signifie que la majeure partie des fonds nécessaires doit provenir des États membres et de sources privées, même si l’on tient compte des autres fonds disponibles de l’UE.
2.4À cet égard, la Commission souligne que l’hydrogène vert est un élément essentiel de la création d’un système énergétique souverain qui soit à la fois intelligent, mieux intégré, optimisé et sûr. L’hydrogène vert et sa chaîne de valeur ont un rôle important à jouer pour compenser les variations des flux d’énergies renouvelables et approvisionner de manière ciblée des secteurs qui se prêtent difficilement ou ne se prêtent pas à l’électrification.
2.5L’hydrogène peut être produit de différentes manières qui, souvent, ne sont ni respectueuses du climat, ni écologiques, ni même neutres pour le climat. Les sources d’énergie utilisées à cette fin sont déterminantes à cet égard: il existe par exemple de l’hydrogène «brun» (ou «noir») provenant de la gazéification du charbon, de l’hydrogène «gris» produit à partir d’énergies fossiles ou de l’hydrogène «rose» d’origine nucléaire. La production d’hydrogène «bleu» génère de grandes quantités de méthane (le dioxyde de carbone qui en résulte étant capté et stocké). On ne peut cependant parler d’hydrogène écologique que dans le cas de l’hydrogène «vert», fabriqué au moyen de l’énergie excédentaire issue de sources renouvelables telles que le vent, l’eau ou le soleil. À cet égard, le CESE attire l’attention sur son avis TEN/718, dans lequel il se félicite des clarifications apportées par la Commission concernant la définition de l’hydrogène propre. Il ajoute cependant qu’à court et moyen termes, la stratégie garde la porte ouverte à d’autres formes d’hydrogène à faible teneur en carbone, obtenu à partir de combustibles fossiles avec captage et stockage du carbone (CSC), technologie encore en voie de déploiement. À l’échelle mondiale, l’hydrogène vert ne pourrait actuellement satisfaire que 1 % des besoins énergétiques: il s’agit d’une ressource extrêmement rare, peu commune et donc stratégique.
2.6Dans sa proposition relative au plan REPowerEU, la Commission a préconisé d’accélérer le développement de la technologie de l’hydrogène avant l’été 2023, de manière à déployer les infrastructures nécessaires pour produire, importer et transporter 20 millions de tonnes d’hydrogène d’ici à 2030.
2.7Le programme InvestEU vise à soutenir les investissements publics et privés dans les technologies respectueuses du climat, notamment les technologies de propulsion à l’hydrogène. Le plan industriel du pacte vert propose de simplifier les procédures d’InvestEU et de les adapter aux besoins actuels. Le Fonds pour l’innovation vise à promouvoir les technologies et solutions innovantes qui contribuent à la décarbonation des industries à forte intensité énergétique, ainsi qu’au développement des énergies renouvelables et du stockage de l’énergie. Selon le plan industriel du pacte vert, 40 milliards d’euros seront mobilisés à cette fin au cours de la prochaine décennie. La BEH investira 3 milliards d’euros pour aider à construire le marché européen de l’hydrogène. L’essentiel des besoins d’investissement devra dès lors être couvert par les États membres et les investisseurs privés.
2.8Selon les estimations d’Hydrogen Europe, la production d’hydrogène au sein de l’UE créera environ 1 million d’emplois nouveaux, dont quelque 150 000 hautement qualifiés.
3.Observations générales
Promouvoir l’hydrogène vert, sans exception
3.1Le CESE souligne que les combustibles fossiles ne doivent pas être subventionnés par des fonds de l’UE. Le principe consistant à «ne pas nuire», qui est explicitement mentionné dans la taxinomie de l’UE, doit donc également s’appliquer aux fonds associés à la BEH. Le CESE souligne que la production d’hydrogène par électrolyse ne doit être financée par des fonds de l’UE que si l’électricité utilisée à cette fin provient d’une source compatible avec le règlement sur la taxinomie et considérée comme apportant une contribution majeure à la décarbonation. À cet égard, il insiste sur la nécessité d’accorder la priorité à l’hydrogène vert dans le cadre de la BEH, en tant que seule option compatible avec les objectifs de neutralité climatique.
