EUR-Lex Access to European Union law

Back to EUR-Lex homepage

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 62014CC0274

Conclusions de l'avocat général M. G. Hogan, présentées le 1er octobre 2019.
Procédure engagée par Banco de Santander SA.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Tribunal Económico Administrativo Central.
Renvoi préjudiciel – Article 267 TFUE – Notion de “juridiction nationale” – Critères – Indépendance de l’organisme national concerné – Inamovibilité des membres – Irrecevabilité de la demande de décision préjudicielle.
Affaire C-274/14.

Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2019:802

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. GERARD HOGAN

présentées le 1er octobre 2019 ( 1 )

Affaire C‑274/14

Banco de Santander SA

[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunal Económico-Administrativo Central (tribunal économique administratif central, Espagne)]

« Renvoi préjudiciel – Aide d’État – Régime fiscal – Impôt sur les sociétés – Déduction – Amortissement de la survaleur résultant de prises de participations d’au moins 5 % par des entreprises fiscalement domiciliées en Espagne dans des entreprises fiscalement domiciliées en dehors de cet État membre – Article 267 TFUE – Recevabilité du renvoi préjudiciel – Notion de “juridiction nationale” – Indépendance – Incompétence de la Cour »

I. Introduction

1.

Dans ses conclusions présentées le 7 octobre 1999 dans les affaires jointes Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:1999:489), l’avocat général Saggio a conclu qu’une juridiction espagnole, le Tribunal Económico-Administrativo Regional de Cataluña (tribunal économique administratif régional de Catalogne, Espagne), n’était pas une juridiction aux fins de l’article 177 du traité CE (devenu article 267 TFUE) ( 2 ). N’étant pas convaincu que ledit tribunal puisse être considéré comme suffisamment indépendant pour satisfaire aux exigences posées par la Cour, il a conclu qu’il ne pouvait être considéré comme une juridiction au sens de l’actuel article 267 TFUE.

2.

À cette fin, l’avocat général Saggio a souligné les liens structurels étroits qui unissaient le tribunal économique administratif régional de Catalogne au ministère espagnol de l’Économie et des Finances ( 3 ) ainsi que le fait que le président et les membres de ce tribunal étaient des « fonctionnaires de l’administration, nommés par le ministre» ( 4 ). Il a également fait remarquer que le ministre avait le pouvoir de révoquer les membres dudit tribunal, pouvoir « qui ne semble par ailleurs pas lié à des hypothèses prévues de manière claire et limitative par la loi» ( 5 ).

3.

Or, dans son arrêt du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:2000:145), la Cour a marqué son désaccord avec les conclusions de l’avocat général Saggio. Elle a conclu qu’il existait une « séparation fonctionnelle entre, d’une part, les services de l’administration fiscale chargés de la gestion, du recouvrement et de la liquidation » des impôts et, d’autre part, le tribunal économique administratif régional de Catalogne, qui statuait « sur les réclamations introduites contre les décisions prises par lesdits services sans recevoir aucune instruction de l’administration fiscale» ( 6 ).

4.

Le droit de l’Union n’est pas resté figé depuis le prononcé de l’arrêt du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:2000:145). L’article 2 TUE prévoit désormais que l’Union est fondée sur la valeur du respect de l’État de droit. L’article 19, paragraphe 2, TUE dispose que les juges et les avocats généraux de la Cour « sont choisis parmi des personnalités offrant toutes garanties d’indépendance ». L’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci‑après la « Charte ») garantit un recours effectif et le droit d’être entendu devant « un tribunal indépendant et impartial ».

5.

Dans la lignée de ces évolutions des traités et de la Charte, la Cour a par la suite élaboré une impressionnante jurisprudence relative aux exigences de l’indépendance des juges. Cette jurisprudence contemporaine est en grande partie résumée par la Cour dans son arrêt du 27 février 2018, Associação Sindical dos Juízes Portugueses (C‑64/16, EU:C:2018:117).

6.

Dans cet arrêt, la Cour souligne que l’indépendance des juridictions nationales est essentielle « au bon fonctionnement du système de coopération judiciaire qu’incarne le mécanisme de renvoi préjudiciel prévu à l’article 267 TFUE» ( 7 ). La Cour résume ensuite admirablement la substance de ces exigences d’indépendance des juges en ces termes :

« L’indépendance des juridictions nationales est, en particulier, essentielle au bon fonctionnement du système de coopération judiciaire qu’incarne le mécanisme de renvoi préjudiciel prévu à l’article 267 TFUE, en ce que […] ce mécanisme ne peut être activé que par une instance, chargée d’appliquer le droit de l’Union, qui répond, notamment, à ce critère d’indépendance.

