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Document 62013CJ0455

    Arrêt de la Cour (huitième chambre) du 17 septembre 2015.
    Confederazione Cooperative Italiane, Cooperativas Agro-Alimentarias et Fédération française de la coopération fruitière, légumière et horticole (Felcoop) (C-455/13 P), Commission européenne (C-457/13 P) et République italienne (C-460/13 P) contre Associazione Nazionale degli Industriali delle Conserve Alimentari Vegetali (Anicav) et autres.
    Pourvoi - Agriculture - Organisation commune des marchés - Secteur des fruits et légumes - Règlement (CE) nº 1580/2007 - Article 52, paragraphe 2 bis - Règlement d’exécution (UE) nº 543/2011 - Articles 50, paragraphe 3, et 60, paragraphe 7 - Aides aux organisations de producteurs - Fruits et légumes transformés - Taux forfaitaires couvrant certaines activités de transformation - Éligibilité des investissements et des actions liés à la transformation - Recours en annulation - Recevabilité - Affectation directe.
    Affaires jointes C-455/13 P, C-457/13 P et C-460/13 P.

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2015:616

    ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

    17 septembre 2015 (*)

    «Pourvoi – Agriculture – Organisation commune des marchés – Secteur des fruits et légumes – Règlement (CE) n° 1580/2007 – Article 52, paragraphe 2 bis – Règlement d’exécution (UE) n° 543/2011 – Articles 50, paragraphe 3, et 60, paragraphe 7 – Aides aux organisations de producteurs – Fruits et légumes transformés – Taux forfaitaires couvrant certaines activités de transformation – Éligibilité des investissements et des actions liés à la transformation – Recours en annulation – Recevabilité – Affectation directe»

    Dans les affaires jointes C‑455/13 P, C‑457/13 P et C‑460/13 P,

    ayant pour objet trois pourvois au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduits les 8 août et 12 août 2013,

    Confederazione Cooperative Italiane, établie à Rome (Italie),

    Cooperativas Agro-Alimentarias, établie à Madrid (Espagne),

    Fédération française de la coopération fruitière, légumière et horticole (Felcoop), établie à Paris (France),

    représentées par Mes M. Merola et M. C. Santacroce, avvocati,

    parties requérantes dans l’affaire C‑455/13 P,

    Commission européenne, représentée par Mmes K. Skelly et A. Marcoulli ainsi que par M. B. Schima, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

    partie requérante dans l’affaire C‑457/13 P

    soutenue par:

    République française, représentée par M. D. Colas et Mme C. Candat, en qualité d’agents,

    Sociedad Cooperativa de Exportación de Frutos Cítricos Anecoop (Anecoop) S. Coop., établie à Valence (Espagne),

    Cooperativa Agrícola Nuestra Señora del Oreto (CANSO) Coop. V., établie à Valence,

    Cooperativa Agrícola «Sant Bernat» (Carlet) Coop. V., établie à Valence,

    Cooperativa Agrícola SCJ (COPAL) Coop. V., établie à Valence,

    Grupo AN S. Coop., établie à Navarre (Espagne),

    Acopaex S. Coop., établie à Badajoz (Espagne),

    Las Marismas de Lebrija Sociedad Cooperativa Andaluza (Las Marismas), établie à Séville (Espagne),

    Associació de Cooperatives Agràries de les Terres de Lleida (ACTEL), établie à Lleida (Espagne),

    Unió Corporació Alimentária (UNIO) SCCL, établie à Reus (Espagne),

    Union Coopérative Agricole France Prune (France Prune), établie à Casseneuil (France),

    Agrial SCA, établie à Caen (France),

    Triskalia, établie à Landerneau (France),

    Union Fermière Morbihannaise (UFM), établie à Locminé (France),

    VOG Products Soc. agr. coop., établie à Laives (Italie),

    Consorzio Padano Ortofrutticolo (CO.PAD.OR.) Soc. agr. coop., établie à Collecchio (Italie),

    Consorzio Casalasco del Pomodoro Soc. agr. coop., établie à Rivarolo del Re (Italie),

    Agricoltori Riuniti Piacentini (ARP) Soc. agr. coop., établie à Gariga di Podenzano (Italie),

    Orogel Fresco Soc. agr. coop., établie à Pievesestina di Cesena (Italie),

    Conserve Italia Soc. agr. coop., établie à San Lazzaro di Savena (Italie),

    Fruttagel Soc. agr. coop., établie à Alfonsine (Italie),

    représentées par Mes M. Merola et M. C. Santacroce, avvocati,

    Unione Nazionale tra le Organizzazioni di Produttori Ortofrutticoli, Agrumari e di Frutta in Guscio (Unaproa), établie à Rome, représentée initialement par Me S. Crisci, puis par Me G. Coppo, avvocati,

    parties intervenantes,

    République italienne, représentée par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. S. Varone, avvocato dello Stato, ayant élu domicile à Luxembourg,

    partie requérante dans l’affaire C‑460/13 P,

    les autres parties aux procédures étant:

    Associazione Nazionale degli Industriali delle Conserve Alimentari Vegetali (Anicav), établie à Naples (Italie), représentée par Mes S. Estima Martins et R. Oliveira, advogados,

    partie demanderesse en première instance dans l’affaire T‑454/10,

    Agrupación Española de Fabricantes de Conservas Vegetales (Agrucon), établie à Madrid,

    Associazione Italiana Industrie Prodotti Alimentari (AIIPA), établie à Milan (Italie),

    Associazione Nazionale degli Industriali delle Conserve Alimentari Vegetali (Anicav), établie à Naples,

    Campil-Agro-Industrial do Campo do Tejo Lda, établie à Pontével (Portugal),

    Evropaïka Trofima AE, établie à Larissa (Grèce),

    FIT – Fomento da Indústria do Tomate SA, établie à Marateca (Portugal),

    Konservopoiia Oporokipeftikon Filippos AE, établie à Imathia (Grèce),

    Panellinia Enosi Konservopoion, établie à Athènes (Grèce),

    Elliniki Etairia Konservon AE, établie à Nafplio (Grèce),

    Anonymos Viomichaniki Etaireia Konservon D. Nomikos, établie à Athènes,

    Italagro – Indústria de Transformação de Produtos Alimentares SA, établie à Castanheira do Ribatejo (Portugal),

