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Document 62018CC0485

Conclusions de l'avocat général M. G. Hogan, présentées le 16 juillet 2020.
Groupe Lactalis contre Premier ministre e.a.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Conseil d'État (France).
Renvoi préjudiciel – Règlement (UE) no 1169/2011 – Information des consommateurs sur les denrées alimentaires – Article 9, paragraphe 1, sous i), et article 26, paragraphe 2, sous a) – Mention obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance des denrées alimentaires – Omission susceptible d’induire en erreur les consommateurs – Article 38, paragraphe 1 – Questions expressément harmonisées – Article 39, paragraphe 2 – Adoption de mesures nationales prévoyant des mentions obligatoires complémentaires concernant le pays d’origine ou le lieu de provenance de types ou de catégories spécifiques de denrées alimentaires – Conditions – Existence d’un lien avéré entre une ou plusieurs propriétés des denrées alimentaires concernées et leur origine ou leur provenance – Notions de “lien avéré” et de “propriétés” – Preuve que la majorité des consommateurs attache une importance significative à cette information – Mesure nationale prévoyant la mention obligatoire de l’origine nationale, européenne ou non européenne du lait.
Affaire C-485/18.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2020:592

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. GERARD HOGAN

présentées le 16 juillet 2020 ( 1 )

Affaire C‑485/18

Groupe Lactalis

contre

Premier ministre,

Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation,

Garde des Sceaux, ministre de la Justice,

Ministre de l’Économie et des Finances

(demande de décision préjudicielle formée par le Conseil d’État, France)

« Renvoi préjudiciel – Règlement (UE) no 1169/2011 – Information des consommateurs sur les denrées alimentaires – Article 26 – Indication obligatoire du pays d’origine – Champ d’application de l’harmonisation – Article 3 – Mesures nationales exigeant des mentions obligatoires complémentaires pour des types ou catégories spécifiques de denrées alimentaires – Conditions – Mesure nationale prévoyant l’indication obligatoire de l’origine nationale, européenne ou extra européenne du lait »

I. Introduction

1.

La présente demande de décision préjudicielle concerne l’interprétation de l’article 26 et de l’article 39 du règlement (UE) no 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires ( 2 ).

2.

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant la société Groupe Lactalis, d’une part, au Premier ministre français, au ministre de la Justice, au ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation et au ministre de l’Économie et des Finances, d’autre part, au sujet de la légalité du décret no 2016‑1137, du 19 août 2016, relatif à l’indication de l’origine du lait et du lait et des viandes utilisés en tant qu’ingrédient (JORF no 0194 du 21 août 2016, texte n 18, ci‑après le « décret litigieux »). Ce décret a pour effet, dans le cas du lait, d’obliger les producteurs à en indiquer l’origine sur l’étiquetage du produit.

3.

On ne sera peut-être pas étonné d’observer que l’indication du pays d’origine sur l’étiquetage des produits fait partie des caractéristiques les plus controversées du marché unique. Il est assez fréquent que de telles exigences d’étiquetage ne constituent qu’une méthode déguisée pour assurer la préférence des produits nationaux ( 3 ). Il existe toutefois des cas dans lesquels il existe un lien clair et avéré entre la provenance de la denrée alimentaire en cause et ses qualités. L’existence même du règlement (CEE) no 2081/92 du Conseil, du 14 juillet 1992, relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine des produits agricoles et des denrées alimentaires ( 4 ), en constitue en soi une preuve. La véritable question soulevée par la présente affaire est celle de savoir si une mesure nationale qui impose, dans le cas du lait, une telle exigence peut être justifiée au regard du droit de l’Union. Toutefois, pour les raisons que je vais indiquer, je ne crois pas que, dans l’hypothèse envisagée par la juridiction de renvoi, cela soit le cas.

4.

Avant de procéder à l’examen de ces questions, il convient toutefois de rappeler au préalable la réglementation applicable en la matière.

II. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

1. Le règlement no 1169/2011

5.

Aux termes de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement no 1169/2011, ce règlement vise à fournir « les dispositions de base permettant d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs en matière d’information sur les denrées alimentaires, dans le respect des différences de perception desdits consommateurs et de leurs besoins en information, tout en veillant au bon fonctionnement du marché intérieur ».

6.

L’article 3, paragraphes 1 et 2, dudit règlement dispose :

« 1.   L’information sur les denrées alimentaires tend à un niveau élevé de protection de la santé et des intérêts des consommateurs en fournissant au consommateur final les bases à partir desquelles il peut décider en toute connaissance de cause et utiliser les denrées alimentaires en toute sécurité, dans le respect, notamment, de considérations sanitaires, économiques, écologiques, sociales et éthiques.

2.   La législation concernant l’information sur les denrées alimentaires vise à établir, dans l’Union, la libre circulation des denrées alimentaires légalement produites et commercialisées, compte tenu, le cas échéant, de la nécessité de protéger les intérêts légitimes des producteurs et de promouvoir la fabrication de produits de qualité.

[...] »

7.

L’article 9, paragraphe 1, sous i), du règlement no 1169/2011, intitulé « Liste des mentions obligatoires », dispose :

« 1.   Conformément aux articles 10 à 35, et sous réserve des exceptions prévues dans le présent chapitre, les mentions suivantes sont obligatoires :

[...]

i)

le pays d’origine ou le lieu de provenance lorsqu’il est prévu à l’article 26 ;

[...] »

8.

L’article 10 de ce règlement, intitulé « Mentions obligatoires complémentaires pour des types ou catégories spécifiques de denrées alimentaires », dispose :

« 1.   En plus des mentions énumérées à l’article 9, paragraphe 1, des mentions obligatoires complémentaires sont prévues à l’annexe III pour des types ou catégories spécifiques de denrées alimentaires.

2.   Afin de veiller à l’information du consommateur sur les types ou catégories spécifiques de denrées alimentaires et de tenir compte des progrès scientifiques et techniques, de la protection de la santé des consommateurs ou de l’utilisation des denrées en toute sécurité, la Commission peut modifier l’annexe III par voie d’actes délégués, en conformité avec l’article 51.

[...] »

9.

Conformément à l’article 26 du règlement no 1169/2011, intitulé « Pays d’origine ou lieu de provenance » :

« 1.   Le présent article s’applique sans préjudice des exigences d’étiquetage prévues dans des dispositions particulières de l’Union, et notamment le règlement (CE) no 509/2006 du Conseil du 20 mars 2006 relatif aux spécialités traditionnelles garanties des produits agricoles et des denrées alimentaires et le règlement (CE) no 510/2006 du Conseil du 20 mars 2006 relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine des produits agricoles et des denrées alimentaires.

2.   L’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance est obligatoire :

a)

dans les cas où son omission serait susceptible d’induire en erreur les consommateurs sur le pays d’origine ou le lieu de provenance réel de la denrée alimentaire, en particulier si les informations jointes à la denrée ou l’étiquette dans son ensemble peuvent laisser penser que la denrée a un pays d’origine ou un lieu de provenance différent ;

b)

pour la viande relevant des codes de nomenclature combinée (NC) dont la liste figure à l’annexe XI. L’application du présent point est subordonnée à l’adoption des actes d’exécution visés au paragraphe 8.

3.   Lorsque le pays d’origine ou le lieu de provenance de la denrée alimentaire est indiqué et qu’il n’est pas celui de son ingrédient primaire :

a)

le pays d’origine ou le lieu de provenance de l’ingrédient primaire en question est également indiqué ; ou

b)

le pays d’origine ou le lieu de provenance de l’ingrédient primaire est indiqué comme étant autre que celui de la denrée alimentaire.

L’application du présent paragraphe est subordonnée à l’adoption des actes d’exécution visés au paragraphe 8.

4.   Dans les cinq ans à compter de la date d’application du paragraphe 2, [sous] b), la Commission présente un rapport au Parlement européen et au Conseil afin d’évaluer l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance pour les produits visés audit point.

5.   Au plus tard le 13 décembre 2014, la Commission présente des rapports au Parlement européen et au Conseil concernant l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance pour les denrées suivantes :

a)

les types de viande autres que la viande bovine et ceux visés au paragraphe 2, [sous] b) ;

b)

le lait ;

c)

le lait utilisé comme ingrédient dans les produits laitiers ;

d)

les denrées alimentaires non transformées ;

e)

les produits comprenant un seul ingrédient ;

f)

les ingrédients constituant plus de 50 % d’une denrée alimentaire.

[...]

7.   Les rapports visés aux paragraphes 5 et 6 tiennent compte de la nécessité d’informer les consommateurs de la faisabilité de fournir l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance et d’une analyse des coûts et des avantages de l’introduction de telles mesures, y compris les incidences juridiques sur le marché intérieur et l’impact sur le commerce international.

La Commission peut accompagner ces rapports de propositions de modification des dispositions pertinentes de la législation de l’Union.