La notion d’“indépendance” suppose, notamment, que l’instance concernée exerce ses fonctions juridictionnelles en toute autonomie, sans être soumise à aucun lien hiérarchique ou de subordination à l’égard de quiconque et sans recevoir d’ordres ou d’instructions de quelque origine que ce soit, et qu’elle soit ainsi protégée d’interventions ou de pressions extérieures susceptibles de porter atteinte à l’indépendance de jugement de ses membres et d’influencer leurs décisions […]

Or, tout comme l’inamovibilité des membres de l’instance concernée (voir, notamment, arrêt du 19 septembre 2006, Wilson, C‑506/04, EU:C:2006:587, point 51), la perception par ceux‑ci d’un niveau de rémunération en adéquation avec l’importance des fonctions qu’ils exercent constitue une garantie inhérente à l’indépendance des juges» ( 8 ).

II. Contexte du renvoi préjudiciel

7.

La présente demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Económico‑Administrativo Central (tribunal économique administratif central, Espagne, ci‑après le « TEAC ») de Madrid par décision du 2 avril 2014 et parvenue au greffe de la Cour le 5 juin 2014, met tout cela en exergue. Bien que le présent renvoi concerne le TEAC, des organes similaires siègent également dans les différentes communautés autonomes d’Espagne. Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:2000:145), il se trouvait que le renvoi préjudiciel venait du tribunal économique administratif régional de Catalogne, mais il est en l’occurrence indifférent que le tribunal économique administratif siège au niveau national à Madrid (comme en l’espèce) ou dans une communauté autonome [comme dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:2000:145)].

8.

Le renvoi préjudiciel dans la présente affaire concerne principalement l’interprétation de la décision 2011/5/CE de la Commission du 28 octobre 2009 (qui traite des aspects relevant des aides d’État d’un régime fiscal espagnol spécial prévoyant l’amortissement fiscal de la survaleur financière en cas de prise de participations étrangères) telle qu’appliquée par le Royaume d’Espagne ( 9 ). Le renvoi soulève également la validité de la décision de la Commission d’ouvrir la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE concernant l’aide d’État SA.35550 (13/C) (ex 13/NN, ex 12/CP) – amortissement fiscal de la survaleur financière en cas de prise de participations étrangères ( 10 ) et de la décision (UE) 2015/314 de la Commission du 15 octobre 2014 relative à l’aide d’État SA.35550 (13/C) (ex 13/NN) (ex 12/CP) mise à exécution par l’Espagne – Régime relatif à l’amortissement fiscal de la survaleur financière en cas de prise de participations étrangères [notifiée sous le numéro C(2014) 7280] ( 11 ).

9.

Le renvoi préjudiciel trouve son origine dans un recours formé par Banco de Santander SA devant le TEAC contre un avis d’imposition établi par l’inspection fiscale espagnole. Cet avis est intervenu à la suite de l’acquisition par Banco de Santander, en mai 2002, de 100 % des actions d’une société allemande, AKB, pour un montant de 1099999999 euros. Quelque six mois plus tard, Banco de Santander a cédé les actions d’AKB à deux sociétés liées. Banco de Santander a finalement fait valoir que la survaleur financière liée à cette opération pouvait être amortie en vertu des avantages fiscaux prévus par la législation fiscale espagnole.

10.

Il n’est pas nécessaire, pour ce qui nous occupe, d’examiner en détail le fond du renvoi préjudiciel ni, au demeurant, l’historique plutôt enchevêtrée de la présente procédure de renvoi, puisqu’elle est restée suspendue depuis la saisine initiale en 2014 en raison de l’existence d’une multitude d’autres procédures dans lesquelles la légalité de la décision 2011/5 a été contestée devant le Tribunal de l’Union européenne et la Cour, notamment dans l’affaire ayant conduit à l’arrêt du 21 décembre 2016, Commission/World Duty Free Group e.a. (C‑20/15 P et C‑21/15 P, EU:C:2016:981) ( 12 ). Je relève par ailleurs que la légalité de la décision 2015/314 est elle aussi actuellement contestée devant le Tribunal ( 13 ).

III. Compétence de la Cour

11.

La raison pour laquelle je n’ai que légèrement esquissé le fond du renvoi préjudiciel et l’historique de la procédure jusqu’à présent est qu’une seule question se pose en l’espèce devant la Cour, celle de savoir si le TEAC est une « juridiction » au sens de l’article 267 TFUE.

12.

