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Document 62001CJ0018

    Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 22 mai 2003.
    Arkkitehtuuritoimisto Riitta Korhonen Oy, Arkkitehtitoimisto Pentti Toivanen Oy et Rakennuttajatoimisto Vilho Tervomaa contre Varkauden Taitotalo Oy.
    Demande de décision préjudicielle: Kilpailuneuvosto - Finlande.
    Directive 92/50/CEE - Marchés publics de services - Notion de 'pouvoir adjudicateur' - Organisme de droit public - Société créée par une collectivité territoriale en vue de promouvoir le développement d'activités industrielles ou commerciales sur le territoire de ladite collectivité.
    Affaire C-18/01.

    Recueil de jurisprudence 2003 I-05321

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2003:300

    62001J0018

    Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 22 mai 2003. - Arkkitehtuuritoimisto Riitta Korhonen Oy, Arkkitehtitoimisto Pentti Toivanen Oy et Rakennuttajatoimisto Vilho Tervomaa contre Varkauden Taitotalo Oy. - Demande de décision préjudicielle: Kilpailuneuvosto - Finlande. - Directive 92/50/CEE - Marchés publics de services - Notion de 'pouvoir adjudicateur' - Organisme de droit public - Société créée par une collectivité territoriale en vue de promouvoir le développement d'activités industrielles ou commerciales sur le territoire de ladite collectivité. - Affaire C-18/01.

    Recueil de jurisprudence 2003 page I-05321


    Parties
    Motifs de l'arrêt
    Décisions sur les dépenses
    Dispositif

    Parties


    Dans l'affaire C-18/01,

    ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 234 CE, par le Kilpailuneuvosto (Finlande) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

    Arkkitehtuuritoimisto Riitta Korhonen Oy,

    Arkkitehtitoimisto Pentti Toivanen Oy,

    Rakennuttajatoimisto Vilho Tervomaa

    et

    Varkauden Taitotalo Oy,

    une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 1er, sous b), de la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services (JO L 209, p. 1),

    LA COUR

    (cinquième chambre),

    composée de M. C. W. A. Timmermans (rapporteur), président de la quatrième chambre, faisant fonction de président de la cinquième chambre, MM. D. A. O. Edward, P. Jann, S. von Bahr et A. Rosas, juges,

    avocat général: M. S. Alber,

    greffier: Mme M.-F. Contet, administrateur principal,

    considérant les observations écrites présentées:

    - pour Varkauden Taitotalo Oy, par Me H. Tuure, asianajaja,

    - pour le gouvernement finlandais, par Mme T. Pynnä, en qualité d'agent,

    - pour le gouvernement français, par MM. G. de Bergues et S. Pailler, en qualité d'agents,

    - pour le gouvernement autrichien, par M. M. Fruhmann, en qualité d'agent,

    - pour la Commission des Communautés européennes, par MM. M. Nolin et M. Huttunen, en qualité d'agents,

    vu le rapport d'audience,

    ayant entendu les observations orales du gouvernement finlandais et de la Commission à l'audience du 16 mai 2002,

    ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 11 juillet 2002,

    rend le présent

    Arrêt

    Motifs de l'arrêt


    1 Par décision du 14 décembre 2000, parvenue à la Cour le 16 janvier 2001, le Kilpailuneuvosto (Conseil de la concurrence) a posé, en application de l'article 234 CE, trois questions préjudicielles sur l'interprétation de l'article 1er, sous b), de la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services (JO L 209, p. 1).

    2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant les sociétés Arkkitehtuuritoimisto Riitta Korhonen Oy et Arkkitehtitoimisto Pentti Toivanen Oy ainsi que l'entreprise Rakennuttajatoimisto Vilho Tervomaa (ci-après, ensemble, «Korhonen e.a.») à la société Varkauden Taitotalo Oy (ci-après «Taitotalo»), au sujet de la décision de cette dernière de ne pas retenir l'offre qu'elles avaient faite dans le cadre d'un marché relatif à la fourniture de services de planification et de construction d'un projet immobilier.

    Le cadre juridique

    La réglementation communautaire

    3 L'article 1er, sous b), de la directive 92/50 dispose:

    «Aux fins de la présente directive:

    [...]

    b) sont considérés comme `pouvoirs adjudicateurs', l'État, les collectivités territoriales, les organismes de droit public, les associations formées par une ou plusieurs de ces collectivités ou de ces organismes de droit public.

    Par `organisme de droit public', on entend tout organisme:

    - créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial

    et

    - ayant la personnalité juridique

    et

    - dont, soit l'activité est financée majoritairement par l'État, les collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public, soit la gestion est soumise à un contrôle par ces derniers, soit l'organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié est désignée par l'État, les collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public.

    Les listes des organismes et des catégories d'organismes de droit public qui remplissent les critères énumérés au deuxième alinéa du présent point figurent à l'annexe I de la directive 71/305/CEE. Ces listes sont aussi complètes que possible et peuvent être révisées selon la procédure prévue à l'article 30 ter de ladite directive».

