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Document 32020R0379

Règlement d’exécution (UE) 2020/379 de la Commission du 5 mars 2020 instituant un droit compensateur provisoire sur les importations de produits de fibre de verre à filament continu originaires d’Égypte

C/2020/1224

OJ L 69, 6.3.2020, p. 14–40 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

Legal status of the document In force

ELI: http://data.europa.eu/eli/reg_impl/2020/379/oj

6.3.2020   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

L 69/14


RÈGLEMENT D’EXÉCUTION (UE) 2020/379 DE LA COMMISSION

du 5 mars 2020

instituant un droit compensateur provisoire sur les importations de produits de fibre de verre à filament continu originaires d’Égypte

LA COMMISSION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

vu le règlement (UE) 2016/1037 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2016 relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de l’Union européenne (1) (ci-après le «règlement de base»), et notamment son article 12 et son article 24, paragraphe 1,

après consultation des États membres,

considérant ce qui suit:

1.   PROCÉDURE

1.1.   Ouverture

(1)

Le 7 juin 2019, la Commission européenne (ci-après la «Commission») a ouvert une enquête antisubventions concernant les importations dans l’Union européenne (ci-après l’«Union») de produits de fibre de verre à filament continu originaires d’Égypte (ou le «pays concerné») en vertu de l’article 10 du règlement de base. Elle a publié un avis d’ouverture au Journal officiel de l’Union européenne (2) (ci-après l’«avis d’ouverture»).

(2)

La Commission a ouvert l’enquête à la suite d’une plainte déposée le 24 avril 2019 par l’Association des producteurs de fibres de verre européens (ci-après le «plaignant» ou l’«APFE») au nom de producteurs représentant plus de 25 % de la production totale de l’Union. Des producteurs représentant 71 % de la production totale de produits de fibre de verre à filament continu dans l’Union ont soutenu la plainte.

(3)

Avant l’ouverture de l’enquête antisubventions, la Commission a avisé les pouvoirs publics égyptiens qu’elle avait été saisie d’une plainte dûment documentée et les a invités à engager des consultations conformément à l’article 10, paragraphe 7, du règlement de base. Les pouvoirs publics égyptiens ont rejeté l’invitation et n’ont pas engagé de consultations, mais ils ont présenté deux séries d’observations concernant l’ouverture de l’enquête, l’une avant la publication de l’avis d’ouverture et l’autre après.

(4)

Le 3 mai 2019, la Commission a ouvert une enquête antidumping distincte concernant les importations dans l’Union des mêmes produits de fibre de verre à filament continu originaires d’Égypte et de Bahreïn (3). Le 12 décembre 2019, la Commission a informé toutes les parties intéressées que l’enquête se poursuivrait sans institution de droits antidumping provisoires.

(5)

Avant l’ouverture de l’enquête, les pouvoirs publics égyptiens ont déclaré que la plainte ne contenait pas d’éléments de preuve suffisants de l’existence de subventions ou d’un préjudice pour justifier l’ouverture d’une procédure. Il a été répondu à leurs observations concernant l’existence de subventions dans la note relative au caractère suffisant des éléments de preuve, qui a été versée au dossier public, et à leurs observations concernant le préjudice dans les paragraphes qui suivent.

(6)

À la suite de l’ouverture, la Commission a reçu des observations complémentaires de la part des pouvoirs publics égyptiens, faisant à nouveau part de leurs remarques sur les subventions, mais formulant aussi des commentaires concernant les allégations relatives au préjudice causé par les importations en provenance d’Égypte exposées dans la plainte.

(7)

Les pouvoirs publics égyptiens ont d’abord analysé les données de la plainte relatives aux prix sur le marché de l’Union en 2017 et 2018, et ont noté que les prix de vente de l’Union européenne n’avaient pas diminué et que les prix des importations en provenance d’Égypte n’avaient baissé que de 2 %.

(8)

Toutefois, cette analyse de prix n’a comparé que deux années de la période considérée et elle n’a donc pas tenu compte de l’ensemble des données figurant dans la plainte, qui montre l’évolution complète des prix à l’importation et des prix de vente de l’Union européenne, faisant apparaître une baisse des prix à l’importation et une stagnation des prix de vente dans l’Union européenne.

(9)

La Commission renvoie également aux données figurant aux considérants 84 à 91 ci-dessous concernant l’évolution des prix et à ses conclusions sur la base de l’ensemble des données.

(10)

Les pouvoirs publics égyptiens ont analysé les indicateurs économiques exposés dans la plainte et ont conclu qu’ils n’indiquaient pas de préjudice important. Telle n’est pas l’analyse que fait la Commission des données fournies dans la plainte, qui démontre clairement l’existence d’un préjudice sur la base d’une forte baisse des bénéfices de 2016 à 2018.

(11)

Le point 4.4 ci-dessous est entièrement consacré à l’exposé détaillé de l’analyse des indicateurs macroéconomiques et microéconomiques effectuée par la Commission.

(12)

Les pouvoirs publics égyptiens ont ensuite avancé d’autres causes pour expliquer le préjudice important, au cas où la Commission conclurait à l’existence d’un tel préjudice. Ils affirment que le préjudice serait dû à un manque de développement technologique, à une capacité de production insuffisante, à une contraction de la demande, à une augmentation des coûts et à des importations en provenance d’autres pays.

(13)

La plainte prend déjà en compte ces facteurs. Elle fournit des éléments de preuve montrant que l’industrie de l’Union a investi dans ses installations et qu’il n’existe aucun lien de causalité entre les importations en provenance d’autres pays et le préjudice subi par l’industrie de l’Union.

(14)

Tous ces facteurs ont fait l’objet d’une enquête et le point 5 ci-dessous est entièrement consacré aux conclusions provisoires de la Commission.

(15)

La Commission a également reçu des observations concernant les allégations relatives au préjudice causé par les importations en provenance d’Égypte de la part d’un groupe d’utilisateurs de produits de fibre de verre à filament continu dans l’Union.

(16)

Le groupe d’utilisateurs, qui a souhaité rester anonyme, a formulé des observations concernant l’absence de préjudice en 2015, le volume des importations en provenance d’Égypte, le fait que le volume des importations n’était pas susceptible d’augmenter davantage et les indicateurs économiques exposés dans la plainte.

(17)

Une fois encore, tous ces facteurs ont fait l’objet d’une enquête et le point 4 ci-dessous est entièrement consacré aux conclusions provisoires de la Commission. La Commission a confirmé qu’au stade de l’ouverture de l’enquête, la plainte contenait des éléments de preuve suffisants de l’existence de subventions préjudiciables.

(18)

Les pouvoirs publics égyptiens et Jushi Egypt ont également déclaré que la remise des droits à l’importation sur les matières premières n’était pas une subvention dans la mesure où ces produits importés sont réexportés en l’état ou transformés en produits en aval.

(19)

La Commission a reconnu que, en particulier, lorsque les conditions énoncées à l’article 3, point 1) a) ii), du règlement de base et aux annexes I, II et III visées dans ladite disposition sont remplies, seule la remise excessive de droits à l’importation sur les matières premières constitue une subvention passible de mesures compensatoires, et elle a accordé une attention particulière à cette distinction lors de l’enquête.

(20)

La Commission a en outre pris note du fait que le commentaire des pouvoirs publics égyptiens ne portait pas sur les exonérations de droits à l’importation concernant les équipements de production.

1.2.   Modification de l’avis d’ouverture

(21)

Le 12 février 2020, la Commission a publié au Journal officiel de l’Union européenne (4) un avis modifiant l’avis d’ouverture.

(22)

Au cours de l’enquête, la Commission a découvert des éléments de preuve supplémentaires relatifs à des subventions à prendre en compte qui n’étaient pas totalement incluses dans l’avis d’ouverture du 7 juin 2019.

(23)

En particulier, la Commission a mis en évidence des éléments de preuve supplémentaires relatifs à des prêts stratégiques à taux préférentiels accordés à Jushi Egypt par des entités chinoises publiques ou contrôlées par l’État, directement et indirectement par l’intermédiaire de la société mère de Jushi Egypt établie en République populaire de Chine.

(24)

La Commission a mis en évidence des éléments prouvant que ces prêts comportent une contribution financière imputable aux pouvoirs publics égyptiens et qu’ils confèrent un avantage au producteur-exportateur du produit concerné.

(25)

Durant l’enquête, la Commission a également mis en lumière d’autres éléments de la coopération entre l’Égypte et la République populaire de Chine qui pourraient s’avérer pertinents pour l’examen d’autres pratiques de subvention déjà mentionnées dans l’avis d’ouverture, telles que la fourniture de terrains moyennant une rémunération moins qu’adéquate.

(26)

Par conséquent, conformément à l’article 10, paragraphe 7, du règlement de base, la Commission a décidé d’inclure ces subventions dans le champ d’application de l’enquête actuelle et de modifier en conséquence l’avis du 7 juin 2019. Une note au dossier a été ajoutée à cet égard et les pouvoirs publics égyptiens ont été invités à engager des consultations sur ces subventions supplémentaires.

1.3.   Période d’enquête et période considérée

(27)

L’enquête relative aux subventions et au préjudice a porté sur la période comprise entre le 1er avril 2018 et le 31 mars 2019 (ci-après la «période d’enquête» ou «PE»). L’analyse des tendances utiles pour la détermination du préjudice a porté sur la période comprise entre le 1er janvier 2016 et la fin de la période d’enquête (ci-après la «période considérée»). Lorsque cela se justifiait, la Commission a également examiné des données postérieures à la période d’enquête.

1.4.   Enregistrement

(28)

Par le règlement d’exécution (UE) 2020/199 de la Commission (5) (ci-après le «règlement relatif à l’enregistrement»), la Commission a soumis les importations du produit concerné à enregistrement au cours de la période de notification préalable de trois semaines en vertu de l’article 24, paragraphe 5 bis, du règlement de base.

1.5.   Parties intéressées

(29)

Dans l’avis d’ouverture, les parties intéressées ont été invitées à prendre contact avec la Commission en vue de participer à l’enquête. De plus, la Commission a expressément informé le plaignant, d’autres producteurs de l’Union connus, les producteurs-exportateurs connus et les pouvoirs publics égyptiens, les importateurs, fournisseurs et utilisateurs connus, les négociants ainsi que les associations notoirement concernées de l’ouverture de l’enquête, et les a invités à y participer.

(30)

Les parties intéressées ont eu l’occasion de formuler des observations sur l’ouverture de l’enquête et de demander à être entendues par la Commission et/ou le conseiller-auditeur dans le cadre des procédures commerciales.

(31)

Les parties intéressées qui avaient déjà coopéré à l’enquête antidumping distincte ont été invitées à déclarer qu’elles coopéraient aux deux enquêtes et ont été considérées comme des parties intéressées dans les deux cas lorsqu’elles l’avaient fait. Cela étant, la Commission a considéré les enquêtes antidumping et antisubventions comme deux procédures distinctes et a demandé aux parties intéressées de préciser clairement dans leurs observations si elles faisaient référence à l’enquête antidumping, à l’enquête antisubventions ou aux deux.

1.6.   Échantillonnage

(32)

Dans son avis d’ouverture, la Commission a indiqué qu’elle était susceptible de procéder à un échantillonnage des parties intéressées conformément à l’article 27 du règlement de base.

1.6.1.   Échantillonnage des producteurs de l’Union

(33)

Dans son avis d’ouverture, la Commission a indiqué qu’elle avait provisoirement sélectionné un échantillon de producteurs de l’Union. La Commission a sélectionné l’échantillon en se fondant sur le plus grand volume représentatif de production sur lequel l’enquête pouvait raisonnablement porter, compte tenu du temps disponible. L’échantillon initialement choisi était le même que celui de l’enquête antidumping distincte portant sur le même produit originaire d’Égypte et de Bahreïn.