Dans sa demande de décision préjudicielle, le TEAC indique que les tribunaux économiques administratifs sont des juridictions aux fins de l’article 267 TFUE, car elles satisfont aux conditions énoncées dans la jurisprudence de la Cour. Le TEAC affirme que cette thèse est confirmée par l’arrêt du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:2000:145). Il convient de relever que, au point 38 de son arrêt du 27 février 2018, Associação Sindical dos Juízes Portugueses (C‑64/16, EU:C:2018:117), la Cour note que, au nombre des éléments à prendre en compte dans le cadre de l’appréciation de la qualité de « juridiction », figurent l’origine légale de l’organe, sa permanence, le caractère obligatoire de sa juridiction, la nature contradictoire de sa procédure, l’application, par l’organe, des règles de droit ainsi que son indépendance. Dans ses observations, la Commission a émis des doutes quant à l’indépendance du TEAC. Par décision du 30 avril 2019, la Cour a décidé que la question de sa compétence pour répondre aux questions posées par le TEAC devrait être examinée dans un premier temps. Une série de questions écrites ont été adressées aux parties au sujet de la compétence de la Cour pour qu’elles formulent des observations écrites à cet égard et une audience s’est tenue le 2 juillet 2019.

13.

Si le TEAC n’est pas une telle juridiction, la Cour ne saurait répondre aux questions posées par celui‑ci dans sa demande de décision préjudicielle, car elle n’est pas compétente pour en connaître. Si, en revanche, elle parvenait à la conclusion contraire, la Cour serait tenue d’examiner le fond de ces questions dans le cadre d’un arrêt ultérieur.

14.

Tout cela amène à la question centrale de savoir si l’arrêt du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:2000:145), demeure valable au vu des évolutions de la jurisprudence de la Cour depuis le prononcé de cet arrêt.

15.

À mon avis, la conclusion de la Cour, dans cette affaire, selon laquelle les tribunaux économiques administratifs bénéficiaient de garanties d’indépendance suffisantes pour être qualifié de juridiction aux fins de l’article 267 TFUE n’est plus soutenable – au regard notamment du raisonnement de la Cour dans des affaires ultérieures, par exemple dans l’arrêt du 27 février 2018, Associação Sindical dos Juízes Portugueses (C‑64/16, EU:C:2018:117). J’estime donc qu’il ne convient pas de suivre l’arrêt du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:2000:145), en l’espèce. Il s’ensuit que, d’après moi, le TEAC ne bénéficie pas d’un degré d’indépendance suffisant pour être considéré comme une « juridiction » aux fins de l’article 267 TFUE. Dès lors, la Cour n’est pas compétente pour répondre aux questions posées par le TEAC.

16.

Avant d’expliquer les raisons pour lesquelles je suis parvenu à cette conclusion, il convient tout d’abord d’examiner la législation et la pratique espagnoles pertinentes.

A.   La législation et la pratique espagnoles pertinentes

17.

La législation qui régit actuellement le TEAC consiste dans une série de lois et décrets espagnols. Le TEAC a pour fonction de statuer sur les recours formés contre des actes administratifs adoptés, entre autres, par les organes du ministère de l’Économie et des Finances. Les tribunaux économiques administratifs ont initialement été investis de cette fonction en vertu d’un décret-loi royal du 16 juin 1924.

18.

La réglementation actuelle du TEAC est principalement énoncée dans la Ley 58/2003 General Tributaria (loi no 58/2003 portant code général des impôts), du 17 décembre 2003 (ci‑après la « LGT ») ( 14 ), et le Real Decreto 520/2005 (décret royal no 520/2005), du 13 mai 2005 ( 15 ). Ce décret a toutefois été modifié de temps à autre.

1. Nomination et révocation du président et des membres du TEAC

19.

Le président ( 16 ) et les membres ( 17 ) du TEAC sont des fonctionnaires chargés du règlement des litiges en matière fiscale. Ils sont nommés par décret royal du gouvernement espagnol (conseil des ministres) sur proposition du ministre de l’Économie et des Finances parmi les fonctionnaires dont l’expérience et la réputation dans ce domaine sont reconnues. Les différents tribunaux économiques administratifs (y compris le TEAC) ne relèvent d’ailleurs pas du ministère de la Justice ou d’un organe chargé de l’organisation judiciaire : au lieu de cela, ils font partie intégrante du ministère de l’Économie et des Finances ( 18 ).

20.

S’il est vrai que les membres du TEAC ne sont pas eux‑mêmes responsables de la gestion et de la perception effective des impôts, il est néanmoins difficile d’éviter l’impression que le TEAC lui‑même fait partie intégrante de l’ensemble du système de l’administration fiscale en Espagne.

21.

Banco de Santander observe que le mandat du président et des membres du TEAC a une durée indéterminée et qu’il peut être à vie jusqu’au départ à la retraite. De plus, d’après elle, le fait que le président et les membres du TEAC sont nommés et révoqués par décret du conseil des ministres, qui est l’organe collégial suprême du pouvoir exécutif, évite toute ingérence de l’administration fiscale. En outre, selon Banco de Santander, le pouvoir d’un gouvernement de nommer, de révoquer ou de ne pas renouveler le mandat des membres d’une juridiction n’affecte pas, en soi, leur indépendance. Elle soutient également que le pouvoir de nommer et de révoquer des membres discrétionnairement n’est pas surprenant, puisqu’il s’agit de mandats sans limite de temps. En réalité, les conséquences de ce pouvoir sont analogues à celles du pouvoir de ne pas renouveler un mandat lorsqu’il a une durée déterminée.

