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Document 52022IP0262

Résolution du Parlement européen du 23 juin 2022 sur l’exploitation illégale des forêts dans l’Union européenne (2022/2523(RSP))

OJ C 32, 27.1.2023, p. 8–8 (GA)
OJ C 32, 27.1.2023, p. 20–27 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

27.1.2023   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 32/20


P9_TA(2022)0262

Exploitation illégale des forêts dans l’UE

Résolution du Parlement européen du 23 juin 2022 sur l’exploitation illégale des forêts dans l’Union européenne (2022/2523(RSP))

(2023/C 32/04)

Le Parlement européen,

vu l’article 227 du traité sur l’Union européenne,

vu les articles 4, 191, 230 et 258 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

vu le règlement (UE) no 995/2010 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché (1) (règlement de l’Union sur le bois),

vu la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (2) (la directive Habitats),

vu la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement (3) (la directive relative à l’évaluation stratégique environnementale),

vu le règlement (CE) no 1367/2006 du Parlement européen et du Conseil du 6 septembre 2006 concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (4) (règlement Aarhus),

vu la procédure d’infraction INFR (2020)2033 incluse dans la procédure d’infraction de la Commission du 12 février 2020,

vu la communication de la Commission du 20 mai 2020, intitulée «Stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030 — Ramener la nature dans nos vies» (COM(2020)0380),

vu la communication de la Commission du 16 juillet 2021 intitulée «Une nouvelle stratégie de l’UE pour les forêts pour 2030» (COM(2021)0572),

vu la proposition de la Commission du 17 novembre 2021 en vue d’un règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la mise à disposition sur le marché de l’Union ainsi qu’à l’exportation à partir de l’Union de certains produits de base et produits associés à la déforestation et à la dégradation des forêts et abrogeant le règlement (UE) no 995/2010 (COM(2021)0706), qui vise à enrayer la déforestation et la dégradation des forêts imputables à l’Union,

vu la proposition de la Commission du 15 décembre 2021 relative à une directive du Parlement européen et du Conseil sur la protection de l’environnement par le droit pénal et remplaçant la directive 2008/99/CE (COM(2021)0851) et la communication qui l’accompagne (COM(2021)0814),

vu le règlement (UE) 2021/1767 du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 2021 modifiant le règlement (CE) no 1367/2006 concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (5),

vu la question à la Commission sur l’exploitation illégale des forêts dans l’Union (O-000020/2022 — B9-0016/2022),

vu l’article 136, paragraphe 5, et l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,

vu la proposition de résolution de la commission des pétitions,

A.

considérant que la commission des pétitions a reçu les pétitions no 0289/2015, 0625/2018, 1248/2019, 0408/2020, 0722/2020 et 1056/2021, qui soulèvent des préoccupations quant à la progression de l’exploitation illégale des forêts et aux cas spécifiques d’infraction à la législation environnementale de l’Union dans certains États membres, y compris dans les dernières forêts primaires et anciennes qui demeurent en Europe, et qui demandent l’adoption de mesures préventives destinées à réduire le risque et l’ampleur des dégradations environnementales et des menaces qu’elle fait peser sur la vie et le bien-être humains;

B.

considérant que l’exploitation illégale des forêts est une activité extrêmement inquiétante qui entraîne des dégradations environnementales, une perte de biodiversité et une dégradation de l’écosystème, une désertification et une érosion des sols responsable de catastrophes naturelles telles que des glissements de terrain, et a déjà eu pour conséquence la destruction ou la dégradation de plusieurs sites Natura 2000 et forêts primaires et anciennes; que l’exploitation illégale des forêts peut entraîner l’extinction d’espèces protégées et d’habitats spécifiques pour différentes espèces végétales et animales, car ceux qui se livrent à des activités illégales ont tendance à méconnaître les lois qui protègent les précieuses ressources forestières;

C.

considérant que, selon Europol, la criminalité environnementale est aussi lucrative que le trafic de drogue, mais présente un risque bien moindre de détection et de sanction (6);

D.

considérant que l’exploitation illégale des forêts est un facteur majeur de la dégradation des forêts, de la déforestation et du changement climatique, qui contribue à la détérioration de qualité de l’air; que l’exploitation illégale des forêts représente entre 15 % et 30 % de la production internationale de bois et a en outre des conséquences environnementales, sociales et économiques; que l’exploitation illégale des forêts passe en grande partie inaperçue, ce qui entrave les efforts que déploie l’Union pour atteindre les objectifs du pacte vert pour l’Europe, de la loi sur le climat et de la stratégie en faveur de la biodiversité; que les activités d’exploitation illégale sont très fréquentes dans certaines des forêts de l’Union qui présentent la meilleure qualité et sont les mieux préservées;