(34)

Aucun commentaire sur la sélection de l’échantillon n’a été reçu.

1.6.2.   Échantillonnage des importateurs

(35)

Pour déterminer s’il était nécessaire de procéder par échantillonnage et, dans l’affirmative, sélectionner un échantillon, la Commission a demandé aux importateurs indépendants de fournir les informations précisées dans l’avis d’ouverture.

(36)

Étant donné que seuls deux importateurs indépendants ont fourni des formulaires d’échantillonnage remplis, l’échantillonnage n’a pas été appliqué.

(37)

Les deux importateurs indépendants ont également été sélectionnés en vue d’une inspection dans le cadre de l’enquête antidumping distincte.

1.6.3.   Échantillonnage des producteurs-exportateurs en Égypte

(38)

La Commission n’a pas recouru à l’échantillonnage en ce qui concerne les producteurs-exportateurs égyptiens, étant donné que le groupe Jushi est le seul producteur-exportateur du produit concerné en Égypte.

1.6.4.   Réponses aux questionnaires et visites de vérification

(39)

La Commission a envoyé des questionnaires aux pouvoirs publics égyptiens, au producteur-exportateur, aux trois producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon et à deux importateurs indépendants. Un questionnaire a été mis à la disposition des utilisateurs, qui pouvaient le remplir s’ils le souhaitaient, au lieu de formuler des observations.

(40)

La Commission a reçu des réponses au questionnaire de la part des pouvoirs publics égyptiens, du producteur-exportateur, de tous les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon et des deux importateurs indépendants. Deux questionnaires d’utilisateur complétés ont également été reçus.

(41)

La Commission a recherché et vérifié toutes les informations jugées nécessaires aux fins de la détermination des subventions, du préjudice en résultant et de l’intérêt de l’Union. Une visite de vérification a eu lieu dans les locaux des pouvoirs publics égyptiens, de l’autorité générale pour la zone économique de Suez et de l’autorité générale des investissements et des zones franches, en présence de fonctionnaires d’autres ministères concernés.

(42)

La méthode appliquée et l’exactitude des données recueillies par les plaignants aux fins des indicateurs macroéconomiques ont fait l’objet d’une visite de vérification conformément à l’article 26 du règlement de base, effectuée dans les locaux des avocats des plaignants.

(43)

Des visites de vérification au titre de l’article 26 du règlement de base ont été effectuées dans les locaux des sociétés suivantes:

 

Producteurs de l’Union et sociétés liées

3B Fibreglass, Battice, Belgique,

Johns Manville Slovakia a.s., Trnava, Slovaquie,

European Owens Corning Fibreglass SPRL, Watermael-Boitsfort, Belgique;

 

Importateurs indépendants dans l’Union européenne

Euroresins UK Limited, Ellesmere Port, Royaume-Uni,

Helm AG, Hambourg, Allemagne;

 

Utilisateurs indépendants dans l’Union européenne

Polykemi Ystad, Suède,

société A (6);

 

Producteur-exportateur en Égypte et sociétés liées

Groupe Jushi:

Jushi Egypt for Fiberglass Industry S.A.E., Égypte,

Jushi France SAS, France,

Jushi Italia srl, Italie,

Jushi Spain SA, Espagne.

2.   PRODUIT CONCERNÉ ET PRODUIT SIMILAIRE

2.1.   Produit soumis à l’enquête

(44)

Le produit soumis à la présente enquête consiste en fils coupés en fibre de verre d’une longueur ne dépassant pas 50 mm (ci-après «fils coupés»), en stratifils (rovings) en fibre de verre, à l’exclusion des stratifils en fibre de verre imprégnés et enrobés ayant une perte au feu supérieure à 3 % (déterminée conformément à la norme ISO 1887) (ci-après «stratifils») et en mats en filaments de fibre de verre, à l’exclusion des mats en laine de verre (ci-après «mats») (ci-après le «produit soumis à l’enquête»). Le produit soumis à l’enquête est appelé «renforts en fibres de verre».

(45)

Le produit concerné est le produit soumis à l’enquête, originaire d’Égypte.

(46)

Le produit concerné relève actuellement des codes NC 7019 11 00, ex 7019 12 00, 7019 31 00 (codes TARIC 7019120022, 7019120025, 7019120026 et 7019120039).

2.2.   Produit similaire

(47)

L’enquête a montré que les produits suivants présentaient les mêmes caractéristiques physiques, chimiques et techniques essentielles et étaient destinés aux mêmes utilisations de base:

a)

le produit concerné;

b)

le produit fabriqué et vendu sur le marché intérieur de l’Égypte;

c)

le produit fabriqué et vendu dans l’Union par l’industrie de l’Union.

(48)

La Commission a décidé qu’aux fins de la présente enquête ces produits constituaient donc des produits similaires au sens de l’article 2, point c), du règlement de base.

3.   SUBVENTIONNEMENT

3.1.   Subventions et programmes de subventions faisant l’objet de l’enquête en cours

(49)

Sur la base des informations disponibles, y compris celles contenues dans la plainte, l’avis d’ouverture et les réponses au questionnaire de la Commission, cette dernière a enquêté sur les allégations de subventionnement pratiqué par les pouvoirs publics égyptiens au moyen des subventions suivantes:

prêts préférentiels stratégiques, lignes de crédit, autres financements, assurances et garanties;

abandon de recettes par l’intermédiaire de mécanismes de réduction et d’exonération des impôts directs:

privilèges en matière d’impôt sur le revenu pour les entreprises situées dans une zone économique spéciale;

abandon de recettes au moyen de régimes concernant la fiscalité indirecte et les droits à l’importation:

exonérations de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») et remises de droits à l’importation pour l’usage d’équipements importés;

exonérations de la TVA et exemptions de droits à l’importation pour les intrants importés utilisés dans les produits finis exportés;

fourniture par les pouvoirs publics de biens et de services moyennant une rémunération moins qu’adéquate:

fourniture d’électricité par les pouvoirs publics moyennant une rémunération moins qu’adéquate;

fourniture de terrains par les pouvoirs publics moyennant une rémunération moins qu’adéquate.

3.2.   Introduction

(50)

Le subventionnnement allégué en Égypte concerne Jushi Egypt for Fiberglass Industry S.A.E. (ci-après «Jushi Egypt»), une société établie dans la zone de coopération économique et commerciale sino-égyptienne de Suez (ci-après la «zone CECS»). Cette zone couvre une superficie de 7,34 km2, divisée en une superficie de départ de 1,34 km2 et une superficie d’expansion de 6 km2.

(51)

En 2002, la zone géographique plus vaste de 20 km2 dans laquelle s’inscrit la zone de coopération économique et commerciale sino-égyptienne de Suez, la zone économique du nord-ouest du golfe de Suez, a été officiellement classée comme zone économique spéciale (ci-après «ZES») par les pouvoirs publics égyptiens (7). De ce fait, les dispositions de la loi égyptienne no 83/2002 sur les zones économiques spéciales (ci-après la «loi no 83/2002») sont devenues également applicables à la zone CECS.

(52)

En 2014, l’Égypte a lancé le plan de développement du corridor du canal de Suez. En 2015, dans le cadre de ce plan, la ZES a été officiellement intégrée à la zone économique du canal de Suez au sens large (ci-après la «ZCS»), qui couvre une superficie de 461 km2 autour du canal de Suez. L’ensemble de la zone est désormais considéré comme une «zone économique spéciale» conformément à la loi no 83/2002 telle que modifiée (8). Par conséquent, les entreprises qui sont établies dans cette zone spéciale bénéficient d’un traitement préférentiel tel que décrit dans les programmes de subvention mentionnés ci-dessous.

3.3.   Exonérations de TVA et remises de droits à l’importation sur les équipements importés

(53)

Ce programme prévoit une exonération de la TVA et des droits à l’importation pour les importations d’équipements utilisés dans le processus de production des sociétés établies dans la ZCS.

3.3.1.   Analyse

(54)

Les bases juridiques de ce programme sont les suivantes:

a)

loi no 83/2002 sur les zones économiques spéciales (ci-après la «loi no 83/2002»);

b)

décret du président de la République arabe d’Égypte concernant la loi no 27/2015 portant modification de certaines dispositions de la loi no 83/2002 sur les zones économiques spéciales (ci-après la «loi no 27/2015»);

c)

loi sur les investissements promulguée par la loi no 72/2017;

d)

projet de résolution no 2310/2017 du premier ministre concernant la publication des règlements d’application de la loi sur les investissements (loi no 72/2017);

e)

loi sur la TVA promulguée par la loi no 67/2016;

f)

règlements d’application de la loi sur la TVA, décret no 66/2017 du ministère des finances.

3.3.2.   Conclusions de l’enquête

(55)

Conformément à l’article 22 de la loi no 83/2002, telle que modifiée par la loi no 27/2015, la ZCS fait partie d’un territoire douanier distinct en vertu d’un décret du ministre des finances. Cette zone douanière distincte est placée sous la supervision d’un comité suprême des douanes, établi par le président de l’autorité de la zone.

(56)

En outre, en vertu de l’article 42 de la loi no 83/2002, les équipements, outils ou appareils importés sont exonérés de taxes et de droits pour autant qu’ils soient affectés à la production de biens ou de services pour l’activité autorisée au sein de la ZCS. Par contre, comme la ZCS n’est pas une zone réservée à l’exportation, toutes les taxes et tous les droits doivent être payés pour tous les produits commercialisés sur le marché intérieur en dehors de la zone.

(57)

Enfin, conformément à la législation applicable, les sociétés situées en dehors de la ZCS paient d’avance la TVA à l’importation et la déduisent de la TVA sur leurs ventes intérieures ou, le cas échéant, demandent un remboursement lorsque des produits finis sont exportés.

(58)

Pour les sociétés établies dans la ZCS, la TVA à l’importation n’est pas facturée initialement, conformément à une lettre d’entente sur ce point entre le ministère des finances et l’autorité générale de la ZCS.

(59)

La Commission a constaté que la TVA et les droits à l’importation de Jushi Egypt sur les équipements importés n’avaient pas été perçus depuis 2017 et pendant toute la période d’enquête. Avant 2017, la société s’est effectivement acquittée de ses droits à l’importation et de la TVA/taxe générale sur les ventes (9) sur les équipements importés, puisqu’elle ne se trouvait pas encore dans la ZCS. Toutefois, étant donné que Jushi Egypt a opté pour le régime fiscal et administratif de la ZCS en 2017, cette société bénéficie des traitements fiscaux préférentiels en vigueur dans la zone, y compris des exonérations de TVA et de droits de douane.

(60)

D’une manière générale, en Égypte, les entreprises qui achètent des machines soumises au taux de TVA de 5 % doivent considérer les montants correspondants comme des crédits sur les paiements futurs (10). Toutefois, lorsque le solde du crédit est conservé pendant plus de 6 périodes d’imposition consécutives (mois), ce qui est le cas pour les sociétés très actives à l’exportation qui ne peuvent compenser la TVA en amont en tant que crédit sur des paiements futurs, le représentant de l’entreprise doit déposer une demande écrite indiquant le montant du solde du crédit. L’autorité fiscale égyptienne doit vérifier l’exactitude du solde et procéder au remboursement dans les 45 jours suivant la date de présentation de la demande.