22.

Le gouvernement espagnol indique que les membres des tribunaux économiques administratifs sont nommés pour une durée indéterminée et ne sont pas affectés par des changements dans la composition du gouvernement. Tel est le cas au sein du TEAC, dont les membres sont nommés pour un long mandat, qui peut durer des décennies, malgré les changements politiques survenant durant les législatures de quatre ans. En outre, selon le gouvernement espagnol, les membres des tribunaux économiques administratifs sont soumis aux mêmes règles d’abstention et de récusation que ceux des tribunaux administratifs. Ces règles sont expressément énoncées dans la législation espagnole et s’appliquent de manière parfaitement normale. L’indépendance des tribunaux économiques administratifs est renforcée par la faculté de leurs membres d’exprimer des opinions dissidentes.

23.

Je noterai que le pouvoir du conseil des ministres de nommer les membres du TEAC inclut celui de révoquer ces derniers, qui peuvent, semble-t-il, être démis de leurs fonctions par la simple publication d’un décret royal au journal officiel espagnol ( 19 ). De fait, comme la Commission l’a observé dans ses réponses écrites à certaines questions spécifiquement posées aux parties par la Cour, ce pouvoir a été fréquemment exercé ces dernières années.

24.

Ainsi, par exemple, comme l’a indiqué la Commission, le 13 janvier 2012, le président ( 20 ) et un membre du TEAC ( 21 ) ont été révoqués et ce dernier a été nommé nouveau président du TEAC ( 22 ). De même, le 1er juin 2018, le président ( 23 ) du TEAC a été révoqué et un autre a été nommé ( 24 ). Le 6 juillet 2018, quatre autres membres du TEAC ont été révoqués et huit autres ont été confirmés ( 25 ).

25.

Loin de moi l’idée, bien évidemment, de mettre en doute ou de discréditer la légitimité des nominations spécifiques ou des révocations qui ont été portées à l’attention de la Cour par la Commission. Néanmoins, si de nombreux membres des différents tribunaux économiques administratifs (y compris le TEAC) peuvent très bien rester en fonction pendant de longues périodes ( 26 ), ce que le gouvernement espagnol souligne, il n’en demeure pas moins saisissant qu’aucune garantie législative claire n’assure l’inamovibilité du président et des membres de ces organes sauf juste cause ou incapacité.

26.

À cet égard, l’histoire a donné raison à l’avocat général Saggio lorsqu’il disait craindre, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, UE:C:2000:145), que le pouvoir de révocation ne semblait pas lié à des hypothèses « prévues de manière claire et limitative par la loi» ( 27 ). En fin de compte, dans l’état actuel du droit espagnol, le président et les membres du TEAC occupent leurs fonctions selon le bon plaisir du gouvernement (conseil des ministres) espagnol. Dès lors, le président et les membres du TEAC ne jouissent, ni en théorie ni en fait, de la fixité du mandat ni d’aucune autre garantie contre la révocation, sauf juste cause ou incapacité, de la manière qui constitue un aspect coutumier et indispensable de l’indépendance judiciaire et qui traduit tant la théorie que la pratique des constitutions et lois fondamentales de l’ensemble des États membres de l’Union.

2. Article 243 de la LGT – recours extraordinaire pour l’unification de la jurisprudence

27.

La compétence des tribunaux économiques administratifs est obligatoire et ce n’est que si le litige n’est pas tranché dans un délai d’un an que les juridictions ordinaires espagnoles peuvent être saisies ( 28 ). Il est aussi indubitable que les tribunaux économiques administratifs (y compris le TEAC) sont liés par le droit applicable et mettent en œuvre les normes juridiques conventionnelles dans le règlement de ces litiges en matière fiscale.

28.

Outre les recours ordinaires devant le TEAC contre les décisions des tribunaux économiques administratifs régionaux et locaux ( 29 ), l’article 243 de la LGT prévoit également un recours qualifié d’« extraordinaire » pour l’unification de la jurisprudence ( 30 ).

29.

Il ressort clairement des dispositions de l’article 243 de la LGT que les autorités fiscales espagnoles peuvent former un recours extraordinaire devant une chambre spéciale du TEAC lorsqu’elles estiment qu’une ou plusieurs décisions antérieures de cet organe sont erronées.

30.

