COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 9.3.2021
COM(2021) 118 final
COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS
Une boussole numérique pour 2030: l'Europe balise la décennie numérique
1.L’union fait la force: une transformation numérique pour rendre l’Europe résiliente
En à peine un an, la pandémie de COVID-19 a radicalement modifié le rôle que joue la transformation numérique dans nos sociétés et nos économies, bouleversé la manière dont elle est perçue, et accéléré son rythme. On ne peut désormais plus se passer des technologies numériques pour travailler, apprendre, se distraire, avoir des relations sociales, faire des achats et accéder à toute une gamme de services allant de la santé à la culture. La pandémie a également illustré le rôle décisif que peut jouer l’innovation disruptive. Elle a aussi mis en lumière les vulnérabilités de notre espace numérique, la dépendance de ce dernier à l’égard des technologies non européennes et l’incidence de la désinformation sur nos sociétés démocratiques.
Face à ces défis, notre ambition déclarée est plus pertinente que jamais: il s’agit de mener des politiques numériques qui donnent aux individus et aux entreprises les moyens de s’approprier un avenir numérique qui soit centré sur l’humain, durable et plus prospère. L’Europe devra capitaliser sur ses atouts: un marché unique ouvert et compétitif, des règles solides intégrant les valeurs européennes, l’affirmation de son statut d’acteur du commerce international équitable et fondé sur des règles, une base industrielle robuste, des citoyens hautement qualifiés et une société civile solide. Dans le même temps, elle doit soigneusement évaluer toutes les faiblesses stratégiques, vulnérabilités et dépendances à haut risque qui mettent en péril la réalisation de ses ambitions et y remédier. Elle devra aussi accélérer les investissements correspondants.
L’Europe parviendra à la souveraineté numérique dans un monde interconnecté en mettant en place et en déployant des capacités technologiques de manière à donner aux citoyens et aux entreprises les moyens de tirer parti du potentiel de la transformation numérique et à contribuer à l'édification d’une société plus saine et plus verte.
Dans son discours sur l’état de l’Union prononcé en septembre 2020, la présidente von der Leyen a annoncé que l’Europe devrait parvenir à la souveraineté numérique en adoptant une vision commune pour l’UE à l’horizon 2030, fondée sur des objectifs et des principes clairs. La présidente a notamment insisté sur la création d’un nuage européen, sur un leadership en matière d’intelligence artificielle éthique, sur une identité électronique sécurisée pour tous et sur un renforcement considérable des infrastructures de données, de supercalculateurs et de connectivité. En réponse, le Conseil européen a invité la Commission à présenter, au plus tard en mars 2021, une «boussole globale pour le numérique» présentant les ambitions numériques à l'horizon 2030. Cette boussole devrait établir un système de suivi et exposer les moyens et les principales étapes pour concrétiser ces ambitions.
L’impulsion politique ainsi donnée appelle à intensifier les travaux lancés au cours de la dernière décennie pour accélérer la transformation numérique de l’Europe, en se fondant sur les progrès réalisés en vue de la mise en place d’un marché unique numérique totalement opérationnel et en renforçant les actions définies dans la stratégie «Façonner l’avenir numérique de l’Europe». La stratégie prévoyait un programme de réformes politiques qui ont déjà été engagées avec l’acte sur la gouvernance des données, la législation sur les services numériques, la législation sur les marchés numériques et la stratégie de cybersécurité. Un certain nombre d’instruments budgétaires de l’Union tels que les programmes de cohésion, l’instrument d’appui technique et le programme pour une Europe numérique soutiendront les investissements nécessaires à la transition numérique. L’accord auquel sont parvenus les colégislateurs, en vertu duquel un minimum de 20 % de la facilité pour la reprise et la résilience devrait être consacré à la transition numérique, contribuera à étayer ce programme de réformes, le financement permettant d’établir la décennie numérique de l’Europe sur des bases solides.
2.La vision pour 2030: des individus et des entreprises autonomes
L’approche européenne d’une économie et d’une société numérisées est axée sur la solidarité, la prospérité et le développement durable et fondée sur l’autonomisation des individus et des entreprises, tout en garantissant la sécurité et la résilience de son écosystème numérique et de ses chaînes d’approvisionnement.
L’un des principaux enseignements tirés de la pandémie est que le numérique permet de rapprocher des personnes qui ne se trouvent pas physiquement au même endroit. Les infrastructures numériques et la connectivité rapide offrent de nouvelles perspectives aux individus. La numérisation peut devenir un vecteur décisif des droits et des libertés, car elle permet de dépasser les limites des territoires, des positions sociales ou des communautés et offre de nouvelles possibilités d’apprendre, de se divertir, de travailler, d’explorer et de réaliser ses ambitions. Cela donnera naissance à une société où la distance géographique aura moins d’importance, parce que les gens pourront travailler, apprendre, interagir avec les administrations publiques, gérer leurs finances et effectuer des paiements, utiliser les systèmes de soins de santé et les systèmes de transport automatisés, participer à la vie démocratique, se divertir ou rencontrer d’autres personnes et échanger avec elles à tout endroit de l’UE, y compris dans les zones rurales et isolées.
Toutefois, la crise a aussi montré que notre espace numérique est vulnérable et qu’il est de plus en plus tributaire de technologies critiques, souvent développées dans des pays tiers. Elle a mis en évidence notre dépendance à l’égard d’un petit nombre de grandes entreprises technologiques, fait augmenter l’afflux de produits contrefaits et la cybercriminalité et amplifié l’incidence de la désinformation sur nos sociétés démocratiques. Une nouvelle fracture numérique est également apparue, non seulement entre les zones urbaines bénéficiant d’une bonne connectivité et les territoires ruraux et éloignés, mais aussi entre ceux qui peuvent tirer pleinement parti d’un espace numérique enrichi, accessible et sécurisé, offrant une gamme complète de services, et ceux qui ne le peuvent pas. Une fracture similaire sépare aussi les entreprises qui sont déjà en mesure d’exploiter tout le potentiel de l’environnement numérique et celles qui ne sont pas encore totalement passées au numérique. La pandémie de COVID-19 a ainsi révélé une nouvelle «pauvreté numérique», rendant impératif de faire en sorte que tous les citoyens et toutes les entreprises d’Europe puissent tirer parti de la transformation numérique pour une vie meilleure et plus prospère. La vision européenne à l’horizon 2030 est celle d’une société numérique dans laquelle personne n’est laissé pour compte.
Solutions de santé numériques
La pandémie de COVID-19 a montré le potentiel de solutions innovantes de télémédecine, de soins à distance et de robotique pour protéger le personnel médical et aider les patients à recevoir à domicile des soins dispensés à distance et ouvert la voie à leur utilisation généralisée. Les technologies numériques peuvent donner aux individus les moyens de surveiller leur état de santé et d’adapter leur mode de vie. Elles peuvent favoriser l’autonomie, prévenir les maladies non transmissibles et accroître l’efficience des prestataires de soins et des systèmes de santé. Les Européens pourront, grâce à des outils associés aux compétences numériques adéquates, continuer à mener une vie professionnelle active alors qu’ils avancent en âge, et les professionnels de la santé et les soignants pourront tirer pleinement parti des solutions de santé numériques pour surveiller et traiter leurs patients.
La transformation numérique apporte de nouvelles sources de prospérité, elle permet aux entrepreneurs d’innover, de démarrer une activité et de la développer quel que soit l’endroit où ils vivent, elle ouvre des marchés et des possibilités d’investissement dans toute l’Europe et dans le monde et elle crée de nouveaux emplois à une période où les Européens sont de plus en plus nombreux à sentir que leur sécurité économique ou leur environnement sont menacés.
