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Document 62019CJ0718

Arrêt de la Cour (grande chambre) du 22 juin 2021.
Ordre des barreaux francophones et germanophone e.a. contre Conseil des ministres.
Demande de décision préjudicielle, introduite par la Cour constitutionnelle (Belgique).
Renvoi préjudiciel – Citoyenneté de l’Union – Articles 20 et 21 TFUE – Directive 2004/38/CE – Droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres – Décision de mettre fin au séjour de l’intéressé pour des raisons d’ordre public – Mesures préventives pour éviter tout risque de fuite de l’intéressé pendant le délai octroyé à celui-ci pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil – Dispositions nationales similaires à celles applicables aux ressortissants de pays tiers au titre de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2008/115/CE – Durée maximale de rétention à des fins d’éloignement – Disposition nationale identique à celle applicable aux ressortissants de pays tiers.
Affaire C-718/19.

Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2021:505

 ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

22 juin 2021 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Citoyenneté de l’Union – Articles 20 et 21 TFUE – Directive 2004/38/CE – Droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres – Décision de mettre fin au séjour de l’intéressé pour des raisons d’ordre public – Mesures préventives pour éviter tout risque de fuite de l’intéressé pendant le délai octroyé à celui-ci pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil – Dispositions nationales similaires à celles applicables aux ressortissants de pays tiers au titre de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2008/115/CE – Durée maximale de rétention à des fins d’éloignement – Disposition nationale identique à celle applicable aux ressortissants de pays tiers »

Dans l’affaire C‑718/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Cour constitutionnelle (Belgique), par décision du 18 juillet 2019, parvenue à la Cour le 27 septembre 2019, dans la procédure

Ordre des barreaux francophones et germanophone,

Association pour le droit des Étrangers ASBL,

Coordination et Initiatives pour et avec les Réfugiés et Étrangers ASBL,

Ligue des Droits de l’Homme ASBL,

Vluchtelingenwerk Vlaanderen ASBL

contre

Conseil des ministres,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président, Mme R. Silva de Lapuerta, vice‑présidente, Mme A. Prechal, MM. M. Vilaras, E. Regan (rapporteur) et N. Piçarra, présidents de chambre, MM. M. Safjan, D. Šváby, S. Rodin, F. Biltgen, Mme K. Jürimäe, MM. C. Lycourgos, P. G. Xuereb, Mme L. S. Rossi et M. I. Jarukaitis, juges,

avocat général : M. A. Rantos,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 16 novembre 2020,

considérant les observations présentées :

pour Association pour le droit des Étrangers ASBL, Coordination et Initiatives pour et avec les Réfugiés et Étrangers ASBL, Ligue des Droits de l’Homme ASBL et Vluchtelingenwerk Vlaanderen ASBL, par Me M. Van den Broeck, advocaat, ainsi que par Mes P. Delgrange et S. Benkhelifa, avocates,

pour le gouvernement belge, par Mmes L. Van den Broeck, M. Jacobs et C. Pochet, en qualité d’agents, assistées de Mes D. Matray, C. Decordier, S. Matray et C. Piront, avocats, ainsi que de Me T. Bricout, advocaat,

pour le gouvernement danois, par MM. J. Nymann-Lindegren et P. Jespersen ainsi que par Mme M. S. Wolff, en qualité d’agents,

pour le gouvernement espagnol, par M. J. Rodríguez de la Rúa Puig, en qualité d’agent,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par Mmes A. Azéma et E. Montaguti, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 10 février 2021,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 20 et 21 TFUE ainsi que de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO 2004, L 158, p. 77, ainsi que rectificatifs JO 2004, L 229, p. 35, et JO 2005, L 197, p. 34).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Ordre des barreaux francophones et germanophone, Association pour le droit des Étrangers ASBL, Coordination et Initiatives pour et avec les Réfugiés et Étrangers ASBL, Ligue des Droits de l’Homme ASBL et Vluchtelingenwerk Vlaanderen ASBL au Conseil des ministres (Belgique), au sujet d’une réglementation nationale qui applique aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles, d’une part, des mesures similaires à celles applicables aux ressortissants de pays tiers afin d’éviter tout risque de fuite de ces ressortissants pendant le délai octroyé à ces derniers pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil à la suite de l’adoption d’une décision de retour et, d’autre part, une durée maximale de rétention à des fins d’éloignement identique à celle applicable auxdits ressortissants.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 2004/38

3

Les considérants 1 à 3 et 31 de la directive 2004/38 sont libellés comme suit :

« (1)

La citoyenneté de l’Union confère à chaque citoyen de l’Union un droit fondamental et individuel de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, sous réserve des limitations et des restrictions fixées par le traité [FUE] et des mesures adoptées en vue de leur application.

(2)

La libre circulation des personnes constitue une des libertés fondamentales du marché intérieur, qui comporte un espace sans frontières intérieures dans lequel cette liberté est assurée selon les dispositions du traité [FUE].

(3)

La citoyenneté de l’Union devrait constituer le statut de base des ressortissants des États membres lorsqu’ils exercent leur droit de circuler et de séjourner librement. Il est par conséquent nécessaire de codifier et de revoir les instruments communautaires existants qui visent séparément les travailleurs salariés, les non salariés, les étudiants et autres personnes sans emploi en vue de simplifier et de renforcer le droit à la liberté de circulation et de séjour de tous les citoyens de l’Union.

[...]

(31)

La présente directive respecte les droits et libertés fondamentaux et observe les principes qui sont reconnus notamment par la [c]harte des droits fondamentaux de l’Union européenne ; [...] »

4

L’article 3 de cette directive, intitulé « Bénéficiaires », prévoit, à son paragraphe 1 :

« La présente directive s’applique à tout citoyen de l’Union qui se rend ou séjourne dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité, ainsi qu’aux membres de sa famille, tels que définis à l’article 2, point 2), qui l’accompagnent ou le rejoignent. »

5

L’article 4 de ladite directive, intitulé « Droit de sortie », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Sans préjudice des dispositions concernant les documents de voyage, applicables aux contrôles aux frontières nationales, tout citoyen de l’Union muni d’une carte d’identité ou d’un passeport en cours de validité, ainsi que les membres de sa famille qui n’ont pas la nationalité d’un État membre munis d’un passeport en cours de validité, ont le droit de quitter le territoire d’un État membre en vue de se rendre dans un autre État membre. »

6

Aux termes de l’article 27 de la même directive, intitulé « Principes généraux » :

« 1.   Sous réserve des dispositions du présent chapitre, les États membres peuvent restreindre la liberté de circulation et de séjour d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille, quelle que soit sa nationalité, pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique. Ces raisons ne peuvent être invoquées à des fins économiques.