    Kopaïs AVEE Trofimon & Poton, établie à Athènes,

    Serraïki Konservopoiia Oporokipeftikon Serko AE, établie à Serres (Grèce),

    Sociedade de Industrialização de Produtos Agrícolas – Sopragol SA, établie à Mora (Portugal),

    Sugalidal – Indústrias de Alimentação SA, établie à Benavente (Portugal),

    Sutol – Indústrias Alimentares Lda, établie à Alcácer do Sal (Portugal),

    ZANAE Zymai Artopoiias Nikoglou AE Viomichania Emporio Trofimon, établie à Sindos (Grèce),

    représentées par Mes S. Estima Martins et R. Oliveira, advogados,

    parties demanderesses en première instance dans l’affaire T‑482/11,

    Associazione Italiana Industrie Prodotti Alimentari (AIIPA), établie à Milan,

    Agrupación Española de Fabricantes de Conservas Vegetales (Agrucon), établie à Madrid,

    AIT – Associação dos Industriais de Tomate, établie à Lisbonne (Portugal),

    Panellinia Enosi Konservopoion, établie à Athènes,

    Kopaïs AVEE Trofimon & Poton, établie à Athènes,

    Evropaïka Trofima AE, établie à Larissa,

    Konservopoiia Oporokipeftikon Filippos AE, établie à Imathia,

    Anonymos Viomichaniki Etaireia Konservon D. Nomikos, établie à Athènes,

    Serraïki Konservopoiia Oporokipeftikon Serko AE, établie à Serres,

    Elliniki Etaireia Konservon AE, établie à Nafplio,

    ZANAE Zymai Artopoiias Nikoglou AE Viomichania Emporio Trofimon, établie à Sindos,

    représentées par Mes S. Estima Martins et R. Oliveira, advogados,

    parties intervenantes en première instance dans l’affaire T‑454/10,

    Confederazione Cooperative Italiane, établie à Rome,

    Cooperativas Agro-Alimentarias, établie à Madrid,

    Fédération française de la coopération fruitière, légumière et horticole (Felcoop), établie à Paris,

    VOG Products Soc. agr. coop., établie à Laives,

    Consorzio Padano Ortofrutticolo (CO.PAD.OR.) Soc. agr. coop., établi à Collecchio,

    Consorzio Casalasco del Pomodoro Soc. agr. coop., établie à Rivarolo del Re,

    ARP Agricoltori Riuniti Piacentini Soc. agr. coop., établie à Podenzano,

    Orogel Fresco Soc. agr. coop., établie à Cesena,

    Conserve Italia Soc. agr. coop., établie à San Lazzaro di Savena,

    parties intervenantes en première instance dans les affaires T‑454/10 et T‑482/11,

    LA COUR (huitième chambre),

    composée de M. A. Ó Caoimh, président de chambre, MM. E. Jarašiūnas (rapporteur) et C. G. Fernlund, juges,

    avocat général: M. N. Wahl,

    greffier: M. I. Illéssy, administrateur,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 juin 2015,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

    rend le présent

    Arrêt

    1        Par leurs pourvois, la Confederazione Cooperative Italiane, la Cooperativas Agro-Alimentarias, la Fédération française de la coopération fruitière, légumière et horticole (Felcoop), la Commission européenne et la République italienne demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne Anicav e.a. /Commission (T‑454/10 et T‑482/11, EU:T:2013:282, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a annulé l’article 52, paragraphe 2 bis, deuxième alinéa, du règlement (CE) n° 1580/2007 de la Commission, du 21 décembre 2007, portant modalités d’application des règlements (CE) n° 2200/96, (CE) n° 2201/96 et (CE) n° 1182/2007 du Conseil dans le secteur des fruits et légumes (JO L 350, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) n° 687/2010 de la Commission, du 30 juillet 2010 (JO L 199, p. 12, ci-après le «règlement n° 1580/2007»), ainsi que l’article 50, paragraphe 3, du règlement d’exécution (UE) n° 543/2011 de la Commission, du 7 juin 2011, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne les secteurs des fruits et légumes et des fruits et légumes transformés (JO L 157, p. 1), dans la mesure où ces articles prévoient que la valeur de «non véritables activités de transformation» est incluse dans la valeur de la production commercialisée (ci-après la «VPC») des fruits et légumes destinés à la transformation, et a également annulé l’article 60, paragraphe 7, du règlement n° 543/2011.

     Le cadre juridique

    2        Le règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil, du 22 octobre 2007, portant organisation commune des marchés dans le secteur agricole et dispositions spécifiques en ce qui concerne certains produits de ce secteur (règlement «OCM unique») (JO L 299, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 361/2008 du Conseil, du 14 avril 2008 (JO L 121, p. 1, ci-après le «règlement ‘OCM unique’»), s’applique, conformément à son article 1er, paragraphe 1, sous i) et j), au secteur des fruits et légumes ainsi qu’au secteur des fruits et légumes transformés.

    3        Le règlement n° 361/2008 a incorporé dans le règlement n° 1234/2007, certaines dispositions du règlement (CE) n° 1182/2007 du Conseil, du 26 septembre 2007, établissant des règles spécifiques pour le secteur des fruits et légumes, modifiant les directives 2001/112/CE et 2001/113/CE ainsi que les règlements (CEE) n° 827/68, (CE) n° 2200/96, (CE) n° 2201/96, (CE) n° 2826/2000, (CE) n° 1782/2003 et (CE) n° 318/2006, et abrogeant le règlement (CE) n° 2202/96 (JO L 273, p. 1). Il a ainsi inséré dans le règlement n° 1234/2007 la section IV bis, intitulée «Aides dans le secteur des fruits et légumes», du chapitre IV du titre I de la partie II de ce règlement, qui comporte les articles 103 bis à 103 nonies.

    4        Aux termes de l’article 103 ter du règlement «OCM unique»:

    «1.      Les organisations de producteurs dans le secteur des fruits et légumes peuvent constituer un fonds opérationnel. Le fonds est financé par:

    a)      les contributions financières versées par les membres ou l’organisation de producteurs elle-même;

    b)      l’aide financière communautaire qui peut être octroyée aux organisations de producteurs.

    2.      Les fonds opérationnels sont utilisés aux seules fins du financement des programmes opérationnels approuvés par les États membres conformément à l’article 103 octies.»

