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Document 61996CJ0194

    Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 5 mars 1998.
    Hilmar Kulzer contre Freistaat Bayern.
    Demande de décision préjudicielle: Bundessozialgericht - Allemagne.
    Règlement (CEE) nº 1408/71 - Travailleur n'ayant pas fait usage du droit de libre circulation - Fonctionnaire à la retraite - Article 73 - Prestations familiales - Institution allemande compétente - Article 77 - Législation nationale.
    Affaire C-194/96.

    Recueil de jurisprudence 1998 I-00895

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:1998:85

    61996J0194

    Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 5 mars 1998. - Hilmar Kulzer contre Freistaat Bayern. - Demande de décision préjudicielle: Bundessozialgericht - Allemagne. - Règlement (CEE) nº 1408/71 - Travailleur n'ayant pas fait usage du droit de libre circulation - Fonctionnaire à la retraite - Article 73 - Prestations familiales - Institution allemande compétente - Article 77 - Législation nationale. - Affaire C-194/96.

    Recueil de jurisprudence 1998 page I-00895


    Sommaire
    Parties
    Motifs de l'arrêt
    Décisions sur les dépenses
    Dispositif

    Mots clés


    1 Sécurité sociale des travailleurs migrants - Réglementation communautaire - Champ d'application personnel - Fonctionnaire à la retraite n'ayant pas fait usage lui-même du droit de libre circulation - Enfant du fonctionnaire s'étant déplacé avec sa mère à l'intérieur de la Communauté

    2 Sécurité sociale des travailleurs migrants - Prestations familiales - Fonctionnaire à la retraite soumis à la législation allemande - Enfant résidant dans un autre État membre - Notion de travailleur salarié aux fins du versement des prestations familiales - Institution allemande compétente - Application des critères prévus à l'article 1er, sous a), et à l'annexe I du règlement n_ 1408/71 - Effets - Refus d'octroi des prestations en vertu de la réglementation allemande - Admissibilité

    (Règlement du Conseil n_ 1408/71, art. 1er, a), ii), 73 et annexe I, point I, C)

    3 Sécurité sociale des travailleurs migrants - Prestations familiales - Titulaires de pensions ou de rentes - Notion de législation au sens du paragraphe 2, sous a), de l'article 77 du règlement n_ 1408/71 - Régimes spéciaux des fonctionnaires ou du personnel assimilé - Exclusion

    (Règlement du Conseil n_ 1408/71, art. 1er, j), 4, § 4, et 77, § 2, a))

    Sommaire


    1 Un fonctionnaire à la retraite qui n'a travaillé que dans l'État dont il est ressortissant relève du champ d'application personnel du règlement n_ 1408/71, dans le cas où son enfant à charge s'est déplacé à l'intérieur de la Communauté avec son ancienne épouse, si le fonctionnaire est ou a été soumis à la législation d'un État membre à laquelle le règlement est applicable.

    2 L'article 73 du règlement n_ 1408/71, lu en combinaison avec les dispositions du point I, C, de l'annexe I du même règlement, doit être interprété, aux fins du versement d'allocations familiales au titre de la législation allemande, en ce sens qu'il ne vise pas une personne, ressortissante de cet État membre, qui perçoit, au titre de la législation de cet État, une prestation de vieillesse en tant que fonctionnaire à la retraite dans le cas où cette personne n'a travaillé que dans l'État membre dont elle est ressortissante et où son enfant à charge s'est déplacé à l'intérieur de la Communauté avec son ancienne épouse. En effet, il ressort des termes de cette annexe, à laquelle renvoie l'article 1er, sous a), ii), du règlement, que seuls les travailleurs assurés à titre obligatoire dans le cadre de l'un des régimes y mentionnés ont droit aux allocations familiales allemandes en vertu du titre III, chapitre 7, du règlement. Dans ces conditions, permettre à un fonctionnaire à la retraite d'invoquer l'article 73 du règlement pour bénéficier des allocations familiales allemandes au motif que, en règle générale, la situation des fonctionnaires doit être assimilée à celle des travailleurs salariés méconnaîtrait les dispositions de l'annexe I.