Les technologies numériques peuvent contribuer de manière significative à la réalisation des objectifs du pacte vert pour l’Europe. L’adoption de solutions numériques et l’utilisation des données aideront à réussir la transition vers une économie neutre pour le climat, circulaire et plus résiliente. Remplacer les déplacements professionnels par des vidéoconférences permet de réduire les émissions tandis que, dans les secteurs de l’agriculture, de l’énergie, des bâtiments, de l’industrie ou de l’urbanisme, les technologies numériques rendent les processus plus écologiques, ce qui contribue à l’objectif proposé par l’Europe de réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici à 2030 et à une meilleure protection de notre environnement. Les infrastructures et technologies numériques elles-mêmes devront devenir plus durables et utiliser efficacement l’énergie et les ressources. L’innovation et des normes écologiques ambitieuses permettront aux entreprises, dans le cadre de leur transformation numérique, d’adopter des technologies numériques ayant une empreinte environnementale moindre, présentant une plus grande efficacité énergétique et optimisant l'utilisation des matériaux.
Solutions vertes numériques — Passeport numérique des produits
La transition vers une économie durable nécessite une gestion plus intelligente des données relatives aux produits tout au long du cycle de vie de ces derniers. La plupart de ces informations existent, mais ceux qui pourraient les utiliser au mieux n’y ont pas accès. Avec les technologies numériques, il est possible d’étiqueter, de localiser et de partager les données relatives aux produits tout au long des chaînes de valeur, même au niveau des différents composants et matériaux. Inauguré dans le secteur des batteries destinées aux véhicules électriques et aux applications industrielles, le système du passeport numérique européen des produits (dans le cadre de l’initiative sur les produits durables) améliorera les informations mises à la disposition des entreprises, stimulera une utilisation efficace des ressources et donnera aux consommateurs les moyens de faire des choix durables.
Il faut absolument disposer d’infrastructures et de technologies résilientes, sûres et fiables pour garantir le respect des règles et des valeurs européennes. Un marché unique solide, une concurrence loyale et un commerce opérationnel fondé sur des règles sont des atouts essentiels pour la réussite économique et la résilience de l’UE.
Dans le même temps, les technologies numériques sont principalement développées en dehors de l’UE et la convergence entre les États membres en matière de transformation numérique reste limitée, ce qui nuit aux économies d’échelle. C’est en consolidant ses points forts et en renforçant ses capacités à l’intérieur de ses frontières que l’UE deviendra un partenaire international plus solide. Il est nécessaire d’accroître massivement les investissements, en mobilisant tous les fonds de l’UE et les ressources nationales pertinentes, y compris en générant, par effet de levier, d’importants investissements privés, pour permettre à l’UE de développer des technologies critiques d’une manière qui stimule la croissance de sa productivité et son développement économique, en parfaite cohérence avec ses valeurs et objectifs sociétaux.
3.
Quatre axes principaux pour baliser la trajectoire de l’UE
La Commission propose de mettre en place une «boussole numérique» afin de traduire les ambitions numériques de l’UE pour 2030 en objectifs concrets et de faire en sorte qu’ils soient atteints. Cette boussole reposera sur un système de suivi renforcé, et permettra de suivre la trajectoire de l’UE en ce qui concerne le rythme de la transformation numérique, les lacunes dans les capacités numériques stratégiques européennes ainsi que la mise en œuvre des principes numériques. Cet outil, assorti de moyens de concrétiser la vision, établira des jalons essentiels sur quatre axes principaux. Les deux premiers concernent plus particulièrement les capacités numériques dans les domaines des infrastructures et de l’enseignement et des compétences, et les deux autres la transformation numérique des entreprises et des services publics.
3.1
Une population disposant de compétences numériques et des professionnels du numérique hautement qualifiés
Dans le monde de demain, si nous voulons maîtriser notre destin et pouvoir nous fier aux moyens, aux valeurs et aux choix qui sont les nôtres, nous devons pouvoir compter sur des citoyens autonomes et qualifiés en matière numérique, sur une main-d’œuvre dotée de compétences numériques et sur des experts du numérique bien plus nombreux qu’aujourd’hui. Pour ce faire, il convient de développer un écosystème d’éducation au numérique hautement performant et de mettre en place une politique efficace visant à promouvoir les liens avec les talents du monde entier et à les attirer.
Les compétences numériques seront essentielles pour renforcer notre résilience collective en tant que société. Afin de garantir une participation active à la décennie numérique, il faut que tous les citoyens possèdent des compétences numériques élémentaires et que la main-d’œuvre puisse acquérir de nouvelles compétences numériques spécialisées, comme expliqué dans la stratégie européenne en matière de compétences.
Le plan d’action sur le socle européen des droits sociaux prévoit que le pourcentage d’adultes possédant des compétences numériques élémentaires soit d’au moins 80 % en 2030. Pour que tous les Européens puissent profiter pleinement du bien-être procuré par une société numérique inclusive, et suivant les propositions formulées dans le chapitre sur les principes numériques (chapitre 4), l’accès à l’éducation permettant l’acquisition de compétences numériques élémentaires devrait être un droit pour tous les citoyens de l’UE, tandis que l’apprentissage tout au long de la vie devrait devenir une réalité.
Si les compétences numériques sont généralisées, il sera possible de bâtir une société dans laquelle on pourra faire confiance aux produits numériques et aux services en ligne, déceler les tentatives de désinformation et de fraude, se protéger contre les cyberattaques, les escroqueries et la fraude en ligne, et dans laquelle les enfants apprendront à s’orienter dans la multitude d’informations qui se trouvent en ligne et à les comprendre.
La maîtrise du codage ou des connaissances de base en informatique ne constituent pas, à elles seules, des compétences numériques avancées. Les possibilités de formation et d’éducation numériques offertes à la main-d’œuvre devraient permettre aux individus d'acquérir des compétences numériques spécialisées qui leur permettront d’accéder à des emplois de qualité et à des carrières gratifiantes. En 2019, on comptait 7,8 millions de spécialistes des TIC, le taux de croissance annuel antérieur étant de 4,2 %. Si cette tendance se poursuit, l’UE sera loin d'avoir les 20 millions d’experts dont elle aurait besoin, par exemple dans des domaines clés tels que la cybersécurité ou l’analyse des données. Plus de 70 % des entreprises déclarent que le manque de personnel possédant des compétences numériques adéquates constitue un obstacle à l’investissement. On observe également un sérieux déséquilibre entre les hommes et les femmes, ces dernières ne représentant qu’un spécialiste des TIC sur six et un diplômé sur trois dans le domaine des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STEM)
. Cette situation est aggravée par un nombre insuffisant de programmes d’éducation et de formation spécialisés dans des domaines tels que l’intelligence artificielle, l’informatique quantique et la cybersécurité et par un faible niveau d’intégration des matières numériques et des outils pédagogiques multimédias dans d’autres disciplines. Pour relever ce défi, il faut investir massivement pour former les générations futures de travailleurs et pour assurer la requalification et la reconversion de la main-d’œuvre.
En complément des actions menées dans l’UE, il convient de soutenir l’accroissement de l’habileté numérique à l’échelle mondiale, afin d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies. Le programme Erasmus+ offrira également des possibilités aux ingénieurs et spécialistes du numérique de pays tiers et, de manière générale, renforcera les environnements d’apprentissage numérique. En Afrique, des coalitions nationales en matière de compétences numériques et d’emplois pourraient élaborer des programmes communs de formation en matière de compétences numériques et soutenir les gouvernements en leur apportant une expertise et en élaborant des projets permettant de faire entrer les écoles et les établissements d’enseignement dans l’ère numérique. De même, les compétences et l’habileté numériques occupent désormais une place centrale dans le renforcement des capacités numériques en ce qui concerne nos relations avec l’Amérique latine et les Caraïbes.
À l’horizon 2030, la concurrence mondiale pour attirer les talents sera féroce, car l’expertise restera une compétence rare et un facteur essentiel d’innovation, de croissance, de productivité et de prospérité pour tous les pays. Le renforcement de l’attractivité de l’UE ainsi que les dispositifs de soutien aux talents numériques seront déterminants pour la transformation numérique de l’UE.
Le niveau d’ambition proposé est que d’ici à 2030:
-
En sus de l’objectif relatif aux compétences numériques de base établi dans le plan d’action relatif au socle européen des droits sociaux, on compte 20 millions de spécialistes des TIC employés dans l’UE, avec une parité entre les femmes et les hommes.