E.

considérant que des produits issus de l’exploitation illégale des forêts sont vendus dans l’Union comme du bois certifié (7); que les principaux systèmes de certification existants ne sont pas en mesure de satisfaire pleinement aux exigences de la législation applicable; que les principaux systèmes évalués dans le rapport de la Commission de juillet 2021 sur les systèmes de certification et de vérification dans le secteur forestier présentent des lacunes dans leur définition de la légalité et que leurs exigences légales ont une portée limitée ou sont de nature ambiguë; que ces systèmes, s’ils permettent, pour l’essentiel, une systématisation du transfert des déclarations de certification tout au long de la chaîne d’approvisionnement, ne permettent pas de vérifier systématiquement les transactions entre entités, en temps réel ou autrement, au regard des volumes, des espèces et de la qualité, ce qui signifie qu’ils sont vulnérables à la manipulation et à la fraude; que tous les principaux systèmes de certification atteignent leurs limites lorsqu’il s’agit de détecter et de traiter efficacement les problèmes de corruption, que les systèmes de détection de la corruption sont relativement limités et que le risque de fraude n’est pas bien pris en compte (8);

F.

considérant que les forêts sont des puits de carbone essentiels qui contribuent à lutter contre le changement climatique;

G.

considérant que l’exploitation illégale des forêts a d’importantes répercussions socio-économiques négatives, car les communautés locales et responsables sont privées de leurs moyens de subsistance économiques en raison de la commercialisation illicite de bois coupé illégalement, ce qui encourage la délinquance et nuit au développement local durable et aux entreprises légitimes; que l’exploitation illégale des forêts est souvent associée à l’évasion fiscale, qui permet aux exploitants clandestins de réduire la valeur marchande des produits forestiers, ce qui entraîne une altération du marché et une concurrence déloyale; que l’exploitation illégale des forêts génère des pertes de recettes pour le gouvernement sous la forme de pertes de taxes et de droits et contribue à accroître les coûts de gestion et de transaction dans le secteur forestier; que le bois est souvent coupé illégalement dans un État membre mais commercialisé dans un autre; que la majorité du bois illégal est commercialisé et utilisé comme du bois abattu légalement;

H.

considérant l’absence de données cohérentes, harmonisées et comparables concernant l’exploitation des forêts de l’Union, ainsi que d’une définition commune de l’exploitation illégale des forêts;

I.

considérant que dans certains cas, les exploitants forestiers clandestins ont fait preuve de violence envers les fonctionnaires des offices des forêts, les gardes forestiers, les forces de l’ordre, les défenseurs de l’environnement et les journalistes d’investigation, dont au moins six ont perdu la vie, et qu’il y a eu de nombreux actes de violence et de harcèlement contre des personnes chargées de la protection des forêts;

J.

considérant que l’absence d’une définition reconnue au niveau international des activités couvertes par la notion d’«exploitation illégale des forêts» pose des problèmes; que ce manque de précision constitue une grave lacune juridique;

K.

considérant que la corruption et la fraude sont les principaux facteurs de l’exploitation illégale des forêts, qui conduisent à une répression insuffisante et à l’impunité; que cela exacerbe également diverses activités criminelles telles que le financement de conflits et le blanchiment de capitaux; qu’une action de l’Union est nécessaire pour mettre un terme à l’exploitation illégale des forêts et à la déforestation et pour limiter le commerce de bois et de produits dérivés issus d’un abattage illégal;

L.

considérant que, selon Eurojust, la criminalité environnementale est devenue la quatrième activité criminelle la plus répandue au niveau international;

M.

considérant que le règlement de l’Union sur le bois établit des règles pour la mise sur le marché du bois et des produits dérivés et devrait empêcher l’exploitation illégale des forêts; que la Commission a l’intention d’abroger le règlement de l’Union sur le bois au moyen de sa proposition de règlement relatif à la mise à disposition sur le marché de l’Union ainsi qu’à l’exportation à partir de l’Union de certains produits de base et produits associés à la déforestation et à la dégradation des forêts; que l’Union doit aider les États membres, en cas de gouvernance lacunaire des forêts, à combattre la criminalité, organisée ou non, qui vise les forêts, et soutenir la protection de l’environnement, y compris la protection et la gestion durable des forêts conformément à la directive 2008/99/CE du 19 novembre 2008 relative à la protection de l’environnement par le droit pénal (9), conformément aux objectifs du pacte vert pour l’Europe, de la stratégie en faveur de la biodiversité, du plan d’action «zéro pollution» et du plan d’action en faveur de l’économie circulaire;

