EUR-Lex Access to European Union law

Back to EUR-Lex homepage

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 52021AB0004

Avis de la Banque Centrale Européenne du 19 février 2021 sur une proposition de règlement sur les marchés de crypto-actifs, et modifiant la directive (UE) 2019/1937 (CON/2021/4) 2021/C 152/01

OJ C 152, 29.4.2021, p. 1–9 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

29.4.2021   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 152/1


AVIS DE LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE

du 19 février 2021

sur une proposition de règlement sur les marchés de crypto-actifs, et modifiant la directive (UE) 2019/1937

(CON/2021/4)

(2021/C 152/01)

Introduction et fondement juridique

Le 18 et le 30 novembre 2020, la Banque centrale européenne (BCE) a reçu des demandes de consultation, respectivement de la part du Conseil de l’Union européenne et du Parlement européen, portant sur une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur les marchés de crypto-actifs, et modifiant la directive (UE) 2019/1937 (1) (ci-après le «règlement proposé»).

La BCE a compétence pour émettre un avis en vertu de l’article 127, paragraphe 4, et de l’article 282, paragraphe 5, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, étant donné que le règlement proposé contient des dispositions relevant de sa compétence. Cette dernière comprend notamment la conduite de la politique monétaire, la promotion du bon fonctionnement des systèmes de paiement, le contrôle prudentiel des établissements de crédit et la contribution à la bonne conduite des politiques menées par les autorités compétentes en ce qui concerne la stabilité du système des marchés financiers, conformément à l’article 127, paragraphe 2, premier et quatrième tirets, à l’article 127, paragraphes 5 et 6, et à l’article 282, paragraphe 1, dudit traité. Conformément à l’article 17.5, première phrase, du règlement intérieur de la Banque centrale européenne, le présent avis a été adopté par le conseil des gouverneurs.

1.   Observations générales

1.1.

La BCE est favorable à l’initiative de la Commission européenne visant à créer un cadre harmonisé au niveau de l’Union européenne pour les crypto-actifs et les activités et services connexes, initiative qui fait partie de l’ensemble de mesures sur la finance numérique (2) adopté par la Commission le 24 septembre 2020. La BCE est également favorable à l’objectif du règlement proposé, qui est de traiter les différents niveaux de risque que présente chaque type de crypto-actif, tout en trouvant un juste équilibre avec la nécessité de soutenir l’innovation. En outre, la BCE estime qu’un cadre harmonisé au niveau de l’Union est essentiel pour prévenir la fragmentation au sein du marché unique. Cela étant, certains aspects du règlement proposé relatifs aux responsabilités de la BCE, de l’Eurosystème et du Système européen de banques centrales (SEBC) concernant la conduite de la politique monétaire, le bon fonctionnement des systèmes de paiement, le contrôle prudentiel des établissements de crédit et la stabilité financière nécessitent des ajustements supplémentaires.

1.2.

Il ressort du règlement proposé que les crypto-actifs, en particulier les deux sous-catégories que sont les jetons se référant à des actifs et les jetons de monnaie électronique, ont une dimension évidente de substitution monétaire eu égard aux trois fonctions de la monnaie, à savoir celles de moyen d’échange, de réserve de valeur et d’unité de compte. La définition du «jeton se référant à des actifs» fait référence à la fonction de réserve de valeur («vise à conserver une valeur stable») (3), tandis que celle du «jeton de monnaie électronique» fait référence la fois à la fonction de moyen d’échange et à celle de réserve de valeur («[...] dont l’objet principal est d’être utilisé comme moyen d’échange et qui vise à conserver une valeur stable [...]») (4). Le règlement proposé met l’accent sur la fonction de moyen d’échange des jetons de monnaie électronique, relevant que ceux-ci sont «destinés essentiellement à constituer un moyen de paiement dans le but de stabiliser leur valeur en se référant à une monnaie fiat unique» et que «[à] l’instar de la monnaie électronique, ces crypto-actifs constituent des substituts électroniques des pièces et des billets de banque et sont utilisés pour effectuer des paiements» (5). Cette interprétation est renforcée par le fait que les instruments financiers, tels que définis dans la directive n° 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil (ci-après la «directive MiFID II») (6), sont exclus du champ d’application du règlement proposé. Au vu de ce qui précède, la BCE comprend que les termes «jetons se référant à des actifs» et «jetons de monnaie électronique» sont définis dans le règlement proposé, en tout ou en partie, comme des substituts monétaires.

1.3.

La BCE est favorable à l’exclusion générale de la BCE et des banques centrales nationales des États membres, lorsqu’elles agissent en leur qualité d’autorités monétaires, du champ d’application du règlement proposé (7), ainsi qu’à une exclusion de ce champ d’application de tout crypto-actif qui pourrait ultérieurement être émis par les banques centrales lorsqu’elles agissent en leur qualité d’autorités monétaires et de tout service lié à des crypto-actifs que les banques centrales pourraient ultérieurement fournir (8). La BCE relève que le règlement proposé fait également référence aux expressions «monnaie de l’Union» et «banque centrale d’émission» (9), et que s’il est lu conjointement avec un autre élément de l’ensemble de mesures sur la finance numérique qui contient également les deux expressions, à savoir la proposition de règlement sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués (10), une distinction claire apparaît, dans les propositions législatives de l’Union, entre les crypto-actifs et la monnaie de banque centrale (11). Afin d’éviter toute confusion possible quant à la nature juridique et aux caractéristiques des crypto-actifs (si et lorsqu’ils sont) émis par des banques centrales, par rapport à la monnaie de banque centrale, il pourrait s’avérer utile que le règlement proposé confirme qu’il ne s’appliquerait pas à l’émission, par les banques centrales, de monnaie de banque centrale reposant sur la technologie des registres distribués ou sous forme numérique, destinée à compléter des formes existantes de monnaie de banque centrale, que la BCE peut autoriser conformément au traité et aux statuts du Système européen de banques centrales (ci-après les «statuts du SEBC»).

1.4.