3.2À longue échéance, seule la production d’hydrogène vert devrait bénéficier d’un soutien financier. Le CESE recommande de limiter aux secteurs dits difficiles à électrifier le premier appel d’offres pour soutenir la production d’hydrogène vert, que la Commission a annoncé pour l’automne 2023.
3.3Dans le même temps, le CESE reconnaît qu’il sera nécessaire de recourir à l’hydrogène «bleu», pour autant qu’il soit disponible en quantité suffisante et à un prix acceptable. Afin de gérer la demande, la BEH devrait servir d’outil d’agrégation de celle-ci, offrir une vue d’ensemble de la demande d’hydrogène et de sa disponibilité dans les secteurs difficiles à électrifier et la centraliser, de manière à parvenir à un prix d’offre aussi bas que possible, soit un mode de fonctionnement comparable à celui de la plateforme énergétique de l’UE, comme le suggère la communication sur la BEH.
3.4Le CESE partage l’avis exprimé dans la communication sur la BEH selon lequel un mécanisme d’achat conjoint d’hydrogène dans les secteurs difficiles à électrifier peut contribuer à éviter la concurrence intraeuropéenne en encourageant plutôt la passation conjointe de marchés. Ces achats groupés peuvent favoriser la création de premières chaînes de valeur opérationnelles pour les importations dans l’Union. Le Comité note qu’en tant que responsable à la fois du financement et de la coordination, la BEH devra disposer de capacités professionnelles considérables dans plusieurs domaines différents.
3.5Le CESE n’est pas favorable à ce que les procédés d’électrolyse à forte intensité énergétique soient alimentés par des sources d’énergie non renouvelables au moyen des réseaux électriques européens, ce qui ferait augmenter la demande globale d’énergie; il convient plutôt de prévoir des règles claires et transparentes sur l’utilisation exclusive de l’électricité excédentaire produite à partir de sources d’énergie renouvelables pour accroître la production d’hydrogène vert. Il insiste sur la nécessité d’encourager l’utilisation de l’hydrogène en combinaison avec le développement des sources d’énergie renouvelables, et uniquement là où l’électrification directe n’est pas possible.
3.6Comme l’indique la
Feuille de route pour l’hydrogène en Europe
, l’hydrogène vert ne se prête pas à être utilisé au jour le jour de façon généralisée par les consommateurs finaux, en particulier pour ce qui est des transports privés et des systèmes de chauffage.
3.7Le CESE est d’avis que lors de l’élaboration des lignes directrices sur l’allocation des fonds de la BEH, il convient de ne pas se focaliser exclusivement sur le rapport coût-efficacité des projets à financer. Il y a plutôt lieu de considérer comme des critères essentiels la sécurité énergétique, la durabilité environnementale, la promotion et le maintien d’emplois de qualité et le caractère urgent des besoins d’investissement. Il conviendrait en outre de prévoir l’obligation d’assurer la compétitivité, d’instaurer des critères sociaux et environnementaux et de déployer les énergies renouvelables dans les pays fournisseurs.
3.8Le CESE estime que le SEQE-UE actuel doit encore être renforcé; il s’agit notamment d’assurer une protection efficace à l’égard des importations (mécanisme d’ajustement aux frontières). Une trajectoire de prix prévisible et peu volatile est susceptible de contribuer à la sécurité des investissements en ce qui concerne les investissements essentiels dans l’hydrogène vert. La Commission devrait accorder la priorité à la gestion efficace des quantités et à la sécurité des investissements dans le cadre du SEQE-UE, à la suppression des subventions pour le gaz naturel, ainsi qu’à l’aide aux technologies de production et de distribution de l’hydrogène vert par le financement de la recherche, de la technologie et de l’innovation.
