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Document 61990TJ0045
Judgment of the Court of First Instance (Fifth Chamber) of 28 January 1992. # Alicia Speybrouck v European Parliament. # Temporary staff - Dismissal - Protection of pregnant employees - Statement of reasons for dismissal - Period of notice - Compliance with duly established internal procedure. # Case T-45/90.
Arrêt du Tribunal de première instance (cinquième chambre) du 28 janvier 1992.
Alicia Speybrouck contre Parlement européen.
Agent temporaire - Licenciement - Protection de l'employée enceinte - Motivation de la décision de licenciement - Délai de préavis - Respect d'une procédure interne régulièrement instituée.
Affaire T-45/90.
Arrêt du Tribunal de première instance (cinquième chambre) du 28 janvier 1992.
Alicia Speybrouck contre Parlement européen.
Agent temporaire - Licenciement - Protection de l'employée enceinte - Motivation de la décision de licenciement - Délai de préavis - Respect d'une procédure interne régulièrement instituée.
Affaire T-45/90.
Recueil de jurisprudence 1992 II-00033
ECLI identifier: ECLI:EU:T:1992:7
Arrêt du Tribunal de première instance (cinquième chambre) du 28 janvier 1992. - Alicia Speybrouck contre Parlement européen. - Agent temporaire - Licenciement - Protection de l'employée enceinte - Motivation de la décision de licenciement - Délai de préavis - Respect d'une procédure interne régulièrement instituée. - Affaire T-45/90.
Recueil de jurisprudence 1992 page II-00033
Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif
++++
1 . Fonctionnaires - Égalité de traitement - Égalité entre fonctionnaires de sexe masculin et de sexe féminin - Droit fondamental - Respect assuré par le juge communautaire - Licenciement d' une femme enceinte - Inadmissibilité - Conditions
2 . Fonctionnaires - Agents temporaires - Régimes distincts - Résiliation du contrat à durée indéterminée d' un agent d' un groupe parlementaire - Obligation de motivation - Absence
(( Statut des fonctionnaires, art . 25; régime applicable aux autres agents, art . 2, sous c ), et 11 ))
3 . Fonctionnaires - Agents temporaires - Résiliation du contrat à durée indéterminée d' un agent d' un groupe parlementaire - Pouvoir d' appréciation de l' administration - Contrôle juridictionnel - Limites
( Régime applicable aux autres agents, art . 47, § 2 )
1 . Le principe de l' égalité de traitement entre femmes et hommes en matière d' emploi et, corrélativement, l' absence de toute discrimination, directe ou indirecte, fondée sur le sexe, fait partie intégrante des droits fondamentaux dont la Cour et le Tribunal assurent le respect en vertu de l' article 164 du traité .
Dans le cadre du statut des fonctionnaires, les exigences qu' impose la nécessité d' assurer l' égalité de traitement entre travailleurs féminins et masculins ne sont nullement limitées à celles découlant de l' article 119 du traité ou des directives comunautaires adoptées dans ce domaine .
Partant, une employée enceinte ne saurait être licenciée en raison de son état, sous peine de violer ledit principe d' égalité . Cela ne signifie pas, pour autant, qu' elle ne pourrait être licenciée pour des motifs qui sont sans rapport avec sa grossesse .
2 . A la différence des fonctionnaires dont la stabilité d' emploi est garantie par le statut, les agents temporaires relèvent d' un régime spécifique à la base duquel se trouve le contrat d' emploi conclu avec l' institution concernée .
Lorsque ce contrat prévoit explicitement sa résiliation unilatérale sans imposer, par renvoi aux dispositions pertinentes du régime applicable aux autres agents, l' obligation de motiver celle-ci, l' application par analogie de l' article 25 du statut, telle que prévue, en termes généraux, par l' article 11 dudit régime, est exclue .
Cette dispense de motivation doit être mise en relation avec le fait que pour les agents temporaires visés à l' article 2, sous c ), du régime applicable aux autres agents la confiance mutuelle est un élément essentiel du contrat d' engagement . Cela est d' autant plus vrai pour les agents engagés par les groupes parlementaires qui sont, en règle générale, l' émanation d' une option politique bien définie .
3 . Il résulte de l' article 47, paragraphe 2, du régime applicable aux autres agents que la résiliation d' un contrat à durée indéterminée relève du pouvoir d' appréciation de l' autorité compétente, dès lors qu' elle intervient dans le respect du préavis prévu par ce contrat et conforme à ladite disposition .
Le Tribunal ne saurait contrôler le bien-fondé d' une telle appréciation, sauf si l' existence d' une erreur manifeste ou d' un détournement de pouvoir peut être établie .
Dans l' affaire T-45/90,
Alicia Speybrouck, ancien agent temporaire du groupe des droites européennes au Parlement européen, demeurant à Bruges, représentée par Me Vic Elvinger et, lors de la procédure orale, par Me Catherine Dessoy, avocats au barreau de Luxembourg, ayant élu domicile à Luxembourg en leur étude, 31, rue d' Eich,
partie requérante,
contre
Parlement européen, représenté par MM . Jorge Campinos, jurisconsulte, et Manfred Peter, chef de division, en qualité d' agents, assistés par Me Hugo Vandenberghe, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg au secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,
partie défenderesse,
ayant pour objet l' annulation de la résiliation du contrat d' emploi de la requérante, la compensation du préjudice matériel et moral prétendument subi du fait de cette résiliation, ainsi qu' à titre subsidiaire, la désignation d' un expert afin d' évaluer plus précisément ce préjudice,
LE TRIBUNAL ( cinquième chambre ),
composé de MM . K . Lenaerts, président, D . Barrington et H . Kirschner, juges,
greffier : M . H . Jung
vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 9 octobre 1991,
rend le présent
Arrêt
Les faits à l' origine du recours
1 Après avoir travaillé en tant qu' assistante parlementaire auprès de divers membres du Parlement européen ( ci-après "Parlement ") appartenant au groupe des démocrates européens ( 1985-1989 ) et après avoir travaillé pendant quelques mois à l' institut pour une politique européenne de l' environnement à Bruxelles, la requérante a été engagée, à partir du 1er janvier 1990, en qualité d' agent temporaire de grade A 3, afin de remplir les fonctions de secrétaire général adjoint du groupe technique des droites européennes ( ci-après "groupe "), et ce pour une durée indéterminée . Le contrat d' emploi, non daté, prévoyait i ) une période de stage de six mois et ii ) un délai de préavis de trois mois à observer par chacune des parties, nonobstant l' application des articles 48, 49 et 50 du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes ( ci-après "RAA ").
2 Un rapport de stage "concluant" a été établi en date du 3 mai 1990 . Tant M . Brissaud, secrétaire général du groupe, que la requérante ont signé ce rapport le 18 mai 1990 .