N.

considérant que les activités illégales entraînent des pratiques non durables, réduisent la valeur des forêts et aboutissent à la dépréciation des différents services environnementaux, économiques et sociaux fournis par les forêts, avec à la clé une déforestation pure et simple et une dégradation des forêts;

O.

considérant que l’exploitation illégale des forêts est liée à des violations des droits de l’homme et à la violence, ainsi qu’à des crimes associés à la fraude et à la corruption, tels que le blanchiment de capitaux et l’évasion fiscale;

P.

considérant que plusieurs procédures d’infraction sont en cours contre des États membres en raison de la non-application de la législation de l’Union à cet égard;

Q.

considérant que, dans le cadre du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) et d’autres fonds gérés par les États membres, les propriétaires forestiers peuvent actuellement bénéficier d’une compensation pour les services forestiers, environnementaux et climatiques, le soutien à la conservation, à la reconstitution et à la protection des forêts, ainsi que d’une compensation pour les zones forestières Natura 2000, ainsi que pour l’entretien et les activités améliorant la résilience et la valeur environnementale des écosystèmes forestiers;

R.

considérant que les plans d’aménagement forestier des États membres devraient correspondre aux mesures nécessaires pour protéger et restaurer la biodiversité dans les forêts, et devraient être à la disposition du public; que les plans de gestion des sites Natura 2000 ne reconnaissent pas tous la valeur explicite des forêts primaires et anciennes et que les mesures de conservation des forêts strictement protégées n’excluent pas totalement l’exploitation forestière, ce qui peut être incompatible avec la conservation à long terme des forêts primaires et anciennes;

1.

demande instamment aux États membres de mettre en œuvre et de respecter pleinement les obligations énoncées dans la législation de l’Union en vigueur dans le domaine de l’environnement; invite la Commission à agir plus rapidement, plus efficacement et de manière plus transparente, notamment en assurant un suivi régulier des affaires, et à engager des procédures d’infraction pour remédier à tous les cas de non-conformité; invite la Commission à prévoir des ressources suffisantes afin de remédier aux retards actuels; estime qu’un niveau suffisant de personnel qualifié et de ressources est une condition essentielle à la réussite de la mise en œuvre et de l’application des politiques de l’Union;

2.

observe que l’exploitation illégale des forêts demeure un problème dans l’Union; est inquiet de l’incidence négative de cas d’exploitation illégale sur les forêts européennes, les habitats naturels, le marché intérieur ainsi que l’action pour le climat de l’Union; invite la Commission et les États membres à procéder à une évaluation approfondie des causes socio-économiques de ce phénomène et à mettre pleinement en œuvre la législation européenne et nationale pertinente pour l’élaboration effective de mesures concrètes et immédiates de lutte contre l’exploitation illégale des forêts afin d’éviter qu’elle ne devienne tendancielle, compte tenu des obligations au titre des directives sur la nature et des objectifs de la stratégie en faveur de la biodiversité qui ont été approuvés par les États membres; s’inquiète du fait que la flambée des prix des matériaux et de l’énergie et l’application de taux nuls aux émissions de biomasse dans le cadre du système d’échange de quotas d’émission pourraient accroître la pression sur les forêts au-delà des niveaux durables, y compris en raison de l’exploitation illégale des forêts, qui promet des marges bénéficiaires élevées pour un risque négligeable, compte tenu également de la situation sociale et économique des personnes vivant dans des zones reculées et rurales de l’Union;

3.

craint que l’exploitation illégale croissante des forêts dans l’Union sape les objectifs du pacte vert pour l’Europe, de la stratégie de l’Union en faveur de la biodiversité et de la stratégie pour les forêts, car elle est synonyme d’échec des objectifs de protection de la diversité écologique unique et des dernières forêts primaires et anciennes ainsi que de restauration et de conservation des habitats naturels et des espèces de faune et de flore sauvages, et qu’elle compromet les objectifs fixés au regard des zones faisant l’objet d’une protection effective stricte;

4.

souligne que la déforestation est responsable de 20 % des émissions mondiales de CO2; s’inquiète de l’incidence négative de l’exploitation illégale des forêts sur la désertification, l’érosion des sols et des phénomènes tels que les inondations; souligne que la déforestation est également liée à l’extinction de nombreuses espèces qui perdent leur habitat en raison de l’exploitation illégale des forêts;

5.