8.   Au plus tard le 13 décembre 2013, après des analyses d’impact, la Commission adopte les actes d’exécution fixant les modalités d’application du paragraphe 2, [sous] b), et du paragraphe 3 du présent article. Ces actes d’exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d’examen visée à l’article 48, paragraphe 2.

[...] »

10.

Le chapitre VI de ce règlement, intitulé « Mesures nationales », comprend notamment les articles 38 et 39.

11.

L’article 38 dudit règlement, intitulé « Mesures nationales », dispose :

« 1.   Pour ce qui concerne les questions expressément harmonisées par le présent règlement, les États membres ne peuvent ni adopter ni conserver des mesures nationales, sauf si le droit de l’Union l’autorise. Ces mesures nationales ne peuvent entraver la libre circulation des marchandises, notamment donner lieu à une discrimination à l’encontre de denrées alimentaires provenant d’autres États membres.

2.   Sans préjudice de l’article 39, les États membres peuvent adopter des dispositions nationales concernant des questions qui ne sont pas expressément harmonisées par le présent règlement, pour autant que ces mesures n’aient pas pour effet d’interdire, d’entraver ou de restreindre la libre circulation des marchandises qui sont conformes au présent règlement. »

12.

L’article 39 du règlement no 1169/2011, intitulé « Mesures nationales sur les mentions obligatoires complémentaires », dispose :

« 1.   Outre les mentions obligatoires visées à l’article 9, paragraphe 1, et à l’article 10, les États membres peuvent, conformément à la procédure établie à l’article 45, adopter des mesures exigeant des mentions obligatoires complémentaires, pour des types ou catégories spécifiques de denrées alimentaires, justifiées par au moins une des raisons suivantes :

a)

protection de la santé publique ;

b)

protection des consommateurs ;

c)

répression des tromperies ;

d)

protection de la propriété industrielle et commerciale, des indications de provenance ou des appellations d’origine enregistrées, et répression de la concurrence déloyale.

2.   En application du paragraphe 1, les États membres ne peuvent introduire des mesures concernant l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance des denrées alimentaires que s’il existe un lien avéré entre certaines propriétés de la denrée et son origine ou sa provenance. Lorsqu’ils communiquent ces mesures à la Commission, les États membres apportent la preuve que la majorité des consommateurs attachent une importance significative à cette information. »

B.   Le droit français

13.

Le décret litigieux est entré en vigueur le 17 janvier 2017 et était applicable jusqu’au 31 décembre 2018.

14.

L’article 1er de ce décret comporte un point I libellé comme suit :

« I. - L’étiquetage des denrées alimentaires préemballées au sens de l’article 2 du [règlement no 1169/2011] susvisé se conforme aux dispositions du présent décret lorsque ces denrées contiennent :

1° Du lait ;

2° En tant qu’ingrédient, du lait utilisé dans les produits laitiers mentionnés dans la liste figurant en annexe ;

[...]

L’étiquetage des denrées alimentaires préemballées indique l’origine des ingrédients mentionnés aux 1° à 3°. Toutefois, si ces ingrédients représentent un pourcentage, exprimé en poids total des ingrédients mis en œuvre dans la denrée alimentaire préemballée, inférieur à un seuil, l’étiquetage de cette denrée n’est pas soumis aux dispositions du présent décret. »

15.

L’article 3 de ce décret dispose :

« I. - L’indication de l’origine du lait ou du lait utilisé en tant qu’ingrédient dans les produits laitiers mentionnés à l’article 1er comprend les mentions suivantes :

1° “Pays de collecte : (nom du pays dans lequel a été collecté le lait)” ;

2° “Pays de conditionnement ou de transformation : (nom du pays dans lequel le lait a été conditionné ou transformé)”.

II. - Par dérogation au I, lorsque le lait ou le lait utilisé en tant qu’ingrédient dans les produits laitiers a été collecté, conditionné ou transformé dans le même pays, la mention de l’origine peut apparaître sous la forme : “Origine : (nom du pays)”.

III. - Par dérogation aux I et II, lorsque le lait ou le lait utilisé en tant qu’ingrédient dans les produits laitiers a été collecté, conditionné ou transformé dans un seul ou plusieurs États membres de l’Union européenne, la mention de l’origine peut apparaître sous la forme : “Origine : UE”.

IV. - Par dérogation aux I et II, lorsque le lait ou le lait utilisé en tant qu’ingrédient dans les produits laitiers a été collecté, conditionné ou transformé dans un seul ou plusieurs États non membres de l’Union européenne, la mention de l’origine peut apparaître sous la forme : “Origine : Hors UE”. »

16.

L’article 4, dernier alinéa, du décret litigieux énonce :

« [...]

Pour l’application du I des articles 2 et 3, lorsque l’indication de l’origine conduit à indiquer plusieurs États membres et non membres de l’Union européenne ou lorsque cette origine n’est pas déterminée, la mention du nom des pays peut être remplacée par la mention : “UE ou Hors UE”. »

17.

L’article 6 dudit décret dispose :

« Les produits légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre de l’Union européenne ou dans un pays tiers ne sont pas soumis aux dispositions du présent décret. »

18.

Le 24 décembre 2018, le décret no 2018‑1239 relatif à l’indication de l’origine du lait et du lait et des viandes utilisés en tant qu’ingrédient (JORF no 0298 du 26 décembre 2018, texte no 70) a prorogé l’application du décret litigieux jusqu’au 31 mars 2020.

19.

Tant ce décret que le décret litigieux ont été notifiés, avant leur entrée en vigueur, à la Commission européenne en vertu de l’article 45 du règlement no 1169/2011. La Commission n’a émis aucun avis négatif au sens de l’article 45, paragraphe 3, du règlement no 1169/2011 pour l’un ou l’autre décret ( 5 ).

III. Les faits et la demande de décision préjudicielle

20.

Par requête enregistrée le 24 octobre 2016, Lactalis a saisi le Conseil d’État (France) d’un recours tendant à l’annulation du décret litigieux. À l’appui de cette demande, Lactalis a invoqué, notamment, deux moyens tirés d’une violation, par le décret, des articles 26, 38 et 39 du règlement no 1169/2011. La juridiction de renvoi a estimé que, pour se prononcer sur ces deux moyens, il y avait d’abord lieu de déterminer l’interprétation qu’il convient de donner à certaines dispositions dudit règlement qui présentent certaines difficultés.

21.

C’est dans ces conditions que le Conseil d’État a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’article 26 du [règlement no 1169/2011] qui prévoit notamment que la Commission présente des rapports au Parlement européen et au Conseil concernant l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance pour ce qui concerne le lait et le lait utilisé en tant qu’ingrédient, doit-il être regardé comme ayant expressément harmonisé cette question au sens du [paragraphe] 1 de l’article 38 du même règlement et fait-il obstacle à la faculté pour les États membres d’adopter des mesures exigeant des mentions obligatoires complémentaires sur le fondement de l’article 39 de ce règlement ?

2)

Dans le cas où les mesures nationales seraient justifiées par la protection des consommateurs au regard du [paragraphe] 1 de l’article 39, les deux critères prévus au [paragraphe] 2 de cet article s’agissant, d’une part, du lien avéré entre certaines propriétés de la denrée et son origine ou sa provenance et, d’autre part, la preuve que la majorité des consommateurs attache une [importance] significative à cette information doivent-ils être lus de façon combinée et, notamment, l’appréciation du lien avéré peut-elle être fondée sur des éléments seulement subjectifs tenant à l’importance de l’association que les consommateurs peuvent majoritairement faire entre les propriétés d’une denrée et son origine ou sa provenance ?

3)

Dans la mesure où les propriétés de la denrée paraissent pouvoir s’entendre de tous les éléments qui participent de la qualité de la denrée, les considérations liées à la capacité de résistance de la denrée aux transports et aux risques de son altération durant un trajet peuvent-elles intervenir pour apprécier l’existence d’un lien avéré entre certaines propriétés de la denrée et son origine ou sa provenance pour l’application [de l’article 39, paragraphe 2] ?

4)

L’appréciation des conditions posées à l’article 39 suppose-t-elle de regarder les propriétés d’une denrée comme étant uniques du fait de son origine ou de sa provenance ou comme étant garanties du fait de cette origine ou de cette provenance et, dans ce dernier cas, nonobstant l’harmonisation des normes sanitaires et environnementales applicables au sein de l’Union européenne, la mention de l’origine ou de la provenance peut-elle être plus précise qu’une mention sous la forme “UE” ou “Hors UE” ? »

IV. Analyse

A.   Sur la première question préjudicielle

22.

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande si l’article 26 du règlement no 1169/2011, qui prévoit, notamment, que la Commission soumet au Parlement et au Conseil des rapports relatifs à l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance du lait et du lait utilisé en tant qu’ingrédient, doit être interprété en ce sens qu’il a procédé à une harmonisation spécifique des règles relatives à l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance du lait utilisé comme produit final ou en tant qu’ingrédient et si cette disposition s’oppose à ce qu’un État membre rende cette indication obligatoire en vertu de l’article 39 de ce règlement.