    La réglementation nationale

    4 La directive 92/50 a été transposée en droit finlandais par la julkisista hankinnoista annettu laki (loi sur les marchés publics) 1505/1992, du 23 décembre 1992 (ci-après la «loi 1505/1992»).

    5 Cette loi comporte, à son article 2, une définition du pouvoir adjudicateur très proche de celle qui figure à l'article 1er, sous b), de la directive 92/50. En effet, aux termes de l'article 2, premier alinéa, point 2, de la loi 1505/1992, sont considérées comme «pouvoirs adjudicateurs», au sens de cette loi, les personnes morales «faisant partie de l'administration publique». Il ressort du second alinéa du même article que ladite condition est réputée remplie lorsqu'une personne morale a été créée en vue de satisfaire des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial et dont soit l'activité est financée majoritairement par les pouvoirs publics, soit la gestion est soumise à un contrôle par ces derniers, soit l'organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié est désignée par les pouvoirs publics.

    Le litige au principal et les questions préjudicielles

    6 Taitotalo est une société anonyme dont le capital est détenu en totalité par la ville de Varkaus (Finlande) et dont l'objet consiste à acheter, à vendre et à louer des biens immobiliers ainsi que des parts de sociétés immobilières, et à organiser et à fournir des services de gestion immobilière et d'autres prestations connexes rendues nécessaires par l'administration desdits biens et parts. Le conseil d'administration de cette société comprend trois membres, fonctionnaires de la ville de Varkaus, nommés par l'assemblée générale des actionnaires de la société, dans laquelle ladite ville détient 100 % des voix. D'après les indications fournies par la juridiction de renvoi, l'acte fondateur de la société a été signé le 21 janvier 2000 et elle a été immatriculée au registre du commerce le 6 avril 2000.

    7 À la suite de la décision prise par la ville de Varkaus de créer, sur son territoire, un pôle de développement technologique dénommé «Tyyskän osaamiskeskus» («centre de compétences de Tyyskä»), Taitotalo y fait construire plusieurs immeubles de bureaux ainsi qu'un immeuble de stationnement couvert. L'objectif déclaré de cette société est d'acheter le terrain à la ville de Varkaus, une fois le lotissement effectué, et de louer ensuite les immeubles nouvellement construits à l'industrie de pointe.

    8 Afin de mener à bien un tel projet, il a été fait appel aux services de construction, de commercialisation et de coordination fournis par la société Keski-Savon Teollisuuskylä Oy (ci-après «Teollisuuskylä»). Conformément à ses statuts, cette dernière société - qui appartient à une société de développement régional dont le capital est détenu, pour l'essentiel, par la ville de Varkaus et d'autres communes de la région du Savo central - a pour objet principal de construire, d'acquérir et de gérer des locaux à usage industriel ou commercial ainsi que des biens immobiliers principalement destinés à l'usage des entreprises, auxquelles ils sont cédés à prix coûtant.

    9 Par un premier appel d'offres du 6 juillet 1999, Teollisuuskylä a sollicité des offres pour la fourniture de services de planification et de construction de la première phase du projet immobilier précité, qui porte sur la construction des bâtiments Tyyskä 1, destiné à l'usage de la société Honeywell-Measurex Oy, et Tyyskä 2, destiné à plusieurs petites entreprises. À l'expiration du délai qui avait été fixé pour soumissionner, soit à la fin du mois d'août 1999, Teollisuuskylä a toutefois fait savoir aux candidats que, en raison de modifications intervenues dans le capital de la société immobilière à créer - Taitotalo - la planification et la construction du projet en cause devaient faire l'objet d'une procédure d'adjudication ouverte, publiée au Journal officiel des Communautés européennes.

    10 Après modification du cahier des charges, Teollisuuskylä a donc, par un second appel d'offres du 4 septembre 1999, engagé une nouvelle procédure d'adjudication du marché relatif à la fourniture de services de planification et de construction de la première phase du projet. Il était précisé que les donneurs d'ordres étaient la ville de Varkaus et Teollisuuskylä. Un avis d'appel d'offres a en outre été publié au Virallinen lehti (Journal officiel de la république de Finlande) n_ 35, du 2 septembre 1999, sous l'intitulé «suunnittelukilpailu» (concours relatif à une planification). Cet avis désignait comme pouvoir adjudicateur la ville de Varkaus, pour le compte de la société immobilière à créer.

    11 Korhonen e.a. ont déposé des offres dans le cadre de cette nouvelle procédure, mais ont été informées, par lettre du 6 avril 2000 émanant de Taitotalo, que la société JP-Terasto Oy et le groupe dirigé par la société Arkkitehtitoimisto Pekka Paavola Oy avaient été retenus pour concevoir et construire, respectivement, les bâtiments Tyyskä 1 et Tyyskä 2.