2.   Les mesures d’ordre public ou de sécurité publique doivent respecter le principe de proportionnalité et être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l’individu concerné. L’existence de condamnations pénales antérieures ne peut à elle seule motiver de telles mesures.

Le comportement de la personne concernée doit représenter une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. Des justifications non directement liées au cas individuel concerné ou tenant à des raisons de prévention générale ne peuvent être retenues.

[...]

4.   L’État membre qui a délivré le passeport ou la carte d’identité permet au titulaire du document qui a été éloigné d’un autre État membre pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique de rentrer sur son territoire sans aucune formalité, même si ledit document est périmé ou si la nationalité du titulaire est contestée. »

7

L’article 30 de la directive 2004/38, intitulé « Notification des décisions », dispose :

« 1.   Toute décision prise en application de l’article 27, paragraphe 1, est notifiée par écrit à l’intéressé dans des conditions lui permettant d’en saisir le contenu et les effets.

[...]

3.   La notification comporte l’indication de la juridiction ou de l’autorité administrative devant laquelle l’intéressé peut introduire un recours ainsi que du délai de recours et, le cas échéant, l’indication du délai imparti pour quitter le territoire de l’État membre. Sauf en cas d’urgence dûment justifié, ce délai ne peut être inférieur à un mois à compter de la date de notification. »

La directive 2008/115/CE

8

Les considérants 2, 4 et 24 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO 2008, L 348, p. 98), sont libellés comme suit :

« (2)

Le Conseil européen de Bruxelles [(Belgique)] des 4 et 5 novembre 2004 a recommandé la mise en place d’une politique efficace d’éloignement et de rapatriement basée sur des normes communes, afin que les personnes concernées soient rapatriées d’une façon humaine et dans le respect intégral de leurs droits fondamentaux et de leur dignité.

[...]

(4)

Il est nécessaire de fixer des règles claires, transparentes et équitables afin de définir une politique de retour efficace, constituant un élément indispensable d’une politique migratoire bien gérée.

[...]

(24)

La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus, en particulier, par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. »

9

L’article 1er de cette directive, intitulé « Objet », prévoit :

« La présente directive fixe les normes et procédures communes à appliquer dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, conformément aux droits fondamentaux en tant que principes généraux du droit [de l’Union] ainsi qu’au droit international, y compris aux obligations en matière de protection des réfugiés et de droits de l’homme. »

10

L’article 2 de ladite directive, intitulé « Champ d’application », dispose, à son paragraphe 3 :

« La présente directive ne s’applique pas aux personnes jouissant du [droit] à la libre circulation, telles que définies à l’article 2, point 5), du code frontières Schengen. »

11

L’article 6 de la même directive, intitulé « Décision de retour », dispose, à son paragraphe 1 :

« Les État[s] membres prennent une décision de retour à l’encontre de tout ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 à 5. »

12

L’article 7 de la directive 2008/115, intitulé « Départ volontaire », prévoit, à son paragraphe 3 :

« Certaines obligations visant à éviter le risque de fuite, comme les obligations de se présenter régulièrement aux autorités, de déposer une garantie financière adéquate, de remettre des documents ou de demeurer en un lieu déterminé, peuvent être imposées pendant le délai de départ volontaire. »

13

Le chapitre IV de cette directive, intitulé « Rétention à des fins d’éloignement », contient les articles 15 à 18 de ladite directive.

14

Aux termes de l’article 15 de la même directive, intitulé « Rétention » :

« 1.   À moins que d’autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les États membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d’un pays tiers qui fait l’objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l’éloignement, en particulier lorsque :

a)

il existe un risque de fuite, ou

b)

le ressortissant concerné d’un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement.

Toute rétention est aussi brève que possible et n’est maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise.

[...]

5.   La rétention est maintenue aussi longtemps que les conditions énoncées au paragraphe 1 sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien. Chaque État membre fixe une durée déterminée de rétention, qui ne peut pas dépasser six mois.

6.   Les États membres ne peuvent pas prolonger la période visée au paragraphe 5, sauf pour une période déterminée n’excédant pas douze mois supplémentaires, conformément au droit national, lorsque, malgré tous leurs efforts raisonnables, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison :

a)

du manque de coopération du ressortissant concerné d’un pays tiers, ou

b)

des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires. »

Le droit belge

15

L’article 44 ter de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers (Moniteur belge du 31 décembre 1980, p. 14584), dans sa version en vigueur au litige au principal (ci-après la « loi du 15 décembre 1980 »), prévoit :

« § 1er.   Lorsqu’un citoyen de l’Union ou un membre de sa famille n’a pas ou n’a plus le droit de séjourner sur le territoire, le ministre ou son délégué peut lui donner un ordre de quitter le territoire, en application de l’article 7, alinéa 1er.

Lorsque le ministre ou son délégué envisage de prendre un ordre de quitter le territoire, il tient compte de la durée du séjour du citoyen de l’Union ou du membre de sa famille sur le territoire du Royaume, de son âge, de son état de santé, de sa situation familiale et économique, de son intégration sociale et culturelle dans le Royaume et de l’intensité de ses liens avec son pays d’origine.

§ 2.   L’ordre de quitter le territoire délivré à un citoyen de l’Union ou à un membre de sa famille indique le délai endéans lequel il doit quitter le territoire du Royaume. Sauf en cas d’urgence dûment justifié, ce délai ne peut pas être inférieur à un mois à compter de la notification de la décision.

Le délai visé à l’alinéa 1er peut être prolongé par le ministre ou son délégué lorsque :

le retour volontaire ne peut se réaliser dans ledit délai ; ou

les circonstances propres à la situation de l’intéressé le justifient.

La demande visant à obtenir une prolongation du délai pour quitter le territoire du Royaume doit être introduite par le citoyen de l’Union ou le membre de sa famille auprès du ministre ou de son délégué. »

16

Les articles 28 à 31 de la loi du 24 février 2017, modifiant la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers afin de renforcer la protection de l’ordre public et de la sécurité nationale (Moniteur belge du 19 avril 2017, p. 51890) (ci-après la « loi du 24 février 2017 »), ont inséré dans la loi du 15 décembre 1980 les articles 44 quater à 44 septies, lesquels sont libellés comme suit :

« Art. 44 quater. Aussi longtemps que le délai visé à l’article 44 ter court, le citoyen de l’Union ou le membre de sa famille ne peut pas faire l’objet d’un éloignement forcé.

Pour éviter tout risque de fuite pendant le délai visé à l’article 44 ter, le citoyen de l’Union ou le membre de sa famille peut être contraint à remplir des mesures préventives. Le Roi est habilité à déterminer ces mesures par un arrêté délibéré en Conseil des ministres.