23.

D’emblée, il convient de relever, en premier lieu, que l’obligation pour la Commission, prévue à l’article 26, paragraphe 5, du règlement no 1169/2011, de présenter des rapports au Parlement et au Conseil concernant l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance du lait ne saurait préjuger du fait que ce règlement a ou non harmonisé les règles en matière d’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance du lait. En effet, la seule conclusion qui peut être tirée d’une telle obligation est que cette indication n’est pas actuellement obligatoire en droit de l’Union.

24.

En second lieu, il convient de souligner que l’adoption d’un acte législatif de l’Union dans un domaine de compétences partagées implique nécessairement une certaine harmonisation des législations nationales, dessaisissant ainsi les États membres de leurs compétences nationales conformément à l’article 2, paragraphe 2, TFUE. Cette harmonisation peut toutefois ne prévoir que des normes minimales ou ne porter que sur certains aspects du domaine spécifié, de sorte que les États membres peuvent continuer à se fonder, pour les autres aspects de ce domaine précis, sur leurs compétences propres pour adopter des mesures spécifiques.

25.

S’agissant de l’harmonisation réalisée par le règlement no 1169/2011 en ce qui concerne l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance des denrées alimentaires, il convient de rappeler que l’article 9 de ce règlement établit une liste des mentions obligatoires que les exploitants professionnels sont tenus de mentionner sur les étiquettes des denrées alimentaires. Outre cette liste, l’article 10 énumère les mentions obligatoires complémentaires qui doivent être indiquées, mais uniquement pour certains types ou catégories de denrées alimentaires ( 6 ).

26.

Parmi les mentions obligatoires quels que soient les types ou les catégories de denrées alimentaires concernées, l’article 9, paragraphe 1, sous i), du règlement no 1169/2011 mentionne le pays d’origine ou le lieu de provenance, mais uniquement lorsqu’une telle mention obligatoire est prévue à l’article 26 de ce règlement.

27.

Conformément à l’article 26, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011, l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance est obligatoire dans deux cas, à savoir :

dans les cas où son omission serait susceptible d’induire en erreur les consommateurs sur le pays d’origine ou le lieu de provenance réel de la denrée alimentaire, en particulier si les informations jointes à la denrée ou l’étiquette dans son ensemble peuvent laisser penser que la denrée a un pays d’origine ou un lieu de provenance différent ( 7 ) ;

pour la viande relevant des codes de nomenclature combinée (NC) énumérées à l’annexe XI, à savoir les viandes porcines, ovines, caprines ou des volailles fraîches, réfrigérées ou congelées de la position 0105.

28.

Bien que cette disposition ne précise pas si elle harmonise ou non les législations nationales relatives à l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance, le contexte dans lequel elle s’inscrit apporte un éclairage sur son champ d’application. À cet égard, il peut être relevé que le règlement no 1169/2011 comporte un chapitre VI qui est spécifiquement consacré aux mesures nationales.

29.

Il est vrai que l’article 38, paragraphe 2, de ce règlement, qui figure sous ce chapitre, dispose que, « [s]ans préjudice de l’article 39, les États membres peuvent adopter des dispositions nationales concernant des questions qui ne sont pas expressément harmonisées par le présent règlement, pour autant que ces mesures n’aient pas pour effet d’interdire, d’entraver ou de restreindre la libre circulation des marchandises qui sont conformes au présent règlement ». Toutefois, l’article 38, paragraphe 1, dudit règlement précise, à l’inverse, que, « [p]our ce qui concerne les questions expressément harmonisées par le présent règlement, les États membres ne peuvent ni adopter ni conserver des mesures nationales, sauf si le droit de l’Union l’autorise ». Bien que le sens exact de l’expression « sans préjudice de l’article 39 » dans ce contexte ne soit peut-être pas tout à fait clair, je pense que les mesures visées à l’article 39 (à savoir celles régissant les mentions obligatoires complémentaires sur les étiquettes des denrées alimentaires) ne sont pas affectées par l’article 38, paragraphe 2 ( 8 ).

30.

Il en résulte donc que l’article 38, qui sert d’introduction au chapitre VI, se borne à reconnaître que certaines dispositions ne procèdent qu’à une harmonisation partielle tandis que d’autres dispositions procèdent à une harmonisation complète des mentions relatives à l’étiquetage des denrées alimentaires, et à spécifier les conséquences de chaque situation. La difficulté d’interprétation ainsi présentée tient au fait que l’article 38 ne précise pas quelles dispositions relèvent de l’une ou l’autre de ces deux situations.

31.

En revanche, les dispositions de l’article 39 du règlement no 1169/2011 me semblent déterminantes. En effet, le premier paragraphe de cet article indique expressément que les États membres peuvent, sous certaines conditions, adopter des mesures exigeant des mentions obligatoires complémentaires pour des types ou catégories spécifiques de denrées alimentaires. Interpréter cette disposition en ce sens qu’elle n’harmonise pas pleinement les conditions dans lesquelles les États membres peuvent adopter des mentions obligatoires complémentaires permettraient donc la mise en œuvre de mesures nationales ne respectant pas l’article 39, compromettant ainsi totalement l’effet utile de cette disposition. Il s’ensuit que le règlement no 1169/2011 doit nécessairement être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que les États membres introduisent des mentions obligatoires en se fondant sur leurs compétences propres, de manière entièrement autonome.

32.

Cette conclusion est corroborée par les objectifs poursuivis par le règlement no 1169/2011. Il ressort, en effet, des considérants 6 et 9 dudit règlement que l’un des objectifs de ce règlement était simplement de consolider la réglementation existante qui résultait de la directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 mars 2000, relative au rapprochement des législations des États membres concernant l’étiquetage et la présentation des denrées alimentaires ainsi que la publicité faite à leur égard ( 9 ). Étant donné que l’article 3, paragraphe 1, de cette directive précise que « [l’]étiquetage des denrées alimentaires comporte [...] les seules mentions obligatoires [auxquelles cette disposition se réfère] » ( 10 ), il peut être déduit desdits considérants que le règlement no 1169/2011 a, à tout le moins, maintenu le principe selon lequel les États membres ne jouissent plus d’une compétence purement autonome pour décider des mentions qui seront rendues obligatoires.

33.

En outre, selon les considérants 13 et 14 du règlement no 1169/2011, « [p]our que les mesures de l’Union et les mesures nationales régissant l’information sur les denrées alimentaires reposent sur un cadre clair et une base commune, il convient [en particulier] d’établir des définitions, principes, exigences et procédures communs [ainsi qu’u]ne approche exhaustive [...] de l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires qu’ils consomment » ( 11 ). L’emploi de l’adjectif « exhaustif » est assez explicite.

34.

Tout cela me paraît suffisant pour illustrer le fait que tant le contexte que les objectifs de l’article 26 du règlement no 1169/2011 démontrent que ce règlement a harmonisé les législations nationales des États membres en matière de mentions obligatoires. Cette harmonisation n’est toutefois pas exhaustive, les États membres demeurant libres d’adopter des mentions obligatoires complémentaires, mais uniquement dans les conditions fixées par ce règlement ( 12 ).

35.

S’agissant de l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance, étant donné que l’article 26, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 précise les cas dans lesquels, conformément à l’article 9 de ce règlement, les exploitants du secteur alimentaire doivent ajouter cette mention sur les étiquettes alimentaires, cette disposition doit dès lors être interprétée comme ayant harmonisé au moins les conditions dans lesquelles certaines mentions peuvent être rendues obligatoires. Par conséquent, les États membres sont dessaisis de leur compétence nationale pour légiférer sur de telles indications selon leurs propres modalités ( 13 ). Toutefois, l’article 39 de ce règlement redélègue une partie des compétences préemptées par l’effet de l’article 2, paragraphe 2, TFUE en attribuant compétence aux États membres pour adopter leurs propres indications obligatoires, sous réserve du respect des conditions prévues par cette disposition ( 14 ).

36.

Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument soulevé par certaines parties au principal, selon lequel l’harmonisation opérée par le règlement no 1169/2011 ne concerne pas l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance, dès lors qu’une telle mention serait nécessaire pour assurer la traçabilité des denrées alimentaires et de leurs ingrédients. En effet, outre le fait que je ne vois aucun élément étayant un tel argument dans le libellé du règlement no 1169/2011, la nécessité d’assurer la traçabilité des produits alimentaires n’est pas en soi incompatible avec l’absence d’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance des denrées alimentaires. En effet, l’article 3, paragraphe 15, du règlement général sur la législation alimentaire ( 15 ) définit la traçabilité comme « la capacité de retracer, à travers toutes les étapes de la production, de la transformation et de la distribution, le cheminement d’une denrée alimentaire, d’un aliment pour animaux, d’un animal producteur de denrées alimentaires ou d’une substance destinée à être incorporée ou susceptible d’être incorporée dans une denrée alimentaire ou un aliment pour animaux ». La traçabilité n’exige donc pas la mention explicite du pays d’origine ou du lieu de provenance sur l’étiquetage, celle‑ci pouvant être réalisée, par exemple, au moyen d’un code d’identification ( 16 ).

