EUR-Lex Access to European Union law

Back to EUR-Lex homepage

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 32002D0541

Décision de la Commission du 9 avril 2002 concernant l'utilisation des aides d'État destinées à l'industrie houillère en France pour les années 1994 à 1997 (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) [notifiée sous le numéro C(2002) 1329]

OJ L 176, 5.7.2002, p. 26–42 (ES, DA, DE, EL, EN, FR, IT, NL, PT, FI, SV)

Legal status of the document In force

ELI: http://data.europa.eu/eli/dec/2002/541/oj

32002D0541

Décision de la Commission du 9 avril 2002 concernant l'utilisation des aides d'État destinées à l'industrie houillère en France pour les années 1994 à 1997 (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) [notifiée sous le numéro C(2002) 1329]

Journal officiel n° L 176 du 05/07/2002 p. 0026 - 0042


Décision de la Commission

du 9 avril 2002

concernant l'utilisation des aides d'État destinées à l'industrie houillère en France pour les années 1994 à 1997

[notifiée sous le numéro C(2002) 1329]

(Le texte en langue française est le seul faisant foi.)

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

(2002/541/CECA)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l'acier, et notamment son article 4, point c),

vu la décision n° 3632/93/CECA de la Commission du 28 décembre 1993 relative au régime communautaire des interventions des États membres en faveur de l'industrie houillère(1),

après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations conformément à l'article 88 du traité CECA(2), et vu ces observations,

considérant ce qui suit:

I. PROCÉDURE

(1) Le 26 août 1997, cinq entreprises françaises, Thion & Cie, Maison Balland Brugneaux, Société Nouvelle Vinot Postry, Établissements Lekieffre, et Charbogard (ci-après dénommés "les plaignants") ont déposé auprès de la Commission une plainte dirigée contre l'entreprise Charbonnages de France.

(2) La plainte allègue un détournement des aides d'État que la France octroie sur une base annuelle à Charbonnages de France, après autorisation de la Commission, dans le cadre de la décision n° 3632/93/CECA. Elle vise à dénoncer la vente de houille, par le groupe Charbonnages de France, à un prix généralement inférieur à celui pratiqué sur le marché mondial et interdisant donc toute concurrence. Ce prix ne serait rendu possible que par l'utilisation, à des fins non autorisées, des aides d'État accordées par la France à Charbonnages de France pour le soutien de sa production de houille. Cette pratique entraînerait, selon les plaignants, des distorsions de concurrence sur le marché français du charbon importé destiné au secteur industriel, résidentiel et tertiaire. Les plaignants appuient plus particulièrement leur argumentation sur les dispositions de la décision n° 3632/93/CECA.

(3) À la suite de cette plainte, et afin d'en vérifier le bien-fondé, la Commission a requis des plaignants des informations complémentaires. Deux annexes à la plainte ont été déposées par les plaignants, le 19 février 1998 et le 19 octobre 1998.

(4) Les services de la Commission ont eu des entretiens avec des représentants de Charbonnages de France et des autorités françaises. Des rencontres ont eu lieu les 22 janvier, 15 septembre et 2 octobre 1998. Enfin, la France a également été informée par les services de la Commission, par lettre du 26 novembre 1998, des infractions éventuelles au droit communautaire résultant des éléments de la plainte.

(5) Les informations fournies par les autorités françaises n'ont pas permis d'infirmer les allégations des plaignants. La Commission a dès lors adressé au gouvernement français, le 9 février 1999, une lettre de mise en demeure reprenant les éléments de la plainte et les principes juridiques qui pouvaient avoir été enfreints(3). La Commission demandait à la France de présenter les arguments pertinents qui permettraient, le cas échéant, de conclure à la compatibilité des aides en faveur de Charbonnages de France. La France a répondu à la lettre de mise en demeure de la Commission par lettre du 8 avril 1999.

(6) La lettre de mise en demeure de la Commission portait sur les aides en faveur de l'industrie houillère française autorisées par les décisions 95/465/CECA(4), 95/519/CECA(5) et 96/458/CECA(6) de la Commission, pour les années 1994, 1995 et 1996 respectivement. La Commission avait également évalué le montant des aides présumées incompatibles pour l'année 1997. Les aides relatives à cette dernière année, notifiées par la France le 31 juillet 1997, ont été autorisées par la décision 2001/85/CECA de la Commission(7), sous réserve toutefois d'un montant de 35 millions de francs français (FRF) sur lequel la Commission doit statuer au terme de l'examen de la plainte faisant l'objet de la présente décision. Le montant total des aides présumées incompatibles pour ces quatre années a été évalué à 209,9 millions de FRF. Ce montant ne préjuge pas de l'éventuelle incompatibilité de certains montants d'aide que l'État français a versés ou propose de verser à Charbonnages de France pour les années ultérieures. En outre, la décision de la Commission ne préjuge en rien des actions qui ont pu être intentées devant les juridictions nationales ou d'autres instances par les plaignants, concernant les agissements du groupe Charbonnages de France qui font l'objet de la présente décision ou d'autres agissements, éventuellement relatifs à des années antérieures à 1994. Elle statue sur la compatibilité de l'utilisation des aides d'État à l'industrie houillère au sein du groupe Charbonnages de France avec les dispositions de la décision n° 3632/93/CECA.

(7) Dans sa lettre de mise en demeure adressée à la France, la Commission a également mis les autres États membres et d'autres parties intéressées en demeure de lui présenter leurs observations. En réponse à cette consultation, le Royaume-Uni a émis, par lettre du 7 mai 1999, une série d'observations. Ces dernières ont été transmises à la France.

II. DESCRIPTION

II.1. Parties en présence

(8) Les plaignants exercent une activité d'importation et de revente de charbon sur le marché français.

(9) Charbonnages de France est un groupe qui comporte notamment trois établissements publics à caractère industriel et commercial. Il s'agit de l'établissement public à caractère industriel et commercial Charbonnages de France ("EPIC CdF"), des Houillères du Bassin de Lorraine ("HBL") et des Houillères de Bassin du Centre et du Midi ("HBCM").

(10) L'EPIC CdF a été créé par une loi de nationalisation du 17 mai 1946. Cette loi instaurait un monopole d'exploitation des mines de combustibles minéraux au profit de l'EPIC CdF et des houillères de bassin. Le décret n° 59-1036 du 14 septembre 1959 définit les attributions de ces organes. Selon l'article 27 du décret, l'EPIC CdF est un organisme de direction, de coordination, de contrôle et de participation. Il assure la direction d'ensemble des houillères de bassin, et détermine les règles générales d'accomplissement de leur mission. Il définit et met en oeuvre les structures juridiques et financières et assure la représentation des houillères de bassin auprès des pouvoirs publics et de tous organismes dont l'autorité s'exerce sur le plan national et international. Conformément à l'article 39 dudit décret, les houillères de bassin sont des organismes de production, d'exploitation et de vente ayant notamment pour mission de prendre en charge les entreprises ou les exploitations nationalisées et d'assurer l'exploitation des gisements. Les houillères de bassin sont tenues d'assurer l'équilibre financier de leur exploitation et peuvent dans ce cadre émettre des emprunts sous le contrôle et l'autorité de l'EPIC CdF.

(11) Les autres entités du groupe Charbonnages de France sont soumises à des régimes juridiques variés de droit privé. Le groupe comprend notamment un groupement d'intérêt économique, le GIE CdF Énergie ("CdF Énergie"), et la Société industrielle pour le développement de l'Énergie charbon et de la cogénération ("Sidec").

(12) CdF Énergie a le monopole de la vente de houille au sein du groupe Charbonnages de France. En effet, le groupement a plus particulièrement pour objet, dans le cadre du prolongement de l'activité économique de ses membres, d'assurer la totalité des ventes en France et à l'étranger des combustibles minéraux solides produits par ses membres et la totalité des ventes des autres combustibles minéraux solides que les membres destinent au marché français. Il assure ou fait assurer toutes les opérations d'achat de charbons importés, utilisés ou vendus en France par ses membres et les filiales contrôlées directement ou indirectement. Les HBL, les HBCM, l'EPIC CdF et une filiale appartenant en totalité au groupe Charbonnages de France, Filianor, participent au capital de CdF Énergie, respectivement à hauteur de 45,19 %, 25,95 %, 22,66 % et 6,20 %. Selon les informations communiquées par les autorités françaises le 8 avril 1999, une nouvelle société, CdF Énergie SA, a été créée au début de l'année 1999, la dissolution de CdF Énergie ayant par ailleurs été engagée à partir de cette date.