3.2
Des infrastructures numériques durables, sûres et efficaces
L’Europe ne parviendra au leadership numérique qu’en s’appuyant sur une infrastructure numérique durable en ce qui concerne la connectivité, la microélectronique et la capacité à traiter de vastes quantités de données, car leur rôle est déterminant pour permettre d’autres évolutions technologiques et soutenir l’avantage concurrentiel de notre industrie. Dans tous ces domaines, il faut réaliser des investissements considérables qui doivent être coordonnés pour atteindre une dimension européenne.
Chacun doit impérativement disposer, partout en Europe, d’une connectivité sûre et d’excellente qualité pour garantir la pleine participation de toutes les entreprises et tous les citoyens à la société. Il est essentiel de parvenir à une connectivité en gigabit d’ici à 2030. Bien que diverses combinaisons de technologies puissent permettre de réaliser cette ambition, il y a lieu de privilégier la connectivité fixe, mobile et satellitaire de nouvelle génération, qui est plus durable, au moyen du déploiement de réseaux à très haute capacité, notamment les réseaux 5G, en s’appuyant sur une attribution rapide et efficace des fréquences du spectre et conformément à la boîte à outils de cybersécurité 5G, dans la perspective d’un développement de la 6G pour les années à venir
.
Plus nous avançons dans la décennie, plus les ménages auront recours à ces technologies de réseau car leurs besoins en matière de connectivité à très haute capacité iront croissant. D’ici à la fin de la décennie, de nouvelles fonctions et possibilités de communication numérique sur les réseaux, telles que les médias holographiques de haute précision et les expériences sensorielles numériques, devraient ouvrir des perspectives entièrement nouvelles à une société fondée sur les technologies numériques, ce qui souligne la nécessité d’une connectivité en gigabit. Bien avant la fin de la décennie, les entreprises auront besoin de connexions en gigabit et d’infrastructures de données dédiées pour les applications de l’informatique en nuage et du traitement des données, de la même manière que les écoles et les hôpitaux en auront besoin pour l’éducation en ligne et la santé en ligne. Le calcul à haute performance (HPC) nécessitera des connexions en terabit pour permettre le traitement des données en temps réel.
Le niveau d’ambition proposé est que d’ici à 2030:
Tous les ménages européens soient couverts par un réseau en gigabit, toutes les zones habitées étant couvertes par la 5G.
Le leadership numérique de l’Europe et sa compétitivité mondiale sont tributaires d’une connectivité solide, à l’intérieur des frontières de l’Union comme à l’extérieur. Ces considérations devraient également guider notre action internationale, en particulier dans les fuseaux horaires européens, et compte tenu de l’émergence de passerelles de données à la périphérie de l’UE. L’UE a un vaste programme d’action, prévoyant notamment le déploiement du haut débit avec des partenaires des Balkans occidentaux et du partenariat oriental. L’Europe sera reliée à ses partenaires de la politique de voisinage et en Afrique, notamment au moyen de câbles terrestres et sous-marins et d’une constellation sécurisée de satellites. En outre, l’UE aura recours à de nouveaux partenariats de connectivité avec l’Inde et l’ASEAN pour intensifier la mise en œuvre de la stratégie de connectivité UE-Asie. Le partenariat numérique avec l’Amérique latine et les Caraïbes complétera le lancement de la composante «connectivité» de l’alliance numérique avec l’Amérique latine et les Caraïbes, grâce au câble BELLA.
Si la connectivité est une condition préalable à la transformation numérique, ce sont les microprocesseurs qui se trouvent à l’origine de la plupart des chaînes de valeur stratégiques clés telles que les voitures connectées, les téléphones, l’internet des objets, les ordinateurs à haute performance, l’informatique en périphérie de réseau et l’intelligence artificielle. Certes, l’Europe conçoit et fabrique des puces haut de gamme, mais elle souffre aussi d’importantes lacunes, notamment dans les domaines des technologies de fabrication de pointe et de la conception des puces, ce qui la rend vulnérable à plusieurs égards.
Le niveau d’ambition proposé est que d’ici à 2030:
La quantité de semi-conducteurs durables et de pointe produits en Europe, y compris les processeurs, représente en valeur au moins 20 % de la production mondiale (c’est-à-dire des installations permettant de produire des nœuds de taille inférieure à 5 nm, avec l’ambition de passer à 2 nm, et qui soient 10 fois plus économes en énergie qu’aujourd’hui).
Des infrastructures numériques au service des citoyens, des PME, du secteur public et des grandes entreprises nécessitent des capacités de calcul à haute performance et des infrastructures de données complètes. Aujourd’hui, les données produites en Europe sont généralement stockées et traitées à l’extérieur de ses frontières, où se déroulent également les opérations d’extraction de valeur. Certes, il convient que les entreprises qui produisent et exploitent des données conservent leur liberté de choix à cet égard, mais cela peut présenter des risques en ce qui concerne la cybersécurité, l’approvisionnement, les possibilités de changement de fournisseur et l’accès illicite de pays tiers aux données. Seule une faible part du marché des services d’informatique en nuage est détenue par des fournisseurs établis dans l’UE. Celle-ci se trouve donc exposée à ces risques, et le potentiel d’investissement de son industrie numérique dans le marché du traitement des données est limité. En outre, compte tenu de l’incidence des centres de données et des infrastructures du nuage sur la consommation d’énergie, l’UE devrait prendre l’initiative pour rendre ces infrastructures neutres sur le plan climatique et efficaces sur le plan énergétique d’ici à 2030, en exploitant l’énergie excédentaire pour chauffer les logements, les entreprises et les espaces publics communs. La Commission intégrera à l’indice relatif à l’économie et à la société numériques renforcé (DESI) des mécanismes de mesure de l’efficacité énergétique des centres de données et des réseaux de communications électroniques utilisés par les entreprises européennes.
Comme le souligne la stratégie européenne pour les données, le volume de données produites augmente considérablement et on s’attend à ce que les opérations de traitement de données soient de plus en plus nombreuses à se dérouler en périphérie, à proximité des utilisateurs et sur le lieu de production des données. Cette évolution nécessitera la mise au point et le déploiement de technologies de traitement des données fondamentalement nouvelles, qui vont jusqu’à la périphérie, en s’éloignant des modèles centralisés d’infrastructures fondés sur le nuage. Pour tenir compte de cette tendance à la distribution et à la décentralisation accrues des capacités de traitement des données, et pour remédier au déficit d’offre de services en nuage adaptés répondant aux besoins des entreprises et des administrations publiques européennes, l’Europe doit renforcer ses propres infrastructures et capacités pour le nuage.
Applications de l’informatique intelligente en périphérie
-Pour les véhicules autonomes, surveiller les intersections dangereuses afin que les véhicules puissent circuler en toute sécurité.
-Dans le domaine de l’«agriculture intelligente», le déploiement de capacités en périphérie connectées aux machines dans les exploitations agricoles permettra de recueillir des données agricoles en temps réel, de fournir aux agriculteurs des services avancés, tels que la prévision des récoltes ou la gestion des exploitations, et d'optimiser les chaînes d’approvisionnement alimentaire.
-Dans le cadre d’une approche «Manufacturing-as-a-service», permettre aux entreprises manufacturières — notamment aux PME — d’avoir un accès local à des plateformes de services industrielles innovantes fondées sur le nuage et à des places de marché afin de renforcer la visibilité de leurs capacités de production.
-Dans le domaine des données et dossiers de santé, accélérer la collecte et l’agrégation des données de santé au niveau local (en cas de pandémie, par exemple).
-Dans le cadre de la modernisation du secteur public, le déploiement en périphérie permettra aux administrations publiques locales de disposer d’une capacité de traitement des données.
Le niveau d’ambition proposé est que d’ici à 2030:
-10 000 nœuds périphériques hautement sécurisés et neutres pour le climat soient déployés dans l’UE et répartis de manière à garantir aux entreprises, où qu’elles se trouvent, un accès aux services de données avec une faible latence (quelques millisecondes).
Toutefois, les entreprises et les administrations publiques européennes ne pourront profiter pleinement des avantages liés à l’écosystème du nuage et de l’informatique en périphérie que si ce dernier est associé à une capacité de calcul de pointe. À cet égard, la coopération avec les États membres dans le cadre de l’entreprise commune pour le calcul à haute performance européen, déjà établie, sera accélérée afin de déployer une infrastructure de classe mondiale associant le calcul intensif, l’informatique quantique et les données.