37.

En l’absence d’une exclusion explicite du lait de l’harmonisation opérée par le règlement no 1169/2011, il y a lieu de considérer que ce dernier s’applique à l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance du lait. Il est vrai que l’article 26, paragraphe 2, sous a), du règlement no 1169/2011 prévoit que l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance est obligatoire lorsque le fait de ne pas l’indiquer pourrait induire le consommateur en erreur quant au véritable pays d’origine ou lieu de provenance de la denrée alimentaire. Toutefois, cette disposition ne saurait être interprétée, comme le suggère certaines parties, comme conférant aux États membres la faculté d’exiger l’indication du pays d’origine ou de provenance du lait en toutes circonstances. En effet, cette disposition n’habilite pas les États membres à adopter des mesures dérogatoires générales. Elle précise que les exploitants du secteur alimentaire sont tenus d’indiquer le pays d’origine ou le lieu de provenance des denrées alimentaires dans les cas où l’omission de cette indication pourrait induire le consommateur en erreur quant au véritable pays d’origine ou au lieu de provenance de la denrée alimentaire ( 17 ). En outre, il peut être déduit de l’article 26, paragraphes 5 et 7, du règlement no 1169/2011, selon lesquels la Commission doit examiner la faisabilité de l’introduction d’une indication obligatoire de l’origine du lait, que, à l’heure actuelle, les exploitants du secteur alimentaire ne sont pas tenus de mentionner une telle indication, sauf dans le cas visé à l’article 26, paragraphe 2, sous a) ( 18 ).

38.

Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose de répondre à la première question de la manière suivante : l’article 26 du règlement no 1169/2011 doit être interprété en ce sens qu’il a harmonisé les conditions dans lesquelles l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance du lait utilisé en tant que produit final ou en tant qu’ingrédient peut être rendue obligatoire par les États membres. Cette disposition ne s’oppose toutefois pas à ce que les États membres rendent cette mention obligatoire sur le fondement de l’article 39 dudit règlement lorsque des considérations telles que la protection de la santé publique, les droits des consommateurs, la prévention de la fraude ou de la concurrence déloyale le justifie et lorsque les conditions prévues à cette disposition sont remplies.

B.   Sur la deuxième question préjudicielle

39.

Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande en substance si, lorsqu’une mesure exigeant l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance est justifiée en vertu de l’article 39, paragraphe 1, du règlement no 1169/2011, il convient de lire les deux critères énoncés au paragraphe 2 de cet article de manière combinée, ou si, en particulier, l’appréciation du premier critère, à savoir l’existence d’un « lien avéré », peut reposer uniquement sur des éléments subjectifs tenant à l’importance du lien que la majorité des consommateurs peut établir entre les propriétés de la denrée alimentaire et son origine ou sa provenance.

40.

Aux termes de l’article 39, paragraphe 1, du règlement no 1169/2011, les États membres peuvent exiger des mentions obligatoires en plus de celles visées à l’article 9, paragraphe 1, et à l’article 10 de ce règlement, sous réserve des exigences prévues par cette disposition. Cette disposition prévoit trois conditions pour l’adoption de mesures nationales imposant ces précisions supplémentaires, à savoir :

en premier lieu, les mentions obligatoires ne doivent concerner que certains types ou catégories spécifiques de denrées alimentaires ;

en deuxième lieu, elle peut être justifiée par au moins l’une des raisons énumérées à l’article 39, paragraphe 1, parmi lesquelles figure la protection des consommateurs ;

en troisième lieu, la mesure nationale qui l’exige doit respecter la procédure prévue à l’article 45 dudit règlement.

41.

Enfin, lorsque les mentions obligatoires concernent l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance des denrées alimentaires, l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 précise, dans sa première phrase, que « [l]es États membres ne peuvent introduire des mesures concernant [une telle indication] que s’il existe un lien avéré entre certaines propriétés de la denrée et son origine ou sa provenance » et, dans sa seconde phrase, que, « [l]orsqu’ils communiquent ces mesures à la Commission, les États membres apportent la preuve que la majorité des consommateurs attachent une importance significative à cette information ».

42.

Outre ces trois conditions explicitement énoncées à l’article 39, paragraphe 1, du règlement no 1169/2011, toute mesure nationale exigeant des mentions doit également respecter les principes généraux d’information applicables aux denrées alimentaires énoncés au chapitre II dudit règlement ainsi que les principes généraux du droit de l’Union.

43.

Aucun considérant du règlement no 1169/2011 n’est consacré à l’article 39, paragraphe 2, de ce règlement. Toutefois, la structure de cette disposition suggère déjà que celle‑ci énonce deux critères distincts. Si l’on peut admettre que certains éléments du libellé ou du contexte de cette disposition ou certains objectifs poursuivis par ce règlement pourraient permettre de considérer que l’existence d’un « lien avéré » pourrait reposer sur des éléments subjectifs relatifs à l’importance du lien que la majorité des consommateurs peut établir entre les propriétés de la denrée alimentaire et son origine ou sa provenance, je considère que la meilleure interprétation de cette disposition est qu’elle vise des éléments purement objectifs.

44.

Toute autre conclusion ouvrirait la voie, en définitive, à la possibilité de réintroduire indirectement des réglementations nationales relatives aux produits alimentaires qui auraient pour objet de faire appel aux instincts purement nationalistes, voire chauvinistes, des consommateurs. L’un des objets du projet de marché intérieur ayant été d’éliminer de telles règles (lorsque cela est possible), il est difficile de croire que le législateur de l’Union ait entendu permettre leur réintroduction détournée par le mécanisme de l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011. Malgré ce contexte déjà défavorable, il convient néanmoins d’examiner les termes de cette disposition.

45.

Premièrement, le terme « propriété » [en langue anglaise « quality »] pourrait renvoyer à un ensemble de propriétés et de caractéristiques d’un produit permettant de satisfaire les attentes des consommateurs ( 19 ). Deuxièmement, la référence faite à l’article 39, paragraphe 2, deuxième phrase, du règlement no 1169/2011 à l’avis de la majorité des consommateurs en tant qu’élément de preuve à fournir lorsqu’un État membre notifie une telle mesure à la Commission pourrait laisser penser que cette disposition se borne à préciser le moment auquel les preuves doivent être fournies. Troisièmement, le règlement no 1169/2011 indique à plusieurs reprises que les consommateurs reçoivent les informations appropriées pour leur permettre d’effectuer des « choix en connaissance de cause », y compris de nature environnementale ou éthique ( 20 ). L’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 mentionne en particulier que, « [a]u moment d’envisager d’imposer des informations obligatoires sur les denrées alimentaires et afin de permettre aux consommateurs de prendre leurs décisions en toute connaissance de cause, il convient de prendre en considération le fait que la majorité des consommateurs jugent largement nécessaires certaines informations auxquelles ils attachent une valeur importante, ou de tenir compte de tout bénéfice généralement admis par les consommateurs » ( 21 ).

46.

Pour ma part, je considère néanmoins qu’une analyse détaillée du règlement démontre que, comme je viens de l’exposer, l’intention du législateur de l’Union en formulant la première phrase était précisément d’exclure que, dans le cas de mesures spécifiques exigeant l’indication du lieu d’origine, leur adoption puisse être fondée exclusivement sur des considérations purement subjectives.

47.

La définition du terme « propriété », utilisé au pluriel, renvoie généralement aux propriétés ou caractéristiques intrinsèques du produit en cause ( 22 ). En l’espèce, il est intéressant d’observer que le terme utilisé dans la version française de l’article 39, paragraphe 2, est non pas « qualités », mais « propriétés », ce qui renvoie clairement à la propriété ou à la fonctionnalité considérée comme une caractéristique ou une partie intrinsèque de quelque chose. En outre, la première phrase de l’article 39, paragraphe 2, précise, s’agissant du lien qui doit exister entre certaines propriétés de la denrée et son origine ou sa provenance, qu’il doit être « avéré », ce qui part de la présomption implicite que ces propriétés peuvent être objectivement établies ( 23 ). Enfin, il ressort de l’article 1er, paragraphe 1, et de l’article 3, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 que les objectifs poursuivis par ce règlement sont non seulement d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs, mais également d’assurer le respect de la libre circulation des denrées alimentaires. Or, même appliquée de manière indifférenciée aux denrées alimentaires nationales et importées, l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance est de nature à porter atteinte à la libre circulation des produits, peut-être au-delà de toute autre forme de mentions non discriminatoires ( 24 ). En effet, ainsi que la Cour l’a jugé avant l’adoption de ce règlement, de telles exigences visent « à permettre aux consommateurs d’opérer une distinction entre les produits nationaux et les produits importés, et leur donnent ainsi la possibilité de faire valoir leurs préjugés éventuels contre les produits étrangers » ( 25 ).