3 Par lettre du 28 mai 1990, le président du groupe, M . Le Pen, aurait demandé à M . Brissaud "de mettre en oeuvre la procédure adéquate pour qu' il soit mis fin à la collaboration ( de la requérante ) au groupe selon les règles en vigueur au Parlement européen ". Il aurait ajouté : "il s' agit d' une raison grave de caractère politique dont je tiendrai informé le bureau du groupe, lors de sa prochaine réunion que je vous demande de convoquer à Bruxelles, le mardi 5 juin 1990 ".
4 La requérante a contesté l' authenticité de cette lettre en soulignant que seule une copie a été portée à sa connaissance lors de la transmission des pièces dans le cadre de la procédure en référé à laquelle il sera fait référence ci-après . En réponse à la demande que lui a adressée le Tribunal, le 6 juin 1991, de produire l' original de cette lettre, le Parlement a déclaré qu' il n' était pas en mesure de déférer à cette invitation, au motif que le groupe n' a pas l' habitude de lui remettre les originaux qui sont en sa possession .
5 L' extrait du procès-verbal de la réunion du bureau du groupe qui se serait tenue le 5 juin, se lit comme suit :
"Le bureau, après avoir entendu son président et après une large discussion, a décidé à la majorité de ses membres de confirmer la décision prise par son président de mettre fin au stage de Mlle Alicia Speybrouck, et ceci pour des raisons graves d' ordre politique dont il a eu à connaître ."
6 Selon les explications fournies au cours de l' audience par la requérante, ladite réunion se serait en fait tenue le 7 juin, et non pas le 5 juin 1990 .
7 Par lettre datée du 31 mai 1990, dont la requérante affirme avoir eu connaissance le 6 juin suivant, le secrétaire général du groupe, M . Brissaud, l' a informée du fait que son stage ne serait pas prolongé et qu' elle était licenciée avec un préavis d' un mois, devant débuter le 1er juin 1990 .
8 Par lettre du 6 juin 1990 adressée au directeur général du personnel, du budget et des finances, M . Van den Berge, la requérante a introduit une réclamation, au sens de l' article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes ( ci-après "statut "), applicable par analogie en vertu de l' article 46 du RAA, à l' encontre de cette décision, tout en l' informant du fait qu' elle était enceinte .
9 Dans une lettre du 18 juin 1990 également adressée à M . Van den Berge, la requérante a confirmé qu' elle était enceinte depuis le 15 mai 1990, ainsi que l' attestait un certificat médical établi par son gynécologue habituel et remis le 18 juin 1990 au médecin du Parlement .
10 Par lettre du 26 juin 1990, M . Brissaud a informé la requérante de ce que le bureau du groupe avait confirmé son licenciement, indépendamment de la notification de sa grossesse et du fait que le début de celle-ci se situait aux environs du 15 mai 1990, soit avant la décision de licenciement du 31 mai 1990 .
11 Par lettre du 9 juillet 1990, M . Calinoglou, président du comité du personnel, a protesté contre le licenciement de la requérante, tel qu' il avait été arrêté par la décision du 31 mai 1990 .
12 Le Parlement affirme que, par lettre du 10 juillet 1990, M . Brissaud a fait parvenir au comité une réponse par voie de courrier interne à l' institution .
13 La requérante a mis en doute l' existence d' une telle réponse écrite . En réponse à la demande que lui a adressée le Tribunal, le 6 juin 1991, le Parlement a déclaré ne pas être en mesure de soumettre l' original de cette lettre qui, selon les explications qu' il a fournies au cours de l' audience, aurait été égarée à la suite du renouvellement du comité du personnel .
14 Par lettre du 12 juillet 1990, dont la requérante affirme avoir eu connaissance le 20 juillet, M . Le Pen, président du groupe, lui a notifié un nouveau licenciement, cette fois avec un préavis de trois mois, devant expirer le 11 octobre 1990 . Le Parlement reconnaît que l' envoi de cette lettre avait été précédé de contacts entre le groupe et le service juridique du Parlement, lequel aurait préconisé de remplacer le premier licenciement du 31 mai 1990, fondé sur l' article 14 du RAA, par un second licenciement, dûment fondé sur l' article 47 du RAA .
15 Par lettre du 24 juillet 1990 adressée à M . Van den Berge, la requérante a introduit une nouvelle réclamation, au sens de l' article 90, paragraphe 2, du statut, contre cette décision du 12 juillet 1990 . Par lettre du 6 septembre 1990, M . Van den Berge a informé la requérante de ce que son contrat se terminerait le 11 octobre 1990 et de ce que ses deux réclamations étaient en cours d' instruction .
La procédure
16 Par requête déposée et enregistrée au greffe du Tribunal le 16 octobre 1990, la requérante a introduit un recours en annulation à l' encontre des décisions du 31 mai 1990 et du 12 juillet 1990, précitées, mettant fin à son contrat d' emploi .
17 Par requête déposée et enregistrée au greffe le même jour, la requérante a demandé qu' il soit sursis à l' exécution des décisions précitées .
18 Par ordonnance du 23 novembre 1990, le président du Tribunal a rejeté cette demande . Toutefois, il a ordonné, à titre de mesures provisoires, que, "à compter de la date à laquelle le contrat a pris fin et jusqu' à ce que la Commission verse effectivement à la requérante l' allocation de chômage prévue à l' article 28 bis du RAA, le Parlement ( paye ) à la requérante un montant équivalant à celui de l' allocation mensuelle de chômage susvisée, majorée, à partir de la naissance de l' enfant, des allocations familiales visées à l' article 28 bis, paragraphe 5, du RAA, et ( assure ) à la requérante, sans contribution à sa charge, la couverture des risques de maladie dans les conditions prévues à l' article 72 du statut ".
19 Par requête déposée et enregistrée au greffe le 14 mars 1991, la requérante, faisant valoir que le Parlement n' exécutait pas l' ordonnance précitée, a sollicité de nouvelles mesures provisoires . Au terme des explications orales fournies par les parties au cours de l' audience du 20 mars 1991, cette seconde procédure en référé a été suspendue pendant trois semaines . Compte tenu du changement d' attitude du Parlement, la requérante s' est désistée de cette seconde instance en référé par lettre du 11 avril 1991 .
20 La procédure écrite a suivi un cours régulier et a pris fin le 18 mars 1991 .
21 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a invité le Parlement, le 6 juin 1991, à exposer les raisons exactes et complètes à l' origine du licenciement de la requérante et à produire le texte de la réglementation interne relative au recrutement des fonctionnaires et autres agents, arrêtée le 15 mars 1989 par le bureau du Parlement ( ci-après "réglementation du bureau "), ainsi que l' original des lettres du 28 mai et du 10 juillet 1990, précitées . De même, il a invité le Parlement à préciser à quelle date le président du comité du personnel avait effectivement reçu notification de cette dernière lettre . Le Parlement n' a apporté qu' une réponse partielle aux questions qui lui avaient été posées et n' a pas produit les originaux des lettres des 28 mai et 10 juillet 1990 .