Il est particulièrement frappant de constater que le recours en question peut être introduit uniquement par le directeur général des impôts du ministère de l’Économie et des Finances ( 31 ), bien qu’il siège également en tant que membre de la chambre spéciale du TEAC, ainsi que le directeur général de l’AEAT, le directeur général ou le directeur du service de l’AEAT auquel l’organe auteur de la décision objet du recours est fonctionnellement rattaché et le président du conseil pour la défense des contribuables.

31.

Le fait que le directeur général du service de l’AEAT est également membre de la chambre spéciale composée de huit personnes, bien que son agence soit l’auteur de la décision faisant l’objet du recours, est également très singulier. Cette circonstance est, selon moi, contraire à la maxime nemo judex in causa sua et, par définition, au principe fondamental énoncé à l’article 47, deuxième alinéa, de la Charte, qui exige un tribunal indépendant et impartial.

B.   Sur la question de savoir si le TEAC jouit du degré d’indépendance requis pour constituer une juridiction au sens de l’article 267 TFUE

32.

Comme l’a souligné l’avocate générale Stix-Hackl au point 45 de ses conclusions dans l’affaire Wilson (C‑506/04, EU:C:2006:311), le critère de l’indépendance « est bien le critère le plus important pour distinguer la juridiction nationale d’une autorité administrative ».

33.

La Cour s’est exprimée dans le même sens aux points 37 et 38 de l’arrêt du 16 février 2017, Margarit Panicello (C‑503/15, EU:C:2017:126) :

« À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’exigence d’indépendance d’un organe de renvoi comporte deux aspects. Le premier aspect, externe, suppose que l’instance exerce ses fonctions en toute autonomie, sans être soumise à aucun lien hiérarchique ou de subordination à l’égard de quiconque et sans recevoir d’ordres ou d’instructions de quelque origine que ce soit […], étant ainsi protégée contre les interventions ou les pressions extérieures susceptibles de mettre en péril l’indépendance de jugement de ses membres quant aux litiges qui leur sont soumis […]

Le second aspect, interne, rejoint la notion d’impartialité et vise l’égale distance par rapport aux parties au litige et à leurs intérêts respectifs au regard de l’objet de celui‑ci. Cet aspect exige le respect de l’objectivité et l’absence de tout intérêt dans la solution du litige en dehors de la stricte application de la règle de droit […] »

34.

Dans cette affaire, il a été jugé qu’un Secretario Judicial (greffier) fonctionnaire « reçoit, et est tenu de respecter, les instructions de son supérieur hiérarchique », sauf lorsqu’il exerce les compétences relatives à la foi publique judiciaire. La Cour a constaté que le Secretario Judicial en cause dans cette affaire était appelé à connaître de l’action en paiement d’honoraires en cause « au principal en respectant les principes d’unité d’action et de dépendance hiérarchique» ( 32 ).

35.

Dès lors, le Secretario Judicial n’était pas une « juridiction » au sens de l’article 267 TFUE.

36.

Pour les raisons que j’ai déjà indiquées, je ne considère pas que les membres du TEAC jouissent du degré d’indépendance requis pour que cette instance puisse être considérée comme une juridiction aux fins de l’article 267 TFUE. J’aboutis à cette conclusion pour les raisons suivantes.

37.

En premier lieu, si le TEAC applique clairement le droit et les normes juridiques conventionnelles dans le règlement des litiges en matière fiscale et présente le degré de permanence qui est le propre des organes juridictionnels, ses membres n’ont pas la qualité essentielle de fixité du mandat ( 33 ) qui, comme l’a souligné la Cour au point 45 de l’arrêt du 27 février 2018, Associação Sindical dos Juízes Portugueses (C‑64/16, EU:C:2018:117), est une condition indispensable pour l’administration de la justice.

38.

Le fait même que le gouvernement alors en place a révoqué des membres du TEAC par décret royal pour des motifs qui semblent relever de l’opportunité suffit, en soi, à démontrer que le TEAC ne possède pas cette qualité vitale et essentielle ( 34 ). Pour satisfaire à cet aspect de l’exigence d’indépendance, il serait nécessaire que les membres du TEAC bénéficient de garanties juridiques réelles et effectives contre la révocation, sauf juste cause ou incapacité.

39.

En second lieu, un autre aspect de l’exigence d’indépendance, exprimé au point 44 de l’arrêt du 27 février 2018, Associação Sindical dos Juízes Portugueses (C‑64/16, EU:C:2018:117), est l’exigence que l’instance concernée « exerce ses fonctions juridictionnelles en toute autonomie, sans être soumise à aucun lien hiérarchique ou de subordination à l’égard de quiconque et sans recevoir d’ordres ou d’instructions de quelque origine que ce soit ».

40.