Art. 44 quinquies. § 1er. Le ministre ou son délégué prend toutes les mesures nécessaires pour exécuter l’ordre de quitter le territoire lorsque :

aucun délai n’a été octroyé au citoyen de l’Union ou au membre de sa famille pour quitter le territoire du Royaume ;

le citoyen de l’Union ou le membre de sa famille n’a pas quitté le territoire du Royaume dans le délai qui lui était octroyé ;

avant l’écoulement du délai octroyé pour quitter le territoire du Royaume, le citoyen de l’Union ou le membre de sa famille présente un risque de fuite, n’a pas respecté les mesures préventives imposées ou constitue une menace pour l’ordre public ou la sécurité nationale.

§ 2. Lorsque le citoyen de l’Union ou le membre de sa famille s’oppose à son éloignement ou lorsqu’il présente un risque de dangerosité lors de son éloignement, il est procédé à son retour forcé, le cas échéant avec escorte. Des mesures coercitives peuvent alors être utilisées à son égard dans le respect des articles 1er et 37 de la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police [(Moniteur belge du 22 décembre 1992, p. 27124)].

Lorsque l’éloignement est exécuté par voie aérienne, les mesures sont prises conformément aux orientations communes d’éloignement par voie aérienne annexées à la [décision 2004/573/CE du Conseil, du 29 avril 2004, relative à l’organisation de vols communs pour l’éloignement, à partir du territoire de deux États membres ou plus, de ressortissants de pays tiers faisant l’objet de mesures d’éloignement sur le territoire de deux États membres ou plus (JO 2004, L 261, p. 28)].

§ 3. Le Roi désigne par un arrêté délibéré en Conseil des ministres, l’instance chargée d’assurer le contrôle des retours forcés et détermine les modalités de ce contrôle. Cette instance est indépendante des autorités compétentes en matière d’éloignement.

Art. 44 sexies. Lorsque les circonstances propres à chaque cas le justifient, le ministre ou son délégué peut reporter temporairement l’éloignement. Il en informe l’intéressé.

Pour éviter tout risque de fuite, le citoyen de l’Union ou le membre de sa famille peut être contraint à remplir des mesures préventives. Le Roi est habilité à déterminer ces mesures par un arrêté délibéré en Conseil des ministres.

Le ministre ou son délégué peut, dans les mêmes cas, assigner à résidence le citoyen de l’Union ou le membre de sa famille pendant le temps nécessaire à l’exécution de cette mesure.

Art. 44 septies. § 1er. Si des raisons d’ordre public, de sécurité nationale ou de santé publique l’exigent et à moins que d’autres mesures moins coercitives puissent s’appliquer efficacement, les citoyens de l’Union et les membres de leurs familles peuvent, en vue de garantir l’exécution de la mesure d’éloignement, être maintenus pendant le temps strictement nécessaire à l’exécution de la mesure sans que la durée du maintien puisse dépasser deux mois.

Toutefois, le ministre ou son délégué peut prolonger la durée de ce maintien par période de deux mois, lorsque les démarches nécessaires en vue de l’éloignement de l’étranger ont été entreprises dans les sept jours ouvrables suivant le maintien du citoyen de l’Union ou du membre de sa famille, qu’elles sont poursuivies avec toute la diligence requise et qu’il subsiste toujours une possibilité d’éloigner effectivement l’intéressé dans un délai raisonnable.

Après une première prolongation, la décision de prolonger la durée du maintien peut être prise uniquement par le ministre.

Après cinq mois, le citoyen de l’Union ou le membre de sa famille doit être mis en liberté. Dans le cas où la sauvegarde de l’ordre public ou la sécurité nationale l’exige, le maintien peut être prolongé chaque fois d’un mois sans toutefois que la durée totale du maintien puisse dépasser huit mois.

§ 2. Le citoyen de l’Union ou le membre de sa famille visé au paragraphe 1er peut introduire un recours à l’encontre de la décision de maintien dont il fait l’objet, conformément aux articles 71 et suivants. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

17

Deux recours en annulation totale ou partielle de la loi du 24 février 2017 ont été introduits devant la Cour constitutionnelle (Belgique), le premier, par l’Ordre des barreaux francophones et germanophone et, le second, par l’Association pour le droit des Étrangers, la Coordination et Initiatives pour et avec les Réfugiés et Étrangers, la Ligue des Droits de l’Homme ainsi que le Vluchtelingenwerk Vlaanderen. Les deux affaires correspondantes ont été jointes par la juridiction de renvoi.

18

Selon les indications fournies dans la décision de renvoi, cette loi a pour objectif d’assurer une politique efficace d’éloignement des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles, en faisant en sorte que cette politique soit humaine et s’inscrive dans le respect intégral de leurs droits fondamentaux et de leur dignité. Les dispositions de ladite loi, lesquelles viseraient également à garantir aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles un régime d’éloignement qui ne soit pas moins favorable que celui dont bénéficient les ressortissants de pays tiers, permettent ainsi de clarifier les mesures qui peuvent être prises à l’égard des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles afin d’assurer leur éloignement du territoire belge.

19

En premier lieu, cette juridiction nourrit des doutes concernant la compatibilité avec le droit de l’Union des dispositions nationales qui prévoient la possibilité d’imposer des mesures préventives au citoyen de l’Union ou au membre de sa famille, auquel un ordre de quitter le territoire belge pour des raisons d’ordre public a été délivré, pendant le délai qui lui est imparti pour quitter ce territoire ou pendant la prolongation de ce délai afin d’éviter tout risque de fuite de l’intéressé. Ces dispositions habilitent le Roi à déterminer ces mesures par arrêté délibéré en Conseil des ministres et prévoient que le ministre compétent (ci-après le « ministre ») ou son délégué peut assigner l’intéressé à résidence dans l’hypothèse où l’éloignement est temporairement reporté.

20

Les parties requérantes au principal font valoir, notamment, que le droit de l’Union s’oppose à l’imposition de mesures aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles en vue d’éviter le risque de fuite de ceux-ci pendant le délai qui leur est imparti pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil ou pendant la prolongation de ce délai.

21

À cet égard, la juridiction de renvoi relève que la directive 2008/115, qui est applicable aux seuls ressortissants de pays tiers, prévoit la possibilité d’imposer de telles mesures, alors que la directive 2004/38, applicable aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles, ne contient pas de dispositions à cet égard. Selon les travaux préparatoires relatifs aux dispositions nationales en cause au principal, les dispositions visant à éviter le risque de fuite de ceux-ci ne constitueraient pas une transposition dans le droit belge de la directive 2008/115, mais s’en inspireraient grandement.