invite les procureurs et les autorités compétentes des États membres à enquêter dans toute la mesure permise par la loi sur tous les cas d’exploitation illégale des forêts, ainsi que sur les chaînes de transport, de stockage, de distribution et de vente de bois provenant de sources illégales;

6.

souligne que la gestion, la protection et la conservation durables des forêts sur la base d’indicateurs et de seuils mesurables constituent un objectif essentiel pour l’avenir de la foresterie européenne; approuve l’instauration de systèmes de certification proches de la nature afin de préserver toute la diversité biologique, d’assurer la productivité et la résilience à long terme et de répondre ainsi aux problématiques environnementales, économiques et sociétales qui se posent;

7.

invite la Commission et les États membres à mettre en place les mesures nécessaires pour procéder à un contrôle approfondi de la traçabilité du bois utilisé par les entreprises européennes afin de garantir le plein respect du règlement de l’Union sur le bois;

8.

souligne avec force que la Commission devrait veiller à ce que des ressources financières suffisantes soient consacrées, dans le cadre des plans stratégiques nationaux, à la restauration de la biodiversité dans les zones les plus durement touchées par l’exploitation illégale des forêts; rappelle que, selon la résolution du Parlement du 9 juin 2021 sur la stratégie de l’Union en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030, les États membres devraient atteindre au moins 10 % des dépenses annuelles en faveur de la biodiversité dans le cadre financier pluriannuel; déplore que l’objectif de financement de la biodiversité dans certains États membres soit nettement inférieur aux 10 % convenus;

9.

déplore que concernant la gestion durable des forêts, ni seuils ni fourchettes n’aient encore été définis comme critères de référence pour l’état souhaitable des forêts, et que les critères relatifs à la santé des écosystèmes, à la biodiversité et au changement climatique restent insuffisants; demande par conséquent de définir les nouveaux indicateurs et seuils nécessaires à une gestion durable des forêts;

10.

exhorte l’ensemble des États membres à veiller à ce que les systèmes de traçabilité du bois soient pleinement opérationnels et à ce que les sanctions en matière d’exploitation forestière soient proportionnées et dissuasives afin de décourager efficacement l’exploitation illégale des forêts; se déclare vivement préoccupé par le fait qu’à l’heure actuelle, les sanctions ne sont pas proportionnelles à la valeur des produits du bois, et que les opérateurs ne reçoivent parfois que des avertissements ou des sanctions administratives très faibles; presse les États membres de donner les moyens aux autorités nationales responsables de la foresterie d’améliorer l’efficacité de leur action et de renforcer le nombre d’agents de la force publique, s’il y a lieu, afin d’engager des poursuites en justice effectives dans les affaires d’exploitation illégale des forêts, en se fondant sur les preuves relevées par la police ou communiquées à celle-ci par des tiers; demande que des procédures pénales, y compris à l’encontre de particuliers, soient prévues dans le cadre de la révision de la directive relative à la protection de l’environnement par le droit pénal;

11.

invite tous les États membres à partager les bonnes pratiques entre les services répressifs afin de renforcer la lutte contre toutes les pratiques illégales connexes;

12.

invite les États membres à veiller à ce que l’accès du public aux informations relatives à l’environnement ainsi que la participation publique à la prise de décision et de justice en ce qui concerne les plans d’aménagement forestier soient assurés conformément à la convention d’Aarhus;

13.

insiste sur la nécessité d’évaluer correctement les incidences environnementales des plans d’aménagement forestier et rappelle qu’il incombe aux États membres de réviser ceux qui ne sont pas conformes à la législation nationale;

14.

déplore les attaques dont ont été victimes des fonctionnaires du corps forestier, des gardes forestiers, des agents de la force publique, des défenseurs de l’environnement et des journalistes d’investigation, y compris les attaques meurtrières, et rappelle que celles-ci sont souvent perpétrées par des particuliers ou des bandes bien organisées et bien équipées, qui pratiquent une exploitation illégale et recourent à toujours plus de violence et, fréquemment, à l’intimidation;

15.

