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Document 62015TJ0729

Arrêt du Tribunal (deuxième chambre) du 5 février 2018.
MSD Animal Health Innovation GmbH et Intervet international BV contre Agence européenne des médicaments.
Accès aux documents – Règlement (CE) no 1049/2001 – Documents détenus par l’EMA et soumis dans le cadre de la demande d’autorisation de mise sur le marché du médicament vétérinaire Bravecto – Décision d’accorder à un tiers l’accès aux documents – Exception relative à la protection des intérêts commerciaux – Absence de présomption générale de confidentialité.
Affaire T-729/15.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2018:67

 ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

5 février 2018 ( *1 )

« Accès aux documents – Règlement (CE) no 1049/2001 – Documents détenus par l’EMA et soumis dans le cadre de la demande d’autorisation de mise sur le marché du médicament vétérinaire Bravecto – Décision d’accorder à un tiers l’accès aux documents – Exception relative à la protection des intérêts commerciaux – Absence de présomption générale de confidentialité »

Dans l’affaire T‑729/15,

MSD Animal Health Innovation GmbH, établie à Schwabenheim (Allemagne),

Intervet international BV, établie à Boxmeer (Pays-Bas),

représentées initialement par Me P. Bogaert, avocat, M. B. Kelly et Mme H. Billson, solicitors, Mmes J. Stratford, QC, et C. Thomas, barrister, puis par Me Bogaert, M. Kelly, Mmes Stratford et Thomas,

parties requérantes,

contre

Agence européenne des médicaments (EMA), représentée par MM. T. Jabłoński, A. Spina, S. Marino, A. Rusanov et Mme N. Rampal Olmedo, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision EMA/785809/2015 de l’EMA, du 25 novembre 2015, accordant à un tiers, en vertu du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), l’accès à des documents contenant des informations soumises dans le cadre d’une demande d’autorisation de mise sur le marché du médicament vétérinaire Bravecto,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. M. Prek (rapporteur), président, E. Buttigieg et B. Berke, juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 16 mai 2017,

rend le présent

Arrêt

Faits à l’origine du litige

1

Les requérantes, MSD Animal Health Innovation GmbH (ci-après « MSD ») et Intervet international BV (ci-après « Intervet »), font toutes deux partie du groupe de sociétés Merck, chef de file mondial des soins de santé.

2

En novembre 2012, Intervet a déposé une demande d’autorisation de mise sur le marché (AMM) pour le Bravecto, un médicament vétérinaire utilisé dans le traitement des infestations des chiens par les tiques et les puces. MSD est le promoteur de cinq essais toxicologiques qui ont été produits sous la forme de rapports détaillés d’essais non cliniques et qui ont été soumis à l’Agence européenne des médicaments (EMA) dans le cadre du dossier de demande d’AMM du Bravecto.

3

En date du 11 février 2014, la Commission européenne a délivré l’AMM pour les comprimés à croquer de Bravecto sous différents dosages destinés aux chiens de différents poids. Le Bravecto a ainsi été autorisé pour le traitement des infestations des chiens par les tiques et les puces.

4

Par courriel du 24 août 2015, l’EMA a informé les requérantes qu’elle avait reçu une demande émanant d’un tiers et visant à obtenir, sur le fondement du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), l’accès aux cinq rapports d’essais toxicologiques qui figuraient dans le dossier du Bravecto. Dès lors qu’elle envisageait de divulguer le contenu de trois de ces cinq rapports, l’EMA a invité les requérantes à lui communiquer leurs propositions d’occultation en vue de la divulgation de ces trois rapports regroupés sous la dénomination « Rapports d’études du lot 1 », à savoir l’étude de toxicité par exposition cutanée de rats portant la référence C45151, l’étude de toxicité par exposition cutanée de rats portant la référence C88913 et l’étude de toxicité orale sur des rats portant la référence C45162 (ci-après, dénommés ensemble, les « rapports d’études du lot 1 »).

5

Par courrier du 8 septembre 2015, les requérantes ont indiqué qu’elles avaient identifié les informations figurant dans les rapports d’études du lot 1 qu’elles considéraient comme confidentielles et ont joint, en annexe, lesdits rapports en surlignant les parties pour lesquelles elles revendiquaient la confidentialité.

6

Par une décision EMA/671379/2015, du 9 octobre 2015 (ci-après la « décision du 9 octobre 2015), l’EMA a indiqué aux requérantes qu’elle acceptait certaines propositions d’occultation – à savoir la fourchette de concentration de la substance active, les détails de la norme de référence interne utilisée dans les tests analytiques et les références aux projets de développements à venir – et qu’elle en rejetait d’autres.

7

Par courriel du 19 octobre 2015, les requérantes ont souligné que, par la décision du 9 octobre 2015, l’EMA rejetait en réalité leur proposition de non-divulgation pour la majorité des informations qu’elles estimaient confidentielles. Elles ont indiqué que chaque rapport d’études du lot 1 bénéficiait d’une présomption de confidentialité.

8

Le 28 octobre 2015, l’EMA et les requérantes se sont entretenues dans le cadre d’une téléconférence. Les requérantes y ont précisé les raisons pour lesquelles elles estimaient que les informations qu’elles avaient identifiées devaient demeurer confidentielles. L’EMA, pour sa part, a réitéré la position qu’elle avait adoptée dans la décision du 9 octobre 2015.

9

Par courrier du 3 novembre 2015, les requérantes ont souligné que la présomption de confidentialité s’appliquait aux rapports d’études du lot 1 et qu’elles avaient proposé à titre strictement subsidiaire des expurgations spécifiques des rapports d’études, accompagnées de leur justification.

10

Par courrier du 25 novembre 2015 (ci-après la « décision attaquée »), d’une part, l’EMA a indiqué que la présente décision remplaçait celle du 9 octobre 2015. D’autre part, elle a souligné qu’elle maintenait la position qu’elle avait exprimée dans cette décision et a confirmé sa décision de divulguer les documents qui ne présentaient pas, selon elle, un caractère confidentiel. À la décision attaquée étaient joints des tableaux justificatifs exposant les motifs actualisés des requérantes et les réponses mises à jour de l’EMA.

Procédure et conclusions des parties

11

Le 17 décembre 2015, les requérantes ont introduit le présent recours. Par acte séparé du même jour, elles ont introduit une demande en référé au titre de l’article 278 TFUE en vue d’obtenir le sursis à l’exécution de la décision attaquée.

12

Par une ordonnance du 20 juillet 2016, MSD Animal Health Innovation et Intervet international/EMA (T‑729/15 R, non publiée, EU:T:2016:435), le président du Tribunal a sursis à l’exécution de la décision attaquée.

13

Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision attaquée ;

condamner l’EMA aux dépens.

14

L’EMA conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner les requérantes aux dépens.

En droit

15

Dans la décision attaquée, l’EMA a rappelé tout d’abord que les rapports concernés par la demande d’accès aux documents et qui ont été l’objet de la décision attaquée étaient les rapports d’études du lot 1.

16

Après avoir précisé que la décision attaquée annulait et remplaçait la décision du 9 octobre 2015, l’EMA a rappelé qu’elle avait octroyé un délai supplémentaire pour permettre à MSD de présenter d’autres arguments afin de démontrer le caractère confidentiel des documents pour lesquels elle considérait que la divulgation ne porterait pas sérieusement atteinte aux processus décisionnels en cours et futurs de l’EMA, ni à la position concurrentielle et à l’intérêt économique des requérantes. Elle indique avoir examiné les arguments supplémentaires qui lui ont été présentés le 3 novembre 2015 et avoir marqué son accord sur les données relatives à la fourchette de concentration de la substance active, aux détails de la norme de référence interne utilisée dans les tests analytiques et à une demande de fixation des limites de résidus. Elle a en revanche refusé d’occulter d’autres données et a renvoyé à cet égard à trois tableaux élaborés pour chacune des études et comportant respectivement 64, 72 et 48 pages. Les tableaux annexés à la décision attaquée contiennent ainsi les justifications détaillées de son refus.

17

À l’appui de leur recours les requérantes invoquent cinq moyens, tirés, respectivement, le premier, de la protection des rapports d’études du lot 1, par l’article 4, paragraphe 2 ou 3, du règlement no 1049/2001, en vertu d’une présomption générale de confidentialité, le deuxième, de la protection des mêmes rapports d’études, par l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, en tant qu’informations confidentielles sur le plan commercial, le troisième, de la protection des mêmes rapports d’études, par l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001, contre les atteintes au processus décisionnel, le quatrième, de l’absence d’une mise en balance des intérêts et, le cinquième, d’une mise en balance inadéquate des intérêts.

Sur le premier moyen, tiré de la protection des rapports d’études du lot 1 par l’article 4, paragraphe 2 ou 3, du règlement no 1049/2001, en vertu d’une présomption générale de confidentialité

18

Dans le cadre du premier moyen, les requérantes soutiennent en substance qu’il existe une présomption générale de confidentialité des pièces produites dans le cadre de la procédure d’AMM d’un médicament et avancent à cet égard les arguments suivants :

dans la réglementation sectorielle relative aux médicaments, le législateur a prévu un régime propre de divulgation qui prime sur le régime d’accès aux documents prévu par le règlement no 1049/2001. Ce régime prévoirait que les pièces produites dans le cadre de la procédure d’AMM d’un médicament seraient protégées par une présomption générale de confidentialité aux fins de l’application de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 ;

il est d’ailleurs de l’essence même du régime d’AMM que tous les documents produits en tant que pièces d’un dossier d’AMM, et, en particulier, les études cliniques et non cliniques, soient protégés par la présomption générale de confidentialité posée par l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 ;

l’existence de cette présomption est confortée par l’interprétation du règlement no 1049/2001 et du règlement (CE) no 726/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, et instituant une Agence européenne des médicaments (JO 2004, L 136, p. 1), à la lumière des exigences posées par l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), du 15 avril 1994 (JO 1994, L 336, p. 214, ci-après « l’accord ADPIC ») et, notamment, par son article 39, paragraphe 3 ;

la présomption générale de confidentialité doit s’appliquer pendant toute la durée et au-delà de la période d’exclusivité des données commerciales et non venir à expiration après l’adoption de la décision d’AMM. Toute autre interprétation ne serait pas compatible avec l’effet utile du règlement no 726/2004 ;

en tout état de cause, les rapports doivent être présumés confidentiels au moins jusqu’au terme des processus décisionnels envisagés ;

conformément à la jurisprudence, les rapports d’études du lot 1 appartiennent tous à la même catégorie de documents et doivent bénéficier de la présomption générale de confidentialité afin de garantir les objectifs de la procédure d’AMM et de préserver l’intégrité du déroulement de la procédure bilatérale en limitant l’ingérence de tierces parties. De surcroît, les rapports d’études du lot 1 devraient jouir d’une protection plus élevée que les rapports du comité des médicaments, car ils ont été créés par les requérantes et non par le comité des médicaments à usage vétérinaire (ci-après le « CMUV ») ;

l’EMA n’a pas suffisamment motivé les raisons pour lesquelles la divulgation des passages figurant dans les rapports d’études du lot 1 était justifiée à titre de dérogation à la présomption générale de confidentialité. Au contraire, sans la moindre motivation, elle a posé la présomption irréfragable que toutes les informations se rapportant à l’AMM en cause pouvaient être divulguées, remettant en cause la politique de non-divulgation qu’elle avait appliquée jusqu’en 2010.

19

L’EMA réfute ces arguments.

20

Dans le cadre de ce moyen, les requérantes soutiennent en substance que les présomptions générales de confidentialité justifiant le refus d’accès s’appliquant à certaines catégories de documents concerneraient également les rapports d’études du lot 1 présentés dans le cadre de la procédure d’AMM du Bravecto, prévue par les règlements nos 141/2000 et 726/2004, et, partant, que la divulgation de ces documents porterait en principe atteinte aux intérêts commerciaux. Ainsi, la présomption générale de confidentialité dont se prévalent les requérantes repose sur l’exception relative à la protection de leurs intérêts commerciaux, visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

21

L’examen de cette question implique de rappeler que, en application de l’article 2, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001, les dispositions relatives à l’accès du public aux documents de l’EMA s’appliquent à tous les documents détenus par cette agence, c’est-à-dire à tous les documents établis ou reçus par elle et en sa possession, dans tous ses domaines d’activité. En outre, si ledit règlement vise à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible, ce droit est toutefois soumis à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé (arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 85).