    5        L’article 103 quater du règlement «OCM unique» dispose:

    «1.      Les programmes opérationnels dans le secteur des fruits et légumes visent au moins deux des objectifs visés à l’article 122, point c), ou des objectifs suivants:

    [...]

    b)      l’amélioration de la qualité des produits;

    c)      le développement de leur mise en valeur commerciale;

    d)      la promotion des produits, qu’ils soient frais ou transformés;

    [...]»

    6        Selon l’article 103 quinquies, paragraphe 2, du règlement «OCM unique», l’aide financière communautaire est plafonnée à 4,1 % de la VPC de chaque organisation de producteurs, avec possibilité d’atteindre 4,6 % de cette valeur à condition que le montant qui excède 4,1 % soit uniquement destiné à des mesures de prévention et de gestion des crises.

    7        L’article 103 septies, paragraphe 2, du règlement OCM unique prévoit que les États membres établissent une stratégie nationale en matière de programmes opérationnels à caractère durable dans le secteur des fruits et légumes et indique les éléments que cette stratégie doit comporter.

    8        L’article 122 du règlement «OCM unique», qui porte sur les organisations de producteurs, dispose:

    «Les États membres reconnaissent les organisations de producteurs qui:

    a)      se composent de producteurs d’un des secteurs suivants:

    [...]

    iii)      fruits et légumes en ce qui concerne les agriculteurs cultivant un ou plusieurs produits de ce secteur et/ou de ces produits, lorsqu’ils sont destinés uniquement à la transformation;

    [...]

    b)      sont constituées à l’initiative des producteurs;

    c)      ont un but précis qui peut notamment englober ou, dans le cas du secteur des fruits et légumes, qui englobe un des objectifs suivants:

    i)      assurer la programmation de la production et son adaptation à la demande, notamment en quantité et en qualité;

    ii)      concentrer l’offre et mettre sur le marché la production de ses membres;

    iii)      optimiser les coûts de production et régulariser les prix à la production.

    [...]»

    9        Le règlement n° 1580/2007, dans sa version initiale, a établi les modalités d’application du règlement n° 1182/2007. Son article 52, paragraphes 1 et 6, prévoyait notamment que la VPC d’une organisation de producteurs était calculée «sur la base de la production des membres des organisations pour laquelle l’organisation de producteurs est reconnue» et que la production commercialisée devait être facturée au stade de la «sortie de l’organisation de producteurs», le cas échéant, en tant que produit emballé, préparé ou ayant subi une première transformation. Ce règlement a été modifié par le règlement n° 687/2010 dont le considérant 4 énonce:

    «Le calcul de la valeur des fruits et légumes destinés à la transformation s’est avéré difficile. À des fins de contrôle et dans un souci de simplification, il y a lieu d’introduire, pour le calcul de la valeur des fruits et légumes destinés à la transformation, un taux forfaitaire qui recouvre la valeur du produit de base, à savoir les fruits et légumes destinés à la transformation, et les activités qui ne constituent pas des activités de transformation véritables. Étant donné que le volume de fruits et légumes requis pour la production de fruits et légumes transformés varie considérablement en fonction du groupe de produits, il convient que les taux forfaitaires reflètent ces différences.»

    10      Ainsi, l’article 52, paragraphe 2 bis, du règlement n° 1580/2007 prévoit:

    «La [VPC] n’inclut pas la valeur des fruits et légumes transformés ou de tout autre produit qui n’est pas un produit du secteur des fruits et légumes.

    Cependant, la [VPC] des fruits et légumes destinés à la transformation, qui ont été transformés en l’un des fruits et légumes transformés visés dans la partie X de l’annexe I du règlement [‘OCM unique’] ou en tout autre produit agricole visé au présent article et décrit plus précisément dans l’annexe VI bis du présent règlement, par une organisation de producteurs, une association d’organisations de producteurs ou des producteurs ou des coopératives qui en sont membres, ou par des filiales, comme indiqué au paragraphe 7 du présent article, par leurs soins ou au moyen de l’externalisation, est calculée en appliquant à la valeur facturée de ces produits transformés un taux forfaitaire exprimé sous forme de pourcentage.

    Le taux forfaitaire est égal:

    a)      à 53 % pour les jus de fruits;

    b)      à 73 % pour les jus concentrés;

    c)      à 77 % pour le concentré de tomates;

    d)      à 62 % pour les fruits et légumes congelés;

    e)      à 48 % pour les fruits et légumes en conserve;

    f)      à 70 % pour les champignons en conserve du genre Agaricus;

    g)      à 81 % pour les fruits conservés provisoirement dans l’eau salée;

    h)      à 81 % pour les fruits secs;

    i)      à 27 % pour les autres fruits et légumes transformés;

    j)      à 12 % pour les herbes aromatiques transformées;

    k)      à 41 % pour la poudre de paprika.»

    11      L’annexe VIII du règlement n° 1580/2007 contient la liste des opérations et dépenses non admissibles au titre des programmes opérationnels.

    12      Le règlement n° 1580/2007 a été abrogé et remplacé par le règlement d’exécution n° 543/2011, dont l’article 50, paragraphe 3, reprend le contenu de l’article 52, paragraphe 2 bis, du règlement n° 1580/2007.

    13      L’article 60, paragraphe 7, du règlement d’exécution n° 543/2011 dispose:

    «Les investissements et actions liés à la transformation de fruits et légumes en fruits et légumes transformés peuvent bénéficier d’une aide lorsque ces investissements et actions poursuivent les objectifs visés à l’article 103 quater, paragraphe 1, du [règlement ‘OCM unique’], y compris ceux visés à l’article 122, paragraphe 1, [sous] c), dudit règlement, et à condition qu’ils soient recensés dans la stratégie nationale visée à l’article 103 septies, paragraphe 2, du [règlement ‘OCM unique’].»