On pourrait en dire autant en l’espèce s’agissant du recours extraordinaire pour l’unification de la jurisprudence, puisque le directeur général de l’organe même qui a introduit le recours siège inéluctablement en vertu de l’article 243 de la LGT comme membre de la chambre spéciale du TEAC qui connaît du recours, tout comme le directeur général de l’AEAT auteur de la décision qui fait précisément l’objet du recours. S’il est vrai que les intérêts du contribuable seront vraisemblablement représentés par le président du conseil pour la défense des contribuables ( 35 ), il n’en demeure pas moins que, dans l’esprit du contribuable avisé moyen qui a introduit sa réclamation fiscale devant le TEAC, le système même établi par l’article 243 de la LGT aux fins de la procédure du recours extraordinaire pour l’unification de la jurisprudence doit, eu égard à la composition particulière prévue par la loi pour la chambre spéciale, apparaître pencher en la faveur de l’administration fiscale.

41.

En tout état de cause, le fait que certains membres de la chambre spéciale du TEAC ont des liens institutionnels étroits avec l’administration fiscale doit en soi aussi jeter le doute sur l’indépendance de ce dernier. Comme la Cour l’a noté au point 49 de l’arrêt du 19 septembre 2006, Wilson (C‑506/04, EU:C:2006:587), « [l]a notion d’indépendance, qui est inhérente à la mission de juger, implique avant tout que l’instance concernée ait la qualité de tiers par rapport à l’autorité qui a adopté la décision frappée d’un recours ». Compte tenu du statut hiérarchique et de la position occupée au sein de l’administration fiscale par le directeur général des impôts du ministère de l’Économie et des Finances, le directeur général de l’AEAT, le directeur général ou le directeur du service de l’AEAT, il serait difficile de dire que ces personnes pourraient être considérées comme des tiers dans un litige en matière fiscale au sens envisagé par la Cour dans l’arrêt du 19 septembre 2006, Wilson (C‑506/04, EU:C:2006:587).

42.

En outre, le fait même que l’article 243 de la LGT prévoit une telle procédure de recours extraordinaire, que seule l’administration fiscale peut introduire, renforce l’impression que le TEAC ne devrait peut-être pas trop s’empresser de s’écarter d’une interprétation de la législation fiscale favorisée par l’administration, puisque le directeur général des impôts du ministère de l’Économie et des Finances pourrait, le cas échéant, engager la procédure de recours extraordinaire prévue à l’article 243 du LGT. Cela est également incompatible avec les notions d’« indépendance », puisque l’existence même de cette procédure et la qualité de membre de la chambre spéciale peuvent constituer une forme de pression subtile susceptible, selon les termes employés par la Cour au point 37 de l’arrêt du 16 février 2017, Margarit Panicello (C‑503/15, EU:C:2017:126), « de mettre en péril l’indépendance de jugement de ses membres quant aux litiges qui leur sont soumis ».

43.

Pour l’ensemble de ces raisons, je suis donc d’avis que le TEAC ne satisfait pas aux conditions d’indépendance requises pour être qualifié de « juridiction » aux fins de l’article 267 TFUE. Si la Cour ne met pas en œuvre un système strict de précédents, force est toutefois de constater que la motivation de l’arrêt du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:2000:145), n’est pas satisfaisante et qu’il ne convient plus de suivre cet arrêt sur ce point.

44.

Je propose donc à la Cour de juger qu’elle n’est pas compétente pour statuer sur la demande de décision préjudicielle présentée par le TEAC.

IV. Conclusion

45.

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de juger qu’elle n’est pas compétente pour statuer sur la demande de décision préjudicielle présentée par le Tribunal‑Económico Administrativo Central (tribunal économique administratif central, Espagne).


( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) Voir, également, conclusions de l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer dans l’affaire De Coster (C‑17/00, EU:C:2001:366, point 26) dans lesquelles il mentionne le relâchement progressif du critère de l’indépendance qui a culminé dans l’arrêt du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:2000:145). L’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer fait sienne l’appréciation exprimée par l’avocat général Saggio dans ses conclusions présentées le 7 octobre 1999 dans les affaires jointes Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:1999:489) et relève, dans ses conclusions dans l’affaire De Coster (C‑17/00, EU:C:2001:366, point 28), que « [l]es membres des [tribunaux économiques administratifs] sont des fonctionnaires de l’administration, nommés par le ministre, lequel dispose du pouvoir de les révoquer, en dehors des hypothèses prévues de manière claire et limitative par la loi. Il n’en résulte donc pas que les règles relatives au fonctionnement de l’organisme garantissent l’inamovibilité de ses membres et, en conséquence, il semble douteux que cet organisme dispose d’une indépendance qui lui permette de résister à d’éventuelles interventions et pressions indues de la part du pouvoir exécutif ». L’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer conclut que les tribunaux économiques administratifs ne peuvent être qualifiés de « juridictionnels ».