22

Il importe également de relever que la Cour a reconnu la possibilité pour les institutions et les agences concernées de se fonder sur des présomptions générales s’appliquant à certaines catégories de documents, des considérations d’ordre général similaires étant susceptibles de s’appliquer à des demandes de divulgation portant sur des documents de même nature (arrêt du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, EU:C:2008:374, point 50). L’existence d’une telle présomption n’exclut pas le droit de l’intéressé de démontrer qu’un document donné dont la divulgation est demandée n’est pas couvert par ladite présomption (arrêt du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission, C‑514/07 P, C‑528/07 P et C‑532/07 P, EU:C:2010:541, point 103).

23

Cependant, il importe de souligner que l’existence d’une présomption générale de confidentialité de certaines catégories de documents constitue une exception à l’obligation, imposée par le règlement no 1049/2001 à l’institution concernée, d’examiner de façon concrète et individuelle chacun des documents visés par une demande d’accès afin de déterminer si ceux-ci relèvent de l’une des exceptions prévues notamment par l’article 4, paragraphe 2, dudit règlement. Au même titre que la jurisprudence impose que les exceptions à la divulgation visées à la disposition susmentionnée soient interprétées et appliquées de façon stricte en ce qu’elles dérogent au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents détenus par les institutions de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:496, point 75, et du 3 juillet 2014, Conseil/in’t Veld, C‑350/12 P, EU:C:2014:2039, point 48), la reconnaissance et l’application d’une présomption générale de confidentialité doivent s’envisager de façon stricte (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 81).

24

Le juge de l’Union a dès lors dégagé, dans plusieurs arrêts, certains critères pour la reconnaissance d’une telle présomption selon le type d’affaires.

25

D’une part, il ressort de plusieurs arrêts de la Cour que, pour qu’une présomption générale soit valablement opposée à la personne qui demande l’accès à des documents sur le fondement du règlement no 1049/2001, il est nécessaire que les documents demandés fassent partie d’une même catégorie de documents ou soient d’une même nature (voir, en ce sens, arrêts du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, EU:C:2008:374, point 50, et du 17 octobre 2013, Conseil/Access Info Europe, C‑280/11 P, EU:C:2013:671, point 72).

26

D’autre part, l’application des présomptions générales peut être dictée par l’impérative nécessité d’assurer le fonctionnement correct des procédures en question et de garantir que leurs objectifs ne soient pas compromis. Ainsi, la reconnaissance d’une présomption générale peut être fondée sur l’incompatibilité de l’accès aux documents de certaines procédures avec le bon déroulement de celles-ci et sur le risque qu’il soit porté atteinte à celles-ci, étant entendu que les présomptions générales permettent de préserver l’intégrité du déroulement de la procédure en limitant l’ingérence des tierces parties (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Wathelet dans les affaires jointes LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:528, points 66, 68, 74 et 76).

27

C’est en ce sens, par exemple, que le Tribunal a considéré que, aussi longtemps que, au cours de la phase précontentieuse d’une enquête menée dans le cadre d’une procédure EU Pilot, il existait un risque d’altérer le caractère de la procédure en manquement, d’en modifier le déroulement et de porter atteinte aux objectifs de cette procédure, l’application de la présomption générale de confidentialité aux documents échangés entre la Commission et l’État membre concerné se justifiait (voir, en ce sens, arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑306/12, EU:T:2014:816, points 57 à 63).

28

En outre, dans toutes les affaires ayant donné lieu aux décisions mettant en place de telles présomptions, le refus d’accès en cause portait sur un ensemble de documents clairement circonscrits par leur appartenance commune à un dossier afférent à une procédure administrative ou juridictionnelle en cours (voir, en ce sens, arrêts du 28 juin 2012, Commission/Éditions Odile Jacob, C‑404/10 P, EU:C:2012:393, point 128 ; du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, points 49 et 50, et du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, points 69 et 70).

29

Enfin, le juge de l’Union considère que l’application de règles spécifiques prévues par un acte juridique relatif à une procédure conduite devant une institution de l’Union pour les besoins de laquelle les documents demandés ont été produits est aussi l’un des critères de nature à justifier la reconnaissance d’une présomption générale (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2015, McCullough/Cedefop, T‑496/13, non publié, EU:T:2015:374, point 91, et conclusions de l’avocat général Cruz Villalón dans l’affaire Conseil/Access Info Europe, C‑280/11 P, EU:C:2013:325, point 75). Les exceptions au droit d’accès aux documents qui figurent à l’article 4 du règlement no 1049/2001 ne sauraient ainsi être interprétées sans tenir compte des règles spécifiques régissant l’accès à ces documents, prévues par les règlements concernés.

30

C’est en ce sens que la Cour a relevé que, dans le cadre d’une procédure d’application de l’article 101 TFUE, certaines dispositions du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101] et [102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), ainsi que du règlement (CE) no 773/2004 de la Commission, du 7 avril 2004, relatif aux procédures mises en œuvre par la Commission en application des articles [101] et [102 TFUE] (JO 2004, L 123, p. 18), régissaient de manière restrictive l’usage des documents figurant dans le dossier relatif à ladite procédure, puisque ceux-ci prévoyaient que les parties à une procédure d’application de l’article 101 TFUE ne disposaient pas d’un droit d’accès illimité aux documents figurant dans le dossier de la Commission et que les tiers, à l’exception des plaignants, ne disposaient pas, dans le cadre d’une telle procédure, du droit d’accès aux documents du dossier de la Commission. La Cour a estimé qu’autoriser un accès généralisé sur la base du règlement no 1049/2001 aux documents figurant dans un dossier relatif à l’application de l’article 101 TFUE aurait été de nature à mettre en péril l’équilibre que le législateur de l’Union avait voulu assurer dans les règlements nos 1/2003 et 773/2004 entre l’obligation pour les entreprises concernées de communiquer à la Commission des informations commerciales éventuellement sensibles aux fins de permettre à celle-ci de déceler l’existence d’une entente et d’en apprécier la compatibilité avec ledit article, d’une part, et la garantie de protection renforcée s’attachant, au titre du secret professionnel et du secret des affaires, aux informations ainsi transmises à la Commission, d’autre part. La Cour en a conclu que la Commission, aux fins de l’application des exceptions prévues à l’article 4, paragraphe 2, premier et troisième tirets, du règlement no 1049/2001, était en droit de présumer, sans procéder à un examen concret et individuel de chacun des documents figurant dans un dossier relatif à une procédure d’application de l’article 101 TFUE, que la divulgation de ces documents portait, en principe, atteinte à la protection des intérêts commerciaux des entreprises impliquées dans une telle procédure (voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, points 86, 87, 90 et 93).

31

C’est aussi en fonction de ce critère que le Tribunal a, au contraire, considéré qu’aucune présomption générale de confidentialité ne résultait des dispositions du règlement (CE) no 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2006, concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) no 793/93 du Conseil et le règlement (CE) no 1488/94 de la Commission ainsi que la directive 76/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission (JO 2006, L 396, p. 1), puisque ledit règlement ne régissait pas de manière restrictive l’usage des documents figurant dans le dossier relatif à une procédure d’autorisation pour l’utilisation d’une substance chimique, à la différence des situations pour lesquelles la Cour et le Tribunal ont admis que les présomptions générales de confidentialité justifiant le refus d’accès aux documents s’appliquaient (voir, en ce sens, arrêt du 13 janvier 2017, Deza/ECHA, T‑189/14, EU:T:2017:4, point 39).

32

En l’espèce, les documents litigieux ne sont pas afférents à une procédure administrative ou juridictionnelle en cours puisque l’AMM du Bravecto a été délivrée le 11 février 2014 et que la demande d’accès aux documents litigieux n’est intervenue que le 24 août 2015. Par conséquent, à supposer même que la jurisprudence citée aux points 26 et 27 ci-dessus, selon laquelle l’application d’une présomption générale pourrait se justifier par l’impérative nécessité d’assurer le fonctionnement correct de la procédure concernée, trouve application dans le cadre d’une procédure d’AMM, la divulgation des documents litigieux ne peut pas altérer ladite procédure puisque la procédure a été close avant que la demande d’accès aux documents litigieux par un tiers ait eu lieu.

33

De même, à la différence des situations pour lesquelles la Cour et le Tribunal ont admis que les présomptions générales de confidentialité justifiant le refus d’accès aux documents s’appliquaient, le règlement no 726/2004 ne régit pas de manière restrictive l’usage des documents figurant dans le dossier relatif à une procédure d’AMM d’un médicament. Il ne prévoit pas une limitation de l’accès au dossier aux « parties concernées » ou aux « plaignants ».

34

Le règlement no 726/2004 prévoit expressément en son article 73 que le règlement no 1049/2001 s’applique aux documents détenus par l’EMA et que le conseil d’administration de celle-ci arrête les modalités d’application du règlement no 1049/2001. Aucune autre disposition du règlement no 726/2004 ne saurait être interprétée comme révélant l’intention du législateur de l’Union d’établir un régime d’accès restreint aux documents par le biais d’une présomption générale de confidentialité de ceux-ci.

35

En effet, le règlement no 726/2004 impose à l’EMA, en son article 11, son article 13, paragraphe 3, son article 36, son article 38, paragraphe 3, et son article 57, paragraphes 1 et 2, la publication de trois documents, à savoir le rapport européen public d’évaluation (ci-après l’« EPAR »), un résumé des caractéristiques des médicaments concernés et la notice destinée à l’utilisateur, après en avoir supprimé toutes les informations présentant un caractère de confidentialité commerciale. Ces dispositions mentionnent les informations minimales, par le biais des trois documents susmentionnés, que l’EMA est appelée à mettre de façon proactive à disposition du public. L’objectif du législateur de l’Union est, d’une part, que soient indiquées de la façon la plus intelligible possible aux professionnels de santé les caractéristiques du médicament concerné et la manière dont il convient de le prescrire aux patients et, d’autre part, que le public non professionnel soit informé, dans un langage compréhensible, du mode d’utilisation optimale du médicament et des effets de celui-ci. Ce régime de publication proactive minimale d’informations ne constitue donc pas un régime spécifique d’accès aux documents qui devrait être interprété en ce sens que toutes les données et informations ne figurant pas dans les trois documents susmentionnés seraient présumées confidentielles.

36

Les articles 11, 12 et 36 ainsi que l’article 37, paragraphe 3, du règlement no 726/2004 traduisent également la volonté du législateur que la procédure d’AMM soit transparente, même si celle-ci ne donne pas lieu à une décision ou qu’elle aboutit à une décision de refus d’AMM. Ces dispositions prévoient en effet que tant les informations relatives à une demande d’AMM que le demandeur a retirée avant qu’un avis n’ait été rendu par l’EMA que celles concernant une demande d’AMM qui a été refusée doivent être accessibles au public.

37

Il s’ensuit que le principe qui prévaut dans les règlements nos 726/2004 et 1049/2001 est celui de l’accès du public aux informations et que les exceptions à ce principe sont celles visées à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, dont celles portant sur les informations commerciales confidentielles. Compte tenu de l’exigence d’une interprétation stricte rappelée au point 23 ci-dessus, force est de considérer que le législateur de l’Union n’a pas prévu de régime spécifique d’accès aux documents et, en ce sens, n’a pas instauré de présomption générale de confidentialité des rapports d’études du lot 1.