(13) Sidec est une société anonyme dont l'activité consiste à financer des projets d'unités de production de vapeur et d'électricité utilisant principalement comme combustible le charbon, et à exploiter ces installations. Au cours de la période considérée dans la présente décision, Charbonnages de France détenait, partiellement par l'intermédiaire d'une filiale du groupe, 56 % du capital de Sidec.

II.2. Marché concerné

(14) Selon les plaignants, le détournement présumé des aides versées à Charbonnages de France pour couvrir les pertes liées à l'exploitation houillère affecte les conditions de concurrence sur le marché de la distribution et de la vente de charbon aux consommateurs du secteur industriel, résidentiel et tertiaire, exclusion faite des consommations propres du groupe Charbonnages de France et des livraisons à l'entreprise Électricité de France et à la sidérurgie. Les consommations propres de Charbonnages de France, plus particulièrement pour la production d'électricité par la Société nationale d'électricité et de thermique (SNET), constituent en effet un marché auquel les plaignants n'ont pas accès. De même, les négociants opérant sur le territoire français ne fournissent pas de houille au secteur sidérurgique et à Électricité de France, qui s'approvisionnent directement auprès de producteurs ou passent par des traders opérant à un niveau international. Le marché décrit par les plaignants constitue par conséquent, au sein du marché du charbon-vapeur, un segment de marché caractérisé par des conditions de concurrence qui lui sont propres.

(15) Ce marché représentait, en 1995, 4 millions de tonnes de houille. Les ventes aux différents secteurs du marché défini au considérant 14 se répartissent comme suit:

>TABLE>

(16) Étant donné son statut de commissionnaire exclusif pour la commercialisation des combustibles minéraux solides produits au sein du groupe Charbonnages de France, la vente de la houille produite en France a été assurée en totalité par CdF Énergie. Des 2,4 millions de tonnes de charbon en provenance de pays tiers, 1 million de tonnes a été commercialisé par CdF Énergie et 1,4 million de tonnes par divers négociants, dont les plaignants. En 1997, ce marché a peu évolué et représentait 3,7 millions de tonnes dont 1,9 million de tonnes d'origine nationale et 1,8 million de tonnes en provenance de pays tiers.

II.3. Mesures contestées

II.3.a) Garantie de décote

(17) Sidec met à la disposition des clients industriels une installation de chaufferie au charbon. Le contrat prévoit que le financement, la réalisation, l'exploitation et la prise en charge de ces installations de production de vapeur ou de chaleur sont réalisés par Sidec. Les installations restent la propriété de Sidec jusqu'au terme du contrat, d'une durée de dix ou douze ans avec une faculté de renouvellement pour cinq ans, cette durée devant permettre de couvrir l'amortissement de l'investissement. Corrélativement à cette mise à disposition par Sidec, cette dernière assure l'approvisionnement en houille des installations mises à la disposition de ses contractants, houille qui lui est fournie par CdF Énergie qui dispose, au sein du groupe Charbonnages de France, d'une exclusivité pour la distribution de la houille.

(18) L'énergie produite est facturée par Sidec à ses clients sur la base des unités thermiques consommées. Le prix de vente de ces thermies est calculé en fonction de divers éléments, notamment: l'amortissement, la taxe professionnelle, les assurances, l'entretien, l'exploitation, le loyer et le prix des combustibles approvisionnés, en l'occurrence le charbon livré par CdF Énergie.

(19) En complément de ces prestations, le contrat entre Sidec et ses clients industriels prévoit une "garantie de décote". Cette clause a pour objet de garantir aux utilisateurs de l'énergie produite à partir de la houille le maintien sur la durée du contrat d'un prix compétitif, déterminé en fonction de combustibles concurrents, principalement le fuel. En d'autres termes, Sidec garantit à ses clients que le prix de vente de la thermie produite à partir de la houille sera toujours inférieur ou égal à celui de la thermie produite à partir du fuel. Les contrats prévoient une méthode de calcul permettant de déterminer ce dernier prix de référence.

(20) Selon les plaignants, le groupe Charbonnages de France aurait acquis, par ce mécanisme, une grande part du marché du charbon importé destiné au secteur industriel. Cette politique commerciale aurait en outre garanti, par la conclusion de contrats à long terme, la fidélité des clients. Sidec se serait ainsi assurée un marché représentant près d'un milliard de FRF d'installations de combustion.

(21) Cette garantie présupposait à l'origine des prix comparatifs sur le marché mondial de la houille et du fuel lourd à l'avantage de la houille. Les premiers contrats remontent en effet au début des années quatre-vingt qui ont été marquées par des prix du pétrole élevés. À partir du contre-choc pétrolier de 1986, la forte baisse du prix des produits pétroliers a obligé Sidec à mettre en oeuvre de manière durable les mécanismes de garantie de décote, dès lors que le prix de la thermie-fuel se révélait être plus compétitif. Selon les termes des contrats conclus par Sidec, la mise en oeuvre de la clause de garantie de décote impliquait une réduction des éléments variables du prix de la thermie produite à partir de la houille, et à titre principal du prix de ce combustible.

(22) CdF Énergie supporte la mise en oeuvre de cette garantie de décote qui conduit Sidec à diminuer le prix de la thermie-houille facturée à ses clients. Il ressort en effet des comptes de résultat de CdF Énergie que cette entité accorde des réductions importantes sur ses facturations de houille, une partie de ces réductions étant au bénéfice de Sidec. Les annexes aux bilans et comptes de résultat de cette dernière société mentionnent d'ailleurs expressément que Sidec consent à titre habituel, au profit de ses clients acheteurs de vapeur, des garanties de décote de prix charbon/hydrocarbures qui sont intégralement contre-garanties par CdF Énergie, sauf pour quelques contrats où Sidec supporte elle-même le coût de la mise en oeuvre de la garantie de décote.

>TABLE>

(23) Ces rabais importants accordés à Sidec amènent en fait CdF Énergie à vendre la houille, nationale et importée, à un prix inférieur aux cours internationaux des charbons industriels de même type vendus sur le marché concurrentiel (considérant 35). Ces rabais amènent par conséquent CdF Énergie à vendre de la houille à Sidec en dessous du niveau de ses coûts d'approvisionnement en charbon importé.

(24) L'EPIC CdF ristourne à son tour à CdF Énergie le montant des rabais accordés à Sidec dans le cadre de la mise en oeuvre de la garantie de décote. Ces montants apparaissent dans les comptes de résultat de CdF Énergie sous l'intitulé "compensation GD par CdF". Ces montants sont plus précisément repris en produits d'exploitation, ce qui démontre le caractère récurrent et habituel de cette pratique. Dans le compte de résultat de l'EPIC CdF, les montants apparaissent en charges exceptionnelles. Les annexes précisent qu'il s'agit de la "couverture par CdF de garanties de décote accordées aux clients du groupe dans le cadre de contrats de fidélisation au charbon (alors que le prix des énergies concurrentes se révèle moins élevé)(8)".

>TABLE>

II.3.b) Avances pour investissements commerciaux

(25) CdF Énergie fournit à certains de ses clients des prestations gratuites, telles que l'installation de systèmes de dépoussiérage ou l'aménagement de sites pour le stockage de la houille. Ces prestations sont liées à l'engagement d'achat par ces mêmes clients de charbon auprès de CdF Énergie et constituent par conséquent une pratique de fidélisation de ces derniers.

(26) Ces prestations gratuites ont été financées par l'EPIC CdF, par le biais d'avances versées à CdF Énergie qui s'élevaient, en 1994, à 33139626 FRF(9). Elles ont été maintenues au cours des années suivantes au sein de CdF Énergie.

