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Document 62007CJ0375

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 20 novembre 2008.
Staatssecretaris van Financiën contre Heuschen & Schrouff Oriëntal Foods Trading BV.
Demande de décision préjudicielle: Hoge Raad der Nederlanden - Pays-Bas.
Demande de décision préjudicielle - Validité d’un règlement de classement - Interprétation de l’annexe du règlement (CE) nº 1196/97 - Articles 220 et 239 du code des douanes - Articles 871 et 905 du règlement (CEE) nº 2454/93 - Feuilles séchées composées de farine de riz, de sel et d’eau - Classement tarifaire - Recouvrement a posteriori de droits à l’importation - Procédure de remise - Erreur décelable des autorités douanières - Négligence manifeste de l’importateur.
Affaire C-375/07.

European Court Reports 2008 I-08691

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2008:645

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

20 novembre 2008 ( *1 )

«Demande de décision préjudicielle — Validité d’un règlement de classement — Interprétation de l’annexe du règlement (CE) no 1196/97 — Articles 220 et 239 du code des douanes — Articles 871 et 905 du règlement (CEE) no 2454/93 — Feuilles séchées composées de farine de riz, de sel et d’eau — Classement tarifaire — Recouvrement a posteriori de droits à l’importation — Procédure de remise — Erreur décelable des autorités douanières — Négligence manifeste de l’importateur»

Dans l’affaire C-375/07,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Hoge Raad der Nederlanden (Pays-Bas), par décision du 13 juillet 2007, parvenue à la Cour le 3 août 2007, dans la procédure

Staatssecretaris van Financiën,

contre

Heuschen & Schrouff Oriëntal Foods Trading BV,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, MM. J.-C. Bonichot, J. Makarczyk, P. Kūris et Mme C. Toader (rapporteur), juges,

avocat général: Mme V. Trstenjak,

greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 mai 2008,

considérant les observations présentées:

pour Heuschen & Schrouff Oriëntal Foods Trading BV, par Me H. de Bie, advocaat,

pour le gouvernement néerlandais, par Mmes C. Wissels, C. ten Dam et M. Mol, en qualité d’agents,

pour le gouvernement hellénique, par M. K. Georgiadis ainsi que par Mmes Z. Chatzipavlou et I. Pouli, en qualité d’agents,

pour le gouvernement italien, par M. I. M. Braguglia, en qualité d’agent, assisté de M. G. Albenzio, avvocato dello Stato,

pour la Commission des Communautés européennes, par Mme M. Patakia, assistée de Me F. Tuytschaever, advocaat,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 4 septembre 2008,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte, d’une part, sur la position tarifaire applicable à l’importation de papier de riz et sur l’éventuelle invalidité du règlement (CE) no 1196/97 de la Commission, du 27 juin 1997, relatif au classement de certaines marchandises dans la nomenclature combinée (JO L 170, p. 13, ci-après le «règlement de classement»), et, d’autre part, sur les prérogatives dont dispose le juge national, saisi d’un recours contre une décision concernant le recouvrement a posteriori de droits à l’importation, lorsque la Commission des Communautés européennes a déjà porté certaines appréciations de fait ou de droit sur les opérations d’importation en cause.

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Staatssecretaris van Financiën à Heuschen & Schrouff Oriëntal Foods Trading BV (ci-après «H & S») au sujet du classement tarifaire de feuilles de riz, également dénommées «papier de riz».

Le cadre juridique

Le droit communautaire

La réglementation relative au classement tarifaire du papier de riz

3

Le règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO L 256, p. 1), a instauré une nomenclature complète des marchandises faisant l’objet d’opérations d’importation ou d’exportation dans la Communauté européenne (ci-après la «NC»), cette nomenclature figurant à l’annexe I de ce règlement.

4

Les sous-positions 19019099 et 19059020 de la NC, dans sa rédaction résultant du règlement (CE) no 1624/97 de la Commission, du 13 août 1997, modifiant l’annexe I du règlement no 2658/87 (JO L 224, p. 16), étaient susceptibles d’être appliquées en l’espèce.

5

Les positions 1901 et 1905 de la NC ainsi que les sous-positions correspondantes, dans leur version en langue française, se lisent comme suit:

«1901

Extraits de malt; préparations alimentaires de farines, semoules, amidons, fécules ou extraits de malt, ne contenant pas de cacao […], non dénommées ni comprises ailleurs; préparations alimentaires de produits des nos 0401 à 0404, ne contenant pas de cacao […], non dénommées ni comprises ailleurs:

[…]

 

1901 90 99

– – –

autres:

[…]

 

1905

Produits de la boulangerie, de la pâtisserie ou de la biscuiterie, même additionnés de cacao; hosties, cachets vides des types utilisés pour médicaments, pains à cacheter, pâtes séchées de farine, d’amidon ou de fécule en feuilles et produits similaires:

[…]

 

1905 90

autres:

[…]

 

1905 90 20

– –

Hosties, cachets vides des types utilisés pour médicaments, pains à cacheter, pâtes séchées de farine, d’amidon ou de fécule en feuilles et produits similaires.»