(61)

L’enquête a cependant révélé que, dans la pratique, les pouvoirs publics égyptiens ne remboursent pas l’avance de TVA, de sorte que la taxe représente un coût réel pour ces entreprises. En effet, une analyse des crédits de taxe générale sur les ventes/TVA de Jushi Egypt figurant dans les rapports annuels relatifs à la période 2016-2018 a montré que les montants dus par les pouvoirs publics égyptiens à Jushi Egypt restaient en souffrance depuis plusieurs années (11) et Jushi Egypt a confirmé ne pas s’attendre à recevoir les remboursements (12).

(62)

Il convient aussi de considérer que, dans la mesure où les équipements utilisés dans la fabrication des produits, y compris le produit faisant l’objet de l’enquête, seront, selon toute vraisemblance, utilisés pour toute leur durée de vie utile à l’intérieur du territoire égyptien sans être réexportés ou vendus sur le marché intérieur, il n’y a aucune raison d’accorder une exemption des droits de douane et de la TVA pour leur achat, si ce n’est pour favoriser les sociétés établies dans la ZCS. Il s’agit donc de recettes sacrifiées sous la forme de droits de douane et de TVA non payables sans aucune justification, étant donné que ces équipements sont utilisés pour la production locale du produit soumis à l’enquête, sur lequel les droits de douane et la TVA sont normalement dus pour les producteurs situés en dehors de la ZCS.

(63)

Par conséquent, depuis 2017, date à laquelle Jushi Egypt a été soumise au traitement préférentiel prévu par le régime juridique de la ZCS, cette société a bénéficié d’une exonération de facto de la TVA sur l’importation de machines. Cette exonération correspond à des recettes sacrifiées puisque, comme indiqué dans les paragraphes précédents, même si la TVA devrait être remboursée en fin de compte, en fait aucun élément n’indique que les pouvoirs publics égyptiens ont remboursé par le passé à Jushi Egypt la TVA acquittée sur les machines. Les éléments de preuve disponibles ont en effet montré que Jushi Egypt n’a pas obtenu ces remboursements lorsque la société était établie en dehors de la zone.

(64)

Les sociétés établies dans la ZCS, qui n’ont pas à payer de TVA en amont, bénéficient d’une exonération de facto de la TVA qui leur évite de devoir supporter un coût réel et leur épargne la charge administrative liée à l’obligation de demander le remboursement de la TVA ou de compenser les crédits de TVA. La même conclusion s’impose encore plus clairement en ce qui concerne l’exonération des droits à l’importation sur les équipements importés.

3.3.3.   Conclusion

(65)

Compte tenu de ce qui précède, la Commission a provisoirement conclu que ce programme fournit une contribution financière sous la forme de recettes sacrifiées par les pouvoirs publics égyptiens, au sens de l’article 3, point 1) a) ii), du règlement de base, étant donné que les entreprises admissibles sont exonérées du paiement de la TVA et/ou des droits de douane normalement exigibles. Il confère également un avantage aux sociétés bénéficiaires au sens de l’article 3, point 2), du règlement de base, étant donné qu’elles se trouvent dans une meilleure situation financière qu’en l’absence du régime. En effet, sans ce régime, elles auraient payé la TVA et les droits à l’importation lors de l’importation des équipements.

(66)

Le programme est spécifique au sens de l’article 4, paragraphe 2, point a), du règlement de base, dans la mesure où il n’est pas applicable de manière générale en Égypte et ne s’applique qu’aux sociétés établies dans les zones économiques spéciales, telles que la ZCS. La législation régissant les activités de l’autorité chargée d’octroyer les subventions limite la possibilité d’en bénéficier aux entreprises qui se trouvent dans de telles zones économiques spéciales.

3.3.4.   Calcul du montant de la subvention

(67)

Le montant de cette subvention passible de mesures compensatoires est calculé en termes d’avantage conféré au bénéficiaire, tel que constaté pour la période d’enquête. L’avantage conféré au bénéficiaire est considéré comme équivalent au montant suivant:

a)

le montant de l’exonération des droits de douane sur les équipements importés achetés depuis 2017. Pour faire en sorte que le montant passible de mesures compensatoires corresponde uniquement à la période d’enquête, il a été procédé à l’amortissement de l’avantage reçu sur la durée de vie utile de l’équipement conformément aux procédures comptables habituelles de l’entreprise, sauf pour une catégorie d’actifs, pour laquelle la période d’amortissement a été adaptée afin qu’elle reflète mieux la durée d’utilité réelle, telle que vérifiée par les services de la Commission.

b)

En ce qui concerne les recettes sacrifiées sous la forme d’une exonération de facto de la TVA, l’avantage calculé correspond au montant total de la TVA normalement due mais non versée au cours de la période d’enquête sur les achats d’équipements importés (pendant la période d’enquête).

(68)

Le montant de la subvention provisoirement établi pour ce type de subventions au cours de la période d’enquête pour le producteur-exportateur était de 0,78 %.

3.4.   Exonérations de TVA et remises sur les droits à l’importation pour les matériaux importés

(69)

En vertu de la loi no 83/2002, les entités opérant dans une zone économique spéciale sont autorisées à importer des matériaux sans s’acquitter de droits de douane, taxes sur les ventes ou autres taxes ou droits qui seraient normalement dus, dans la mesure où ces matériaux importés sont réexportés en l’état ou transformés en produits en aval qui sont ensuite exportés.

3.4.1.   Base juridique

(70)

Les bases juridiques de ce programme sont les suivantes:

loi no 83/2002 sur les zones économiques spéciales (ci-après la «loi no 83/2002»),

décret no 1625 de 2002 du premier ministre relatif à la publication des règlements d’application sur les zones économiques spéciales,

décret du président de la République arabe d’Égypte concernant la loi no 27/2015 portant modification de certaines dispositions de la loi no 83/2002 sur les zones économiques spéciales (ci-après la «loi no 27/2015»),

loi sur les investissements promulguée par la loi no 72/2017,

projet de résolution no 2310/2017 du premier ministre concernant la publication des règlements d’application de la loi sur les investissements (loi no 72/2017),

loi sur la TVA promulguée par la loi no 67/2016,

règlements d’application de la loi sur la TVA, décret no 66/2017 du ministère des finances.

3.4.2.   Conclusions de l’enquête

(71)

Comme indiqué au considérant 46 ci-dessus, la ZCS fait partie d’un espace douanier distinct. En vertu de l’article 42 de la loi no 83/2002, les matières premières, les fournitures, les pièces de rechange et tout autre matériau ou élément importés de l’étranger sont exonérés de droits et taxes, pour autant qu’ils soient affectés à la production de biens ou de services pour l’activité autorisée au sein de la ZCS. À l’inverse, toutes les taxes et tous les droits doivent être payés pour tous les produits commercialisés sur le marché intérieur en dehors de la ZCS.

(72)

Au cours de l’enquête, la Commission a constaté que, conformément aux dispositions de l’article susmentionné de la loi no 83/2002, Jushi Egypt avait bénéficié d’une exonération de la TVA et des droits à l’importation sur les intrants utilisés dans la production de produits finis exportés (et, en particulier, du produit concerné).

(73)

En ce qui concerne l’exonération de droits à l’importation, une telle configuration semblerait correspondre à un régime de ristourne de droits tel que décrit à l’annexe I, point i), du règlement de base. Conformément à l’annexe I, point i), les systèmes de ristourne sur intrants de remplacement peuvent constituer une subvention à l’exportation dans la mesure où ils permettent de ristourner des montants supérieurs aux impositions à l’importation perçues initialement sur les intrants importés pour lesquels la ristourne est demandée.

(74)

Afin de déterminer s’il y a eu ristourne excessive, conformément à l’annexe III, point II, du règlement de base, la Commission a demandé des informations complémentaires aux pouvoirs publics égyptiens concernant le régime de ristourne de droits en général, et plus particulièrement l’existence et l’application effective des procédures de surveillance et de vérification qui l’accompagnent.

(75)

Sur la base des informations reçues initialement, il est apparu que les pouvoirs publics égyptiens avaient mis en place un cadre législatif pour surveiller le système de ristourne de droits, y compris, le cas échéant, le remboursement des droits acquittés. Toutefois, au cours des visites de vérification chez Jushi Egypt, il a été constaté que ce cadre n’était pas effectivement appliqué dans la pratique.

(76)

Jushi Egypt n’a payé aucun droit à l’importation (ni aucune TVA) sur ses achats de matériaux au cours de la période d’enquête, que ces derniers aient été utilisés pour des ventes intérieures ou pour des ventes à l’exportation de produits finis. Normalement, un dépôt doit être effectué sur un compte bloqué des autorités douanières, sur lequel les droits peuvent être prélevés périodiquement. Toutefois, au cours de la période d’enquête, aucun dépôt n’a été effectué et aucun montant n’a été perçu par les autorités.

(77)

À l’issue de la période d’enquête, Jushi Egypt a versé aux autorités égyptiennes une petite somme destinée d’après ses dires à couvrir une ristourne excessive pour les ventes sur le marché intérieur. Toutefois, aucun élément de preuve n’a permis d’établir que ce paiement était effectivement dû à une ristourne excessive concernant les ventes sur le marché intérieur ou qu’il était lié à des ventes intérieures effectuées au cours de la période d’enquête. Or, il existait également des éléments de preuve indiquant que Jushi Egypt avait reçu le remboursement des droits à l’importation acquittés au cours de périodes antérieures, avant d’obtenir une dispense de droits à l’importation.

(78)

Après d’autres échanges avec les pouvoirs publics égyptiens, des informations complémentaires ont été reçues, qui montrent qu’en fait, le cadre de surveillance et de vérification pour la perception des droits de douane dans la ZCS était encore en cours d’établissement pendant la période d’enquête. Ainsi, le comité d’ajustement des soldes des droits à l’importation n’a été établi qu’en 2019, conformément au décret no 158 du chef de l’autorité douanière, la mise en place d’un comité de contrôle douanier était toujours en cours en 2019 et les procédures d’exécution n’avaient pas encore été publiées. La Commission a donc provisoirement conclu qu’il n’existait pas de système effectif et approprié de ristourne de droits.

(79)

En outre, comme indiqué au considérant 50 ci-dessus, la TVA sur les marchandises importées n’est pas payée d’avance dans la ZCS. Les autorités fiscales ne conservent que le droit de récupérer la TVA par la suite.

(80)

L’enquête a aussi révélé que, pour certains intrants utilisés par Jushi Egypt dans le processus de production et achetés à des fournisseurs égyptiens, la TVA était facturée au taux normal, alors même que la société était basée dans la zone spéciale, où la TVA n’était normalement pas due. Ces transactions ont donné lieu à un crédit de TVA pour Jushi Egypt. À l’inverse, les ventes d’intrants entre des sociétés situées dans la zone spéciale n’étaient pas soumises à la TVA nationale, que les marchandises fabriquées avec de tels intrants soient exportées ou vendues sur le marché intérieur. Jushi Egypt n’a pas été en mesure de montrer quels intrants (provenant du marché intérieur ou importés) avaient été utilisés ou consommés pour produire des produits exportés ou vendus sur le marché intérieur.

(81)

Tous ces éléments montrent que cette zone spéciale n’est pas une zone franche industrielle classique et qu’elle diffère également des autres zones franches spéciales qui existent en Égypte. Il s’agit d’une zone spéciale unique, hybride, présentant plusieurs caractéristiques spécifiques qui la différencient des autres. Les lois et règlements applicables ne semblent pas être appliqués dans la zone, de sorte que la Commission a provisoirement fondé ses conclusions sur sa compréhension de la manière dont les opérations menées dans la zone fonctionnent dans la pratique.