    3 L'article 77, paragraphe 2, sous a), du règlement n_ 1408/71 doit être interprété en ce sens qu'il ne vise pas la situation d'une personne qui est seulement titulaire d'une pension due au titre d'un régime spécial de fonctionnaires ou de personnel assimilé. En effet, le terme «législation» utilisé dans cette disposition revêt la portée qui est définie à l'article 1er, sous j), du règlement et ne vise donc pas les lois, règlements, dispositions statutaires ou les autres mesures ayant trait aux catégories de prestations mentionnées à l'article 4, paragraphe 4, du règlement, dont, notamment, des régimes spéciaux des fonctionnaires ou du personnel assimilé.

    Parties


    Dans l'affaire C-194/96,

    ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE, par le Bundessozialgericht (Allemagne) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

    Hilmar Kulzer

    et

    Freistaat Bayern,

    une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation des articles 2, paragraphe 3, 73 et 77 du règlement (CEE) n_ 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n_ 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983 (JO L 230, p. 6), tel que modifié par le règlement (CEE) n_ 3427/89 du Conseil, du 30 octobre 1989 (JO L 331, p. 1), puis par le règlement (CEE) n_ 1247/92 du Conseil, du 30 avril 1992 (JO L 136, p. 1),

    LA COUR

    (cinquième chambre),

    composée de MM. C. Gulmann, président de chambre, J. C. Moitinho de Almeida, D. A. O. Edward (rapporteur), J.-P. Puissochet et P. Jann, juges,

    avocat général: M. N. Fennelly,

    greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

    considérant les observations écrites présentées:

    - pour M. Kulzer, par Me Michael Kaplitz, avocat à Schwandorf,

    - pour la Commission des Communautés européennes, par M. Peter Hillenkamp, conseiller juridique, en qualité d'agent,

    vu le rapport d'audience,

    ayant entendu les observations orales de la Commission à l'audience du 16 septembre 1997,

    ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 23 octobre 1997,

    rend le présent

    Arrêt

    Motifs de l'arrêt


    1 Par arrêt du 30 avril 1996, parvenu à la Cour le 10 juin suivant, le Bundessozialgericht a posé, en application de l'article 177 du traité CE, deux questions préjudicielles relatives à l'interprétation des articles 2, paragraphe 3, 73 et 77 du règlement (CEE) n_ 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n_ 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983 (JO L 230, p. 6), tel que modifié par le règlement (CEE) n_ 3427/89 du Conseil, du 30 octobre 1989 (JO L 331, p. 1), puis par le règlement (CEE) n_ 1247/92 du Conseil, du 30 avril 1992 (JO L 136, p. 1, ci-après le «règlement»).

    2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant M. Kulzer au Freistaat Bayern au sujet de l'octroi d'allocations familiales pour son enfant à charge.

    Le droit communautaire

    3 Les quatrième et cinquième considérants du règlement n_ 1408/71, dans sa version originale (JO 1971, L 149, p. 2), sont libellés dans les termes suivants:

    «considérant que, en raison des importantes différences existant entre les législations nationales quant à leur champ d'application ratione personae, il est préférable de poser le principe suivant lequel le règlement est applicable à tous les ressortissants des États membres assurés dans le cadre des régimes de sécurité sociale organisés au bénéfice des travailleurs salariés;

    considérant que les règles de coordination des législations nationales de sécurité sociale s'inscrivent dans le cadre de la libre circulation des travailleurs ressortissants des États membres et doivent, à ce titre, contribuer à l'amélioration de leur niveau de vie et des conditions de leur emploi, en garantissant à l'intérieur de la Communauté, d'une part, à tous les ressortissants des États membres l'égalité de traitement au regard des différentes législations nationales et, d'autre part, aux travailleurs et à leurs ayants droit le bénéfice des prestations de sécurité sociale, quel que soit le lieu de leur emploi ou de leur résidence».