22 Le Tribunal a, sur rapport du juge rapporteur, décidé d' ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d' instruction préalables .
Les conclusions des parties
23 La requérante conclut à ce qu' il plaise au Tribunal :
a ) annuler les décisions de M . Jean-Marc Brissaud, du 31 mai 1990, notifiant à la requérante son licenciement, la décision implicite de rejet de M . Van den Berge, déduite de son silence pendant plus de quatre mois à la suite de la réclamation de la requérante en date du 6 juin 1990, et la décision de M . Jean-Marie Le Pen, président du groupe des droites européennes, en date du 12 juillet 1990, informant la requérante qu' elle était licenciée avec effet au 11 octobre 1990; partant, ordonner la réintégration de la requérante dans ses fonctions antérieures;
b ) subsidiairement déclarer les licenciements abusifs et condamner la partie défenderesse à payer à Mlle Alicia Speybrouck la somme de 5 000 000 LFR à titre de dommages et intérêts, sous réserve d' augmentation à dire d' expert . Pour autant que de besoin, nommer un expert avec la mission d' évaluer les dommages et intérêts revenant à la requérante pour le préjudice matériel et moral subi du fait du licenciement abusif;
c ) condamner la partie défenderesse aux frais et dépens de l' instance .
24 Le Parlement conclut à ce qu' il plaise au Tribunal :
a ) déclarer le recours non fondé;
b ) statuer sur les dépens conformément aux dispositions applicables du règlement de procédure .
Sur la recevabilité
1 . Sur la demande en annulation de la décision de licenciement du 31 mai 1990
25 A l' appui de sa demande en annulation à l' encontre de cette première décision de licenciement, la requérante avait initialement invoqué trois moyens tirés, en premier lieu, de la violation de l' article 9, sous d ), du règlement du groupe; en second lieu, de l' application erronée de l' article 14 du RAA en lieu et place de l' article 47 du RAA et, en troisième lieu, du fait que le délai de préavis d' un mois, tel qu' il lui avait initialement été accordé, était insuffisant au regard des dispositions pertinentes de l' article 47 du RAA .
26 Sans pour autant répondre aux moyens d' annulation ainsi invoqués, le Parlement fait observer que seule la validité de la décision de licenciement ultérieure, du 12 juillet 1990, peut faire l' objet du litige soumis au Tribunal, au motif qu' en tout état de cause l' exécution du contrat d' emploi de la requérante s' est régulièrement poursuivie jusqu' au 11 octobre 1990 .
27 En présence de ces arguments, le Tribunal prend acte du fait que la requérante ne conteste pas dans sa réplique cette dernière affirmation du Parlement et s' en remet sur ce point à l' appréciation du Tribunal .
28 De même, le Tribunal relève qu' il ressort des explications fournies par les parties lors de l' audience que celles-ci s' accordent pour reconnaître que la requérante a régulièrement perçu son traitement jusqu' au 20 octobre 1990 .
29 Considérant qu' il est ainsi établi que la décision du 31 mai 1990 ne faisait plus grief à la requérante lors de l' introduction de son recours, le Tribunal en déduit que le recours est irrecevable dans la mesure où il vise cette décision .
2 . Sur la demande visant à obtenir la réintégration de la requérante dans ses fonctions antérieures
30 Au sujet de cette demande, il convient de rappeler que le juge communautaire ne saurait adresser des injonctions à une institution communautaire, sans empiéter sur les prérogatives de l' autorité administrative .
31 En règle générale, ce principe rend irrecevables les conclusions visant à ordonner à une institution de prendre les mesures que pourrait impliquer l' exécution d' un arrêt procédant à l' annulation d' une décision ( voir l' arrêt de la Cour du 9 juin 1983, Verzyck/Commission, 225/82, Rec . p . 1991, 2005 et suivantes ).
32 Il convient d' en déduire qu' en l' espèce la demande de la requérante est irrecevable .
Sur le fond
1 . Sur la demande en annulation de la décision de licenciement du 12 juillet 1990
33 A l' appui de son recours en annulation à l' encontre de cette seconde décision de licenciement, la requérante développe dans sa requête introductive d' instance trois moyens d' annulation tirés, en premier lieu, de la violation d' un droit fondamental tendant à assurer la protection de la femme enceinte à l' encontre de tout licenciement; en second lieu, du non-respect du délai de préavis applicable de trois mois; et, en troisième lieu de la méconnaissance des dispositions de l' article 11 de la réglementation du bureau du Parlement ainsi que de celles prévues par le règlement du groupe, et notamment par l' article 9 dudit règlement .
34 Dans sa réplique, la requérante invoque un quatrième moyen d' annulation, tiré du défaut de motivation de la décision attaquée .
Quant au premier moyen tiré de la violation d' un droit fondamental tendant à assurer la protection de la femme enceinte
35 La requérante rappelle, tout d' abord, que la décision de licenciement du 12 juillet 1990 est intervenue alors que l' autorité investie du pouvoir de nomination ( ci-après "AIPN ") était informée de son état de grossesse depuis le 6 juin 1990 . Elle ajoute que cette information a été confirmée par un certificat médical remis le 18 juin 1990 au médecin du Parlement . Par ailleurs, dans sa lettre du 26 juin 1990 adressée à la requérante, M . Brissaud aurait reconnu avoir reçu cette information .
36 De surcroît, la requérante a soutenu au cours de l' audience que, compte tenu du fait que la réunion du bureau du groupe s' est tenue le 7 juin 1990 et non pas le 5 juin 1990, comme le soutient à tort le Parlement, il faut en déduire que le bureau du groupe lui-même était dûment informé de son état lorsqu' il a confirmé la décision de licenciement .
37 Faisant suite à ces développements factuels, la requérante estime qu' en la licenciant, tout en étant informé de son état, le Parlement a enfreint les principes généraux de droit dont la Cour et le Tribunal doivent assurer le respect aux termes de l' article 164 du traité CEE .
38 Au terme d' une analyse sommaire de certaines règles du droit international - en l' occurrence les conventions 3 et 103, adoptées respectivement en 1919 et 1952 par l' Organisation internationale du travail - de la charte sociale européenne, ainsi que du droit interne de certains États membres, la requérante arrive, en effet, à la conclusion que tous les systèmes juridiques des États membres envisagés dans son énumération ont édicté, sous une forme plus ou moins rigoureuse, une interdiction de licencier une femme enceinte pendant une période dont la durée diffère selon les législations en cause .