22

Quelle que soit la nature des mesures concernées, ces dernières auraient nécessairement un effet sur les droits et les libertés du citoyen de l’Union ou du membre de sa famille concerné, puisqu’elles auraient précisément pour but de l’empêcher de fuir et, partant, de se rendre, le cas échéant, dans un autre État membre, et, in fine, d’assurer son départ forcé du territoire belge.

23

Certes, il ressortirait de la jurisprudence de la Cour issue de l’arrêt du 14 septembre 2017, Petrea (C‑184/16, EU:C:2017:684), que le droit de l’Union ne s’oppose pas à ce qu’une décision d’éloignement d’un citoyen de l’Union soit adoptée par les mêmes autorités et selon la même procédure qu’une décision de retour d’un ressortissant de pays tiers en séjour irrégulier lorsque les mesures de transposition de la directive 2004/38 dans le droit national sont plus favorables à ce citoyen de l’Union. Toutefois, les dispositions nationales en cause au principal n’auraient pas pour objet de désigner l’autorité compétente pour prendre une décision d’éloignement à l’égard des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles et ne comporteraient pas non plus de dispositions de procédure, mais concerneraient des restrictions aux droits fondamentaux des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles qui ne sont pas prévues par la directive 2004/38.

24

Par conséquent, la juridiction de renvoi nourrit des doutes quant à l’applicabilité par analogie aux citoyens de l’Union des dispositions de la directive 2008/115 relatives aux mesures visant à éviter le risque de fuite en cas d’éloignement d’un ressortissant de pays tiers.

25

En second lieu, la juridiction de renvoi s’interroge sur la compatibilité avec le droit de l’Union des dispositions nationales qui permettent de placer en rétention les citoyens de l’Union et les membres de leurs familles, qui ne se sont pas conformés à une décision d’éloignement prise pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique, en vue de garantir l’exécution de cette décision, en particulier, pendant une période maximale de huit mois lorsque la sauvegarde de l’ordre public ou de la sécurité publique exige de poursuivre un tel placement.

26

Les parties requérantes au principal font grief à la disposition nationale concernée, notamment, de prévoir des durées de placement en rétention excessivement longues, et, par conséquent, disproportionnées, ainsi que de ne pas prévoir de critères clairs permettant de déterminer objectivement le temps nécessaire à l’exécution de la décision d’éloignement et en quoi consiste un traitement diligent de l’autorité chargée de l’exécution de cette décision.

27

La juridiction de renvoi indique que la disposition nationale concernée reproduit, pour les citoyens de l’Union et les membres de leurs familles, le régime prévu dans le droit national pour les ressortissants de pays tiers. Cette disposition établirait ainsi une identité de traitement des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles avec les ressortissants de pays tiers, notamment en ce qui concerne la durée maximale de la rétention en vue de l’éloignement de l’intéressé.

28

En outre, la question se poserait de savoir si la réglementation nationale en cause au principal est compatible avec la liberté de circulation qui est garantie aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles aux articles 20 et 21 TFUE ainsi que dans la directive 2004/38, dont il pourrait être déduit que la durée du placement en rétention est limitée au temps strictement nécessaire à l’exécution de la décision d’éloignement.

29

Dans ces conditions, la Cour constitutionnelle a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Le droit de l’Union et plus particulièrement les articles [20 et 21 TFUE] et la [directive 2004/38] doivent‑ils être interprétés comme s’opposant à une législation nationale qui applique aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles des dispositions similaires à celles qui constituent la transposition, en ce qui concerne les ressortissants d’États tiers, de l’article 7, paragraphe 3, de la [directive 2008/115], à savoir, des dispositions qui permettent de contraindre le citoyen de l’Union ou le membre de sa famille à se conformer à des mesures préventives pour éviter tout risque de fuite pendant le délai qui lui a été octroyé pour quitter le territoire à la suite de la prise d’une décision de fin de séjour pour raison d’ordre public ou pendant la prolongation de ce délai ?

2)

Le droit de l’Union et plus particulièrement les articles [20 et 21 TFUE] et la [directive 2004/38] doivent-ils être interprétés comme s’opposant à une législation nationale qui applique aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles qui ne se sont pas conformés à une décision de fin de séjour pour motif d’ordre public ou de sécurité publique une disposition identique à celle qui est appliquée aux ressortissants d’États tiers dans la même situation en ce qui concerne le délai maximal de rétention à des fins d’éloignement, à savoir huit mois ? »

Sur les questions préjudicielles

30

Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 20 et 21 TFUE ainsi que la directive 2004/38 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale :

qui applique aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles, pendant le délai qui leur est imparti pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil à la suite de l’adoption d’une décision d’éloignement prise à leur égard pour des raisons d’ordre public ou pendant la prolongation de ce délai, des dispositions visant à éviter le risque de fuite de ceux-ci qui sont similaires à celles qui, en ce qui concerne les ressortissants de pays tiers, visent à transposer dans le droit national l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2008/115, et

qui applique aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles, qui, après l’expiration du délai imparti ou de la prolongation de ce délai, ne se sont pas conformés à une décision d’éloignement prise à leur égard pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique, une mesure de rétention d’une durée maximale de huit mois à des fins d’éloignement, cette durée étant identique à celle applicable, dans le droit national, aux ressortissants de pays tiers ne s’étant pas conformés à une décision de retour prise pour de telles raisons, au titre de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/115.

31

À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 27, paragraphe 1, de la directive 2004/38, les États membres peuvent restreindre la liberté de circulation et de séjour d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille, notamment pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique. Si les questions posées concernent des situations dans lesquelles une décision d’éloignement est adoptée sur le fondement de cette disposition, elles ne portent cependant pas sur l’examen d’une telle décision à l’aune du droit de l’Union, mais sur celui de mesures visant à en assurer l’exécution.

32

Cela étant précisé, il convient de répondre aux questions posées en examinant, en premier lieu, si les articles 20 et 21 TFUE ainsi que la directive 2004/38 s’opposent au fait même de prévoir des dispositions nationales applicables dans le cadre de l’exécution d’une décision d’éloignement des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles dont le contenu est identique ou similaire à des dispositions qui visent à transposer, dans le droit national, la directive 2008/115, relative au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Si tel n’est pas le cas, il conviendra d’apprécier, en deuxième lieu, si les mesures spécifiques prévues par les dispositions en cause au principal sont susceptibles de constituer des restrictions à la liberté de circulation et de séjour et, le cas échéant, en troisième lieu, si de telles restrictions peuvent être justifiées.