3.9Le CESE souligne que le développement d’une économie de l’hydrogène sectorielle et à applications spécifiques requiert l’acceptation et la participation des citoyens, qu’il s’agisse des entrepreneurs, des travailleurs ou des consommateurs. Il déplore que la mise en œuvre de la stratégie dans les différents secteurs n’ait pas fait l’objet d’une réflexion suffisante et réclame une plus grande participation des citoyens à ce processus de transformation, tant au niveau des entreprises qu’au niveau politique. Il invite en outre la Commission à évaluer l’incidence du développement de l’hydrogène vert sur la facture énergétique des ménages.
3.10La Commission a déjà jeté les bases de l’investissement dans le développement de la technologie et des infrastructures relatives à l’hydrogène vert en approuvant le projet important d’intérêt européen commun «IPCEI Hy2Tech». Le CESE insiste sur la nécessité de garantir la cohérence entre, d’une part, les initiatives existantes, les programmes de financement et les PIIEC et, d’autre part, les activités de soutien de la BEH.
Réduire les dépendances stratégiques
3.11Le plan REPowerEU prévoit que d’ici à 2030, 10 millions de tonnes d’hydrogène vert seront produites dans l’Union européenne. Il conviendrait en priorité d’accélérer la création et le renforcement des capacités de production européennes afin de parvenir à l’indépendance énergétique et de ne pas contribuer à de nouvelles dépendances stratégiques. Dans cette optique, il faut également veiller à la diversification des sources et des contrats d’approvisionnement et à la prise en considération des valeurs européennes lorsque l’hydrogène est importé. Il y a lieu de tenir compte, dans le cadre de ce processus, des réalités géographiques (telles que les capacités de production et d’exportation d’un pays) et des objectifs fixés par l’UE en matière d’autonomie stratégique. Les accords avec les pays tiers devraient intégrer un engagement en faveur de la durabilité environnementale, sociale et économique.
3.12Le CESE est par ailleurs d’avis que des accords portant sur l’importation d’hydrogène vert ne devraient être conclus qu’à la condition que la valeur ajoutée profite également aux producteurs nationaux des pays fournisseurs et que l’hydrogène importé de pays tiers soit exclusivement produit à partir de l’électricité excédentaire issue des sources d’énergie renouvelables. Une telle approche servirait la transition de l’économie vers le zéro émission nette, aussi bien au sein de l’UE que dans les pays tiers.
3.13Le CESE estime que l’Europe ne pourra réussir sa transition énergétique que si le commerce mondial des matières premières, et en particulier de l’énergie, repose également sur les principes de durabilité écologique et sociale et la promotion des sources d’énergie renouvelables. La politique énergétique et industrielle de l’UE ne doit pas entraver les pays du Sud dans leur propre transition juste ni les empêcher de développer leurs propres capacités dans le secteur de l’hydrogène. L’extractivisme énergétique stratégique nuit sur le long terme à la transition énergétique mondiale et, partant, à celle de l’Europe également. Il convient plutôt de développer de nouvelles approches en vue de conclure des accords internationaux de coopération en matière de climat et d’énergie.
Financement et mise en œuvre institutionnelle
3.14Le CESE est d’avis que la BEH, en coordination avec les États membres et avec d’autres instruments et organismes de financement européens, devrait veiller à coordonner les fonds de manière à en garantir l’utilisation optimale, tout en évitant le surfinancement. Dans le même temps, l’allégement maximal des procédures administratives pour accéder aux financements est la clé du succès de la BEH, eu égard notamment à la simplicité de la loi américaine sur la réduction de l’inflation. Le Comité attire l’attention sur la nécessité de fournir aux investisseurs un environnement attractif et sûr pour éviter qu’ils n’aillent investir ailleurs, attirés par des conditions à long terme favorables telles que celles offertes par ladite loi.