39 Elle en déduit l' existence d' un droit fondamental qui consacrerait une telle protection .
40 Elle ne nie pas cependant que, malgré l' existence de ce droit fondamental, qu' elle estime généralement reconnu, les dispositions du RAA n' organisent pas explicitement la protection de la femme enceinte à l' encontre d' un licenciement éventuel .
41 Dans son mémoire en défense, le Parlement rétorque, en premier lieu, que le contrat d' emploi de la requérante est régi par le droit communautaire, en l' occurrence le RAA qui, en son article 47, paragraphe 2, précité, n' interdit pas de résilier le contrat d' emploi d' une femme enceinte, mais dont la troisième phrase se limite à prévoir la suspension du délai de préavis au cours d' un congé de maternité dont la durée est définie par l' article 58 du statut, applicable par analogie en vertu de l' article 16 du RAA . Or, le Parlement soutient qu' en l' espèce le point de départ du délai de préavis se situait bien avant celui du congé de maternité de la requérante qui ne devait débuter, au plus tôt, qu' au mois de décembre 1990 . Le Parlement en déduit qu' en l' occurrence cette disposition ne peut être invoquée par la requérante .
42 En second lieu, le Parlement affirme qu' il n' existe pas, parmi les principes généraux de droit que la Cour et le Tribunal sont tenus de faire respecter, un droit fondamental dont il résulterait une interdiction totale de licencier une femme enceinte .
43 A cet égard, le Parlement précise dans sa duplique que les principes généraux du droit, reconnus par la jurisprudence de la Cour, sont dérivés des traditions constitutionnelles communes aux États membres ou des instruments internationaux concernant la protection des droits de l' homme auxquels les États membres ont adhéré ou coopéré . Or, selon le Parlement, la partie requérante ne serait pas parvenue à établir, à la lumière du droit constitutionnel comparé des États membres, que l' interdiction précitée serait consacrée en tant que droit fondamental; en l' occurrence, la requérante se serait limitée à une simple étude de droit du travail comparé . Selon le Parlement, cela ne saurait suffire, afin de créer, de manière prétorienne, un principe général de droit qui irait, toujours selon le Parlement, à l' encontre de l' article 47, paragraphe 2, du RAA .
44 En troisième lieu, le Parlement se réfère à la proposition de directive du Conseil concernant la protection au travail de la femme enceinte ou venant d' accoucher (( COM ( 90 ) 406 final - SYN 303 )), présentée par la Commission le 18 septembre 1990 ( JO C 281, p . 3 ), dont l' article 6, paragraphe 2, confirmerait l' absence d' une interdiction générale de licencier une employée enceinte .
45 Dans sa réplique, la requérante objecte à l' encontre de ce dernier argument que les dispositions pertinentes de la proposition de directive susvisée tendent, au contraire, à reconnaître l' existence d' un droit fondamental visant à assurer la protection de la femme enceinte à l' encontre de tout licenciement .
46 Ayant pris connaissance de l' argumentation respective des parties, le Tribunal constate, en premier lieu, qu' il ressort clairement des mémoires de la requérante et des explications qu' elle a fournies au cours de l' audience que la requérante ne prétend nullement que son licenciement a été dû au fait qu' elle était enceinte; au contraire, toute son argumentation, tirée de l' existence d' un droit fondamental, vise à dénier au groupe le droit de licencier une employée enceinte pour un quelconque motif, même sans relation avec sa grossesse, dès lors qu' il était tout simplement au courant du fait qu' elle était enceinte .
47 Ayant ainsi clarifié la portée de ce moyen, le Tribunal tient, en second lieu, à confirmer que le principe de l' égalité de traitement entre femmes et hommes en matière d' emploi et, corrélativement, l' absence de toute discrimination, directe ou indirecte, fondée sur le sexe, fait partie intégrante des droits fondamentaux dont la Cour et le Tribunal assurent le respect en vertu de l' article 164 du traité CEE .
48 A plusieurs reprises ( arrêts du 7 juin 1972, Sabbatini-Bertoni/Parlement, 20/71, Rec . p . 345; du 20 février 1975, Airola/Commission, 21/74, Rec . p . 221, et du 20 mars 1984, Razzouk et Beydoun/Commission, 75/82 et 117/82, Rec . p . 1530 ), la Cour a reconnu la nécessité d' assurer l' égalité entre travailleurs féminins et travailleurs masculins employés par la Communauté elle-même, dans le cadre du statut des fonctionnaires et, dans le dernier des arrêts précités, la Cour a souligné que, dans les relations entre les institutions communautaires, d' une part, et leurs agents et les ayants droit de ceux-ci, d' autre part, les exigences qu' impose ce principe ne sont nullement limitées à celles découlant de l' article 119 du traité CEE ou des directives communautaires adoptées dans ce domaine .
49 Plus précisément encore, le Tribunal relève que, dans son arrêt préjudiciel du 8 novembre 1990, Handels - og Kontorfunktionaerernes Forbund i Danmark ( C-179/88, Rec . p . I-3979 ), la Cour a interprété les dispositions de l' article 2, paragraphes 1 et 3, de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l' égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l' accès à l' emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail ( JO L 39, p . 40 ), en ce sens que le licenciement d' un travailleur féminin en raison de sa grossesse constitue une discrimination directe fondée sur le sexe ( point 13 ), comme l' est également le refus d' embaucher une femme enceinte ( arrêt du 8 novembre 1990, Dekker, C-177/88, Rec . p . I-3941 ). Un même enseignement se dégage des instruments internationaux auxquels les États membres ont coopéré ou adhéré ainsi que du droit des États membres applicable en la matière .
50 Il résulte de ces développements que seule peut invoquer la protection découlant d' un tel droit fondamental une employée licenciée en raison de sa grossesse .
51 Parvenu à ce stade de son raisonnement, le Tribunal entend, par ailleurs, clarifier que les dispositions de l' article 47, paragraphe 2, sous a ), du RAA, invoquées par le Parlement, qui prévoient que, en cas de licenciement d' un agent temporaire engagé pour une période indéterminée, le délai de préavis ne peut commencer à courir pendant la durée d' un congé de maternité, doivent être interprétées conformément à ce droit fondamental, reconnu par la jurisprudence précitée .
52 Revenant aux faits de l' espèce, il faut, en revanche, constater qu' il n' est nullement établi, et que la requérante ne soutient même pas, que le licenciement du 12 juillet 1990 est intervenu en raison de sa grossesse . Il s' ensuit que la requérante ne peut invoquer une violation du droit fondamental auquel elle s' est référée .