48.

Cela signifie que l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 doit donc être compris comme imposant des conditions supplémentaires à l’adoption de mesures exigeant l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance. Cette disposition a, en effet, pour objet d’assurer un juste équilibre entre les deux objectifs poursuivis par le règlement no 1169/2011 qui sont, d’une part, d’assurer aux consommateurs une information appropriée qui lui permette de faire des choix en connaissance de cause, sûrs, sains et durables et, d’autre part, d’assurer le respect de la libre circulation en matière de denrées alimentaires. Ces conditions visent à limiter les justifications qui peuvent être avancées à l’appui d’une telle mesure et à imposer un lien de proportionnalité plus strict entre les deux ( 26 ).

49.

Si l’on revient maintenant aux dispositions de l’article 39 du règlement no 1169/2011, il s’ensuit, à son tour, que le paragraphe 1 de cet article énonce les raisons d’intérêt général susceptibles de justifier des mesures nationales imposant des mentions obligatoires complémentaires pour des types ou catégories spécifiques de denrées alimentaires. Toutefois, en ce qui concerne les indications relatives au lieu d’origine, le paragraphe 2 dudit article impose deux conditions plus strictes, à savoir, d’une part, l’existence d’un lien avéré entre certaines propriétés de la denrée alimentaire et son origine ou sa provenance et, d’autre part, la preuve que la majorité des consommateurs attachent une importance significative à cette information ( 27 ).

50.

Eu égard au libellé et à l’économie de l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 ainsi qu’à l’objectif spécifique qu’il poursuit, j’estime donc que les première et deuxième conditions sont distinctes et cumulatives ( 28 ). En particulier, l’exigence d’un lien avéré entre les propriétés de la denrée alimentaire et son origine ou sa provenance ne saurait être satisfaite sur la seule base d’éléments purement subjectifs, relatifs à l’importance du lien que la majorité des consommateurs attachent à cette caractéristique.

51.

Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments avancés par les gouvernements français et italien selon lesquels, si l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 devait être interprété comme posant deux conditions distinctes, cette disposition serait privée de tout effet utile, notamment parce que les seules mesures nationales susceptibles de remplir ces deux conditions se heurteraient à l’harmonisation exhaustive réalisée par le règlement (CE) no 1151/2012 ( 29 ).

52.

Il est vrai qu’en interprétant l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 en ce sens qu’il exige non seulement l’existence d’un lien avéré entre certaines propriétés de la denrée alimentaire et son origine ou sa provenance, mais également que la majorité des consommateurs attachent une importance significative à cette information, la portée de cette disposition peut sembler assez limitée. Toutefois, cette disposition ne s’appliquant qu’aux mesures exigeant l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance, il paraît logique d’interpréter cette disposition comme ayant un champ d’application limité. Toutefois, contrairement à ce que soutiennent certaines parties, interpréter cette disposition comme énonçant deux conditions distinctes ne prive pas cet article de tout effet utile. Même si la barre a été placée très haute, elle n’est pas infranchissable.

53.

Quant à l’harmonisation réalisée par le règlement no 1151/2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires, celui‑ci ne s’oppose pas à l’adoption de mesures d’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance. Bien que ce règlement prévoit un régime de protection uniforme et exhaustif des indications géographiques qualifiées utilisées pour désigner des produits pour lesquels il existe un lien spécifique entre leurs propriétés et leur provenance géographique ( 30 ), cette harmonisation ne concerne que l’utilisation de certaines dénominations afin de désigner des produits ( 31 ). Tel n’est pas le cas de l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance.

54.

À la lumière des considérations qui précèdent, je propose de répondre à la deuxième question préjudicielle qu’il convient d’interpréter l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 en ce sens qu’il énonce deux critères distincts. Dès lors, l’appréciation du premier critère relatif à l’existence d’un lien avéré ne saurait être fondée sur une appréciation purement subjective relative à l’importance du lien que la majorité des consommateurs peut établir entre les propriétés de la denrée alimentaire et son origine ou sa provenance. L’article 39, paragraphe 2, de ce règlement exige au contraire que les denrées alimentaires concernées qui proviennent de certains pays ou lieux de provenance possèdent des propriétés ou des caractéristiques objectives qui les différencient de celles ayant une autre origine.

C.   Sur la troisième question préjudicielle

55.

Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande si l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 doit être interprété en ce sens que des considérations liées à la capacité de résistance de la denrée alimentaire aux transports et aux risques de son altération durant un trajet peuvent être prises en compte lors de l’examen de l’existence d’un lien avéré entre certaines propriétés de cette denrée alimentaire et son origine ou sa provenance, aux fins de l’application de cette disposition.

1. Recevabilité

56.

Il ne ressort pas d’emblée du dossier transmis à la Cour que les autorités françaises aient fait état de considérations liées à la capacité de résistance du lait aux transports pour justifier le décret litigieux lors de sa notification à la Commission préalablement à son adoption. Par ailleurs, dans ses observations écrites, le gouvernement français a avancé une autre explication, à savoir que ce décret a été adopté « [a]fin de répondre à la forte attente exprimée par les consommateurs en faveur d’un étiquetage de l’origine du lait » après « des scandales tels que celui de la viande de cheval utilisée frauduleusement à la place de la viande bovine » et que « [l]’obligation de mentionner l’origine permettait d’améliorer la transparence et la traçabilité le long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire de sorte à lutter plus efficacement contre la fraude alimentaire et à rétablir la confiance des consommateurs ».

57.

Toutefois, il convient de relever que les questions préjudicielles posées à la Cour bénéficient d’une présomption de pertinence. Le refus de la Cour de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation ou l’appréciation de validité d’une règle de l’Union sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées ( 32 ).

58.

En l’occurrence, la juridiction de renvoi ne semble pas exclure que des considérations liées à la capacité de résistance du lait aux transports aient pu être prises en compte par le législateur national lors de l’adoption de ce décret. La Cour n’étant pas compétente pour interpréter le droit national – et donc pour déterminer si les objectifs poursuivis par le décret litigieux sont bien ceux visés par la question posée –, j’estime que celle‑ci devrait être considérée comme recevable.

2. Sur le fond

59.

Eu égard à ma conclusion concernant la deuxième question préjudicielle, il convient de rappeler d’emblée que l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 établit deux critères pour l’adoption d’une mesure nationale exigeant l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance des denrées alimentaires par un État membre. Selon le premier critère, une telle indication ne peut être adoptée que s’il existe un lien avéré entre certaines propriétés de la denrée alimentaire et son origine ou sa provenance.

60.

S’agissant de la notion de « propriétés », ainsi qu’il a déjà été relevé, ce terme se réfère aux caractéristiques d’une chose, telles que, en agronomie, les caractéristiques physiques, nutritionnelles, organoleptiques et, en particulier, les caractéristiques gustatives d’une denrée alimentaire.

61.

Dans la mesure où l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 utilise l’expression « certaines propriétés », sans préciser quelles peuvent être ces caractéristiques, j’estime que cette disposition s’applique à tous les cas dans lesquels il est possible d’identifier un lien entre l’une des caractéristiques d’une denrée alimentaire et son origine ou sa provenance. Dans ce contexte, la capacité de résistance de la denrée alimentaire à son transport pourrait être considérée comme l’une des propriétés de cette denrée ( 33 ).

62.

Toutefois, afin de satisfaire au premier critère prévu à l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011, il doit exister un lien entre la propriété mentionnée par la juridiction de renvoi dans sa question, à savoir la capacité de résistance de la denrée alimentaire au transport, d’une part, et son origine ou sa provenance, d’autre part. En ce qui concerne ce dernier critère, une telle propriété n’est pas, en général, spécifique à son origine. Ainsi, à titre d’exemple, dans le cas de certains fruits ou légumes spécifiques, les techniques de production utilisées en agriculture peuvent éventuellement influencer leur aptitude à résister au transport. En revanche, s’agissant du lait, sa capacité à résister au transport, de telle sorte que sa qualité ne soit pas altérée, ne saurait, du moins dans des circonstances modernes, varier en fonction du lieu de production. On peut ainsi présumer – assurément en l’absence de tout élément en sens contraire – que le lait produit en France ou le lait produit en Belgique ont la même capacité de résister à leur transport.

63.

Il est vrai que d’autres propriétés d’une denrée alimentaire, à commencer par sa saveur, peuvent être affectées par son transport. Dans la mesure où ce transport peut prendre plus ou moins de temps en fonction de l’origine de la denrée, il peut donc exister un lien entre l’origine de celle‑ci et certaines de ses qualités. Toutefois, afin de satisfaire au premier critère énoncé à l’article 39 du règlement no 1169/2011 (à savoir l’existence d’un lien avéré entre certaines propriétés de cette denrée et son origine ou sa provenance), encore faut-il qu’il soit établi que le transport d’une denrée alimentaire déterminée présente des risques objectifs de détérioration de certaines de ses propriétés. Dans le cas du lait, compte tenu du second critère, cette altération doit affecter certaines de ses propriétés qu’une majorité de consommateurs apprécie.