invite les autorités nationales et européennes à agir de manière ferme et dissuasive afin de garantir le plein respect du droit national et européen en matière d’environnement; constate que les faiblesses procédurales et le manque de contrôles réduisent l’efficacité du règlement sur le bois dans la pratique; prie instamment les colégislateurs de l’Union de profiter des négociations sur la proposition de règlement relatif aux produits qui ne participent pas à la déforestation (COM(2021)0706) pour tirer les enseignements de la mise en œuvre et de l’application du règlement de l’Union sur le bois et améliorer le statut des autorités compétentes des États membres, les dispositions relatives à la quantité et à la qualité de leurs contrôles, leurs relations et interactions avec les autorités compétentes d’autres États membres et avec d’autres autorités nationales et la Commission; invite les États membres à appliquer strictement les dispositions des textes applicables actuellement en vigueur en vue d’interdire l’utilisation et la mise sur le marché de l’Union de bois provenant de sources illégales; demande que l’exploitation illégale des forêts soit considérée comme une infraction pénale, qu’elle fasse l’objet de sanctions pénales appropriées et qu’elle relève du champ d’application de la directive révisée relative à la protection de l’environnement par le droit pénal, et demande un renforcement de la coopération européenne dans la lutte contre l’exploitation illégale des forêts; demande une définition uniforme de l’exploitation illégale des forêts comme crime contre l’environnement dans tous les États membres, de sorte à garantir l’application de procédures et de sanctions harmonisées pour les mêmes infractions en matière d’exploitation illégale des forêts dans l’ensemble de l’Union;

16.

met l’accent sur l’importance de mesures préventives visant à réduire l’ampleur des dégradations économiques et environnementales ainsi que la menace que fait peser l’exploitation illégale des forêts sur la vie humaine; reconnaît que des progrès ont récemment été accomplis au niveau des États membres, avec des améliorations démontrées de la traçabilité du bois, ainsi que la révision et le renforcement des sanctions prévues dans la législation nationale visant à lutter contre l’exploitation illégale des forêts; souligne la nécessité pour les États membres concernés d’élaborer des plans de restauration adéquats des zones naturelles détériorées; rappelle qu’une approche européenne coordonnée et des mesures de prévention peuvent contribuer à lutter contre l’exploitation illégale des forêts; invite les États membres à améliorer la qualité et l’exhaustivité de leurs systèmes de surveillance des forêts afin de pouvoir tirer des conclusions fiables quant à l’efficacité des plans d’aménagement forestier au sein du réseau Natura 2000; relève que pour pouvoir évaluer de manière satisfaisante l’efficacité des mesures liées à Natura 2000, le suivi devrait inclure la collecte de données supplémentaires sur les zones situées à l’intérieur et à l’extérieur du réseau et sur la qualité de la gestion et de la conservation;

17.

invite la Commission à réviser le règlement de l’Union sur le bois afin d’étendre son application à tous les bois et produits du bois vendus sur le marché européen afin de garantir des conditions de concurrence équitables et d’éviter la concurrence déloyale;

18.

souligne le grand intérêt du public pour la lutte contre l’exploitation illégale des forêts, dont témoignent également les pétitions no 1248/2019, 0408/2020, 0722/2020 et 1056/2021 adressées à la commission des pétitions, qui dénoncent l’augmentation de l’exploitation illégale des forêts, souvent en raison de l’application laxiste de la législation de l’Union dans les zones protégées ou l’arrêt des dispositifs de surveillance satellitaire, ainsi que l’augmentation du nombre d’agressions contre des travailleurs forestiers, des militants et des journalistes;

19.

exhorte les États membres à adopter des mesures répressives adaptées pour lutter contre l’exploitation illégale des forêts et protéger les défenseurs de l’environnement, les journalistes et les lanceurs d’alerte; invite les États membres à prendre les mesures nécessaires pour éviter que les affaires liées à l’exploitation illégale des forêts ne soient classées sans suite par les autorités judiciaires; prend acte du rôle actif et de l’engagement de la société civile, y compris d’organisations non gouvernementales et de défenseurs de l’environnement, dans l’action en faveur de la protection du climat et de la biodiversité, et invite l’Union à soutenir ces activités; souligne qu’il est nécessaire de garantir la participation de la société civile dans le cadre de transparence défini à l’article 13 de l’accord de Paris;

20.

invite la Commission à jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre l’exploitation illégale des forêts à l’échelle mondiale et à promouvoir la mise en œuvre d’une définition unique, claire et reconnue au niveau international du type d’activités relevant de la notion d’«exploitation illégale des forêts» afin de remédier aux lacunes juridiques existantes qui favorisent le non-respect de la norme; se félicite de la proposition de règlement sur les produits exempts de déforestation, en ce qu’elle constitue un premier pas sur cette voie;

21.

demande à la Commission et aux États membres d’évaluer fréquemment les données disponibles sur la base de la surveillance au sol ainsi que des technologies de télédétection, telles que les images satellites de tous les sites forestiers Natura 2000, et de prendre les mesures qui s’imposent, y compris en engageant des procédures d’infraction, en cas de preuves de détérioration ou de destruction de ces sites, et de rendre publiques ces évaluations et mesures; souligne que les images satellites sont plus efficaces si elles sont combinées à des données de terrain, et qu’il convient donc de ne pas négliger ces données; invite les États membres à remédier aux dommages causés aux habitats forestiers protégés ou aux habitats protégés d’espèces forestières sur les sites Natura 2000 touchés par la déforestation et l’exploitation illégale des forêts;