53 Partant, ce moyen doit être rejeté .
Quant au deuxième moyen tiré du non-respect du délai de préavis
54 L' argumentation de la requérante se concentre sur le fait que la lettre de licenciement du 12 juillet 1990, qui spécifiait que le préavis se terminerait le 11 octobre 1990, ne lui a été remise que le 20 juillet 1990 . Par suite, la requérante estime que le délai de préavis ne pouvait en conséquence courir qu' à partir du lendemain de la date de notification et ne pouvait donc expirer que le 21 octobre 1990, au plus tôt .
55 Sur ce point, le Parlement rétorque qu' il n' y a aucune disposition du RAA qui rend un licenciement caduc si - à la suite de problèmes d' acheminement du courrier - le terme du préavis mentionné dans la lettre de licenciement ne correspond pas au terme du délai entier de trois mois commençant à courir à la date de réception de ladite lettre . Selon le Parlement, il suffit que l' intéressé bénéficie réellement d' une période entière de trois mois . Il s' ensuit, toujours selon le Parlement, que l' argument développé par la requérante ne saurait entraîner la nullité de la décision de licenciement .
56 En présence de ces éléments de fait et de droit, le Tribunal constate, en premier lieu, qu' indépendamment du retard intervenu dans la notification de la décision de licenciement du 12 juillet 1990, le délai de préavis mentionné dans cette décision était trop bref étant donné que le terme du délai de trois mois y était fixé au 11 octobre 1990, alors qu' en réalité il devait inclure la journée du 12 octobre 1990 . Il faut donc en conclure que, dès le départ, le délai de préavis n' était pas suffisant . Cela ne signifie pas, pour autant, que la décision de licenciement soit nulle, dans la mesure où la requérante a reconnu, notamment dans les explications orales qu' elle a fournies au cours de l' audience, que le Parlement lui avait effectivement versé son traitement jusqu' au 20 octobre 1990, soit jusqu' au terme du délai de préavis normalement applicable . Dès lors qu' il est ainsi établi que la requérante n' a subi aucun préjudice du fait de cette erreur, il convient d' en déduire que ce moyen est devenu sans objet et doit être rejeté .
Quant au troisième moyen tiré de la violation de l' article 11 de la réglementation du bureau ainsi que du règlement du groupe, notamment de l' article 9
57 La requérante affirme que la décision de licenciement du 12 juillet 1990 n' aurait pas respecté la "procédure interne de conciliation préalable" prévue à l' article 11 de la réglementation susvisée, lequel dispose que "toute procédure visant à mettre fin au contrat d' un agent temporaire recruté sur la base de l' article 2, sous c ), du régime applicable aux autres agents nécessite l' information préalable du comité du personnel qui peut entendre l' intéressé et intervenir auprès de l' autorité habilitée à conclure les contrats d' engagement ".
58 De même, elle prétend, sans plus de précisions, que la décision va à l' encontre du règlement du groupe, et plus particulièrement de son article 9 .
59 S' agissant, d' une part, du non-respect de l' article 11 de la réglementation du bureau, le Parlement a insisté, notamment lors de l' audience, sur le fait qu' à son avis l' article 11 précité n' institue nullement une procédure de conciliation, mais se limite, au contraire, à imposer une information préalable du comité du personnel .
60 Or, le Parlement relève qu' il ressort de la lettre de M . Brissaud du 10 juillet 1990, répondant à la lettre du 9 juillet 1990 du comité du personnel, que le groupe a bel et bien informé préalablement ledit comité de son intention de licencier la requérante, respectant ainsi la disposition précitée .
61 S' agissant, d' autre part, du respect du règlement du groupe et plus particulièrement de son article 9, qui dispose notamment que la lettre de licenciement doit être signée par l' AIPN, à savoir le président du groupe, le Parlement constate que M . Le Pen, président du groupe, a bien signé la lettre de licenciement du 12 juillet 1990 .
62 Dans les explications orales qu' il a fournies au cours de l' audience, le Parlement a, par ailleurs, insisté sur le fait qu' en réalité, le règlement du groupe n' a jamais existé qu' à l' état de projet .
63 Dans sa réplique, le requérante n' invoque plus le grief tiré de la méconnaissance du règlement du groupe .
64 En ce qui concerne le non-respect de l' article 11 du règlement du bureau, elle a contesté l' existence de la lettre du 10 juillet 1990 . Partant, elle a demandé à ce que l' original en soit produit et à ce que le président du comité du personnel confirme ou non la réception de cette missive .
65 A supposer même qu' une telle lettre existe, la requérante estime que, en tout état de cause, la procédure prévue par la réglementation du bureau, qui vise à permettre au comité du personnel d' intervenir et d' entendre l' agent concerné, a été intégralement détournée de sa finalité . Elle rappelle, en effet, que la lettre du 10 juillet 1990 se termine de la manière suivante : "Vous avez tout loisir d' entendre ces deux personnes et d' intervenir auprès de notre président ". Or, selon la requérante, M . Le Pen a arrêté un jour plus tard la décision de licenciement, mettant ainsi le comité du personnel devant un fait accompli .
66 Dans sa duplique, le Parlement rétorque que la décision de licenciement du 12 juillet 1990 ne faisait nullement obstacle à ce que le comité du personnel prenne - éventuellement - les initiatives nécessaires pour que M . Le Pen reconsidère la décision de licenciement .
67 Il répète que la lettre du 10 juillet 1990 répondait à une lettre du président du comité du personnel, en date du 9 juillet 1990, dans laquelle ce dernier demandait de reconsidérer la décision de licenciement du 31 mai 1990 . Le Parlement en déduit que le comité du personnel était donc manifestement informé de la volonté de M . Le Pen de licencier la requérante, de même que M . Le Pen était informé de la demande du comité du personnel de reconsidérer sa décision, ce qui confirmerait sa conclusion selon laquelle l' article 11 de la réglementation du bureau a été pleinement respecté .
68 S' agissant de la première branche du moyen, tiré de la violation de l' article 11 de la réglementation du bureau, le Tribunal tient à souligner, en premier lieu, qu' en dépit du fait que le contrat d' emploi autorisait le Parlement à licencier la requérante en l' absence de toute motivation, mais à condition de respecter le délai de préavis prévu de trois mois, il faut considérer que la réglementation en cause, bien que non prescrite par le RAA, fait partie intégrante des formalités que le Parlement devait respecter, en tant qu' employeur, lorsqu' il entendait mettre fin au contrat d' emploi de la requérante .