64.

En outre, les États membres sont tenus, lorsqu’ils agissent dans le champ d’application du droit de l’Union ( 34 ) et, partant, lors de la mise en œuvre de l’article 39 du règlement no 1169/2011, de respecter les principes généraux du droit de l’Union, y compris le principe de proportionnalité. Conformément à cela, les mesures que les États membres ont la faculté d’adopter doivent être aptes à réaliser l’objectif visé et ne pas aller au‑delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre. Cela implique notamment que lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante ( 35 ). Enfin, il convient de souligner qu’une législation nationale n’est propre à garantir la réalisation de l’objectif invoqué que si elle répond véritablement au souci de l’atteindre d’une manière cohérente et systématique ( 36 ).

65.

S’agissant du lait, même s’il est admis que certaines de ses propriétés pourraient être affectées par le transport, cela ne semble être vrai que dans le cas du lait « frais » (cru ou pasteurisé). Dans la mesure où il ressort du dossier que le décret litigieux s’applique indistinctement à tous les types de lait, tant « frais » que « Ultra-Haute Température » (UHT), il semblerait que celui‑ci aille au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif invoqué par la juridiction de renvoi.

66.

Si, néanmoins, il peut être scientifiquement établi que certaines propriétés, qu’elles soient physiques, nutritionnelles, organoleptiques ou gustatives, du lait, y compris du lait UHT, sont susceptibles d’être altérées par son transport et si les consommateurs attachent de l’importance à ces propriétés spécifiques – comme cela a été expliqué dans le cadre de l’examen de la deuxième question –, les considérations liées à la capacité de résistance de la denrée alimentaire au transport et aux risques de son altération durant un trajet pourraient être prises en compte.

67.

Il est certes vrai que, dans le cas du lait « frais », la question de sa fraîcheur est elle‑même liée – de manière plus ou moins importante selon le type de lait en cause – à la distance parcourue par le lait entre le lieu de production et le marché ( 37 ). Dans ce contexte, je ne peux toutefois m’empêcher de relever que l’article 3-III du décret litigieux prévoit que, pour le lait qui a été produit dans n’importe quel autre État membre à l’exception de la France, l’indication d’origine peut revêtir la forme : « Origine : UE ». En revanche, l’article 3-IV mentionne que, lorsque le lait ou le lait utilisé en tant que composant dans des produits laitiers a été collecté, conditionné ou transformé dans un ou plusieurs États membres non membres de l’Union européenne, l’indication d’origine peut prendre la forme : « Origine : Hors UE ».

68.

Dans la mesure où l’alternative prévue par ces dispositions, « France », « UE » ou « Hors UE », n’est pas suffisamment précise pour que le consommateur puisse apprécier, même indirectement, la distance parcourue par le lait, il semblerait que le décret litigieux ne soit pas conforme à l’objectif invoqué par le gouvernement français à titre de justification, à savoir celui d’informer les consommateurs du risque d’altération du lait au cours du trajet.

69.

En particulier, il pourrait donc être considéré que, dans sa forme actuelle, le décret litigieux méconnaît le critère de proportionnalité en ce qu’il ne satisfait pas à l’objectif d’informer les consommateurs d’un éventuel lien entre le transport prolongé du lait et les propriétés de ce lait d’une manière cohérente et systématique ( 38 ). Il en va d’autant plus ainsi que, selon l’article 6 du décret litigieux, les produits laitiers légalement produits dans un autre État membre ne sont pas soumis aux dispositions de ce décret. Ainsi, par exemple, le fromage produit en Italie avec du lait allemand et commercialisé ensuite en France n’est pas concerné.

70.

La Cour n’étant toutefois pas compétente, en vertu de l’article 267 TFUE, pour appliquer une règle du droit de l’Union à un cas d’espèce et, par extension, pour apprécier la validité d’une réglementation nationale au regard d’une telle règle, il appartient à la seule juridiction de renvoi de vérifier, à la lumière de toute autre explication avancée par le gouvernement français, si les quatre conditions mentionnées au point 64 des présentes conclusions sont remplies.

71.

Dans ces conditions, je propose de répondre à la troisième question que l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 doit être interprété en ce sens que des considérations liées à la capacité de résistance de la denrée alimentaire aux transport et aux risques de son altération durant un trajet peuvent être prises en compte lors de l’examen du lien avéré entre certaines propriétés de cette denrée alimentaire et son origine ou sa provenance aux fins de l’application dudit article 39, paragraphe 2, si, premièrement, il est établi que le lait peut s’abîmer au cours du transport, deuxièmement, si cette altération est susceptible d’affecter certaines propriétés du lait appréciées par une majorité des consommateurs, troisièmement, si une telle exigence est plus simple à mettre en œuvre que toute autre mesure qui aurait pu être plus directement liée à la distance parcourue ou au moment du transport du lait, et, quatrièmement, si la mesure nationale poursuit de manière cohérente et systématique l’objectif d’informer les consommateurs des risques pour les propriétés des denrées alimentaires associés à leur transport.

D.   Sur la quatrième question préjudicielle

72.

Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi demande si l’appréciation des critères prévus à l’article 39 du règlement no 1169/2011 présuppose que les propriétés de la denrée alimentaire soient considérées comme uniques en raison de leur origine ou garanties en raison de cette origine et, dans ce dernier cas, si l’indication de l’origine ou de la provenance doit être plus précise qu’une indication sous la forme « UE » ou « Hors UE », nonobstant l’harmonisation des normes sanitaires et environnementales applicables au sein de l’Union.

73.

À cet égard, ainsi que je l’ai exposé précédemment dans le cadre de la réponse à la deuxième question, l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 pose deux critères distincts tenant, d’une part, à l’existence d’un lien avéré entre certaines propriétés de la denrée alimentaire et son origine ou sa provenance et, d’autre part, à la nécessité pour les États membres d’apporter la preuve que cette information revêt une importance significative pour la majorité des consommateurs.

74.

Le lien entre certaines propriétés de la denrée alimentaire et son origine devant être « avéré », le premier critère exige que les denrées alimentaires ayant une certaine origine possèdent normalement certaines propriétés spécifiques à cette origine. Toutefois, le libellé de l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 n’exige pas que ces propriétés soient uniques, en ce sens qu’elles sont spécifiques à un seul pays, et il n’est pas non plus nécessaire que l’État membre qui exige cette mention figure parmi les pays dont les denrées alimentaires possèdent de telles propriétés.

75.

Toutefois, pour qu’une telle mesure soit conforme au principe de proportionnalité, comme le souligne en substance l’article 39, paragraphe 2, dudit règlement, non seulement il est nécessaire que les consommateurs attachent majoritairement une importance significative aux propriétés spécifiques aux denrées alimentaires en provenance de certains pays ou de certains lieux, mais encore faut-il qu’ils puissent les associer à certains pays ou certains lieux. Dans le cas contraire, l’indication du pays ou du lieu d’origine ne remplirait pas sa fonction, qui est, aux termes de l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 1169/2011, de fournir au consommateur une base pour prendre une décision en connaissance de cause.

76.

S’agissant du degré de certitude qu’il convient d’accorder à la présence de ces propriétés particulières dans les denrées alimentaires en provenance d’un pays ou d’un lieu de provenance déterminé, j’estime qu’il suffit qu’il soit établi que les conditions particulières de production, notamment les conditions techniques ou climatiques qui s’appliquent généralement dans le pays concerné, sont liées à de telles propriétés. Dès lors, je pense que les propriétés des denrées alimentaires provenant d’un groupe déterminé de pays ou de régions géographiques pourraient être spécifiques en raison de leur origine sans être nécessairement garanties en raison de cette origine.

77.

Dans la mesure où ces propriétés peuvent être la conséquence de facteurs tels que le climat, les propriétés du sol ou des normes de production applicables, l’indication de l’origine ou de la provenance pourrait être plus précise qu’une indication sous la forme « UE » ou « Hors UE », nonobstant l’harmonisation des normes sanitaires et environnementales applicables au sein de l’Union.

78.

Même lorsque ces qualités découlent de la norme de production applicable, l’harmonisation peut, comme en l’espèce, laisser aux États membres une certaine marge d’appréciation pour adopter des mesures spécifiques. En effet, cette harmonisation peut ne pas être exhaustive, comme le suggère la présente question, mais couvrir uniquement les questions liées à la santé et à l’environnement, alors que les normes nationales appliquées peuvent poursuivre d’autres objectifs, tels que la garantie d’un certain degré d’excellence de la denrée alimentaire. Aussi, afin d’encourager une « course vers le haut », les consommateurs devraient être en mesure d’identifier l’origine d’une denrée alimentaire possédant une propriété à laquelle ils attachent une valeur importante, lorsqu’il est bien établi que certains États membres appliquent des normes de production plus élevées.

79.