    4 L'article 1er, sous a), du règlement prévoit que, aux fins de l'application du règlement,

    «a) les termes `travailleur salarié' et `travailleur non salarié' désignent, respectivement, toute personne:

    i) qui est assurée au titre d'une assurance obligatoire ou facultative continuée contre une ou plusieurs éventualités correspondant aux branches d'un régime de sécurité sociale s'appliquant aux travailleurs salariés ou non salariés;

    ii) qui est assurée à titre obligatoire contre une ou plusieurs éventualités correspondant aux branches auxquelles s'applique le présent règlement, dans le cadre d'un régime de sécurité sociale s'appliquant à tous les résidents ou à l'ensemble de la population active:

    - lorsque les modes de gestion ou de financement de ce régime permettent de l'identifier comme travailleur salarié ou non salarié

    ou

    - à défaut de tels critères, lorsqu'elle est assurée au titre d'une assurance obligatoire ou facultative continuée contre une autre éventualité précisée à l'annexe I, dans le cadre d'un régime organisé au bénéfice des travailleurs salariés ou non salariés, ou d'un régime visé sous iii) ou en l'absence d'un tel régime dans l'État membre concerné, lorsqu'elle répond à la définition donnée à l'annexe I;

    iii) qui est assurée à titre obligatoire contre plusieurs éventualités correspondant aux branches auxquelles s'applique le présent règlement dans le cadre d'un régime de sécurité sociale organisé d'une manière uniforme au bénéfice de l'ensemble de la population rurale selon les critères fixés à l'annexe I;

    iv) qui est assurée à titre volontaire contre une ou plusieurs éventualités correspondant aux branches auxquelles s'applique le présent règlement, dans le cadre d'un régime de sécurité sociale d'un État membre organisé au bénéfice des travailleurs salariés ou non salariés ou de tous les résidents ou de certaines catégories de résidents:

    - si elle exerce une activité salariée ou non salariée

    ou

    - si elle a été antérieurement assurée à titre obligatoire contre la même éventualité dans le cadre d'un régime organisé au bénéfice des travailleurs salariés ou non salariés du même État membre.»

    5 Le point j) du même article du règlement énonce, dans son premier alinéa, que «le terme `législation' désigne, pour chaque État membre, les lois, les règlements, les dispositions statutaires et toutes autres mesures d'application, existants ou futurs, qui concernent les branches et les régimes de sécurité sociale visés à l'article 4, paragraphes 1 et 2, ou les prestations spéciales à caractère non contributif visées à l'article 4, paragraphe 2 bis».

    6 L'article 2, paragraphes 1 et 3, du règlement dispose:

    «1. Le présent règlement s'applique aux travailleurs salariés ou non salariés qui sont ou ont été soumis à la législation de l'un ou de plusieurs États membres et qui sont des ressortissants de l'un des États membres ou bien des apatrides ou des réfugiés résidant sur le territoire d'un des États membres ainsi qu'aux membres de leur famille et à leurs survivants.

    ...

    3. Le présent règlement s'applique aux fonctionnaires et au personnel qui, selon la législation applicable, leur est assimilé, dans la mesure où ils sont ou ont été soumis à la législation d'un État membre à laquelle le présent règlement est applicable.»

    7 L'article 4, paragraphe 4, du règlement prévoit:

    «4. Le présent règlement ne s'applique ni à l'assistance sociale et médicale, ni aux régimes de prestations en faveur des victimes de la guerre ou de ses conséquences, ni aux régimes spéciaux des fonctionnaires ou du personnel assimilé.»

    8 Conformément à l'article 73 du règlement, le travailleur salarié ou non salarié soumis à la législation d'un État membre a en principe droit, pour les membres de sa famille qui résident sur le territoire d'un autre État membre, aux prestations familiales prévues par la législation du premier État, comme s'ils résidaient sur le territoire de celui-ci.

    9 L'article 77, paragraphe 2, sous a), du règlement prévoit:

    «2. Les prestations sont accordées selon les règles suivantes, quel que soit l'État membre sur le territoire duquel résident le titulaire de pensions ou de rentes ou les enfants:

    a) au titulaire d'une pension ou d'une rente due au titre de la législation d'un seul État membre, conformément à la législation de l'État membre compétent pour la pension ou la rente.»