69 A cet égard, il convient de relever, d' une part, qu' il résulte clairement du libellé de l' article 11 que celui-ci s' applique bien "à toute procédure visant à mettre fin au contrat d' un agent temporaire recruté sur la base de l' article 2, sous c ), du RAA", et, d' autre part, qu' en vertu d' une jurisprudence établie de la Cour, les institutions sont effectivement tenues au respect des procédures internes qu' elles ont volontairement édictées par une mesure d' ordre interne sous peine d' enfreindre le principe de l' égalité de traitement en cas de non-respect ( arrêts de la Cour du 30 janvier 1974, Louwage/Commission, 148/73, Rec . p . 89, et du 21 avril 1983, Ragusa/Commission, point 18, 282/81, Rec . p . 1258 ). Le Tribunal conclut donc qu' en vertu de la disposition invoquée par la requérante le Parlement était effectivement tenu d' informer préalablement le comité du personnel du licenciement ultérieur de la requérante, afin que ce comité soit éventuellement en mesure de l' entendre et d' intervenir auprès de l' AIPN concernée .
70 En second lieu, le Tribunal constate que le Parlement a clairement renoncé à se prévaloir de la décision de licenciement du 31 mai 1990 . Il en résulte que la décision de licenciement du 12 juillet 1990 doit bien être considérée comme une seconde décision de licenciement, qui nécessitait également l' application de la procédure d' information préalable prévue par l' article 11 de la réglementation susvisée .
71 Afin de répondre, en troisième lieu, à la question de savoir si, en l' occurrence, ladite procédure a été effectivement mise en pratique, le Tribunal relève, tout d' abord, que le Parlement affirme que le comité du personnel a été préalablement informé du licenciement ultérieur de la requérante, ainsi que l' attestent, d' une part, la lettre du 9 juillet 1990 que ledit comité a adressée au président du groupe, et, d' autre part, la lettre du 10 juillet 1990 que le secrétaire général du groupe aurait adressée au président du même comité .
72 Or, force est de noter que la première lettre n' exprime que la désapprobation du comité du personnel à l' encontre de la première décision de licenciement du 31 mai 1990, dont ne se prévaut plus le Parlement .
73 S' agissant de la seconde lettre du 10 juillet 1990, le Tribunal constate que la requérante a toujours refusé d' en reconnaître l' authenticité, sans toutefois expliciter les raisons à la base de ses réticences . Répondant à l' une des questions que le Tribunal lui avait adressées le 6 juin 1991, le Parlement indique à ce sujet que le président du comité du personnel a déclaré ne plus être en mesure de soumettre l' original de cette lettre . Il ressort, en outre, des explications fournies au cours de l' audience, que cette lettre aurait été égarée à la suite du renouvellement du comité, notamment de son président et de son secrétaire . Le Parlement s' est, dès lors, limité à en soumettre une copie .
74 Considérant que les circonstances invoquées par le Parlement sont plausibles et ne sont pas de nature à susciter un doute sur l' authenticité de la copie produite par le Parlement, le Tribunal constate que, selon la teneur même de cette lettre, la décision antérieure de licenciement de la requérante est confirmée ainsi que la décision de licencier un autre agent temporaire employé par le groupe . De même, cette lettre indique que les deux personnes concernées recevraient prochainement une lettre de licenciement du président du groupe et que le comité aurait tout loisir de les entendre et d' intervenir auprès du président .
75 Sur ce point, le Tribunal prend note du fait que, si la seconde décision de licenciement a été arrêtée le 12 juillet 1990, elle n' a été notifiée à la requérante que le 20 juillet 1990 et n' est donc devenue effective qu' à cette date . A l' appui de cette conclusion, le Tribunal se réfère à la première phrase de l' article 25, second alinéa, du statut, applicable par analogie en vertu de l' article 11 du RAA, qui prévoit que "toute décision individuelle prise en application du présent statut doit être communiquée par écrit, sans délai, au fonctionnaire intéressé ".
76 Or, en l' espèce, une période de dix jours s' est écoulée entre, d' une part, la lettre du 10 juillet 1990 informant le comité du personnel de ce que le licenciement de la requérante était confirmé et, d' autre part, la notification de la décision arrêtant effectivement le licenciement de cette dernière, période au cours de laquelle le comité du personnel a disposé d' une réelle opportunité d' intervenir en faveur de la requérante, bien qu' en réalité aucune intervention de sa part n' ait eu lieu, comme l' a, par ailleurs, confirmé la requérante au cours de l' audience .
77 En d' autres termes, il n' est donc pas exact d' affirmer, comme le fait la requérante, qu' après l' envoi de la lettre du 10 juillet 1990, le comité du personnel aurait seulement disposé d' une période déraisonnablement courte de deux jours afin d' intervenir en faveur de la requérante .
78 Il s' ensuit qu' en l' occurrence la procédure prévue à l' article 11 de la réglementation du bureau n' a pas été violée puisque les faits de l' espèce démontrent que le comité du personnel, dûment informé du second licenciement de la requérante, a effectivement bénéficié d' un délai raisonnable afin d' intervenir auprès de l' AIPN concernée, mais n' est néanmoins pas intervenu .
79 A titre surabondant, le Tribunal relève que, même au cas où il faudrait considérer qu' en arrêtant la décision de licencier la requérante le 12 juillet 1990, soit deux jours après l' envoi de la lettre au comité du personnel, l' AIPN aurait démontré le peu de respect qu' elle attachait à la réglementation interne du bureau et l' aurait ainsi détournée de sa finalité, il faudrait néanmoins conclure que l' absence de toute intervention de la part dudit comité, même, à la rigueur, au cours de la période de préavis de trois mois qui s' est terminée le 20 octobre 1990 à minuit, prouve qu' en tout état de cause, le déroulement de la procédure aboutissant à la décision de licencier la requérante n' aurait pas été différent ( arrêt de la Cour du 10 juillet 1980, Distillers Company/Commission, point 26, 30/70, Rec . p . 2229, et arrêt du Tribunal du 27 novembre 1990, T-7/90, Kobor/Commission, point 30, Rec . p . II-721 ). Eu égard aux faits de l' espèce, la requérante ne pourrait donc se prévaloir d' une telle irrégularité .
80 Il découle de l' ensemble de ces développements qu' en tout état de cause la première branche de ce moyen doit être écartée .
81 S' agissant de la seconde branche du moyen tiré de la prétendue violation du règlement du groupe, et notamment de son article 9, le Tribunal constate que la requérante n' en précise aucunement l' objet ni la portée . Partant, le Tribunal considère donc que cette seconde branche doit également être écartée .
82 Le Tribunal conclut, dès lors, que ce moyen d' annulation doit être rejeté dans son ensemble .
Quant au quatrième moyen tiré du défaut de motivation
83 Dans sa réplique, la requérante avance que la décision de licenciement serait de toute manière nulle en ce qu' elle était dépourvue de motivation, contrairement aux dispositions combinées de l' article 25 du statut et de l' article 11 du RAA .
