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Document 52017AE1866

Avis du Comité économique et social européen sur les «Rôle et perspectives des partenaires sociaux et autres organisations de la société civile dans le contexte des nouvelles formes de travail» (avis exploratoire à la demande de la présidence estonienne)

OJ C 434, 15.12.2017, p. 30–35 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

15.12.2017   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 434/30


Avis du Comité économique et social européen sur les «Rôle et perspectives des partenaires sociaux et autres organisations de la société civile dans le contexte des nouvelles formes de travail»

(avis exploratoire à la demande de la présidence estonienne)

(2017/C 434/05)

Rapporteure:

Franca SALIS-MADINIER

Corapporteure:

Jukka AHTELA

Consultation

Présidence estonienne du Conseil, 17 mars 2017

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

 

 

Compétence

Section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

Adoption en section spécialisée

19 juillet 2017

Adoption en session plénière

20 septembre 2017

Session plénière no

528

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

185/2/3

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) estime plus nécessaire que jamais de reconnaître le rôle du dialogue social et de la négociation collective à tous les niveaux et de le renforcer en cette période de grandes mutations numériques, écologiques et démographiques, qui engendrent de profonds changements pour les travailleurs, les employeurs et leurs relations en tant que partenaires sociaux.

1.2.

Le CESE considère que les transformations en cours sont d’une telle ampleur qu’elles appellent une réflexion collective, large et inclusive. La méthode repose sur un dialogue social à tous les niveaux et sur la participation de toutes les parties prenantes pour chercher continuellement de nouvelles réponses pertinentes, faire des propositions et inventer le monde de demain.

1.3.

Les acteurs que sont les partenaires sociaux doivent être lucides concernant l’accélération et l’ampleur des bouleversements, déterminés à en limiter les effets néfastes, et persuadés que l’économie du partage peut engendrer des évolutions positives et des opportunités à saisir.

1.4.

Le CESE est convaincu que les objectifs et les principes fondamentaux du dialogue social demeurent valables dans le nouveau monde du travail. Le dialogue social, qui inclut entre autres l’information, la consultation et la participation des travailleurs, doit se fonder sur la confiance réciproque et le respect des pratiques nationales.

1.5.

Le Comité a réaffirmé, dans nombre de ses avis, le rôle central du dialogue social dans les nouvelles formes du travail (1). Le dialogue social doit jouer un rôle de premier plan à tous les niveaux pertinents, et ce en respectant pleinement l’autonomie des partenaires sociaux.

1.6.

Le CESE considère que l’on ne saurait prévoir à ce jour l’ensemble des opportunités et des défis qu’engendrera l’économie numérique. Le rôle du dialogue social et sociétal n’est pas de s’opposer à ces transitions, mais de les orienter au mieux pour profiter de tous les bénéfices qu’elles peuvent représenter pour la croissance, pour la promotion des innovations et des compétences, pour des emplois de qualité, et pour le financement durable et solidaire des protections sociales.

1.7.

Comme l’a déjà affirmé le CESE, la représentation syndicale et la négociation collective pour les travailleurs des plateformes sont remises en question (2). Il convient dès lors de lever les obstacles à l’exercice des droits fondamentaux garantis par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et par les conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT) (3).

1.8.

Le numérique défie les méthodes traditionnelles de gestion et de direction, il appelle à une gestion participative et à l’établissement de règles du jeu collectives. Ce nouveau mode de gestion doit prévoir des lieux d’expression et une participation des salariés à la résolution des problèmes et au partage des pratiques pour renforcer les repères communs, les savoir-faire professionnels et optimiser les ressources humaines dans le processus d’innovation et de développement de l’entreprise.

1.9.

Dans le même temps, le CESE reconnaît que les nouvelles formes de travail, accompagnées d’une désintermédiation et de mutations rapides et incessantes, requièrent une adaptation des structures et des modalités du dialogue social.

1.10.