(27) Il convient en outre de relever la mise à disposition gratuite à des clients de CdF Énergie d'installations de chaufferies, appelées "chaufferies-vitrines". Ces chaufferies-vitrines sont la propriété de CdF Énergie, et sont financées par l'EPIC CdF.

II.3.c) Avances permanentes

(28) Les membres de CdF Énergie contribuent financièrement par des avances permanentes au fonctionnement du GIE. Au début de l'année 1994, le montant de ces avances s'élevait à 20446728 FRF, soit 53586354 FRF qui représentent le montant total des avances des membres de CdF Énergie, diminués de 33139626 FRF qui représentent le montant des avances pour investissements commerciaux. Ces avances ont été maintenues au sein de CdF Énergie au cours des années ultérieures. Les avances permanentes ont été effectuées par les membres de CdF Énergie au prorata de leur quote-part dans le GIE.

(29) D'autres montants ont été inscrits, à partir de l'année 1994, au compte "avances des membres" du bilan de CdF Énergie. Selon la France, il s'agirait toutefois de montants liés au maintien des résultats positifs réalisés par CdF Énergie. En raison de la structure juridique de CdF Énergie, les résultats appartiennent aux membres fondateurs. Le maintien de la majeure partie des résultats dans l'entreprise a donc été constaté non pas sous la forme habituelle du poste de réserves, mais par la constitution du poste "avances des membres".

II.3.d) Charges de l'activité de négoce de charbon

(30) CdF Énergie dispose de deux activités que l'entreprise considère comme distinctes, en particulier dans sa comptabilité. D'une part, CdF Énergie commercialise des combustibles minéraux solides produits au sein du groupe Charbonnages de France, pour lesquels elle perçoit des commissions facturées aux filiales du groupe, et qui sont comptabilisées comme telles dans le compte de résultat(10). D'autre part, CdF Énergie dispose d'une activité de négoce de charbon. Cette activité donne lieu à l'inscription d'"achats de marchandises" et de "ventes de marchandises" dans le compte de résultat de CdF Énergie. Elle est liée à titre principal au négoce de charbon importé. CdF Énergie a adapté son compte de résultat suivant ces deux activités principales, à savoir l'activité de commissionnaire et l'activité de négoce(11).

(31) L'analyse des charges liées à ces deux activités(12) révèle que l'activité de négoce du charbon ne supporte pas la quote-part de frais de fonctionnement qu'elle implique chez tout autre opérateur. On constate en effet l'absence de certaines charges qui sont imputées en totalité sur l'activité de commissionnaire, au titre d'"autres charges de fonctionnement", et notamment les charges suivantes relatives à l'année 1995:

>TABLE>

Cette méthode d'affectation des charges de CdF Énergie aboutit, pour l'année 1995, à une perte importante dans le cadre de l'activité de commissionnaire et à un bénéfice dans le cadre de l'activité de négoce:

>TABLE>

II.4. Fondements de la mise en demeure

(32) Après examen de la plainte qui lui a été soumise, la Commission a considéré dans sa lettre de mise en demeure du 9 février 1999 que les mesures contestées décrites aux considérants 17 à 31 pouvaient avoir été financées par des aides d'État octroyées par la France pour le soutien de la production de houille. Selon la Commission, l'EPIC CdF n'aurait pas été en mesure de verser les compensations des garanties de décote et de financer des investissements commerciaux par des avances en l'absence des aides versées par l'État français. En effet, tant les comptes de l'EPIC CdF que les comptes consolidés du groupe Charbonnages de France présentent des pertes de plusieurs milliards de FRF par an. Seul un soutien public permet l'équilibre formel des bilans.

(33) Concernant les avances permanentes des membres de CdF Énergie, la Commission considère qu'elles contribuent financièrement au fonctionnement du GIE. Elles seraient financées au moins partiellement par les aides d'État octroyées pour la production houillère, dans la mesure où des membres de CdF Énergie, et plus particulièrement les deux houillères de bassin, perçoivent tous les ans de l'État, par l'intermédiaire de l'EPIC CdF, des subventions. Ainsi, les aides destinées à couvrir les pertes d'exploitation des houillères de bassin serviraient partiellement à financer, chaque année, des frais de fonctionnement de CdF Énergie.

(34) L'article 3 de la décision n° 3632/93/CECA impose un prix plancher qui doit être pris en compte pour le calcul des aides destinées à couvrir les pertes liées à l'exploitation de la houille, à savoir le prix de la houille sur les marchés internationaux. Il ressort en outre des termes de cette décision que les aides sont réservées exclusivement à la production de houille communautaire. Or, il semblerait que Sidec se soit approvisionnée auprès de CdF Énergie à un prix inférieur à celui du marché international, tant pour la houille communautaire que pour la houille importée. Cette pratique n'aurait été rendue possible que grâce aux aides octroyées par l'État pour la production de houille. Aussi, la Commission considère qu'il a pu y avoir, plus particulièrement par le truchement du mécanisme de garantie de décote, double infraction au droit communautaire. Ce mécanisme aurait non seulement permis de vendre de la houille sur le marché français à un prix inférieur à celui du marché international, mais il aurait également servi à subventionner la houille importée.

(35) La présomption de la Commission selon laquelle les prix de la houille vendue par CdF Énergie à Sidec, en 1994 et au cours des années suivantes, étaient inférieurs aux prix de la houille sur les marchés internationaux, repose notamment sur une analyse de données relatives à l'année 1993:

a) La Commission s'est basée notamment sur le rapport spécial des commissaires aux comptes de Sidec qui indiquait, pour l'exercice clos au 31 décembre 1993, que "l'approvisionnement auprès de CdF Énergie du charbon nécessaire à la production industrielle de Sidec, a donné lieu à facturation pour un montant de 164896299 FRF".

b) Il ressort de la plainte déposée par les plaignants que les quantités de houille fournies par CdF Énergie à Sidec devaient s'élever à environ 700000 tonnes en 1993. Il faut noter à cet égard que la France a indiqué, dans sa lettre du 8 avril 1999, que ces livraisons s'étaient élevées à 722300 tonnes pour l'année 1994, 741200 tonnes pour l'année 1995 et 720400 tonnes pour l'année 1996. Ces données confirment par conséquent le volume, estimé par les plaignants, de ces livraisons pour l'année 1993.

c) Compte tenu des données figurant aux points a) et b), on peut estimer que le prix moyen facturé par CdF Énergie à Sidec s'élevait en 1993 à environ 235,56 FRF la tonne de houille (164896299 FRF pour 700000 tonnes de houille). Ce prix moyen était nettement inférieur aux prix pratiqués sur les marchés internationaux pour le charbon-vapeur, qui s'élevaient en moyenne à 252,85 FRF pour l'année 1993(13). Les plaignants parviennent à la même conclusion en comparant les prix de la houille facturés par CdF Énergie à Sidec avec, notamment, les moyennes des prix publiés par le comité professionnel du pétrole ainsi que par l'INSEE (Institut national français de statistiques et d'études économiques).

(36) La Commission indique en outre que les aides d'État ne peuvent causer de distorsions de concurrence et de discriminations à l'intérieur de la Communauté. Or, concernant l'année 1993, la Commission a relevé que l'EPIC CdF a versé à CdF Énergie un montant de 50680000 FRF au titre de compensation des garanties de décote(14). Compte tenu du volume des ventes de houille facturées par CdF Énergie à Sidec, on peut estimer que la compensation versée à CdF Énergie au titre des garanties de décote s'est élevée à environ 72,40 FRF par tonne (50680000 FRF pour 700000 tonnes de houille, considérant 35). Il faut dès lors en conclure que le prix qui aurait été facturé par CdF Énergie en l'absence des rabais accordés à Sidec au titre des garanties de décote se serait élevé à 307,96 FRF la tonne, soit 235,56 FRF (montant effectivement facturé à Sidec, considérant 35), auquel s'ajoutent 72,40 FRF (montant du rabais correspondant à la garantie de décote). Ce prix de 307,96 FRF est nettement supérieur aux prix moyens de 252,85 FRF qui se pratiquaient sur les marchés internationaux au cours de l'année 1993. Par conséquent, les aides qui ont permis de financer les mesures contestées, et plus particulièrement la compensation des garanties de décote, seraient à l'origine d'un avantage concurrentiel des filiales du groupe Charbonnages de France par rapport aux plaignants importateurs de houille.