38

Compte tenu de tout ce qui précède, il y a lieu de considérer qu’il n’existe pas de présomption générale de confidentialité des documents et des rapports d’un dossier d’AMM d’un médicament qui découlerait de l’application des dispositions combinées des règlements nos 1049/2001 et 726/2004. Ainsi, après la fin de la procédure d’AMM d’un médicament, les documents du dossier administratif, en ce compris les rapports d’études d’innocuité, ne peuvent être considérés comme bénéficiant d’une présomption générale de confidentialité au motif implicite qu’ils seraient, par principe et dans leur intégralité, manifestement couverts par l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux des demandeurs d’AMM. Il revient ainsi à l’EMA de s’assurer par un examen concret et effectif de chaque document du dossier administratif s’il relève notamment du secret commercial au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

39

Par ailleurs, il importe d’ajouter que, en application de l’article 73 du règlement no 726/2004, l’EMA a adopté les modalités d’exécution du règlement no 1049/2001. De même, afin de renforcer sa politique relative à l’accès aux documents, elle a adopté, le 30 novembre 2010, le document EMA/110196/2006, intitulé « Politique de l’[EMA] sur l’accès aux documents (concernant les médicaments à usage humain et vétérinaires) ». Il y est souligné que, tout en offrant une protection adéquate aux informations commerciales confidentielles, aux données à caractère personnel et aux autres intérêts spécifiques, l’accès à un document est refusé uniquement si l’une des exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 est considérée comme applicable.

40

Il convient aussi de relever que, en appliquant sa politique relative à l’accès aux documents, l’EMA a rédigé le document EMA/127362/2006, dans lequel figure le résultat de sa politique sur l’accès aux documents concernant les médicaments à usage humain et vétérinaire. Ce document contient un tableau de résultats qui a été complété au fur et à mesure de l’expérience acquise par l’agence en matière de demande d’accès aux documents. Ce tableau a été complété par, d’une part, le document EMA/484118/2010 relatif aux recommandations des directeurs des agences des médicaments sur la transparence et, d’autre part, le guide commun de l’EMA et des chefs des agences des médicaments concernant l’identification des informations commerciales confidentielles et des données personnelles dans le cadre de la procédure d’AMM, qui pouvaient être publiées dès l’adoption d’une décision. Il ressort de ce tableau que, s’agissant des dossiers des demandeurs d’autorisation, l’EMA considère que, dès que la procédure d’AMM d’un médicament est terminée et après consultation du titulaire desdits documents, ceux-ci sont en principe accessibles.

41

Il s’ensuit que le moyen tiré de l’existence d’une présomption générale de confidentialité des informations litigieuses doit, en tout état de cause, être rejeté.

42

Aucun des arguments avancés par les requérantes ne saurait remettre en cause cette conclusion.

43

Premièrement, le fait que les rapports d’études du lot 1 ont été établis par les requérantes et qu’ils ne proviennent pas d’un rapport d’évaluation du CMUV fondé sur la base des informations transmises par le demandeur d’AMM n’est pas en soi un motif justifiant que ces rapports doivent jouir d’une protection plus élevée. En effet, la question de savoir si l’information concernée présente ou non un caractère commercial confidentiel est l’élément déterminant, peu importe que cette information ait été insérée par le CMUV dans son rapport d’évaluation ou qu’elle provienne directement du titulaire de l’AMM. Dans ce contexte, il doit être relevé que le seul fait que les données figurant dans les rapports d’études du lot 1 appartiendraient tous à la même catégorie de documents ne saurait suffire à considérer que ceux-ci bénéficient de la présomption générale de confidentialité.

44

Deuxièmement, les requérantes affirment en vain qu’il serait de l’essence même du régime d’AMM que tous les documents produits en tant que pièces d’un dossier d’AMM et, notamment, les études cliniques et non cliniques, soient protégés par la présomption générale de confidentialité posée par l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 et que la jurisprudence du juge des référés et celle issue de l’arrêt du 23 janvier 1997, Biogen (C‑181/95, EU:C:1997:32), irait dans le sens de cette approche. Tout d’abord, cette affirmation n’est nullement étayée. Ensuite, il n’est pas évident que des études cliniques et non cliniques soient en elles-mêmes confidentielles. Celles-ci peuvent en effet se limiter à répondre à un schéma réglementaire prescrit par l’EMA et ne contenir aucun élément de nouveauté. En outre, il importe de souligner que la transparence du processus suivi par l’EMA et la possibilité d’obtenir l’accès aux documents utilisés par les experts de cette agence pour élaborer leur évaluation scientifique contribuent à conférer à une telle autorité une plus grande légitimité aux yeux des destinataires de ses actes et à augmenter la confiance de ceux-ci à l’égard de ladite autorité, de même qu’à accroître la responsabilité de cette dernière à l’égard des citoyens dans un système démocratique (voir, par analogie, arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth et PAN Europe/EFSA, C‑615/13 P, EU:C:2015:489, point 56). Enfin, il ne saurait être inféré de l’arrêt du 23 janvier 1997, Biogen (C‑181/95, EU:C:1997:32), ainsi que des ordonnances du 25 avril 2013, AbbVie/EMA (T‑44/13 R, non publiée, EU:T:2013:221), et du 1er septembre 2015, Pari Pharma/EMA (T‑235/15 R, EU:T:2015:587), invoqués par les requérantes, une quelconque reconnaissance de l’existence d’une présomption générale de confidentialité des rapports d’études du lot 1. Comme le souligne à juste titre l’EMA, une telle conclusion ne peut être déduite des ordonnances du juge des référés. Quant à l’arrêt du 23 janvier 1997, Biogen (C‑181/95, EU:C:1997:32), outre le fait qu’il est intervenu avant l’adoption du règlement no 1049/2001, il ne ressort pas de celui-ci que la Cour aurait confirmé le caractère confidentiel de l’intégralité des informations figurant dans une AMM.

45

Troisièmement, est inopérant l’argument selon lequel la présomption générale de confidentialité des rapports d’études du lot 1 est indispensable pour garantir les objectifs de la procédure d’AMM et préserver l’intégrité du déroulement de la procédure bilatérale. En l’espèce, force est de constater, tout d’abord, que les rapports d’études du lot 1 ont été soumis et évalués dans le cadre de la demande d’AMM du Bravecto, ensuite, que l’EMA a accordé aux requérantes l’AMM de ce médicament pour une indication thérapeutique déterminée et, enfin, que la procédure d’octroi de l’AMM du Bravecto était close lorsque la demande d’accès auxdits rapports a été présentée par un tiers.

46

Dans ce contexte, les requérantes font valoir que, pour garantir l’effet utile du règlement no 726/2004, la présomption générale de confidentialité devrait s’appliquer pendant toute la durée et même au-delà de la période d’exclusivité des données commerciales et non venir à expiration après l’adoption de la décision d’AMM. Elles soutiennent que d’autres données pourraient être réutilisées dans le cadre de nouvelles demandes d’AMM. Ces arguments doivent être rejetés. En effet, la possibilité d’une réutilisation des données ne constitue pas en soi un motif permettant de considérer que ces informations sont confidentielles, ni qu’elles sont susceptibles de porter atteinte au processus décisionnel au sens de l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001. Il ressort de la décision attaquée que seuls les éléments des rapports d’études du lot 1 qui ne se rapportent pas à l’indication déjà autorisée, qui révèlent des détails spécifiques à la demande en cours ou aux projets de développement futurs et qui ne figurent pas dans un document accessible au public (tel que l’EPAR) peuvent être considérés comme des informations commerciales confidentielles. L’EMA ne peut donc pas refuser l’accès aux éléments contenus dans les rapports d’études du lot 1 qui ne concernent pas les trois types de données susmentionnées. En ce sens, il importe de souligner que la décision attaquée a indiqué que les références faites dans les rapports d’études du lot 1 à tout projet de développement futur des requérantes ont été expurgées et que ces informations « ne révèlent aucun détail relatif à la demande actuellement en cours en vue de l’ajout d’une nouvelle forme pharmaceutique ». Ces considérations n’ont d’ailleurs pas été remises en cause par les requérantes.

47

Quatrièmement, il convient d’examiner l’argument selon lequel l’interprétation des règlements nos 1049/2001 et 726/2004 à la lumière des exigences posées par l’accord ADPIC et, notamment, par son article 39, paragraphes 2 et 3, aurait dû conduire l’EMA à la conclusion que les rapports d’études du lot 1 bénéficiaient d’une présomption générale de confidentialité.

48

Il importe de souligner que, si l’article 39, paragraphes 2 et 3, de l’accord ADPIC, auquel se réfèrent les requérantes, ne saurait en tant que tel être invoqué pour invalider la décision attaquée, les règlements nos 1049/2001 et 726/2004 doivent néanmoins être interprétés d’une manière visant à assurer la conformité de ceux-ci au contenu de cette disposition. En effet, les dispositions de l’accord ADPIC qui fait partie des accords de l’OMC, signés par la Communauté européenne et ensuite approuvés par la décision 94/800/CE du Conseil, du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) (JO 1994, L 336, p. 1), font partie intégrante de l’ordre juridique de l’Union. Lorsqu’une réglementation de l’Union existe dans un domaine concerné par l’accord ADPIC, le droit de l’Union s’applique, ce qui implique l’obligation, dans la mesure du possible, d’opérer une interprétation conforme à cet accord, sans toutefois qu’un effet direct puisse être accordé à la disposition en cause de cet accord (voir arrêt du 11 septembre 2007, Merck Genéricos – Produtos Farmacêuticos, C‑431/05, EU:C:2007:496, point 35 et jurisprudence citée).

49

Il y a lieu de rappeler que l’article 39, paragraphe 2, de l’accord ADPIC prévoit que les informations présentant une valeur sur le plan commercial sont protégées de l’utilisation et de la divulgation par des tiers si elles sont secrètes en ce sens que, dans leur globalité ou dans la configuration et l’assemblage exacts de leurs éléments, elles ne sont pas généralement connues de personnes appartenant aux milieux qui s’occupent normalement du genre de renseignements en question ou qu’elles ne leur sont pas aisément accessibles. Le paragraphe 3 dudit article impose aux États membres de protéger des données non divulguées résultant d’essais ou d’autres données non divulguées contre l’exploitation déloyale dans le commerce lorsqu’ils subordonnent l’approbation de la commercialisation de produits pharmaceutiques qui comportent des entités chimiques nouvelles à la communication desdites données dont l’établissement demande un effort considérable.

50

L’article 39, paragraphes 2 et 3, de l’accord ADPIC ne saurait toutefois impliquer qu’il faille faire primer de manière absolue la protection accordée aux droits de propriété intellectuelle sur la présomption en faveur de la divulgation des informations présentées dans le cadre d’une demande de dérogation à l’exclusivité commerciale d’un médicament orphelin. En ce sens, l’approche défendue par les requérantes visant à considérer que l’intégralité des informations qu’elles ont présentées est confidentielle revient à ne pas tenir compte de l’équilibre établi par les règlements susmentionnés et à ne pas appliquer le mécanisme qui prévoit en substance la publication des informations relatives aux médicaments faisant l’objet d’une procédure d’autorisation à l’exception de celles présentant un caractère de confidentialité commerciale. Une telle approche ne peut être retenue, puisqu’elle conduit, en réalité, à mettre en cause la légalité du mécanisme des règlements nos 1049/2001 et 726/2004 au regard de l’article 39, paragraphes 2 et 3, de l’accord ADPIC.

51

De surcroît, l’argumentation des requérantes laisse à penser qu’il n’existerait aucun mécanisme de protection de la propriété intellectuelle. Or, d’une part, les titulaires des données jouissent d’une période de protection de celles-ci en vertu de l’article 39, paragraphe 10, du règlement no 726/2004. D’autre part, ils bénéficient, en application des exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001, d’une protection des informations commerciales confidentielles contenues dans un dossier d’AMM, dont celles relatives à la fabrication du produit et les autres spécifications techniques et industrielles des processus de qualité mis en œuvre pour fabriquer la substance.