    12 Estimant que la réglementation finlandaise sur les marchés publics n'avait pas été respectée, Korhonen e.a. ont, les 17 et 26 avril 2000, saisi le Kilpailuneuvosto de demandes tendant soit à l'annulation de la décision d'attribution du marché ou, à titre subsidiaire, à l'octroi de dommages et intérêts, soit uniquement à l'octroi de dommages et intérêts.

    13 Devant le Kilpailuneuvosto, Taitotalo a soutenu que les recours introduits par Korhonen e.a. devaient être déclarés irrecevables au motif qu'elle n'était pas un pouvoir adjudicateur au sens de l'article 2 de la loi 1505/1992. Se fondant notamment sur une décision rendue dans une affaire similaire par le Korkein hallinto-oikeus (Cour administrative suprême), Taitotalo a fait valoir qu'elle n'avait pas été créée pour s'acquitter de missions d'intérêt général dépourvues de caractère industriel ou commercial, et que, en tout état de cause, le montant de l'aide publique accordée pour la réalisation du projet immobilier concerné n'atteignait pas la moitié du montant total de l'opération.

    14 Considérant que la solution du litige pendant devant lui dépendait d'une interprétation du droit communautaire, notamment au vu de la généralisation, en Finlande, de la pratique consistant pour les collectivités publiques à créer, à détenir et à gérer des sociétés anonymes qui ne poursuivent pas elles-mêmes un but lucratif, mais visent en revanche à créer des conditions favorables à l'exercice d'activités commerciales ou industrielles sur le territoire desdites collectivités, le Kilpailuneuvosto - devenu, à compter du 1er mars 2002, le Markkinaoikeus (Tribunal de la concurrence) - a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

    «1) Une société anonyme, qui est la propriété d'une municipalité et dans laquelle celle-ci détient le pouvoir de direction, peut-elle être considérée comme un pouvoir adjudicateur au sens de l'article 1er, sous b), de la directive 92/50/CEE relative à la coordination des procédures de passation des marchés de services, dès lors que cette société acquiert des services de planification et de construction dans le but de construire des locaux destinés à être loués à des entreprises?

    2) Le fait que le projet de construction vise à créer dans une ville les conditions favorables à l'exercice d'activités lucratives influe-t-il sur l'appréciation?

    3) Le fait que les locaux à construire ne soient loués qu'à une seule entreprise influe-t-il sur l'appréciation?»

    Sur la recevabilité des questions préjudicielles

    15 Se fondant sur la jurisprudence de la Cour selon laquelle, pour permettre à cette dernière de fournir une interprétation du droit communautaire qui soit utile pour le juge national, celui-ci doit définir le cadre factuel et réglementaire dans lequel s'insèrent les questions qu'il pose ou, à tout le moins, expliquer les hypothèses factuelles sur lesquelles ces questions sont fondées (voir, notamment, arrêt du 21 septembre 1999, Brentjens', C-115/97 à C-117/97, Rec. p. I-6025, point 38), la Commission exprime des doutes quant à la recevabilité des questions posées, au motif que la décision de renvoi ne permettrait pas de discerner les dispositions sur la base desquelles les deux procédures d'adjudication ont été engagées et celles qui n'auraient pas été appliquées dans le litige au principal et que, de surcroît, ladite décision ne révélerait pas l'identité de l'instance qui aurait, au moins formellement, réalisé la procédure de marché public.

    16 Le gouvernement français relève pour sa part que, s'agissant du second appel d'offres, la décision de renvoi mentionne la ville de Varkaus à la fois comme pouvoir adjudicateur et comme donneur d'ordres. Dans ces conditions, ce gouvernement s'interroge sur la nécessité d'un renvoi préjudiciel dans la mesure où, d'une part, au moment de la publication de cet appel d'offres, Taitotalo n'avait pas encore la personnalité juridique, exigée par la directive 92/50, et où, d'autre part, la ville de Varkaus, en tant que collectivité territoriale, est en tout état de cause soumise au régime de ladite directive.

    17 Le gouvernement français fait également valoir que, contrairement à ce qui avait été annoncé aux soumissionnaires par Teollisuuskylä, en août 1999, il n'y aurait pas eu de publication du second appel d'offres au Journal officiel des Communautés européennes.

    18 Sans qu'il soit besoin de s'interroger ici sur la question de savoir si l'appel d'offres pour le marché en cause au principal devait ou non faire l'objet d'une publication au Journal officiel des Communautés européennes, il convient de rejeter d'emblée l'argument du gouvernement français tiré du défaut de publication du second appel d'offres dès lors que, ainsi que le gouvernement finlandais l'a relevé au cours de l'audience, cet appel d'offres a été publié dans le supplément n_ 171 du Journal officiel des Communautés européennes du 3 septembre 1999.