Dans le même temps, l’UE doit investir dans de nouvelles technologies quantiques. Elle devrait être à l’avant-garde mondiale du développement d’ordinateurs quantiques entièrement programmables, auquel il sera possible d’accéder partout en Europe, très économes en énergie et capables d’effectuer en quelques heures des opérations qui nécessitent actuellement des centaines de jours, voire des années.
La révolution quantique de la prochaine décennie va changer la donne dans l’apparition et l’utilisation des technologies numériques. Parmi les applications possibles, on peut citer:
-
la santé: les ordinateurs quantiques contribueront au développement plus rapide et plus efficient des médicaments, par exemple en simulant un organisme humain, véritable «jumeau numérique» permettant de réaliser des essais virtuels de médicaments, de développer des traitements personnalisés du cancer, de séquencer le génome beaucoup plus rapidement, etc.;
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le renforcement de la sécurité des communications et des transferts de données: les systèmes de communication quantiques sécurisés peuvent protéger les communications sensibles, les systèmes de vote en ligne et les transactions financières, assurer le stockage à long terme des données sensibles relatives à la santé et à la sécurité nationale et sécuriser les infrastructures de communication critiques.
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l’amélioration de la surveillance des ressources: des capteurs quantiques de gravité installés sur Terre ou embarqués sur des satellites mesureront les champs gravitationnels, ce qui permettra de détecter les obstacles, les affaissements et les ressources en eau souterraines et de surveiller les phénomènes naturels tels que l’activité volcanique.
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l’activité économique/l’environnement: les ordinateurs quantiques optimiseront l’utilisation d’algorithmes pour résoudre des problèmes logistiques et de planification extrêmement complexes, ce qui permettra d’économiser du temps et du carburant ou de trouver la combinaison la moins chère de sources renouvelables pour alimenter un réseau énergétique.
Le niveau d’ambition proposé est que:
d’ici à 2025, l’Europe dispose de son premier ordinateur quantique qui ouvrira la voie à une Europe à la pointe des capacités quantiques à l’horizon 2030.
3.3
La transformation numérique des entreprises
Durant la pandémie de COVID-19, l’adoption des technologies numériques est devenue essentielle pour de nombreuses entreprises. D’ici à 2030, ces technologies, y compris la 5G, l’internet des objets, l’informatique en périphérie, l’intelligence artificielle, la robotique et la réalité augmentée seront bien davantage que des technologies génériques; elles seront au cœur de nouveaux produits, de nouveaux procédés de fabrication et de nouveaux modèles commerciaux fondés sur le partage équitable des données dans l’économie des données. Dans ce contexte, l’adoption et la mise en œuvre rapides des propositions de la Commission relatives à la stratégie pour un marché unique numérique et à la stratégie visant à façonner l’avenir numérique de l’Europe renforceront la transformation numérique des entreprises et garantiront une économie numérique équitable et concurrentielle. Elles devront également s’accompagner de conditions de concurrence équitables à l’étranger.
La transformation des entreprises dépendra de leur capacité à adopter de nouvelles technologies numériques rapidement et à tous les niveaux, y compris dans les écosystèmes industriel et des services qui accusent un retard. Le soutien de l’UE, notamment par l’intermédiaire du programme en faveur du marché unique, du programme pour une Europe numérique et du programme de cohésion, favorisera le déploiement et l’utilisation des capacités numériques, y compris des espaces de données industrielles, de la puissance de calcul, des normes ouvertes ainsi que des installations d’essai et d’expérimentation.
Les entreprises devraient être encouragées à adopter des technologies et des produits numériques ayant une empreinte environnementale moindre, présentant une plus grande efficacité énergétique et optimisant l’utilisation des matériaux. Les technologies numériques doivent être déployées rapidement pour permettre une utilisation plus intensive et plus rationnelle des ressources. De la sorte, le renforcement de la productivité matières de l’Europe réduira à la fois les coûts des intrants dans les processus de production et notre vulnérabilité aux chocs d’approvisionnement.
Les possibilités qu’offre la transformation numérique pour cinq écosystèmes clés
-Secteur de la fabrication: grâce à la connectivité 5G, les appareils des usines seront encore plus connectés et collecteront des données industrielles. L’intelligence artificielle donnera des instructions aux robots en temps réel, ce qui les rendra de plus en plus collaboratifs et améliorera l’emploi, la sécurité, la productivité et le bien-être des travailleurs. Les fabricants seront en mesure d’améliorer la maintenance prédictive et de produire sur demande, en fonction des besoins des consommateurs, avec des stocks nuls, grâce aux jumeaux numériques, aux nouveaux matériaux et à l’impression 3D.
-Santé: la multiplication des interactions en ligne, des services dématérialisés et l’intensification de la transmission électronique, de l’accès électronique aux données plutôt que sur support papier, ainsi que de l’automatisation, pourraient générer jusqu’à 120 milliards d’euros par an en Europe.
-Construction: de tous les grands secteurs économiques, c’est celui dans lequel l’évolution de la productivité a été la plus faible ces vingt dernières années. 70 % des dirigeants du secteur ont indiqué que les nouvelles technologies de production et la numérisation constituaient les moteurs du changement dans la construction.
-Agriculture: les technologies agricoles numériques peuvent permettre au secteur agricole de produire de manière plus adaptée et plus efficiente, améliorant ainsi les performances et la compétitivité du secteur en matière de durabilité. L’agriculture a été définie comme un secteur clé, dans lequel les solutions numériques peuvent contribuer à réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre et l’utilisation de pesticides.
-Mobilité: les solutions numériques pour la mobilité connectée et automatisée recèlent un vaste potentiel pour ce qui est de réduire le nombre d’accidents de la route, d’améliorer la qualité de vie et de renforcer l’efficience des systèmes de transport, y compris en ce qui concerne leur empreinte environnementale.
Il convient d’accorder une attention particulière à l’innovation de pointe et de rupture. Si l’Europe crée déjà autant de start-up que les États-Unis, elle doit mettre en place des conditions plus favorables et un marché unique réellement opérationnel pour une croissance et une expansion rapides. L’Europe s’est dotée de divers outils, mais le déficit d’investissement pour financer la croissance des start-up entre les États-Unis et l’Europe, voire entre l’UE et la Chine, reste considérable. L’UE a déjà produit un certain nombre de licornes, mais elle peut encore progresser dans ce domaine. L’élaboration d’une norme d’excellence «Startup Nations» peut contribuer à faciliter la croissance par-delà les frontières, notamment pour ce qui est d’améliorer l’accès au financement à des fins d’expansion.
Les PME jouent un rôle central dans cette transition, non seulement parce qu’elles représentent la majeure partie des entreprises de l’UE, mais aussi parce qu’elles constituent une source essentielle d’innovation. Avec le soutien de plus de 200 pôles d’innovation numérique et pôles industriels, d’ici à 2030, les PME devraient avoir la possibilité d’accéder aux technologies ou aux données numériques facilement et dans des conditions équitables, dans le cadre d’une réglementation appropriée, et bénéficier d’un soutien adéquat en matière de numérisation. À cet égard, plus de 200 pôles d’innovation numérique et pôles industriels dans l’ensemble de l’UE devraient soutenir la transformation numérique tant des PME innovantes que des PME non numériques et connecter les fournisseurs numériques aux écosystèmes locaux. L’objectif est d’atteindre un niveau élevé d’intensité numérique, en ne laissant personne de côté. La Commission mettra à jour sa stratégie industrielle, en vue également d’accélérer la transformation numérique des écosystèmes industriels à l’appui des objectifs fixés à l’horizon 2030.
Le niveau d’ambition proposé est que d’ici à 2030:
-
75 % des entreprises européennes recourent à des services d’informatique en nuage, aux mégadonnées et à l’intelligence artificielle;
-
plus de 90 % des PME européennes atteignent au moins un niveau élémentaire d’intensité numérique;
-
l’Europe développe sa réserve d’entreprises innovantes en expansion et améliore leur accès au financement, doublant ainsi le nombre de licornes en Europe.