52

Cinquièmement, les requérantes reprochent à la fois à l’EMA de ne pas avoir suffisamment motivé les raisons pour lesquelles elle estimait que les rapports d’études du lot 1 ne bénéficiaient pas d’une présomption générale de confidentialité et contestent les motifs visant à justifier cette considération. En ce que les arguments des requérantes doivent en réalité se comprendre comme un grief tiré de la violation de l’obligation de motivation, il convient de les rejeter. En effet, la décision attaquée comporte un raisonnement complet et détaillé qui permet de comprendre complètement les raisons pour lesquelles l’EMA a conclu à l’absence de présomption générale de confidentialité des informations litigieuses. En particulier, l’EMA souligne que la présomption générale de confidentialité est contraire aux dispositions du traité FUE et du règlement no 1049/2001 relatives à la transparence. Elle rappelle à cet égard le contenu de l’article 2, paragraphes 3 et 4, et de l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001. Quant à l’affirmation de l’existence d’un risque d’exploitation déloyale des données qui viserait à justifier la présomption générale de confidentialité, l’EMA relève que les données soumises au soutien d’une demande d’AMM sont protégées par une période d’exclusivité des données prévues par les articles 13 et 13 bis de la directive 2001/82/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments vétérinaires (JO 2001, L 311, p. 1). À cet égard, l’EMA fait observer que la communication d’informations conformément au règlement no 1049/2001 ne saurait porter atteinte à la protection mise en place par l’article 39 de l’accord ADPIC et les articles 13 et 13 bis de la directive 2001/82. La décision attaquée indique en outre que, conformément à l’article 16 du règlement no 1049/2001, la décision de l’EMA d’accorder l’accès aux documents est sans préjudice des droits de propriété intellectuelle qui peuvent exister sur les documents ou leur contenu et ne saurait être interprétée comme une autorisation explicite ou implicite ou une licence permettant au demandeur d’accès d’utiliser, de reproduire, de publier, de divulguer ou d’exploiter autrement les documents ou leur contenu. L’EMA indique en outre que le risque d’utilisation des documents en contournant l’exclusivité des données en violation de la directive 2001/82 et du règlement no 1049/2001 ne saurait constituer un motif de refus d’accès aux documents, l’approche contraire entraînant pratiquement une paralysie presque totale des activités liées à l’accès aux documents de l’EMA. Une telle approche serait contraire aux dispositions sur la transparence figurant dans le traité FUE et dans le règlement no 1049/2001. L’EMA relève enfin que le risque d’utilisation illégale de documents délivrés conformément au règlement no 1049/2001 est toujours présent et que les autres législations européennes et nationales prévoient des mesures correctives connexes. Partant, les motifs figurant dans la décision attaquée visant à rejeter l’existence d’une présomption générale de confidentialité des rapports d’études du lot 1 répondent aux exigences de motivation de l’article 296 TFUE.

53

En ce que la contestation des requérantes porte sur les motifs mêmes de cette conclusion, elle ne saurait prospérer. Tout d’abord, ainsi qu’il ressort de l’analyse opérée aux points 20 à 41 ci-dessus, il ne saurait être déduit des dispositions du règlement no 726/2004 l’existence d’une quelconque présomption générale de confidentialité des rapports d’études du lot 1.

54

Ensuite, l’exigence figurant dans l’accord ADPIC de protéger les documents présentés à l’EMA contre leur exploitation déloyale dans le commerce est remplie pour les raisons rappelées aux points 47 à 51 ci-dessus. À cet égard, les requérantes affirment à tort que la démarche de l’EMA présuppose nécessairement que tous leurs concurrents respecteront toujours la loi et qu’ils ne pourront pas obtenir un quelconque avantage économique en utilisant légalement les rapports d’études du lot 1. En effet, d’une part, la protection des données prévue dans le règlement no 726/2004 vise précisément à empêcher les concurrents d’utiliser les études figurant dans un dossier d’AMM. D’autre part, la confidentialité de certaines données garantie par l’article 4 du règlement no 1049/2001 constitue un rempart contre l’exploitation déloyale de données commercialement sensibles.

55

Les requérantes font valoir que l’EMA a prévu des conditions d’utilisation proactive des documents et admet ainsi l’éventualité de leur exploitation déloyale. Elles soulignent que l’EMA décline toute responsabilité s’agissant du respect desdites conditions par les intéressés et que cela constitue un aveu que ces conditions sont inaptes à empêcher les concurrents d’obtenir des avantages injustes. Ces arguments doivent être rejetés au motif qu’ils présupposent que des données qui peuvent être exploitées de façon déloyale doivent être considérées comme confidentielles. Or, l’absence totale de risque d’une exploitation déloyale de données ne peut être garantie. Il est donc normal que l’EMA décline sa responsabilité à cet égard. De surcroît, ce motif ne permet pas de considérer que l’ensemble des données doivent bénéficier de la présomption de confidentialité.

56

En outre, les requérantes soutiennent qu’il existe de nombreux moyens par lesquels leurs concurrents pourraient utiliser les connaissances acquises au vu des rapports d’études du lot 1, pour en tirer un avantage concurrentiel au détriment des requérantes. Toutefois, cela ne démontre en rien que l’intégralité des informations mérite d’être protégée par une présomption générale de confidentialité.

57

Enfin, les requérantes affirment en vain que, compte tenu de la divulgation des données, les demandeurs d’AMM auraient intérêt à présenter le minimum d’informations pour satisfaire aux conditions requises pour présenter le dossier d’AMM et obtenir l’AMM pour leur médicament. Cet argument présuppose que l’EMA se contentera d’un minimum d’informations pour émettre un avis favorable à une AMM pour un médicament, ce qui, compte tenu du niveau d’exigence requis par la réglementation de l’Union, est peu probable.

58

Compte tenu de tout ce qui précède, il convient de rejeter le premier moyen comme non fondé.

Sur le deuxième moyen, tiré de la protection, par l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, des rapports d’études du lot 1 en tant qu’informations confidentielles sur le plan commercial

59

Dans le cadre du deuxième moyen, les requérantes font valoir que les rapports d’études du lot 1 présentent globalement un caractère de confidentialité commerciale au sens de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, puisqu’ils révèlent notamment un savoir-faire réglementaire, des capacités d’évaluation clinique et la démarche stratégique inventive suivie par MSD pour réaliser ses études d’innocuité. En effet, les données scientifiques faisant partie du domaine public ainsi que celles couvertes par le secret auraient été configurées et assemblées selon une stratégie innovante et formeraient un ensemble inséparable revêtant une valeur économique. Elles fourniraient ainsi un point de référence susceptible d’aider les concurrents et indiqueraient l’itinéraire ou la « feuille de route » conduisant à l’obtention d’une AMM pour tout médicament contenant la même substance active. Elles dévoileraient de futurs développements de produits et pourraient être intégralement utilisées pour compléter les dossiers de demande d’AMM déposés par les concurrents. À cet égard, les requérantes soutiennent avoir investi des ressources substantielles dans l’élaboration des rapports d’étude du lot 1 et font valoir que l’utilisation de ceux-ci à des fins d’étalonnage procurerait ainsi un avantage à un concurrent potentiel. La période d’exclusivité des données accordée aux titulaires d’AMM n’assurerait pas une protection infaillible contre la concurrence déloyale.

60

L’EMA réfute les arguments des requérantes.

61

À titre liminaire, il importe de rappeler que, en vertu de l’article 15, paragraphe 3, TFUE, tout citoyen de l’Union et toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre ont un droit d’accès aux documents des institutions, organes et organismes de l’Union sous réserve des principes et des conditions qui sont fixés conformément à la procédure législative ordinaire. Le règlement no 1049/2001 vise, comme l’indiquent le considérant 4 et l’article 1er de celui-ci, à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible (arrêts du 28 juin 2012, Commission/Éditions Odile Jacob, C‑404/10 P, EU:C:2012:393, point 111, et du 28 juin 2012, Commission/Agrofert Holding, C‑477/10 P, EU:C:2012:394, point 53 ; voir également, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 40).

62

Par ailleurs, il doit être rappelé que la procédure de demande d’AMM des médicaments est régie par le règlement no 726/2004, qui établit une procédure en droit de l’Union à cet égard. L’article 73 du règlement no 726/2004 prévoit que le règlement no 1049/2001 s’applique aux documents détenus par l’EMA. Il s’ensuit que le principe de l’accès le plus large possible du public aux documents doit en principe être respecté s’agissant des documents que possède l’EMA.

63

Le principe de l’accès le plus large possible du public aux documents n’en est pas moins soumis à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé. En effet, le règlement no 1049/2001, notamment en son considérant 11 et en son article 4, prévoit un régime d’exceptions imposant aux institutions et aux organismes de ne pas divulguer des documents dans le cas où ladite divulgation porterait atteinte à l’un de ces intérêts (voir, en ce sens, arrêts du 28 juin 2012, Commission/Éditions Odile Jacob, C‑404/10 P, EU:C:2012:393, point 111 ; du 28 juin 2012, Commission/Agrofert Holding, C‑477/10 P, EU:C:2012:394, point 53, et du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 40).

64

Dès lors que les exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 dérogent au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents, elles doivent être interprétées et appliquées strictement (voir, en ce sens, arrêts du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:496, point 75, et du 3 juillet 2014, Conseil/in’t Veld, C‑350/12 P, EU:C:2014:2039, point 48).

65

Il convient également de noter que le régime des exceptions prévu à l’article 4 du règlement no 1049/2001, et notamment au paragraphe 2 de celui-ci, est fondé sur une mise en balance des intérêts qui s’opposent dans une situation donnée, à savoir, d’une part, les intérêts qui seraient favorisés par la divulgation des documents concernés et, d’autre part, ceux qui seraient menacés par cette divulgation. La décision prise sur une demande d’accès à des documents dépend de la question de savoir quel est l’intérêt qui doit prévaloir dans le cas d’espèce (arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 42, et du 23 septembre 2015, ClientEarth et International Chemical Secretariat/ECHA, T‑245/11, EU:T:2015:675, point 168).

66

Il y a lieu de relever que, pour justifier le refus d’accès à un document, il ne suffit pas, en principe, que ce document relève d’une activité ou d’un intérêt mentionné à l’article 4 du règlement no 1049/2001, l’institution concernée ou, le cas échéant, la personne qui a transmis les informations figurant dans le document litigieux devant également expliquer comment l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par une exception prévue à cet article (voir, en ce sens, arrêts du 28 juin 2012, Commission/Éditions Odile Jacob, C‑404/10 P, EU:C:2012:393, point 116 ; du 28 juin 2012, Commission/Agrofert Holding, C‑477/10 P, EU:C:2012:394, point 57, et du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 64) et que le risque d’atteinte à cet intérêt est raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (arrêts du 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation/Commission, T‑2/03, EU:T:2005:125, point 69, et du 22 mai 2012, Sviluppo Globale/Commission, T‑6/10, non publié, EU:T:2012:245, point 64).

67

Quant au concept d’intérêts commerciaux, il ressort de la jurisprudence que toute information relative à une société et à ses relations d’affaires ne saurait être considérée comme relevant de la protection qui doit être garantie aux intérêts commerciaux conformément à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, sauf à tenir en échec l’application du principe général consistant à conférer au public le plus large accès possible aux documents détenus par les institutions (arrêts du 15 décembre 2011, CDC Hydrogene Peroxide/Commission, T‑437/08, EU:T:2011:752, point 44, et du 9 septembre 2014, MasterCard e.a./Commission, T‑516/11, non publié, EU:T:2014:759, point 81). Il convient également de préciser, d’ailleurs, que le guide commun de l’EMA et des chefs des agences des médicaments concernant l’identification des informations commerciales confidentielles et des données personnelles dans le cadre de la procédure d’AMM définit l’« information confidentielle sur le plan commercial » comme toute information qui n’est pas dans le domaine public ou accessible au public et dont la divulgation peut porter atteinte aux intérêts économiques ou à la situation concurrentielle de son propriétaire.

68

Ainsi, afin d’appliquer l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, il est nécessaire de démontrer que les documents litigieux contiennent des éléments susceptibles, du fait de leur divulgation, de porter atteinte aux intérêts commerciaux d’une personne morale. Il en est ainsi lorsque, notamment, les documents demandés contiennent des informations commerciales sensibles relatives, notamment, aux stratégies commerciales des entreprises concernées ou à leurs relations commerciales, ou lorsque ceux-ci contiennent des données propres à l’entreprise qui mettent en avant son expertise (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2014, MasterCard e.a./Commission, T‑516/11, non publié, EU:T:2014:759, points 82 à 84).