22.

souligne que la Commission doit veiller au respect du droit de l’Union; est conscient que la charge de la preuve pour démontrer l’existence d’une violation incombe à la Commission, qui ne peut se fonder sur aucune présomption dans les affaires d’infraction; souligne toutefois que, si la Commission a confirmé que l’application correcte du droit de l’Union demeure une priorité, la durée de certaines procédures d’infraction, même lorsque la Commission dispose de suffisamment d’éléments de preuve, suggère le contraire; déclare qu’il est irresponsable qu’au moment où la législation environnementale est celle qui subit le plus de violations et où le pacte vert pour l’Europe a donné lieu à de nouvelles initiatives, la direction générale de l’environnement de la Commission soit constamment et systématiquement en sous-effectif; déplore la perte de biens irremplaçables en raison de l’inaction de la Commission et de restrictions du budget consacré au personnel de l’Union; propose que la Commission et les États membres définissent clairement leurs priorités;

23.

demande à la Commission de recourir systématiquement à toutes les évolutions technologiques disponibles, telles que la télédétection, afin de garantir le plein respect du règlement de l’Union sur le bois et d’être ainsi en mesure d’examiner de manière exhaustive l’état des forêts européennes;

24.

prie instamment la Commission, le Conseil et les États membres de prendre les mesures nécessaires pour mettre en place et développer une coopération policière associant les autorités compétentes de tous les États membres pour prévenir et détecter les infractions pénales dans le domaine forestier et du commerce du bois exploité de manière illégale et enquêter sur celles-ci; souligne que la Commission, le Conseil et les États membres devraient évaluer systématiquement l’efficacité de la coopération policière et l’améliorer régulièrement;

25.

invite la Commission et le Conseil à évaluer attentivement les conséquences potentiellement négatives que l’action en faveur de la biomasse forestière en tant que combustible pourrait avoir sur les forêts de l’Union, en particulier dans le cadre des négociations sur le paquet «Ajustement à l’objectif 55» et de la révision de la directive sur les énergies renouvelables (10) (RED III);

26.

demande à la Commission de promouvoir le partage entre les États membres des bonnes pratiques en matière de lutte contre l’exploitation illégale des forêts et ses conséquences, y compris pour les marchés publics écologiques et la transparence pour les consommateurs en ce qui concerne les noms des entreprises qui commercialisent du bois récolté illégalement;

27.

demande à la Commission de faire preuve de vigilance quant à la bonne application du règlement de l’Union sur le bois, de la directive «Habitats», de la directive relative à l’évaluation stratégique environnementale et de la directive concernant la conservation des oiseaux sauvages (11), ainsi que du règlement Aarhus, étant donné que les lacunes dans la mise en œuvre de la législation environnementale de l’Union peuvent constituer un facteur favorisant la criminalité environnementale; observe que les infractions à ces règlements peuvent entraîner des catastrophes environnementales et écologiques telles que la dégradation et l’érosion des sols, des glissements de terrain, des inondations, l’extinction d’espèces sauvages uniques, la déforestation et la disparition des dernières forêts primaires et anciennes de l’Union;

28.

invite la Commission à examiner les problèmes législatifs actuels et à améliorer ses contrôles afin d’éliminer les failles dans la législation qui permettent d’utiliser dans l’Union du bois récolté illégalement, comme c’est actuellement le cas avec des techniques qui mélangent par exemple du bois issu d’une récolte légale et du bois issu d’une récolte illégale afin de certifier l’origine de ce bois;

29.

invite la Commission à utiliser sa politique commerciale pour lutter contre l’exploitation illégale des forêts au niveau international; souligne que l’importation de bois issu d’une récolte illégale en provenance de pays tiers fausse le marché européen et crée une situation injuste pour les producteurs européens; rappelle que l’utilisation de ce bois provenant de sources illégales nuit également aux communautés dans lesquelles il est récolté et encourage la poursuite de la récolte illégale de ce bois et de toutes les formes de criminalité qui y sont associées; se félicite de l’ensemble de règles de diligence raisonnée imposées par la Commission, dans sa proposition de règlement sur les produits qui ne participent pas à la déforestation, aux entreprises qui souhaitent mettre certains produits de base sur le marché de l’Union;

30.