Le CESE recommande de respecter l’autonomie des partenaires sociaux qui, par le biais de la négociation collective, sont engagés à trouver des formes innovantes de dialogue social et des réponses adaptées aux besoins des employeurs ainsi que des travailleurs, tant dans les entreprises traditionnelles que dans l’économie numérique.

1.11.

Le CESE relate dans le présent avis quelques premières expériences, des réponses et des solutions innovantes, des pratiques syndicales et des résultats de négociations collectives qui répondent aux défis posés par ces mutations.

1.12.

Le CESE constate que la numérisation et ses effets sur le travail doivent être une priorité au niveau européen ainsi que pour tous les États membres et devenir un enjeu central du dialogue social. Le CESE recommande de:

suivre le développement, les tendances, les menaces et les opportunités de la numérisation et leur impact sur les relations industrielles, les conditions de travail et le dialogue social;

renforcer l’efficacité et la pertinence du dialogue social dans les évolutions du monde du travail, par des moyens appropriés tels que le partage d’informations, la réalisation d’études prospectives, la mutualisation des bonnes pratiques et un cadre juridique et non juridique approprié.

1.13.

Ces profondes transformations que connaît le monde du travail soulèvent également la question d’une coopération accrue entre les partenaires sociaux et les autres organisations de la société civile. Le CESE a déjà déclaré qu’il fallait faire une distinction claire entre dialogue social et dialogue civil, mais bien qu’ils ne puissent pas être fusionnés, ils ne devraient pas non plus être complètement séparés l’un de l’autre (4). D’ailleurs, parmi les initiatives citées par le présent avis figurent des concertations larges au niveau des gouvernements associant, aux débats plus généraux sur l’impact global du numérique, d’autres parties prenantes de la société civile.

2.   Introduction

2.1.

Comme en 1985, lorsque les partenaires sociaux et le dialogue social se sont vu conférer une légitimité et un rôle majeur dans la construction européenne, le CESE recommande, en cette période de grandes transformations, de renforcer le rôle des partenaires sociaux à tous les niveaux, tout en reconnaissant le rôle des représentants de la société civile.

2.2.

Les nouvelles formes de travail fragmenté et l’augmentation du nombre de travailleurs atypiques nécessitent l’implication de ces travailleurs par une information et une consultation accrues, ainsi que par une adaptation des droits collectifs et des dispositions en matière de temps de travail et des droits sociaux (5).

3.   La réalité du travail sur les plateformes

3.1.

Selon l’Eurobaromètre (6), 17 % des citoyens européens utilisent des plateformes numériques en tant que clients et travailleurs. Ils sont en majorité hautement qualifiés et urbains. Parmi ces citoyens, seulement 5 % de travailleurs offrent d’une manière régulière des services et du travail sur les plateformes et 18 % le font sporadiquement. Le travail sur les plateformes en tant qu’activité principale est donc encore marginal, mais il augmente. En revanche, les impacts du numérique et de l’intelligence artificielle sur le travail dans les entreprises traditionnelles sont bien plus importants et sans vouloir négliger le travail sur les plateformes, le dialogue social doit se concentrer sur ces évolutions qui modifient profondément la nature et l’organisation du travail.

3.2.

Le CESE demande qu’une enquête soit menée sur le statut contractuel des microtravailleurs et sur les autres nouvelles formes de relations d’emploi, ainsi que sur les obligations des intermédiaires, en vue des négociations sur les conditions de travail. Des clarifications sont nécessaires vis-à-vis de ces formes de travail et du régime fiscal et de sécurité sociale applicables.

3.3.

Le CESE recommande que la Commission européenne, l’Organisation de cooépration et de développement économiques (OCDE) et l’OIT collaborent avec les partenaires sociaux en vue de développer des dispositions appropriées en matière de conditions de travail décentes et de protection des travailleurs en ligne ainsi que des travailleurs soumis à d’autres nouvelles formes de relations du travail. Le CESE est d’avis qu’il serait bénéfique d’élaborer une approche au niveau de l’Union, tout en relevant que la plupart des actions devront être menées à l’échelon national sectoriel, ou sur le lieu de travail (7).

3.4.