3.4
Numérisation des services publics
D’ici à 2030, l’objectif de l’UE est de faire en sorte que la vie démocratique et les services publics en ligne soient pleinement accessibles à tous, y compris aux personnes handicapées, et bénéficient du meilleur environnement numérique offrant des services et des outils simples d’utilisation, efficients et personnalisés, répondant à des normes élevées en matière de sécurité et de respect de la vie privée. Le vote électronique sécurisé encouragerait une plus grande participation du public à la vie démocratique. Des services conviviaux permettront aux citoyens de tous âges et aux entreprises de toutes tailles d’influer plus efficacement sur l’orientation et les résultats de l’action publique et amélioreront les services publics. L’État plateforme (Government as a Platform), qui constituera un nouveau moyen de déployer des services publics numériques, offrira un accès global et facile aux services publics, avec une interaction fluide des capacités avancées, telles que le traitement des données, l’intelligence artificielle et la réalité virtuelle. Il contribuera également à stimuler les gains de productivité des entreprises européennes, grâce à des services plus efficaces, numériques par défaut
, et donnera l’exemple pour inciter les entreprises, en particulier les PME, à accroître leur numérisation.
Toutefois, de nombreux efforts doivent encore être entrepris pour concrétiser cela. Malgré l’utilisation croissante des services publics en ligne, les services fournis par voie numérique sont souvent rudimentaires (formulaires à remplir, par exemple). L’Europe doit tirer parti de la numérisation pour induire un changement de paradigme dans la manière dont les citoyens, les administrations publiques et les institutions démocratiques interagissent, en garantissant l’interopérabilité à tous les niveaux de pouvoir et dans tous les services publics.
Télémédecine
Durant la pandémie, les consultations de télémédecine ont augmenté davantage en un mois qu’en dix ans, ce qui a joué un rôle essentiel dans la réduction des files d’attente dans les hôpitaux et dans le maintien des patients en bonne santé. La capacité des citoyens européens à accéder à leurs dossiers de santé informatisés et à en contrôler l’accès dans l’ensemble de l’UE devrait être grandement améliorée d’ici à 2030, sur la base de spécifications techniques communes pour le partage des données concernant la santé, l’interopérabilité, le développement d’infrastructures sécurisées et l’adoption de mesures visant à faciliter l’acceptation par le public du partage d’informations sur la santé avec la communauté médicale.
Identité numérique européenne: les services publics au creux de la main
D’ici à 2030, le cadre de l’UE devrait avoir conduit au déploiement à grande échelle d’une identité de confiance contrôlée par l’utilisateur, permettant à chaque citoyen de contrôler ses propres interactions et sa présence en ligne. Les utilisateurs pourront utiliser pleinement et facilement les services en ligne dans l’ensemble de l’UE tout en préservant leur vie privée.
Les communautés de l’UE mettent également en place des plateformes de données intelligentes intégrant des données dans différents secteurs et villes, qui améliorent la qualité de vie de leurs citoyens au quotidien. Aujourd’hui, la plupart des services numériques proposés par ces plateformes se limitent à des services de base, tels que le stationnement intelligent, l’éclairage intelligent ou la télématique des transports publics. La numérisation joue aussi un rôle clé dans le développement des «villages intelligents», c’est-à-dire des communautés dans les zones rurales qui recourent à des solutions innovantes pour améliorer leur résilience, en s’appuyant sur les possibilités et les atouts locaux.
Les plateformes dans les communautés rurales et urbaines reposeront sur les technologies numériques et proposeront des services tels que des systèmes de transport intelligents multimodaux, une aide d’urgence rapide en cas d’accident, des solutions plus ciblées en matière de gestion des déchets, la gestion du trafic, la planification urbaine, des solutions intelligentes en matière d’énergie et d’éclairage, l’optimisation des ressources, etc. L’utilisation des critères de l’UE en matière de marchés publics écologiques peut stimuler la demande de transformation numérique verte.
La transformation numérique devrait également permettre de disposer de systèmes judiciaires modernes et efficaces, de faire respecter les droits des consommateurs et d’accroître l’efficacité de l’action publique, y compris les capacités répressives et les capacités d’enquête – ce qui est illégal hors ligne est également illégal en ligne et les services répressifs doivent être les mieux armés pour faire face à des délits numériques de plus en plus sophistiqués.
Le niveau d’ambition proposé est que d’ici à 2030:
·100 % des services publics essentiels puissent être fournis en ligne aux citoyens et aux entreprises européens;
·100 % des citoyens européens aient accès à leurs dossiers médicaux électroniques;
·80 % des citoyens aient recours à un moyen d’identification numérique.
4.
Citoyenneté numérique
Le déploiement d’infrastructures, de compétences et de capacités numériques et le passage au numérique des entreprises et des services publics ne suffisent pas à eux seuls à définir l’approche de l’UE à l’égard de son avenir numérique; il est également nécessaire de permettre à tous les Européens de tirer pleinement parti des technologies et des possibilités numériques. Dans l’espace numérique, nous devons veiller à ce que les mêmes droits que ceux qui s’appliquent hors ligne puissent être pleinement exercés en ligne.
Pour disposer de tous les moyens nécessaires, les individus devraient d’abord avoir accès à une connectivité abordable, sécurisée et de haute qualité, être en mesure d’acquérir des compétences numériques de base – ce qui devrait devenir un droit pour tous – et être dotés d’autres moyens leur permettant de participer pleinement aux activités économiques et sociétales d’aujourd’hui et de demain. Ils doivent également pouvoir accéder facilement aux services publics numériques, sur la base d’une identité numérique universelle, ainsi qu’aux services de santé numériques. Ils devraient bénéficier d’un accès non discriminatoire aux services en ligne et de l’application de principes tels que ceux qui ont trait à des espaces numériques sûrs et fiables, à l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée dans un environnement de travail à distance, à la protection des mineurs et à un processus décisionnel algorithmique éthique.
Par ailleurs, les technologies et services numériques utilisés doivent être conformes au cadre juridique applicable et respecter les droits et les valeurs inhérents au «mode de vie européen». En outre, l’environnement numérique centré sur l’humain, sûr et ouvert doit être conforme à la loi, mais aussi permettre aux individus de faire valoir leurs droits, tels que le droit à la vie privée et à la protection des données, la liberté d’expression, les droits de l’enfant et les droits des consommateurs.
Les principes numériques sont ancrés dans le droit primaire de l’Union, notamment le traité sur l’Union européenne (TUE), le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), la charte des droits fondamentaux et la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, ainsi que dans le droit dérivé.
Cette approche européenne de la société numérique devrait également étayer et soutenir les initiatives ouvertes en faveur de la démocratie en contribuant à l’élaboration de politiques inclusives, en permettant l’instauration d’un vaste dialogue avec les citoyens et en favorisant les actions de terrain visant à mettre en place des initiatives locales en tant que facteurs essentiels pour améliorer l’acceptabilité sociale et le soutien public aux décisions démocratiques.
Cette approche européenne de la société numérique repose également sur le plein respect des droits fondamentaux de l’UE:
·la liberté d’expression, y compris l’accès à des informations diversifiées, fiables et transparentes;
·la liberté de mettre en place et de gérer une activité économique en ligne;
·la protection de la vie privée et des données à caractère personnel, ainsi que le droit à l’oubli;
·la protection de la création intellectuelle des individus dans l’espace en ligne.
Il est tout aussi important de mettre en place un ensemble complet de principes numériques qui constitueront une source d’informations pour les utilisateurs et serviront de guide aux décideurs politiques et aux opérateurs numériques, tels que:
·l’accès universel aux services internet;
·un environnement en ligne sécurisé et fiable;
·une éducation et des compétences numériques universelles permettant aux citoyens de participer activement à la société et aux processus démocratiques;
·un accès à des systèmes et dispositifs numériques respectueux de l’environnement;
·une administration et des services publics numériques accessibles et centrés sur l’humain;
·des principes éthiques applicables aux algorithmes centrés sur l’humain;
·la protection et l’autonomisation des enfants dans l’espace en ligne;
·l’accès aux services de santé numériques.