    10 Le point I, C (Allemagne), de l'annexe I du règlement est libellé de la façon suivante:

    «Si une institution allemande est l'institution compétente pour l'octroi des prestations familiales, conformément au titre III, chapitre 7, du règlement, est considérée au sens de l'article 1er, point a), ii), du règlement:

    a) comme travailleur salarié, la personne assurée à titre obligatoire contre le risque de chômage ou la personne qui obtient, à la suite de cette assurance, des prestations en espèces de l'assurance maladie ou des prestations analogues;

    b) comme travailleur non salarié, la personne qui exerce une activité non salariée et qui est tenue:

    - de s'assurer ou de cotiser pour le risque vieillesse dans un régime de travailleurs non salariés

    ou

    - de s'assurer dans le cadre de l'assurance pension obligatoire.»

    La législation allemande

    11 L'article 1er, paragraphe 1, point 1, du Bundeskindergeldgesetz du 14 avril 1964, dans sa version du 21 janvier 1986 (loi fédérale sur les allocations pour enfants à charge, BGBl. I, p. 222, ci-après le «BKGG») dispose que les personnes qui ont leur domicile ou leur résidence habituelle en Allemagne ont droit aux allocations familiales pour leurs enfants et assimilés en vertu de son article 2, paragraphe 1.

    12 L'article 2, paragraphe 5, du BKGG prévoit que les enfants qui n'ont ni leur domicile ni leur résidence habituelle en Allemagne ne sont pas pris en compte pour le calcul des allocations familiales.

    Le litige au principal

    13 M. Kulzer, de nationalité allemande, réside en Allemagne et perçoit, en tant que fonctionnaire de police à la retraite, une pension du Freistaat Bayern. Il est le père de Stefanie, née en 1974, qui, depuis 1983, vit en France avec sa mère, de nationalité française et divorcée de M. Kulzer. Après le décès de sa mère, survenu en 1987, Stefanie a continué à vivre en France, chez ses grands-parents français. Elle y a suivi sa scolarité et, pendant les vacances scolaires, a rendu régulièrement visite à son père, lequel a toujours subvenu à ses frais d'éducation et d'entretien. M. Kulzer a fait une déclaration de deuxième domicile auprès des autorités allemandes au nom de sa fille. Les autorités françaises ne lui ont jamais versé d'allocations familiales.

    14 En octobre 1988, M. Kulzer a sollicité du Freistaat Bayern le versement d'allocations familiales pour sa fille Stefanie au titre du BKGG. Cette demande, puis sa réclamation ont été rejetées respectivement le 27 juillet et le 5 décembre 1989.

    15 Le recours introduit contre ces décisions ayant échoué, M. Kulzer a interjeté appel devant le Landessozialgericht qui a confirmé le jugement de première instance au motif que sa fille habitait en France. Cette juridiction a estimé que ni la déclaration de deuxième domicile faite par M. Kulzer ni les visites régulières de sa fille pendant les vacances scolaires ne permettaient de considérer que la condition de résidence prévue par le BKGG était remplie. De même, la juridiction a jugé que M. Kulzer ne pouvait se prévaloir de l'article 73 du règlement, car, étant à la retraite, il n'était ni travailleur au sens de l'article 1er ni fonctionnaire au sens de l'article 2, paragraphe 3, du même règlement. De surcroît, l'article 77, paragraphe 2, du règlement ne pouvait s'appliquer puisque le versement des allocations familiales au titre du BKGG n'était en rien lié au bénéfice d'une pension.

    16 M. Kulzer a alors saisi le Bundessozialgericht d'une demande en «Revision» à l'encontre de cette décision. Devant cette juridiction, il soutient notamment que, en tant que fonctionnaire à la retraite, il a également droit, en vertu de l'article 73 du règlement, aux allocations familiales versées au titre du BKGG.

    17 Dans ces circonstances, le Bundessozialgericht a décidé de surseoir à statuer pour poser à la Cour les deux questions préjudicielles suivantes:

    «1) a) Le règlement (CEE) n_ 1408/71, en particulier son article 73, est-il également applicable lorsque ce n'est pas le bénéficiaire même (en particulier un travailleur salarié ou non salarié) qui a exercé son droit de libre circulation à l'intérieur de la Communauté européenne mais bien l'enfant pour lequel les prestations familiales sont sollicitées?

    b) Le fait que l'autre parent, qui s'était déplacé avec l'enfant dans un autre État membre, y ait exercé ou non jusqu'à son décès une activité en qualité de travailleur salarié ou non salarié a-t-il une incidence à cet égard?