Enfin, en ce qui concerne la définition du terme «crypto-actif», la BCE relève que celle introduite par le règlement proposé est très générale (12). Toutefois, afin d’éviter des divergences d’interprétation, au niveau national, sur ce qui peut constituer ou non un crypto-actif en vertu du règlement proposé, de favoriser la prestation transfrontière de services sur crypto-actifs et de créer un ensemble de règles véritablement harmonisées pour les crypto-actifs, il convient de préciser encore le champ d’application du règlement proposé. En particulier, il est nécessaire de clarifier davantage la distinction entre les crypto-actifs pouvant être qualifiés d’instruments financiers (relevant du champ d’application de la directive MiFID II) et ceux qui relèveraient du champ d’application du règlement proposé.

2.   Aspects relatifs à la politique monétaire et au système de paiement

2.1.   Politique monétaire et aspects monétaires connexes

2.1.1.

Contrairement aux crypto-actifs utilisés exclusivement soit comme un moyen de paiement soit comme une réserve de valeur, les crypto-actifs remplissant ces deux fonctions pourraient avoir des conséquences majeures sur la transmission de la politique monétaire. À cet égard, la BCE prend note de l’interdiction du paiement d’intérêts sur les crypto-actifs prévue dans le règlement proposé (13), qui est conforme à la réglementation d’autres instruments principalement utilisés comme des moyens de paiement, tels que la monnaie électronique. En conséquence, cette interdiction pourrait faire dépendre l’attractivité relative des jetons de monnaie électronique et des jetons se référant à des actifs, du point de vue du détenteur, de l’environnement de taux d’intérêt. On ne peut entièrement exclure la possibilité que cela génère des flux entrants et sortants en cas de changement notable de l’environnement de taux d’intérêt, ce qui pourrait avoir des répercussions sur la stabilité financière et la transmission de la politique monétaire.

2.1.2.

Les crypto-actifs dont la valeur nominale est stable, qui servent de moyen de paiement et de réserve de valeur, pourraient avoir une incidence sur la stabilité et le coût du financement des établissements de crédit par les dépôts, ce qui pourrait entraver la capacité des établissements de crédit à remplir leur rôle d’intermédiation économique. Le système financier de la zone euro reposant essentiellement sur les établissements de crédit, des changements brusques de la solidité de leurs bilans peuvent nuire à la stabilité de ces établissements et à leur capacité de prêt et, partant, à la transmission de la politique monétaire, même si des modifications du système financier résultant de l’innovation et de la concurrence ne sont pas nuisibles en elles-mêmes. Dans un scénario où les dépôts seraient remplacés de manière importante par des crypto-actifs, les établissements de crédit pourraient avoir besoin d’explorer d’autres sources de financement, telles que le financement par le marché monétaire et les banques centrales, ce qui aurait des effets sur les coûts de financement des banques, les taux de référence du marché monétaire et la taille du bilan des banques centrales.

2.1.3.

Enfin, dans un scénario impliquant une utilisation généralisée des jetons se référant à des actifs et des jetons de monnaie électronique, il pourrait y avoir une augmentation de la demande d’actifs sûrs, ce qui pourrait influer sur la formation des prix des actifs, la valorisation des garanties, le fonctionnement du marché monétaire et la conduite de la politique monétaire. Cela pourrait, en fin de compte, entraîner une raréfaction des garanties pour les opérations d’open market. En outre, une utilisation généralisée des jetons se référant à des actifs à des fins de paiement pourrait remettre en cause le rôle des paiements en euros, voire compromettre la fourniture, par les pouvoirs publics, de la fonction d’unité de compte de la monnaie.

2.1.4.

Outre les considérations précédentes concernant la politique monétaire, les jetons se référant à des actifs et les jetons de monnaie électronique présenteraient, en vertu du règlement proposé, des caractéristiques différentes, y compris quant à leur fonction principale, à la composition des actifs de réserve et aux droits des détenteurs. À cet égard, il existe un risque qu’en raison de leur utilisation concrète, s’ajoutant à l’importance systémique qu’ils pourraient acquérir, les jetons se référant à des actifs et les jetons de monnaie électronique soient de facto équivalents à des instruments de paiement, indépendamment de la fonction ou utilisation principale qu’ils sont censés avoir en vertu du règlement proposé. Si cela était le cas, il conviendrait de soumettre les jetons se référant à des actifs et les jetons de monnaie électronique à des exigences similaires afin d’éviter le risque d’arbitrage réglementaire entre les différents régime. En particulier, étant donné que les caractéristiques de conception ainsi que l’utilisation des jetons se référant à des actifs les rendent propres à un usage comme moyen de paiement, il conviendrait au moins d’exiger des émetteurs qu’ils accordent aux détenteurs de ces jetons des droits de remboursement, soit sur l’émetteur, soit sur les actifs de réserve. En outre, il pourrait être envisagé de créer une catégorie ad hoc de «jetons de paiement» qui soumettrait les jetons se référant à des actifs à un ensemble d’exigences identiques à celles applicables aux émetteurs de jetons de monnaie électronique. Il conviendrait en outre, au cas où des jetons se référant à des actifs et revêtant une importance significative deviendraient largement utilisés pour effectuer des paiements dans l’Union, de soumettre les émetteurs de ces jetons aux mêmes exigences d’agrément que celles applicables aux émetteurs de jetons de monnaie électronique, lorsque l’Autorité bancaire européenne (ABE) estime que cela est approprié conformément aux critères de classement restant à définir dans les normes techniques de réglementation.