    19 En ce qui concerne, par ailleurs, les doutes du gouvernement français quant à la nécessité des questions posées et les objections de la Commission tirées du caractère imprécis du cadre juridique et factuel du litige au principal, tel qu'il ressort de la décision de renvoi, il convient de rappeler que, en vertu d'une jurisprudence constante, il appartient aux seules juridictions nationales qui sont saisies du litige et doivent assumer la responsabilité de la décision judiciaire à intervenir d'apprécier, au regard des particularités de chaque affaire, tant la nécessité d'une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre leur jugement que la pertinence des questions qu'elles posent à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l'interprétation du droit communautaire, la Cour est, en principe, tenue de statuer (voir, notamment, arrêts du 13 mars 2001, PreussenElektra, C-379/98, Rec. p. I-2099, point 38; du 22 janvier 2002, Canal Satélite Digital, C-390/99, Rec. p. I-607, point 18, et du 27 février 2003, Adolf Truley, C-373/00, non encore publié au Recueil, point 21).

    20 En outre, il résulte de cette même jurisprudence que le refus de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n'est possible que lorsqu'il apparaît de manière manifeste que l'interprétation du droit communautaire sollicitée n'a aucun rapport avec la réalité ou l'objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (voir arrêts précités PreussenElektra, point 39, Canal Satélite Digital, point 19, et Adolf Truley, point 22).

    21 Or, en l'espèce, il n'apparaît pas de manière manifeste que les questions posées par la juridiction de renvoi relèvent de l'un de ces cas de figure.

    22 D'une part, en effet, il ne saurait être soutenu que l'interprétation du droit communautaire sollicitée n'a aucun rapport avec la réalité ou l'objet du litige au principal ou est de nature hypothétique puisque la recevabilité du recours au principal dépend notamment de la portée qu'il convient de donner à la notion d'«organisme de droit public», qui figure à l'article 1er, sous b), de la directive 92/50.

    23 D'autre part, même si elle l'a fait de manière sommaire, la juridiction de renvoi a bien fourni à la Cour les éléments nécessaires pour qu'elle soit en mesure d'apporter une réponse utile aux questions posées, notamment en spécifiant, dans la présentation du cadre factuel du litige au principal, que l'avis publié au Virallinen lehti du 2 septembre 1999 mentionnait comme pouvoir adjudicateur la ville de Varkaus, agissant «pour le compte de la société immobilière à créer».

    24 Dans ces conditions, il ne saurait être exclu que Taitotalo, quoique dépourvue de la personnalité juridique au moment de la publication du second appel d'offres, ait joué un rôle déterminant dans la procédure de passation du marché en cause au principal.

    25 Au demeurant, il convient d'observer que, en réponse à une question posée par la Cour lors de l'audience, le gouvernement finlandais a précisé que, en vertu de son droit national, les fondateurs d'une société peuvent agir pour le compte de celle-ci avant son immatriculation au registre du commerce, étant entendu que ladite société assumera, à la date de son immatriculation effective audit registre, l'ensemble des engagements antérieurs pris en son nom.

    26 Or, tel semble avoir été le cas dans l'affaire au principal, puisque la juridiction de renvoi a relevé que Taitotalo a été inscrite au registre du commerce le 6 avril 2000 et que c'est à cette même date que Korhonen e.a. ont été informées par cette société que leurs offres n'avaient pas été retenues.

    27 Dans ces conditions, il ne saurait être exclu que Taitotalo ait assumé, à la date du 6 avril 2000, l'ensemble des engagements antérieurs pris en son nom par la ville de Varkaus et qu'elle puisse, à ce titre, être considérée comme responsable de la procédure de passation du marché en cause au principal.

    28 Au regard des considérations qui précèdent, il y a donc lieu de déclarer recevables les questions posées par le Kilpailuneuvosto.

    Sur les questions préjudicielles

    29 À titre liminaire, il convient de relever que, par les questions qu'elle adresse à la Cour, la juridiction de renvoi cherche à être éclairée sur la notion d'«organisme de droit public» au sens de l'article 1er, sous b), de la directive 92/50, afin de pouvoir apprécier, dans l'affaire au principal, si Taitotalo doit être considérée comme un pouvoir adjudicateur.

    30 À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l'article 1er, sous b), premier alinéa, de la directive 92/50, sont considérés comme «pouvoirs adjudicateurs» l'État, les collectivités territoriales, les organismes de droit public ainsi que les associations formées par une ou plusieurs de ces collectivités ou de ces organismes de droit public.

    31 L'article 1er, sous b), deuxième alinéa, de la directive 92/50 définit par ailleurs un «organisme de droit public» comme étant tout organisme créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial, doté de la personnalité juridique et dépendant étroitement, par son mode de financement, de gestion ou de contrôle, de l'État, de collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public.

    32 Ainsi que la Cour l'a jugé de manière constante (voir, notamment, arrêts du 10 novembre 1998, BFI Holding, C-360/96, Rec. p. I-6821, point 29; du 10 mai 2001, Agorà et Excelsior, C-223/99 et C-260/99, Rec. p. I-3605, point 26, et Adolf Truley, précité, point 34), les conditions énoncées dans cet article revêtent un caractère cumulatif, de sorte que, en l'absence d'une seule de ces conditions, un organisme ne saurait être qualifié d'organisme de droit public et, partant, de pouvoir adjudicateur au sens de la directive 92/50.