3.15Le CESE est d’avis que la BEH devrait, à l’instar de la loi américaine sur la réduction de l’inflation, contenir des dispositions portant sur les salaires en vigueur, le développement de la main-d’œuvre et les stages, afin d’assurer l’accès d’un ensemble plus large et plus divers de travailleurs qualifiés à des emplois de qualité et de faire en sorte que les travailleurs disposent des compétences nécessaires en vue d’atteindre les objectifs fixés en matière d’énergie propre.
3.16Étant donné que l’investissement public doit s’accompagner d’investissements privés de grande ampleur, ses effets multiplicateurs doivent faire l’objet d’une estimation ex ante, qui doit s’inspirer de l’évaluation ex post détaillée des effets multiplicateurs des programmes récents (InvestEU, PIIEC, etc.).
3.17Le CESE estime qu’il convient de mettre en place des mesures incitatives, telles que le développement de réseaux intelligents, d’infrastructures, de capacités de stockage et de cadres juridiques, pour favoriser l’émergence d’un marché de l’hydrogène. Le durcissement prévu, à partir de 2023, des règles en vue d’une dissociation des structures de propriété des sociétés verticalement intégrées — qui sont souvent des régies municipales — susceptibles d’être actives dans la production d’hydrogène ou la gestion de réseaux briserait l’élan de nombreux projets municipaux, ce qui entraverait la montée en puissance de l’hydrogène et mettrait rapidement fin aux projets de services municipaux intégrés au niveau local.
3.18Le CESE demande que les programmes de financement de la BEH ne pénalisent pas les entreprises publiques et municipales par rapport aux sociétés commerciales.
Dimension sociale
3.19En ces temps de crises multiples, il est essentiel d’investir dans des emplois pérennes. Le CESE souligne par conséquent combien il importe d’assurer une formation de qualité de la main-d’œuvre et de renforcer l’attrait du secteur de l’énergie pour la jeunesse européenne. À cette fin, l’Union européenne pourrait créer des centres d’excellence pour la formation aux fonctions nécessaires en relation avec l’hydrogène vert. Il convient de veiller dans ce contexte à la cohérence avec les «académies des industries à zéro émission nette» proposées par la Commission dans le plan industriel du pacte vert. Ces académies devraient également déployer des programmes de perfectionnement et de reconversion professionnels dans les secteurs énergétiques et productifs stratégiques tels que celui de l’hydrogène vert. La Commission devrait en outre s’atteler, en étroite coopération avec les États membres, à mettre en place des procédures d’accréditation normalisées, à assurer la reconnaissance mutuelle des qualifications et à élaborer des lignes directrices concernant l’éducation et la formation dans ce domaine.
3.20Outre ces programmes de perfectionnement et de reconversion professionnels menés au niveau des différents secteurs et des entreprises individuelles, il convient de mettre davantage l’accent sur la formation et le perfectionnement professionnels au sein même de la société. Des efforts supplémentaires doivent être consentis dans l’ensemble du système éducatif afin de sensibiliser à la transition juste et de développer les compétences nécessaires à cette fin.
3.21Favoriser la création d’emplois grâce au déploiement de l’hydrogène vert implique de soutenir les petites et moyennes entreprises (PME), qui contribuent à près de deux tiers de l’emploi dans le secteur privé non financier européen
. Le CESE invite la Commission à accorder une attention particulière au soutien des PME lors de la conception de la BEH.
3.22Le CESE note par ailleurs que pour améliorer la compétitivité de l’Union et renforcer sa résilience, il y a lieu de conserver le contrôle des actifs et des industries de l’UE et de faire front contre le dumping industriel provenant d’autres régions du monde.
Exigences en matière de sécurité
3.23Le CESE souligne que des exigences élevées en matière de sécurité technique doivent s’appliquer à l’utilisation de l’hydrogène, en particulier dans les installations d’exploitation, et que des obligations et un suivi seront nécessaires pour recenser et réduire les risques.
Bruxelles, le 14 juin 2023
Oliver RÖPKE
Président du Comité économique et social européen