insiste sur l’importance de la mise en œuvre des projets destinés à promouvoir une gestion forestière proche de la nature ainsi que la protection, la restauration et la sauvegarde de l’environnement et, dans le même temps, de soutenir les communautés dépendantes des ressources forestières en développant des chaînes d’approvisionnement courtes et l’écotourisme; propose de développer la gouvernance démocratique des forêts et d’élaborer des projets en étroite coopération avec les autorités locales, qui elles-mêmes collaborent étroitement avec les parties prenantes et les communautés locales, lesquelles sont les plus touchées, directement et indirectement, par les modifications de l’environnement et les répercussions socio-économiques de la production et du commerce à grande échelle du bois et de ses produits;

31.

invite l’Union et les États membres à explorer de nouvelles voies de coopération dans la prévention de l’exploitation illégale des forêts et la lutte contre ce phénomène; recommande à la Commission de mettre en place une plateforme de coopération entre les États membres pour élaborer et améliorer des outils numériques de surveillance des forêts à l’échelon national, afin de signaler les cas d’exploitation illégale des forêts et de permettre une intervention transfrontalière rapide et efficace contre l’exploitation illégale des forêts;

32.

invite les États membres à assumer la responsabilité, qui leur incombe au premier chef, de protéger l’environnement, y compris les forêts, et d’assurer la sécurité des gardes forestiers; rappelle que la corruption au sein des institutions publiques reste un facteur important d’impunité dans les affaires d’exploitation illégale des forêts et d’infractions visant les défenseurs de l’environnement;

33.

invite les États membres à harmoniser, dans toute la mesure du possible, leurs règles en matière de contrôle du bois issu d’une récolte illégale afin d’empêcher que la législation des États membres où les contrôles sont laxistes ne soit mise à profit pour distribuer du bois provenant de sources illégales;

34.

invite les procureurs, les enquêteurs, les gardes forestiers et les experts financiers à unir leurs forces et à conjuguer leurs compétences afin de garantir l’efficacité et la célérité de la détection des activités de la criminalité organisée ainsi que des enquêtes et des poursuites connexes;

35.

rappelle que l’Union peut affecter des fonds à la compensation de services forestiers, environnementaux et climatiques, qui favorisent l’amélioration de la résilience et de la valeur environnementale des écosystèmes forestiers et la restauration, la sauvegarde et la protection des forêts, ainsi qu’à des compensations pour les zones forestières Natura 2000, y compris pour les petits propriétaires forestiers;

36.

propose d’instaurer une surveillance régulière (notamment par des patrouilles d’agents de sécurité ou de police et par la surveillance aérienne) dans les forêts et les zones de transport de bois ou dans les zones où des activités d’exploitation illégale ou de transport et de commerce du bois issu de telles activités ont été signalées; souligne qu’il convient de sensibiliser la police au délit d’exploitation illégale des forêts et invite les États membres à dispenser une formation spéciale aux forces de l’ordre pour les doter d’outils concrets ainsi que des compétences et du savoir-faire nécessaires pour prévenir, détecter et poursuivre les activités d’exploitation illégale des forêts et pour protéger les défenseurs de l’environnement, les lanceurs d’alerte et les personnes chargées de la gestion des forêts; encourage les États membres à coopérer afin de garantir une utilisation intelligente des ressources pour prévenir une mise en œuvre irrégulière de cette mesure;

37.

rappelle que l’exploitation illégale des forêts est souvent liée à d’autres formes de criminalité, telles que les trafics, la corruption, la fraude, ou encore le blanchiment de capitaux, qui comportent pour la plupart une dimension transfrontière; met par conséquent l’accent sur la nécessité de considérer les informations concernant l’exploitation illégale des forêts comme essentielles dans les enquêtes portant sur d’autres formes graves de criminalité, et de partager ces informations avec Europol afin de faciliter les enquêtes transfrontalières;

38.

souligne que la création d’un Parquet européen vert, moyennant l’extension des compétences du Parquet européen, conformément à l’article 86, paragraphe 4, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, est un moyen d’améliorer la mise en œuvre et l’application de la législation environnementale de l’Union et de lutter contre la criminalité environnementale grave revêtant une dimension transfrontière;

39.

invite la Commission à réserver des financements à la lutte contre l’exploitation illégale des forêts;

40.