    33 Dès lors qu'il n'est pas contesté que Taitotalo est détenue et gérée par une collectivité territoriale et qu'elle est dotée de la personnalité juridique - à tout le moins depuis la date de son immatriculation au registre du commerce, le 6 avril 2000 -, il y a lieu de comprendre les questions posées par la juridiction de renvoi comme portant exclusivement sur la question de savoir si cette société a été créée pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial.

    Sur les première et deuxième questions

    34 Par ses deux premières questions, qu'il y a lieu d'examiner conjointement, la juridiction de renvoi demande, en substance, si une société anonyme créée, détenue et gérée par une collectivité territoriale peut être considérée comme satisfaisant spécifiquement un besoin d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial lorsque l'activité de cette société consiste à acquérir des services en vue de la construction de locaux destinés à l'usage exclusif d'entreprises privées, et si l'appréciation portée sur la satisfaction de cette condition serait différente dans l'hypothèse où le projet de construction en cause viserait à créer dans ladite collectivité territoriale les conditions favorables à l'exercice d'activités lucratives.

    Observations soumises à la Cour

    35 Pour Taitotalo comme pour le gouvernement français, il convient d'apporter une réponse négative à ces deux questions aux motifs que l'activité de Taitotalo ne viserait pas à satisfaire des besoins d'intérêt général et/ou qu'elle revêtirait, en tout état de cause, un caractère industriel ou commercial.

    36 Taitotalo fait valoir, à cet égard, que son objectif unique consiste à faciliter les conditions d'exercice de l'activité d'entreprises bien déterminées et non, de façon générale, l'exercice de l'activité économique dans la ville de Varkaus, tandis que la circonstance qu'elle est détenue et financée par un pouvoir adjudicateur serait dépourvue de toute pertinence dès lors qu'elle satisferait, dans l'affaire au principal, des besoins industriels ou commerciaux. Taitotalo précise notamment, dans ce contexte, qu'elle a acquis au prix du marché le terrain nécessaire pour les constructions en cause au principal et que le financement de ce projet sera essentiellement pris en charge par le secteur privé, au moyen de prêts bancaires garantis par des hypothèques.

    37 Se fondant sur l'arrêt de la Cour du 15 janvier 1998, Mannesmann Anlagenbau Austria e.a. (C-44/96, Rec. p. I-73), dans lequel la Cour se serait attachée à vérifier si l'activité de l'entité en cause dans cette affaire - l'imprimerie d'État autrichienne - se rattachait à une prérogative essentielle de l'État, le gouvernement français estime pour sa part que la location de locaux à usage industriel ou commercial ne peut, en aucun cas, être considérée comme entrant dans les prérogatives qui, par leur nature même, relèvent de la puissance publique. En outre, en raison de sa nature commerciale, cette activité ne pourrait pas davantage être comparée à celles qui étaient en cause dans les arrêts BFI Holding, précité, et du 1er février 2001, Commission/France (C-237/99, Rec. p. I-939), à savoir, respectivement, l'enlèvement et le traitement d'ordures ménagères et la construction de logements sociaux.

    38 Pour le gouvernement finlandais, en revanche, l'activité de Taitotalo figurerait typiquement parmi celles qui répondent à un besoin d'intérêt général dépourvu de caractère industriel ou commercial. D'une part, en effet, cette société n'aurait pas pour but premier de générer des bénéfices par son activité, mais de créer les conditions favorables au développement d'activités économiques sur le territoire de la ville de Varkaus, ce qui cadrerait parfaitement avec les missions dont les collectivités territoriales peuvent se charger en vertu de l'autonomie qui leur est garantie par la Constitution finlandaise. D'autre part, l'objectif de la directive 92/50 serait compromis si pareille société n'était pas considérée comme un pouvoir adjudicateur au sens de ladite directive, les communes pouvant, dans une telle hypothèse, être tentées de créer, dans leur sphère d'activité traditionnelle, d'autres entreprises dont les marchés seraient soustraits au champ d'application de la directive.

    39 Enfin, s'ils n'excluent pas que l'activité de Taitotalo puisse répondre à un besoin d'intérêt général du fait de l'impulsion qu'elle donne aux échanges et au développement d'activités lucratives sur le territoire de la ville de Varkaus, le gouvernement autrichien et la Commission soulignent pour leur part que, au vu des informations lacunaires dont ils disposent, il leur est impossible d'apprécier dans quelle mesure ledit besoin revêt ou non un caractère industriel ou commercial. Ils invitent dès lors la juridiction de renvoi à procéder elle-même à cette appréciation, en examinant notamment la position concurrentielle de Taitotalo et la question de savoir si cette société supporte ou non les risques liés à son activité.