En outre, le règlement proposé prévoit qu’une autorité compétente peut refuser l’agrément à un émetteur de jetons se référant à des actifs, notamment lorsque le modèle d’entreprise de l’émetteur peut constituer une menace sérieuse pour la stabilité financière, la transmission de la politique monétaire ou la souveraineté monétaire (14). À cet égard, lorsqu’un dispositif se référant à des actifs équivaut à un système ou schéma de paiement, l’évaluation de la menace potentielle pour la conduite de la politique monétaire et le bon fonctionnement des systèmes de paiement devrait relever de la compétence exclusive de la BCE (ou de la banque centrale nationale émettant la monnaie de l’Union concernée). Dans le cas de l’euro, cela se justifie par le fait qu’une menace potentielle peut nuire à l’accomplissement des missions fondamentales relevant de l’Eurosystème en vertu du traité, en particulier la conduite de la politique monétaire de l’Union et la promotion du bon fonctionnement des systèmes de paiement. Ces risques pourraient, en définitive, avoir une incidence sur la poursuite de l’objectif principal de l’Eurosystème, à savoir, conformément au traité, le maintien de la stabilité des prix. Compte tenu des aspects essentiels sur lesquels l’évaluation de la BCE est demandée dans le cadre du processus d’agrément des émetteurs de jetons se référant à des actifs, l’intervention de la BCE, dans les domaines qui relèvent de sa compétence exclusive, ne devrait pas se limiter à l’émission d’un avis non contraignant. Selon la même logique, lorsque les jetons se référant à des actifs peuvent avoir une incidence sur la conduite de la politique monétaire ou le bon fonctionnement des systèmes de paiement dans des États membres dont la monnaie n’est pas l’euro, il convient que les banques centrales de ces États membres, qui, en vertu du traité, conservent leurs compétences dans le domaine de la politique monétaire conformément à leur droit national, soient en mesure d’émettre un avis contraignant. Compte tenu de ce qui précède, la BCE suggère de modifier le règlement proposé en conséquence. En outre, la BCE estime qu’il convient d’examiner de façon plus approfondie le caractère adéquat du cadre législatif actuel applicable en vertu de la directive n° 2009/110/CE du Parlement européen et du Conseil (ci-après la «directive relative à la monnaie électronique») (15). En particulier, l’arrivée de jetons de monnaie électronique d’importance significative justifie une intervention de la BCE (ou de la banque centrale concernée d’un État membre dont la monnaie n’est pas l’euro), de manière similaire à l’intervention préconisée pour l’agrément des émetteurs de jetons se référant à des actifs. L’émission de jetons de monnaie électronique, en particulier lorsque ceux-ci sont considérés comme revêtant une importance significative, nécessite une évaluation minutieuse de ses implications pour la politique monétaire et le bon fonctionnement des systèmes de paiement.

En outre, le pouvoir de l’autorité compétente de refuser l’agrément lorsque le modèle d’entreprise d’un émetteur de jetons se référant à des actifs constitue une menace sérieuse pour la stabilité financière, la transmission de la politique monétaire ou la souveraineté monétaire, suppose que cette autorité soit en mesure de prévoir précisément ces risques au stade de l’agrément, ce qui peut se révéler impossible étant donné que l’ampleur des risques dépend de celle de l’utilisation du jeton concerné. À cet égard, le règlement proposé ne semble pas fournir d’outil équivalent permettant à l’autorité compétente de réagir au cas où, au cours de son existence, un jeton se référant à des actifs deviendrait une menace pour la stabilité financière, la transmission de la politique monétaire ou la souveraineté monétaire. Par conséquent, la BCE suggère que les autorités compétentes soient également habilitées à prendre toutes les mesures appropriées pour garantir la bonne conduite de la politique monétaire et la promotion du bon fonctionnement des systèmes de paiement, et soient tenues d’agir conformément aux avis de la BCE et des banques centrales concernées sur ces aspects particuliers. Des mécanismes supplémentaires visant à inciter les émetteurs à limiter l’ampleur de l’émission, y compris des exigences en matière de tests de résistance assorties d’éventuelles exigences de capital supplémentaires, devraient être inclus dans le règlement proposé (voir point 3.2.3 ci-dessous).

2.1.5.

En outre, le règlement proposé fait plusieurs fois référence à l’expression «monnaies fiat ayant cours légal». Conformément aux traités et au droit monétaire de l’Union, l’euro est la monnaie unique de la zone euro, c’est-à-dire, celle des États membres ayant adopté l’euro en tant que monnaie. En ce qui concerne les États membres qui n’ont pas adopté l’euro en tant que monnaie, les traités se réfèrent systématiquement aux monnaies de ceux-ci. Les traités ne désignent nulle part l’euro ou les monnaies des États membres comme des monnaies «fiat». Par ailleurs, les billets et pièces en euros émis par la BCE et les BCN sont ceux ayant cours légal. Ces billets et pièces sont libellés en euros et, en tant que tels, sont les valeurs unitaires de la monnaie unique. En conséquence, il n’est pas opportun de faire référence, dans un texte juridique de l’Union, à des «monnaies fiat ayant cours légal». Le règlement proposé devrait plutôt faire référence à des «monnaies officielles», dont les monnaies ayant cours légal sont des expressions (16).

2.1.6.

En outre, le règlement proposé contient des dispositions relatives aux dispositifs de conservation à mettre en place par les prestataires de services sur crypto-actifs (17). En particulier, il est prévu que les fonds des clients soient rapidement placés auprès d’une banque centrale ou d’un établissement de crédit. La BCE accueille favorablement les dispositions relatives à la conservation. Cependant, l’accès, pour les établissements de crédit, aux comptes des banques centrales dans le cadre des opérations de politique monétaire de l’Eurosystème ou pour le règlement des opérations par les systèmes exogènes dans le cadre des opérations de TARGET2, repose sur les critères et conditions d’éligibilité fixés dans les orientations applicables de la BCE (18). Par conséquent, les prestataires de services sur crypto-actifs doivent, soit être des contreparties éligibles de l’Eurosystème, soit opérer par l’intermédiaire d’une banque correspondante disposant d’un compte auprès de la banque centrale de l’Eurosystème concernée. Des dispositifs similaires peuvent s’appliquer dans d’autres banques centrales du SEBC. Compte tenu de ce qui précède, il convient que le règlement proposé fasse référence aux dispositifs de conservation avec une banque centrale en précisant que de tels dispositifs seraient uniquement mis en place dans les cas où les critères d’éligibilité et les conditions d’ouverture d’un compte seraient remplis.

2.2.   Aspects relatifs au système de paiement

2.2.1.