    2) Si la première question appelle une réponse affirmative:

    Un fonctionnaire de police à la retraite est-il également un `fonctionnaire' au sens de l'article 2, paragraphe 3, du règlement (CEE) n_ 1408/71?»

    18 Il ressort de l'ordonnance de renvoi que la présente affaire soulève deux questions, l'une concernant l'article 73 du règlement et la seconde son article 77.

    Sur la question relative à l'article 73 du règlement

    19 En premier lieu, la juridiction nationale demande en substance si l'article 73 du règlement, lu en combinaison avec les dispositions du point I, C, de l'annexe I du même règlement, doit être interprété, aux fins du versement d'allocations familiales au titre de la législation allemande, en ce sens qu'il vise une personne, ressortissante de cet État membre, qui perçoit, au titre de la législation de cet État, une prestation de vieillesse en tant que fonctionnaire à la retraite, dans le cas où cette personne n'a travaillé que dans l'État membre dont elle est ressortissante et où son enfant à charge s'est déplacé à l'intérieur de la Communauté avec son ancienne épouse.

    20 A titre subsidiaire, la juridiction nationale interroge la Cour sur la pertinence, dans une telle hypothèse, de la circonstance que l'ancienne épouse de l'intéressé a exercé, dans l'État membre où elle s'est déplacée, une activité en tant que travailleur salarié ou non salarié au sens de l'article 1er, sous a), du règlement.

    21 Pour répondre à ces questions, il convient d'examiner en premier lieu si une personne, telle que le demandeur au principal, qui est un fonctionnaire à la retraite et qui n'a travaillé que dans l'État dont elle est ressortissante relève du champ d'application du règlement dans le cas où son enfant à charge s'est déplacé à l'intérieur de la Communauté avec son ancienne épouse.

    22 Le champ d'application personnel du règlement est défini par son article 2, faisant partie du titre I, intitulé «Dispositions générales».

    23 Aux termes du paragraphe 1 de cette disposition, le règlement s'applique, notamment, «aux travailleurs salariés ou non salariés qui sont ou ont été soumis à la législation de l'un ou de plusieurs États membres et qui sont des ressortissants de l'un des États membres».

    24 Dans l'arrêt du 31 mai 1979, Pierik (182/78, Rec. p. 1977, point 4), la Cour a considéré que la notion de «travailleur», ayant une portée générale, couvre toute personne qui, exerçant ou non une activité professionnelle, possède la qualité d'assuré au titre de la législation de sécurité sociale d'un ou de plusieurs États membres. Il s'ensuit que les titulaires d'une pension ou d'une rente dues au titre de la législation d'un ou de plusieurs États membres, même s'ils n'exercent pas une activité professionnelle, relèvent, du fait de leur affiliation à un régime de sécurité sociale, des dispositions du règlement concernant les «travailleurs», à moins qu'ils ne fassent l'objet de dispositions particulières.

    25 L'article 2, paragraphe 3, du règlement prévoit que ce dernier s'applique également aux fonctionnaires dans la mesure où ils sont ou ont été soumis à la législation d'un État membre à laquelle le règlement est applicable. Dans le système du traité, les fonctionnaires sont considérés comme des travailleurs salariés (voir arrêt du 24 mars 1994, Van Poucke, C-71/93, Rec. p. I-1101, point 17).

    26 Pour les mêmes raisons qui ont amené la Cour à considérer, dans l'arrêt Pierik, précité, que la notion de «travailleur» vise également des travailleurs à la retraite, la notion de «fonctionnaire», faisant partie d'une disposition de portée générale qui définit le champ d'application personnel du règlement, doit être comprise comme visant des fonctionnaires à la retraite qui n'exercent plus une activité professionnelle dans la mesure où ils sont ou ont été soumis à la législation d'un État membre à laquelle le présent règlement est applicable.