84 A cet égard, elle se réfère aux conclusions de l' avocat général M . Mayras dans l' affaire Schertzer/Parlement ( arrêt du 18 octobre 1977, 25/68, Rec . p . 1746, 1749 ), dont l' extrait invoqué se lit comme suit : "Il en résulterait que, la confiance du groupe dans la loyauté de l' agent à l' idéologie politique cessant d' exister, le lien contractuel peut être dissous par le groupe lui-même, ou l' autorité qu' il a désignée, généralement son président . Mais ces considérations, invoquées par le Parlement défendeur, ne nous paraissent pas déterminantes au point d' autoriser un licenciement rigoureusement non motivé . Nous estimons donc que le défaut de motivation doit être retenu ".
85 De même, elle rappelle que, dans ses arrêts du 15 juillet 1960, Von Lachmueller e.a/Commission ( 43/59, 45/59 et 48/59, Rec . p . 956, 957 ), et du 16 décembre 1960, Fiddelaar/Commission ( 44/59, Rec . p . 1082 ), la Cour aurait estimé, au terme d' un raisonnement basé sur l' analyse de l' intérêt public, que l' administration reste toujours soumise au principe de bonne foi et qu' elle doit, par conséquent, motiver explicitement ses décisions de licenciement .
86 Dans sa duplique, le Parlement fait, d' emblée, remarquer que ce moyen ne figurait pas dans la requête, mettant ainsi en cause sa recevabilité .
87 Il y répond néanmoins, en soulignant que l' élément essentiel des contrats entre un groupe politique et ses agents temporaires est la confiance mutuelle, sans laquelle ces contrats perdent tout leur intérêt . A l' appui de cet argument, il se réfère à l' arrêt de la Cour du 18 octobre 1977, précité, et plus précisément aux points 39 et 40 de cet arrêt qui se lisent comme suit : "... la résiliation unilatérale du contrat d' emploi expressément prévue par la disposition citée ( article 47 du RAA ) ... trouve sa justification dans le contrat d' emploi et n' a pas besoin, dès lors, d' être motivée; ... sous ce rapport, la situation d' un agent temporaire se distingue, essentiellement, de celle d' un fonctionnaire statutaire, de manière que manque de base l' analogie qui forme la justification et la limite du renvoi de l' article 11 du régime applicable aux autres agents à certaines dispositions du statut ". Partant, le Parlement considère que ce moyen n' est pas fondé .
88 En présence de l' argumentation respective des parties, le Tribunal constate l' irrecevabilité de ce moyen, soulevé pour la première fois dans la réplique, en soulignant que la production de nouveaux moyens en cours d' instance est interdite aux termes de l' article 48, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal .
89 Au vu de l' importance que revêt, en général, le devoir de motivation incombant aux institutions des Communautés dans l' exercice de leurs compétences, le Tribunal entend, néanmoins, examiner d' office la question de savoir si, en l' espèce, la requérante peut se prévaloir de l' application par analogie, prévue par l' article 11 du RAA, des dispositions de l' article 25, dernier alinéa, du statut qui prescrivent en termes généraux que toute décision individuelle faisant grief doit être motivée .
90 A cet effet, le Tribunal relève, en premier lieu, que, à la différence des fonctionnaires dont la stabilité d' emploi est garantie par le statut, les agents temporaires relèvent d' un régime spécifique à la base duquel se trouve le contrat d' emploi conclu avec l' institution concernée .
91 En l' espèce, le contrat d' emploi, conclu pour une durée indéterminée, prévoyait explicitement que chacune des parties pouvait le résilier unilatéralement, à la condition d' observer un délai de préavis de trois mois . Le contrat d' emploi n' imposait donc pas d' obligation de motivation à charge de l' employeur, pour autant que le délai de préavis était effectivement respecté .
92 De même, le contrat d' emploi de la requérante renvoyait aux articles 48, 49 et 50 du RAA et confirmait ainsi leur application . Or, parmi ces dispositions, seul l' article 49 impose l' obligation de motiver la décision de licenciement de l' agent temporaire lorsque la résiliation unilatérale intervient pour motif disciplinaire en cas de manquement grave aux obligations auxquelles il/elle est tenu(e ). Dans un tel cas, l' article 49 prévoit explicitement que l' engagement peut être unilatéralement résilié sans préavis, soulignant ainsi que, dans le cadre du régime contractuel dont relève l' agent temporaire, l' obligation de motivation ne s' impose qu' en cas d' absence de délai de préavis . A cet égard, il convient de relever qu' en l' espèce, la résiliation du contrat d' emploi n' est nullement intervenue en vertu de l' article 49 du RAA .
93 Il résulte de ces développements que la résiliation unilatérale, explicitement prévue par le contrat d' emploi, n' a pas besoin d' être motivée quelle que soit la partie dont elle émane . Il s' ensuit que, sur ce point, la situation d' un agent temporaire se distingue de celle d' un fonctionnaire statutaire de façon à exclure l' application par analogie de l' article 25 du statut, telle que prévue, en termes généraux, par l' article 11 du RAA .
94 En second lieu, comme le soutient à juste titre le Parlement, le Tribunal relève que la confiance mutuelle est un élément essentiel des contrats en vertu desquels sont engagés les agents temporaires visés à l' article 2, sous c ), du RAA . Cela est d' autant plus vrai pour les agents qui sont engagés par les groupes parlementaires qui sont, en règle générale, l' émanation d' une option politique bien définie . En l' espèce, il est clair qu' en acceptant une fonction élevée aux caractéristiques très particulières, comme celle de secrétaire général adjoint d' un groupe parlementaire, la requérante devait avoir conscience des facteurs et des aléas politiques qui ont présidé tant à son recrutement qu' à son licenciement ultérieur . L' arrêt de la Cour du 18 octobre 1977, Schertzer/Parlement ( 25/68, Rec . p . 1743 ), confirme cette analyse .
95 Ces considérations, relatives au caractère spécifique de la fonction pour laquelle la requérante avait été engagée, renforcent la conclusion selon laquelle, en cas de disparition de la confiance mutuelle qui prévalait lors de l' engagement de la requérante, le groupe pouvait décider de résilier unilatéralement le contrat d' emploi, sans pour autant devoir fournir de motivation .
96 Il résulte de ce qui précède que ce moyen n' est pas fondé .
2 . Sur la demande subsidiaire visant, en premier lieu, à déclarer les licenciements abusifs; en second lieu, à obtenir réparation du préjudice matériel et moral prétendument subi; et, en troisième lieu, pour autant que de besoin, à obtenir la désignation d' un expert ayant pour mission d' évaluer ledit préjudice
97 Sur le point de savoir si le Tribunal peut déclarer les licenciements abusifs, il convient de rappeler, tout d' abord, qu' il résulte clairement de l' article 47, paragraphe 2, du RAA que la résiliation d' un contrat à durée indéterminée, dans le respect du préavis prévu au contrat et conforme à ladite disposition, relève du pouvoir d' appréciation de l' autorité compétente .