6

La version néerlandaise de la NC décrit la position 1905 et les sous-positions correspondantes de la manière suivante:

«1905

Brood, gebak, biscuits en andere bakkerswaren, ook indien deze producten cacao bevatten; ouwel in bladen, hosties, ouwels voor geneesmiddelen, plakouwels en dergelijke producten van meel of van zetmeel:

[…]

 

1905 90

andere:

[…]

 

1905 90 20

– –

ouwel in bladen, hosties, ouwels voor geneesmiddelen, plakouwels en dergelijke producten, van meel of van zetmeel.»

7

Afin d’assurer l’application uniforme de la NC dans la Communauté, la Commission peut adopter, en vertu de l’article 9, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement no 2658/87, des règlements visant au classement de marchandises particulières dans la NC.

8

Selon l’annexe du règlement de classement, relèvent de la sous-position 19059020 de la NC les «préparation[s] alimentaire[s], faite[s] à base de farine de riz, de sel et d’eau, se présentant sous forme de feuilles ou de disques de différentes dimensions, séchés, translucides». Il est également précisé dans cette annexe que «[c]es feuilles ou disques, après un trempage dans l’eau […] sont généralement utilisés pour entourer les produits dénommés ’rouleaux de printemps’ et des produits similaires».

9

La convention internationale sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (ci-après le «SH»), conclue à Bruxelles le 14 juin 1983, et son protocole d’amendement du 24 juin 1986 (ci-après la «convention sur le SH») ont été approuvés au nom de la Communauté économique européenne par la décision 87/369/CEE du Conseil, du 7 avril 1987 (JO L 198, p. 1).

10

En vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la convention sur le SH, chaque partie contractante s’engage à ce que ses nomenclatures tarifaires et statistiques soient conformes au SH, à utiliser toutes les positions et sous-positions de celui-ci, sans adjonction ni modification, ainsi que les codes y afférents et à suivre l’ordre de numérotation dudit système. La même disposition prévoit que chaque partie contractante s’engage également à appliquer les règles générales pour l’interprétation du SH ainsi que toutes les notes de section, de chapitre et de sous-position du SH, et à ne pas modifier la portée de ces derniers.

11

Le Conseil de coopération douanière, devenu l’Organisation mondiale des douanes, institué par la convention internationale portant création dudit conseil, conclue à Bruxelles le 15 décembre 1950, approuve, dans les conditions fixées à l’article 8 de la convention sur le SH, les notes explicatives et les avis de classement adoptés par le comité du SH.

12

La note explicative de la Commission relative à la sous-position 19059020 de la NC renvoie aux «notes explicatives du SH, no 1905, intitulé B».

13

La note explicative du SH relative à la position 1905 se lit comme suit:

«[…]

A)

Produits de la boulangerie, de la pâtisserie ou de la biscuiterie, même contenant du cacao.

[…]

B)

Hosties, cachets vides des types utilisés pour médicaments, pains à cacheter, pâtes séchées de farine, d’amidon ou de fécule en feuilles et produits similaires.

Cette position couvre un certain nombre de produits à base de pâte de farine ou de fécule, cuits pour la plupart, généralement présentés sous forme de disques ou de feuilles et d’utilisations très diverses.

[…]

Entrent également ici les feuilles minces en pâte de farine ou de fécule cuite et séchée, destinées à revêtir certains articles de pâtisserie ou de confiserie et notamment les nougats. […]»

La réglementation relative à la non-prise en compte a posteriori et à la remise des droits à l’importation

— Sur la non-prise en compte a posteriori de droits douaniers

14

L’article 220, paragraphe 2, du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO L 302, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 82/97 du Parlement européen et du Conseil, du 19 décembre 1996 (JO 1997, L 17, p. 1, ci-après le «code des douanes»), dispose:

«2.   […] il n’est pas procédé à une prise en compte a posteriori, lorsque:

[…]

b)

le montant des droits légalement dus n’avait pas été pris en compte par suite d’une erreur des autorités douanières elles-mêmes, qui ne pouvait raisonnablement être décelée par le redevable, ce dernier ayant pour sa part agi de bonne foi et observé toutes les dispositions prévues par la réglementation en vigueur en ce qui concerne la déclaration en douane;

[…]»

15

L’article 869 du règlement (CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement no 2913/92 (JO L 253, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 1677/98 de la Commission, du 29 juillet 1998 (JO L 212, p. 18, ci-après le «règlement d’application»), prévoit:

«Les autorités douanières décident elles-mêmes de ne pas prendre en compte a posteriori des droits non perçus:

[…]

b)

dans les cas où elles estiment que toutes les conditions visées à l’article 220 paragraphe 2 point b) du code [des douanes] sont remplies et pour autant que le montant non perçu auprès d’un opérateur par suite d’une même erreur et se référant, le cas échéant, à plusieurs opérations d’importation ou d’exportation, soit inférieur à 50000 [euros];

[…]»

16

L’article 871 du règlement d’application est libellé comme suit:

«À l’exclusion des cas prévus à l’article 869, lorsque les autorités douanières soit estiment que les conditions de l’article 220 paragraphe 2 point b) du code sont réunies, soit ont un doute quant à la portée des critères de cette disposition au regard du cas concerné, ces autorités transmettent le cas à la Commission pour qu’il soit réglé conformément à la procédure prévue aux articles 872 à 876. Le dossier adressé à la Commission doit comporter tous les éléments nécessaires à un examen complet du cas présenté. Il doit en outre comprendre une déclaration, signée par la personne intéressée par le cas à présenter à la Commission, attestant du fait qu’elle a pu prendre connaissance du dossier et indiquant, soit qu’elle n’a rien à y ajouter, soit tout élément additionnel qu’il lui semble important d’y faire figurer.