(37) Compte tenu de la situation du marché houiller et énergétique, aux niveaux français et mondial, la Commission a considéré qu'il existait de fortes présomptions que les conclusions auxquelles elle parvenait concernant les prix pratiqués par CdF Énergie au cours de l'année 1993, soient identiques pour les années 1994 et suivantes.

III. OBSERVATIONS DE LA FRANCE

(38) Selon les autorités françaises, les aides octroyées par l'État français pour la production de houille ont été affectées conformément aux décisions d'autorisation de la Commission. S'agissant des mesures contestées, elles auraient été financées sur les produits des activités du groupe Charbonnages de France qui dégagent des marges bénéficiaires ou des dividendes et qui contribuent à la formation du résultat consolidé du groupe.

(39) Au demeurant, les opérations effectuées par l'EPIC CdF, CdF Énergie et Sidec "ont été économiquement rationnelles et n'apparaissent pas critiquables au regard des règles relatives aux aides d'État". Concernant la mise à disposition gratuite de divers équipements aux acheteurs de houille, il s'agirait de prestations de services à caractère commercial, annexes aux prestations principales de ces opérateurs, et qui relèvent d'un comportement commercial normal. Quant aux avances permanentes de fonds effectuées par les membres de CdF Énergie, il s'agirait d'une procédure normale s'agissant d'un GIE, entité sans capital. Enfin, les autorités françaises estiment que la pratique de la garantie de décote n'est pas, en elle-même, contestable. "Lorsque les contrats ont été conclus, le prix élevé du fioul faisait apparaître la garantie de décote comme une garantie symbolique qui ne constituait pas un élément central de choix du prestataire." "Il convient en effet de replacer ce dossier dans le contexte du début des années quatre-vingt, marquées par des prix du pétrole élevés et par la recherche d'une diversification des ressources énergétiques." En outre, dès 1988, face au retournement de conjoncture des prix de l'énergie, CdF Énergie aurait essayé d'obtenir une renégociation des contrats afin de les rendre moins pénalisants pour le groupe.

(40) Les autorités françaises soulignent enfin que, contrairement à ce que prétend la Commission, les effets des mesures en cause sur la concurrence ont été très limités. Afin d'étayer cette thèse, la France estime que le marché des consommateurs du secteur industriel, résidentiel et tertiaire, exclusion faite des consommations propres du groupe Charbonnages de France et des livraisons à l'entreprise Électricité de France et à la sidérurgie, n'est pas le marché adéquat. Le marché devrait être étendu au charbonvapeur, de surcroît non limité au seul marché français dans la mesure où ce produit, sans caractéristiques spécifiques, peut être utilisé dans le monde entier. Il faudrait en outre, selon la France, étendre le marché considéré à d'autres sources d'énergie pouvant être utilisées aux mêmes fins que le charbon-vapeur, en l'occurrence le gaz et le fuel. Les parts de marché détenues par CdF Énergie sur ce marché étendu seraient en définitive très limitées.

IV. COMMENTAIRES DU ROYAUME-UNI

(41) Les autorités britanniques soulignent le manque de transparence dans le financement des activités du groupe Charbonnages de France. Les relations, plus particulièrement entre l'EPIC CdF, HBL, HBCM, CdF Énergie, Filianor et Sidec, permettent des subventions croisées entre les diverses activités du groupe, que ce soit par le biais de financements directs, ou par la fourniture de services gratuits.

(42) Selon le Royaume-Uni, les éléments relevés dans la mise en demeure de la Commission du 9 février 1999 tendent à confirmer le détournement d'une partie des aides, qui sont en principe destinées au soutien de la production de houille, à des fins non conformes à la décision n° 3632/93/CECA et aux décisions d'autorisation des aides adoptées par la Commission.

V. APPRÉCIATION

V.1. Appréciation de la nature d'aides d'État des mesures visées

(43) Dans sa lettre de mise en demeure du 9 février 1999, la Commission avait demandé à la France de lui présenter "un rapport sur le fonctionnement du dispositif commercial et financier" mis en oeuvre par Charbonnages de France. Ce rapport devait notamment contenir les éléments suivants:

a) l'origine des avances des membres de CdF Énergie;

b) l'origine des fonds qui ont permis à l'EPIC CdF de verser à CdF Énergie la compensation de la garantie de décote depuis 1994.

(44) Les autorités françaises ont indiqué que l'origine des avances des membres ne peut se trouver dans les aides ou subventions de l'État, qui étaient "spécifiquement affectées", mais dans les résultats bénéficiaires des filiales du groupe Charbonnages de France. La réponse des autorités françaises est identique concernant la couverture par l'EPIC CdF de la compensation de la garantie de décote: "Les opérations relatives à ces contrats comptabilisées dans l'EPIC CdF sont portées en Résultats exceptionnels et leur financement a été assuré par les résultats bénéficiaires des filiales de l'EPIC."

(45) La Commission constate que la France n'apporte aucun élément permettant d'étayer l'affirmation selon laquelle, d'une part, les aides autorisées par la Commission pour le soutien de la production houillère ont été "spécifiquement affectées" à cette fin et, d'autre part, les fonds qui ont financé les mesures contestées auraient pour origine les résultats bénéficiaires des filiales de Charbonnages de France. Concernant les aides autorisées par la Commission dans le cadre du secteur houiller, la France se borne à rappeler leur ventilation suivant les catégories d'aides prévues par la décision n° 3632/93/CECA. Cette ventilation, qui se retrouve dans les notifications annuelles des aides à l'industrie houillère par l'État français, ainsi que dans les décisions d'autorisation de la Commission, ne donne toutefois aucune indication quant à l'affectation réelle des aides par le bénéficiaire.

(46) Conformément à l'article 4 de la décision n° 3632/93/CECA, les autorités françaises rappellent que les aides à l'industrie houillère ont été affectées, pour partie, "à la couverture de l'écart entre le coût de production et le prix de vente des tonnages de houilles extraits". Le mécanisme de garantie de décote constitue un des éléments intervenant dans la valeur de cet écart, dans la mesure où, par l'octroi de rabais et de ristournes, il contribue à une diminution du prix de vente de la houille extraite par Charbonnages de France. Or il n'existe aucun élément qui permettrait de démontrer qu'une partie de cet écart serait couverte par les aides versées par l'État français, et qu'une autre partie de cet écart - correspondant à la diminution du prix de la houille du fait de la mise en oeuvre du mécanisme de garantie de décote - serait par contre couverte par des résultats bénéficiaires de certaines filiales du groupe Charbonnages de France. Il paraît, au contraire, tout à fait logique de considérer que la totalité des pertes liées à l'exploitation houillère en France, y compris les pertes liées à la diminution du prix de vente de la houille suite à la mise en oeuvre du mécanisme de garantie de décote, a été couverte par des aides d'État.

(47) Concernant les avances permanentes des membres de CdF Énergie, il faut rappeler qu'elles sont versées par les membres du GIE au prorata du niveau de participation de chacun d'eux. En d'autres termes, les deux houillères de bassin - HBL et HBCM - contribuent à elles seules à hauteur de 71,14 % au montant de ces avances. On ne perçoit pas comment ces deux entités chargées de l'exploitation des gisements houillers en France, exploitation qui génère plusieurs milliards de FRF de pertes par an, pourraient avoir financé les avances faites à CdF Énergie autrement qu'en les finançant avec des aides d'État octroyées précisément pour le soutien de la production de houille.

(48) La France invoque le fait que Charbonnages de France est un groupe industriel dont les comptes consolidés agrègent, en sus de l'activité d'extraction, d'autres activités qui dégagent des marges bénéficiaires ou des dividendes. La compensation de la garantie de décote aurait été financée par les produits de ces activités, qui contribuent à la formation du résultat consolidé du groupe Charbonnages de France à hauteur de plus de 500 millions de FRF chaque année.