Sur l’application aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles de dispositions nationales dont le contenu est identique ou similaire à celles applicables aux ressortissants de pays tiers

33

Il convient de rappeler que le chapitre VI de la directive 2004/38 prévoit, notamment, des règles relatives à l’éloignement des seuls citoyens de l’Union et des membres de leurs familles. Toutefois, cette directive ne contient pas de dispositions précises relatives à la possibilité pour les États membres d’adopter des mesures visant à éviter le risque de fuite de ceux-ci pendant le délai qui leur est imparti pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil ou pendant la prolongation de ce délai, pas plus qu’elle ne contient de dispositions précises relatives à la possibilité de placer les intéressés en rétention lorsqu’ils ne se sont pas conformés à une décision d’éloignement dans ce délai ou la prolongation de celui‑ci.

34

En l’absence de réglementation du droit de l’Union, il appartient aux États membres de prévoir des règles leur permettant d’adopter des mesures visant à assurer l’exécution d’une décision d’éloignement fondée sur l’article 27 de la directive 2004/38, à condition qu’aucune disposition de droit de l’Union ne s’y oppose (voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 2017, Petrea, C‑184/16, EU:C:2017:684, point 52).

35

C’est uniquement dans le respect de cette condition que les États membres peuvent s’inspirer des dispositions de la directive 2008/115, notamment de son article 7, paragraphe 3, et de ses articles 15 à 18, pour adopter, d’une part, des mesures visant à éviter le risque de fuite de citoyens de l’Union et des membres de leurs familles, pendant le délai qui leur est imparti pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil ou pendant la prolongation de ce délai, et, d’autre part, des mesures de rétention lorsqu’ils ne se sont pas conformés à une décision d’éloignement dans ledit délai ou la prolongation de celui-ci.

36

En effet, l’article 7, paragraphe 3, de cette directive prévoit la possibilité pour les États membres d’imposer des obligations au ressortissant de pays tiers afin d’éviter le risque de fuite de ce dernier pendant le délai de départ volontaire, les obligations expressément énumérées à cet effet étant celles de se présenter régulièrement aux autorités, de déposer une garantie financière adéquate, de remettre des documents ou de demeurer en un lieu déterminé. De même, un chapitre entier de ladite directive, à savoir le chapitre IV de celle-ci, intitulé « Rétention à des fins d’éloignement », lequel comporte les articles 15 à 18 de la même directive, prévoit la possibilité de placer un ressortissant de pays tiers en rétention à des fins d’éloignement et encadre, de manière détaillée, les garanties accordées aux ressortissants de pays tiers en ce qui concerne tant la décision d’éloignement que celle de leur rétention (voir, en ce sens, arrêt du 10 septembre 2013, G. et R., C‑383/13 PPU, EU:C:2013:533, point 31).

37

Plus spécifiquement, l’article 15, paragraphe 5, de la directive 2008/115 précise, notamment, que la durée de rétention ne peut dépasser six mois, tandis que l’article 15, paragraphe 6, de cette directive dispose que les États membres ne peuvent prolonger la période visée à l’article 15, paragraphe 5, de ladite directive, sauf pour une période déterminée n’excédant pas douze mois supplémentaires lorsque, malgré tous leurs efforts raisonnables, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération du ressortissant de pays tiers concerné ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires.

38

En l’occurrence, il ressort du dossier dont dispose la Cour que le but de la réglementation nationale en cause au principal est de garantir aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles un régime d’éloignement qui ne soit pas moins favorable que celui dont bénéficient les ressortissants de pays tiers. S’agissant, plus spécifiquement, des dispositions nationales visant à éviter le risque de fuite de l’intéressé, celles‑ci s’inspirent en grande partie des dispositions de la directive 2008/115. En ce qui concerne la disposition nationale relative à la rétention de l’intéressé à des fins d’éloignement, celle‑ci reproduit le régime prévu, dans le droit national, pour les ressortissants de pays tiers et établit ainsi une identité de traitement des citoyens de l’Union ainsi que des membres de leur famille avec les ressortissants de pays tiers faisant l’objet d’une procédure de retour au titre de cette directive, notamment en ce qui concerne la durée maximale de rétention prévue en vue de l’éloignement de l’intéressé.

39

Par conséquent, si le seul fait pour l’État membre d’accueil de prévoir des règles nationales applicables dans le cadre de l’exécution d’une décision d’éloignement des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles en s’inspirant de celles applicables au retour des ressortissants de pays tiers qui visent à transposer la directive 2008/115 dans le droit national n’est pas, en soi, contraire au droit de l’Union, il n’en reste pas moins que de telles règles doivent être conformes au droit de l’Union. Ainsi que la juridiction de renvoi invite la Cour à le faire, il convient d’examiner lesdites règles à l’aune des dispositions spécifiques applicables aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles en matière de libre circulation et de libre séjour, à savoir les articles 20 et 21 TFUE ainsi que les dispositions de la directive 2004/38.

Sur l’existence de restrictions à la liberté de circulation et de séjour

40

En ce qui concerne, en premier lieu, les mesures préventives visant à éviter le risque de fuite des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles pendant le délai qui leur est imparti pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil ou pendant la prolongation de ce délai, il y a lieu d’observer que celles‑ci ne sont pas définies dans la réglementation nationale en cause au principal, à l’exception de la possibilité d’une assignation à résidence de l’intéressé dans l’hypothèse où l’éloignement de celui-ci est temporairement reporté. Pour le reste, le Roi est habilité à déterminer ces mesures par un arrêté délibéré en Conseil des ministres.

41

Toutefois, il ressort du libellé même des questions posées que les mesures qui peuvent être imposées dans ce contexte et celles prévues à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2008/115 et exposées au point 36 du présent arrêt sont similaires. Or, il convient de relever que de telles mesures, en ce qu’elles visent précisément à limiter les mouvements de l’intéressé, ont nécessairement pour effet de restreindre la liberté de circulation et de séjour de celui‑ci pendant le délai qui lui est imparti pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil, notamment lorsque l’intéressé fait l’objet d’une assignation à résidence.

42

En ce qui concerne, en second lieu, la possibilité de placer le citoyen de l’Union et les membres de sa famille en rétention à des fins d’éloignement pendant une période maximale de huit mois, il y a lieu de relever, à l’instar de M. l’avocat général au point 88 de ses conclusions, qu’une telle mesure constitue, de par sa nature même, une restriction à la liberté de circulation et de séjour de l’intéressé.