En lien étroit avec les missions fondamentales de politique monétaire de l’Eurosystème, le traité et les statuts du SEBC prévoient que l’Eurosystème assure la surveillance des systèmes de compensation et de paiements dans le cadre de son mandat. Conformément à l’article 127, paragraphe 2, quatrième tiret, du traité, qui se retrouve à l’article 3, paragraphe 1, des statuts du SEBC, l’une des missions fondamentales du SEBC consiste à promouvoir le bon fonctionnement des systèmes de paiement. Dans l’exécution de cette mission fondamentale, «[l]a BCE et les banques centrales nationales peuvent accorder des facilités, et la BCE peut arrêter des règlements, en vue d’assurer l’efficacité et la solidité des systèmes de compensation et de paiements au sein de l’Union et avec les pays tiers.» (19) En vertu de son rôle de surveillance, la BCE a adopté le règlement (UE) n° 795/2014 de la Banque centrale européenne (BCE/2014/28) (ci-après le «règlement SIPS») (20). Le règlement SIPS met en œuvre les Principes pour les infrastructures de marchés financiers publiés par le Comité sur les systèmes de paiement et de règlement (CSPR) et l’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV) (21) (ci-après les «principes du CSPR-OICV»), qui sont juridiquement contraignants et couvrent à la fois les systèmes de paiement de montant élevé et les systèmes de paiement de faible montant, d’importance systémique, gérés soit par une banque centrale de l’Eurosystème, soit par une entité privée. Le cadre de surveillance de l’Eurosystème (22) mentionne les instruments de paiement comme «faisant partie intégrante des systèmes de paiement» et les inclut donc dans le champ de sa surveillance. Le cadre de surveillance des instruments de paiement est en cours de révision (23). Selon ce cadre, un instrument de paiement (par exemple, une carte, un virement, un prélèvement, un virement électronique ou un jeton de paiement numérique (24)) est défini comme un dispositif (ou un ensemble de dispositifs) personnalisé(s) et/ou un ensemble de procédures convenu entre l’utilisateur de services de paiement et le prestataire de services de paiement qui est utilisé pour initier un transfert de valeur (25). À ce jour, le rôle de principale autorité de surveillance assigné à l’Eurosystème dépend de l’ancrage national du dispositif de paiement et du lieu de constitution de son autorité de gouvernance. Pour les dispositifs paneuropéens de virements et de prélèvements au sein de l’espace unique de paiements en euros (Single Euro Payments Area – SEPA), ainsi que certains dispositifs internationaux de paiement par carte, la BCE est le principal acteur de la surveillance. Les prestataires de services de paiement, y compris les établissements de crédit, les établissements de paiement et les institutions de monnaie électronique, sont également soumis à la directive DSP2. Les cadres de surveillance de l’Eurosystème complètent la surveillance microprudentielle des prestataires de services de paiement, y compris les établissements de crédit, les établissements de paiement et les institutions de monnaie électronique, et comportent des aspects pertinents s’agissant d’un système de paiement, d’un schéma de paiement ou d’un dispositif de paiement.

2.2.2.

À la lumière de ce qui précède, la fonction des dispositifs de jetons se référant à des actifs et de jetons de monnaie électronique qui sert à l’exécution d’ordres de transfert peut être considérée comme équivalente à celle d’un «système de paiement» aux fins de la surveillance de l’Eurosystème. Les dispositifs de jetons se référant à des actifs et de jetons de monnaie électronique peuvent être considérés comme équivalents à ceux d’un «système de paiement» lorsqu’ils comportent tous les éléments caractéristiques d’un système de paiement, à savoir : a) un accord formel ; b) au moins trois participants directs (sans compter les éventuelles banques de règlement, contreparties centrales, chambres de compensation ou participants indirects) ; c) des processus et procédures, selon les règles du système, communs à toutes les catégories de participants ; d) l’exécution des ordres de transfert a lieu au sein du système et comprend l’initiation d’un règlement et/ou l’exécution d’une obligation (compensation par exemple), et a donc un effet juridique sur les obligations des participants ; et e) les ordres de transfert sont exécutés entre les participants. Plus précisément, le règlement SIPS définit un système de paiement comme «un accord formel convenu entre trois participants ou davantage, [...] comportant des règles communes ainsi que des procédures normalisées pour l’exécution des ordres de transfert entre les participants» (26). Dans le cadre de cette définition, les ordres de transfert et les participants sont définis dans des termes généraux qui permettent d’englober, respectivement, «toute instruction qui entraîne la prise en charge ou l’exécution d’une obligation de paiement» au sens de la directive n° 98/26/CE du Parlement européen et du Conseil (27) et toute «entité qui est identifiée ou reconnue par un système de paiement et qui, soit directement, soit indirectement, est autorisée à envoyer des ordres de transfert à ce système et en mesure de recevoir des ordres de transfert de ce système» (28). Dans la mesure où les dispositifs de jetons se référant à des actifs et de jetons de monnaie électronique constituent des «systèmes de paiement», le cadre de surveillance des systèmes de paiement de l’Eurosystème fondé sur les principes du CSPR-OICV leur serait applicable.

2.2.3.

De même, la fonction des dispositifs de jetons se référant à des actifs et de jetons de monnaie électronique fixant des règles normalisées et communes pour l’exécution des opérations de paiement entre utilisateurs finaux pourrait être considérée comme un «schéma de paiement». Du point de vue de la surveillance, lorsque des jetons se référant à des actifs et des jetons de monnaie électronique incluent l’euro dans leurs actifs de réserve ou sont libellés en euros, le prestataire de services sur crypto-actifs chargé du fonctionnement global du schéma de paiement pourrait relever du cadre de surveillance révisé et consolidé de l’Eurosystème pour les instruments et dispositifs de paiement. Ce cadre serait applicable à tout instrument de paiement électronique permettant aux utilisateurs finaux d’envoyer et de recevoir de la valeur, et s’appliquerait donc indépendamment du fait que les actifs soient considérés comme des fonds en vertu de la DSP2 (29).

2.2.4.