     La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

    14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 septembre 2010, l’Associazione Nazionale degli Industriali delle Conserve Alimentari Vegetali (Anicav) a introduit le recours dans l’affaire T‑454/10. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 septembre 2011, l’Agrupación Española de Fabricantes de Conservas Vegetales (Agrucon), l’Associazione Italiana Industrie Prodotti Alimentari (AIIPA), l’Anicav, Campil-Agro-Industrial do Campo do Tejo Lda, Evropaïka Trofima AE, FIT – Fomento da Indústria do Tomate SA, Konservopoiia Oporokipeftikon Filippos AE, Panellinia Enosi Konservopoion, Elliniki Etairia Konservon AE, Anonymos Viomichaniki Etaireia Konservon D. Nomikos, Italagro – Indústria de Transformação de Produtos Alimentares SA, Kopaïs AVEE Trofimon & Poton, Serraïki Konservopoiia Oporokipeftikon Serko AE, Sociedade de Industrialização de Produtos Agrícolas – Sopragol SA, Sugalidal – Indústrias de Alimentação SA, Sutol – Indústrias Alimentares Lda et ZANAE Zymai Artopoiias Nikoglou AE Viomichania Emporio Trofimonont (ci-après, ensemble, «Agrucon e.a.») ont introduit le recours dans l’affaire T‑482/11.

    15      Par cinq actes déposés au greffe du Tribunal les 13 et 17 janvier 2011, l’AIIPA, l’Agrucon, AIT – Associação dos Industriais de Tomate, Panellinia Enosi Konservopoion, Kopaïs AVEE Trofimon & Poton, Evropaïka Trofima AE, Konservopoiia Oporokipeftikon Filippos AE, Anonymos Viomichaniki Etaireia Konservon D. Nomikos, Serraïki Konservopoiia Oporokipeftikon Serko AE, Elliniki Etaireia Konservon AE et ZANAE Zymai Artopoiias Nikoglou AE Viomichania Emporio Trofimon (ci-après, ensemble, «AIIPA e.a.») ont demandé à intervenir dans l’affaire T‑454/10 au soutien des conclusions de l’Anicav tandis que, par quatre actes déposés au greffe du Tribunal le 24 janvier 2011, la Confederazione Cooperative Italiane, la Cooperativas Agro-Alimentarias, la Felcoop, VOG Products Soc. agr. coop., Consorzio Padano Ortofrutticolo (CO.PAD.OR.) Soc. agr. coop., Consorzio Casalasco del Pomodoro Soc. agr. coop., ARP Agricoltori Riuniti Piacentini Soc. agr. coop., Orogel Fresco Soc. agr. coop. et Conserve Italia Soc. agr. coop. ont demandé à intervenir dans la même affaire au soutien des conclusions de la Commission.

    16      Par deux actes déposés au greffe du Tribunal le 19 décembre 2011, les parties intervenantes au soutien des conclusions de la Commission dans l’affaire T‑454/10 ont également demandé à intervenir à son soutien dans l’affaire T‑482/11.

    17      Par ordonnance du président de la deuxième chambre du Tribunal du 22 octobre 2012, les affaires T‑454/10 et T‑482/11 ont été jointes aux fins de la procédure orale et de l’arrêt.

    18      Dans l’affaire T‑454/10, l’Anicav et AIIPA e.a. ont sollicité l’annulation de l’article 52 et de l’annexe VIII du règlement n° 1580/2007.

    19      Dans l’affaire T‑482/11, Agrucon e.a. ont demandé l’annulation des articles 50, paragraphe 3, et 60, paragraphe 7, du règlement d’exécution n° 543/2011.

    20      Dans ces deux affaires, la Commission et les parties intervenant à son soutien ont conclu au rejet des recours comme irrecevables et, en tout état de cause, comme non fondés.

    21      Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a, en premier lieu, écarté les fins de non-recevoir soulevées par la Commission et tendant à ce que soient déclarés irrecevables les recours introduits dans les deux affaires T‑454/10 et T‑482/11, pour défaut de qualité pour agir des demanderesses ainsi que, dans l’affaire T‑454/10, pour défaut d’intérêt à agir de l’Anicav.

    22      S’agissant de la qualité pour agir des demanderesses en première instance, la Commission faisant valoir que celles-ci n’étaient directement concernées, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, ni par l’article 52, paragraphe 2 bis, du règlement n° 1580/2007 ni par les articles 50, paragraphe 3, et 60, paragraphe 7, du règlement d’exécution n° 543/2011 (ci-après, ensemble, les «dispositions contestées»), le Tribunal, aux points 36 à 46 de l’arrêt attaqué, a considéré que ces dispositions avaient instauré un système selon lequel les organisations de producteurs étaient éligibles pour recevoir de l’aide couvrant des activités de transformation exercées également par des transformateurs ne faisant pas partie d’une organisation de producteurs, que lesdites dispositions ne laissaient aucune marge d’appréciation aux États membres et que l’affectation de la position concurrentielle des demanderesses et de leurs membres découlait directement de ces dispositions, de sorte qu’ils étaient directement concernés par celles-ci.

    23      Constatant par ailleurs que le règlement n° 1580/2007 et le règlement d’exécution n° 543/2011 étaient des actes réglementaires au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, le Tribunal a considéré que les dispositions contestées ne comportaient pas de mesures d’exécution, en relevant que, si, certes, le versement des aides de l’Union européenne en application de ces dispositions se faisait par l’entremise des autorités nationales, il demeurait que les instruments en vertu desquels ces autorités effectuaient les paiements en question ne visaient pas les demanderesses en première instance et ne leur étaient ni adressés ni notifiés, et que les règles nationales applicables ne prévoyaient pas nécessairement l’adoption d’actes susceptibles d’être attaqués devant les juridictions nationales.

    24      En deuxième lieu, sur le fond, le Tribunal a accueilli les deux premiers moyens soulevés par les demanderesses en première instance, qu’il a examinés conjointement, tirés, respectivement, de la violation du règlement «OCM unique» et du principe de non-discrimination, et par lesquels les demanderesses en première instance faisaient valoir que, d’une part, la possibilité d’octroyer des aides dans le cadre des programmes opérationnels en faveur d’activités de transformation n’était pas prévue par ce règlement et, d’autre part, les dispositions contestées étaient discriminatoires dans la mesure où elles réservaient les aides couvrant des activités de transformation aux organisations de producteurs et excluaient donc les transformateurs ne faisant pas partie de telles organisations.