La Commission accuse immédiatement réception de ce dossier à l’État membre concerné.

Lorsqu’il s’avère que les éléments d’information communiqués par l’État membre sont insuffisants pour lui permettre de statuer en toute connaissance de cause sur le cas qui lui est soumis, la Commission peut demander la communication d’éléments d’information complémentaires.»

17

L’article 873, premier alinéa, du règlement d’application énonce:

«Après consultation d’un groupe d’experts composé de représentants de tous les États membres réunis dans le cadre du comité afin d’examiner le cas d’espèce, la Commission prend une décision établissant soit que la situation examinée permet de ne pas prendre en compte a posteriori des droits en cause, soit qu’elle ne le permet pas.»

— Sur le remboursement ou la remise de droits douaniers

18

Aux termes de l’article 239 du code des douanes:

«1.   Il peut être procédé au remboursement ou à la remise des droits à l’importation ou des droits à l’exportation dans des situations autres que celles visées aux articles 236, 237 et 238:

à déterminer selon la procédure du comité,

qui résultent de circonstances n’impliquant ni manœuvre ni négligence manifeste de la part de l’intéressé. Les situations dans lesquelles il peut être fait application de cette disposition ainsi que les modalités de procédure à suivre à cette fin sont définies selon la procédure du comité. Le remboursement ou la remise peuvent être subordonnés à des conditions particulières.

2.   Le remboursement ou la remise des droits pour les motifs indiqués au paragraphe 1 est accordé sur demande déposée auprès du bureau de douane concerné […]»

19

L’article 905 du règlement d’application dispose:

«1.   Lorsque l’autorité douanière de décision, saisie de la demande de remboursement ou de remise au titre de l’article 239 paragraphe 2 du code, n’est pas en mesure, sur la base de l’article 899, de décider et que la demande est assortie de justifications susceptibles de constituer une situation particulière qui résulte de circonstances n’impliquant ni manœuvre ni négligence manifeste de la part de l’intéressé, l’État membre dont relève cette autorité transmet le cas à la Commission pour être réglé conformément à la procédure prévue aux articles 906 à 909.

Toutefois, sauf en cas de doute de la part de l’autorité douanière de décision, celle-ci peut décider elle-même de procéder au remboursement ou à la remise des droits lorsqu’elle estime que les conditions visées à l’article 239, paragraphe 1, du code sont remplies et pour autant que le montant qui concerne chaque opérateur par suite d’une même situation particulière et se référant, le cas échéant, à plusieurs opérations d’importation ou d’exportation, soit inférieur à 50000 [euros].

Le terme ‘intéressé’ doit être entendu dans le même sens qu’à l’article 899.

Dans tous les autres cas, l’autorité douanière de décision rejette la demande.

2.   Le dossier adressé à la Commission doit comporter tous les éléments nécessaires à un examen complet du cas présenté. Il doit en outre comprendre une déclaration, signée par le demandeur du remboursement ou de la remise, attestant du fait qu’il a pu prendre connaissance du dossier et indiquant, soit qu’il n’a rien à y ajouter, soit tout élément additionnel qu’il lui semble important d’y faire figurer.

La Commission accuse immédiatement réception de ce dossier à l’État membre concerné.

Lorsqu’il s’avère que les éléments d’information communiqués par l’État membre sont insuffisants pour lui permettre de statuer en toute connaissance de cause sur le cas qui lui est soumis, la Commission peut demander la communication d’éléments d’information complémentaires.

[…]»

20

L’article 907, premier alinéa, du règlement d’application prévoit:

«Après consultation d’un groupe d’experts composé de représentants de tous les États membres réunis dans le cadre du comité afin d’examiner le cas d’espèce, la Commission prend une décision établissant soit que la situation particulière examinée justifie l’octroi du remboursement ou de la remise, soit qu’elle ne le justifie pas.»

Le droit national

21

L’article 8:72, paragraphe 4, de la loi générale sur le droit administratif (Algemene Wet Bestuursrecht) dispose:

«Si le tribunal déclare le recours fondé, il peut charger l’organe administratif d’adopter une nouvelle décision ou d’accomplir un autre acte qui tient compte de sa décision, ou alors il peut décider que sa décision intervient à la place de la décision annulée ou de la partie annulée de celle-ci.»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

22

H & S est une entreprise néerlandaise de production et de négoce fournissant notamment les restaurateurs en produits alimentaires orientaux. À ce titre, elle importe depuis plusieurs années du papier de riz en provenance du Vietnam.

23

H & S importait ce produit, déjà en 1996, sous la sous-position 19019099 de la NC. Ce classement tarifaire aurait été à plusieurs reprises accepté par les autorités douanières néerlandaises (ci-après les «autorités douanières»), y compris à l’issue de contrôles et d’analyses effectués sur des échantillons des cargaisons importées.

24

Le 27 juin 1997, la Commission a adopté le règlement de classement, lequel prévoit que les produits en cause relèvent en fait de la sous-position 19059020 de la NC. Ce règlement a été publié au Journal officiel des Communautés européennes le 28 juin 1997 et est entré en vigueur le 19 juillet 1997.