    27 Quant à la circonstance que la personne visée par la question préjudicielle ne s'est jamais elle-même déplacée à l'intérieur de la Communauté, il convient d'abord de relever que le quatrième considérant du règlement n_ 1408/71, dans sa version originale, énonce que, «en raison des importantes différences existant entre les législations nationales quant à leur champ d'application ratione personae, il est préférable de poser le principe suivant lequel le règlement est applicable à tous les ressortissants des États membres assurés dans le cadre des régimes de sécurité sociale organisés au bénéfice des travailleurs salariés».

    28 D'ailleurs, selon l'article 1er, sous a), du règlement, les termes «travailleur salarié» et «travailleur non salarié» désignent «toute personne», sans réserve, assurée dans le cadre de l'un des régimes de sécurité sociale mentionnés à cet article contre les éventualités et aux conditions indiquées dans cette disposition (voir, en ce sens, arrêt du 3 mai 1990, Kits van Heijningen, C-2/89, Rec. p. I-1755, point 9). De même, selon son article 2, paragraphes 1 et 3, le règlement s'applique aux travailleurs salariés ou non salariés et aux fonctionnaires qui sont ou ont été soumis à la législation d'un seul État membre.

    29 Ensuite, dans l'arrêt du 9 décembre 1965, Singer (44/65, Rec. p. 1191, et, plus particulièrement, p. 1198 et 1199), la Cour a jugé que l'article 52 du règlement n_ 3 du Conseil, du 25 septembre 1958, concernant la sécurité sociale des travailleurs migrants (JO 1958, 30, p. 561), s'appliquait à toutes les personnes qui bénéficiaient de prestations en vertu de la législation d'un État membre et que la notion de «travailleur» ne se limitait donc pas aux seuls travailleurs migrants stricto sensu ou aux seuls déplacements relatifs à l'exercice de leur emploi.

    30 Enfin, selon le cinquième considérant du règlement n_ 1408/71, dans sa version initiale, les règles de coordination des législations nationales de sécurité sociale prévues au règlement visent également la situation où des membres de la famille du travailleur se déplacent à l'intérieur de la Communauté.

    31 Par conséquent, il y a lieu de considérer qu'une personne, telle que le demandeur au principal, qui est un fonctionnaire à la retraite et qui n'a travaillé que dans l'État dont elle est ressortissante, relève du champ d'application personnel du règlement, dans le cas où son enfant à charge s'est déplacé à l'intérieur de la Communauté avec son ancienne épouse, si le fonctionnaire est ou a été soumis à la législation d'un État membre à laquelle le règlement est applicable.

    32 Il n'est donc pas nécessaire d'examiner la pertinence de la circonstance que l'ancienne épouse du demandeur au principal a exercé une activité salariée ou non salariée après qu'elle s'est déplacée à l'intérieur de la Communauté.

    33 Il convient dès lors d'examiner si une telle personne peut se prévaloir de l'article 73 du règlement pour bénéficier des allocations familiales prévues par la loi allemande.

    34 Bien que l'article 73 du règlement ne vise pas expressément les fonctionnaires, la situation d'une personne telle que le demandeur au principal doit, en principe, être assimilée à celle des travailleurs salariés visés à l'article 1er, sous a), du règlement, dès lors que, comme il ressort du point 25 du présent arrêt, les fonctionnaires sont considérés, dans le système du traité, comme des travailleurs salariés.

    35 La notion de «travailleur salarié», qui figure à l'article 73 du règlement, est définie à l'article 1er, sous a). Toutefois, cette définition est évincée par celle contenue au point I, C, de l'annexe I du règlement lorsque l'institution compétente pour l'octroi des prestations familiales, conformément au titre III, chapitre 7, du règlement, est allemande.

    36 En effet, il ressort des termes mêmes de cette annexe, à laquelle renvoie l'article 1er, sous a), ii), du règlement, que seuls les travailleurs assurés à titre obligatoire dans le cadre de l'un des régimes y mentionnés ont droit aux allocations familiales allemandes en vertu du titre III, chapitre 7, du règlement (arrêt du 12 juin 1997, Merino García, C-266/95, Rec. p. I-3279, point 24).