(49) La Commission considère, dès lors que l'on évoque le concept de consolidation visant à présenter le résultat d'un groupe de sociétés comme si elles ne formaient qu'une seule entité, que le résultat des activités bénéficiaires devrait d'abord être imputé sur le résultat négatif des activités déficitaires du groupe. Par conséquent, si l'argument invoqué par la France devait être retenu, l'analyse des besoins en aides d'État destinées à couvrir les pertes liées à l'exploitation houillère devrait prendre en compte le résultat consolidé, c'est-à-dire après imputation de l'ensemble des produits du groupe consolidé sur l'ensemble des charges du même groupe. La position soutenue par la France est à cet égard incohérente. En effet, selon la France, la consolidation des comptes - et l'épongement consécutif du déficit de certaines filiales par le bénéfice d'autres filiales - ne s'appliquerait, pour ce qui concerne les pertes liées à la production de houille, qu'au seul déficit résultant de la compensation de la garantie de décote supportée par l'EPIC CdF.

(50) En outre, conformément aux termes de la lettre de mise en demeure de la Commission, il ressort clairement des comptes du groupe Charbonnages de France que l'EPIC CdF n'aurait pas été en mesure de verser les compensations de garantie de décote et de financer des investissements commerciaux par des avances en l'absence des aides versées par l'État français. En effet, tant les comptes de l'EPIC CdF que les comptes consolidés du groupe Charbonnages de France présentent des pertes de plusieurs milliards de FRF par an. Il ressort clairement des comptes de l'exercice 1995 que seul le soutien public permet l'équilibre formel des bilans. En effet, en 1995, le groupe Charbonnages de France avait réalisé un chiffre d'affaires consolidé de 8270 milliards de FRF. Le résultat net global consolidé de l'ensemble du groupe s'établissait à un montant négatif de 4167 milliards de FRF, soit plus de la moitié du chiffre d'affaires. Selon Charbonnages de France, la diminution progressive du concours de l'État "n'a pas permis au groupe, qui avait au cours des deux dernières années stabilisé son endettement financier, de maintenir cette évolution. L'endettement s'est donc en 1995 fortement accru, pour dépasser 29 milliards de FRF, générant des charges financières supplémentaires qui viennent à leur tour alourdir le résultat". La Commission considère dès lors que la poursuite des activités de Charbonnages de France et la survie du groupe sont dépendantes du versement des aides à l'industrie houillère par l'État français. Le financement des mécanismes visés ci-dessus ne peut dès lors qu'avoir eu pour origine ces aides.

(51) Au vu de ce qui précède, la Commission considère que les montants versés par l'EPIC CdF à CdF Énergie au titre de compensation des garanties de décote, montants qui ont été reversés par CdF Énergie à Sidec, soit 78494201 FRF, ont pour origine les aides versées par l'État français chaque année pour le soutien des pertes liées à l'exploitation houillère.

(52) La Commission considère également que les montants des investissements commerciaux financés par des avances consenties par l'EPIC CdF à CdF Énergie, soit 33139626 FRF, ont pour origine les aides versées par l'État français chaque année pour le soutien des pertes liées à l'exploitation houillère. Étant donné le caractère permanent de ces avances faites à CdF Énergie, le montant de 33139626 FRF doit être considéré, dans son ensemble, comme ayant pour origine les aides versées chaque année par la France.

(53) Enfin, la Commission considère que les avances permanentes versées à CdF Énergie, d'une part par l'EPIC CdF, et d'autre part par les deux houillères de bassin, HBL et HBCM, ont également pour origine les aides versées par l'État français pour le soutien des pertes liées à l'exploitation houillère. Les membres de CdF Énergie contribuent au fonctionnement du GIE à concurrence de leur niveau de participation. Il en ressort que les avances versées par l'EPIC CdF, HBL et HBCM correspondent à 93,8 % du total des avances versées par les membres de CdF Énergie, soit un total de 19179031 FRF. Etant donné le caractère permanent de ces avances faites à CdF Énergie, le montant de 19179031 FRF doit être considéré, dans son ensemble, comme ayant pour origine les aides versées chaque année par France.

V.2. Appréciation de la compatibilité des aides d'État

V.2.a) Aides à l'industrie houillère en France

(54) Conformément à l'article 8 de la décision n° 3632/93/CECA, la France a notifié à la Commission, le 9 décembre 1994, un plan de réduction d'activité correspondant aux options qui avaient été dégagées dans le cadre d'un pacte charbonnier national signé entre l'entreprise Charbonnages de France et les organisations syndicales. Ce plan de réduction d'activité prévoit l'arrêt progressif de l'extraction charbonnière à l'horizon 2005. La sévérité des problèmes sociaux et régionaux n'a pas permis aux autorités françaises de s'en tenir à l'horizon 2002 prévu par la décision n° 3632/93/CECA comme date d'échéance pour le plan de fermeture. L'étalement des opérations de fermeture sur une période de dix ans devrait permettre d'atténuer les problèmes sociaux et régionaux particulièrement sensibles dans des régions qui sont affectées depuis de nombreuses années par le recul de l'activité charbonnière. Dans sa décision 95/465/CECA, la Commission a considéré que le plan était conforme aux conditions et aux critères prévus par la décision n° 3632/93/CECA.

(55) Conformément à l'article 9 de la décision n° 3632/93/CECA, la France a notifié à la Commission le montant des aides qu'elle envisageait d'accorder annuellement à l'industrie houillère. La Commission a autorisé(15), pour les années 1994 à 1997, l'octroi d'aides à la réduction d'activité conformément à l'article 4 de la décision n° 3632/93/CECA, ainsi que l'octroi d'aides à la couverture de charges exceptionnelles conformément à l'article 5 de ladite décision. En outre, la Commission a autorisé, pour les années 1994 à 1996, l'octroi d'aides à la recherche et au développement conformément à l'article 6 de la décision n° 3632/93/CECA. Dans son examen, la Commission a évalué la conformité des mesures avec le plan de réduction d'activité tel que notifié à la Commission le 9 décembre 1994.

(56) Il convient dès lors d'examiner si les aides affectées dans le cadre de la mise en oeuvre du mécanisme de garantie de décote, des investissements commerciaux ainsi que des avances permanentes à CdF Énergie, répondent aux conditions et critères prévus par la décision n° 3632/93/CECA, et plus particulièrement aux termes des décisions 95/465/CECA, 95/519/CECA, 96/458/CECA et 2001/85/CECA. Si tel n'est pas le cas, la Commission devra en conclure que ces aides, ou une partie de ces aides, ont été affectées par Charbonnages de France à des fins contraires aux dispositions applicables en la matière.

(57) À cet égard, il ressort que les aides affectées dans le cadre des mécanismes contestés ne répondent en tout état de cause pas aux conditions fixées pour l'octroi des aides à la couverture de charges exceptionnelles. Elles ne répondent en effet à aucune des catégories de coûts visés à l'annexe de la décision n° 3632/93/CECA, ni plus particulièrement aux charges explicitement mentionnées dans les décisions de la Commission autorisant annuellement l'octroi par la France d'aides à l'industrie houillère. Les aides prévues à l'article 5 de la décision n° 3632/93/CECA sont en effet strictement limitées à la couverture de coûts qui ne sont pas en rapport avec la production courante (charges héritées du passé). Il est en outre évident que les aides octroyées dans le cadre de ces mécanismes ne répondent pas aux objectifs et aux critères prévus par l'article 6 de ladite décision pour l'octroi d'aides à la recherche et au développement.

(58) Il reste par conséquent à examiner si les aides affectées par Charbonnages de France dans le cadre de la mise en oeuvre du mécanisme de garantie de décote, des investissements commerciaux ainsi que des avances permanentes peuvent être considérées comme étant compatibles avec l'article 4 de la décision n° 3632/93/CECA, et avoir été affectées par Charbonnages de France en vertu de cette disposition.