43

Certes, les citoyens de l’Union et les membres de leurs familles qui, après l’expiration du délai imparti ou de la prolongation de ce délai, ne se sont pas conformés à une décision d’éloignement prise à leur égard pour des motifs d’ordre public ou de sécurité publique, ne peuvent se prévaloir d’un droit de séjour, au titre de la directive 2004/38, sur le territoire de l’État membre d’accueil tant que cette décision continue à produire ses effets [voir, par analogie, arrêt du 22 juin 2021, Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (Effets d’une décision d’éloignement), C-719/19, point 104]. Toutefois, l’existence d’une telle décision n’enlève rien au caractère restrictif d’une mesure de rétention, laquelle limite les mouvements de l’intéressé au‑delà des limitations découlant de la décision d’éloignement elle‑même, en restreignant pendant toute la durée de la rétention de l’intéressé les possibilités pour ce dernier de séjourner et de circuler librement en dehors du territoire de l’État membre d’accueil. Une telle mesure de rétention constitue ainsi une restriction au droit de sortie prévu à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2004/38, qui prévoit expressément que tout citoyen de l’Union muni d’une carte d’identité ou d’un passeport en cours de validité a le droit de quitter le territoire d’un État membre en vue de se rendre dans un autre État membre (arrêt du 10 juillet 2008, Jipa, C‑33/07, EU:C:2008:396, point 19).

44

Par conséquent, il y a lieu de considérer que des dispositions nationales telles que celles en cause au principal, à savoir tant celles prévoyant la possibilité d’imposer des mesures préventives visant à éviter le risque de fuite de l’intéressé que celle relative à la durée maximale de rétention de celui-ci à des fins d’éloignement, constituent des restrictions à la liberté de circulation et de séjour des citoyens de l’Union ainsi que des membres de leurs familles, telle que celle-ci est consacrée à l’article 20, paragraphe 2, sous a), et à l’article 21, paragraphe 1, TFUE ainsi que précisée dans les dispositions de la directive 2004/38.

Sur l’existence de justifications aux restrictions à la liberté de circulation et de séjour

45

S’agissant de l’existence éventuelle de justifications à des restrictions telles que celles constatées au point précédent, il importe de rappeler que, ainsi que cela découle du libellé même des articles 20 et 21 TFUE, le droit des citoyens de l’Union et des membres de leur famille de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres n’est pas inconditionnel, mais peut être assorti des limitations et des conditions prévues par le traité FUE ainsi que par les dispositions prises pour son application (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2016, Rendón Marín, C‑165/14, EU:C:2016:675, point 55 et jurisprudence citée).

46

À cet égard, il importe de rappeler que, ainsi qu’il ressort des points 30 et 31 du présent arrêt, les questions posées par la juridiction de renvoi partent de la prémisse selon laquelle la décision d’éloignement a été adoptée pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique, au titre de l’article 27, paragraphe 1, de la directive 2004/38.

47

Il s’ensuit que, en ce qui concerne l’affaire au principal, les mesures visant à assurer l’exécution d’une telle décision, à savoir les mesures visant à éviter le risque de fuite du citoyen de l’Union ou du membre de sa famille et les mesures de rétention de celui‑ci jusqu’à un délai maximal de huit mois, doivent être appréciées au regard de l’article 27 de la directive 2004/38. L’article 27, paragraphe 2, de cette directive précise que, pour être justifiées, les mesures de restriction du droit de circulation et de séjour d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille prises, notamment, pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique doivent respecter le principe de proportionnalité et être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l’individu concerné.

48

En ce qui concerne, en premier lieu, les mesures en cause au principal qui visent à éviter le risque de fuite de l’intéressé pendant le délai imparti à celui-ci pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil ou pendant la prolongation de ce délai, ainsi qu’il ressort du point 18 du présent arrêt, ces mesures ont pour objectif d’assurer une politique efficace d’éloignement des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles.

49

Or, une mesure visant à éviter le risque de fuite de l’intéressé dans un cas de figure tel que celui rappelé au point 46 du présent arrêt contribue nécessairement à la protection de l’ordre public, dans la mesure où elle vise, en définitive, à assurer qu’une personne qui est considérée comme représentant une menace pour l’ordre public de l’État membre d’accueil soit éloignée du territoire de celui‑ci, cette mesure se rattachant ainsi à l’objet de la décision d’éloignement elle‑même.

50

Au demeurant, ainsi que la Commission européenne le fait valoir, rien dans les termes de l’article 27, paragraphe 1, de la directive 2004/38 n’exclut que les mesures restreignant la liberté de circulation et de séjour visées par cette disposition puissent être appliquées pendant le délai imparti à l’intéressé pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil à la suite de l’adoption d’une décision d’éloignement prise à son égard ou pendant la prolongation de ce délai.

51

Il s’ensuit que des mesures visant à éviter le risque de fuite de l’intéressé, telles que celles faisant l’objet des questions posées, doivent être considérées comme limitant la liberté de circulation et de séjour de celui-ci « pour des raisons d’ordre public », au sens de l’article 27, paragraphe 1, de la directive 2004/38, de telle sorte qu’elles sont susceptibles, en principe, d’être justifiées au titre de cette disposition.

52

En outre, ces mesures ne sauraient être considérées comme contraires à l’article 27 de la directive 2004/38 au seul motif que celles-ci et les mesures qui, en ce qui concerne les ressortissants de pays tiers, visent à transposer dans le droit national l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2008/115 sont similaires. En effet, dans les deux cas de figure, l’objectif des mesures est d’éviter la fuite de la personne concernée et ainsi, en définitive, d’assurer l’exécution effective de la décision d’éloignement ou de retour prise à l’égard de celle-ci.

53

Cela étant, non seulement les directives 2004/38 et 2008/115 ne partagent pas le même objet, mais les bénéficiaires de la première jouissent d’un statut et de droits d’une nature toute autre que ceux dont peuvent se prévaloir les bénéficiaires de la seconde.

54

En particulier, ainsi que la Cour l’a jugé à maintes reprises et qu’il ressort des considérants 1 et 2 de la directive 2004/38, la citoyenneté de l’Union confère à chaque citoyen de l’Union un droit fondamental et individuel de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, sous réserve des limitations et des restrictions fixées par les traités et des mesures adoptées en vue de leur application, la libre circulation des personnes constituant, par ailleurs, l’une des libertés fondamentales du marché intérieur, consacrée à l’article 45 de la charte des droits fondamentaux (voir, en ce sens, arrêt du 5 mai 2011, McCarthy, C‑434/09, EU:C:2011:277, point 27 et jurisprudence citée).

55

Par ailleurs, ainsi qu’il ressort du considérant 3 de la directive 2004/38, cette dernière vise à faciliter l’exercice du droit fondamental et individuel de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, qui est conféré directement aux citoyens de l’Union par le traité FUE, et a notamment pour objet de renforcer ce droit (voir, en ce sens, arrêt du 5 mai 2011, McCarthy, C‑434/09, EU:C:2011:277, point 28 et jurisprudence citée).