    37 Dans ces conditions, permettre à un fonctionnaire à la retraite, tel que le demandeur au principal, d'invoquer l'article 73 du règlement pour bénéficier des allocations familiales allemandes au motif que, en règle générale, la situation des fonctionnaires doit être assimilée à celle des travailleurs salariés méconnaîtrait les dispositions de l'annexe I.

    38 A la lumière de ce qui précède, il y a lieu de répondre à la question relative à l'article 73 du règlement que cette disposition, lue en combinaison avec celles du point I, C, de l'annexe I du même règlement, doit être interprétée, aux fins du versement d'allocations familiales au titre de la législation allemande, en ce sens qu'elle ne vise pas une personne, ressortissante de cet État membre, qui perçoit, au titre de la législation de cet État, une prestation de vieillesse en tant que fonctionnaire à la retraite dans le cas où cette personne n'a travaillé que dans l'État membre dont elle est ressortissante et où son enfant à charge s'est déplacé à l'intérieur de la Communauté avec son ancienne épouse.

    Sur la question relative à l'article 77 du règlement

    39 Compte tenu des circonstances de l'espèce au principal, il convient d'examiner, en vue de répondre le plus complètement et le plus utilement possible à la juridiction nationale, si l'article 77, paragraphe 2, sous a), du règlement doit être interprété en ce sens qu'il vise, comme l'a soutenu la Commission, la situation d'une personne, telle que le demandeur au principal, qui est titulaire d'une pension due au titre d'un régime spécial de fonctionnaires ou de personnel assimilé.

    40 Dans l'arrêt du 8 mars 1979, Lohmann (129/78, Rec. p. 853), la Cour a jugé que le terme «législation» utilisé dans l'article 77, paragraphe 2, sous a), du règlement revêt la portée qui est définie à l'article 1er, sous j), du règlement. Cette disposition ne vise donc pas les lois, règlements, dispositions statuaires ou les autres mesures ayant trait aux catégories de prestations mentionnées à l'article 4, paragraphe 4, du règlement, dont, notamment, des régimes spéciaux des fonctionnaires ou du personnel assimilé.

    41 Cette conclusion n'exclut toutefois pas qu'une personne percevant une pension au titre d'un régime spécial de fonctionnaires ou de personnel assimilé puisse se prévaloir de l'article 77, paragraphe 2, sous a), du règlement si elle est également titulaire d'une autre prestation de vieillesse visée par cette disposition. Le dossier ne permet toutefois pas de déterminer si tel est le cas du demandeur au principal.

    42 Il convient donc de répondre à la question relative à l'article 77, paragraphe 2, sous a), du règlement que cette disposition doit être interprétée en ce sens qu'elle ne vise pas la situation d'une personne qui est seulement titulaire d'une pension due au titre d'un régime spécial de fonctionnaires ou de personnel assimilé.

    Décisions sur les dépenses


    Sur les dépens

    43 Les frais exposés par la Commission des Communautés européennes qui a soumis des observations à la Cour ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

    Dispositif


    Par ces motifs,

    LA COUR

    (cinquième chambre),

    statuant sur les questions à elle soumises par le Bundessozialgericht, par arrêt du 30 avril 1996, dit pour droit:

    44 L'article 73 du règlement (CEE) n_ 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n_ 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983, tel que modifié par le règlement (CEE) n_ 3427/89 du Conseil, du 30 octobre 1989, puis par le règlement (CEE) n_ 1247/92 du Conseil, du 30 avril 1992, lu en combinaison avec les dispositions du point I, C, de l'annexe I du même règlement, doit être interprété, aux fins du versement d'allocations familiales au titre de la législation allemande, en ce sens qu'il ne vise pas une personne, ressortissante de cet État membre, qui perçoit, au titre de la législation de cet État, une prestation de vieillesse en tant que fonctionnaire à la retraite dans le cas où cette personne n'a travaillé que dans l'État membre dont elle est ressortissante et où son enfant à charge s'est déplacé à l'intérieur de la Communauté avec son ancienne épouse.

    45 L'article 77, paragraphe 2, sous a), du règlement n_ 1408/71, modifié, doit être interprété en ce sens qu'il ne vise pas la situation d'une personne qui est seulement titulaire d'une pension due au titre d'un régime spécial de fonctionnaires ou de personnel assimilé.

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