Le CESE est particulièrement concerné par la remise en question de la représentation syndicale et du droit à la négociation collective des travailleurs du numérique. On pourrait ainsi appliquer des règles de concurrence aux travailleurs indépendants, qui sont en réalité dans une situation similaire à celle d’un salarié dépendant. Il convient dès lors d’examiner au cas par cas le statut des travailleurs concernés et, s’ils exercent une activité salariée, de lever les obstacles qui tendraient à exclure ces travailleurs de la négociation collective et de la représentation syndicale (8).

4.   Numérique et thèmes prioritaires pour les partenaires sociaux dans le dialogue social

4.1.

Le CESE estime que les questions relatives à l’emploi, aux transitions professionnelles, à la formation tout au long de la vie (9), notamment à la formation, aux protections sociales et à la pérennité de leur financement (10), aux conditions de travail et de rémunération, ainsi qu’à la sécurité du revenu figurent parmi les thèmes majeurs du dialogue social à l’ère de la numérisation.

5.   L’emploi et la formation professionnelle

5.1.

L’évolution qualitative et quantitative que connaîtra l’emploi suite à la transition numérique est difficile à appréhender, d’autant plus que les effets peuvent varier selon les secteurs et les métiers.

5.2.

Néanmoins, il incombe aux partenaires sociaux d’anticiper ces évolutions pour adapter les compétences des travailleurs aux nouvelles professions (11). La formation tout au long de la vie et l’adaptation de son contenu aux compétences numériques sont prioritaires. Dans certains États membres, il existe des droits minimaux à un congé de formation professionnelle rémunéré. Il y a lieu d’examiner si ces droits constituent, pour les travailleurs comme pour les employeurs, un instrument adéquat pour s’adapter aux besoins en matière de qualifications, et s’il est nécessaire d’envisager des mesures au niveau européen afin de généraliser ces expériences dans l’Union (12).

6.   La protection sociale

6.1.

Le fonctionnement des systèmes de sécurité sociale doit être réexaminé et adapté le cas échéant, car il a été élaboré pour des carrières salariales continues, qui sont de moins en moins la norme. En dix ans, le nombre d’européens qui travaillent à temps partiel a augmenté de 11 millions (ils sont aujourd’hui 44 millions) et le nombre de travailleurs ayant un contrat temporaire a augmenté de plus de 3 millions (22 millions au total) (13).

6.2.

Au niveau européen et national, des choix politiques en matière financière et fiscale doivent être faits pour assurer la pérennité de nos systèmes de protection sociale et ces sujets constituent une thématique pour le dialogue social.

7.   L’évolution juridique du lien de subordination

7.1.

Le CESE a estimé dans un avis (14) que la définition même du travail et la distinction structurante entre salariat et travail indépendant doivent évoluer juridiquement afin de ne pas laisser sans protection les travailleurs du numérique. Le CESE appelle à une clarification des statuts et des relations dans l’économie numérique afin d’assurer que tout travailleur bénéficie de droits et d’une protection sociale adéquats. Les partenaires sociaux ont un rôle essentiel à jouer pour veiller à ce que ce processus aboutisse à un résultat favorable, équitable et durable, et que toutes les zones d’ombre en matière de droits et de protection soient levées.

8.   Les impacts sur le travail

La numérisation a un impact profond tant sur les organisations existantes que sur les nouvelles entités. L’impact de la numérisation sur les méthodes de travail, comme l’augmentation rapide du travail à distance dans de nombreux secteurs, est un phénomène en forte croissance. D’après une étude récente d’Eurofound, dans l’ensemble de l’EU-28, environ 17 % des salariés en moyenne sont des télétravailleurs ou des travailleurs mobiles en technologies de l’information et de la communication (TIC) (15).

8.1.

L’augmentation du nombre de télétravailleurs et de travailleurs mobiles oblige les partenaires sociaux à trouver de nouvelles voies et des méthodes innovantes pour atteindre ces travailleurs qui ne sont plus physiquement présents dans les locaux des entreprises.