Le rôle de surveillance du SEBC serait également crucial pour les dispositifs de jetons se référant à des actifs et revêtant une importance significative ainsi que les dispositifs de jetons de monnaie électronique d’importance significative, compte tenu de leurs effets potentiellement négatifs sur la capacité de la banque centrale d’émission à mettre en œuvre ses objectifs de politique monétaire, comme indiqué précédemment. Pour les raisons susmentionnées, les compétences du SEBC en vertu du traité et celles de l’Eurosystème en vertu du règlement SIPS devraient être bien précisées dans les considérants et dans le corps du règlement proposé. En outre, la BCE et, le cas échéant, les BCN concernées dont la monnaie n’est pas l’euro, devraient participer au processus de classement des jetons se référant à des actifs et revêtant une importance significative ainsi que des jetons de monnaie électronique d’importance significative, et la BCE devrait être consultée au sujet de l’acte délégué qui donnerait davantage de précisions sur les critères à appliquer pour ce classement. En outre, le règlement proposé devrait accorder plus d’importance à l’interaction potentielle avec la DSP2 qui, en l’état actuel du texte, semble plutôt limitée (30). Il pourrait y avoir une interaction entre le règlement proposé et la DSP2, par exemple, lorsqu’un prestataire de services conclut un contrat avec un bénéficiaire pour accepter d’autres crypto-actifs que des jetons de monnaie électronique. Dans ce cas, il conviendrait de préciser si de tels prestataires doivent remplir les mêmes exigences, en matière de protection des consommateurs, de sécurité et de résilience opérationnelle, que les prestataires de services de paiement réglementés. En définitive, il conviendrait de préciser si ces activités peuvent équivaloir à une «acquisition d’opérations de paiement», telle que définie dans la DSP2 (31).

3.   Observations spécifiques sur les aspects liés à la stabilité financière et à la surveillance prudentielle

3.1.   Aspects liés à la stabilité financière

3.1.1.

Dispositifs de surveillance pour les émetteurs de jetons de monnaie électronique d’importance significative

3.1.2.

Le règlement proposé instaure un dispositif de double surveillance pour les émetteurs de jetons de monnaie électronique d’importance significative, supervisé conjointement par l’autorité nationale compétente (ANC) responsable et l’ABE. En vertu de ce dispositif, l’ABE serait exclusivement chargée de veiller au respect des exigences spécifiques (32) par les émetteurs de jetons de monnaie électronique d’importance significative, tandis que l’ANC concernée surveillerait le respect de toutes les autres exigences énoncées dans le règlement proposé.

3.1.3.

Cette double surveillance souffre de lacunes importantes, et tant les jetons de monnaie électronique d’importance significative que les jetons se référant à des actifs et revêtant une importance significative seraient mieux surveillés au niveau européen. Aucune raison économique ne semble justifier des dispositifs de surveillance différents entre les jetons se référant à des actifs et revêtant une importance significative (soumis à une surveillance harmonisée par l’ABE) et les jetons de monnaie électronique d’importance significative (soumis à une double surveillance, à la fois par l’ABE et par l’ANC). La double surveillance risque de brouiller les responsabilités et de complexifier les dispositifs. Elle risque également de conduire à des missions de surveillance redondantes, voire contradictoires, par exemple dans les cas où les ANC surveillent des émetteurs de jetons se référant à des actifs et revêtant une importance significative ou de jetons de monnaie électronique d’importance significative, qui fournissent d’autres services sur crypto-actifs. La BCE estime que les jetons se référant à des actifs revêtant une importance significative et les jetons de monnaie électronique d’importance significative seraient mieux surveillés au niveau européen, car cela permettrait d’avoir une vision complète des risques et de coordonner les mesures de surveillance, tout en évitant l’arbitrage réglementaire.

3.1.4.

Le dispositif de double surveillance proposé serait mis en œuvre en plus des cadres de surveillance existants. En particulier, lorsque l’émetteur de jetons de monnaie électronique d’importance significative est un établissement de crédit, une double surveillance entraînerait des complications supplémentaires étant donné que cet émetteur pourrait être un établissement de crédit important surveillé par la BCE en vertu du règlement (UE) n° 1024/2013 du Conseil (33) (ci-après le «règlement MSU»). Le règlement proposé soumettrait l’émetteur à trois autorités de surveillance différentes : I) l’ANC concernée, ii) l’ABE et iii) la BCE. À cet égard, l’expérience et la compétence de l’ANC en matière de surveillance des émetteurs et prestataires de services de jetons de monnaie électronique pourraient être utilement mises à profit dans le cadre de leur participation à l’organe de décision de l’ABE et par l’intermédiaire des équipes de surveillance prudentielle conjointe dans le cas des établissements de crédit importants, ainsi que dans le collège d’autorités de surveillance qui doit être mis en place pour chaque jeton de monnaie électronique d’importance significative (34).

3.1.5.

Enfin, lorsque l’émetteur de «jetons de valeur stable» («stablecoins») d’importance significative est un établissement de crédit important, les responsabilités et missions de surveillance de l’ABE et de la BCE devraient également être clarifiées afin d’éviter d’éventuels doubles emplois et conflits. Plus précisément, l’obligation de l’ABE d’assurer le respect, par l’émetteur, des exigences définies dans le règlement proposé ne devrait pas empiéter sur la surveillance des exigences prudentielles dont la BCE assure l’application dans le cadre de sa mission de surveillance bancaire.

3.2.   Exigences de fonds propres et investissement des actifs de réserve

3.2.1.

La mise en place d’exigences prudentielles pour les émetteurs de jetons se référant à des actifs et de jetons de monnaie électronique est accueillie favorablement étant donné que, pour les raisons évoquées plus haut dans le présent avis, ces jetons pourraient présenter des risques pour la conduite de la politique monétaire et le bon fonctionnement des systèmes de paiement. Les garanties proposées pour veiller à la sécurité des actifs de réserve des jetons, au cas où l’émetteur déciderait d’investir une partie de la réserve, sont également les bienvenues.

3.2.2.