56

En outre, la libre circulation des personnes faisant partie des fondements de l’Union européenne, les dispositions la consacrant doivent être interprétées largement, alors que les exceptions et les dérogations à celle‑ci doivent être, au contraire, d’interprétation stricte (voir, en ce sens, arrêts du 3 juin 1986, Kempf, 139/85, EU:C:1986:223, point 13, et du 10 juillet 2008, Jipa, C‑33/07, EU:C:2008:396, point 23).

57

Eu égard au statut fondamental dont bénéficie les citoyens de l’Union, les mesures visant à éviter le risque de fuite qui peuvent être imposées dans le cadre de l’éloignement de ceux‑ci et des membres de leurs familles pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique ne sauraient être moins favorables que les mesures prévues dans le droit national afin d’éviter le risque de fuite, pendant le délai de départ volontaire, des ressortissants de pays tiers faisant l’objet d’une procédure de retour au titre de la directive 2008/115 pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique (voir, par analogie, arrêt du 14 septembre 2017, Petrea, C‑184/16, EU:C:2017:684, points 51, 54 et 56). S’il semble découler du dossier dont dispose la Cour que, en l’occurrence, un tel traitement moins favorable n’est pas en cause au principal et que ces deux catégories de personnes se trouvent, à l’égard d’un risque de fuite, dans une situation comparable, cette appréciation appartient à la juridiction de renvoi.

58

Enfin, ainsi que la Commission le soutient, afin d’apprécier le caractère proportionné d’une mesure visant à éviter le risque de fuite dans un cas individuel, il convient, notamment, de prendre en considération la nature de la menace pour l’ordre public qui a justifié l’adoption de la décision d’éloignement de l’intéressé. Dans le cas où plusieurs mesures sont de nature à permettre d’atteindre l’objectif visé, une préférence devrait être accordée à la mesure la moins restrictive.

59

En ce qui concerne, en second lieu, la possibilité, dans le cas où le citoyen de l’Union ou un membre de sa famille ne quitterait pas l’État membre d’accueil dans le délai imparti ou la prolongation de celui‑ci, de le placer en rétention à des fins d’éloignement pour une durée maximale de huit mois identique à celle applicable, dans le droit national, aux ressortissants de pays tiers faisant l’objet d’une procédure de retour au titre de la directive 2008/115, il convient d’observer que, ainsi qu’il ressort des points 30 et 31 du présent arrêt, l’hypothèse visée à cet égard dans les questions posées est celle du citoyen de l’Union ou du membre de sa famille qui ne s’est pas conformé à une décision d’éloignement prise à son égard pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique dans le délai imparti ou la prolongation de celui‑ci. Par ailleurs, la disposition du droit national pertinente prévoit qu’une rétention pendant la période de huit mois ne peut être appliquée que si la sauvegarde de l’ordre public ou de la sécurité nationale l’exige. À cet égard, il ressort de la décision de renvoi que la notion de « sécurité nationale », au sens de cette disposition, correspond à la notion de « sécurité publique », prévue à l’article 27, paragraphe 1, de la directive 2004/38.

60

Si la rétention prévue au titre de la disposition nationale concernée paraît, par conséquent, fondée sur des raisons pouvant restreindre la liberté de circulation et de séjour d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille conformément à l’article 27, paragraphe 1, de la directive 2004/38, encore faut‑il qu’elle soit proportionnée à l’objectif poursuivi. Cela implique de vérifier que la durée de rétention prévue dans la réglementation nationale en cause au principal est proportionnée à l’objectif, exposé aux points 18 et 48 du présent arrêt, consistant à assurer une politique efficace d’éloignement des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles.

61

En l’occurrence, il convient d’observer que, certes, la réglementation nationale en cause au principal encadre les circonstances dans lesquelles le citoyen de l’Union ou un membre de sa famille peut être maintenu en rétention à des fins d’éloignement pendant une période maximale d’une durée de huit mois, diverses garanties procédurales étant expressément prévues à cet effet.

62

En particulier, il ressort des observations du gouvernement belge que, dans un premier temps, la durée du placement en rétention ne saurait dépasser deux mois et est expressément soumise, notamment, à la condition qu’il n’existe pas d’autres mesures moins coercitives qui pourraient s’appliquer efficacement en vue de garantir l’exécution de la mesure d’éloignement. La possibilité de prolonger la durée de ce placement en rétention par périodes de deux mois est également soumise à plusieurs conditions, en particulier que soient entreprises les démarches nécessaires à l’éloignement de l’intéressé avec toute la diligence requise et qu’il existe toujours une possibilité d’éloigner effectivement celui-ci dans un délai raisonnable. Après une première prolongation, la décision de prolonger la durée du placement en rétention de l’intéressé peut être prise uniquement par le ministre. Enfin, si après cinq mois, le citoyen de l’Union ou le membre de sa famille doit être mis en liberté, le placement en rétention de l’intéressé peut être prolongé, chaque fois d’une durée d’un mois, dans le cas où la sauvegarde de l’ordre public ou la sécurité nationale l’exige, sans toutefois que la durée totale du placement en rétention de celui-ci puisse dépasser huit mois.

63

Il en ressort également que la rétention d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille pendant une période maximale de huit mois prévue dans la disposition nationale en cause au principal nécessite un examen individuel de la situation spécifique de l’intéressé afin de garantir que cette rétention n’excède pas la durée strictement nécessaire à l’exécution de la décision d’éloignement prise à son égard et que des raisons d’ordre public ou de sécurité publique justifient son placement en rétention.

64

Toutefois, l’encadrement ainsi prévu par la réglementation nationale en cause au principal ne justifie pas le fait même de prévoir une durée maximale de rétention, telle que celle en cause au principal, qui s’applique aux fins de l’éloignement des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles, ordonné pour des motifs d’ordre public ou de sécurité publique, et qui est identique à celle applicable à l’éloignement des ressortissants de pays tiers au titre des dispositions adoptées aux fins de la transposition dans le droit national de la directive 2008/115.

65

En effet, s’agissant spécifiquement de la durée de la procédure d’éloignement, les citoyens de l’Union et les membres de leurs familles qui, en cette qualité, relèvent du champ d’application de la directive 2004/38 ne se trouvent pas dans une situation comparable à celle des ressortissants de pays tiers qui relèvent de la directive 2008/115.