69

C’est à la lumière des considérations exprimées aux points 61 à 68 ci-dessus que doivent être analysés les arguments des requérantes selon lesquels l’EMA a violé l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 en adoptant la décision attaquée, autorisant la divulgation des informations litigieuses.

70

Au préalable, il convient de rappeler que l’analyse du premier moyen a révélé qu’il n’existait pas de présomption générale de confidentialité protégeant l’ensemble des rapports d’études du lot 1 de la divulgation. Il s’ensuit que, pour pouvoir considérer que les rapports d’études du lot 1 présentent globalement un caractère de confidentialité commerciale au sens de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, il importe que l’intégralité des données figurant dans ces rapports constitue des informations commerciales confidentielles.

71

En premier lieu, les requérantes soutiennent que les rapports d’études du lot 1 révèlent un savoir-faire réglementaire, des capacités d’évaluation clinique et la démarche stratégique inventive suivie par MSD pour réaliser ses études d’innocuité.

72

Toutefois, l’EMA rappelle à juste titre que tous les essais d’innocuité qui sont inclus dans les demandes d’AMM de médicaments vétérinaires doivent avoir répondu aux exigences prévues à l’annexe I de la directive 2001/82. De même, doit être pris en compte le fait que l’EMA a publié des lignes directrices relatives aux essais de toxicité après la conclusion d’un accord harmonisé entre l’Union, le Japon et les États-Unis d’Amérique, et que ces lignes directrices publiques, élaborées progressivement sur de nombreuses années, constituent aujourd’hui un vaste corpus ayant pour objet de guider l’industrie pharmaceutique dans la conduite des études requises en vue de l’approbation d’un médicament vétérinaire.

73

En l’espèce, dans la décision attaquée, l’EMA rappelle que les études ont été conçues dans le respect des lignes directrices et des recommandations acceptées internationalement. Elle vise en particulier les « [l]ignes directrices de l’OCDE pour les essais de produits chimiques, [s]ection 4, [e]ffets sur la santé, no 410, [t]oxicité cutanée à doses répétées : 21/28 jours, adoptées le 12 mai 1981 », la « Conférence internationale sur l’harmonisation, Topic S 3A Toxicokinetics : A Guidance for Assessing Systemic Exposure in Toxicology Studies (CPMP/ICH/384/95) » [Conférence internationale sur l’harmonisation des exigences techniques pour l’enregistrement des médicaments à usage humain (CIH), thème S 3A, toxicocinétique : lignes directrices pour l’évaluation de l’exposition systémique dans des études toxicologiques], les « VICH, Guideline 31, Studies to evaluate the Safety of Residues of Veterinary Drugs in Human Food : Repeat-Dose (90 Days) Toxicity Testing, octobre 2002 » [Conférence internationale sur l’harmonisation des exigences techniques pour l’enregistrement des médicaments à usage vétérinaire (CIHV), Guide 31, études d’évaluation de la sécurité des résidus de médicaments à usage vétérinaire dans l’alimentation humaine : étude de la toxicité par administration réitérée (90 jours), octobre 2002] et le « Guidance for Industry. Bioanalytical Method Validation, U. S. Department of Health and Human Services, Food and Drug Administration, Center for Drug Evaluation and Research (CDER), Center for Veterinary Medicine (CVM), mai 2001 » [Lignes directrices pour le secteur. Validation de la méthode bioanalytique, ministère de la Santé et des Services sociaux des États-Unis, administration des aliments et des médicaments, centre d’évaluation et de recherche sur les médicaments (CERM), centre de médecine vétérinaire (CMV), mai 2001].

74

Il importe de constater que les requérantes n’ont pas contesté avoir suivi le protocole prévu dans les lignes directrices et les recommandations susmentionnées. Ainsi, elles n’ont pas remis en cause le fait que les rapports d’études du lot 1 respectaient les lignes directrices applicables et qu’ils reposaient sur les principes connus et largement accessibles dans la communauté scientifique. Cette circonstance tend ainsi à confirmer la conclusion de l’EMA selon laquelle lesdits rapports ne présentent pas de caractère innovant.

75

De surcroît, l’affirmation des requérantes selon laquelle les rapports d’études du lot 1 fournissent une stratégie innovante sur la façon de planifier un programme de toxicologie n’est nullement étayée. En effet, les requérantes n’ont pas avancé d’élément concret visant à justifier que les rapports contiendraient des éléments uniques et importants permettant d’apporter des éclairages sur leur stratégie inventive globale et sur leur programme de développement.

76

Dans le même sens, les requérantes soutiennent que, même si dans leur conception, les études d’innocuité sont en partie standardisées, les lignes directrices ne sauraient se substituer au savoir-faire en matière de données relatives à la substance active. Toutefois, comme le souligne l’EMA, l’affirmation d’un savoir-faire prétendument contenu dans les documents est vague et ne permet pas de déterminer en quoi consisterait l’approche innovante suivie. Pour les mêmes raisons, les requérantes font valoir en vain qu’une différence considérable existe entre des documents d’orientations contenant des recommandations sur les documents qu’il convient ou non de produire aux fins d’une demande et les documents que comporte réellement le dossier versé au soutien de cette demande.

77

Elles se prévalent également de détails sur les normes de gestion interne que comporterait une étude de toxicologie développées par MSD, mais ne les identifient pas, ni, a fortiori, n’apportent d’éléments concrets permettant de comprendre en quoi lesdites normes refléteraient un « savoir-faire secret développé au prix d’efforts et de frais substantiels ». Il est de surcroît utile de souligner que l’EMA a accepté que ne soient pas divulgués des détails relatifs à la norme de référence interne utilisée pour les essais analytiques.

78

En deuxième lieu, les requérantes reprochent en substance à l’EMA de n’avoir indiqué aucun motif permettant de contredire l’argument selon lequel les informations seraient confidentielles, car elles indiqueraient l’itinéraire ou la « feuille de route » conduisant à l’obtention d’une AMM pour tout médicament contenant la même substance active.

79

Premièrement, pour autant que cette considération doive se comprendre comme un grief tiré d’un défaut de motivation, il doit être rejeté. En effet, la décision attaquée contient des motifs précis concernant les arguments des requérantes sur ce point, ainsi que cela ressort tant des réponses aux considérations générales que de celles, particulières, portant sur les informations litigieuses qui, selon l’EMA, ne présentent pas de caractère confidentiel (voir les pages 331 et 339 de l’annexe du courrier du 25 novembre 2015).

80

Deuxièmement, si les arguments avancés par les requérantes doivent être interprétés comme un grief visant à démontrer le caractère confidentiel de l’ensemble des rapports d’études du lot 1 et à constater que l’EMA n’a pas apporté la preuve du contraire, il doit être rejeté. Tout d’abord, la considération selon laquelle l’ensemble des informations litigieuses seraient confidentielles au motif qu’elles indiqueraient l’itinéraire ou la « feuille de route » conduisant à l’obtention d’une AMM s’apparente davantage à l’invocation d’une présomption générale de confidentialité qu’il reviendrait à l’EMA de renverser. Or, l’examen du premier moyen a révélé qu’une telle présomption n’existait pas dans le cadre des procédures d’AMM de médicaments vétérinaires. Ensuite, les arguments au soutien dudit grief sont vagues et non étayés. En effet, la simple affirmation que les informations litigieuses indiqueraient l’itinéraire ou la « feuille de route » conduisant à l’obtention d’une AMM ne permet pas de déterminer que celles-ci seraient confidentielles. Il ne saurait donc valablement être soutenu que l’EMA aurait dû présenter des motifs permettant de démontrer le contraire. Enfin, il importe de souligner que, dans la décision attaquée, l’EMA a décidé d’occulter un certain nombre d’informations. En effet, elle souligne, sans être contredite sur ce point par les requérantes, que les documents ne contiennent aucune information sur la composition ou la fabrication du Bravecto, puisque les informations suivantes des rapports d’études du lot 1 ont été occultées : des détails relatifs aux intervalles de concentration des substances actives, des détails relatifs à la norme de référence interne utilisée pour les essais analytiques ainsi que des références aux projets de développement futurs.

81

En troisième lieu, ne saurait prospérer l’argument des requérantes selon lequel, en application de la jurisprudence issue des ordonnances du 25 juillet 2014, Deza/ECHA (T‑189/14 R, non publiée, EU:T:2014:686), et du 23 mai 2016, Pari Pharma/EMA (T‑235/15 R, non publiée, EU:T:2016:309), les rapports d’études du lot 1 forment un ensemble inséparable revêtant une valeur économique et méritent ainsi un traitement confidentiel dans leur intégralité. D’une part, il n’est pas contesté que lesdits rapports contiennent un certain nombre d’informations qui ont été publiées. En effet, l’EPAR relatif au Bravecto est accessible au public et comporte des données qui proviennent directement des rapports d’études du lot 1, ce qui implique forcément qu’une partie au moins des données figurant dans lesdits rapports sont accessibles au public. Par conséquent, pour pouvoir revendiquer le traitement confidentiel de l’ensemble des rapports, il revient aux requérantes de démontrer que l’assemblage complet des données accessibles au public avec celles qui ne le sont pas constitue une donnée commerciale sensible dont la divulgation porterait atteinte à leurs intérêts commerciaux. Le fait allégué par les requérantes que l’EPAR serait moins détaillé et ne contiendrait pas d’explications sur les modalités suivies pour parvenir aux résultats concernant le Bravecto est sans incidence à cet égard. Les requérantes n’ont présenté que des explications vagues et génériques afin de démontrer que ledit assemblage des informations litigieuses pourrait produire les conséquences alléguées en termes d’atteinte à leur savoir-faire et à leurs secrets d’affaires. Des explications précises et concrètes se seraient révélées d’autant plus nécessaires que, comme cela a été rappelé au point 64 ci-dessus, les exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 dérogeant au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents, elles doivent être interprétées et appliquées strictement.

82

D’autre part, l’atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne, telle que visée à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, ne se détermine pas nécessairement au regard de la valeur patrimoniale de l’information qui fait l’objet de la divulgation.

83

Dans ce cadre, doit être également rejeté l’argument tiré du fait que, à la différence des rapports rédigés par le comité des médicaments à usage humain qui contiennent des données présentées par le demandeur d’une AMM, les rapports d’études du lot 1 proviennent des requérantes elles-mêmes, ce qui renforcerait leur caractère confidentiel. En effet, comme cela a été indiqué au point 81 ci-dessus, les requérantes n’ont pas concrètement démontré que la divulgation des informations litigieuses porterait atteinte à leurs intérêts commerciaux.

84

En quatrième lieu, l’affirmation des requérantes selon laquelle les concurrents seraient en mesure d’utiliser les études comme une aide à la conception de leurs propres études de toxicologie et d’étalonner au regard des éléments produits par MSD leurs propres demandes d’AMM doit être relativisée à un double titre. D’une part, les entreprises concurrentes doivent en tout état de cause mener leurs propres études conformément aux lignes directrices scientifiques applicables et fournir toutes les données requises pour que leur dossier soit complet. Il n’apparaît dès lors pas évident que la divulgation des rapports d’études du lot 1 permette à ces dernières d’accélérer le processus d’obtention d’une AMM de leur médicament et d’obtenir l’approbation d’essais cliniques plus rapidement. Aucun argument concret n’a été présenté à cet égard. D’autre part, comme le rappelle l’EMA dans la décision attaquée, le règlement no 726/2004 et la directive 2001/82 accordent une protection, au moyen de l’exclusivité des données, à des documents réglementaires présentés aux fins d’obtenir une AMM. Une entreprise concurrente ne pourra donc se contenter d’utiliser les études d’innocuité des requérantes, mais devra produire les études qu’elle a elle-même effectuées.

85

En cinquième lieu, les requérantes font valoir en vain que la période d’exclusivité des données accordée aux titulaires d’AMM n’assurerait pas une protection infaillible contre la concurrence déloyale et qu’il existerait d’innombrables désavantages commerciaux auxquels les titulaires d’AMM seraient exposés en cas de divulgation erga omnes de leurs données cliniques et non cliniques. Il ressort des points qui précèdent que les requérantes n’ont pas démontré la réalité des désavantages commerciaux avancés dans leurs écritures.