V.2.b) Prix du charbon sur le marché mondial

(59) Conformément à l'article 4, paragraphe 1, de la décision n° 3632/93/CECA, qui renvoie aux dispositions de l'article 3, paragraphe 1, de ladite décision, les aides à la réduction d'activité sont destinées à la couverture de l'écart entre le coût de production et le prix de vente de la houille résultant du libre consentement des parties contractantes au regard des conditions qui prévalent sur le marché mondial. L'article 3, paragraphe 1, de ladite décision détermine par conséquent l'enveloppe maximale des aides admissibles. Or, comme il a été indiqué au considérant 23, les rabais importants accordés à Sidec ont amené CdF Énergie à vendre la houille à un prix inférieur à ceux qui prévalent sur les marchés internationaux. Ces rabais ont par conséquent été financés par des aides qui, pour une certaine partie, excédaient le plafond admissible prévu à l'article 3, paragraphe 1, de la décision n° 3632/93/CECA.

(60) La Commission note à cet égard que la France n'a apporté aucun argument visant à contredire les éléments de fait qui avaient conduit la Commission à considérer, dans sa lettre de mise en demeure, que CdF Énergie a livré à Sidec au cours des années 1994 à 1997 de la houille, communautaire ou importée, à un prix inférieur au marché mondial. Les autorités françaises semblent au contraire, dans leur lettre du 8 avril 1999, reconnaître la présomption à laquelle était parvenue la Commission dans sa lettre de mise en demeure. Parlant des "dérives d'un mécanisme devenu inopportun", la France indique notamment que "dès 1988 face au retournement de la conjoncture des prix de l'énergie, la direction générale de Charbonnages de France a demandé à CdF Énergie d'essayer d'obtenir une renégociation des contrats afin de les rendre moins pénalisants pour le groupe. À la demande de CdF Énergie, Sidec a proposé à ses clients de reconsidérer les clauses des contrats. De nombreux clients refusèrent, certains acceptèrent d'engager des discussions."

(61) La Commission rappelle à cet égard les termes de sa lettre de mise en demeure qui indiquent: "en conséquence et compte tenu de sa connaissance du dossier, la Commission considère que, pour les années budgétaires 1994, 1995 et 1996, le GIE a effectivement livré de la houille (communautaire et importée) sur le marché communautaire à un prix inférieur à celui du marché mondial et ce grâce aux aides octroyées par CdF dans les conditions décrites précédemment. Si les allégations des plaignants ne sont pas contredites par les autorités françaises de façon à permettre à la Commission de conclure à l'absence de fondement de la plainte, la Commission conclura à un détournement des aides d'État originellement autorisées par la Commission pour la couverture des coûts de production de la houille communautaire (article 4, aides à la réduction d'activité)". Il ressort d'ailleurs, à la lecture de la lettre de mise en demeure, que les arguments qui ont conduit la Commission à considérer que les prix facturés à Sidec étaient inférieurs aux prix de la houille sur les marchés internationaux ont été exposés et analysés de manière très détaillée dans cette lettre. Force est de constater que la France n'a fourni aucune information sur les prix facturés, en 1994 et au cours des années suivantes, pour la houille livrée par CdF Énergie à Sidec. Au contraire, comme il a déjà été indiqué au considérant 60, la France reconnaît tacitement dans sa lettre du 8 avril 1999 que CdF Énergie a effectivement vendu de la houille à Sidec à des prix inférieurs à ceux qui se pratiquaient sur les marchés internationaux. La France tente plutôt de justifier cette pratique, en indiquant notamment qu'elle n'aurait pas créé de distorsion de concurrence préjudiciable aux plaignants.

(62) La Commission précise que ses services n'ont pas été en mesure de procéder eux-mêmes, comme pour l'année 1993, au calcul du prix moyen annuel des ventes de houille par CdF Énergie à Sidec pour l'année 1994 et pour les années suivantes. En effet, aucun rapport spécial des commissaires aux comptes n'a été déposé auprès du greffe du tribunal de commerce de Paris pour ces années concernant les activités de Sidec. Cela étant, compte tenu de la situation du marché houiller et énergétique, au niveau français et au niveau mondial, il faut considérer que les conclusions auxquelles la Commission est parvenue concernant les prix pratiqués par CdF Énergie au cours de l'année 1993 sont également pertinentes pour les années 1994 à 1997 (considérants 35 à 37). Il faut remarquer à cet égard que les différentes pratiques commerciales et financières en 1994 et au cours des années suivantes, telles qu'elles ressortent des documents financiers et des rapports d'activité du groupe Charbonnages de France, sont identiques à celles des années précédentes. Il faut donc en conclure que CdF Énergie a vendu à Sidec, en 1994 et au cours des années suivantes, la houille à un prix inférieur aux cours internationaux des charbons industriels de même type vendus sur le marché concurrentiel.

(63) En outre, il faut considérer que non seulement les aides utilisées par CdF Énergie pour couvrir les rabais liés à la garantie de décote, mais également les aides affectées à des investissements commerciaux, ainsi que celles affectées aux avances permanentes à CdF Énergie, ont conduit le groupe Charbonnages de France à pratiquer des prix rendus pour le charbon inférieurs à ceux pratiqués pour les charbons de qualité similaire des pays tiers. C'est en effet l'ensemble de ces mécanismes mis en oeuvre conjointement, et financés par des aides d'État, qui a permis à CdF Énergie de pratiquer des prix inférieurs aux prix de référence du charbon sur les marchés internationaux. Or, l'article 3, paragraphe 1, troisième tiret, de la décision n° 3632/93/CECA prescrit que le montant de l'aide ne pourra pas conduire à des prix rendus pour le charbon communautaire inférieurs à ceux pratiqués pour les charbons de qualité similaire des pays tiers. Il faut dès lors considérer que les aides affectées à l'ensemble des mécanismes contestés ont été versées en infraction à cette disposition.

V.2.c) Aides destinées au charbon importé

(64) La plus grande partie du charbon livré à Sidec provient d'importations de pays tiers réalisées par CdF Énergie. En effet, suite à la signature du pacte charbonnier national en 1994, qui prévoit l'arrêt progressif de l'extraction charbonnière à l'horizon 2005, la production nationale a diminué de façon continue. La fourniture de charbon assurée par CdF Énergie à Sidec n'a dès lors pu être effectuée qu'en complétant de manière croissante le charbon national par du charbon d'importation. Selon la lettre de la France du 8 avril 1999, les volumes de vente de charbon communautaire et importé par CdF Énergie à Sidec s'établissent comme suit:

>TABLE>

(65) Les compensations versées par l'EPIC CdF au titre de la garantie de décote ont par conséquent été versées indifféremment à CdF Énergie, pour les ventes à Sidec de houille nationale, ainsi que pour les ventes de houille importée. De même, les aides affectées aux investissements commerciaux, ainsi que celles affectées aux avances permanentes à CdF Énergie, ont permis de soutenir indifféremment les deux activités de l'entreprise, à savoir d'une part l'activité de commissionnaire liée à la commercialisation des combustibles produits au sein du groupe Charbonnages de France, et d'autre part l'activité de négoce de charbon liée principalement à la vente de charbon importé.

(66) Le fait que, selon les annexes du compte de résultat de CdF Énergie, l'activité de négoce se solderait par un bénéfice, alors que l'activité de commissionnaire se solderait par une perte importante (considérants 30 et 31), ne saurait en aucun cas constituer un indice selon lequel les aides ont été affectées exclusivement à cette dernière activité déficitaire, et par conséquent au charbon national. En effet, il ressort des annexes au compte de résultat que l'activité de négoce ne supporte pas la quote-part de frais de fonctionnement qu'elle implique chez tout autre opérateur, ayant pour conséquence une augmentation du résultat de cette activité qui ne reflète pas la réalité. En outre, il faut noter que la compensation de garantie de décote figure précisément, dans les annexes au compte de résultat, dans une rubrique relative à l'activité de négoce.

(67) Or, il ne fait aucun doute que les aides qui peuvent être octroyées par les États membres conformément à la décision n° 3632/93/CECA sont exclusivement réservées à la houille communautaire. À cet égard, on relèvera notamment le deuxième considérant de ladite décision qui précise que "à la concurrence du pétrole et du gaz naturel est venue s'ajouter la pression croissante du charbon importé en provenance de pays tiers". Ces termes excluent toute idée de subventionnement du charbon produit dans un pays tiers. Il serait d'ailleurs contraire à la ratio legis de la décision n° 3632/93/CECA de ne pas s'opposer à une aide provenant de fonds publics qui favoriserait la houille importée, alors que celle-ci est déjà en position plus concurrentielle par rapport à la houille communautaire.