En conséquence, lorsque les propriétés spécifiques d’une denrée sont liées à des facteurs climatiques ou se rapportent aux propriétés du sol ou aux normes de production appliquées, un État membre peut, sur la base de l’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 rendre obligatoire l’indication du pays d’origine afin de permettre aux consommateurs intéressés par ces propriétés de faire un choix en connaissance de cause. Toutefois, s’il s’avère que les propriétés des denrées alimentaires recherchées par les consommateurs sont garanties par l’application de normes de production pleinement harmonisées dans l’Union, un État membre ne peut rien exiger d’autre que l’indication « UE/Hors UE ». En effet, une indication plus précise serait nécessairement inutile et, partant, irait au-delà de ce qui est nécessaire, contrairement à ce qu’exige le principe de proportionnalité.

80.

En ce qui concerne le lait, même si la question ne porte pas spécifiquement sur cette denrée alimentaire, je ne suis pas totalement convaincu que l’harmonisation opérée par le droit de l’Union tienne pleinement compte de l’ensemble des conditions de la production laitière qui dépendent, entre autres, de l’alimentation des vaches ainsi que de leur bien-être général. En effet, j’observe, par exemple, que le règlement no 178/2002, sur lequel Lactalis fonde ses observations, se borne à énoncer, comme le mentionne l’article 1er, paragraphe 2, de ce règlement, certains principes généraux que les États membres doivent respecter. De même, l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 98/58/CE ( 39 ) précise que celle‑ci ne fixe que les normes minimales relatives à la protection des animaux dans les élevages ( 40 ). D’autres instruments réglementaires, tels que le règlement (CE) no 853/2004 ( 41 ), prévoient la possibilité pour les États membres d’adopter des mesures dérogatoires ( 42 ). Par ailleurs, lors de l’audience, la Commission a confirmé que la réglementation applicable à la production laitière n’était pas complètement harmonisée.

81.

Eu égard à ce qui précède, j’estime qu’il convient de répondre à la quatrième question que l’article 39 du règlement no 1169/2011 exige seulement que les propriétés des denrées alimentaires provenant d’un groupe déterminé de pays ou de régions géographiques puissent être spécifiques en raison de leur origine sans que ces propriétés soient nécessairement garanties en raison de cette origine. Cette disposition ne s’oppose pas nécessairement à ce qu’un État membre impose une indication obligatoire supplémentaire relative au lieu de production qui soit plus précise que la simple indication « UE » ou « Hors UE », nonobstant l’harmonisation des normes sanitaires et environnementales applicables au sein de l’Union.

V. Conclusion

82.

Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le Conseil d’État (France) comme suit :

1)

L’article 26 du règlement (UE) no 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires doit être interprété en ce sens qu’il a harmonisé les conditions dans lesquelles l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance du lait utilisé en tant que produit final ou en tant qu’ingrédient peut être rendue obligatoire par les États membres. Toutefois, cette disposition ne leur interdit pas de rendre cette indication obligatoire sur le fondement de l’article 39 de ce règlement lorsque cela est justifié par des considérations telles que la protection de la santé publique, les droits des consommateurs, la prévention de la fraude ou de la concurrence déloyale et lorsque les conditions prévues à cette disposition sont remplies.

2)

L’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 doit être interprété comme énonçant deux critères distincts. Dès lors, l’appréciation du premier critère relatif à l’existence d’un lien avéré ne saurait être fondée sur des éléments subjectifs relatifs à l’importance de l’association que la majorité des consommateurs peut établir entre les propriétés de la denrée alimentaire et son origine ou sa provenance, mais exige que les denrées alimentaires concernées qui proviennent de certains pays ou de certains lieux de provenance possèdent certaines propriétés ou certaines caractéristiques objectives qui les différencient des denrées alimentaires ayant une autre origine.

3)

L’article 39, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 doit être interprété en ce sens que des considérations liées à la capacité de résistance de la denrée alimentaire aux transports et aux risques de son altération durant un trajet peuvent être prises en compte lors de l’examen du lien avéré entre certaines propriétés de cette denrée et son origine ou sa provenance aux fins de l’application de l’article 39, paragraphe 2, de ce même règlement si, premièrement, il est établi que le lait peut s’abîmer en cours de transport, deuxièmement, que cette altération est de nature à affecter certaines propriétés du lait qu’une majorité des consommateurs apprécie, troisièmement, qu’une telle exigence est plus simple à mettre en œuvre que toute autre mesure susceptible d’être davantage liée à la distance parcourue ou au temps de transport du lait et quatrièmement, que l’objectif d’information des consommateurs sur les risques pour les propriétés des denrées alimentaires associés à leur transport est poursuivi par la mesure nationale de manière cohérente et systématique.

4)

L’article 39 du règlement no 1169/2011 exige seulement que les propriétés des denrées alimentaires provenant d’un groupe déterminé de pays ou de régions géographiques puissent être spécifiques en raison de leur origine sans nécessairement que ces propriétés soient garanties en raison de cette origine. Cette disposition ne s’oppose pas nécessairement à ce qu’un État membre impose une indication complémentaire relative au lieu de production qui soit plus précise que la simple indication « UE » ou « Hors UE », nonobstant l’harmonisation des normes sanitaires et environnementales applicables au sein de l’Union.


( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) Modifiant les règlements (CE) no 1924/2006 et (CE) no 1925/2006 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 87/250/CEE de la Commission, la directive 90/496/CEE du Conseil, la directive 1999/10/CE de la Commission, la directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil, les directives 2002/67/CE et 2008/5/CE de la Commission et le règlement (CE) no 608/2004 de la Commission (JO 2011, L 304, p. 18).

( 3 ) Voir, notamment, arrêt du 17 juin 1981, Commission/Irlande (113/80, EU:C:1981:139).

( 4 ) JO 1992, L 208, p. 1.

( 5 ) Lactalis et la Commission soutiennent toutes deux, toutefois, que le projet de version du décret litigieux notifié à la Commission n’était pas identique à la version finale.

( 6 ) À cet égard, il résulte des situations envisagées à l’annexe III du règlement no 1169/2011, à laquelle l’article 10 fait référence, que la notion de « types ou catégories spécifiques de denrées alimentaires » doit être interprétée comme incluant les méthodes de production et la composition des denrées alimentaires.

( 7 ) Voir article 26, paragraphe 2, sous a), de ce règlement. L’article 26, paragraphe 3, du règlement no 1169/2011 précise que, lorsque le pays d’origine ou le lieu de provenance des denrées alimentaires est indiqué et qu’il n’est pas le même que celui de son ingrédient primaire, le pays d’origine ou le lieu de provenance de cet ingrédient primaire doit également être indiqué ou le pays d’origine ou être indiqué comme étant autre que celui de la denrée alimentaire. Le champ d’application de cette disposition a été précisé dans le règlement d’exécution (UE) 2018/775 de la Commission, du 28 mai 2018, portant modalités d’application de l’article 26, paragraphe 3, du règlement no 1169/2011 (JO 2018, L 131, p. 8). Toutefois, dans la mesure où ce dernier est d’un rang inférieur, celui‑ci ne saurait être pris en compte lors de l’interprétation du champ d’application de l’article 26.

( 8 ) Selon moi, cette expression doit être comprise comme indiquant simplement que, bien que les situations visées à l’article 39 relèvent d’un domaine harmonisé, les États membres peuvent néanmoins adopter des mesures nationales s’ils remplissent les conditions fixées par cette disposition.

( 9 ) JO 2000, L 109, p. 29.

( 10 ) Mise en italique par mes soins. La liste des mentions indiquées à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2000/13 est la même, avec quelques ajouts, que celle prévue à l’article 9 du règlement no 1169/2011.

( 11 ) Mise en italique par mes soins.

( 12 ) Au passage, on peut noter que la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires [COM(2008) 40 final] semble confirmer que le règlement no 1169/2011 vise à harmoniser les conditions en vertu desquelles certaines mentions pourraient être rendues obligatoires. En effet, cette proposition indiquait que « [l]’absence d’harmonisation des réglementations entraverait le bon fonctionnement du marché intérieur, appauvrirait les informations fournies et réduirait le niveau de protection du consommateur » (p. 6). Par conséquent, l’abrogation des « règles harmonisées » n’était pas considérée comme une approche viable. Au contraire, « l’indication obligatoire, que volontaire en tant qu’outil de promotion des ventes, du pays d’origine ou du lieu de provenance des denrées alimentaires, ne doit pas tromper le consommateur et doit se fonder sur des critères harmonisés » (p. 8). En conséquence, « [i]l est proposé d’harmoniser le cadre réglementaire des dispositions horizontales relatives à l’étiquetage des denrées alimentaires, et de contribuer ainsi à la protection des consommateurs en veillant à ce que ceux‑ci reçoivent des informations adéquates leur permettant d’opérer des choix éclairés, sûrs, durables et bénéfiques pour la santé » (p. 11).