9.   Surveillance et contrôle du travail

9.1.

Si les TIC et la numérisation offrent des opportunités d’autonomie dans la gestion du temps et des lieux de travail pour certains travailleurs (car leur évaluation se base davantage sur le résultat que sur les heures de présence), pour d’autres, les technologies de l’information et de la communication imposent une surveillance et un contrôle accrus de leur travail.

9.2.

Les partenaires sociaux, par l’intermédiaire du dialogue social, doivent relever ces défis pour protéger les intérêts collectifs de tous ces travailleurs et garantir un travail de qualité.

10.   Les travailleurs hyperconnectés et les risques pour la santé

10.1.

Si l’utilisation de plus en plus intensive des TIC peut représenter, pour certains travailleurs, une opportunité d’autonomie et une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie privée, lorsqu’elle est mal maîtrisée, elle constitue également un risque pour la santé. L’augmentation du nombre de travailleurs souffrant de stress et de burn-out est une réalité préoccupante et coûteuse, à laquelle le dialogue social doit trouver des solutions. La Commission a avancé une proposition de directive sur l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et aidants dans le cadre du paquet de mesures accompagnant le socle européen des droits sociaux (16).

10.2.

Les TIC (17) peuvent aussi brouiller les frontières entre vie professionnelle et vie privée. Un dialogue large pour limiter la disponibilité permanente des travailleurs ainsi que leur formation à l’utilisation efficace des TIC sont des réponses nécessaires, tout comme de nouveaux droits, tel que celui à la déconnexion récemment reconnu en France.

11.   Participation des travailleurs aux instances de décision

11.1.

La tendance à une autonomie accrue qu’offre la numérisation à certains travailleurs représente un défi pour les entreprises, leurs instances, leur gouvernance, ainsi que pour les méthodes de gestion et les structures hiérarchiques traditionnelles des entreprises. Ces évolutions nécessitent davantage de formes de dialogue social, des informations, des consultations et une participation forte des travailleurs. Ceux-ci peuvent contribuer eux-mêmes à des pratiques innovantes et à des processus de développement bénéfiques à l’entreprise et à ses parties prenantes.

11.2.

Au vu de ce contexte, le CESE estime qu’une influence et une participation accrues des travailleurs dans les instances de décision sont nécessaires. La confiance des travailleurs et de leurs organisations syndicales et leur contribution, à tous les niveaux et instances pertinents, que ce soit au niveau local et/ou à celui des conseils de surveillance et d’administration, est capitale. Leur participation à l’anticipation des évolutions, à la gestion et aux décisions portant sur ces changements est essentielle pour aborder les effets des transformations numériques et créer un esprit et une culture tournés vers l’innovation. Selon un rapport d’Eurofound, la majorité des dirigeants d’entreprise est convaincue que la participation des salariés aux choix des entreprises constitue un avantage concurrentiel (18).

11.3.

Pour le CESE, il est nécessaire de prendre en compte des formes appropriées de consultation et d’information des travailleurs dans les nouvelles organisations de travail. Au niveau national comme dans les entreprises, les partenaires sociaux devraient trouver les solutions les plus adaptées pour garantir la participation de ces acteurs.

12.   Les premiers résultats du dialogue social portant sur le numérique dans les États membres: principes et bonnes pratiques

12.1.

Dans un certain nombre d’États membres, les gouvernements ont amorcé un dialogue sur les enjeux et les défis de la numérisation. Les syndicats, les employeurs, les chercheurs et les représentants de la société civile y ont été associés.

12.2.

Le CESE relate les initiatives prises dans un certain nombre de pays pour anticiper les nouvelles formes de travail. Ces initiatives associent partenaires sociaux et acteurs de la société civile, y compris les organisations de jeunesse et de lutte contre la pauvreté.

12.2.1.

L’Allemagne a été pionnière avec la publication, en 2015, du livre vert intitulé «Travail 4.0 — Réimaginer le travail», ouvrant la voie au dialogue avec les partenaires sociaux et d’autres parties prenantes sur la mise en œuvre du numérique.