(68) Il ressort par ailleurs clairement du plan de réduction d'activité qui a été notifié à la Commission par la France en 1994, ainsi que des aides d'État qui ont été notifiées annuellement à la Commission depuis cette date, que les aides versées par l'État français à l'industrie houillère sont réservées à la production nationale. Les aides qui ont été affectées par le groupe Charbonnages de France à l'activité de négoce n'ont par conséquent pas été affectées en conformité avec les dispositions de la décision n° 3632/93/CECA, et ce quel que soit le prix de la houille importée qui a été porté en compte à Sidec.

(69) En outre, les aides octroyées en vertu de l'article 4 de la décision n° 3632/93/CECA doivent, conformément à l'article 2, paragraphe 1, deuxième tiret, de ladite décision, concourir à résoudre les problèmes sociaux et régionaux liés à la réduction d'activité totale ou partielle d'unités de production. Or, les aides qui ont été affectées à la compensation de la garantie de décote, ainsi que les aides affectées aux investissements commerciaux et aux avances permanentes, se situent au contraire dans une perspective de développement des activités commerciales de CdF Énergie. Étant donné que l'exploitation houillère en France se réduit progressivement depuis 1994, ces aides ont plus particulièrement contribué à développer l'activité de négoce de charbon importé de CdF Énergie. La Commission constate, par conséquent, qu'une partie des aides versées par l'État français à Charbonnages de France n'a pas été affectée conformément aux objectifs pour lesquels ces aides avaient été autorisées par la Commission.

V.2.d) Distorsions de concurrence

(70) Conformément au quatrième considérant du point I de la décision n° 3632/93/CECA, les aides à l'industrie houillère ne doivent pas perturber le fonctionnement du marché commun. Les quatrième et cinquième considérants du point III de ladite décision précisent par ailleurs que la Communauté doit assurer l'établissement, le maintien et le respect de conditions normales de concurrence. Dans ce contexte, la Communauté veille à ce que les aides ne créent pas de discriminations entre producteurs charbonniers, entre acheteurs ou entre utilisateurs de la Communauté.

(71) Or, force est de constater que le mécanisme même de garantie de décote, dont il s'avère que la mise en oeuvre a été financée au moyen d'aides d'État, était de nature à créer des distorsions de concurrence contraires au marché communautaire. En effet, ce mécanisme était susceptible d'inciter CdF Énergie, et l'a conduit effectivement, à pratiquer des prix pour la houille inférieurs à ceux généralement pratiqués sur les marchés internationaux. L'analyse détaillée de certaines données relatives à l'année 1993, qui a notamment conduit la Commission à adresser une lettre de mise en demeure à la France, démontre très clairement l'avantage quantitatif que réservait ce mécanisme au groupe Charbonnages de France par rapport à la concurrence (considérant 35). Ne pouvant offrir à la même clientèle des conditions de fourniture de charbon aussi favorables que celles offertes par le groupe Charbonnages de France, les plaignants ont par conséquent été écartés d'une part substantielle du marché pertinent tel que décrit aux considérants 14 à 16.

(72) Il ressort d'ailleurs des comptes de résultat de CdF Énergie que cette entité aurait subi des pertes importantes sans les compensations de garantie de décote versée par l'EPIC CdF. Les montants versés au titre de la compensation de garantie de décote ont par conséquent permis d'assurer la viabilité de CdF Énergie, voire de constituer des réserves qui n'ont pas été reversées à ses membres fondateurs. CdF Énergie disposait ainsi de fonds propres lui permettant de financer une partie de ses activités sans être contrainte de recourir à un financement extérieur.

>TABLE>

(73) Le mécanisme de garantie de décote, ainsi que les avances pour investissements commerciaux et les avances permanentes des membres, ont donc permis à CdF Énergie de poursuivre une extension de ses activités dans le domaine de la distribution en France de charbon importé, permettant à l'entreprise d'atteindre, en 1997, 61 % de parts du marché pertinent. Concernant plus particulièrement les investissements commerciaux, il semble que ceux-ci étaient consentis en faveur de consommateurs de charbon pour lesquels les besoins n'étaient pas tels qu'ils pouvaient justifier la mise en place des contrats liés à une garantie de décote.

(74) En outre, les contrats entre Sidec et ses clients réservent une exclusivité de fourniture du charbon pour une durée de dix ou douze ans, voire quinze ans en cas de prolongation du contrat. Cette politique de fidélisation, qui a permis au groupe Charbonnages de France de capter une part importante du marché pertinent, aurait certainement été inefficace si les clients de Sidec ne s'étaient vus offrir la garantie que le prix de la thermie-houille ne dépasserait jamais le prix de la thermie-fuel sur toute la durée du contrat. En effet, de tels avantages peuvent naturellement amener un client à s'engager pour une telle période, là où traditionnellement il ne s'engage que pour une année au plus.

(75) La France ne saurait invoquer utilement le fait que l'objet de ces contrats n'était pas de permettre à CdF Énergie de capter le marché de la commercialisation du charbon, mais de lutter contre la domination de l'énergie pétrolière. La Commission doit en effet se borner à constater les effets de ces pratiques sur la concurrence entre les négociants de charbon importé, les intentions du groupe Charbonnages de France étant à cet égard non pertinentes. En outre, il est évident qu'en offrant aux clients de Sidec des conditions avantageuses afin de concurrencer le pétrole le groupe Charbonnages de France mettait ipso facto sous pression les concurrents de CdF Énergie qui livraient également du charbon sur le marché pertinent.

(76) Les autorités françaises tentent de minimiser la position dominante acquise par CdF Énergie, en invoquant le fait que le marché des chaufferies industrielles est trop restreint et devrait être étendu au marché du charbon-vapeur, voire à d'autres sources d'énergie (considérant 40). L'analyse de la Commission devrait en outre dépasser le territoire français dans la mesure où le charbon est utilisé dans le monde entier. La Commission ne peut souscrire à cette argumentation. En effet, il faut rappeler que certains clients français, notamment la SNET et Électricité de France, sont des marchés captifs, non ouverts de facto à la concurrence, et qui ne peuvent par conséquent être incorporés dans le marché pertinent. En outre, la France n'indique aucunement dans quelle mesure cette définition du marché pertinent serait susceptible d'influencer l'examen des éventuelles distorsions de concurrence causées par Charbonnages de France au détriment des plaignants.

VI. CONCLUSION

(77) Compte tenu de ce qui précède, la Commission considère que les compensations des garanties de décote versées par l'EPIC CdF à CdF Énergie, les avances versées par l'EPIC CdF pour investissements commerciaux et les avances permanentes des membres de CdF Énergie, ont été financées grâce aux aides octroyées par l'État français à Charbonnages de France pour la production de houille. Le montant des interventions financières pour l'année 1994 s'élève à 74785157 FRF, soit 22466500 FRF au titre de compensation des garanties de décote, 33139626 FRF pour les avances pour investissements commerciaux et 19179031 FRF pour les avances permanentes. Les montants des interventions financières, versés au titre de la compensation des garanties de décote pour les années 1995, 1996 et 1997, s'élèvent à, respectivement, 35016000 FRF, 11000000 de FRF et 10011701 FRF. Le montant total des aides concernées s'élève dès lors à 130812858 FRF.

(78) Ces aides doivent être considérées comme incompatibles avec les dispositions de la décision n° 3632/93/CECA car elles ne répondent pas aux critères et conditions prévus dans ladite décision pour être compatibles avec le bon fonctionnement du marché commun. Plus particulièrement, ces aides n'ont pas été octroyées dans le strict respect, d'une part, de la décision de la Commission qui approuve le plan de réduction d'activité soumis par les autorités françaises dans le cadre du pacte charbonnier national, et, d'autre part, des décisions qui autorisent les aides que la France accorde annuellement à l'industrie houillère. Il faut dès lors conclure que ces aides ont été détournées de l'affectation pour laquelle elles pouvaient être, et ont été, autorisées en vertu de la décision n° 3632/93/CECA.