    Réponse de la Cour

    40 À titre liminaire, il convient de rappeler que la Cour a déjà jugé que l'article 1er, sous b), deuxième alinéa, de la directive 92/50 opère une distinction entre, d'une part, les besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial et, d'autre part, les besoins d'intérêt général ayant un caractère industriel ou commercial (voir, notamment, arrêts précités BFI Holding, point 36, et Agorà et Excelsior, point 32). Afin d'apporter une réponse utile aux questions posées, il convient de vérifier d'abord si des activités telles que celle en cause au principal répondent effectivement à des besoins d'intérêt général, puis de déterminer, le cas échéant, si de tels besoins revêtent ou non un caractère industriel ou commercial.

    41 En ce qui concerne la question de savoir si l'activité en cause au principal répond à un besoin d'intérêt général, il y a lieu de constater qu'il ressort de la décision de renvoi que l'activité principale de Taitotalo consiste à acheter, à vendre et à louer des biens immobiliers ainsi qu'à organiser et à fournir des services de gestion immobilière et d'autres prestations accessoires rendues nécessaires par l'administration desdits biens. L'opération menée par Taitotalo dans l'affaire au principal consiste, plus précisément, à acquérir des services de planification et de construction dans le cadre d'un projet immobilier portant sur la construction de plusieurs immeubles de bureaux et d'un immeuble de stationnement couvert.

    42 Dans la mesure où cette opération fait suite à la décision prise par la ville de Varkaus de créer sur son territoire un pôle de développement technologique et où l'objectif déclaré de Taitotalo est d'acheter le terrain à cette ville après l'achèvement du lotissement et de mettre les immeubles nouvellement construits à la disposition de l'industrie de pointe, son activité est susceptible de répondre effectivement à un besoin d'intérêt général.

    43 À cet égard, il convient notamment de rappeler que, saisie de la question de savoir si une entité ayant pour objet d'exercer et de faciliter toute activité visant à l'organisation de foires, d'expositions et de congrès pouvait être considérée comme un organisme de droit public au sens de l'article 1er, sous b), de la directive 92/50, la Cour a jugé que les activités visant à l'organisation de pareilles manifestations satisfont des besoins d'intérêt général dans la mesure où l'organisateur desdites manifestations, en réunissant en un même lieu géographique des fabricants et des commerçants, n'agit pas seulement dans l'intérêt particulier de ces derniers, qui bénéficient ainsi d'un espace de promotion pour leurs produits et marchandises, mais procure également aux consommateurs qui fréquentent ces manifestations une information permettant à ceux-ci d'effectuer leurs choix dans des conditions optimales. L'impulsion qui en résulte pour les échanges peut, en effet, être considérée comme relevant de l'intérêt général (voir arrêt Agorà et Excelsior, précité, points 33 et 34).

    44 Des considérations similaires peuvent être avancées, mutatis mutandis, s'agissant de l'activité en cause au principal, dans la mesure où il ne saurait être nié que, en acquérant des services de planification et de construction dans le cadre d'un projet immobilier portant notamment sur la construction d'immeubles de bureaux, la défenderesse au principal n'agit pas seulement dans l'intérêt particulier des entreprises directement concernées par ledit projet, mais également dans celui de la ville de Varkaus.

    45 Des activités telles que celle exercée par Taitotalo dans l'affaire au principal peuvent en effet être considérées comme répondant à des besoins d'intérêt général dans la mesure où elles sont susceptibles de donner une impulsion aux échanges ainsi qu'au développement économique et social de la collectivité territoriale concernée, l'implantation d'entreprises sur le territoire d'une commune ayant souvent des retombées favorables pour cette commune en termes de création d'emplois, d'augmentation des recettes fiscales ainsi que d'amélioration de l'offre et de la demande de biens et de services.

    46 Plus délicate, en revanche, est la question de savoir si de tels besoins d'intérêt général ont un caractère autre qu'industriel ou commercial. Tandis que le gouvernement finlandais fait valoir que ces besoins sont dépourvus de caractère industriel ou commercial, dans la mesure où Taitotalo ne viserait pas tant à faire du profit qu'à créer les conditions favorables à l'implantation d'entreprises sur le territoire de la ville de Varkaus, la défenderesse au principal soutient la thèse inverse au motif qu'elle satisferait précisément des entreprises commerciales et que le financement du projet immobilier en cause serait essentiellement à la charge du secteur privé.

    47 En vertu d'une jurisprudence constante, constituent en général des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial, au sens de l'article 1er, sous b), des directives communautaires relatives à la coordination des procédures de passation des marchés publics, des besoins qui, d'une part, sont satisfaits d'une manière autre que par l'offre de biens ou de services sur le marché et que, d'autre part, pour des raisons liées à l'intérêt général, l'État choisit de satisfaire lui-même ou à l'égard desquels il entend conserver une influence déterminante (voir, notamment, arrêts précités BFI Holding, points 50 et 51, Agorà et Excelsior, point 37, et Adolf Truley, point 50).