La Commission proposera d’inclure cet ensemble de principes et de droits numériques dans une déclaration solennelle interinstitutionnelle entre la Commission européenne, le Parlement européen et le Conseil, sur la base d’une proposition de la Commission européenne, en s’appuyant sur l’expérience acquise dans le cadre du socle européen des droits sociaux et en la complétant.
La Commission a l’intention de réaliser un exercice annuel Eurobaromètre spécialement consacré au suivi de la perception qu’ont les Européens du respect de leurs droits et de leurs valeurs, ainsi que de la mesure dans laquelle ils estiment que la numérisation de notre société leur est profitable.
5.
Une boussole pour atteindre les cibles et les objectifs fixés pour 2030
Un cadre solide est nécessaire pour concrétiser l’ambition renouvelée de l’UE en matière de numérisation. Il devrait englober notre vision fondée sur les quatre axes principaux et les principes numériques et pallier les lacunes essentielles en matière de capacités.
BOUSSOLE numérique
Structure de gouvernance avec rapports annuels et suivi
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Réalisation des objectifs concrets au titre des quatre axes principaux
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Conception et lancement de
projets plurinationaux
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Suivi des principes numériques
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Suivi par des indicateurs clés de performance (ICP) quantitatifs, établissement de rapports sur les actions menées, complétés par des recommandations
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Suivi du déficit d’infrastructures et de capacités critiques. Recherche d’un consensus/d’un accord sur des projets communs et facilitation de leur mise en œuvre
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Rapports et tableaux de bord
Eurobaromètre annuel
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5.1 Gouvernance
Sur le plan opérationnel, la Commission a l’intention de proposer une boussole numérique sous la forme d’un programme d’action dans le domaine numérique que le Parlement européen et le Conseil devront adopter par codécision, axé sur l’engagement constant en faveur de la réalisation des objectifs numériques communs. Le programme serait caractérisé par les aspects suivants:
-Un ensemble d’objectifs concrets pour chacun des quatre axes principaux proposés au chapitre 3.
-Un système de suivi mesurant les progrès accomplis par l’UE au regard des objectifs clés pour 2030 (chapitre 3 et annexe) et des principes numériques (chapitre 4), évaluant également les domaines dans lesquels l’évolution est insuffisante au niveau des États membres, y compris, par exemple, l’inaction ou la mise en œuvre incomplète des propositions réglementaires clés. Les indicateurs sous-jacents pour le suivi des objectifs au niveau de l’UE et des tendances en matière de numérisation au niveau national seront intégrés dans les rapports DESI renforcés afin de s’aligner sur les méthodologies et processus existants et de les exploiter.
-La Commission européenne sera chargée de l’analyse et de l’établissement de rapports généraux sur les progrès réalisés au niveau européen. Ces rapports fourniront une vue d’ensemble et une analyse de la situation et montreront la distance qu’il reste à parcourir pour atteindre les objectifs de la décennie numérique (voir, à titre d’exemple, le graphique ci-dessous). L’objectif final est de déterminer dans quels domaines les progrès sont insuffisants et comment les lacunes recensées peuvent être comblées par des mesures et des recommandations au niveau européen et/ou national.
Où en sommes-nous dans la réalisation des objectifs à l’horizon 2030 qui permettront la mise en place d’une société numérique inclusive et durable?
Sur la base de l’analyse effectuée, la Commission publiera chaque année le rapport sur l’état d’avancement de la décennie numérique en Europe (European State of the Digital Decade Report) à l’intention du Conseil et du Parlement européen, afin de rendre compte des progrès accomplis en ce qui concerne la réalisation de la vision à l’horizon 2030 et les axes principaux, objectifs et principes correspondants, et également pour ce qui est du respect plus général de ces objectifs, sous la forme de «clignotants». Ce rapport attirera l’attention sur les écarts par rapport aux objectifs communs de l’UE à l’horizon 2030 et aux principes numériques, ainsi que sur les lacunes recensées en matière d’investissement. Le rapport annuel sur l’état d’avancement de la décennie numérique, en tant que rapport unique sur les progrès réalisés dans le domaine du numérique, alimentera également l’exercice du Semestre européen et sera aligné sur le processus de la facilité pour la reprise et la résilience.
Le rapport donnera lieu à une analyse collaborative entre la Commission et les États membres afin de trouver des solutions pour remédier aux faiblesses constatées et de proposer des actions ciblées et efficaces. La Commission sera habilitée, en collaboration avec les États membres, à procéder à un suivi opérationnel et à formuler des recommandations. Il pourrait notamment s’agir de recommandations concernant la mise en œuvre de la réglementation ou la nécessité d’une intervention publique pour encourager des investissements supplémentaires dans les technologies et les capacités numériques, par exemple au moyen de l’élaboration de projets multinationaux.
Le programme mettra en place un mécanisme permettant à la Commission de nouer le dialogue avec les États membres dans le cadre d’une coopération et d’une coordination étroites, dans le but de prendre des engagements communs ainsi que d’éventuelles mesures au niveau de l’UE et au niveau national, en tenant compte également de la mise en œuvre d’autres politiques et initiatives numériques. Ce programme permettra aussi à la Commission de dialoguer avec les États membres en vue de lancer et de façonner des projets multinationaux, comme décrit ci-dessous.
L’accent sera mis sur la coopération et la coordination avec les États membres, mais, pour que la gouvernance soit efficace, tous les acteurs économiques et sociétaux doivent avoir une confiance dûment fondée dans l’exécution concrète. Étant donné qu’il s’agit d’une condition essentielle pour réussir à accélérer la transformation numérique de l’UE, la boussole fera l’objet de consultations ciblées avec les parties prenantes concernées.
5.2 Projets multinationaux
Afin de concrétiser la vision de l’Europe pour la décennie numérique, il faut disposer de capacités numériques dans les quatre domaines de la boussole numérique; cela n’est possible que si les États membres et l’UE mutualisent les ressources. En ce qui concerne les grands projets technologiques dont l’Europe a besoin pour mener à bien sa transition numérique, il est indispensable d’adopter une approche européenne du renforcement des capacités numériques. Des capacités européennes de pointe nécessitent une masse critique de financement et la mobilisation de tous les acteurs.
Le Conseil européen a appelé à poursuivre le renforcement des synergies entre l’utilisation des fonds de l’UE et des fonds nationaux en ce qui concerne ces projets technologiques clés. Le règlement établissant la facilité pour la reprise et la résilience (FRR) et l’instrument d’appui technique reconnaissent la possibilité d’élaborer des projets multinationaux combinant des investissements provenant de plusieurs plans nationaux pour la reprise et la résilience. Il faudrait en outre prévoir des actions à plus long terme, en s’employant à garantir la mobilisation d’investissements provenant du budget de l’UE, des États membres et du secteur.
Les orientations que pourraient prendre les projets multinationaux ont déjà été examinées avec les États membres dans le cadre de l’élaboration des plans nationaux pour la reprise et la résilience, au titre des initiatives phares «Connecter», «Développer», «Moderniser» et «Promouvoir la reconversion et la mise à niveau des compétences». La Commission a offert un soutien opérationnel et encouragé les États membres à utiliser les fonds provenant de leurs plans nationaux pour la reprise et la résilience respectifs pour conjuguer leurs efforts et financer ces projets multinationaux.