25

Cependant, H & S a continué à importer du papier de riz en classant celui-ci dans la sous-position tarifaire 19019099. Les autorités douanières ont également continué à accepter ses déclarations, en dernier lieu les 14 juillet 1997 et 16 mars 1998. Puis, le même 16 mars, elles se sont aperçu du classement erroné et ont informé cette société que cette marchandise relevait de la position prescrite par le règlement de classement, soit la sous-position 19059020 de la NC. Par la suite, H & S a déclaré ses denrées sous cette dernière position.

26

Au cours de l’année 2000, les autorités douanières ont informé H & S qu’elles procéderaient, pour la période du 25 novembre 1997 au 2 février 1998, au recouvrement a posteriori des droits qui auraient dû être acquittés au titre de la sous-position 19059020 de la NC.

27

H & S a alors introduit une demande de remise desdits droits. Saisie le 19 septembre 2002 d’une demande au sens de l’article 905 du règlement d’application, la Commission a, le 17 juin 2004, adopté la décision REM 19/2002 constatant que la remise des droits à l’importation n’est pas justifiée dans un cas particulier (ci-après la «décision du 17 juin 2004»). Cette décision a été contestée par H & S dans le cadre d’un recours en annulation introduit le 23 septembre 2004 devant le Tribunal de première instance des Communautés européennes. L’arrêt du Tribunal du 30 novembre 2006, Heuschen & Schrouff Oriëntal Foods/Commission (T-382/04), rejetant ledit recours a fait l’objet d’un pourvoi introduit par H & S, affaire enregistrée au greffe de la Cour sous le numéro C-38/07 P.

28

Les autorités douanières ont notifié à H & S, le 22 novembre 2000, un avis de recouvrement portant sur un montant de 645399,50 NLG (soit 292869,52 euros). Sur réclamation de H & S, l’inspecteur a maintenu les injonctions de paiement, à l’exception d’une somme de 13650,30 NLG, à la suite de l’annulation d’une déclaration en douane.

29

Le 29 mars 2001, H & S a saisi d’un recours la Tariefcommissie, à laquelle s’est substitué, en cours de procédure, le Gerechtshof te Amsterdam. Ce dernier a, le7 décembre 2004, déclaré le recours fondé et annulé la décision de l’inspecteur ainsi que les injonctions de paiement. En effet, cette juridiction a certes confirmé que les feuilles de riz relevaient de la sous-position 19059020 de la NC. Toutefois, l’application erronée de la sous-position 19019099 de la NC aurait résulté d’une erreur des autorités douanières, erreur qui ne pouvait être raisonnablement décelée par H & S et qui permettait, conformément à l’article 220 du code des douanes, de renoncer au recouvrement a posteriori des droits à l’importation ainsi éludés.

30

Le Staatssecretaris van Financiën s’est alors pourvu en cassation devant la juridiction de renvoi pour contester l’application faite par le Gerechtshof te Amsterdam de l’article 220 du code des douanes, tandis que H & S a formé un pourvoi incident afin de faire constater que ses produits relevaient en réalité de la sous-position 19019099 de la NC.

31

Il ressort de l’ordonnance de renvoi qu’il est constant que les produits importés sont constitués de farine de riz, d’eau et de sel, mélangés et pétris, puis aplatis et séchés. Ces produits ne sont pas destinés à être consommés sans traitement thermique préalable.

32

S’agissant du pourvoi incident, la juridiction de renvoi constate que, selon les notes explicatives du SH, la position 1905 de la NC se caractériserait moins par le fait qu’elle concerne des produits cuits que par le fait qu’elle vise des produits de formes fines.

33

Toutefois, il serait également possible d’affirmer, en se fondant sur la jurisprudence de la Cour, que les positions 1901 et 1905 de la NC se distinguent en ce que la première concerne les produits non cuits, tandis que la seconde vise les denrées cuites.

34

Le règlement de classement plaçant sans réserve les feuilles de riz dans la position 1905 de la NC, le Hoge Raad der Nederlanden estime qu’il est nécessaire d’interroger la Cour sur sa validité.

35

S’agissant du pourvoi principal, cette juridiction constate que le Gerechtshof te Amsterdam a admis, dans son jugement du 7 décembre 2004, que les trois critères relatifs au caractère décelable de l’erreur des autorités douanières et nécessaires à l’application de l’article 220 du code des douanes étaient réunis, alors même que la Commission avait décidé, le 17 juin 2004, que ces mêmes critères n’étaient pas satisfaits s’agissant de l’appréciation de la diligence de l’opérateur aux fins de l’application de l’article 239 dudit code, ce que le Tribunal confirma dans son arrêt Heuschen & Schrouff Oriëntal Foods/Commission, précité, rejetant le recours de H & S dirigé contre la décision du 17 juin 2004.

36

Selon la juridiction de renvoi, la question est celle de savoir quelle décision une autorité douanière nationale est tenue de suivre lorsque la Commission et le juge national adoptent deux positions en sens contraire en ce qui concerne l’appréciation des trois critères susmentionnés. Plus précisément, il s’agirait de définir quelle est la compétence du juge national par rapport à celle de la Commission, s’agissant de l’application de ces critères.