insiste sur le fait qu’il importe d’accroître la disponibilité de données transparente et de qualité et prend bonne note de l’objectif de la nouvelle stratégie de l’Union pour les forêts visant à améliorer la collecte de données harmonisées à cet égard; estime qu’il est essentiel de s’appuyer sur les structures existantes, en particulier les inventaires forestiers nationaux et le système d’information forestière pour l’Europe, afin d’améliorer la réponse opérationnelle des forces de police dans le domaine de la criminalité forestière; reconnaît la nécessité de disposer, régulièrement et en temps utile, de données comparables pour tous les États membres pour les variables fondamentales et les variables appliquées relatives aux forêts; approuve dès lors la proposition relative à un cadre sur l’observation des forêts, la transmission de rapports et la collecte de données à l’échelle de l’Union; invite les États membres à recueillir des données sur les activités d’inspection, sur le nombre d’infractions établi ainsi que sur le type et l’ampleur des sanctions imposées;

41.

invite les États membres à sensibiliser davantage le public à la lutte contre l’exploitation illégale des forêts et aux outils de signalement disponibles, notamment au moyen de campagnes de communication ciblées; invite les États membres à inclure dans les programmes scolaires la notion de préservation des forêts dans le cadre de la conservation du patrimoine naturel;

42.

souligne que les litiges en matière d’environnement requièrent des connaissances et des compétences spécifiques de la part des professionnels du droit; recommande dès lors que les États membres renforcent la composante environnementale dans les études universitaires de droit;

43.

souligne que le recours à des technologies de télédétection, telles que l’imagerie satellitaire, à l’appui de la collecte des données d’inventaire et des inspections sur le terrain, peut aider les autorités compétentes européennes et nationales à détecter les zones importantes d’exploitation forestière illicite plus rapidement et avec davantage de précision; souligne la nécessité d’étalonner ces données à l’aide de données recueillies par la surveillance au sol afin de garantir l’exactitude des constatations; invite les États membres à exploiter pleinement les outils mis à leur disposition par le Centre satellitaire de l’Union européenne pour renforcer leurs capacités de lutte contre l’exploitation illégale des forêts; souligne que si l’exploitation forestière peut être détectée par image satellite, il demeure difficile de faire la distinction entre les activités légales et illégales; souligne que l’efficacité des ressources satellitaires pour lutter contre l’exploitation illégale des forêts dépend de la capacité des autorités à utiliser les informations et à les coordonner avec d’autres bases de données et outils de surveillance (au sol); estime que l’utilisation des images satellitaires en complément des inspections sur le terrain et des données d’inventaire peut constituer un atout précieux pour détecter les activités d’exploitation illégale des forêts et contribuer à établir indirectement l’existence de telles activités par la présence de routes en dehors des zones autorisées;

44.

rappelle le rôle essentiel de l’innovation technologique dans la lutte contre l’exploitation illégale des forêts et la criminalité environnementale de manière générale; invite la Commission à consacrer des financements à l’appui technologique des États membres pour doter les autorités répressives nationales des meilleurs outils possible;

45.

souligne qu’une mission d’information dans les zones touchées par l’exploitation illégale des forêts contribuerait à établir la réalité sur le terrain, les principaux facteurs à l’origine de ces activités et les effets sur la population locale, ainsi qu’à définir les pistes à suivre dans des cas spécifiques;

46.

invite la Commission à veiller à ce que l’Union ne soutienne pas des initiatives et des projets susceptibles de conduire à l’exploitation illégale des forêts et à la déforestation, ou à d’autres répercussions néfastes de ce type sur l’environnement;

47.

charge sa Présidente de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission ainsi qu’aux gouvernements et aux parlements des États membres.

(1)  JO L 295 du 12.11.2010, p. 23.

(2)  JO L 206 du 22.7.1992, p. 7.

(3)  JO L 197 du 21.7.2001, p. 30.

(4)  JO L 264 du 25.9.2006, p. 13.

(5)  JO L 356 du 8.10.2021, p. 1.

(6)  https://www.europol.europa.eu/crime-areas-and-statistics/crime-areas/environmental-crime

(7)  Selon la note d’information à l’intention des autorités compétentes mettant en œuvre le règlement de l’Union sur le bois de juin-septembre 2020, «bien que le bois fourni à IKEA par VGSM ait été certifié par le Conseil de bonne gestion forestière, le rapport indique que plus de la moitié du bois récolté à Velyky Bychkiv d’avril à juin 2018 n’était pas conforme aux normes du Conseil de bonne gestion forestière et avait en réalité été abattu illégalement».

(8)  Commission européenne, Study on certification and verification schemes in the forest sector and for wood-based products: report, juillet 2021.

(9)  JO L 328 du 6.12.2008, p. 28.

(10)  Directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (JO L 328 du 21.12.2018, p. 82).

(11)  Directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages (JO L 20 du 26.1.2010, p. 7).


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