Les exigences prudentielles et de liquidité imposées aux émetteurs de «stablecoins» devraient être proportionnées aux risques que ces jetons pourraient présenter pour la stabilité financière. La BCE se félicite donc des exigences supplémentaires prévues dans le règlement proposé pour les émetteurs de «stablecoins» d’importance significative. Cela étant, il se peut que ces exigences supplémentaires ne soient pas suffisantes pour faire face à un accroissement des risques si les «stablecoins» venaient à être largement utilisés comme moyen de paiement ou comme réserve de valeur dans plusieurs pays de l’Union. En outre, les émetteurs de «stablecoins» qui ne sont pas des établissements de crédit n’auraient pas accès à la fonction de prêteur en dernier ressort des banques centrales. À la lumière de ce qui précède, la BCE souhaite formuler les observations ci-après.

3.2.3.

Premièrement, le règlement proposé permet à l’ANC de procéder à un ajustement à la hausse ou à la baisse, allant jusqu’à 20 %, de l’exigence de fonds propres de 2 % du montant moyen des actifs de réserve pour les émetteurs de «stablecoins» (d’importance moins significative). Dans le cas des émetteurs d’importance significative, aucun ajustement de l’exigence de 3 % n’est autorisé pour l’autorité de surveillance. Des pouvoirs supplémentaires au titre du deuxième pilier devraient être accordés à l’autorité de surveillance, en particulier pour les émetteurs d’importance significative, compte tenu des risques plus élevés qu’ils présentent pour la stabilité financière. En particulier, les émetteurs de «stablecoins» d’importance significative devraient être tenus de procéder régulièrement à des tests de résistance tenant compte de scénarios de crise grave, mais plausible, de types financier (par exemple chocs sur les taux d’intérêt) et non financier (par exemple risque opérationnel). Dans le cas où un émetteur de tels jetons propose au moins deux catégories de jetons se référant à des crypto-actifs et/ou fournit des services sur crypto-actifs, les tests de résistance devraient couvrir l’ensemble de ces services et activités de manière globale et complète afin de prendre en compte la combinaison des différents risques sous-jacents découlant de leur structure complexe. Compte tenu des résultats de ces tests de résistance, il conviendrait que l’autorité de surveillance ait le pouvoir d’imposer des exigences de fonds propres supplémentaires, en plus de l’exigence de 3 %, qui soient proportionnées aux risques constatés. Des exigences et des pouvoirs similaires, en matière de tests de résistance, pourraient être instaurés au profit des autorités de surveillance envers les émetteurs d’importance moins significative, ce qui permettrait à ces autorités d’aller, en principe, au-delà du complément de 20 % de l’exigence de 2 % dans certains cas, en fonction des perspectives en matière de risques et des résultats des tests de résistance.

3.2.4.

Deuxièmement, les émetteurs de jetons se référant à des actifs et de jetons de monnaie électronique peuvent être tout autant exposés au risque de «retraits massifs», entraînant d’éventuels risques de contagion au reste du système financier et des risques associés pour la stabilité financière. Il importe donc que ces émetteurs soient soumis à des exigences harmonisées concernant l’investissement des actifs de réserve, afin de garantir des conditions de concurrence équitables et de respecter le principe «même activité, mêmes risques, mêmes règles» entre les jetons se référant à des actifs et les jetons de monnaie électronique. Des exigences rigoureuses en matière de liquidité pour les émetteurs de «stablecoins», en particulier les émetteurs d’importance significative, sont également essentielles pour leur permettre de résister aux tensions de liquidité et réduire au minimum les risques pour la stabilité financière. En l’espèce, les dispositifs de «stablecoins» et leurs actifs de réserve présentent des similitudes avec les fonds monétaires. À cet égard, le règlement (UE) 2017/1131 du Parlement européen et du Conseil (35) exige des fonds monétaires qu’ils détiennent d’importantes réserves de liquidité en cas de chocs liés à des rachats massifs. Les émetteurs de «stablecoins» devraient respecter des exigences de liquidité au moins aussi prudentes que celles imposées aux fonds monétaires à valeur liquidative constante, à développer dans des normes techniques de réglementation. Ces exigences prudentes en matière d’investissement, à développer dans les normes techniques de réglementation, pourraient accroître la capacité des actifs de réserve des «stablecoins» à résister à des scénarios graves de demandes de rachats. En outre, les émetteurs de «stablecoins» d’importance significative devraient être tenus de procéder régulièrement à des tests de résistance de la liquidité et, en fonction des résultats de ces tests, l’autorité de surveillance devrait avoir le pouvoir de renforcer les exigences relatives au risque de liquidité.

3.2.5.

Enfin, le règlement proposé n’impose aucune restriction pour empêcher une éventuelle concentration des dépositaires ou de l’investissement des actifs de réserve. L’absence de limites à une éventuelle concentration pourrait compromettre la sécurité des actifs de réserve et exposer ceux-ci aux risques idiosyncrasiques de certains dépositaires et émetteurs de dette. Le règlement proposé devrait prévoir l’introduction de garanties visant à empêcher une telle concentration, à développer dans des normes techniques de réglementation.

3.3.   Aspects liés à la surveillance prudentielle

3.3.1.

La BCE et l’ANC concernée sont les autorités compétentes qui exercent des pouvoirs de surveillance prudentielle en vertu du règlement (UE) n° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil (également appelé «CRR») (36) et de la directive n° 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil (également appelée «CRD») (37), lesquels constituent ensemble le «cadre CRR/CRD». En outre, le règlement MSU confie à la BCE des missions spécifiques en matière de surveillance prudentielle des établissements de crédit au sein de la zone euro et la charge également de veiller au fonctionnement efficace et cohérent du mécanisme de surveillance unique (MSU), au sein duquel des responsabilités spécifiques de surveillance prudentielle sont réparties entre la BCE et les ANC participantes. En particulier, la BCE a pour mission d’accorder et de retirer les agréments de tous les établissements de crédit (38). Pour les établissements de crédit importants, la BCE a également pour mission, entre autres, de veiller au respect des dispositions pertinentes du droit de l’Union imposant des exigences prudentielles aux établissements de crédit, y compris l’obligation de disposer de dispositifs solides en matière de gouvernance, tels que des processus de gestion des risques et mécanismes de contrôle interne fiables (39). À cette fin, la BCE dispose de tous les pouvoirs de surveillance, pour intervenir dans l’activité des établissements de crédit, qui sont nécessaires à l’exercice de ses fonctions.