(82)

Enfin, et surtout, du fait de l’absence d’autorités administratives chargées de l’administration, du contrôle et de l’application du système fiscal et des obligations fiscales liées au régime fiscal particulier applicable dans la zone, c’est un espace unique dans lequel les sociétés qui y sont établies sont totalement libres de se conformer ou de se soustraire aux règles fiscales, sans aucune conséquence possible. Par conséquent, compte tenu de la situation particulière de cette zone et sur la base des informations disponibles, la Commission a décidé provisoirement de considérer les exonérations de TVA sur les intrants importés comme une exonération de facto du paiement de la TVA sur ceux-ci, indépendamment du fait que les intrants soient ultérieurement incorporés dans des produits finis exportés ou vendus sur le marché intérieur.

3.4.3.   Conclusion

(83)

La Commission a donc provisoirement conclu que le système de surveillance des ristournes de droits des pouvoirs publics égyptiens n’était pas appliqué dans les faits et qu’il ne pouvait pas être qualifié de tel pour toutes les raisons expliquées au point précédent et résumées au considérant 73. En effet, comme expliqué aux considérants 68 et 70, l’enquête a montré que les pouvoirs publics égyptiens n’avaient même pas mis en place une autorité chargée de la gestion et de l’exécution de toute obligation fiscale pour les entités situées dans la zone, y compris les droits de douane et la TVA dus sur les matériaux importés.

(84)

En outre, la Commission a établi que le prétendu système de ristourne de droits pour les intrants utilisés dans les produits finis exportés donnait lieu à des recettes sacrifiées, qui constituent une subvention passible de mesures compensatoires au sens de l’article 3, point 1) a) ii), du règlement de base, car elles entraînent une ristourne excessive des taxes à l’importation prélevées initialement sur les intrants importés pour lesquels la ristourne est demandée. Les pouvoirs publics égyptiens n’ont pas non plus fourni de nouvel examen des opérations en question.

(85)

Ces ristournes excessives sont également spécifiques au sens de l’article 4, paragraphe 2, point a), du règlement de base, dans la mesure où elles ne sont pas applicables de manière générale en Égypte et ne s’appliquent qu’aux sociétés établies dans la ZCS.

(86)

En outre, l’exonération de facto de la TVA sur les matériaux importés constitue une contribution financière sous la forme de recettes sacrifiées par les pouvoirs publics égyptiens au sens de l’article 3, point 1) a) ii), du règlement de base, étant donné que les entreprises admissibles sont exonérées du paiement de la TVA qui serait normalement due. Elle confère également un avantage aux entreprises bénéficiaires au sens de l’article 3, point 2), du règlement de base. Le programme est spécifique au sens de l’article 4, paragraphe 2, point a), du règlement de base, puisque la législation limite l’exonération de TVA aux seules entreprises qui sont situées dans la ZCS.

3.4.4.   Calcul du montant de la subvention

(87)

Le montant de cette subvention passible de mesures compensatoires est calculé en termes d’avantage conféré au bénéficiaire, tel que constaté pour la période d’enquête.

(88)

En ce qui concerne les droits à l’importation, l’avantage conféré au bénéficiaire est considéré comme étant égal à la différence entre le montant des droits à l’importation dus au cours de la période d’enquête et le montant réel des droits à l’importation acquittés au cours de la période d’enquête.

(89)

Afin de déterminer le montant des droits à l’importation dus, la Commission a considéré que le ratio de consommation moyenne était le même pour tous les types de produits finis, puisqu’ils appartiennent tous à la même catégorie générale de produits. La Commission a établi le ratio de consommation sur la base des registres du producteur-exportateur. Elle a d’abord déterminé les quantités de matières importées au cours de la période d’enquête. Ensuite, elle a calculé la proportion des ventes intérieures par rapport aux ventes totales de Jushi Egypt. Puis, elle a appliqué cette proportion de ventes intérieures au volume total des matériaux importés et a déterminé les quantités de matériaux importés pour lesquelles des droits à l’importation seraient exigibles.

(90)

Enfin, pour établir le montant de l’avantage, la Commission a calculé le montant des droits à l’importation exigibles pour les quantités de matériaux utilisés pour la production de marchandises vendues sur le marché intérieur.

(91)

En ce qui concerne les recettes sacrifiées sous la forme d’une exonération de facto de la TVA, le calcul de l’avantage a consisté dans la prise en compte du montant total de la TVA normalement due mais non versée au cours de la période d’enquête sur les achats d’intrants importés.

(92)

Le montant de la subvention provisoirement établi pour ce type de subventions au cours de la période d’enquête pour les producteurs-exportateurs était de 7,42 %.

3.5.   Impôt sur le revenu

(93)

Les bases juridiques de ce programme sont les suivantes:

loi relative à l’impôt sur le revenu, promulguée par la loi no 91/2005, et

décret no 16/2017 du ministère des investissements ajoutant un addendum (A) intitulé «The effects of changes in currency changes rates» (Les effets des variations des taux de change des devises) à la norme comptable no 13 de l’Égypte.

3.5.1.   Analyse

(94)

Jushi Egypt est soumise au taux normal de l’impôt égyptien sur le revenu (22,5 %).

(95)

En 2016, le gouvernement égyptien a décidé de passer d’un taux de change fixe de la livre égyptienne (EGP) à un taux de change flottant, sur la base d’une recommandation du Fonds monétaire international. En conséquence, la livre égyptienne a perdu, en un mois, près de la moitié de sa valeur par rapport à d’autres devises de premier plan, telles que le dollar américain et l’euro. Afin de faire face à cette fluctuation soudaine de la monnaie, les pouvoirs publics égyptiens ont publié une norme comptable spéciale, ainsi qu’une règle fiscale spéciale pour traiter les différences de change. En conséquence, les sociétés ont été autorisées à déduire plus largement les différences de change dues à la dépréciation de la livre égyptienne de leurs revenus imposables.

(96)

Bien que cette disposition législative ait été applicable, d’une manière générale, à toutes les sociétés en Égypte et qu’elle ait été destinée à compenser les effets négatifs de la dépréciation de la monnaie égyptienne, elle a conféré de facto un avantage substantiel à un nombre limité d’entreprises du pays, c’est-à-dire des sociétés qui sont tournées vers l’exportation et qui mènent leurs activités presque entièrement en devises étrangères, telles que le dollar américain ou l’euro. Cette catégorie particulière d’entreprises n’a pas subi de perte réelle du fait de la dépréciation de la livre égyptienne, mais a pu bénéficier de la norme comptable spéciale publiée par les pouvoirs publics égyptiens à des fins fiscales. Par conséquent, les entreprises qui exercent leurs activités dans une devise étrangère semblent être déficitaires à des fins fiscales, même si leur situation financière peut faire apparaître des profits considérables. À l’inverse, certaines entreprises égyptiennes qui exercent leurs activités en livres égyptiennes ont subi des pertes réelles, qui ont eu une véritable incidence sur leurs activités, situation à laquelle a remédié la règle fiscale spéciale publiée par les pouvoirs publics égyptiens.

(97)

Jushi Egypt a bénéficié de manière disproportionnée de cette mesure, étant donné que l’enquête a montré que cette société exerce ses activités presque exclusivement en dollars américains ou en euros et qu’elle n’effectue pratiquement pas de transactions en livres égyptiennes. En effet, elle est presque exclusivement axée sur l’exportation, importe la quasi-totalité de ses équipements, ses prêts sont libellés en devises étrangères de même qu’une grande partie de ses matériaux. Par conséquent, les pertes enregistrées par Jushi Egypt en raison de la dépréciation de la livre égyptienne, notamment à cause des importants prêts en devises étrangères, ne sont pas réelles et ne sont utilisées qu’à des fins fiscales pour réduire le revenu imposable.

(98)

En outre, la déduction fiscale était supposée être une mesure temporaire, applicable uniquement aux opérations affectées au moment de la dépréciation. Néanmoins, au cours de la période d’enquête, Jushi Egypt a encore déduit des montants substantiels de son revenu imposable au titre des différences de change, réalisées ou non. En conséquence, elle était déficitaire d’après ses déclarations d’impôt sur le revenu, alors que ses états financiers présentaient un bénéfice considérable et durable.

3.5.2.   Conclusion

(99)

À la lumière des considérations qui précèdent, la Commission a conclu que ces avantages fiscaux constituent des recettes sacrifiées par les pouvoirs publics égyptiens au sens de l’article 3, point 1) a) ii), du règlement de base et ont conféré un avantage au sens de l’article 3, point 2), du règlement de base.

(100)

En outre, ils sont de facto spécifiques au producteur-exportateur Jushi Egypt, au sens de l’article 4, paragraphe 2, point c), du règlement de base, dans la mesure où ils sont utilisés de manière prépondérante par un groupe restreint d’entreprises opérant presque exclusivement en devises étrangères.

3.5.3.   Calcul du montant de la subvention

(101)

L’avantage conféré à Jushi Egypt a été établi sur la base des informations contenues dans la déclaration d’impôt sur le revenu de 2018. Premièrement, le montant déduit du revenu imposable en vertu de la disposition mentionnée ci-dessus au point 3.5.1 a été établi. Deuxièmement, le taux d’imposition généralement applicable de 22,5 % a été appliqué à ce montant déduit. Enfin, ce montant a été exprimé en pourcentage du chiffre d’affaires total de Jushi Egypt au cours de la période d’enquête.

(102)

Les montants de subvention constatés pour ce régime fiscal direct se sont élevés à 1,68 % pour Jushi Egypt.

3.6.   Autres régimes

(103)

En ce qui concerne tous les autres régimes énumérés au considérant 43 ci-dessus, la Commission poursuit son enquête, notamment au regard des modifications apportées à l’avis d’ouverture visées au considérant 18 ci-dessus.

3.7.   Conclusions relatives aux subventions

(104)

La Commission a calculé le montant des subventions passibles de mesures compensatoires pour le producteur-exportateur, conformément aux dispositions du règlement de base, en examinant chaque subvention ou programme de subventions et a additionné ces chiffres pour calculer le montant total des subventions dont a bénéficié le producteur-exportateur pendant la période d’enquête. Pour déterminer les subventions globales qui figurent ci-dessous, la Commission a d’abord calculé le pourcentage de subventionnement, qui est le rapport entre le montant de la subvention et le chiffre d’affaires total de la société. Ce pourcentage a ensuite été utilisé pour calculer les subventions octroyées aux exportations du produit concerné vers l’Union au cours de la période d’enquête. Le montant de la subvention par tonne de produit concerné exportée vers l’Union au cours de la période d’enquête a ensuite été calculé et les marges indiquées ci-dessous correspondent au pourcentage de la valeur CIF (coût, assurance et fret) des mêmes exportations par tonne.

(105)

Étant donné l’entière coopération des producteurs-exportateurs égyptiens, le montant de «toutes les autres sociétés» a été fixé provisoirement au niveau de l’unique producteur-exportateur égyptien.

Tableau 1

Taux de subvention provisoires

Société

Taux de subvention provisoire

Jushi Egypt for Fiberglass Industry S.A.E.

8,7 %

Toutes les autres sociétés

8,7 %

4.   PRÉJUDICE

4.1.   Définition de l’industrie de l’Union et de la production de l’Union

(106)

Au cours de la période d’enquête, sept producteurs de l’Union fabriquaient le produit similaire. Ils constituent l’«industrie de l’Union» au sens de l’article 9, paragraphe 1, du règlement de base.

(107)

Comme indiqué aux considérants 31 et 32, la Commission a sélectionné un échantillon de producteurs de l’Union. Cet échantillon comprenait trois producteurs de l’Union représentant 68 % de la production totale de l’Union du produit similaire au cours de la période d’enquête.