12.2.2.

En France, un Conseil national du numérique a été créé et le rapport «Rapport Mettling» a été publié en 2015. Les syndicats, les employeurs et les citoyens ont été associés à l’élaboration de ce rapport qui comporte un certain nombre de recommandations que doivent appliquer les entreprises.

12.2.3.

De telles initiatives prises par les gouvernements et associant partenaires sociaux, monde académique et représentants de la société civile ont également été déployées en Autriche, en Finlande, en Suède, au Portugal, en Italie, en Espagne, en Hongrie et au Danemark.

Le CESE considère que les résultats de ce dialogue multi-parties prenantes doit être consolidé au niveau européen et que les besoins et problématiques exprimés doivent être pris en compte dans les initiatives européennes pour contribuer à harmoniser le cadre de référence.

13.   Partenaires sociaux et évolution des thèmes du dialogue social et des actions syndicales face au numérique

13.1.

Des expérimentations, que le CESE relate ci-après de manière non exhaustive, entreprises dans de nombreux États membres, montrent l’évolution des pratiques syndicales et l’acquisition de nouveaux droits grâce aux négociations collectives portant sur les nouvelles formes de travail.

13.2.

En France, deux nouveaux droits ont été reconnus: le premier, inscrit dans la loi «Travail» d’août 2016, est le droit à la déconnexion, qui répond aux risques d’un travail sans frontières et sans limites. Ce droit garantit aux travailleurs qui utilisent les TIC la possibilité de limiter la connexion permanente.

13.3.

Le dialogue social au niveau des entreprises traduit ce droit à la déconnexion par des accords collectifs d’entreprise ou de branche. Des accords de télétravail et de travail mobile ont aussi été négociés dans un certain nombre d’entreprises. Un accord sur le numérique, le premier en Europe, a aussi été signé en 2016 entre partenaires sociaux au sein d’un groupe de télécommunications. Il prévoit notamment la création d’un comité avec les partenaires sociaux chargé d’anticiper les nouvelles compétences dont auront besoin les salariés en raison des évolutions numériques.

13.4.

Le second nouveau droit obtenu en France est le compte personnel d’activité. L’ensemble des travailleurs (salariés, travailleurs indépendants ou «faux» indépendants ainsi que les travailleurs des plateformes) en bénéficient et peuvent cumuler, grâce à lui, le droit à la formation, à la prévoyance sociale, au chômage et à la retraite sur un seul compte transférable.

13.5.

En outre, des pratiques syndicales innovantes commencent à voir le jour: certains syndicats ont créé une plateforme pour les travailleurs indépendants, qui propose de nouveaux services tels qu’une assurance santé, des garanties de prévoyance et des services juridiques adaptés à leur activité.

13.6.

En Allemagne et en Suède, le syndicat allemand IG Metall et le syndicat suédois Unionen ont conclu, en juin 2016, un partenariat pour suivre et évaluer le travail sur les plateformes numériques en vue d’anticiper les changements provoqués par la nouvelle économie et de développer des outils numériques de communication syndicale, afin d’organiser les travailleurs indépendants et les travailleurs participatifs (crowd-workers). L’accès à la plateforme syndicale ainsi créée est transnational et s’adresse aux travailleurs par-delà les frontières nationales. En Allemagne, un accord de branche sur le travail mobile a également été conclu et prend en compte les nouvelles modalités de travail: télétravail, travail nomade, travail à domicile.

13.7.

En Italie, les syndicats ont négocié, dans certaines entreprises, des accords pour les travailleurs atypiques qui prévoient des garanties en matière de couverture prévoyance et maladie, qui étaient jusqu’au présent réservées aux travailleurs salariés classiques, ainsi qu’une assistance juridique adaptée.

13.8.