( 3 ) Voir conclusions de l’avocat général Saggio dans les affaires jointes Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:1999:489, point 15). Il ressort du dossier dont la Cour dispose que le ministère espagnol compétent est désormais le Ministerio de Hacienda y Función Pública (ministère des Finances et de la Fonction publique). Pour éviter toute confusion, je continuerai toutefois de me référer au ministère de l’Économie et des Finances.

( 4 ) Voir conclusions de l’avocat général Saggio dans les affaires jointes Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:1999:489, point 16).

( 5 ) Conclusions de l’avocat général Saggio dans les affaires jointes Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:1999:489, point 16).

( 6 ) Arrêt du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:2000:145, point 39).

( 7 ) Arrêt du 27 février 2018, Associação Sindical dos Juízes Portugueses (C‑64/16, EU:C:2018:117, point 43).

( 8 ) Arrêt du 27 février 2018, Associação Sindical dos Juízes Portugueses (C‑64/16, EU:C:2018:117, points 43 à 45). Mise en italique par mes soins.

( 9 ) Décision de la Commission du 28 octobre 2009 relative à l’amortissement fiscal de la survaleur financière en cas de prise de participations étrangères C 45/07 (ex NN 51/07, ex CP 9/07) appliqué par l’Espagne (JO 2011, L 7, p. 48).

( 10 ) JO 2013, C 258, p. 8.

( 11 ) JO 2015, L 56, p. 38.

( 12 ) Par son pourvoi dans l’affaire C‑20/15 P, la Commission européenne a demandé l’annulation de l’arrêt du 7 novembre 2014, Autogrill España/Commission (T‑219/10, EU:T:2014:939), par lequel le Tribunal a annulé l’article 1er, paragraphe 1, et l’article 4 de la décision 2011/5. La Cour a annulé l’arrêt du Tribunal et a renvoyé l’affaire devant celui‑ci. Par son arrêt du 15 novembre 2018, World Duty Free Group/Commission (T‑219/10 RENV, EU:T:2018:784), le Tribunal a rejeté la demande d’annulation de la décision 2011/5. Dans l’affaire C‑64/19 P, le 29 janvier 2019, le Royaume d’Espagne a intenté un pourvoi contre l’arrêt rendu par le Tribunal le 15 novembre 2018 dans l’affaire T‑219/10 RENV, World Duty Free Group/Commission (JO 2019, C 112, p. 36).

( 13 ) Voir, notamment, affaire T‑252/15 : recours introduit le 21 mai 2015 – Ferrovial et autres/Commission (JO 2015, C 245, p. 35).

( 14 ) BOE no 302, du 18 décembre 2003, p. 44987.

( 15 ) BOE no 126, du 27 mai 2005, p. 17835.

( 16 ) Il a le grade de directeur général du ministère de l’Économie et des Finances.

( 17 ) Ils ont le grade de vice-directeur général du ministère de l’Économie et des Finances.

( 18 ) Voir article 6 du Real Decreto 1113/2018 (décret royal no 1113/2018), du 7 septembre 2018 (BOE no 218, du 8 septembre 2018). Il convient de noter que, bien que les tribunaux économiques administratifs relèvent du secrétaire d’État aux finances, l’article 6, paragraphe 1, du décret royal no 1113/2018 dispose que cela est sans préjudice de leur indépendance fonctionnelle dans le règlement des différends économiques administratifs.

( 19 ) Article 29, paragraphe 2, du décret royal no 520/2005.

( 20 ) Real Decreto 117/2012 (décret royal no 117/2012), du 13 janvier 2012, BOE no 12 du 14 janvier 2012, p. 2867.

( 21 ) Real Decreto 118/2012 (décret royal no 118/2012), du 13 janvier 2012, BOE no 12 du 14 janvier 2012, p. 2877.

( 22 ) Real Decreto 125/2012 (décret royal no 125/2012), du 13 janvier 2012, BOE no 12 du 14 janvier 2012, p. 2884.

( 23 ) Real Decreto 614/2018 (décret royal no 614/2018), du 22 juin 2018, BOE no 152 du 23 juin 2018, p. 64031.

( 24 ) Real Decreto 620/2018 (décret royal no 620/2018), du 22 juin 2018, BOE no 152 du 23 juin 2018, p. 64037.

( 25 ) Real Decreto 836/2018 (décret royal no 836/2018), du 6 juillet 2018, BOE no 164 du 7 juillet 2018, p. 68370.

( 26 ) Peut-être en raison, du moins en partie, de la durée indéterminée de leur mandat.

( 27 ) Conclusions de l’avocat général Saggio dans les affaires jointes Gabalfrisa e.a. (C‑110/98 à C‑147/98, EU:C:1999:489, point 16).

( 28 ) Voir article 240, paragraphe 1, et article 249 de la LGT.