(108)

La Commission a établi la production totale de renforts en fibres de verre de l’Union au cours de la période d’enquête à environ 695 000 tonnes, sur la base des informations recueillies par le plaignant et vérifiées au cours de l’enquête.

Tableau 2

Production de l’Union

 

2016

2017

2018

PE

Production totale de l’Union (en tonnes)

701 611

694 178

693 123

695 324

Indice

100

99

99

99

Source: plaignant.

(109)

La production totale de l’Union est restée stable entre 2016 et la fin de la période d’enquête, suivant une très légère tendance à la baisse.

4.2.   Consommation de l’Union

(110)

La Commission a établi la consommation de renforts en fibres de verre de l’Union en ajoutant les importations de renforts en fibres de verre dans l’Union aux ventes de l’industrie de l’Union sur le marché de l’Union.

(111)

La consommation de l’Union a évolué de la manière suivante:

Tableau 3

Consommation de l’Union

 

2016

2017

2018

PE

Consommation totale de l’Union (en tonnes)

978 454

1 045 331

1 058 263

1 027 982

Indice

100

107

108

105

Source: plaignant, base de données Surveillance 2.

(112)

La consommation de renforts en fibres de verre de l’Union a augmenté de 5 % entre le début et la fin de la période considérée; la tendance en glissement annuel montre toutefois que la consommation a légèrement varié au cours de cette période.

4.3.   Importations en provenance du pays concerné

4.3.1.   Volume et part de marché des importations en provenance du pays concerné

(113)

La Commission a établi le volume des importations et leur part de marché en se fondant sur les données figurant dans la base de données Surveillance 2 (13).

(114)

Les importations dans l’Union de renforts en fibres de verre en provenance du pays concerné ont évolué comme suit:

Tableau 4

Volume des importations (en tonnes) et part de marché

 

2016

2017

2018

PE

Volume des importations en provenance d’Égypte (en tonnes)

50 529

95 865

146 304

144 169

Indice

100

190

290

285

Part de marché (%)

5

9

14

14

Source: base de données Surveillance 2.

(115)

Les importations de renforts en fibres de verre en provenance d’Égypte ont augmenté rapidement entre 2016 et 2018, triplant presque en volume. La part de marché de ces importations, dans le contexte de l’augmentation de la consommation de 5 %, a donc également triplé.

4.3.2.   Prix des importations en provenance du pays concerné et sous-cotation des prix

(116)

L’évolution des prix moyens à l’importation au cours de la période considérée a été la suivante:

Tableau 5

Prix à l’importation

 

2016

2017

2018

PE

Prix à l’importation des produits en provenance d’Égypte (en EUR par tonne)

993

918

898

904

Indice

100

92

90

91

Source: base de données Surveillance 2.

(117)

Les prix à l’importation des produits en provenance d’Égypte ont clairement été orientés à la baisse au cours de la période considérée. Au cours de la période d’enquête, la différence a été d’environ 20 % entre ces prix à l’importation et les prix de vente dans l’Union européenne (tableau 9).

(118)

La Commission a déterminé la sous-cotation des prix pendant la période d’enquête en comparant:

1)

les prix moyens pondérés facturés à l’importation pour chaque type de produit par le producteur égyptien au premier acheteur indépendant sur le marché de l’Union, établis sur une base coût, assurance et fret (CIF) et dûment ajustés pour tenir compte des coûts postérieurs à l’importation; et

2)

les prix de vente moyens pondérés facturés, pour chaque type de produit, par les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon à des acheteurs indépendants sur le marché de l’Union.

(119)

La Commission a effectué des comparaisons des prix type par type sur des opérations effectuées au même stade commercial, après application des ajustements nécessaires et déduction des rabais et remises.

(120)

Lorsque la vente du producteur égyptien au premier acheteur indépendant sur le marché de l’Union était effectuée par l’intermédiaire d’une société de vente liée établie dans l’Union européenne, le prix de l’importation a été établi sur une base CIF, mais il a été procédé à un ajustement de ce prix pour tenir compte des frais généraux et administratifs et du bénéfice de l’importateur lié.

(121)

La comparaison sur une base type par type était possible en raison de l’utilisation d’un numéro de contrôle de produit commun (ci-après le «NCP») pour décrire les types de renforts en fibres de verre exportés vers l’Union européenne en provenance d’Égypte et également vendus par les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon.

(122)

Le calcul a fait apparaître une marge de sous-cotation moyenne pondérée de 16 % par les importations de produits de Jushi Egypt sur le marché de l’Union.

(123)

Par conséquent, la Commission a provisoirement établi que les prix des importations en provenance d’Égypte étaient sensiblement inférieurs aux prix de l’industrie de l’Union.

4.4.   Situation économique de l’industrie de l’Union

4.4.1.   Remarques générales

(124)

Conformément à l’article 8, paragraphe 5, du règlement de base, l’examen de l’incidence des importations faisant l’objet de subventions sur l’industrie de l’Union a comporté une évaluation de tous les indicateurs économiques ayant une influence sur la situation de celle-ci durant la période considérée.

(125)

Comme indiqué aux considérants 17 à 20, l’échantillonnage a été utilisé pour la détermination du préjudice et de l’incidence négative sur les prix de vente, les quantités vendues, la part de marché et les bénéfices de l’industrie de l’Union.

(126)

Aux fins de la détermination du préjudice, la Commission a établi une distinction entre les indicateurs de préjudice macroéconomiques et microéconomiques. La Commission a évalué les indicateurs macroéconomiques sur la base des données contenues dans les réponses au questionnaire communiquées par les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon et des informations fournies par le plaignant. Les indicateurs microéconomiques ont été fondés sur les données figurant dans les réponses au questionnaire communiquées par les producteurs inclus dans l’échantillon.

(127)

Les deux séries de données sont apparues représentatives de la situation économique de l’industrie de l’Union.

(128)

Les indicateurs macroéconomiques sont les suivants: la production, les capacités de production, l’utilisation des capacités, le volume des ventes, la part de marché, la croissance, l’emploi, la productivité, l’importance du montant de la subvention et le rétablissement à la suite de pratiques antérieures de subvention ou de dumping.

(129)

Les indicateurs microéconomiques sont les suivants: les prix unitaires moyens, le coût unitaire, les coûts de la main-d’œuvre, les stocks, la rentabilité, le flux de liquidités, les investissements, le rendement des investissements et l’aptitude à mobiliser des capitaux.

4.4.2.   Indicateurs macroéconomiques

4.4.2.1.   Capacités de production et utilisation des capacités

(130)

Au cours de la période considérée, les capacités de production totales de l’Union et son utilisation des capacités ont évolué comme suit:

Tableau 6

Capacités de production et utilisation des capacités

 

2016

2017

2018

PE

Capacités de production (en tonnes)

759 107

760 104

753 688

751 098

Indice

100

100

99

99

Utilisation des capacités (%)

92

91

92

93

Source: plaignant.

(131)

Les capacités de production sont restées stables au cours de la période considérée. La raison en est que ces capacités reposent principalement sur le nombre de fours qui alimentent les chaînes de production et que l’augmentation des capacités est une opération à très haute intensité de capital.

(132)

L’utilisation des capacités de l’industrie de l’Union est également restée élevée et stable au cours de la période considérée. Une fois qu’un four est en exploitation, il est économiquement nécessaire de le maintenir en fonctionnement sans interruption.

4.4.2.2.   Volume des ventes et part de marché

(133)

Au cours de la période considérée, le volume des ventes et la part de marché de l’industrie de l’Union ont évolué comme suit:

Tableau 7

Volume des ventes et part de marché

 

2016

2017

2018

PE

Volume des ventes sur le marché de l’Union (en tonnes)

622 504

651 082

609 902

594 097

Indice

100

105

98

95

Part de marché (%)

64

62

58

58

Source: plaignant, statistiques sur les importations et les exportations.

(134)

Les ventes de l’industrie de l’Union ont augmenté en chiffres absolus entre 2016 et 2017, avant de reculer, perdant 5 points de pourcentage entre 2016 et la fin de la période d’enquête. La part de marché de l’industrie de l’Union a diminué pendant toute la période considérée, passant de 64 % à 58 %. Cette baisse doit être replacée dans le contexte de l’augmentation de 5 % de la consommation dans l’Union et de l’augmentation des importations en provenance d’Égypte à des prix inférieurs et en baisse.

4.4.2.3.   Emploi et productivité

(135)

Sur la période considérée, l’emploi et la productivité ont évolué comme suit:

Tableau 8

Emploi et productivité

 

2016

2017

2018

PE

Nombre de salariés

3 620

3 636

3 661

3 686

Indice

100

100

101

102

Productivité (en tonnes par salarié)

194

191

189

189

Indice

100

99

98

97

Source: plaignant.

(136)

L’emploi et la productivité de l’industrie de l’Union sont restés stables tout au long de la période considérée.

4.4.2.4.   Importance du montant des subventions passibles de mesures compensatoires et rétablissement à la suite de pratiques antérieures de dumping ou de subvention

(137)

Étant donné que la Commission poursuit l’examen de certains régimes de subvention, il n’est pas possible à ce stade de déterminer l’ampleur exacte des subventions. Toutefois, sur la base du montant des subventions pour certains régimes déjà exposé ci-dessus et de la marge de subvention provisoire établie, les subventions ne peuvent pas être considérées comme négligeables.

(138)

Bien qu’il n’y ait pas d’antécédents de subventions ou de dumping de la part de l’Égypte, l’unique producteur-exportateur égyptien fait partie d’une société dont il a déjà été constaté qu’elle se livrait à des pratiques de dumping (et qu’elle recevait des subventions) dans un autre pays (la Chine). En fait, le groupe Jushi a annoncé qu’il construirait une usine en Égypte pour fabriquer des renforts en fibres de verre et les vendre sur le marché de l’Union européenne afin d’éviter de payer les droits antidumping et compensateurs applicables à ses exportations de renforts en fibres de verre depuis la Chine à destination de l’Union européenne. Une fois l’usine opérationnelle, les données exposées ci-dessus montrent que les importations en provenance d’Égypte à bas prix ont commencé à entrer sur le marché de l’Union et ont augmenté rapidement au cours de la période considérée.

(139)

Il faut donc s’attendre à ce que Jushi Egypt se livre aux mêmes pratiques que le groupe Jushi en Chine et continue à le faire.

4.4.3.   Indicateurs microéconomiques

4.4.3.1.   Prix et facteurs influençant les prix

(140)

Les prix de vente unitaires moyens pondérés des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon qui ont été facturés à des acheteurs indépendants dans l’Union ont évolué comme suit au cours de la période considérée:

Tableau 9

Prix de vente dans l’Union

 

2016

2017

2018

PE

Prix de vente unitaire moyen dans l’Union sur le marché total (en EUR/tonne)

1 167

1 123

1 139

1 136

Indice

100

96

98

97

Coût de production unitaire (en EUR/tonne)

1 035

1 027

1 086

1 107

Indice

100

99

105

107

Source: producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon.

(141)

Le prix de vente unitaire moyen pondéré des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon qui a été facturé à des acheteurs indépendants a diminué de 3 % au cours de la période considérée.

(142)

Toutefois, le coût de production unitaire des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon a progressé de 7 % au cours de la période considérée. Il est donc évident que les prix ne pouvaient pas être augmentés pour correspondre à la hausse des coûts de production.

4.4.3.2.   Coûts de la main-d’œuvre

(143)

Durant la période considérée, les coûts moyens de la main-d’œuvre des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon ont évolué comme suit:

Tableau 10

Coûts moyens de la main-d’œuvre par salarié

 

2016

2017

2018

PE

Coûts moyens de la main-d’œuvre par salarié (en EUR)

55 351

56 722

57 703

57 585

Indice

100

102

104

104

Source: producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon.