(79) En conséquence, les montants d'aides qui se rapportent aux années 1994, 1995 et 1996, années pour lesquelles la Commission a autorisé la totalité des aides notifiées par la France, soit un total de 120801157 FRF (18416018 euros), doivent être remboursés par le groupe Charbonnages de France à l'État français. Conformément à l'article 9, paragraphe 5, de la décision n° 3632/93/CECA, les sommes à rembourser par Charbonnages de France doivent être considérées comme un avantage anormal sous la forme d'une avance de trésorerie injustifiée et, comme telles, devront faire l'objet d'une rémunération au taux du marché par le bénéficiaire. Les intérêts sont calculés à partir de la date à laquelle les aides octroyées annuellement par l'État français, dont font partie les montants qui doivent être remboursés par Charbonnages de France, ont été versées à l'entreprise bénéficiaire.

(80) Les aides relatives à l'année 1997 ont été autorisées par la Commission sous réserve d'un montant provisionnel de 35 millions de FRF (5335716 euros) sur lequel la Commission devait statuer au terme de l'examen des plaintes faisant l'objet de la présente décision. Compte tenu de ce qui précède, la Commission est en mesure d'autoriser un montant d'aides de 24988299 FRF (3809442 euros), le solde de 10011701 FRF (1526274 euros) couvrant les compensations de garanties de décote pour cette année devant être considéré comme incompatible avec les dispositions de la décision n° 3632/93/CECA. Au cas où ce dernier montant aurait été versé à Charbonnages de France en anticipation d'une décision d'autorisation de la Commission, il doit être considéré comme un avantage anormal sous la forme d'une avance de trésorerie injustifiée et, comme tel, doit faire l'objet d'une rémunération au taux du marché par le bénéficiaire. Les intérêts seront calculés, le cas échéant, à partir de la date à laquelle les aides, dont ferait partie la compensation affectée à la couverture des garanties de décote, ont été versées à l'entreprise bénéficiaire.

(81) Concernant les années 1998 à 2001, la Commission a autorisé les aides notifiées par la France en faveur de l'industrie houillère, sous réserve d'un montant provisionnel s'élevant à 45 millions de FRF (6860206 euros) pour chacune des années 1998 à 2000 conformément aux décisions 2001/85/CECA(16) et 2001/58/CECA(17), et à 10 millions de FRF (1524490 euros) pour l'année 2001 conformément à la décision 2001/678/CECA(18). Aux termes de ces décisions, la Commission doit statuer sur ces montants en tenant compte des résultats de l'examen de la plainte faisant l'objet de la présente décision. Or, sur la base des considérations qui précèdent, il faut considérer qu'une partie de ces montants d'aides est destinée à être affectée - ou a été affectée en anticipation d'une décision de la Commission - aux compensations des garanties de décote versées par l'EPIC CdF à CdF Énergie et par CdF Énergie à Sidec pour ces années. Il ressort à cet égard de la lettre des autorités françaises du 8 avril 1999 que treize contrats prévoyant une garantie de décote étaient encore en cours à cette date. Il est dès lors demandé à la France de notifier à la Commission les montants des compensations des garanties de décote versés par l'EPIC CdF à CdF Énergie et par CdF Énergie à Sidec pour ces années. Sur la base de ces informations, la Commission pourra statuer définitivement sur les montants d'aide notifiés par la France pour les années 1998 à 2001 qui n'ont pas été autorisés.

(82) La Commission invite la France à prendre les mesures requises pour se conformer à la présente décision. À cet égard, il ressort de la lettre des autorités françaises du 8 avril 1999 que la date d'échéance la plus tardive des contrats incluant une clause de garantie de décote est 2006. Il faut rappeler que les différents mécanismes identifiés dans le cadre de la présente décision, et plus particulièrement le mécanisme de garantie de décote faisant l'objet d'une compensation versée par l'EPIC CdF à CdF Énergie et par CdF Énergie à Sidec, sont à l'origine de distorsions de concurrence (considérants 70 à 76). La France est par conséquent invitée à prendre les mesures nécessaires afin de mettre fin à ces mécanismes financés grâce aux aides d'État octroyées à Charbonnages de France pour la production de houille,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Les aides d'État octroyées par la France en faveur de l'industrie houillère qui ont été affectées ou doivent être affectées aux compensations des garanties de décote et aux avances pour investissements versées par l'établissement public à caractère industriel et commercial Charbonnages de France ("l'EPIC CdF") au groupement d'intérêt économique CdF Énergie ("CdF Énergie"), ainsi qu'à des avances permanentes des membres de CdF Énergie, pour un montant total de 19942292 euros, sont incompatibles avec le marché commun.

Article 2

1. La France prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer auprès du groupe Charbonnages de France les montants d'aide relatifs aux années 1994, 1995 et 1996 visés à l'article 1er, soit un montant total de 18416018 euros.

2. La récupération a lieu sans délai conformément aux procédures du droit national, pour autant qu'elles permettent l'exécution immédiate et effective de la présente décision. Les aides à récupérer incluent des intérêts au taux du marché à partir de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition du bénéficiaire jusqu'à la date de leur récupération.

Article 3

1. La France est autorisée à octroyer à son industrie houillère, pour l'année 1997, une aide à la réduction d'activité complémentaire à celle autorisée par la décision 2001/85/CECA, à concurrence de 3809442 euros. Le solde du montant d'aide sur lequel la Commission devait statuer conformément à l'article 1er, point a), de ladite décision, soit 1526274 euros, ne peut par conséquent être mis à exécution.

2. Si le montant de 1526274 euros visé au paragraphe 1 a été versé par la France au groupe Charbonnages de France en anticipation d'une décision de la Commission, la récupération a lieu selon les modalités décrites à l'article 2, paragraphe 2.

Article 4

L'octroi d'aides déclarées incompatibles en vertu de la présente décision doit cesser dès la notification de celle-ci à la France.

Article 5

1. La France informe la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, des mesures qu'elle a prises pour s'y conformer.

2. En ce qui concerne les aides en faveur de l'industrie houillère pour les années 1998, 1999, 2000 et 2001, la France notifie à la Commission, dans un délai de quinze jours ouvrables à compter de la notification de la présente décision, les montants des compensations des garanties de décote versés par l'EPIC CdF à CdF Énergie pour ces années.

Article 6

La République française est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 9 avril 2002.

Par la Commission

Loyola De Palacio

Vice-président

(1) JO L 329 du 30.12.1993, p. 12.

(2) JO C 99 du 10.4.1999, p. 9.

(3) JO C 99 du 10.4.1999, p. 9.

(4) JO L 267 du 9.11.1995, p. 46.

(5) JO L 299 du 12.12.1995, p. 18.

(6) JO L 191 du 1.8.1996, p. 45.

(7) JO L 29 du 31.1.2001, p. 45.

(8) EPIC CdF, bilan et compte de résultat 1995, notes sur le compte de résultat, p. 19.

(9) CdF Énergie: bilan, compte de résultat et annexe au 31 décembre 1995, p. 28 et 29.

(10) Les commissions ont été facturées, en 1995, à HBL, HBCM, Cokes de Drocourt, Agglonord, Agglocentre et CTBR (CdF Énergie: bilan, compte de résultat et annexe au 31 décembre 1995, p. 43).

(11) Voir également à ce sujet le considérant 16.

(12) CdF Énergie: bilan, compte de résultat et annexe au 31 décembre 1995, p. 37 à 42.

(13) Prix du charbon-vapeur importé des pays tiers. Moyenne européenne calculée sur la base des prix caf franco frontière communiqués à la Commission dans le cadre des décisions 77/707/CECA (JO L 292 du 16.11.1977, p. 11) et 85/161/CECA (JO L 63 du 2.3.1985, p. 20).

(14) CdF Énergie: bilan, compte de résultat et annexe au 31 décembre 1993, p. 3.

(15) Considérant 6.

(16) JO L 29 du 31.1.2001, p. 45.

(17) JO L 21 du 23.1.2001, p. 12.

(18) JO L 239 du 7.9.2001, p. 35.

Top