3.3.2.

En vertu du règlement proposé, les États membres sont tenus de désigner les ANC chargées d’exercer les fonctions et missions prévues par le règlement proposé (40). En outre, le règlement proposé renvoie, d’une manière générale, à la nécessité pour les ANC de se coordonner avec les autorités chargées de la surveillance ou de la supervision des activités autres que celles exercées par les émetteurs et fournisseurs de crypto-actifs en vertu du règlement proposé (41). En fait, les pouvoirs de surveillance conférés aux ANC en vertu du règlement proposé (42) peuvent également avoir des implications prudentielles pour les établissements de crédit, par exemple en cas de demande de divulgation d’informations supplémentaires ou de demande de gel ou de mise sous séquestre d’actifs. Dans de tels cas, l’appel à la collaboration avec d’autres autorités peut ne pas suffire (43).

3.3.3.

Compte tenu de ce qui précède, il est de la plus haute importance d’instituer un mécanisme de coordination clair, comprenant des processus et calendriers bien définis pour les questions de notification, entre les ANC concernées et la BCE en tant qu’autorité de surveillance prudentielle des établissements de crédit importants lorsqu’ils ont l’intention d’émettre des crypto-actifs et/ou de fournir des services liés à des crypto-actifs. Un mécanisme de coordination clair permettrait que les compétences respectives des ANC et de la BCE soient exercées en temps utile, de manière efficace et cohérente. Il garantirait également le respect du règlement proposé par les émetteurs et fournisseurs de crypto-actifs. Il convient que le règlement proposé fasse référence à une obligation, pour les ANC, de notifier la BCE lorsqu’un établissement de crédit important publie un livre blanc, a l’intention de fournir l’un des services sur crypto-actifs ou enfreint le règlement proposé.

3.3.4.

En outre, lorsque des établissements de crédit importants émettent des jetons se référant à des actifs et revêtant une importance significative ainsi que des jetons de monnaie électronique d’importance significative, le dispositif de double surveillance entre l’ANC concernée et l’ABE serait applicable. À cet égard, il est nécessaire d’expliquer plus en détail ce que la surveillance de l’ABE entraînerait en pratique. Par ailleurs, ce dispositif de double surveillance devrait également tenir compte du rôle de surveillance de la BCE vis-à-vis des établissements de crédit importants, en prévoyant des mécanismes de coordination plus clairs, y compris un cadre de notification clair, et inclure la BCE, en tant qu’autorité de surveillance prudentielle, au sein du collège. Enfin, le règlement proposé devrait faire référence de manière explicite et cohérente aux autorités de surveillance prudentielle, tant pour les jetons se référant à des actifs et revêtant une importance significative que pour les jetons de monnaie électronique d’importance significative (44).

Lorsque la BCE recommande de modifier le règlement proposé, des suggestions de rédaction particulières, accompagnées d’une explication, figurent dans un document de travail technique séparé. Le document de travail technique est disponible en anglais sur le site internet EUR-LEX.

Fait à Francfort-sur-le-Main, le 19 février 2021.

La présidente de la BCE

Christine LAGARDE


(1)  COM(2020) 593 final.

(2)  L’ensemble de mesures sur la finance numérique comprend une stratégie en matière de finance numérique ainsi que des propositions législatives, qui visent à garantir l’existence d’un secteur financier compétitif dans l’Union, permettant aux consommateurs d’accéder à des produits financiers innovants tout en garantissant la protection des consommateurs et la stabilité financière.

(3)  Voir article 3, paragraphe 1, point 3, du règlement proposé.

(4)  Voir article 3, paragraphe 1, point 4, du règlement proposé.

(5)  Voir le considérant 9 du règlement proposé.

(6)  Directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers et modifiant la directive 2002/92/CE et la directive 2011/61/UE (JO L 173 du 12.6.2014, p. 349).

(7)  Voir l’article 2, paragraphe 3, point a), du règlement proposé.

(8)  Voir le considérant 7 du règlement proposé.

(9)  Voir, respectivement, l’article 43, paragraphe 1, et l’article 112, paragraphe 5, du règlement proposé.

(10)  Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués (COM/2020/594 final). Voir les considérants 16 et 24 ainsi que l’article 4, paragraphe 3, et l’article 5, paragraphe 5.

(11)  Plus précisément, à l’article 4, paragraphe 3, de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués, il est fait référence à de la «monnaie de banque centrale», à de la «monnaie de banque commerciale», à de la «monnaie de banque commerciale sous une forme tokenisée» et à des «jetons de monnaie électronique».

(12)  La définition du terme «crypto-actif» dans le règlement proposé est à la fois axée sur la technologie et large. Cette approche s’écarte d’une caractérisation des crypto-actifs qui soit neutre sur le plan technologique et précise. Voir le document spécial n° 223/2019 des services de la BCE intitulé «Crypto-Assets : Implications for financial stability, monetary policy, and payments and market infrastructures» (soit «Crypto-actifs : répercussions sur la stabilité financière, la politique monétaire, les paiements et les infrastructures» de marché) disponible en anglais sur le site internet de la BCE à l’adresse suivante : www.ecb.europa.eu.

(13)  Voir les articles 36 et 45 du règlement proposé.

(14)  Voir article 19, paragraphe 2, point c), du règlement proposé.

(15)  Directive 2009/110/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 concernant l’accès à l’activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces établissements, modifiant les directives 2005/60/CE et 2006/48/CE et abrogeant la directive 2000/46/CE (JO L 267 du 10.10.2009, p. 7).