86

Dans ce contexte, les requérantes soutiennent que la substance active et la norme de référence sont toutes deux indispensables pour mener les analyses donnant lieu aux résultats attendus et que leurs concurrents ne seraient pas en mesure de produire ces mêmes résultats sans commettre une violation de leurs droits d’exclusivité à l’égard de la substance active. Il convient toutefois de rappeler que l’EMA a considéré qu’il convenait d’occulter la fourchette de concentration de la substance active ainsi que les détails de la norme de référence interne utilisée dans les tests analytiques. Les requérantes n’ont apporté aucun élément permettant de comprendre la raison pour laquelle ces occultations ne seraient pas suffisantes, ni, partant, en quoi les concurrents violeraient leurs droits d’exclusivité à l’égard de la substance active.

87

En sixième lieu, les requérantes font état d’un risque d’une perte immédiate du bénéfice de la période d’exclusivité des données en cas de divulgation des rapports d’études du lot 1, au motif que ceux-ci pourraient être utilisés par des concurrents dans des pays tiers qui le permettraient. Toutefois, outre le fait que cet argument des requérantes est vague et imprécis, rien ne permet de conclure que l’accès aux informations en cause, lesquelles ne présentent pas de caractère confidentiel du point de vue des intérêts commerciaux des requérantes, rendrait plus facile, à lui seul, l’obtention d’une AMM dans un pays tiers par une entreprise pharmaceutique concurrente. Cela est d’autant plus manifeste que des données telles que celles relatives à la fourchette de concentration de la substance active, aux détails de la norme de référence interne utilisée dans les tests analytiques et à une demande de fixation des limites de résidu demeurent, quant à elles, confidentielles. Les requérantes n’ont avancé aucun argument concret visant à démontrer la prétendue réalité du danger qui existerait dans certains pays tiers. De surcroît, la non-divulgation de toutes les études, pour empêcher les autorités d’un pays tiers d’accorder l’accès à son marché à un fabricant sans que celui-ci soit tenu de soumettre ses propres études, reviendrait à anéantir le droit du public à accéder aux documents contenant des informations concernant des médicaments autorisés, accordé par le droit de l’Union.

88

En septième lieu, à supposer que les rapports d’études du lot 1 puissent être utilisés comme un élément du dossier d’AMM déposé par des concurrents dans une procédure introduite pour un médicament générique concurrent du Bravecto, il n’en reste pas moins qu’un tel médicament générique ne paraît pas pouvoir être commercialisé avant le terme d’une période de dix années (voir article 13, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2001/82). Ainsi, il est difficilement concevable que l’utilisation d’informations près de dix années après la mise sur le marché du Bravecto puisse porter atteinte aux intérêts commerciaux des requérantes.

89

En huitième lieu, les requérantes font également valoir en vain qu’elles ont investi des ressources substantielles dans l’élaboration des rapports et que cela démontrerait de façon évidente leur valeur commerciale potentielle. Tout d’abord, comme cela a été rappelé au point 82 ci-dessus, l’atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne, telle que visée à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, ne se détermine pas nécessairement au regard de la valeur patrimoniale de l’information qui fait l’objet de la divulgation. En d’autres termes, le fait que la mise en œuvre d’études d’innocuité implique des investissements en termes financiers pour des entreprises pharmaceutiques n’implique pas en soi que lesdites études soient confidentielles. Ensuite, comme cela a été souligné au point 72 ci-dessus, tous les essais d’innocuité qui sont inclus dans les demandes d’AMM de médicaments vétérinaires doivent avoir répondu aux exigences de la directive 2001/82 et des lignes directrices de l’EMA relatives aux essais de toxicité. Enfin, les données figurant dans les rapports d’études du lot 1 sont protégées par l’exclusivité (voir point 84 ci-dessus). Compte tenu de ces éléments, force est de constater que toutes les entreprises pharmaceutiques doivent mener leur propres études d’innocuité, puisqu’elles ne peuvent se contenter de se référer à celles d’entreprises concurrentes. Elles doivent ainsi procéder à des investissements financiers dans ce cadre au même titre que les requérantes. Il n’apparaît donc pas que la divulgation de telles informations qui auraient une valeur commerciale puisse de ce seul fait porter atteinte aux intérêts commerciaux des requérantes et que ces informations revêtent d’office un caractère commerciale confidentiel.

90

En neuvième lieu, l’argument selon lequel les concurrents seront en mesure de porter atteinte aux futurs projets auxquels MSD destine le Bravecto dans et hors de l’Union ne saurait prospérer. En effet, il ressort de la décision attaquée que l’EMA a accepté d’expurger les références faites dans les rapports d’études du lot 1 à tout projet de développement futur des requérantes. Compte tenu de cet élément et comme le souligne l’EMA, il n’est pas aisé de comprendre en quoi la divulgation des documents pourrait affecter les projets futurs de développement d’autres indications du Bravecto.

91

En dixième lieu, l’affirmation selon laquelle les concurrents pourraient nuire aux requérantes en divulguant hors contexte des passages des rapports d’études du lot 1 dans le but de nuire à la réputation du Bravecto est dénuée de toute pertinence. En effet, la possibilité de nuire à la réputation du titulaire des documents ne constitue pas un critère de nature à identifier si une information est confidentielle ou ne l’est pas.

92

En onzième lieu, doit être rejetée l’affirmation selon laquelle les informations non cliniques figurant dans les rapports d’études du lot 1 permettraient aux concurrents de MSD d’obtenir plus facilement une AMM. Les requérantes n’ont identifié aucune donnée desdits rapports, ni n’ont étayé leur propos d’aucune argumentation concrète permettant de considérer que les informations non cliniques revêtiraient un caractère confidentiel.

93

En dernier lieu, les requérantes affirment que l’approche de l’EMA exigeant des requérantes qu’elles démontrent en quoi l’AMM d’un produit concurrent s’appuie sur l’exploitation déloyale de leurs documents n’est pas conforme à la jurisprudence, laquelle requerrait seulement de démontrer que l’exploitation déloyale de leurs données est raisonnablement prévisible et non purement hypothétique. Un tel argument est dénué de pertinence, les requérantes n’ayant pas démontré un hypothétique risque d’utilisation déloyale de leurs données, comme l’a relevé l’EMA. En effet, il a été rappelé au point 84 ci-dessus que les entreprises concurrentes doivent en tout état de cause mener leurs propres études conformément aux lignes directrices scientifiques applicables et fournir toutes les données requises pour que leur dossier soit complet. Dans ces circonstances, il n’apparaît pas raisonnablement prévisible que l’évaluation comparative avec le dossier des requérantes puisse permettre à leurs concurrentes d’accélérer leur propre procédure d’autorisation réglementaire et de se voir autoriser la conduite d’essais cliniques plus rapidement.

94

Il résulte de tout ce qui précède que le deuxième moyen doit être rejeté.

Sur le troisième moyen, tiré de la protection, par l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001, des rapports d’études du lot 1 contre les atteintes au processus décisionnel

95

Au soutien du troisième moyen, les requérantes avancent, tout d’abord, que la divulgation des rapports d’études du lot 1 serait en tout état de cause prématurée. Elles soulignent que l’EMA considère qu’elle ne peut occulter que des informations relatives aux demandes subséquentes des requérantes et non celles figurant dans la demande d’AMM ayant donné lieu à la présentation des rapports. Or, elles estiment que, si la divulgation peut affecter une demande d’AMM à venir, les informations en cause relèvent de l’article 4, paragraphe 3 (ainsi que de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1409/2001), et devraient faire l’objet d’un traitement confidentiel. Ensuite, elles font valoir que la divulgation de données incitera les demandeurs d’AMM à ne communiquer que le minimum d’informations nécessaire à l’appui de leur demande. Elles soutiennent enfin qu’elles sont directement et individuellement concernées par les éventuels effets de la divulgation des rapports d’études du lot 1 sur le processus décisionnel de l’EMA concernant le Bravecto et qu’elles sont donc en droit de faire valoir leurs arguments au titre de l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001.

96

L’EMA conteste le fait que la divulgation des rapports d’études du lot 1 puisse affecter la procédure d’AMM du Bravecto.

97

Dans le cadre du troisième moyen, les requérantes font valoir que la divulgation des rapports d’études du lot 1 porte atteinte au processus décisionnel et est ainsi en contradiction avec l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001.

98

À titre liminaire, il convient de rappeler que l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001 suppose qu’il soit démontré que l’accès aux documents sollicités était susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte à la protection du processus décisionnel de la Commission et que ce risque d’atteinte était raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (voir arrêt du 18 décembre 2008, Muñiz/Commission, T‑144/05, non publié, EU:T:2008:596, point 74 et jurisprudence citée).

99

Il convient également de souligner que l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001 opère une distinction claire entre le cas où la procédure est close et celui où elle ne l’est pas. Ainsi, d’une part, selon l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, dudit règlement, relève du champ d’application de l’exception visant la protection du processus décisionnel tout document établi par une institution pour son usage interne ou reçu par une institution et qui concerne une question sur laquelle celle-ci n’a pas encore pris de décision. D’autre part, l’article 4, paragraphe 3, second alinéa, du même règlement prévoit que, après la prise de décision, l’exception en cause couvre uniquement les documents contenant des avis destinés à l’utilisation interne dans le cadre de délibérations et de consultations préliminaires au sein de l’institution concernée (arrêt du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:496, point 78).

100

Ce n’est dès lors que pour une partie seulement des documents à usage interne, à savoir ceux contenant des avis destinés à l’utilisation interne dans le cadre de délibérations et de consultations préliminaires au sein de l’institution concernée, que l’article 4, paragraphe 3, second alinéa, du règlement no 1049/2001 permet d’opposer un refus même après que la décision a été prise, lorsque leur divulgation porterait gravement atteinte au processus décisionnel de cette institution (arrêt du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:496, point 79).

101

Il s’ensuit que le législateur de l’Union a considéré que, une fois la décision adoptée, les exigences de protection du processus décisionnel présentaient une acuité moindre, de sorte que la divulgation de tout document autre que ceux mentionnés à l’article 4, paragraphe 3, second alinéa, du règlement no 1049/2001 ne peut jamais porter atteinte audit processus et que le refus de divulgation d’un tel document ne saurait être autorisé, alors même que la divulgation de celui-ci aurait porté gravement atteinte à ce processus si elle avait eu lieu avant l’adoption de la décision en cause (arrêt du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:496, point 80).

102

En l’espèce, force est de constater, tout d’abord, que les rapports d’études du lot 1 ont été soumis et évalués dans le cadre de la demande d’AMM du Bravecto, ensuite, que l’EMA a accordé aux requérantes l’AMM de celui-ci pour une indication thérapeutique déterminée et, enfin, que la procédure d’octroi de l’AMM au Bravecto était close lorsque la demande d’accès auxdits rapports a été présentée par un tiers. L’article 4, paragraphe 3, second alinéa, du règlement no 1049/2001 est ainsi la disposition à laquelle se réfèrent en substance les requérantes.

103

C’est en tenant compte de ces considérations qu’il convient d’analyser les arguments des requérantes.

104

Au préalable, il doit être répondu à l’argument de l’EMA par lequel elle considère que le troisième moyen avancé par les requérantes devrait être rejeté au motif que celles-ci n’ont pas d’intérêt légitime concret à le soulever. Le raisonnement avancé par l’EMA repose sur le fait que l’article 4, paragraphe 4, du règlement no 1049/2001 prévoit que, dans le cas de documents émanant d’un tiers, l’institution consulte celui-ci afin de déterminer si une exception prévue à l’article 4, paragraphe 1 ou 2, du même règlement est d’application, à moins qu’il ne soit clair que le document doit ou ne doit pas être divulgué. Or, étant donné que le libellé de cette disposition indique que l’exception invoquée par le titulaire des documents justifiant leur non-divulgation ne peut reposer que sur l’article 4, paragraphes 1 et 2, du règlement no 1049/2001, les requérantes n’auraient pas d’intérêt à invoquer une éventuelle violation de l’article 4, paragraphe 3, de ce règlement devant le Tribunal.