    25      En dernier lieu, le Tribunal a décidé que les effets produits par l’article 52, paragraphe 2 bis, deuxième alinéa, du règlement n° 1580/2007 et par l’article 50, paragraphe 3, du règlement d’exécution n° 543/2011 dans les relations entre la Commission, les États membres et les organisations de producteurs seraient maintenus en ce sens que seuls les paiements aux organisations de producteurs exécutés en vertu de ces dispositions depuis l’entrée en vigueur du règlement n° 687/2010 et jusqu’au prononcé de l’arrêt étaient à considérer comme définitifs. En revanche, il n’a pas maintenu les effets de l’article 60, paragraphe 7, du règlement d’exécution n° 543/2011, au motif que le financement s’y rapportant était par nature entaché dans son intégralité de l’illégalité constatée.

     La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

    26      Par ordonnances du président de la Cour des 5 mars et 2 juillet 2014, la République française, la Sociedad Cooperativa de Exportación de Frutos Cítricos Anecoop (Anecoop) S. Coop., la Cooperativa Agrícola Nuestra Señora del Oreto (CANSO) Coop. V., la Cooperativa Agrícola «Sant Bernat» (Carlet) Coop. V., la Cooperativa Agrícola SCJ (COPAL) Coop. V., le Grupo AN S. Coop., l’Acopaex S. Coop., Las Marismas de Lebrija Sociedad Cooperativa Andaluza (Las Marismas), l’Associació de Cooperatives Agràries de les Terres de Lleida (ACTEL), l’Unió Corporació Alimentária (UNIO) SCCL, l’Union Coopérative Agricole France Prune (France Prune), Agrial SCA, Triskalia, l’Union Fermière Morbihannaise (UFM), VOG Products Soc. agr. coop., Consorzio Padano Ortofrutticolo (CO.PAD.OR.) Soc. agr. coop., Consorzio Casalasco del Pomodoro Soc. agr. coop., Agricoltori Riuniti Piacentini (ARP) Soc. agr. coop., Orogel Fresco Soc. agr. coop., Conserve Italia Soc. agr. coop., Fruttagel Soc. agr. coop. (ci-après, ensemble, «Anecoop e.a.») ainsi que l’Unione Nazionale tra le Organizzazioni di Produttori Ortofrutticoli, Agrumari e di Frutta in Guscio (Unaproa), ont été admis à intervenir dans l’affaire C‑457/13 P au soutien des conclusions de la Commission.

    27      Les parties et l’avocat général entendus, la Cour a décidé de joindre les affaires C‑455/13 P, C‑457/13 P et C‑460/13 P aux fins de la procédure orale et de l’arrêt, conformément à l’article 54 du règlement de procédure de la Cour.

    28      La Confederazione Cooperative Italiane, la Cooperativas Agro-Alimentarias, la Felcoop, la Commission, soutenue par la République française, Anecoop e.a. ainsi que par l’Unaproa, et la République italienne (ci-après les «demanderesses au pourvoi») demandent à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué et sollicitent, à l’exception de la République française, la condamnation des demanderesses en première instance aux dépens.

    29      La Confederazione Cooperative Italiane, la Cooperativas Agro-Alimentarias, la Felcoop, la Commission et les parties intervenant à son soutien dans l’affaire C‑457/13 P demandent en outre à la Cour qu’elle statue définitivement sur le litige en déclarant que les recours dans les affaires T‑454/10 et T‑482/11 étaient irrecevables. À titre subsidiaire, elles sollicitent, si ces recours étaient jugés recevables, l’annulation de l’arrêt attaqué au fond ainsi que le renvoi de l’affaire devant le Tribunal et, à titre plus subsidiaire, l’annulation de tout ou partie de l’arrêt attaqué concernant les effets de l’annulation prononcée.

    30      L’Anicav, Agrucon e.a. ainsi qu’AIIPA e.a. (ci-après les «défenderesses au pourvoi») concluent au rejet du pourvoi et à la condamnation aux dépens des demanderesses au pourvoi.

     Sur le pourvoi

     Sur la qualité pour agir des demanderesses en première instance

     Argumentation des parties

    31      Les demanderesses au pourvoi font valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant recevables, en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, les recours en annulation introduits par les demanderesses en première instance.

    32      La Confederazione Cooperative Italiane, la Cooperativas Agro-Alimentarias, la Felcoop ainsi qu’Anecoop e.a. soutiennent, tout d’abord, que le Tribunal a effectué une interprétation erronée des dispositions contestées, conduisant à une application incorrecte de l’article 263, quatrième et sixième alinéas, TFUE. En effet, le régime d’aide en question et la discrimination alléguée entre les transformateurs industriels de fruits et légumes et les organisations de producteurs s’engageant dans des activités de transformation découleraient non pas des dispositions contestées, mais du règlement «OCM unique» prévoyant le financement des programmes opérationnels desdites organisations. Ainsi, par leurs recours, les demanderesses en première instance viseraient en réalité à remettre en cause un acte législatif, alors qu’elles n’ont pas qualité pour le faire, en contournant le délai prévu à l’article 263, sixième alinéa, TFUE.

    33      Concernant, ensuite, la question de savoir si les demanderesses en première instance sont directement concernées par les dispositions contestées, la Confederazione Cooperative Italiane, la Cooperativas Agro-Alimentarias et la Felcoop estiment que c’est à tort que le Tribunal a affirmé que ces dispositions avaient directement causé un désavantage concurrentiel aux transformateurs industriels de fruits et légumes au bénéfice des organisations de producteurs, alors que les dispositions relatives aux taux forfaitaires n’établissent pas un régime d’aide, mais se bornent à réglementer un aspect technique du régime d’aide préexistant, à savoir la méthode de calcul de la VPC des organisations de producteurs, et n’apportent aucun changement à la situation juridique des transformateurs. De même, l’éligibilité des investissements et des actions liés à la transformation des fruits et légumes ne serait pas la conséquence de l’article 60, paragraphe 7, du règlement d’exécution n° 543/2011, mais résulterait du choix fondamental d’accorder un soutien effectif aux organisations de producteurs que le législateur de l’Union a fait dans le règlement «OCM unique». Ainsi, les transformateurs de fruits et légumes se trouveraient entièrement en dehors du champ d’application des dispositions contestées.

    34      En outre, les demanderesses au pourvoi estiment que le Tribunal a commis une erreur de droit en assimilant la position des demanderesses en première instance à celle d’un concurrent d’un bénéficiaire d’une aide d’État alors que le droit de la concurrence ne peut être appliqué aux régimes d’aide qui représentent l’essence même de la politique agricole commune. La Commission et l’Unaproa observent également, à cet égard, que les règles de gestion des aides dans le secteur des fruits et légumes en vertu du règlement «OCM unique» ne revêtent pas un caractère spécifique, mais sont de portée générale.