Projets numériques multinationaux examinés à ce jour avec les États membres au titre de la FRR:
-édifier une infrastructure paneuropéenne interconnectée, polyvalente et commune de traitement des données, devant être utilisée dans le strict respect des droits fondamentaux, développer des capacités en périphérie permettant un traitement en temps réel (très faible latence) pour répondre aux besoins des utilisateurs finaux à proximité des lieux de production des données (c’est-à-dire à la périphérie des réseaux de télécommunications), concevoir des plateformes Middleware sécurisées, à faible consommation et interopérables pour des utilisations sectorielles, et permettre l’échange et le partage aisés de données, notamment pour les espaces européens communs des données;
-doter l’UE de capacités dans le domaine électronique lui permettant de concevoir et de déployer une nouvelle génération de processeurs fiables à basse consommation et d’autres composants électroniques nécessaires pour alimenter ses infrastructures numériques critiques, ses systèmes d’IA et ses réseaux de communication;
-procéder au déploiement paneuropéen de corridors 5G pour les opérations numériques avancées dans le secteur ferroviaire et pour une mobilité connectée et automatisée contribuant à la sécurité routière et à la réalisation des objectifs du pacte vert;
-acquérir des superordinateurs et des ordinateurs quantiques, raccordés au réseau de communication à bande passante extrême de l’entreprise commune EuroHPC, investir dans les plateformes d’application à grande échelle qui nécessitent des ressources de calcul intensif (par exemple, en matière de santé et de prévision des catastrophes) ainsi que dans les centres nationaux de compétences CHP et dans les compétences quantiques et en CHP et coopérer avec ces plateformes et ces centres;
-développer et déployer une infrastructure de communication quantique ultrasécurisée couvrant l’ensemble de l’UE, afin d’accroître sensiblement la sécurité de la communication et du stockage des actifs que constituent les données sensibles sur tout le territoire de l’UE, y compris la sécurité des infrastructures critiques;
-déployer un réseau de centres d’opérations de sécurité, fonctionnant grâce à l’intelligence artificielle, capable de détecter suffisamment tôt les signes d’une cyberattaque, et de permettre une action proactive, en vue d’améliorer la préparation et la réaction communes aux risques à l’échelle des États membres et de l’UE;
-administration publique connectée: en complémentarité et en synergie avec le cadre eIDAS, créer et proposer sur une base volontaire une identité numérique européenne permettant d’accéder aux services numériques en ligne des secteurs public et privé et de les utiliser d’une manière qui renforce la protection de la vie privée et respecte strictement la législation en vigueur en matière de protection des données; établir un système «une fois pour toutes» permettant aux administrations publiques aux niveaux local, régional et national d’échanger des données et des preuves par-delà les frontières, dans le respect plein et entier des exigences légales et des droits fondamentaux;
-infrastructure européenne de services de chaînes de blocs: développer, déployer et exploiter une infrastructure paneuropéenne fondée sur la technologie des chaînes de blocs, écologique et sécurisée, entièrement respectueuse des valeurs et du cadre juridique de l’UE, qui rende la fourniture de services publics nationaux/locaux et transfrontières plus efficiente et plus fiable et favorise de nouveaux modèles économiques;
-pôles d’innovation numérique européens: soutenir la numérisation de l’industrie européenne en achevant un réseau à l’échelle de l’UE de «pôles d'innovation numérique européens», qui sont des «guichets uniques» conçus pour offrir aux PME une expertise technique, des possibilités de «tester avant d’investir», des conseils financiers ou encore des formations, etc.;
-partenariats de haute technologie en faveur des compétences numériques grâce au pacte sur les compétences: le manque de spécialistes des TIC se fait de plus en plus sentir dans tous les écosystèmes industriels, toutes les régions et tous les États membres. Afin d’y remédier, on pourrait instituer un partenariat multipartite à grande échelle en matière de compétences pour rapprocher la demande et l’offre, favoriser davantage d’investissements privés et publics, accroître la quantité et la qualité de l’offre d’enseignement et de formation spécialisés et promouvoir l’excellence dans les établissements d’enseignement supérieur et d’EFP, ce qui les rendrait plus attrayants et plus sensibles aux besoins du marché du travail sur le plan numérique.
La Commission est déterminée à soutenir l’élaboration et la mise en œuvre de projets multinationaux, notamment au titre de la FRR, et par un dialogue renforcé avec les États membres, y compris à travers un cadre de gouvernance souple.
Jusqu’à présent, divers mécanismes ont été utilisés pour différents projets et investissements, qui ont fait apparaître une lacune dans la panoplie d’outils dont dispose la Commission pour combiner des financements provenant des États membres, du budget de l’UE et de l’investissement privé aux fins du déploiement et de l’exploitation d’infrastructures et de services d’intérêt commun, en dehors du domaine de la recherche.
En particulier, plusieurs caractéristiques combinées sont nécessaires pour obtenir un mécanisme efficient permettant de déployer et de réaliser des projets multinationaux numériques (et éventuellement aussi des projets dans d’autres domaines):
·la possibilité d’une mise en place rapide et souple tout en garantissant l’ouverture à tous les États membres intéressés;
·des dispositions types régissant des questions communes telles que la propriété des données et leur gestion, y compris le rôle incombant à la Commission de garantir l’ouverture, la cohérence avec les priorités et réglementations de l’UE adoptées, dont les règles en matière de concurrence et d’aides d’État, et la coordination avec les programmes et politiques de l’UE;
·faciliter la mise en commun des financements européens et nationaux ainsi que la complémentarité et la combinaison des différentes sources de financement tout en créant des incitations permettant d’attirer les investissements privés;
·la capacité juridique d’acquérir et d’exploiter des infrastructures plurinationales et des services paneuropéens d’intérêt public, allant au-delà du secteur de la recherche, tout en facilitant l’absence de rattachement à un fournisseur donné.
Afin d’offrir une solution efficiente et d’inciter les États membres à collaborer à des projets multinationaux, en s’appuyant sur les enseignements tirés, notamment de la mise en œuvre de tels projets au titre de la FRR, la Commission évalue actuellement différentes options, telles que la faisabilité et les caractéristiques d’un instrument propre aux projets multinationaux, dans le cadre de la future proposition de programme d’action dans le domaine numérique.
La boussole numérique: un nouvel outil pour piloter la décennie numérique
La Commission proposera une boussole numérique sous la forme d’un programme d’action que le Parlement européen et le Conseil devront adopter par codécision. Cette boussole numérique englobera:
(I)des objectifs concrets pour réaliser notre vision, qui s’articuleront autour de quatre axes principaux et seront mesurés aux niveaux de l’UE et des États membres par des indicateurs de performance clés fondés sur un indice relatif à l’économie et à la société numérique (DESI) renforcé,
(II)une structure de gouvernance, comprenant l’établissement de rapports annuels par la Commission à l’intention du Parlement européen et du Conseil sur les progrès accomplis dans l’atteinte des objectifs de la décennie numérique, rapports dans lesquels pourraient figurer notamment des recommandations particulières pour limiter les écarts par rapport à la réalisation de ces objectifs,
(III)le suivi des principes numériques approuvés dans la déclaration interinstitutionnelle, et
(IV)un mécanisme permettant d’organiser avec les États membres les projets multinationaux qui sont nécessaires pour opérer la transition numérique de l’Europe dans les secteurs critiques.
6.
Partenariats internationaux pour la décennie numérique
Il est démontré que le degré de numérisation d’une économie ou d’une société constitue non seulement un pilier essentiel de la résilience économique et sociétale mais aussi un facteur d’influence mondiale. Alors que la pandémie a montré qu’aucune politique numérique ne saurait être totalement neutre sur le plan des valeurs, l’UE a à présent l’occasion de faire émerger, parmi des modèles proposés concurrents, sa vision positive et centrée sur l’humain de l’économie et de la société numériques.
Pour que la décennie numérique de l’Europe soit couronnée de succès, nous établirons de solides partenariats numériques internationaux correspondant aux quatre axes que nous avons définis: les compétences, les infrastructures et la transformation des entreprises et des services publics. Ces partenariats renforceront la capacité de l’UE à faire valoir ses propres intérêts et à proposer des solutions au niveau mondial tout en luttant contre les pratiques déloyales et abusives et en garantissant la sécurité et la résilience des chaînes d’approvisionnement numériques de l’UE.
Le point de départ de l’Union est une économie numérique ouverte fondée sur les flux d’investissement et d’innovation en tant que moteur de la prospérité. Dans le même temps, l'UE œuvrera résolument en faveur de nos valeurs et intérêts fondamentaux, grâce à trois grands principes: des conditions de concurrence équitables sur les marchés numériques, un cyberespace sécurisé et la défense des droits fondamentaux en ligne.