105

Cela revient en substance à considérer que la limite selon laquelle les tiers à l’origine des données doivent être consultés seulement « afin de déterminer si une exception prévue [à l’article 4,] paragraphe 1 ou 2[, du règlement no 1049/2001] est d’application » et non à l’article 4, paragraphe 3, de ce règlement vaut également lors de la procédure devant le Tribunal.

106

Force est toutefois de considérer qu’il n’existe aucun obstacle légal empêchant les requérantes de soulever la violation de l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001 dans le cadre d’un recours en annulation devant le Tribunal. L’exigence prévue à l’article 4, paragraphe 4, du même règlement, imposée aux requérantes lors de la consultation, de se limiter aux exceptions prévues à l’article 4, paragraphes 1 et 2, dudit règlement ne saurait constituer ipso jure un obstacle à soulever la violation de l’article 4, paragraphe 3, de ce règlement devant le Tribunal. Cela est d’autant plus vrai que, comme le soulignent les requérantes, elles sont directement concernées tant par la décision de l’EMA de divulguer les documents qu’elles considèrent comme confidentielles que par les effets de cette divulgation sur le processus décisionnel de celle-ci en ce qui concerne le Bravecto.

107

Partant, le moyen ne saurait être écarté au prétendu motif que les requérantes n’auraient aucun intérêt à le soulever.

108

Quant au fond, en premier lieu, les requérantes font valoir que les rapports d’études du lot 1 vont être utilisés pour de nouvelles demandes d’autorisation, puisqu’elles comptent s’appuyer sur ceux-ci pour leurs demandes à venir. Elles estiment ainsi que les informations en cause relèvent de l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001 et que leur divulgation portera donc gravement atteinte au processus décisionnel de l’EMA dans le cadre de la procédure administrative pendante et de procédures administratives futures.

109

Ces arguments ne sauraient toutefois prospérer. Premièrement, comme l’EMA le relève à juste titre, les titulaires des AMM – qui, pour obtenir celles-ci, ont présenté des données d’essai d’innocuité – bénéficient d’une protection de leurs données à plusieurs niveaux au terme de la procédure d’AMM. D’une part, les titulaires des données jouissent d’une période de protection de celles-ci en vertu de l’article 39, paragraphe 10, du règlement no 726/2004. D’autre part, ils bénéficient d’une protection des informations commerciales confidentielles contenues dans un dossier d’AMM, y compris les informations relatives à la fabrication du produit et les autres spécifications techniques et industrielles des processus de qualité mis en œuvre pour fabriquer la substance. Compte tenu de ces garanties, il n’apparaît a priori pas que l’accès aux rapports d’études du lot 1, une fois l’AMM délivrée, puisse porter préjudice aux intérêts des requérantes.

110

Deuxièmement, le fait que d’autres données puissent être réutilisées dans le cadre de nouvelles demandes d’AMM ne constitue pas en soi un motif permettant de considérer que ces informations sont confidentielles, ni qu’elles sont susceptibles de porter atteinte au processus décisionnel au sens de l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001. Comme il a été souligné au point 46 ci-dessus, l’EMA a veillé, dans la décision attaquée, à ce que les données ne se rapportant pas à l’indication déjà autorisée et celles qui ont trait aux projets de développement futurs demeurent confidentielles.

111

Troisièmement, et en tout état de cause, force est de constater que les requérantes n’ont pas présenté d’éléments permettant de conclure que la prétendue atteinte au processus décisionnel était grave. Or, ainsi qu’il résulte de la jurisprudence citée aux points 98 et 99 ci-dessus et compte tenu du constat figurant au point 102 ci-dessus, il revenait aux requérantes de démontrer que l’accès aux rapports d’études du lot 1 était susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte à la protection du processus décisionnel de la Commission et que ce risque d’atteinte était raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (voir, en ce sens, arrêt du 18 décembre 2008, Muñiz/Commission, T‑144/05, non publié, EU:T:2008:596, point 74 et jurisprudence citée). La nécessité d’une telle démonstration se justifiait avec d’autant plus d’intensité que les exigences de protection du processus décisionnel présentaient une acuité moindre.

112

En second lieu, les requérantes affirment en vain que la divulgation des données telles que les rapports d’études du lot 1 inciterait les demandeurs d’AMM à confier le minimum d’informations sensibles à l’EMA et aurait en substance un effet contre-productif.

113

D’une part, les entreprises pharmaceutiques qui cherchent à obtenir une AMM pour leur médicament n’ont aucun intérêt à transmettre le moins d’informations possibles à l’EMA, une telle approche diminuant significativement leur chance de succès à cet égard.

114

D’autre part, reconnaître l’éventuelle réticence d’une entreprise pharmaceutique à confier, dans le cadre de sa demande d’AMM d’un médicament, des informations à l’EMA au motif que ces dernières pourraient être divulguées en vertu du règlement no 1049/2001 ne saurait constituer le fondement d’une atteinte grave au processus décisionnel au sens de l’article 4, paragraphe 3, second alinéa, du règlement no 1049/2001 (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 24 mai 2011, Batchelor/Commission, T‑250/08, EU:T:2011:236, point 80).

115

Il résulte de tout ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté.

Sur le quatrième moyen, tiré de l’absence d’une mise en balance des intérêts

116

Les requérantes constatent le fait que l’EMA ait indiqué à plusieurs reprises et de façon incidente, dans la décision attaquée, que les informations pouvaient être divulguées en tout état de cause lorsqu’un intérêt public supérieur le justifiait. Elles constatent toutefois que l’EMA n’identifie ni la nature de l’intérêt public ni les raisons pour lesquelles il prévaudrait sur les intérêts des requérantes. Selon elles, une interprétation de l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001 à la lumière de l’article 39, paragraphe 3, de l’accord ADPIC doit conduire à considérer que, lorsqu’il existe un risque d’exploitation déloyale des données, les hypothèses d’intérêt public supérieur à la divulgation se limitent au cas où il est nécessaire de protéger le public, une telle nécessité n’existant toutefois pas en l’espèce. Elles ajoutent que, au nom de leurs droits fondamentaux au respect de la vie privée ainsi qu’à la protection de leurs données à caractère professionnel et du droit de propriété (à l’inclusion de la propriété intellectuelle), l’EMA aurait dû vérifier si la divulgation était proportionnée à l’atteinte portée aux intérêts des requérantes et s’il pouvait exister d’autres solutions (comme une communication réservée aux chercheurs universitaires indépendants). Elles soutiennent que les préoccupations de santé publique avancées par l’EMA ne sont pas de nature à justifier d’un intérêt public supérieur, dans la mesure où ces motifs ne sont en réalité fondés que sur des allégations générales et non étayées. En ce sens, l’EMA ne pourrait se prévaloir de sa mission de santé publique et de l’obligation de transparence prévue par le règlement no 1049/2001 pour divulguer les rapports d’études du lot 1, car le règlement no 726/2004 instaurerait déjà un régime d’accès détaillé qui prévoirait la non-divulgation des données à caractère confidentiel du point de vue commercial.

117

L’EMA réfute l’ensemble de ces arguments.

118

Au préalable, il importe de déterminer la portée exacte du quatrième moyen avancé par les requérantes. Il ressort du point 111 de la requête que le reproche fait à l’EMA de ne pas avoir effectué la mise en balance des intérêts intervient « une fois retenu le caractère confidentiel (en tout ou en partie) des rapports d’études du lot 1 ». Le moyen ne concerne donc pas le moment – antérieur chronologiquement parlant – où l’EMA se pose la question du caractère confidentiel ou non de telle ou telle information. Le raisonnement que poursuivent les requérantes aux points 114 et suivants de la requête est toutefois ambivalent et laisse à penser que celles-ci feraient également grief à l’EMA de ne pas avoir opéré une mise en balance des intérêts lors de la première étape de son raisonnement, à savoir lors de l’appréciation du caractère confidentiel ou non de telle ou telle information.

119

Cela étant précisé, il convient d’examiner le moyen, à titre principal, en ce qu’il vise l’absence de mise en balance des intérêts, alors même que les informations litigieuses sont confidentielles et, à titre subsidiaire, en ce qu’il concerne l’existence même de l’une des exceptions prévues à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001.

120

En premier lieu, il convient de rappeler que l’article 4, paragraphe 2, dernier membre de phrase, du règlement no 1049/2001 dispose que les institutions de l’Union ne refusent pas l’accès à un document lorsque sa divulgation est justifiée par un intérêt public supérieur, même si celle-ci pourrait porter atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée ou à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit des institutions de l’Union (arrêt du 7 octobre 2014, Schenker/Commission, T‑534/11, EU:T:2014:854, point 74). Dans ce contexte, il y a lieu de mettre en balance, d’une part, l’intérêt spécifique devant être protégé par la non-divulgation du document concerné et, d’autre part, notamment, l’intérêt général à ce que ce document soit rendu accessible, eu égard aux avantages découlant, ainsi qu’il est précisé au considérant 2 du règlement no 1049/2001, d’une transparence accrue, à savoir une meilleure participation des citoyens au processus décisionnel ainsi qu’une plus grande légitimité, une plus grande efficacité et une plus grande responsabilité de l’administration des citoyens dans un système démocratique (arrêt du 21 octobre 2010, Agapiou Joséphidès/Commission et EACEA, T‑439/08, non publié, EU:T:2010:442, point 136).

121

Si l’intérêt public supérieur susceptible de justifier la divulgation d’un document ne doit pas nécessairement être distinct des principes qui sous-tendent le règlement no 1049/2001 (arrêt du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 92), il ressort toutefois de la jurisprudence que des considérations générales seules ne sauraient être de nature à établir que le principe de transparence présente une acuité particulière qui pourrait primer les raisons justifiant le refus de divulgation des documents en question et qu’il incombe au demandeur d’invoquer de manière concrète des circonstances fondant un intérêt public supérieur justifiant la divulgation des documents concernés (voir, en ce sens, arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, points 93 et 94, et du 23 septembre 2015, ClientEarth et International Chemical Secretariat/ECHA, T‑245/11, EU:T:2015:675, point 193).

122

D’une part, ainsi que le souligne l’EMA, celle-ci n’a pas conclu que les informations en cause devaient être protégées par un régime d’exception tel que visé à l’article 4, paragraphe 2 ou 3, du règlement no 1049/2001. De ce fait, elle n’avait pas l’obligation de déterminer ou d’évaluer l’intérêt public à la divulgation des informations, ni de le mettre en balance avec l’intérêt des requérantes à garder lesdites informations confidentielles.

123

D’autre part, il convient de noter qu’est imprécise et non étayée l’affirmation des requérantes selon laquelle l’EMA a indiqué à plusieurs reprises et de façon incidente, dans la décision attaquée, que les informations pouvaient être divulguées en tout état de cause lorsqu’un intérêt public supérieur existait. En effet, les requérantes n’identifient pas les points de la décision attaquée dans lesquels l’EMA se référerait à l’intérêt public supérieur et ne permettent donc pas de prendre en compte le contexte dans lequel seraient intervenues ces considérations.

124

En second lieu, à supposer qu’il faille considérer que les requérantes reprochent à l’EMA de ne pas avoir opéré une mise en balance des intérêts lors de l’examen du caractère confidentiel ou non de chaque information, force est de considérer que les arguments avancés ne sauraient prospérer.

125

Premièrement, le raisonnement des requérantes repose sur le présupposé erroné qu’il existe une présomption générale de confidentialité. L’analyse du premier moyen a en effet révélé qu’une telle présomption n’existait pas pour les rapports d’études d’innocuité concernés par la demande d’accès aux documents.

126

Deuxièmement, les requérantes avancent en substance que, compte tenu des dispositions spéciales figurant dans le règlement no 726/2004, l’EMA aurait dû adopter une démarche prudente lorsqu’elle a analysé la question de la divulgation des rapports d’études du lot 1 en application du règlement no 1049/2001 et qu’elle aurait dû ainsi faire intervenir la question de l’intérêt public supérieur dans son appréciation.