(144)

Les coûts moyens de la main-d’œuvre ont augmenté progressivement au cours de la période considérée.

4.4.3.3.   Stocks

(145)

Au cours de la période considérée, les niveaux de stocks des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon ont évolué comme suit:

Tableau 11

Stocks

 

2016

2017

2018

PE

Stocks de clôture (en tonnes)

80 078

63 974

86 975

95 397

Indice

100

80

109

119

Source: producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon.

(146)

Les stocks des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon ont augmenté au cours de la période considérée et ont atteint leur niveau le plus élevé au cours de la période d’enquête.

4.4.3.4.   Rentabilité, flux de liquidités, investissements, rendement des investissements et aptitude à mobiliser des capitaux

(147)

Au cours de la période considérée, la rentabilité, les flux de liquidités, les investissements et le rendement des investissements des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon ont évolué comme suit:

Tableau 12

Rentabilité, flux de liquidités, investissements et rendement des investissements

 

2016

2017

2018

PE

Rentabilité des ventes dans l’Union à des clients indépendants (en % du chiffre d’affaires)

12,6

10

7,4

5,2

Flux de liquidités (en EUR)

99 824 451

99 239 696

24 615 552

44 541 758

Indice

100

99

55

45

Investissements (en EUR)

17 532 291

34 598 499

52 191 829

42 018 578

Indice

100

197

298

240

Rendement des investissements (%)

18

15

10

7

Source: producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon.

(148)

La Commission a établi la rentabilité des trois producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon en exprimant le bénéfice net avant impôt tiré des ventes du produit similaire à des clients indépendants dans l’Union en pourcentage du chiffre d’affaires généré par ces ventes. La rentabilité est basée sur le coût des produits vendus.

(149)

La rentabilité a considérablement chuté au cours de la période considérée, de 7 points de pourcentage, soit plus de la moitié.

(150)

Malgré de faibles niveaux de bénéfice, l’industrie de l’Union a généré un flux de liquidités positif dans le cadre de ses activités tout au long de la période considérée

(151)

L’industrie de l’Union a continué à investir pendant la période considérée. Les investissements ont augmenté au cours de la période considérée, ce qui n’est pas surprenant, étant donné que l’industrie des renforts en fibres de verre a besoin d’investissements constants pour reconstruire les fours.

(152)

Le rendement des investissements est le bénéfice exprimé en pourcentage de la valeur comptable nette des investissements. Le rendement des investissements était faible mais positif, étant donné que l’industrie était rentable.

(153)

Les résultats financiers de l’industrie de l’Union en termes de bénéfices durant la période d’enquête ont toutefois limité sa capacité à mobiliser des capitaux.

4.4.4.   Conclusion concernant le préjudice

(154)

On constate, au cours de la période considérée, une augmentation rapide des quantités de renforts en fibres de verre importées d’Égypte, avec un triplement des volumes. Il convient de replacer cette évolution dans le contexte de l’augmentation de la consommation de l’Union, entraînant une perte de parts de marché pour l’industrie de l’Union.

(155)

Cette baisse de la part de marché, en particulier, alors que la consommation de l’Union augmente, constitue un signe clair de préjudice important. Lorsque la consommation dans l’Union augmente, l’industrie de l’Union devrait pouvoir être en mesure de maintenir la stabilité de sa part de marché et d’augmenter ses volumes de ventes.

(156)

Alors que la quantité produite est restée stable, les ventes et les prix de vente ont baissé. L’industrie de l’Union n’a pas pu réagir aux hausses de coûts par des hausses de prix et, par conséquent, alors que les coûts augmentaient, les bénéfices ont chuté, passant de 12 % en 2016 à 5 % pendant la période d’enquête.

(157)

La Commission note en particulier que l’industrie de l’Union a subi une dépression des prix manifeste au cours de la période considérée, étant donné que les importations de produits égyptiens à bas prix ont considérablement augmenté en quantité. En l’absence de telles importations, la Commission s’attend à ce que l’industrie de l’Union soit en mesure de répercuter les augmentations de coûts sur ses clients.

(158)

Une dépression des prix a également pu être observée sur la base de l’évolution du coût de production unitaire de l’industrie de l’Union par rapport à son prix de vente unitaire à des clients indépendants dans l’Union européenne et au prix à l’importation des renforts en fibres de verre en provenance d’Égypte.

(159)

La Commission a constaté que, par exemple, entre 2016 et 2017, les coûts des producteurs de l’Union ont reculé de 1 %, mais que le prix de vente de l’Union a diminué de 4 % pour faire face à la concurrence des produits en provenance d’Égypte (dont le prix à l’importation a chuté de 8 %).

(160)

Entre 2017 et 2018, les coûts des producteurs de l’Union ont progressé de 6 %, mais leurs prix de vente n’ont pu augmenter que de 2 %, étant donné que le prix à l’importation des produits en provenance d’Égypte a continué de baisser.

(161)

La Commission conclut donc provisoirement que l’industrie de l’Union a subi un préjudice important au cours de la période d’enquête.

5.   CAUSALITÉ

5.1.   Effets des importations faisant l’objet de subventions

(162)

La Commission a provisoirement conclu que l’industrie de l’Union avait subi un préjudice important au cours de la période d’enquête, compte tenu de la forte diminution des bénéfices et de la baisse de la part de marché. Ces évolutions négatives ont eu lieu dans le contexte d’une forte augmentation des importations en provenance d’Égypte à des prix toujours plus bas et inférieurs à ceux de l’industrie de l’Union, soumise à une pression sur les prix supplémentaire.

(163)

En outre, la Commission prend acte des éléments de preuve du dossier attestant que l’usine en Égypte a été ouverte par Jushi China dans le but explicite de vendre des renforts en fibres de verre sur le marché de l’Union sans le paiement des droits en vigueur sur les importations en provenance directe de Chine.

(164)

La Commission a donc considéré que les importations de renforts en fibres de verre faisant l’objet de subventions en provenance d’Égypte ont causé un préjudice important à l’industrie de l’Union.

5.2.   Autres facteurs connus

(165)

La Commission a également examiné si d’autres facteurs connus, individuellement ou collectivement, sont susceptibles d’affaiblir le lien de causalité établi entre les importations faisant l’objet de subventions et le préjudice provisoirement constaté, de sorte que ce lien ne serait plus réel et substantiel.

5.2.1.   Importations en provenance de pays tiers

(166)

Outre les importations en provenance d’Égypte, les importations en provenance de trois autres pays seulement, à savoir la Malaisie, la Chine et la Norvège, ont représenté une part de marché significative au cours de la période considérée. Le volume des importations en provenance d’autres pays tiers a évolué comme suit durant la période considérée:

Tableau 13

Importations en provenance de pays tiers

Pays

 

2016

2017

2018

PE

Malaisie

Volume (en tonnes)

98 446

111 373

114 325

102 896

 

Indice

100

113

116

105

 

Part de marché (%)

10

11

11

10

 

Prix moyen

930

941

986

976

Chine

Volume (en tonnes)

79 374

58 456

50 177

49 034

 

Indice

100

74

63

62

 

Part de marché (%)

8

6

5

5

 

Prix moyen

1 068

1 058

1 022

1 030

Norvège

Volume (en tonnes)

41 362

43 006

44 289

44 160

 

Indice

100

104

107

107

 

Part de marché (%)

4

4

4

4

 

Prix moyen

1 156

1 126

1 101

1 094

Tous les autres pays

Volume (en tonnes)

86 240

85 548

93 266

93 626

 

Indice

100

99

108

109

 

Part de marché (%)

9

8

9

9

 

Prix moyen

1 199

1 148

1 104

1 130

Source: base de données Surveillance 2.

(167)

Les importations en provenance de Chine font déjà l’objet de mesures antidumping et compensatoires et la part de marché de ces importations est en baisse, les importateurs remplaçant les renforts en fibres de verre d’origine chinoise par ceux d’origine égyptienne, en provenance du même groupe Jushi.

(168)

Les importations en provenance de Malaisie ont affiché une part de marché stable sur l’ensemble de la période considérée. Il n’existe en Malaisie qu’une seule usine, appartenant au groupe japonais NEG, qui possède aussi des usines dans l’Union. Cette usine n’exporte que des fils coupés à destination de l’Union européenne. La Commission a comparé le prix des fils coupés de la Malaisie aux prix des fils coupés dans l’Union et a constaté que les prix malaisiens n’étaient apparemment pas inférieurs à ceux de l’Union.

(169)

Les importations en provenance de Norvège ont enregistré une part de marché stable et faible (4 %) au cours de la période considérée et entrent dans l’Union à un prix élevé.

(170)

Les importations en provenance d’autres pays ont atteint une part de marché cumulée de 9 %, stable tout au long de la période considérée. Par conséquent, aucun de ces autres pays n’a pu avoir une influence significative sur les résultats de l’industrie de l’Union.

(171)

Sur la base de l’analyse ci-dessus, la Commission a conclu que les importations en provenance d’autres pays n’avaient eu aucune incidence sur la situation de l’industrie de l’Union au cours de la période d’enquête. En particulier, il n’existe aucune corrélation entre la baisse des performances de l’industrie de l’Union et la stabilité des parts de marché d’autres sources d’approvisionnement.

5.2.2.   Résultats à l’exportation de l’industrie de l’Union

(172)

Les données relatives aux exportations, fournies à la Commission par le plaignant, sont les suivantes:

Tableau 14

Résultats à l’exportation de l’industrie de l’Union

 

2016

2017

2018

PE

Volume d’exportation (en tonnes)

49 370

44 660

38 704

46 119

Indice

100

90

78

93

Ventes à l’exportation en pourcentage des ventes dans l’Union européenne (%)

8

7

6

8

Source: plaignant.

(173)

Le niveau des exportations de l’industrie de l’Union a été limité et est resté stable au cours de la période considérée. Il n’a pas dépassé 8 % de ses ventes au cours d’une année quelconque de la période considérée, comme indiqué dans le tableau ci-dessus.

(174)

Compte tenu de la faible participation des ventes à l’exportation dans les ventes totales de l’industrie de l’Union et du fait que ces ventes étaient pratiquement stables au cours de la période considérée, il a été constaté que les résultats à l’exportation de l’industrie de l’Union n’avaient pas contribué au préjudice subi par l’industrie de l’Union.

5.3.   Conclusions

(175)

La Commission a donc provisoirement conclu que les importations de renforts en fibres de verre faisant l’objet de subventions en provenance d’Égypte avaient causé un préjudice important à l’industrie de l’Union.

(176)

La Commission a déterminé et évalué d’autres facteurs susceptibles d’avoir contribué au préjudice subi par l’industrie de l’Union, tels que les importations en provenance d’autres pays tiers et les résultats à l’exportation de l’industrie de l’Union. Toutefois, il a été constaté que ces autres facteurs n’avaient eu aucune incidence sur la situation de l’industrie de l’Union, que ce soit individuellement ou collectivement.

6.   INTÉRÊT DE L’UNION

(177)

Conformément à l’article 31 du règlement de base, la Commission a examiné si, malgré la constatation de l’existence de subventions préjudiciables, elle pouvait clairement conclure qu’il n’était pas dans l’intérêt de l’Union d’adopter des mesures compensatoires correspondant au montant total des subventions passibles de mesures compensatoires dans ce cas particulier. La Commission a déterminé l’intérêt de l’Union sur la base d’une analyse de tous les intérêts concernés, notamment ceux de l’industrie de l’Union, des importateurs et des consommateurs.