    48 En l'occurrence, il ne saurait être exclu que l'acquisition de services visant à favoriser l'implantation d'entreprises privées sur le territoire d'une collectivité territoriale déterminée puisse, pour les motifs évoqués au point 45 du présent arrêt, être considérée comme répondant à un besoin d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial. L'existence ou l'absence d'un tel besoin d'intérêt général doit être appréciée en prenant en compte l'ensemble des éléments juridiques et factuels pertinents, tels que les circonstances ayant présidé à la création de l'organisme concerné et les conditions dans lesquelles il exerce son activité (voir, en ce sens, arrêt Adolf Truley, précité, point 66).

    49 À cet égard, il importe notamment de vérifier si l'organisme en question exerce ses activités en situation de concurrence, l'existence d'une telle concurrence pouvant, ainsi que la Cour l'a déjà jugé, constituer un indice au soutien du fait qu'un besoin d'intérêt général revêt un caractère industriel ou commercial (voir, en ce sens, arrêt BFI Holding, points 48 et 49).

    50 Toutefois, il résulte des termes mêmes employés dans ce dernier arrêt que l'existence d'une concurrence développée ne permet pas, à elle seule, de conclure à l'absence d'un besoin d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial (voir arrêt Adolf Truley, précité, point 61). Le même constat s'impose s'agissant de la circonstance que l'organisme en cause vise à satisfaire spécifiquement les besoins d'entreprises commerciales. D'autres facteurs doivent être pris en compte avant de parvenir à une telle conclusion et, notamment, la question de savoir dans quelles conditions l'organisme en question exerce ses activités.

    51 En effet, si l'organisme opère dans des conditions normales de marché, poursuit un but lucratif et supporte les pertes liées à l'exercice de son activité, il est peu probable que les besoins qu'il vise à satisfaire soient d'une nature autre qu'industrielle ou commerciale. En pareille hypothèse, l'application des directives communautaires relatives à la coordination des procédures de passation des marchés publics ne s'imposerait d'ailleurs pas puisqu'un organisme poursuivant un but lucratif et supportant lui-même les risques liés à son activité ne s'engagera normalement pas dans une procédure de passation de marché à des conditions qui ne seraient pas économiquement justifiées.

    52 En vertu d'une jurisprudence constante, lesdites directives visent en effet à exclure à la fois le risque qu'une préférence soit donnée aux soumissionnaires ou candidats nationaux lors de toute passation de marché effectuée par les pouvoirs adjudicateurs et la possibilité qu'un organisme financé ou contrôlé par l'État, les collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public se laisse guider par des considérations autres qu'économiques (voir, notamment, arrêts du 3 octobre 2000, University of Cambridge, C-380/98, Rec. p. I-8035, point 17; du 12 décembre 2002, Universale-Bau e.a., C-470/99, non encore publié au Recueil, point 52, et Adolf Truley, précité, point 42).

    53 En réponse à une question écrite posée par la Cour, le gouvernement finlandais a indiqué, lors de l'audience, que, si des sociétés telles que Taitotalo présentent, sur le plan juridique, peu de différences avec les sociétés anonymes détenues par des opérateurs privés dans la mesure où elles supportent les mêmes risques économiques que ces dernières et peuvent également être déclarées en faillite, les collectivités territoriales auxquelles elles appartiennent permettront rarement qu'un tel événement se produise et procéderont, le cas échéant, à une recapitalisation desdites sociétés afin qu'elles puissent continuer à assumer les tâches pour lesquelles elles ont été créées, à savoir, essentiellement, l'amélioration des conditions générales d'exercice de l'activité économique dans la collectivité territoriale concernée.

    54 En réponse à une question posée par la Cour lors de l'audience, le même gouvernement a encore précisé que, s'il n'est pas exclu que les activités des sociétés telles que Taitotalo engendrent des bénéfices, la recherche de tels bénéfices ne peut, en aucun cas, constituer l'objectif principal desdites sociétés, celles-ci devant toujours, aux termes de la législation finlandaise, viser à promouvoir prioritairement l'intérêt général des habitants de la collectivité territoriale concernée.

    55 Dans de telles conditions, renforcées par la circonstance, mentionnée par la juridiction de renvoi, que la défenderesse au principal a bénéficié d'un financement public pour la réalisation du projet immobilier en cause au principal, il apparaît vraisemblable qu'une activité telle que celle que poursuit Taitotalo dans le litige au principal répond à un besoin d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial.

    56 Il appartient toutefois à la juridiction de renvoi, qui seule possède une connaissance approfondie du dossier, d'apprécier les circonstances ayant présidé à la création de cet organisme et les conditions dans lesquelles il exerce son activité, en ce compris, notamment, la poursuite éventuelle d'un but lucratif et la prise en charge des risques liés à son activité.