    35      C’est également à tort, selon la Confederazione Cooperative Italiane, la Cooperativas Agro-Alimentarias, la Felcoop, la République française, Anecoop e.a. ainsi que l’Unaproa, que le Tribunal a considéré que les dispositions contestées ne laissaient aucune marge d’appréciation aux États membres. En effet, les États membres et les autorités locales compétentes ne seraient pas privés de leur marge d’appréciation pour calculer la VPC et l’éligibilité des investissements et des actions liés à la transformation de fruits et légumes à une aide versée dans le cadre d’un programme opérationnel n’aurait pas un caractère purement automatique, de tels investissements et actions devant être recensés dans la stratégie nationale.

    36      De même, enfin, selon les demanderesses au pourvoi, le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant que les dispositions contestées ne comportaient pas de mesures d’exécution alors que ces dispositions, s’inscrivant dans le cadre du régime général de mise en œuvre des règles relatives aux fonds opérationnels et aux programmes opérationnels des organisations de producteurs dans le secteur des fruits et légumes prévues par le règlement «OCM unique», supposent, pour être mises en œuvre, que les autorités nationales approuvent les projets de programmes opérationnels notifiés par ces organisations de producteurs après avoir notamment vérifié le calcul prévisionnel de la VPC, que lesdites organisations introduisent une demande d’aide et fournissent des pièces justificatives et qu’un acte approuvant le montant de l’aide soit adopté. S’agissant plus particulièrement de l’éligibilité des investissements et des actions, elles ajoutent que la sélection de ceux-ci est entièrement confiée aux autorités nationales.

    37      Les participants à l’audience ayant été invités par la Cour à concentrer leurs plaidoiries sur les enseignements à tirer de l’arrêt T & L Sugars et Sidul Açúcares/Commission (C‑456/13 P, EU:C:2015:284), prononcé le 28 avril 2015, les demanderesses au pourvoi ont notamment fait valoir que celui-ci apportait la confirmation de ce que les demanderesses en première instance, en tant que transformateurs industriels de fruits et légumes, ne pouvaient être considérées comme étant directement concernées par les dispositions contestées, celles-ci n’affectant pas directement leur situation juridique. Il découle en effet, selon elles, de cet arrêt que le désavantage concurrentiel allégué ne constitue tout au plus qu’une conséquence factuelle de ces dispositions et que la jurisprudence en matière d’aides d’État ne peut être appliquée par analogie aux aides relevant de la politique agricole commune.

    38      Les défenderesses au pourvoi, s’opposant tout d’abord à l’allégation selon laquelle elles contesteraient indirectement le règlement «OCM unique», exposent qu’elles ne remettent pas en cause le choix fait par le législateur dans ce règlement de faire une distinction entre le secteur des fruits et légumes frais et celui des fruits et légumes transformés et de ne permettre l’octroi de l’aide qu’au premier de ces secteurs. Elles s’opposent en revanche à ce que des organisations de producteurs reçoivent une aide de l’Union concernant des activités relevant du secteur des fruits et légumes transformés, en violation du règlement «OCM unique».

    39      Elles font valoir, ensuite, que les dispositions contestées les concernent directement dans la mesure où, en permettant l’inclusion des activités appelées «non véritables activités de transformation» dans la VPC et l’éligibilité des investissements et des actions liés à des activités de transformation exercées par les organisations de producteurs à une aide, la situation juridique des transformateurs industriels définie par le règlement «OCM unique» a été sensiblement modifiée, ceux-ci étant placés dans une situation concurrentielle désavantageuse.

    40      Elles ajoutent que les règles relatives aux taux forfaitaires et à l’éligibilité des investissements et des actions liés à des activités de transformation ne laissent aucune marge d’appréciation aux États membres, les règles relatives à ces taux devant être directement et intégralement suivies par ces derniers et la possibilité pour les autorités nationales de décider de ne pas inclure les activités de transformation dans la liste des dépenses éligibles étant purement théorique.

    41      Enfin, les défenderesses au pourvoi exposent, concernant l’absence de mesures d’exécution, que les procédures nationales constituent non pas des mesures d’exécution de l’article 52, paragraphe 2 bis, du règlement n° 1580/2007 ou de l’article 50, paragraphe 3, du règlement d’exécution n° 543/2011, mais de simples procédures administratives suivies par les autorités nationales qui servent d’intermédiaire pour le paiement de l’aide. Les règles de calcul de l’aide seraient, quant à elles, clairement établies dans ces règlements et seraient, en tant que telles, directement applicables, sans nécessiter de mesures d’exécution. De même, les stratégies nationales seraient non pas des mesures d’exécution de l’article 60, paragraphe 7, du règlement d’exécution n° 543/2011, mais plutôt des mesures d’exécution de l’article 103 septies, paragraphe 2, du règlement «OCM unique». Leur but ne serait pas de déclarer les investissements et les actions liés à des activités de transformation comme étant éligibles à l’aide de l’Union.

    42      En tout état de cause, les dispositions contestées porteraient en elles-mêmes préjudice à leurs droits sans nécessiter ni même permettre, pour produire cet effet, de quelconques mesures d’exécution de la part de l’Union ou des États membres. En effet, les mesures spécifiques prises dans ce contexte ne viseraient que les organisations de producteurs et non les transformateurs qui n’auraient pas la possibilité de les contester ni même d’en avoir connaissance.

    43      Lors de l’audience, les défenderesses au pourvoi ont notamment fait valoir que la présente affaire se distinguait de celle ayant donné lieu à l’arrêt T & L Sugars et Sidul Açúcares/Commission (C‑456/13 P, EU:C:2015:284) en ce que, en l’occurrence, il s’agit de la même activité, utilisant les mêmes matières premières et produisant les mêmes produits. En outre, les dispositions contestées étant, selon elles, contraires au règlement «OCM unique», il n’y aurait pas de raison de ne pas apprécier la condition de l’affectation directe comme en matière d’aides d’État.