37

La juridiction de renvoi relève que, si les autorités douanières estiment que les conditions prévues par le code des douanes sont susceptibles d’être remplies, elles transmettent le cas à la Commission, celle-ci décidant s’il est ou non nécessaire de procéder au recouvrement a posteriori des droits à l’importation (article 220 du code des douanes) ou si une remise de ceux-ci est justifiée (article 239 du même code). Dans cette hypothèse, l’application uniforme du droit communautaire serait assurée.

38

Toutefois, il en irait autrement lorsque les autorités douanières décident que les conditions de mise en œuvre de l’article 220 du code des douanes ne sont pas remplies. Dans ce cas, elles ne s’en remettent pas à la Commission et, si l’intéressé introduit un recours contre la décision de ces autorités, il appartient alors au juge national d’apprécier si les conditions pour renoncer au recouvrement a posteriori sont ou non satisfaites. L’application uniforme du droit communautaire peut alors être garantie par le mécanisme du renvoi préjudiciel. Cependant, lorsque la décision rendue par le juge national est susceptible de recours, il ne pèserait pas sur ce dernier une obligation de surseoir à statuer pour poser une question préjudicielle.

39

C’est dans ces conditions que le Hoge Raad der Nederlanden a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)

Est-ce que des feuilles telles que celles décrites à l’annexe du règlement [de classement] relèvent de la position 1905 de la [NC] s’il s’agit de feuilles fabriquées à base de farine de riz, de sel et d’eau qui sont séchées, mais qui n’ont subi aucun traitement thermique?

2)

Compte tenu de la réponse à la première question, est-ce que le règlement [de classement] est valide?

3)

L’article 871 du règlement [d’application] doit-il être interprété en ce sens que si, en vertu de l’article 871, paragraphe 1, précité, l’autorité douanière était tenue de transmettre le cas à la Commission avant de pouvoir décider de renoncer à une prise en compte a posteriori en l’espèce, le juge national, saisi d’un recours par le contribuable contre la décision de l’autorité douanière en vue de (bien) procéder à la prise en compte a posteriori, n’a-t-il pas le pouvoir d’annuler la prise en compte a posteriori, en jugeant que les conditions prévues à l’article 220, paragraphe 2, sous b), [du code des douanes] relatives à la prise en compte a posteriori (obligatoire) sont remplies, alors que son appréciation n’est pas soutenue par la Commission?

4)

Si la réponse à la troisième question est que le fait d’attribuer à la Commission un certain pouvoir de décision en matière de recouvrement a posteriori de droits de douane n’implique aucune limitation du pouvoir du juge national ayant à juger d’un recours en matière de recouvrement a posteriori, le droit communautaire prévoit-il alors un autre mécanisme garantissant une application uniforme du droit communautaire en cas de divergence des appréciations faites par la Commission et par le juge national au cas d’espèce selon les critères utilisés dans le cadre de l’article 220 du code des douanes pour décider si une erreur de l’autorité douanière peut être décelée par un contribuable?»

Sur les questions préjudicielles

Sur les première et deuxième questions

40

Par ses deux premières questions, qu’il convient d’examiner conjointement, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si des feuilles fabriquées à base de farine de riz, de sel et d’eau, qui sont séchées, mais qui n’ont subi aucun traitement thermique, relèvent de la sous-position 19059020 de la NC et, le cas échéant, si le règlement de classement est valide.

Observations soumises à la Cour

41

H & S considère que la position 1905 de la NC ne concerne que les produits cuits et pouvant être consommés directement, ainsi que la Cour l’aurait laissé entendre au point 12 de l’arrêt du 11 août 1995, Uelzena Milchwerke (C-12/94, Rec. p. I-2397). Par conséquent, le règlement de classement devrait être déclaré invalide.

42

Les gouvernements néerlandais, hellénique et italien ainsi que la Commission sont d’avis que la position 1905 de la NC ne concerne pas spécifiquement les produits cuits ou aptes à une consommation immédiate et que le classement des feuilles de riz dans la sous-position 19059020 de la NC n’est pas contraire à la nomenclature combinée. Ils estiment donc que le règlement de classement est valide.

Réponse de la Cour

43

Il convient, tout d’abord, de rappeler que le critère décisif pour le classement tarifaire des marchandises doit être recherché, en général, dans leurs caractéristiques et propriétés objectives, telles que définies notamment par le libellé de la position tarifaire et des notes de section ou de chapitre (arrêt du 18 juillet 2007, Olicom, C-142/06, Rec. p. I-6675, point 16 et jurisprudence citée).

44

À cet égard, les notes qui précèdent les chapitres du tarif douanier commun, de même d’ailleurs que les notes explicatives du SH, constituent des moyens importants pour assurer une application uniforme de ce tarif et fournissent, en tant que telles, des éléments valables pour son interprétation (arrêt Olicom, précité, point 17 et jurisprudence citée).

45

Il est vrai, ainsi que le fait valoir la requérante au principal, que la version néerlandaise du libellé de la position 1905 de la NC, contrairement à certaines autres versions linguistiques, ne fait pas expressément référence à des pâtes de farine, d’amidon ou de fécule en feuilles et autres produits similaires, lesquelles doivent être «séchées». En effet, cette version linguistique ne fait référence qu’à des produits se présentant sous forme de feuilles.