La politique commerciale et les accords commerciaux joueront un rôle primordial à cet égard en définissant les règles mondiales et bilatérales applicables au commerce numérique de manière ouverte mais ferme, sur le fondement des valeurs européennes. L’Union européenne a proposé, en tant qu’élément central de la relation transatlantique renouvelée, d’instituer un nouveau Conseil du commerce et des technologies UE - États-Unis, afin d’approfondir notre partenariat de commerce et d’investissement, de renforcer notre leadership technologique et industriel commun, d’élaborer des normes compatibles, d’intensifier la collaboration en matière de recherche, de promouvoir une concurrence loyale et de garantir la sécurité des chaînes d’approvisionnement critiques.
Acteur de premier plan dans les enceintes multilatérales, l’Union se fait la promotrice d’un multilatéralisme inclusif caractérisé par la collaboration entre les gouvernements, la société civile, le secteur privé, le monde universitaire et d’autres parties prenantes. Ces enceintes peuvent améliorer le fonctionnement de l’économie numérique à l’échelle mondiale, comme l’illustrent les négociations sur de nouvelles règles du commerce électronique au sein de l’Organisation mondiale du commerce. L’Union œuvrera de manière active et résolue à promouvoir, au sein des organisations internationales, sa vision centrée sur l’humain de la numérisation, en coopération avec ses États membres et les partenaires partageant les mêmes valeurs. Cette approche coordonnée devrait en particulier défendre une utilisation des technologies entièrement conforme à la charte des Nations unies et à la déclaration universelle des droits de l’homme.
Les partenariats numériques internationaux de l’UE seront soutenus par une boîte à outils fondée sur un ensemble de mesures combinant la coopération réglementaire, le renforcement des capacités et des compétences, l’investissement dans la coopération internationale et les partenariats de recherche. Pour ce faire, on aura recours à un programme croissant de dialogues bilatéraux:
·Les partenariats numériques internationaux de l’UE encourageront la mise en conformité ou la convergence avec les normes réglementaires et les standards de l’UE sur des questions telles que la protection des données, la protection de la vie privée et les flux de données, l’utilisation éthique de l’IA, la cybersécurité et la confiance, la lutte contre la désinformation et contre les contenus illicites en ligne, la défense de la gouvernance de l’internet ainsi que le soutien au développement de la finance numérique et de l’administration en ligne. L’Union contribuera également à l’élaboration de solutions communes, par exemple dans le cadre des travaux en cours au sein du G20 et de l’OCDE en vue de parvenir à une solution consensuelle au niveau mondial pour régir la fiscalité de l’économie numérique.
·Afin d’étayer ses partenariats numériques avec les pays en développement et les pays émergents, la Commission élaborera et proposera des trains de mesures sur l’économie numérique qui s’inspireront de cette boîte à outils. Ces trains de mesures seront financés par l’intermédiaire des initiatives de l’équipe d’Europe (Team Europe) qui combinent les ressources de l’UE et de ses États membres, en collaboration avec des entreprises européennes d’envergure mondiale, y compris par le développement et la mise en réseau de pôles d’innovation numérique. Ils seront conçus de manière à ce que les axes principaux restent associés et fassent l’objet d’un traitement exhaustif, garantissant la promotion d’un modèle de développement numérique centré sur l’humain. Le renforcement de la connectivité numérique afin de réduire la fracture numérique nécessite des investissements importants et, dès lors, une coopération financière globale, y compris avec des partenaires partageant les mêmes valeurs et avec des institutions financières internationales. L’équipe d’Europe s’attaquera à cette fracture numérique dans les pays partenaires, en accordant une attention particulière à l’Afrique, tout en faisant la promotion des technologies et valeurs de l’UE. Cette démarche pourrait être soutenue par la création d’un fonds pour la connectivité numérique selon une approche dite de l’équipe d’Europe. La Commission en étudiera la faisabilité avec nos partenaires dans les mois à venir.
·Les partenariats numériques offriront la possibilité de mener des activités de recherche communes, y compris dans le cadre d’entreprises communes sur les questions industrielles, qui soutiendront le leadership de l’UE dans le domaine de technologies en rapide évolution telles que la 6G, les technologies quantiques ou l’utilisation des technologies numériques au service de la lutte contre le changement climatique et les problèmes environnementaux.
Partenariats internationaux: la boussole numérique en action
En 2020, l’Union a proposé un partenariat pour la transformation numérique, avec l’Afrique, dans le cadre duquel l’accent sera mis sur les compétences au moyen de possibilités d’éducation et de formation, sur les investissements dans des infrastructures de base durables essentielles, sur la coopération réglementaire et la convergence des réglementations, notamment le renforcement de la protection des données à caractère personnel, ainsi que sur l’augmentation des flux de données sécurisés et le renforcement de la coopération en matière d’intelligence artificielle et de numérisation des administrations publiques. Elle soutiendra le développement de pôles d’innovation numérique et l’extension de l’espace européen de la recherche, ainsi que le marché unique numérique en Afrique. La plateforme «Digital4Development», lancée en décembre 2020, permettra de mettre l’expertise de l’Europe au service du développement de programmes et de l’assistance technique.
Les partenariats numériques globaux occupent une place tout aussi centrale dans nos relations avec les pays des Balkans occidentaux et du voisinage oriental et méridional. Notre action dans le domaine numérique en dehors des fuseaux horaires européens, notamment avec nos partenaires d’Asie, d’Amérique latine et des Caraïbes, s’inspire aussi de la philosophie de la présente communication.
S’appuyant sur une relation transatlantique renouvelée, pilier solide de notre engagement international en matière numérique, l’UE devrait montrer la voie vers une coalition plus large de partenaires partageant les mêmes valeurs, qui soit ouverte à tous ceux épousant sa vision d’une transformation numérique centrée sur l’humain et soit développée avec ces derniers. Ensemble, nous défendrons l’internet ouvert et décentralisé, reposant sur un seul et unique «world wide web», ainsi qu’une utilisation des technologies qui soit respectueuse des libertés individuelles et nous promouvrons des conditions de concurrence équitables sur le plan numérique. Les membres de cette coalition devraient collaborer pour stimuler la compétitivité et l’innovation, définir des normes dans des enceintes internationales, relatives notamment à l’utilisation éthique de l’intelligence artificielle, promouvoir les échanges commerciaux numériques à l’aide de chaînes d’approvisionnement mutuellement interdépendantes et résilientes et sécuriser le cyberespace. La Commission et le Haut représentant œuvreront de concert avec les États membres de l’UE au développement d’une approche globale et coordonnée de la formation de coalitions numériques et des démarches diplomatiques, notamment par le réseau des délégations de l’UE.
D’ici à 2030, les partenariats numériques internationaux devraient se traduire par des possibilités accrues pour les entreprises européennes, par une intensification du commerce numérique via des réseaux sécurisés, par le respect des normes et valeurs européennes et par un environnement plus favorable sur le plan international au type de transformation numérique centrée sur l’humain que nous et d’autres partenaires souhaitons voir advenir.
7.
Conclusion: la voie à suivre
Dans la présente communication relative à une boussole numérique sont clairement définies une voie vers une vision commune et des actions qui permettront à l’Europe d’atteindre les objectifs de la décennie numérique, sur son territoire et dans le monde.
La participation et l’engagement du public et de l’ensemble des parties prenantes sont déterminants pour réussir la transformation numérique. Dans ce contexte, la Commission, peu après l’adoption de la présente communication, entamera un vaste processus de consultation sur les principes numériques. Elle dialoguera avec les États membres, le Parlement européen, les partenaires régionaux et économiques et sociaux, les entreprises et les citoyens sur des éléments particuliers de la présente communication pendant l’année 2021, dont le cadre de la boussole assorti d’objectifs spécifiques et la gouvernance. La Commission instituera un forum des parties prenantes, qui sera associé à certains aspects des travaux relatifs à la boussole numérique pour 2030.
La Commission s’appuiera sur ces étapes de concertation en vue de proposer aux colégislateurs le programme d’action dans le domaine numérique d’ici au troisième trimestre de 2021 et elle espère avoir accompli des progrès décisifs avec les autres institutions en ce qui concerne l’élaboration d’une déclaration sur les principes numériques d’ici à la fin de 2021.