     Appréciation de la Cour

    44      Par leurs recours, les demanderesses en première instance ont sollicité l’annulation de l’article 52, paragraphe 2 bis, du règlement n° 1580/2007 et de l’article 50, paragraphe 3, du règlement d’exécution n° 543/2011, qui fixent les taux forfaitaires applicables à différentes catégories de fruits et légumes permettant de calculer la VPC des fruits et légumes destinés à la transformation qui ont été transformés par les organisations de producteurs, ladite VPC servant à déterminer le montant de l’aide financière communautaire pouvant être octroyée aux organisations de producteurs pour le financement des programmes opérationnels approuvés par les États membres. Elles ont en outre demandé l’annulation de l’article 60, paragraphe 7, du règlement d’exécution n° 543/2011 en vertu duquel les investissements et les actions liés à la transformation de fruits et légumes en fruits et légumes transformés peuvent bénéficier d’une aide s’ils poursuivent les objectifs des programmes opérationnels et ont été recensés dans la stratégie nationale.

    45      Pour juger que les demanderesses en première instance étaient directement concernées, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, dernier membre de phrase, TFUE, par les dispositions contestées, le Tribunal, après avoir considéré que ces dernières ne laissaient aucune marge d’appréciation aux États membres, a énoncé ce qui suit:

    «40      En ce qui concerne l’argument de la Commission, selon lequel le désavantage concurrentiel découlant des dispositions contestées pour les requérantes [en première instance] et leurs membres constituerait une conséquence factuelle indirecte, il y a lieu de relever que l’affectation de la position concurrentielle des[dites] requérantes et de leurs membres découle directement des taux forfaitaires spécifiques établis par l’article 52, paragraphe 2 bis, du règlement n° 1580/2007 et par l’article 50, paragraphe 3, du règlement d’exécution n° 543/2011 ainsi que de l’éligibilité des investissements et actions liés à la transformation au financement de l’Union en vertu de l’article 60, paragraphe 7, de ce dernier règlement, si bien qu’ils sont directement concernés par les dispositions contestées (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 11 juillet 1996, Métropole télévision e.a./Commission, T‑528/93, T‑542/93, T‑543/93 et T‑546/93, [EU:T:1996:99], point 64).

    41      De surcroît, l’interprétation de la Commission sur le sens de l’affectation directe empêcherait tout justiciable de demander l’annulation d’un acte ayant pour objet le versement d’une aide à ses concurrents, puisque le désavantage correspondant ne serait qu’une conséquence factuelle indirecte. Or, si, en vertu d’une jurisprudence constante, il est acquis que le concurrent du bénéficiaire d’une aide est directement concerné par une décision de la Commission autorisant un État membre à verser celle-ci lorsque la volonté dudit État d’y procéder ne fait nul doute (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 27 avril 1995, AAC e.a./Commission, T‑442/93, [EU:T:1995:80], points 45 et 46; ASPEC e.a./Commission, T‑435/93, [EU:T:1995:79], points 60 et 61, et du 22 octobre 1996, Skibsværftsforeningen e.a./Commission, [EU:T:1996:153], point 49), une disposition du droit de l’Union qui prévoit l’octroi d’une aide de l’Union elle-même est à plus forte raison de nature à concerner directement au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, le concurrent du bénéficiaire de ladite aide.»

    46      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, la condition selon laquelle une personne physique ou morale doit être directement concernée par la décision attaquée, telle que prévue à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, requiert que la mesure de l’Union contestée produise directement des effets sur la situation juridique du particulier et ne laisse aucun pouvoir d’appréciation à ses destinataires qui sont chargés de sa mise en œuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation de l’Union, sans application d’autres règles intermédiaires (voir arrêts Glencore Grain/Commission, C‑404/96 P, EU:C:1998:196, point 41; Front national/Parlement, C‑486/01 P, EU:C:2004:394, point 34; Commission/Ente per le Ville Vesuviane et Ente per le Ville Vesuviane/Commission, C‑445/07 P et C‑455/07 P, EU:C:2009:529, point 45, ainsi que Stichting Woonpunt e.a./Commission, C‑132/12 P, EU:C:2014:100, point 68).

    47      Dans l’arrêt T & L Sugars et Sidul Açúcares/Commission (C‑456/13 P, EU:C:2015:284), la Cour a constaté que des entreprises de raffinage de sucre de canne importé n’étaient pas directement concernées par deux règlements de la Commission permettant aux producteurs de l’Union de commercialiser une quantité limitée de sucre et d’isoglucose hors quota et dont elles demandaient l’annulation. La Cour a relevé, en effet, au point 37 de cet arrêt, que «les requérantes [dans cette affaire], dans la mesure où elles n’[avaient] pas la qualité de producteurs de sucre et n’[étaient] pas directement affectées dans leur situation juridique par lesdits règlements, n’[étaient] pas directement concernées par ces règlements au sens de l’article 263, quatrième alinéa, dernier membre de phrase, TFUE».

    48      La position des demanderesses en première instance dans la présente affaire par rapport aux dispositions contestées est analogue à celle des requérantes dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt par rapport à ces deux règlements. En effet, étant non pas des producteurs de fruits et légumes, mais des transformateurs industriels de fruits et légumes, elles invoquent uniquement, pour justifier de leur qualité pour agir, le fait que ces dispositions les placent dans une situation concurrentielle désavantageuse.

    49      Or, un tel fait ne permet pas en soi de considérer qu’elles sont affectées dans leur situation juridique par les dispositions contestées, adoptées dans le cadre de la politique agricole commune, et qu’elles sont, partant, directement concernées par celles-ci (voir, en ce sens, arrêt T & L Sugars et Sidul Açúcares/Commission, C‑456/13 P, EU:C:2015:284, point 37 et jurisprudence citée).

    50      Par conséquent, en jugeant, aux points 40 et 41 de l’arrêt attaqué, que les demanderesses en première instance étaient directement concernées par les dispositions contestées au seul motif que ces dernières affectaient leur position concurrentielle, le Tribunal a commis une erreur de droit.

    51      Ainsi, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les motifs de l’arrêt attaqué selon lesquels les dispositions contestées ne laissaient pas de marge d’appréciation aux États membres et ne comportaient pas de mesures d’exécution, il y a lieu d’annuler ledit arrêt en ce qu’il a déclaré recevables les recours en tant qu’ils tendaient à l’annulation de ces dispositions.