46

Toutefois, selon une jurisprudence constante, la nécessité d’une interprétation uniforme des règlements communautaires exclut que, en cas de doute, le texte d’une disposition soit considéré isolément et exige, au contraire, qu’il soit interprété et appliqué à la lumière des versions établies dans les autres langues officielles (arrêt du 11 novembre 1999, Söhl & Söhlke, C-48/98, Rec. p. I-7877, point 46).

47

S’agissant de la position 1901 de la NC dont se prévaut H & S, force est de constater que, ainsi que l’indique expressément son libellé, elle ne concerne que les préparations alimentaires de farines, semoules, amidons, fécules ou extraits de malt qui ne sont pas dénommées ni comprises ailleurs dans la NC. Cette position présente donc un caractère résiduel et ne saurait couvrir des produits dont la description correspond à d’autres positions du chapitre concerné de la NC. Par ailleurs, la sous-position 19019099 de la NC, sous laquelle ont été déclarées les marchandises en cause au principal, correspond aux produits «autres», c’est-à-dire ceux qui ne sont pas susceptibles d’être classés dans une autre sous-position de ladite position résiduelle 1901.

48

Or, ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général aux points 43 et 44 de ses conclusions, la référence au papier de riz («rice paper») ou à des produits «séchés» figure expressément dans le libellé de plusieurs versions linguistiques de la sous-position 9020 de la NC.

49

Ensuite, contrairement à ce que soutient H & S dans ses observations écrites devant la Cour, aucune version linguistique ne fait référence à l’exigence selon laquelle les produits relevant de ladite sous-position doivent nécessairement être cuits. En effet, la seule référence à l’état des produits couverts par la position 1905 de la NC et, plus précisément, par la sous-position 19059020 de celle-ci concerne le fait qu’ils se présentent sous une forme «séchée».

50

La note explicative de la Commission concernant cette dernière sous-position renvoie aux «notes explicatives du SH, no 1905, intitulé B». Or, ainsi que l’a souligné le gouvernement néerlandais, ces notes visent un certain nombre de produits à base de farine ou de fécule, qui sont cuits pour la plupart, généralement présentés sous forme de disques ou de feuilles, et qui sont d’utilisations très diverses. Ainsi, selon les notes explicatives de la Commission et du SH, le fait d’être cuite n’est pas une caractéristique nécessaire au classement d’une marchandise dans la sous-position 19059020 de la NC.

51

Enfin, il ne saurait être déduit du point 12 de l’arrêt Uelzena Milchwerke, précité, que la Cour ait entendu limiter l’application de la position 1905 de la NC aux seuls produits «cuits». En effet, à ce point 12, la Cour a certes jugé que la classification dans la position 1905 des «[p]roduits de la boulangerie, de la pâtisserie ou de la biscuiterie […]», ainsi que dans la sous-position 190530 des «biscuits additionnés d’édulcorants; gaufres et gaufrettes», suppose que la marchandise concernée soit cuite au moins une fois. Toutefois, force est de constater que cette appréciation ne concernait que la première des catégories de produits figurant dans le libellé de la position 1905, à savoir celle des «[p]roduits de la boulangerie, de la pâtisserie ou de la biscuiterie, même additionnés de cacao», laquelle fait l’objet de l’intitulé A de la note explicative du SH relative à la position 1905.

52

Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de constater que le classement dans la sous-position 19059020 de la NC des préparations alimentaires, à base de farine de riz, de sel et d’eau, se présentant sous forme de feuilles ou de disques de différentes dimensions, séchées et translucides, est conforme au libellé de cette sous-position.

53

Il convient donc de répondre aux deux premières questions que:

les feuilles fabriquées à base de farine de riz, de sel et d’eau qui sont séchées, mais qui n’ont subi aucun traitement thermique, relèvent de la sous-position 19059020 de la NC;

l’examen de la question posée n’a révélé aucun élément de nature à affecter la validité du règlement de classement.

Sur les troisième et quatrième questions

54

Par ses troisième et quatrième questions, qu’il convient de traiter conjointement, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si, lorsque la Commission s’est déjà prononcée dans un cas particulier sur les conditions d’application de l’article 239, paragraphe 1, second tiret, du code des douanes, le juge national, saisi d’une contestation de l’avis de mise en recouvrement des droits à l’importation relatifs à ce cas, est lié par cette décision de la Commission lorsqu’il apprécie ce même cas au regard de l’article 220 dudit code.

Observations soumises à la Cour

55

H & S est d’avis que le juge national, statuant sur les conditions d’application de l’article 220 du code des douanes à un cas particulier, ne saurait être lié par une décision de la Commission statuant sur ce cas au regard de l’article 239 du même code, dès lors que le renvoi préjudiciel garantit l’uniformité d’application du droit communautaire.

56

Les gouvernements néerlandais, hellénique et italien ainsi que la Commission considèrent qu’une telle décision de cette dernière s’impose au juge national et que, s’il souhaite s’en écarter, il doit soit surseoir à statuer jusqu’à ce que soit rendu un jugement définitif des juridictions communautaires saisies d’un recours en annulation contre ladite décision, soit saisir la Cour d’un renvoi préjudiciel en appréciation de validité.