66

En particulier, ainsi que M. l’avocat général l’a également relevé au point 94 de ses conclusions, les États membres disposent de mécanismes de coopération et de facilités dans le cadre de l’éloignement d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille vers un autre État membre dont ils ne disposent pas nécessairement dans le cadre de l’éloignement d’un ressortissant de pays tiers vers un pays tiers. En effet, ainsi que la Commission l’a souligné à juste titre lors de l’audience, les relations entre les États membres, lesquelles sont fondées sur l’obligation de coopération loyale et le principe de confiance mutuelle, ne devraient pas donner lieu à des difficultés d’une nature identique à celles qui peuvent se présenter dans le cas de la coopération entre les États membres et les pays tiers.

67

Dans le même ordre d’idées, les difficultés pratiques relatives à l’organisation du trajet de retour de l’intéressé dans le cas de l’éloignement des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles ne devraient généralement pas être les mêmes que celles tenant à l’organisation du trajet de retour des ressortissants de pays tiers vers un pays tiers, notamment lorsque ce dernier retour implique un pays tiers difficilement accessible par voie aérienne.

68

Par ailleurs, le temps nécessaire pour établir la nationalité des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles qui font l’objet d’une procédure d’éloignement au titre de la directive 2004/38 devrait, en règle générale, être plus court que celui requis pour établir la nationalité des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier qui font l’objet d’une procédure de retour au titre de la directive 2008/115. En effet, non seulement les mécanismes de coopération entre les États membres rendent la vérification de la nationalité des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles plus aisée, mais, ainsi que la Commission l’a également soutenu lors de l’audience, si une personne fait l’objet de l’application des dispositions de la directive 2004/38, cela implique, en principe, que cette personne ait déjà été identifiée comme étant ressortissant d’un État membre ou comme membre de la famille d’un citoyen de l’Union dont la nationalité est connue.

69

En outre, le retour du citoyen de l’Union sur le territoire de son État membre d’origine est, le cas échéant, également rendu plus aisé par l’article 27, paragraphe 4, de la directive 2004/38, selon lequel l’État membre qui a délivré le passeport ou la carte d’identité doit permettre au titulaire d’un tel document qui a été éloigné d’un autre État membre pour des raisons, notamment, d’ordre public ou de sécurité publique d’entrer sur son territoire sans aucune formalité, même si ce document est périmé ou si la nationalité de ce titulaire est contestée.

70

Il importe d’ajouter que, ainsi qu’il découle de l’article 15, paragraphe 6, de la directive 2008/115, même dans le cas de l’éloignement d’un ressortissant de pays tiers au titre de la directive 2008/115, la durée de la rétention à des fins d’éloignement ne peut dépasser six mois que lorsque, malgré tous les efforts raisonnables de l’État membre d’accueil, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération du ressortissant de pays tiers concerné ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires.

71

Or, indépendamment de la question de savoir à quelles conditions la rétention pendant une période maximale de huit mois d’un ressortissant de pays tiers faisant l’objet d’une procédure de retour au titre de la directive 2008/115 peut être considérée comme étant conforme au droit de l’Union, il découle des conditions spécifiques exposées au point précédent que ce sont précisément les difficultés pratiques relatives, en particulier, à l’obtention des documents nécessaires de pays tiers qui sont susceptibles, en principe, de justifier une rétention d’une telle durée dans le cas des personnes concernées.

72

Il ressort des considérations exposées aux points 66 à 71 du présent arrêt que les citoyens de l’Union et les membres de leurs familles qui relèvent, en cette qualité, de la directive 2004/38 ne se trouvent pas dans une situation comparable à celle des ressortissants de pays tiers qui font l’objet d’une procédure de retour au titre de la directive 2008/115 pour ce qui concerne la durée de la procédure d’éloignement, de telle sorte qu’il n’est pas justifié d’accorder un traitement identique à l’ensemble de ces personnes en ce qui concerne la durée maximale de rétention à des fins d’éloignement. Il s’ensuit qu’une durée de rétention maximale pour les citoyens de l’Union et les membres de leurs familles qui relèvent, en cette qualité, de la directive 2004/38, telle que celle prévue dans la réglementation en cause au principal, va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi.

73

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions posées que les articles 20 et 21 TFUE ainsi que la directive 2004/38 doivent être interprétés en ce sens que :

ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale qui applique aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles, pendant le délai qui leur est imparti pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil à la suite de l’adoption d’une décision d’éloignement prise à leur égard pour des raisons d’ordre public ou pendant la prolongation de ce délai, des dispositions visant à éviter le risque de fuite qui sont similaires à celles qui, en ce qui concerne les ressortissants de pays tiers, visent à transposer dans le droit national l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2008/115, à condition que les premières dispositions respectent les principes généraux prévus à l’article 27 de la directive 2004/38 et qu’elles ne soient pas moins favorables que les secondes,

ils s’opposent à une réglementation nationale qui applique aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles, qui, après l’expiration du délai imparti ou de la prolongation de ce délai, ne se sont pas conformés à une décision d’éloignement prise à leur égard pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique, une mesure de rétention d’une durée maximale de huit mois à des fins d’éloignement, cette durée étant identique à celle applicable, dans le droit national, aux ressortissants de pays tiers ne s’étant pas conformés à une décision de retour prise pour de telles raisons, au titre de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/115.

Sur les dépens

74

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (grande chambre) dit pour droit :

 

Les articles 20 et 21 TFUE ainsi que la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE, doivent être interprétés en ce sens que :

 

ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale qui applique aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles, pendant le délai qui leur est imparti pour quitter le territoire de l’État membre d’accueil à la suite de l’adoption d’une décision d’éloignement prise à leur égard pour des raisons d’ordre public ou pendant la prolongation de ce délai, des dispositions visant à éviter le risque de fuite qui sont similaires à celles qui, en ce qui concerne les ressortissants de pays tiers, visent à transposer dans le droit national l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, à condition que les premières dispositions respectent les principes généraux prévus à l’article 27 de la directive 2004/38 et qu’elles ne soient pas moins favorables que les secondes ;

ils s’opposent à une réglementation nationale qui applique aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles, qui, après l’expiration du délai imparti ou de la prolongation de ce délai, ne se sont pas conformés à une décision d’éloignement prise à leur égard pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique, une mesure de rétention d’une durée maximale de huit mois à des fins d’éloignement, cette durée étant identique à celle applicable, dans le droit national, aux ressortissants de pays tiers ne s’étant pas conformés à une décision de retour prise pour de telles raisons, au titre de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/115.

 

Lenaerts

Silva de Lapuerta

Prechal

Vilaras

Regan

Piçarra

Safjan

Šváby

Rodin

Biltgen

Jürimäe

Lycourgos

Xuereb

Rossi

Jarukaitis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 22 juin 2021.

Le greffier

A. Calot Escobar

Le président

K. Lenaerts


( *1 ) Langue de procédure : le français.

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