( 13 ) Dès lors que le règlement no 1169/2011 harmonise les règles nationales relatives aux mentions obligatoires et prévoit, à son article 45, une procédure spécifique lorsqu’un État membre souhaite prévoir d’autres mentions obligatoires, j’estime que le règlement (CE) no 764/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 9 juillet 2008, établissant les procédures relatives à l’application de certaines règles techniques nationales à des produits commercialisés légalement dans un autre État membre et abrogeant la décision no 3052/95/CE (JO 2008, L 218, p. 21) n’est pas applicable en l’espèce.

( 14 ) D’ailleurs, le fait que le règlement no 1169/2011 harmonise le domaine des mentions obligatoires, tout en laissant aux États membres la possibilité de prévoir d’autres mentions obligatoires, semble correspondre au libellé de l’article 1er, paragraphe 2, dudit règlement, qui mentionne que « [ce règlement] fixe les dispositifs garantissant le droit des consommateurs à l’information et les procédures d’information sur les denrées alimentaires, tout en tenant compte de la nécessité de prévoir une souplesse suffisante permettant de répondre aux évolutions futures et aux nouvelles exigences en matière d’information » (mise en italique par mes soins).

( 15 ) Règlement (CE) no 178/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2002, établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l’Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires (JO 2002, L 31, p. 1).

( 16 ) Voir, également, article 18, paragraphe 2, du règlement général sur la législation alimentaire.

( 17 ) Il est vrai que l’article 26, paragraphe 2, sous a), utilise les termes « en particulier » pour préciser que l’indication du pays d’origine est obligatoire « si les informations jointes à la denrée ou l’étiquette dans son ensemble peuvent laisser penser que la denrée a un pays d’origine ou un lieu de provenance différent », ce qui implique que le champ d’application de cette disposition ne se limite pas au cas dans lequel les informations accompagnant la denrée alimentaire ou l’étiquette sont trompeuses. Toutefois, je ne pense pas que l’on puisse en déduire qu’une telle indication serait également obligatoire en l’absence de tout risque de confusion. Je comprends plutôt la nécessité d’utiliser les termes « en particulier » en ce sens que les informations trompeuses peuvent être liées à la denrée alimentaire ou à l’étiquette, mais pas exclusivement. Par exemple, certaines marques peuvent également susciter une telle confusion.

( 18 ) Voir, également, dernière phrase du considérant 32 du règlement no 1169/2011.

( 19 ) Par exemple, la norme ISO 9000:2000 définit en langue anglaise le terme « quality » comme la capacité d’un ensemble de caractéristiques intrinsèques à satisfaire les exigences.

( 20 ) Voir article 3, paragraphe 1, et considérant 4 du règlement no 1169/2011.

( 21 ) Voir article 4, paragraphe 2, et, en ce sens, considérants 16 et 18. Dès lors que cette disposition énonce un principe général de la législation alimentaire, je comprends qu’elle s’adresse aux États membres, lorsqu’ils font usage de l’article 39, ainsi qu’à la Commission, lorsqu’elle fait usage du pouvoir que lui a délégué le législateur de l’Union à l’article 10, paragraphe 2, pour modifier la liste des mentions obligatoires complémentaires.

( 22 ) Ce terme pourrait ainsi être compris comme se référant aux attributs physiques, nutritionnelles, organoleptiques et, en particulier, gustatifs d’une denrée alimentaire.

( 23 ) S’agissant de l’article 4, paragraphe 2, celui‑ci figure au chapitre II du règlement no 1169/2011, qui est consacré, comme son titre l’indique, aux principes généraux de l’information sur les denrées alimentaires. Cette disposition posant un principe général d’information sur les denrées alimentaires, la règle qu’elle établit peut faire l’objet d’exceptions.

( 24 ) Pour autant que des mesures nationales imposant une obligation d’information sur l’origine ou la provenance des marchandises s’appliquent indistinctement à toutes les marchandises, elles ne constituent pas des discriminations directes, mais des mesures qui peuvent avoir un effet équivalent à une restriction quantitative. Voir, en ce sens, arrêt du 25 avril 1985, Commission/Royaume‑Uni (207/83, EU:C:1985:161, point 17). En l’espèce, le décret litigieux ne s’applique pas aux produits transformés en dehors de l’Union. Toutefois, la Cour a jugé que « l’application de [mesures nationales], serait-elle limitée aux seuls producteurs nationaux, crée et maintient par elle‑même une différence de traitement entre ces deux catégories de marchandises entravant, au moins potentiellement, le commerce intracommunautaire », puisqu’elle favorise l’achat par les transformateurs nationaux de marchandises produites localement, en l’occurrence du lait. Voir, en ce sens, arrêt du 7 mai 1997, Pistre e.a. (C‑321/94 à C‑324/94, EU:C:1997:229, point 45).

( 25 ) Arrêt du 25 avril 1985, Commission/Royaume‑Uni (207/83, EU:C:1985:161, point 17).

( 26 ) Par exemple, alors que l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1169/2011 dispose que, au moment d’envisager d’imposer des informations obligatoires sur les denrées alimentaires, les États membres ne sont tenus de prendre en considération que le fait que la majorité des consommateurs jugent largement nécessaires certaines informations auxquelles ils attachent une valeur importante, ou de tenir compte de tout bénéfice généralement admis par les consommateur, dans le cas spécifique où ces informations obligatoires sont le pays d’origine ou le lieu de provenance, les États membres doivent également fournir la preuve que la majorité des consommateurs attachent une valeur importante à la fourniture de ces informations.

( 27 ) Plus précisément, ces deux conditions visent à empêcher que les mesures nationales exigeant l’indication du pays d’origine soient fondées sur les préjugés des consommateurs concernant les propriétés alléguées de certains produits alimentaires en provenance de certains pays, et à exclure implicitement la possibilité pour un État membre d’utiliser n’importe quelle caractéristique des denrées alimentaires comme prétexte pour exiger l’indication du pays d’origine.

( 28 ) Il est vrai que ces deux critères doivent être lus de manière combinée, mais seulement en ce sens que toute propriété pour laquelle il existe un lien avéré avec l’origine ou la provenance de la denrée alimentaire ne peut justifier l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance des denrées alimentaires, mais seulement celles qui importent aux consommateurs.

( 29 ) Règlement du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires (JO 2012, L 343, p. 1).

( 30 ) Voir, en ce sens, arrêt du 8 septembre 2009, Budějovický Budvar (C‑478/07, EU:C:2009:521, point 114).

( 31 ) Voir, par analogie, arrêt du 8 mai 2014, Assica et Kraft Foods Italia (C‑35/13, EU:C:2014:306, points 29 à 31).

( 32 ) Voir, notamment, arrêt du 16 juin 2015, Gauweiler e.a. (C‑62/14, EU:C:2015:400, point 25).

( 33 ) Bien qu’il existe des normes d’hygiène et de sécurité partiellement harmonisées au niveau de l’Union (maintien de la chaîne du froid, etc.) qui visent à préserver certaines de leurs propriétés pendant le transport, toutes les denrées alimentaires n’ont pas la même capacité de résistance au transport.

( 34 ) Voir, en ce sens, arrêt du 1er décembre 2011, Painer (C‑145/10, EU:C:2011:798, points 105 et 106).

( 35 ) Voir, notamment, arrêt du 4 mai 2016, Philip Morris Brands e.a. (C‑547/14, EU:C:2016:325, point 165 et jurisprudence citée).

( 36 ) Voir, notamment, arrêt du 14 novembre 2018, Memoria et Dall’Antonia (C‑342/17, EU:C:2018:906, point 52).

( 37 ) On peut considérer que l’indication du pays ou du lieu d’origine n’est pas nécessairement la manière la plus précise d’informer les consommateurs sur la distance parcourue par le lait entre la production et le marché. Si, par exemple, on prend le cas du lait importé de Belgique en France, la distance entre la zone de production et le lieu de sa consommation ou de son utilisation ultérieure peut dans certains cas être plus courte que dans le cas de certains laits produits ailleurs en France. Cependant, la mention obligatoire de telles informations sur l’emballage présente l’avantage d’être simple à mettre en œuvre et probablement moins onéreuse pour les exploitants commerciaux que toute autre alternative, telle qu’une donnée plus directement liée à la distance parcourue par le lait, car cette distance peut varier en fonction du circuit de distribution.

( 38 ) Voir, notamment, arrêt du mercredi 14 novembre 2018, Memoria et Dall’Antonia (C‑342/17, EU:C:2018:906, point 52).

( 39 ) Directive du Conseil du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages (JO 1988, L 221, p. 23).

( 40 ) Je comprends donc ces règles en ce sens qu’elles visent à garantir que les denrées alimentaires commercialisées sur le territoire de l’Union présentent certaines propriétés minimales plutôt que des propriétés identiques.

( 41 ) Règlement du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 fixant des règles spécifiques d’hygiène applicables aux denrées alimentaires d’origine animale (JO 2004, L 139, p. 55, et rectificatif JO 2013, L 160, p. 15).

( 42 ) Voir article 10, paragraphe 3, du règlement no 853/2004.

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