( 29 ) Article 241 de la LGT.

( 30 ) L’article 243 de la LGT, intitulé « Recours extraordinaire pour l’unification de la jurisprudence », dispose :

« 1. Un recours extraordinaire pour l’unification de la jurisprudence peut être introduit par le directeur général des impôts du ministère de l’Économie et des Finances contre les décisions en matière fiscale rendues par le [TEAC] lorsque ledit directeur général est en désaccord avec le contenu de ces décisions.

Un tel recours extraordinaire peut également être introduit par les directeurs généraux des impôts des communautés autonomes et des villes ayant un statut d’autonomie, ou par des organes équivalents, lorsque le recours porte sur une décision d’un organe dépendant de la communauté autonome ou de la ville ayant un statut d’autonomie concernée.

2. La chambre spéciale pour l’unification de la jurisprudence est compétente pour connaître de ce recours. Elle est composée du président du [TEAC], qui la préside, de trois membres de cette juridiction, du directeur général des impôts du ministère de l’Économie et des Finances, du directeur général de l’Agencia Estatal de Administración Tributaria (agence d’État de l’administration fiscale[, ci‑après l’“AEAT”]), du directeur général ou du directeur du service de [l’AEAT] dont l’organe auteur de l’acte visé par la décision objet du recours dépend fonctionnellement ainsi que du président du Consejo para la Defensa del Contribuyente (conseil pour la défense des contribuables).

Lorsque le recours porte sur une décision d’un organe relevant d’une communauté autonome ou d’une ville ayant un statut d’autonomie, on entend par “directeur de l’AEAT” et “directeur général ou directeur du service de [l’AEAT]” les organes équivalents ou assimilés de ladite communauté autonome ou ville ayant un statut d’autonomie.

3. La chambre spéciale statue sur le recours à la majorité de ses membres. En cas de partage des voix, celle du président est toujours prépondérante.

4. Il est statué sur le recours dans un délai de six mois et dans le respect de la situation juridique particulière découlant de la décision attaquée, en établissant la jurisprudence applicable.

5. La jurisprudence établie par les décisions statuant sur ces recours lie les tribunaux économiques administratifs, les autorités fiscales des communautés autonomes et des villes ayant un statut d’autonomie ainsi que le reste de l’administration fiscale de l’État, des communautés autonomes et des villes ayant un statut d’autonomie. »

( 31 ) Ou par les directeurs généraux des impôts des communautés autonomes et des villes ayant un statut d’autonomie, ou des organes équivalents, lorsque le recours porte sur une décision d’un organe dépendant de la communauté autonome ou de la ville ayant un statut d’autonomie concernée.

( 32 ) Arrêt du 16 février 2017, Margarit Panicello (C‑503/15, EU:C:2017:126, point 41). Enfin, la Cour européenne des droits de l’homme s’est également exprimée en ce sens dans son arrêt du 25 février 1997, Findlay c. Royaume‑Uni (CE:ECHR:1997:0225JUD002210793), dans lequel elle a signalé que, en vertu du régime de cour martiale alors en vigueur au Royaume‑Uni, les membres de la cour martiale en question étaient subordonnés à l’officier convocateur dans la hiérarchie militaire. À cet égard, la Cour européenne des droits de l’homme a noté que « [p]our maintenir la confiance dans l’indépendance et l’impartialité d’un tribunal, les apparences peuvent revêtir de l’importance. Dès lors que les membres de la cour martiale qui l’ont jugé étaient tous hiérarchiquement subordonnés à l’officier convocateur et sous ses ordres, M. Findlay pouvait nourrir des doutes objectivement fondés quant à l’indépendance et à l’impartialité du tribunal ».

( 33 ) La Cour parle de l’« inamovibilité des membres de l’instance concernée ».

( 34 ) Au point 53 de l’arrêt du 19 septembre 2006, Wilson (C‑506/04, EU:C:2006:587), la Cour relève que « [c]es garanties d’indépendance et d’impartialité postulent l’existence de règles, notamment en ce qui concerne la composition de l’instance, la nomination, la durée des fonctions ainsi que les causes d’abstention, de récusation et de révocation de ses membres, qui permettent d’écarter tout doute légitime, dans l’esprit des justiciables, quant à l’imperméabilité de ladite instance à l’égard d’éléments extérieurs et à sa neutralité par rapport aux intérêts qui s’affrontent ». Mise en italique par mes soins.

( 35 ) Aux termes de l’article 34, paragraphe 2, de la LGT :

« Le conseil pour la défense des contribuables, qui est intégré au ministère des Finances, veille à l’effectivité des droits des assujettis, traite les plaintes résultant de l’application du système fiscal par les organes de l’État et émet les suggestions et propositions pertinentes, sous la forme et avec les effets prévus par voie réglementaire. »

Top