(178)

Les renforts en fibres de verre constituent un matériau important dans de nombreuses applications d’utilisateurs dans l’Union européenne.

(179)

Ils sont principalement utilisés comme matière première pour renforcer les résines thermoplastiques et thermodurcissables dans l’industrie des matériaux composites. Les renforts en fibres de verre représentent 10 % à 60 % du coût de fabrication des résines thermoplastiques et thermodurcissables, en fonction du produit final concerné. Ces dernières sont ensuite utilisées dans une large gamme d’applications par l’industrie en aval de l’Union. L’industrie de l’Union a fourni des renseignements sur le marché montrant qu’environ la moitié de ses ventes est destinée à la fabrication de thermoplastiques.

(180)

Les renforts en fibres de verre sont aussi utilisés comme principale matière première pour la fabrication de tissus en fibre de verre. Ils représentent un coût de production important pour la production de tissus en fibre de verre, à concurrence de 70 %. La Commission observe que des enquêtes antidumping et antisubventions sont en cours en ce concerne les importations de tissus en fibre de verre originaires de la République populaire de Chine et d’Égypte (14). À ce jour, aucune mesure n’a encore été instituée dans le cadre de ces procédures.

(181)

Les informations sur le marché communiquées par l’industrie de l’Union ont montré qu’actuellement, jusqu’à 20 % des renforts en fibres de verre produits par l’industrie de l’Union servent à fabriquer des tissus en fibre de verre. Toutefois, ces informations ont aussi montré qu’un pourcentage plus élevé d’importations de produits chinois, ainsi que d’importations en provenance d’autres pays, était destiné à cette application.

(182)

Afin d’évaluer l’intérêt de l’Union, la Commission a analysé la position de l’industrie de l’Union, qui affiche des taux d’utilisation des capacités très élevés et qui, à court terme, ne serait pas en mesure de répondre à des signaux du marché de grande ampleur, et d’éventuelles autres sources d’approvisionnement non concernées par les mesures en vigueur. Cette analyse est développée aux considérants 154, 170 et 176.

6.1.   Intérêt de l’industrie de l’Union

(183)

La Commission a constaté que l’industrie de l’Union subit un préjudice important et que ce préjudice est causé par les importations de renforts en fibres de verre en provenance d’Égypte.

(184)

La Commission observe que l’industrie affiche des taux d’utilisation des capacités très élevés, ce qui limite la possibilité de nouvelles augmentations de production. L’institution de mesures à l’égard de l’Égypte devrait toutefois permettre à l’industrie d’installer les capacités supplémentaires nécessaires pour approvisionner le marché de l’Union.

(185)

Comme la Commission l’a constaté lors de l’enquête précédente portant sur les importations de renforts en fibres de verre originaires de Chine, l’institution de mesures sur les importations déloyales permet à l’industrie d’investir dans des augmentations de capacité (15).

(186)

Compte tenu de l’existence d’un préjudice important subi par l’industrie de l’Union et du fait que ce préjudice important est causé par des importations faisant l’objet de subventions en provenance d’Égypte, la Commission a donc provisoirement conclu que l’institution de mesures serait dans l’intérêt de l’industrie de l’Union.

6.2.   Intérêt des importateurs indépendants

(187)

Les importateurs qui ont coopéré à l’enquête se sont opposés à l’institution de mesures, étant donné que cela restreindrait les sources de renforts en fibres de verre entrant sur le marché. Ils ont également soulevé la question de la certification de nouvelles sources de renforts en fibres de verre et de la complexité de cette procédure, qui est telle que certains de leurs clients continuent d’exiger les produits importés de Chine — quitte à payer le droit — étant donné que la société concernée est certifiée pour être utilisée par leurs clients.

(188)

La Commission a constaté que les importateurs continuaient d’importer des produits de Chine malgré des droits en vigueur plus élevés que ceux qui devraient être institués sur les sources égyptiennes. Par conséquent, l’institution de droits sur les importations de renforts en fibres de verre en provenance d’Égypte ne mettrait pas nécessairement un terme à toutes les importations entrant dans l’Union.

(189)

La certification des sources de renforts en fibres de verre est clairement un sujet de préoccupation pour certains utilisateurs de ce produit. Dans de nombreux secteurs, ce n’est toutefois pas le cas et, lorsque c’est nécessaire, on constate que les importations se poursuivent avec le paiement de droits. Bien entendu, l’institution de droits sur les importations certifiées augmentera leurs coûts, mais aucun élément du dossier ne montre que cette augmentation ne peut pas être répercutée sur le client final, qui a lui-même demandé des renforts en fibres de verre particuliers provenant d’un fournisseur spécifique.

(190)

La Commission s’est rendue dans les locaux de deux importateurs de renforts en fibres de verre qui s’approvisionnaient auprès de diverses sources dans le monde et revendaient ensuite le produit sans transformation. Pour un importateur, les renforts en fibres de verre constituaient une très petite partie de son activité (moins de 1 %); les droits institués sur les importations en provenance d’Égypte auraient donc un effet négligeable sur ses résultats.

(191)

Dans le cas de l’autre importateur, ce produit représentait une part plus importante de ses activités avec des marges bénéficiaires très faibles. Pour cet importateur, compte tenu de ses très faibles marges, toute augmentation de prix entraînerait donc des pertes éventuelles si elle ne pouvait être répercutée sur ses clients. Toutefois, cet importateur avait déjà été confronté à ce problème, lorsque la Commission avait institué des droits plus élevés sur les importations de renforts en fibres de verre originaires de Chine.

(192)

La Commission a donc conclu que l’institution de droits ne serait pas dans l’intérêt des importateurs au motif qu’elle augmenterait leurs coûts.

6.3.   Intérêt des utilisateurs

(193)

Plusieurs parties intéressées se sont manifestées et ont fait part de leur point de vue sur l’intérêt, pour les utilisateurs, de l’institution de mesures dans le cadre de la présente enquête, principalement en envoyant des lettres types qui ne contenaient pas de preuves de leurs affirmations.

(194)

Certaines parties intéressées ont envoyé une lettre type à l’appui des mesures, afin de conserver l’industrie de l’Union en tant que fournisseur, tandis que d’autres ont envoyé une lettre type qui s’opposait aux mesures, afin de ne pas subir de hausse de coûts. À la suite de l’analyse de ces lettres types, il s’avère qu’elles émanaient de distributeurs de renforts en fibres de verre dans l’Union européenne ou de fournisseurs de l’industrie de l’Union.

(195)

Toutefois, la Commission a effectivement reçu des observations de la part des utilisateurs de renforts en fibres de verre dans l’Union, exprimant leur point de vue sur l’enquête.

(196)

Un groupe d’utilisateurs, qui a souhaité rester anonyme pour éviter tout risque de conséquences négatives dans ses relations commerciales, a été entendu par la Commission et a déclaré que les mesures ne seraient pas dans l’intérêt de l’Union.

(197)

La Commission a pris note de la question de la certification de certains renforts en fibres de verre fabriqués dans certaines usines lorsqu’elle s’est rendue dans les locaux des utilisateurs. Ceux-ci ont fait remarquer que certains utilisateurs sont obligés d’utiliser des renforts en fibres de verre particuliers, en provenance d’une usine spécifique, que des droits soient applicables ou non.

(198)

Si des mesures sont instituées sur les renforts en fibres de verre en provenance d’Égypte et que l’utilisateur est tenu de recourir à ces produits en particulier dans le cadre de leur traitement ultérieur, cela se traduira pour lui par une augmentation des coûts qu’il pourrait ne pas être en mesure de répercuter sur ses clients.

(199)

Le groupe d’utilisateurs anonymes a fait observer que les fibres de verre sont un ingrédient critique du point de vue de la qualité et que certains systèmes de qualité actuels, par exemple pour les thermoplastiques destinés à l’industrie automobile, rendraient nécessaire une nouvelle procédure d’approbation si l’utilisateur devait changer de fournisseur.

(200)

Le même groupe a également affirmé que, même si un utilisateur a différents fournisseurs, il continuera de s’adresser à un fournisseur spécifique pour un composé spécifique.

(201)

Dans le cas des utilisateurs qui fabriquent d’autres thermoplastiques, les clients sont moins sensibles à la source de la matière première, étant donné que les renforts en fibres de verre sont mélangés à de la résine et servent à renforcer le thermoplastique, au lieu de rester relativement inchangés, comme c’est le cas pour la production de tissus en fibre de verre.

(202)

Bien que les renforts en fibres de verre représentent jusqu’à 60 % du coût de fabrication, d’autres sources de ce produit qui ne sont pas soumises à des droits sont aisément disponibles, à savoir la Malaisie et la Norvège. Toutefois, compte tenu de la hausse des prix que les mesures entraîneraient, l’utilisateur dans les locaux duquel la Commission s’est rendue s’est déclaré opposé à l’institution de mesures. Tous les utilisateurs de thermoplastique qui ont formulé un avis étaient opposés à l’institution de mesures.

(203)

Les utilisateurs qui fabriquent des tissus en fibre de verre se trouvent dans une position totalement différente, étant donné que les renforts en fibres de verre constituent la matière première pour la production de ces tissus. La Commission s’est rendue dans les locaux d’un producteur de tissus en fibre de verre et d’un utilisateur de renforts en fibres de verre qui ont demandé à rester anonymes aux fins de la présente enquête. Ils s’opposent aux mesures parce que lorsque des droits ont été institués sur les renforts en fibres de verre en provenance de Chine, les prix des matières premières ont augmenté de 10 %, mais ils n’ont pas été en mesure de répercuter cette hausse sur leurs clients.

(204)

Quatre utilisateurs de tissus de fibre de verre qui ont formulé un avis étaient opposés à l’institution de mesures. Toutefois, la Commission constate que l’un des producteurs de renforts en fibres de verre de l’Union retenus dans l’échantillon, Owens Corning, est un producteur intégré qui fabrique également des tissus de fibre de verre dans l’Union. Il est favorable aux mesures sur les importations de renforts en fibres de verre et de tissus en fibre de verre en provenance d’Égypte.

(205)

Toutefois, la Commission a également reçu des observations de la part de deux autres fabricants de tissus de fibre de verre, qui étaient favorables à l’institution de mesures sur les renforts en fibres de verre en provenance d’Égypte pour protéger l’ensemble de la chaîne de valeur en Europe et également pour encourager la R&D.

(206)

Étant donné que les renforts en fibres de verre constituent la principale matière première du produit fini des utilisateurs, il faut en conclure que les mesures ne seraient pas dans leur intérêt puisqu’elles augmenteraient les coûts pour les utilisateurs. Toutefois, les mesures seraient dans l’intérêt de groupes intégrés utilisant les renforts en fibres de verre qu’ils produisent eux-mêmes.

(207)

Dans l’ensemble, compte tenu des autres sources d’approvisionnement disponibles non soumises à des mesures, étant donné qu’un utilisateur intégré était en faveur de mesures et qu’aucun élément de preuve n’indique clairement que les utilisateurs ne pourraient pas absorber les coûts supplémentaires liés aux mesures instituées sur les importations en provenance d’Égypte, la Commission a conclu que les effets négatifs sur les utilisateurs ne montraient pas clairement qu’il n’était pas dans l’intérêt de l’Union d’appliquer les mesures.

6.4.   Effets de distorsion des échanges des subventions/rétablissement d’une concurrence effective

(208)

Conformément à l’article 31, paragraphe 1, du règlement de base, une attention particulière est accordée à la nécessité d’éliminer les effets de distorsion des échanges d’une subvention préjudiciable et de restaurer une concurrence effective.