Réponse de la Cour

57

À titre liminaire, il y a lieu de constater que les procédures prévues aux articles 220 et 239 du code des douanes poursuivent le même but, à savoir limiter le paiement a posteriori des droits à l’importation ou à l’exportation aux cas où un tel paiement est justifié et où il est compatible avec un principe fondamental tel que le principe de protection de la confiance légitime (voir arrêts du 1er avril 1993, Hewlett Packard France, C-250/91, Rec. p. I-1819, point 46, ainsi que Söhl & Söhlke, précité, point 54).

58

Il en découle que les conditions auxquelles l’application desdits articles est subordonnée, à savoir notamment, pour l’article 239, paragraphe 1, second tiret, du code des douanes, celle relative à l’absence de négligence manifeste de la part de l’intéressé et, pour l’article 220 du même code, celle relative à l’absence d’une erreur des autorités douanières raisonnablement décelable par le redevable, doivent être interprétées de la même façon (voir, en ce sens, arrêt Söhl & Söhlke, précité, point 54).

59

Dès lors, ainsi que la Cour l’a précédemment jugé, afin d’apprécier si un opérateur a fait preuve de «négligence manifeste», au sens de l’article 239, paragraphe 1, second tiret, du code des douanes, il convient d’appliquer, par analogie, les critères utilisés dans le cadre de l’article 220 du code des douanes pour vérifier le caractère décelable par un opérateur économique d’une erreur commise par l’autorité douanière (voir arrêts Söhl & Söhlke, précité, points 55 et 56, ainsi que du 13 mars 2003, Pays-Bas/Commission, C-156/00, Rec. p. I-2527, point 92).

60

Dans le cadre des procédures prévues aux articles 871 et 905 du règlement d’application, lorsque les autorités douanières estiment que les conditions prévues respectivement aux articles 220, paragraphe 2, sous b), et 239, paragraphe 1, second tiret, du code des douanes sont remplies, ces autorités ou l’État membre dont elles relèvent, excepté dans les situations prévues aux articles 869 et 899 dudit règlement, transmettent le cas à la Commission afin que celle-ci établisse si lesdites conditions sont effectivement remplies.

61

À cet égard, il apparaît que, à l’exception des cas spécifiques prévus par la réglementation, le législateur communautaire a entendu confier à l’appréciation de la Commission les situations dans lesquelles il convient de renoncer à une recette budgétaire normalement due, étant entendu que les droits douaniers perçus sur l’importation de produits dans le territoire communautaire constituent une ressource propre du budget des Communautés européennes. Une telle constatation est corroborée par les pouvoirs conférés à la Commission par les articles 875 et 908, paragraphe 3, du règlement d’application, aux termes desquels celle-ci peut habiliter un ou plusieurs États membres, dans les conditions qu’elle détermine, à ne pas prendre en compte a posteriori les droits, à les rembourser ou à les remettre, dans des cas dans lesquels se présentent des éléments de fait et de droit comparables à ceux déjà examinés par elle dans des décisions antérieures.

62

Ainsi que la Cour l’a déjà précisé, l’attribution d’un pouvoir de décision à la Commission en matière de recouvrement a posteriori des droits de douane a pour but de garantir l’application uniforme du droit communautaire. Celle-ci risque d’être mise en cause dans les cas où il est donné suite à une demande de renonciation au recouvrement a posteriori, car l’appréciation sur laquelle peut se fonder un État membre pour prendre une décision favorable risque, dans les faits, en raison de l’absence probable de tout recours contentieux, d’échapper à un contrôle qui permette d’assurer une application uniforme des conditions posées par la législation communautaire. Par contre, cela n’est pas le cas quand les autorités nationales procèdent au recouvrement, quel que soit le montant en cause, puisque, dans ce cas, il est alors toujours loisible à l’intéressé de contester une telle décision devant les juridictions nationales (arrêt du 22 juin 2006, Conseil général de la Vienne, C-419/04, Rec. p. I-5645, point 42 et jurisprudence citée).

63

Dans un tel cas, il appartient alors à la juridiction nationale d’apprécier si, compte tenu des circonstances de l’espèce, ces conditions sont remplies et, par conséquent, l’uniformité du droit communautaire pourra être assurée par la Cour dans le cadre de la procédure de renvoi préjudiciel (voir, en ce sens, arrêts du 26 juin 1990, Deutsche Fernsprecher, C-64/89, Rec. p. I-2535, point 13, ainsi que Conseil général de la Vienne, précité, point 42 et jurisprudence citée).

64

Toutefois, lorsque la Commission a été saisie par un État membre d’une demande de remise de droits à l’importation au sens de l’article 239 du code des douanes et qu’elle a déjà adopté une décision contenant des appréciations de droit ou de fait dans un cas particulier d’opérations d’importation, de telles appréciations s’imposent à tous les organes de l’État membre destinataire d’une telle décision, conformément à l’article 249 CE, et ce y compris à ses juridictions amenées à apprécier ce même cas au regard de l’article 220 dudit code (voir, en ce sens, arrêt du 24 septembre 1998, Sportgoods, C-413/96, Rec. p. I-5285, point 41).

65

Dès lors, les exigences liées à l’application uniforme du droit communautaire commandent que, pour les mêmes opérations d’importation d’un opérateur, une décision de la Commission se prononçant sur l’existence d’une «négligence manifeste» de cet opérateur ne soit pas tenue en échec par une décision ultérieure d’un juge national se prononçant sur le «caractère décelable», par ce même opérateur, de l’erreur des autorités douanières nationales.