    57 Quant à l'observation de la Commission selon laquelle il ne saurait être exclu que l'activité en cause au principal ne représente qu'une part négligeable des activités de Taitotalo, il convient de rappeler que cette circonstance, à la supposer établie, serait sans pertinence pour la solution du litige au principal dès lors que cette société continue à se charger de besoins d'intérêt général.

    58 En vertu d'une jurisprudence constante, en effet, la qualité d'organisme de droit public ne dépend pas de l'importance relative de la satisfaction de besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial dans l'activité de l'organisme concerné (voir arrêts précités Mannesmann Anlagenbau Austria e.a., points 25, 26 et 31; BFI Holding, points 55 et 56, et Adolf Truley, point 56).

    59 Au regard des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux première et deuxième questions qu'une société anonyme créée, détenue et gérée par une collectivité territoriale répond à un besoin d'intérêt général, au sens de l'article 1er, sous b), deuxième alinéa, de la directive 92/50, lorsqu'elle acquiert des services visant à promouvoir le développement d'activités industrielles ou commerciales sur le territoire de ladite collectivité. Afin d'évaluer si ce besoin est dépourvu de caractère industriel ou commercial, il appartient à la juridiction nationale d'apprécier les circonstances ayant présidé à la création de cette société et les conditions dans lesquelles elle exerce son activité, en ce compris, notamment, l'absence de poursuite d'un but lucratif à titre principal, l'absence de prise en charge des risques liés à cette activité ainsi que le financement public éventuel de l'activité en cause.

    Sur la troisième question

    60 Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la circonstance que les locaux à construire ne soient loués qu'à une seule entreprise est de nature à remettre en cause la qualité d'organisme de droit public du bailleur.

    61 À cet égard, il suffit de constater qu'il résulte clairement de la réponse apportée aux deux premières questions qu'une telle circonstance n'empêche pas, en principe, de qualifier le bailleur des locaux à construire d'organisme de droit public dès lors que, comme M. l'avocat général l'a relevé au point 92 de ses conclusions, l'intérêt général ne se mesure pas au nombre des utilisateurs directs d'une activité ou d'un service.

    62 D'une part, en effet, il ne saurait être nié que l'implantation d'une seule entreprise sur le territoire d'une collectivité territoriale peut également donner une impulsion aux échanges et entraîner des retombées économiques et sociales favorables pour cette collectivité ainsi que pour l'ensemble de ses habitants, l'implantation de ladite entreprise pouvant, notamment, avoir un effet catalyseur et stimuler l'implantation d'autres entreprises dans la région concernée.

    63 D'autre part, cette interprétation est également conforme à la finalité de la directive 92/50 qui, aux termes de son vingtième considérant, vise notamment à éliminer les pratiques qui restreignent la concurrence en général et la participation aux marchés des ressortissants d'autres États membres en particulier. Comme l'a relevé le gouvernement finlandais, admettre qu'un organisme puisse échapper au champ d'application de ladite directive au seul motif que l'activité qu'il déploie ne profite qu'à une seule société reviendrait à méconnaître la finalité même de cette directive puisque, pour se soustraire aux règles qu'elle énonce, il suffirait à une société telle que Taitotalo de soutenir que les locaux à construire sont destinés à être loués à une seule entreprise, laquelle pourrait, sitôt l'opération réalisée, céder les locaux à d'autres entreprises.

    64 Au regard des considérations qui précèdent, il convient donc de répondre à la troisième question que la circonstance que les locaux à construire ne soient loués qu'à une seule entreprise n'est pas de nature à remettre en cause la qualité d'organisme de droit public du bailleur dès lors qu'il est établi que celui-ci répond à un besoin d'intérêt général dépourvu de caractère industriel ou commercial.

    Décisions sur les dépenses


    Sur les dépens

    65 Les frais exposés par les gouvernements finlandais, français et autrichien, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

    Dispositif


    Par ces motifs,

    LA COUR

    (cinquième chambre),

    statuant sur les questions à elle soumises par le Kilpailuneuvosto, par décision du 14 décembre 2000, dit pour droit:

    1) Une société anonyme créée, détenue et gérée par une collectivité territoriale répond à un besoin d'intérêt général, au sens de l'article 1er, sous b), deuxième alinéa, de la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services, lorsqu'elle acquiert des services visant à promouvoir le développement d'activités industrielles ou commerciales sur le territoire de ladite collectivité. Afin d'évaluer si ce besoin est dépourvu de caractère industriel ou commercial, il appartient à la juridiction nationale d'apprécier les circonstances ayant présidé à la création de cette société et les conditions dans lesquelles elle exerce son activité, en ce compris, notamment, l'absence de poursuite d'un but lucratif à titre principal, l'absence de prise en charge des risques liés à cette activité ainsi que le financement public éventuel de l'activité en cause.

    2) La circonstance que les locaux à construire ne soient loués qu'à une seule entreprise n'est pas de nature à remettre en cause la qualité d'organisme de droit public du bailleur dès lors qu'il est établi que celui-ci répond à un besoin d'intérêt général dépourvu de caractère industriel ou commercial.

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