(16)  Voir le préambule et l’article 3, paragraphe 4 du traité sur l’Union européenne ; l’article 119, paragraphe 2, l’article 140, paragraphe 3, et l’article 282, paragraphe 4, du traité ; et les articles 2, 10 et 11 du règlement (CE) n° 974/98 du Conseil du 3 mai 1998 concernant l’introduction de l’euro (JO L 139 du 11.5.1998, p. 1). Voir également la définition de «monnaie» à l’article 2, point a), de la directive 2014/62/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 relative à la protection pénale de l’euro et des autres monnaies contre la contrefaçon, et remplaçant la décision-cadre 2000/383/JAI du Conseil (JO L 151 du 21.5.2014, p. 1).

(17)  Voir l’article 63, paragraphe 3, du règlement proposé.

(18)  Orientation (UE) 2015/510 de la Banque centrale européenne du 19 décembre 2014 concernant la mise en œuvre du cadre de politique monétaire de l’Eurosystème (BCE/2014/60) (JO L 91 du 2.4.2015, p. 3) ; et orientation de la Banque centrale européenne du 5 décembre 2012 relative au système de transferts express automatisés transeuropéens à règlement brut en temps réel (TARGET2) (BCE/2012/27) (JO L 30 du 30.1.2013 p. 1).

(19)  Voir l’article 22 des statuts du SEBC.

(20)  Règlement (UE) n° 795/2014 de la Banque centrale européenne du 3 juillet 2014 concernant les exigences de surveillance applicables aux systèmes de paiement d’importance systémique (BCE/2014/28) (JO L 217 du 23.7.2014, p. 16).

(21)  Disponibles sur le site internet de la Banque des règlements internationaux à l’adresse suivante : www.bis.org.

(22)  Cadre de surveillance de l’Eurosystème, version révisée (juillet 2016), disponible sur le site internet de la BCE à l’adresse suivante : www.ecb.europa.eu.

(23)  Voir le cadre de surveillance de l’Eurosystème révisé et consolidé pour les instruments, systèmes et dispositifs de paiement électronique (cadre PISA), disponible sur le site internet de la BCE à l’adresse suivante : www.ecb.europa.eu.

(24)  Un jeton de paiement numérique est une représentation numérique de valeur adossée à des créances ou des actifs enregistrés ailleurs et permettant un transfert de valeur entre utilisateurs finaux. Selon la conception qui les sous-tend, les jetons de paiement numériques peuvent prévoir un transfert de valeur sans faire nécessairement intervenir un tiers central et/ou utiliser des comptes de paiement.

(25)  L’acte, initié par le payeur (ou pour son compte) ou par le bénéficiaire, consistant à transférer des fonds ou des jetons de paiement numériques, ou à placer ou retirer des espèces sur/depuis un compte d’utilisateur, indépendamment de toute obligation sous-jacente entre le payeur et le bénéficiaire. Le transfert peut concerner un ou plusieurs prestataires de services de paiement. La définition du terme «transfert de valeur» conformément au cadre PISA s’écarte de ce qui est défini comme un transfert de «fonds» au sens de la directive (UE) 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, modifiant les directives 2002/65/CE, 2009/110/CE et 2013/36/UE et le règlement (UE) n° 1093/2010, et abrogeant la directive 2007/64/CE (JO L 337 du 23.12.2015, p. 35) (ci-après la «DSP2»). Un «transfert de valeur» dans le contexte d’un «instrument de paiement» tel que défini dans la DSP2 ne peut se référer qu’à un transfert de «fonds». En vertu de la DSP2, les «fonds» n’incluent pas les jetons de paiement numériques, à moins qu’ils ne puissent être classés dans la monnaie électronique (ou, moins vraisemblablement, dans la monnaie scripturale).

(26)  Voir l’article 2, paragraphe 1, du règlement SIPS.

(27)  Directive 98/26/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres (JO L 166 du 11.6.1998, p. 45). Voir l’article 2, point i), premier tiret, où «ordre de transfert» est défini comme suit : «toute instruction donnée par un participant de mettre à la disposition d’un destinataire une somme d’argent par le biais d’une inscription dans les livres d’un établissement de crédit, d’une banque centrale, d’une contrepartie centrale ou d’un organe de règlement, ou toute instruction qui entraîne la prise en charge ou l’exécution d’une obligation de paiement telle que définie par les règles de fonctionnement du système [...]».

(28)  Voir l’article 2, paragraphe 18, du règlement SIPS.

(29)  Voir le cadre de surveillance de l’Eurosystème pour les instruments, systèmes et dispositifs de paiement électronique (octobre 2020), disponible sur le site internet de la BCE à l’adresse suivante : www.ecb.europa.eu

(30)  Voir l’article 63, paragraphe 4, du règlement proposé.

(31)  Voir l’article 4, paragraphe 44, de la DSP2.

(32)  Voir l’article 52 du règlement proposé.

(33)  Règlement (UE) n° 1024/2013 du Conseil du 15 octobre 2013 confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de surveillance prudentielle des établissements de crédit (JO L 287 du 29.10.2013, p. 63).

(34)  Voir l’article 101, paragraphe 1, du règlement proposé.

(35)  Règlement (UE) 2017/1131 du Parlement et du Conseil du 14 juin 2017 sur les fonds monétaires (JO L 169 du 30.6.2017, p. 8).

(36)  Règlement (UE) n° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 (JO L 176 du 27.6.2013, p. 1).

(37)  Directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’’investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE (JO L 176 du 27.6.2013, p. 338).

(38)  Voir l’article 4, paragraphe 1, point a), l’article 6, paragraphe 4, et l’article 14, du règlement MSU.

(39)  Voir l’article 4, paragraphe 1, point e), et l’article 6, paragraphe 4, du règlement MSU.

(40)  Voir l’article 81 du règlement proposé.

(41)  Voir les articles 85 et 110 du règlement proposé.

(42)  Voir l’article 82 du règlement proposé.

(43)  Voir l’article 82, paragraphe 4, point b), du règlement proposé.

(44)  Voir l’article 99, paragraphe 2, point i), et l’article 101, paragraphe 2, point b), du règlement proposé.


Top