Au Danemark, dans de nombreux autres pays de l’Union européenne ainsi qu’aux États-Unis, les nouvelles formes de travail numérique ont été largement critiquées par les syndicats car elles échappent aux réglementations du travail en vigueur dans les secteurs traditionnels ainsi qu’aux impositions fiscales. La société de transport Uber, emblème du travail sur les plateformes, a été au cœur des débats sur l’économie numérique. L’enjeu était de faire reconnaître les chauffeurs d’Uber comme des travailleurs dépendants, et à ce titre, de contraindre Uber à les déclarer, à verser des cotisations patronales et à respecter les réglementations du travail (19). Les organisations syndicales ont notamment pour objectif de négocier, au nom des travailleurs des plateformes, des salaires minimaux, la transparence des critères qui gouvernent les algorithmes et déterminent leur notation et évaluation ainsi que des conditions de travail décentes (20).

13.9.

Aux Pays-Bas, des travailleurs en contrats flexibles ou «indépendants» ont également commencé à se syndiquer.

13.10.

Le dialogue social européen dans la métallurgie a abouti à une position commune signée par le syndicat Industriall et l’organisation des employeurs, la CEEMET, sur l’impact de la numérisation et les actions à mener (21).

13.11.

Au niveau européen, Business Europe, UNI Europa, le CEEP et l’UEAPME ont signé une déclaration commune sur les effets du numérique dans le monde du travail et ont pointé les défis majeurs qui attendent les responsables européens et les partenaires sociaux (22).

Bruxelles, le 20 septembre 2017.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  JO C 125 du 21.4.2017, p. 10; JO C 303 du 19.8.2016, p. 54, et JO C 13 du 15.1.2016, p. 161.

(2)  JO C 303 du 19.8.2016, p. 54.

(3)  Articles 12 et 28 de la charte, et conventions nos 87 et 98 de l’OIT; voir aussi plus loin, paragraphes 3.2 et suivants.

(4)  JO C 458 du 19.12.2014, p. 1.

(5)  Comme l’a reconnu Marianne Thyssen, lors de la conférence conjointe ETUI/CES organisée en juin 2016 sur le thème «Façonner le nouveau monde du travail».

(6)  Eurobaromètre Flash 438, 2016.

(7)  JO C 303 du 19.8.2016, p. 54.

(8)  JO C 303 du 19.8.2016, p. 54.

(9)  Avis du CESE sur les «Compétences/nouvelles formes de travail» (voir page 36 du présent Journal officiel).

(10)  Sur la nécessaire adaptation de la fiscalité et des cotisations du travail dans les plateformes pour financer la protection sociale, voir JO C 13 du 15.1.2016, p. 161.

(11)  Avis du CESE sur les «Compétences/nouvelles formes de travail» (voir page 36 du présent Journal officiel).

(12)  JO C 13 du 15.1.2016, p. 161.

(13)  Document de réflexion sur la dimension sociale de l’Europe, avril 2017.

(14)  JO C 75 du 10.3.2017, p. 33.

(15)  «Travailler en tout temps, en tout lieu: les effets sur le monde du travail», Eurofound, 2017.

(16)  Communication de la Commission européenne intitulée «Initiative visant à promouvoir l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et aidants qui travaillent», avril 2017.

(17)  Voir l’étude d’Eurofound «Travailler en tout temps, en tout lieu: les effets sur le monde du travail», 2017.

(18)  «Work organisation and employee involvement in Europe», 2013; voir également JO C 161 du 6.6.2013, p. 35.

(19)  En Angleterre, un jugement a condamné Uber dans l’affaire M. Y Aslam, M. J Farrar et autres contre Uber; Uber a fait appel.

(20)  «Les impacts sociaux de la digitalisation de l’économie», Christophe Degryse, Working Paper ETUI 2016.02; «ReformsWatch», service d’information en ligne d’ETUI, 2016; «Trade unions must organise people working through platforms», Gunhild Wallin, juin 2016 et «Digitalisation and working life: lessons from the Uber cases around Europe», Eurofound, janvier 2016.

(21)  «An Industriall Europe & CEEMET joint position», 8 décembre 2016.

(22)  Déclaration des partenaires sociaux européens sur la numérisation, signée au sommet social tripartite, le 16 mars 2016.


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