(209)

L’enquête a établi que Jushi Egypt vend des quantités importantes de renforts en fibres de verre faisant l’objet de subventions à des prix artificiellement bas sur le marché de l’Union. Si cette situation persiste, Jushi Égypte conservera son avantage concurrentiel déloyal, ce qui aggravera encore la situation déjà vulnérable de l’industrie de l’Union. En conséquence, les effets de distorsion des échanges des importations en provenance d’Égypte faisant l’objet de subventions augmenteront au fil du temps et ces importations continueront à priver l’industrie de l’Union de conditions de concurrence équitables.

6.5.   Conclusion concernant l’intérêt de l’Union

(210)

Des mesures sont clairement dans l’intérêt de l’industrie de l’Union. Il y a une incidence négative limitée sur les importateurs et les utilisateurs, en particulier sur les producteurs de tissus en fibre de verre, qui constituent le groupe le plus vulnérable, compte tenu de la proportion élevée que représentent les renforts en fibres de verre dans leurs coûts de production.

(211)

Toutefois, la Commission observe qu’il existe d’autres sources de renforts en fibres de verre non soumises à des mesures. La Commission prend également note de l’innovation considérable dont a fait preuve l’industrie de l’Union ces dernières années, et constate que les producteurs de l’Union travaillent avec leurs utilisateurs pour produire ce qu’ils demandent, selon leurs propres spécifications individuelles. Une telle innovation serait menacée en cas de persistance du préjudice.

(212)

La Commission a pris note des observations en ce qui concerne les processus de certification et d’approbation, mais l’institution de mesures vise à garantir des conditions de concurrence équitables pour tous les opérateurs et, par conséquent, les utilisateurs peuvent continuer à importer d’Égypte les renforts en fibres de verre certifiés ou approuvés en payant un prix de marché équitable.

(213)

À la lumière de ce qui précède, la Commission a provisoirement conclu qu’il n’existait aucune raison impérieuse de penser qu’il n’était pas dans l’intérêt de l’Union d’instituer des mesures compensatoires correspondant au montant total des subventions passibles de mesures compensatoires sur les importations de renforts en fibres de verre originaires d’Égypte.

7.   MESURES COMPENSATOIRES PROVISOIRES

(214)

Sur la base des conclusions établies par la Commission concernant les subventions, le préjudice important, le lien de causalité et l’intérêt de l’Union et conformément à l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base, il y a lieu d’instituer un droit compensateur provisoire sur les importations de renforts en fibres de verre originaires d’Égypte.

7.1.   Mesures provisoires

(215)

Il convient d’instituer des mesures compensatoires provisoires sur les importations de renforts en fibres de verre originaires d’Égypte, conformément aux règles énoncées à l’article 12, paragraphe 1, du règlement de base, qui dispose que le droit provisoire correspond au montant total des subventions passibles de mesures compensatoires établi à titre provisoire.

(216)

Compte tenu de ce qui précède, les taux du droit compensateur provisoire, exprimés en pourcentage du prix CIF frontière de l’Union, avant dédouanement, s’établissent comme suit:

Tableau 15

Taux de droit provisoires

Société

Droit compensateur provisoire

Jushi Egypt for Fiberglass Industry S.A.E.

8,7 %

Toutes les autres sociétés

8,7 %

(217)

Le taux individuel de droit compensateur mentionné dans le présent règlement a été établi sur la base des conclusions de la présente enquête. Il reflète donc la situation constatée pour le seul producteur-exportateur pendant la présente enquête. Ces taux de droit s’appliquent exclusivement aux importations du produit concerné originaire du pays concerné et fabriqué par l’entité juridique citée.

(218)

Il convient que les importations du produit concerné qui a été fabriqué par toute autre société dont le nom n’est pas spécifiquement mentionné dans le dispositif du présent règlement, y compris les entités liées aux sociétés spécifiquement mentionnées, soient soumises au taux de droit applicable à «toutes les autres sociétés». Ces importations ne devraient pas être soumises au taux de droit compensateur individuel.

(219)

La société peut solliciter l’application du taux individuel de droit compensateur si elle change de raison sociale ultérieurement. Une telle demande doit être adressée à la Commission (16). Elle doit contenir toutes les informations nécessaires permettant de démontrer que ce changement n’a pas d’effet sur le droit de la société à bénéficier du taux qui lui est applicable. Si le changement de raison sociale de la société n’affecte pas le droit de celle-ci à bénéficier du taux de droit qui lui est applicable, un avis signalant le changement de raison sociale sera publié au Journal officiel de l’Union européenne.

8.   ENREGISTREMENT

(220)

Comme indiqué au considérant 9 ci-dessus, la Commission a soumis à enregistrement les importations de renforts en fibres de verre au cours de la période de notification préalable conformément aux dispositions de l’article 24, paragraphe 5 bis, du règlement de base, en publiant le règlement relatif à l’enregistrement.

(221)

Le règlement relatif à l’enregistrement ne prévoit l’enregistrement des importations que pendant les trois semaines suivant la notification préalable. L’enregistrement prendra fin dès l’entrée en vigueur du présent règlement.

(222)

Aucune décision concernant une éventuelle application rétroactive des mesures compensatoires n’a été prise à ce stade de la procédure. Cette décision sera prise au stade définitif.

9.   INFORMATIONS AU STADE PROVISOIRE

(223)

Conformément à l’article 29 bis du règlement de base, la Commission a informé les parties intéressées de l’institution prévue de droits provisoires. Ces informations ont également été mises à la disposition du grand public via le site web de la DG Commerce.

(224)

Les parties intéressées ont eu trois jours ouvrables pour soumettre des observations concernant l’exactitude des calculs qui leur ont été spécifiquement communiqués.

(225)

La Commission a reçu des observations de la part de Jushi Egypt. Celles-ci ne portaient toutefois pas sur l’exactitude du calcul. Par conséquent, le droit compensateur provisoire demeure inchangé.

10.   DISPOSITIONS FINALES

(226)

Dans l’intérêt d’une bonne administration, la Commission invitera les parties intéressées à présenter leurs observations écrites et/ou à demander à être entendues par la Commission et/ou le conseiller-auditeur dans le cadre des procédures commerciales dans un délai déterminé.

(227)

Les conclusions relatives à l’institution de droits provisoires sont temporaires et pourront être modifiées au stade définitif de l’enquête,

A ADOPTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT:

Article premier

1.   Un droit compensateur provisoire est institué sur les importations de fils coupés en fibres de verre d’une longueur n’excédant pas 50 mm, de stratifils (rovings) en fibre de verre, à l’exclusion des stratifils en fibre de verre imprégnés et enrobés ayant une perte au feu supérieure à 3 % (déterminée conformément à la norme ISO 1887), et de mats en filaments de fibre de verre, à l’exclusion des mats en laine de verre, relevant actuellement des codes NC 7019 11 00, ex 7019 12 00, 7019 31 00 (codes TARIC 7019120022, 7019120025, 7019120026 et 7019120039) et originaires d’Égypte.

2.   Les taux du droit compensateur provisoire applicables au prix net franco frontière de l’Union, avant dédouanement, s’établissent comme suit pour le produit décrit au paragraphe 1 et fabriqué par les sociétés énumérées ci-après:

Société

Droit compensateur provisoire

Code additionnel TARIC

Jushi Egypt for Fiberglass Industry S.A.E.

8,7 %

C540

Toutes les autres sociétés

8,7 %

C999

3.   La mise en libre pratique, dans l’Union, du produit visé au paragraphe 1 est subordonnée au dépôt d’une garantie équivalente au montant du droit provisoire.

4.   Sauf indication contraire, les dispositions en vigueur en matière de droits de douane sont applicables.

Article 2

1.   Les parties intéressées présentent par écrit leurs observations concernant le présent règlement à la Commission dans un délai de 15 jours civils suivant la date d’entrée en vigueur du présent règlement.

2.   Les parties intéressées demandent à être entendues par la Commission dans un délai de 5 jours civils à compter de la date d’entrée en vigueur du présent règlement.

3.   Les parties intéressées demandent à être entendues par le conseiller-auditeur dans le cadre des procédures commerciales dans un délai de 5 jours civils à compter de la date d’entrée en vigueur du présent règlement. Le conseiller-auditeur examine les demandes présentées en dehors de ce délai et peut décider de les accepter le cas échéant.

Article 3

1.   Les autorités douanières sont invitées à lever l’enregistrement des importations instauré conformément à l’article 1er du règlement d’exécution (UE) 2020/199.

2.   Les données collectées au sujet de produits qui sont entrés dans l’Union pour la mise à la consommation 3 semaines au plus avant la date d’entrée en vigueur du présent règlement sont conservées jusqu’à l’entrée en vigueur d’éventuelles mesures définitives ou jusqu’à la clôture de la présente procédure.

Article 4

Le présent règlement entre en vigueur le jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre.

Fait à Bruxelles, le 5 mars 2020.

Par la Commission

La présidente

Ursula VON DER LEYEN


(1)  JO L 176 du 30.6.2016, p. 55.

(2)  JO C 192 du 7.6.2019, p. 30.

(3)  JO C 151 du 3.5.2019, p. 4.

(4)  JO C 48 du 12.2.2020, p. 18.

(5)  Règlement d’exécution (UE) 2020/199 de la Commission du 13 février 2020 soumettant à enregistrement les importations de produits de fibre de verre à filament continu originaires d’Égypte (JO L 42 du 14.2.2020, p. 10).

(6)  La société A a demandé l’anonymat au motif qu’elle s’exposerait à un risque important de représailles commerciales si certains producteurs avaient l’impression qu’elle agissait d’une manière contraire à leurs intérêts.

(7)  Voir décret no 35 du président de la République arabe d’Égypte du 15.2.2003.

(8)  Décret no 330 du président de la République arabe d’Égypte de 2015 sur l’établissement de la zone économique du canal de Suez, 19 août 2015.

(9)  En juillet 2016, l’Égypte a remplacé la «taxe générale sur les ventes» par la TVA. Bien qu’il existe certaines différences entre ces régimes fiscaux, tous deux autorisent les producteurs de biens à déduire la taxe précédemment acquittée, ce qui leur permet d’accumuler des crédits lorsque le montant de la taxe payée dépasse le montant perçu auprès des clients, notamment dans le cas des sociétés axées sur l’exportation.

(10)  Article 22, loi no 67/2016.

(11)  En effet, la majorité des créances de TVA ou d’autres impôts indirects déclarées dans les rapports annuels de 2016 à 2018 font référence à des achats à l’étranger soumis à la taxe générale sur les ventes de 10 %, en vigueur jusqu’en juillet 2016.

(12)  Plusieurs publications internationales sur les questions fiscales confirment que le remboursement de la TVA payée d’avance en Égypte est extrêmement difficile (LIEN). Le rapport «Doing Business in Egypt 2020» de la Banque mondiale classe l’Égypte au 156e rang sur 190 en matière fiscale.

(13)  Base de données des produits spécifiques sous «surveillance» ou contrôle importés sur le territoire douanier de l’Union, tenue à jour par la direction générale Fiscalité et union douanière.

(14)  Avis d’ouverture de la procédure antidumping (JO C 68 du 21.2.2019, p. 29); avis d’ouverture de la procédure antisubventions (JO C 167 du 16.5.2019, p. 11).

(15)  Règlement d’exécution (UE) 2017/724 de la Commission (JO L 107 du 25.4.2017, p. 4), considérant 149.

(16)  Commission européenne, direction générale du commerce, direction H, rue de la Loi 170, 1040 Bruxelles, Belgique.


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