66

Ainsi, lorsqu’elle a connaissance, au cours de la procédure engagée devant elle, de la saisine de la Commission au titre des articles 220 ou 239 du code des douanes, une juridiction nationale, telle qu’en l’espèce le Gerechtshof te Amsterdam, saisie d’un recours contre l’avis de mise en recouvrement de droits à l’importation, doit éviter de prendre des décisions qui vont à l’encontre d’une décision envisagée par la Commission en application desdits articles (voir, par analogie, arrêts du 28 février 1991, Delimitis, C-234/89, Rec. p. I-935, point 47, ainsi que du 14 décembre 2000, Masterfoods et HB, C-344/98, Rec. p. I-11369, point 51). Ceci implique que la juridiction de renvoi, qui ne peut substituer son appréciation à celle de la Commission, puisse surseoir à statuer dans l’attente de la décision de la Commission (voir, en ce sens, arrêt du 7 septembre 1999, De Haan, C-61/98, Rec. p. I-5003, point 48).

67

En tout état de cause, ainsi que la Cour l’a notamment rappelé dans le cadre du contentieux relatif aux articles 81 CE et 82 CE, lorsqu’une juridiction nationale a des doutes quant à la validité ou à l’interprétation d’un acte d’une institution communautaire, elle peut ou doit, conformément à l’article 234, deuxième et troisième alinéas, CE, déférer une question préjudicielle à la Cour (voir arrêt Masterfoods et HB, précité, point 54).

68

Si, comme dans l’affaire au principal, l’importateur avait introduit, dans le délai prévu à l’article 230, cinquième alinéa, CE, un recours en annulation contre la décision de la Commission se prononçant sur la demande de remise de droits au sens de l’article 239 du code des douanes, il appartenait à la juridiction nationale d’apprécier s’il y avait lieu soit de surseoir à statuer jusqu’à ce que la décision définitive soit rendue sur ce recours en annulation, soit de saisir elle-même la Cour d’une question préjudicielle en appréciation de validité (voir, par analogie, arrêt Masterfoods et HB, précité, point 55).

69

En revanche, lorsque la Commission se prononce sur un cas particulier dans le cadre de l’article 239 du code des douanes, elle ne saurait être liée par une décision rendue antérieurement par une juridiction nationale et par laquelle cette dernière s’est prononcée sur les conditions d’application à ce même cas de l’article 220 du code des douanes (voir, par analogie, arrêt Masterfoods et HB, précité, point 48).

70

Compte tenu de ce qui précède, il convient de répondre aux troisième et quatrième questions que:

lorsque la Commission a été saisie par un État membre d’une demande de remise de droits à l’importation au sens de l’article 239 du code des douanes et qu’elle a déjà adopté une décision contenant des appréciations de droit ou de fait dans un cas particulier d’opérations d’importation, de telles appréciations s’imposent à tous les organes de l’État membre destinataire d’une telle décision, conformément à l’article 249 CE, et ce y compris à ses juridictions amenées à apprécier ce même cas au regard de l’article 220 dudit code;

si l’importateur a introduit, dans le délai prévu à l’article 230, cinquième alinéa, CE, un recours en annulation contre la décision de la Commission se prononçant sur la demande de remise de droits à l’importation au sens de l’article 239 du code des douanes, il appartient à la juridiction nationale d’apprécier s’il y a lieu soit de surseoir à statuer jusqu’à ce que la décision définitive soit rendue sur ce recours en annulation, soit de saisir elle-même la Cour d’une question préjudicielle en appréciation de validité.

Sur les dépens

71

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit:

 

1)

Les feuilles fabriquées à base de farine de riz, de sel et d’eau qui sont séchées, mais qui n’ont subi aucun traitement thermique, relèvent de la sous-position 19059020 de la nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun, dans sa rédaction résultant du règlement (CE) no 1624/97 de la Commission, du 13 août 1997.

 

2)

L’examen de la question posée n’a révélé aucun élément de nature à affecter la validité du règlement (CE) no 1196/97 de la Commission, du 27 juin 1997, relatif au classement de certaines marchandises dans la nomenclature combinée.

 

3)

Lorsque la Commission des Communautés européennes a été saisie par un État membre d’une demande de remise de droits à l’importation au sens de l’article 239 du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement (CE) no 82/97 du Parlement européen et du Conseil, du 19 décembre 1996, et qu’elle a déjà adopté une décision contenant des appréciations de droit ou de fait dans un cas particulier d’opérations d’importation, de telles appréciations s’imposent à tous les organes de l’État membre destinataire d’une telle décision, conformément à l’article 249 CE, et ce y compris à ses juridictions amenées à apprécier ce même cas au regard de l’article 220 dudit règlement.

Si l’importateur a introduit, dans le délai prévu à l’article 230, cinquième alinéa, CE, un recours en annulation contre la décision de la Commission des Communautés européennes se prononçant sur la demande de remise de droits à l’importation au sens de l’article 239 dudit règlement, il appartient à la juridiction nationale d’apprécier s’il y a lieu soit de surseoir à statuer jusqu’à ce que la décision définitive soit rendue sur ce recours en annulation, soit de saisir elle-même la Cour de justice des Communautés européennes d’une question préjudicielle en appréciation de validité.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: le néerlandais.

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