     Sur la recevabilité des recours en première instance

    52      Conformément à l’article 61, premier alinéa, seconde phrase, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, cette dernière peut, en cas d’annulation de la décision du Tribunal, statuer définitivement sur le litige lorsque celui-ci est en état d’être jugé.

    53      En l’espèce, il résulte des motifs énoncés aux points 46 à 51 du présent arrêt que c’est à tort que le Tribunal a déclaré recevables les recours en première instance en tant qu’ils visaient à l’annulation des dispositions contestées.

    54      Le Tribunal n’ayant pas statué sur le recours dans l’affaire T‑454/10 en tant que celui-ci tendait à l’annulation de l’annexe VIII du règlement n° 1580/2007, au motif, énoncé au point 35 de l’arrêt attaqué, qu’il n’y avait pas lieu d’annuler cette annexe s’il était fait droit à la demande d’annulation de l’article 52, paragraphe 2 bis, de ce même règlement, et ne s’étant donc pas prononcé sur la fin de non-recevoir soulevée également par la Commission à l’encontre de cette demande, il doit être constaté que cette dernière est irrecevable, en tout état de cause, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 46 et 50 du présent arrêt.

    55      Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter comme irrecevables les recours en annulation introduits dans les affaires T‑454/10 et T‑482/11.

     Sur les dépens

    56      En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens. Conformément à l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce dernier à la procédure de pourvoi, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

    57      Selon l’article 184, paragraphe 4, seconde phrase, dudit règlement, la Cour peut décider qu’une partie intervenante en première instance, qui n’a pas formé elle-même le pourvoi et qui a participé à la phase écrite ou orale de la procédure devant la Cour, supportera ses propres dépens.

    58      En vertu de l’article 140, paragraphe 1, du même règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens.

    59      En l’espèce, les demanderesses en première instance ayant succombé en leurs moyens et la Confederazione Cooperative Italiane, la Cooperativas Agro-Alimentarias, la Felcoop, la République italienne, Anecoop e.a. et l’Unaproa ayant conclu à leur condamnation aux dépens, de même que la Commission dans l’affaire C‑457/13 P, il y a lieu de les condamner solidairement aux dépens exposés en première instance et/ou dans les présents pourvois par ces dernières.

    60      AIT – Associação dos Industriais de Tomate et la République française supporteront leurs propres dépens.

    Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) déclare et arrête:

    1)      L’arrêt du Tribunal de l’Union européenne Anicav e.a./Commission (T‑454/10 et T‑482/11, EU:T:2013:282) est annulé en ce qu’il a déclaré recevables les recours introduits dans les affaires T‑454/10 et T‑482/11 en tant que ceux-ci tendaient à l’annulation de l’article 52, paragraphe 2 bis, deuxième alinéa, du règlement (CE) n° 1580/2007 de la Commission, du 21 décembre 2007, portant modalités d’application des règlements (CE) n° 2200/96, (CE) n° 2201/96 et (CE) n° 1182/2007 du Conseil dans le secteur des fruits et légumes, tel que modifié par le règlement (UE) n° 687/2010 de la Commission, du 30 juillet 2010, ainsi que des articles 50, paragraphe 3, et 60, paragraphe 7, du règlement d’exécution (UE) n° 543/2011 de la Commission, du 7 juin 2011, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne les secteurs des fruits et légumes et des fruits et légumes transformés.

    2)      Les recours en annulation introduits dans les affaires T‑454/10 et T‑482/11 sont rejetés comme irrecevables.

    3)      L’Associazione Nazionale degli Industriali delle Conserve Alimentari Vegetali (Anicav), l’Agrupación Española de Fabricantes de Conservas Vegetales (Agrucon), l’Associazione Italiana Industrie Prodotti Alimentari (AIIPA), Campil-Agro-Industrial do Campo do Tejo Lda, l’Evropaïka Trofima AE, FIT – Fomento da Indústria do Tomate SA, Konservopoiia Oporokipeftikon Filippos AE, Panellinia Enosi Konservopoion, Elliniki Etairia Konservon AE, Anonymos Viomichaniki Etaireia Konservon D. Nomikos, Italagro – Indústria de Transformação de Produtos Alimentares SA, Kopaïs AVEE Trofimon & Poton, Serraïki Konservopoiia Oporokipeftikon Serko AE, Sociedade de Industrialização de Produtos Agrícolas – Sopragol SA, Sugalidal – Indústrias de Alimentação SA, Sutol – Indústrias Alimentares Lda et ZANAE Zymai Artopoiias Nikoglou AE Viomichania Emporio Trofimon sont condamnées aux dépens exposés en première instance et/ou dans les pourvois par la Confederazione Cooperative Italiane, la Cooperativas Agro-Alimentarias, la Fédération française de la coopération fruitière, légumière et horticole (Felcoop), la Commission européenne dans l’affaire C‑457/13 P, la République italienne, la Sociedad Cooperativa de Exportación de Frutos Cítricos Anecoop (Anecoop) S. Coop, la Cooperativa Agrícola Nuestra Señora del Oreto (CANSO) Coop. V., la Cooperativa Agrícola «Sant Bernat» (Carlet) Coop. V., la Cooperativa Agrícola SCJ (COPAL) Coop. V., Grupo AN S. Coop., l’Acopaex S. Coop., Las Marismas de Lebrija Sociedad Cooperativa Andaluza (Las Marismas), l’Associació de Cooperatives Agràries de les Terres de Lleida (ACTEL), l’Unió Corporació Alimentária (UNIO) SCCL, l’Union Coopérative Agricole France Prune (France Prune), Agrial SCA, Triskalia, l’Union Fermière Morbihannaise (UFM), VOG Products Soc. agr. coop., Consorzio Padano Ortofrutticolo (CO.PAD.OR.) Soc. agr. coop., Consorzio Casalasco del Pomodoro Soc. agr. coop., Agricoltori Riuniti Piacentini (ARP) Soc. agr. coop., Orogel Fresco Soc. agr. coop., Conserve Italia Soc. agr. coop., Fruttagel Soc. agr. coop. ainsi que par l’Unione Nazionale tra le Organizzazioni di Produttori Ortofrutticoli, Agrumari e di Frutta in Guscio (Unaproa).

    4)      AIT – Associação dos Industriais de Tomate et la République française supportent leurs propres dépens.

    Signatures


    * Langue de procédure: l’anglais.

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