98 Partant, le Tribunal ne saurait contrôler le bien-fondé d' une telle appréciation sauf si l' existence d' une erreur manifeste ou d' un détournement de pouvoir peut être établie ( voir arrêt de la Cour du 26 février 1981, De Briey/Commission, 25/80, Rec . p . 637 ).
99 Or, dans la mesure où, en l' espèce, l' existence d' une telle erreur ou d' un détournement de pouvoir n' a pas été établie ni même invoquée par la requérante, le Tribunal ne peut substituer son appréciation à celle de l' autorité compétente et déclarer les licenciements de la requérante abusifs .
100 Partant, cette demande doit être rejetée .
101 S' agissant de la demande visant à obtenir la réparation du préjudice matériel et moral prétendument subi, le Tribunal relève, en ce qui concerne sa recevabilité, que la requérante avait déjà présenté une telle demande à titre subsidiaire dans sa réclamation du 24 juillet 1990 à l' encontre de la décision de licenciement du 12 juillet 1990, et, que, en tout état de cause, cette demande présente un lien étroit avec la demande en annulation des décisions visées ci-avant .
102 Il s' ensuit que la demande de la requérante visant à obtenir la réparation du préjudice qu' elle estime avoir subi est recevable .
103 En ce qui concerne l' appréciation du bien-fondé de cette demande, il convient d' examiner si la requérante a démontré que le Parlement est responsable d' une faute de service commise à son égard, qui lui aurait causé un préjudice dont elle demande la réparation .
104 Or, en l' espèce, la requérante n' a présenté aucun moyen de nature à entraîner l' annulation des décisions attaquées . Partant, la requérante n' a établi aucune irrégularité susceptible de constituer une faute de service imputable au Parlement et qui pourrait justifier l' octroi de dommages et intérêts .
105 La demande visant à obtenir la réparation du préjudice matériel et moral prétendument subi doit donc être rejetée . Il s' ensuit que la demande visant la désignation éventuelle d' un expert ayant pour mission d' évaluer ledit préjudice doit également être rejetée .
106 Il résulte de l' ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté dans son ensemble .
Sur les dépens
107 S' agissant des dépens afférents à la première instance en référé, le Tribunal relève que la requérante a introduit cette procédure, concomitamment avec son recours au fond, le 16 octobre 1990, afin de remédier à la précarité de sa situation résultant de son licenciement qui l' aurait laissée sans ressources financières dans l' attente soit de l' octroi de l' allocation de chômage prévue à l' article 28 bis du RAA, soit d' un arrêt qui lui donnerait gain de cause, alors même qu' elle était enceinte et devait donc prévoir un accroissement de ses dépenses liées à son accouchement et aux soins de son enfant .
108 A cet égard, il convient de relever que, si le président du Tribunal, dans son ordonnance du 23 novembre 1990, n' a pas accédé à la demande de la requérante visant à obtenir le sursis à l' exécution des décisions de licenciement, il a néanmoins ordonné, à titre de mesures provisoires, que, "à compter de la date à laquelle le contrat a pris fin et jusqu' à ce que la Commission verse effectivement à la requérante l' allocation de chômage prévue à l' article 28 bis du RAA, le Parlement ( paye ) à la requérante un montant équivalant à celui de l' allocation mensuelle de chômage susvisée, majorée, à partir de la naissance de l' enfant, des allocations familiales visées à l' article 28 bis, paragraphe 5, du RAA et ( assure ) à la requérante, sans contribution à sa charge, la couverture des risques de maladie dans les conditions prévues à l' article 75 du statut ".
109 Il a ainsi reconnu que l' état de la requérante justifiait une sollicitude particulière du Parlement, afin d' éviter qu' elle ne se retrouve temporairement sans ressources et ne puisse assurer son propre entretien ainsi que celui de l' enfant sur le point de naître .
110 Le Tribunal constate donc l' existence de motifs exceptionnels qui justifient que les dépens afférents à la première instance en référé soient supportés par le Parlement, conformément aux dispositions de l' article 87, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal .
111 S' agissant des dépens afférents à la seconde instance en référé, le Tribunal constate que face au fait que le Parlement a initialement refusé de, ou du moins tardé à, se conformer à ladite ordonnance du 23 novembre 1990, la requérante s' est vue contrainte de solliciter, par requête enregistrée au greffe le 14 mars 1991, de nouvelles mesures provisoires afin d' assurer le respect effectif du dispositif de l' ordonnance .
112 Sur ce point, le Tribunal rappelle que c' est seulement au cours de l' audience du 20 mars 1991, organisée dans le cadre de cette seconde instance en référé, que le Parlement s' est effectivement engagé à exécuter le dispositif de ladite ordonnance, permettant ainsi à la requérante de se désister de cette seconde procédure par lettre du 11 avril 1991 . En ce qui concerne les dépens relatifs à cette seconde instance en référé, à propos desquels la requérante avait demandé dans sa requête du 14 mars 1991 qu' ils soient mis à charge du Parlement, la requérante a proposé, dans cette même lettre du 11 avril 1991, qu' il soit statué à leur sujet dans le cadre de l' instance au fond, toujours pendante à l' époque .
113 Au vu de ces éléments, le Tribunal conclut que les dépens encourus par la requérante dans le cadre de la seconde instance en référé jusqu' à son désistement lui ont été imposés par l' attitude du Parlement, et qu' il est donc justifié que ce dernier soit condamné à les supporter en vertu des dispositions de l' article 87, paragraphe 5, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal .
114 Par suite, le Parlement est condamné à supporter l' ensemble des dépens afférents aux deux procédures en référé introduites par la requérante respectivement le 16 octobre 1990 et le 14 mars 1991 .
115 En ce qui concerne les dépens afférents à la procédure au fond, le Tribunal rappelle qu' aux termes de l' article 87, paragraphe 2, de son règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s' il est conclu en ce sens . Toutefois, selon l' article 88 du même règlement, les frais exposés par les institutions dans les recours des agents des Communautés restent à la charge de celles-ci . En ce qui concerne lesdits dépens, il y a donc lieu de condamner chacune des parties à supporter ses propres dépens .
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL ( cinquième chambre )
déclare et arrête :
1 ) Le recours est rejeté .
2 ) Le Parlement est condamné à l' ensemble des dépens afférents aux procédures en référé .
3 ) Chaque partie supportera ses propres dépens afférents à la procédure au fond .