127

Toutefois, l’article 73 du règlement no 726/2004 prévoit explicitement que les dispositions du règlement no 1049/2001 s’appliquent aux documents détenus par l’EMA. Celle-ci est donc tenue, au nom du principe de transparence consacré à l’article 15 TFUE et dans le règlement no 1049/2001, d’accorder l’accès aux documents qu’elle détient, à savoir, notamment, des rapports d’études qui lui ont été transmis dans le cadre de demandes d’AMM. Ce n’est que si ces documents relèvent de l’une des exceptions visées à l’article 4 du règlement no 1049/2001 qu’il convient d’en refuser l’accès. Ainsi, et contrairement à ce qu’affirment les requérantes, le règlement no 726/2004 ne prévoit pas de régime spécial d’accès aux documents qui dérogerait au principe général de transparence prévu par le règlement no 1049/2001.

128

L’EMA n’a donc pas commis d’erreur de droit en ne faisant pas intervenir le critère de l’intérêt public supérieur dans son appréciation du caractère confidentiel ou non des données figurant dans les rapports d’études du lot 1.

129

Troisièmement, les requérantes font valoir en substance que l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001 aurait dû être interprété et appliqué à la lumière de l’article 39, paragraphe 3, de l’accord ADPIC. Elles soutiennent que, dès lors qu’existait un risque d’exploitation déloyale des données, les rapports d’études du lot 1 ne pouvaient être divulgués que s’il y avait un intérêt public supérieur à cette divulgation, lequel intérêt ne pouvait exister que s’il était nécessaire de protéger le public. Or, un tel intérêt n’aurait pas existé en l’espèce.

130

Ces arguments doivent être rejetés. Il importe de rappeler que les « données réglementaires » visées par l’article 39, paragraphe 3, de l’accord ADPIC sont protégées tant par l’article 39, paragraphe 10, du règlement no 726/2004 que par l’article 4 du règlement no 1049/2001. Ces deux dispositions prévoient en effet des mesures visant à assurer que les données soient protégées contre l’exploitation déloyale dans le commerce. De telles mesures sont conformes à ce que requiert l’article 39, paragraphe 3, in fine de l’accord ADPIC. Il revenait ainsi aux requérantes d’indiquer en quoi la protection prévue par les dispositions susmentionnées n’aurait pas été suffisante et que la démonstration d’un intérêt public supérieur se serait donc imposée.

131

Quatrièmement, les requérantes estiment que l’EMA aurait dû, au nom des droits fondamentaux des requérantes au respect de la vie privée ainsi qu’à la protection de leurs données à caractère professionnel et du droit de propriété (à l’inclusion de la propriété intellectuelle), vérifier si la divulgation était proportionnée à l’atteinte portée aux intérêts des requérantes et s’il pouvait exister d’autres solutions (comme une communication réservée aux chercheurs universitaires indépendants). Ces arguments ne sauraient toutefois prospérer. En effet, l’examen de cette question doit être opéré dans le contexte des dispositions du règlement no 1049/2001. Or, comme le rappelle à juste titre l’EMA, il ressort de l’application combinée des règlements nos 1049/2001 et 726/2004 que tout citoyen a un droit d’accès aux documents de l’EMA, y compris ceux soumis par les entreprises pharmaceutiques aux fins de l’obtention d’une AMM, sous réserve des exceptions prévues par ledit règlement no 1049/2001. En l’espèce, l’EMA n’a fait qu’appliquer ces dispositions. Compte tenu de l’absence de présomption générale de confidentialité des rapports d’études du lot 1, elle ne pouvait ainsi refuser l’accès à l’intégralité desdits rapports que si toutes les informations y figurant avaient été considérées comme des informations commerciales confidentielles dont la divulgation pouvait porter atteinte aux intérêts commerciaux des requérantes, ce que celles-ci n’ont pas démontré. Dans ces circonstances, l’EMA n’a pas pu enfreindre les droits fondamentaux des requérantes en appliquant les dispositions du règlement no 1049/2001.

132

À cet égard, s’agissant du reproche précis fait à l’EMA de ne pas avoir vérifié si la divulgation était proportionnée à l’atteinte portée aux intérêts des requérantes, il est utile de souligner que l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001 prévoit que, si une partie seulement du document demandé est concernée par une ou plusieurs des exceptions, les autres parties du document sont divulguées et que l’examen de l’accès partiel audit document de l’EMA doit être réalisé à l’aune du principe de proportionnalité (voir, en ce sens, arrêt du 6 décembre 2001, Conseil/Hautala, C‑353/99 P, EU:C:2001:661, points 27 et 28).

133

La jurisprudence souligne en effet qu’il résulte des termes mêmes de l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001 qu’une institution ou un organe est tenu d’examiner s’il convient d’accorder un accès partiel aux documents visés par une demande d’accès, en limitant un refus éventuel aux seules données couvertes par les exceptions visées. L’institution ou l’organe doit accorder un tel accès partiel si le but poursuivi par cette institution ou cet organe, lorsqu’il refuse l’accès au document, peut être atteint dans l’hypothèse où cette institution se limiterait à occulter les passages qui peuvent porter atteinte à l’intérêt public protégé (voir, en ce sens, arrêts du 6 décembre 2001, Conseil/Hautala, C‑353/99 P, EU:C:2001:661, point 29, et du 12 septembre 2013, Besselink/Conseil, T‑331/11, non publié, EU:T:2013:419, point 84).

134

L’analyse détaillée des différents documents, figurant dans la décision attaquée, fait apparaître que l’EMA a examiné la demande d’accès aux documents dans le strict respect du principe de proportionnalité dont l’application dans le domaine de l’accès aux documents a été décrite par la jurisprudence mentionnée aux points 132 et 133 ci-dessus.

135

Cinquièmement, les préoccupations de santé publique avancées par l’EMA ne seraient pas de nature, selon les requérantes, à justifier l’existence d’un intérêt public supérieur, dans la mesure où ces motifs ne seraient en réalité fondés que sur des allégations générales et non étayées qui ne sont pas spécifiquement liées aux rapports d’études du lot 1. Cet argument doit être rejeté, les requérantes n’ayant identifié aucun point de la décision attaquée dans lequel l’EMA aurait mentionné des considérations de santé publique. De surcroît, il ne semble pas que l’EMA ait fondé sa décision de divulguer les rapports d’études du lot 1 sur des préoccupations de santé publique. Les seuls motifs qui ont déterminé le sens de la décision attaquée concernent la question de savoir si les documents concernés relevaient de l’une des exceptions visées à l’article 4 du règlement no 1049/2001.

136

Sixièmement, le reproche fait par les requérantes à l’EMA de faire référence à la sécurité du Bravecto pour la divulgation des documents est dénué de pertinence pour des raisons analogues à celles exprimées au point 135 ci-dessus. En effet, les requérantes n’ont fait mention d’aucun point de la décision attaquée qui indiquerait que l’EMA s’est fondée sur la sécurité du Bravecto pour décider de divulguer les rapports d’études du lot 1. Comme le rappelle à juste titre l’EMA, la règle générale veut que les documents détenus par les institutions de l’Union soient publics. Il importait donc de déterminer si l’ensemble des rapports d’études du lot 1 ou une partie de ceux-ci relevait de l’une des exceptions visées à l’article 4 du règlement no 1049/2001. L’EMA ayant considéré que lesdites exceptions ne trouvaient pas application en l’espèce, elle n’avait pas à mettre en balance les intérêts, ni, a fortiori, à identifier et à démontrer l’intérêt public supérieur permettant la divulgation, ainsi qu’il ressort du point 128 ci-dessus.

137

Au surplus, il est utile de préciser que, par leur argumentation, les requérantes sèment la confusion en laissant l’impression que toute divulgation de document décidée par l’EMA est opérée dans le cadre de sa mission de protection de la santé publique et est faite au nom de la santé publique qu’elle considérerait comme relevant de l’intérêt public supérieur. Or, le fait que l’impact que peuvent avoir les documents concernés sur la santé publique est l’une des raisons pour lesquelles le législateur de l’Union a renforcé la transparence et a établi le droit d’accès aux documents détenus notamment par l’EMA ne signifie pas pour autant que la divulgation de documents tels que les rapports d’études du lot 1 se ferait d’office au nom de l’intérêt public supérieur de santé publique et impliquerait d’office la nécessité d’une mise en balance des intérêts. Ainsi qu’il a été rappelé aux points 135 et 136 ci-dessus, il importait d’abord de déterminer si l’ensemble des rapports d’études du lot 1 ou une partie de ceux-ci relevait de l’une des exceptions visées à l’article 4 du règlement no 1049/2001.

138

Compte tenu de l’ensemble de ces considérations, il y a lieu de rejeter, en tout état de cause, le quatrième moyen comme non fondé.

Sur le cinquième moyen, tiré d’une mise en balance inadéquate des intérêts

139

Dans le cadre du cinquième moyen, les requérantes soutiennent que, en tout état de cause, une mise en balance adéquate des intérêts dans laquelle il aurait été tenu compte du régime de divulgation instauré par le règlement no 726/2004, de l’accord ADPIC, des droits fondamentaux des requérantes et du principe de proportionnalité aurait abouti à un résultat qui leur aurait été de toute évidence favorable. Elles soulignent que l’EPAR avait déjà rendu accessibles au public les informations appropriées et que le partage des données figurant dans les rapports d’études du lot 1, motivé par des raisons de santé publique, aurait pu être réalisé selon des modalités moins attentatoires aux droits du titulaire de l’AMM (par exemple par un accès restreint et conditionné). De surcroît, aucune crainte justifiant un examen particulier n’aurait été émise à propos de l’innocuité du Bravecto.

140

L’EMA rappelle avoir souligné que les documents ne peuvent être qualifiés d’informations commerciales confidentielles et qu’elle ne pouvait donc pas mettre en balance un intérêt public supérieur justifiant la divulgation et la non-communication des documents.

141

Le cinquième moyen soulevé par les requérantes repose une fois encore sur le postulat que les rapports d’études du lot 1 ou une partie de ceux-ci sont confidentiels. Or, il ressort de l’examen des moyens précédents que l’EMA n’a pas commis d’erreur en concluant à l’absence d’informations confidentielles au sens de l’article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement no 1049/2001 et qu’elle n’avait donc pas à mettre en balance l’intérêt particulier à la confidentialité et l’intérêt public supérieur justifiant la divulgation.

142

L’analyse des quatre premiers moyens a également révélé que cette approche de l’EMA était conforme à l’accord ADPIC, aux droits fondamentaux des requérantes au respect de la vie privée ainsi qu’à la protection de leurs données à caractère professionnel et du droit de propriété et au principe de proportionnalité.

143

Il s’ensuit qu’aucune mise en balance inadéquate des intérêts ne saurait être reprochée à l’EMA.

144

Partant, le cinquième moyen doit, en tout état de cause, être rejeté comme non fondé.

145

Il découle de l’ensemble de ce qui précède que le recours doit être rejeté.

Sur les dépens

146

Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En l’espèce, les requérantes ayant succombé dans la procédure principale, il y a lieu de les condamner aux dépens exposés par l’EMA, conformément aux conclusions de cette dernière, y compris ceux afférents à la procédure en référé.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

 

1)

Le recours est rejeté.

 

2)

MSD Animal Health Innovation GmbH et Intervet international BV supporteront, outre leurs propres dépens, ceux exposés par l’Agence européenne des médicaments (EMA), y compris les dépens afférents à la procédure en référé.

 

Prek

Buttigieg

Berke

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 février 2018.

Signatures

Table des matières

 

Faits à l’origine du litige

 

Procédure et conclusions des parties

 

En droit

 

Sur le premier moyen, tiré de la protection des rapports d’études du lot 1 par l’article 4, paragraphe 2 ou 3, du règlement no 1049/2001, en vertu d’une présomption générale de confidentialité

 

Sur le deuxième moyen, tiré de la protection, par l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, des rapports d’études du lot 1 en tant qu’informations confidentielles sur le plan commercial

 

Sur le troisième moyen, tiré de la protection, par l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001, des rapports d’études du lot 1 contre les atteintes au processus décisionnel

 

Sur le quatrième moyen, tiré de l’absence d’une mise en balance des intérêts

 

Sur le cinquième moyen, tiré d’une mise en balance inadéquate des intérêts

 

Sur les dépens


( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.

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