COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 8.3.2018
COM(2018) 97 final
COMMUNICATION DE LA COMMISSION
Plan d'action: financer la croissance durable
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Document 52018DC0097
COMMUNICATION FROM THE COMMISSION TO THE EUROPEAN PARLIAMENT, THE EUROPEAN COUNCIL, THE COUNCIL, THE EUROPEAN CENTRAL BANK, THE EUROPEAN ECONOMIC AND SOCIAL COMMITTEE AND THE COMMITTEE OF THE REGIONS Action Plan: Financing Sustainable Growth
COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL EUROPÉEN, AU CONSEIL, À LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS Plan d'action: financer la croissance durable
COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL EUROPÉEN, AU CONSEIL, À LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS Plan d'action: financer la croissance durable
COM/2018/097 final
COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 8.3.2018
COM(2018) 97 final
COMMUNICATION DE LA COMMISSION
Plan d'action: financer la croissance durable
Présentation du contexte
En adoptant, en 2015, l’accord de Paris 1 sur le changement climatique et le programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations unies 2 , les gouvernements du monde entier ont choisi une trajectoire plus durable pour notre planète et notre économie. Le programme à l’horizon 2030 des Nations unies s’articule autour de 17 objectifs de développement durable (ODD). Au cours des 15 prochaines années, ces objectifs nous guideront dans la préparation d’un avenir qui garantisse la stabilité, une planète saine, des sociétés justes, inclusives et résilientes ainsi que des économies prospères. L’accord de Paris, signé en décembre 2015 par 195 pays, est le tout premier accord mondial universel sur le climat visant à adapter et à développer la résilience face au changement climatique et à contenir le réchauffement climatique nettement en-dessous de 2 °C.
La durabilité et la transition vers une économie sobre en carbone, plus efficace dans l’utilisation des ressources et circulaire sont primordiales pour assurer la compétitivité à long terme de l’économie de l’UE. La durabilité s’inscrit depuis longtemps au cœur du projet de l’Union européenne et les traités de l’UE en reconnaissent les dimensions sociale et environnementale 3 . L’Union européenne est attachée à un développement qui pourvoit aux besoins des générations actuelles et futures, tout en offrant de nouvelles perspectives d’emploi et d’investissement et en garantissant la croissance économique. Bon nombre des priorités de la Commission 4 pour la période 2014-2020 servent les objectifs de l’Union en matière de climat et d’énergie et contribuent à la mise en œuvre du programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations unies. La Commission, qui travaille également à l’élaboration d’un document de réflexion intitulé «Vers une Europe durable d’ici à 2030», a institué une plateforme pluripartite aux fins de l’échange des bonnes pratiques liées à la mise en œuvre des ODD.
Confrontés aux conséquences catastrophiques et imprévisibles de plus en plus nombreuses du changement climatique et de l’épuisement des ressources, les pouvoirs publics doivent agir de toute urgence pour adapter leurs politiques à cette nouvelle réalité. Le système financier a un rôle essentiel à jouer à cet égard. Il est en voie de réforme afin de tenir compte des enseignements tirés de la crise financière et, dans ce contexte, il peut faire partie de la solution vers une économie plus verte et plus durable. Si les pouvoirs publics veulent réorienter les capitaux privés vers des investissements plus durables, ils doivent radicalement modifier le mode de fonctionnement du système financier. Cela est indispensable pour que l’UE se dote d’une croissance économique plus durable, garantisse la stabilité du système financier et favorise une plus grande transparence et une vision de long terme de l’économie. Une telle démarche est également au cœur du projet d’union des marchés des capitaux (UMC) de l’UE 5 .
À la fin de l’année 2016, la Commission a créé un groupe d’experts à haut niveau sur la finance durable. Le 31 janvier 2018, ce groupe d’experts a publié son rapport final 6 , qui offre une vision globale sur la manière d’élaborer une stratégie en matière de finance durable pour l’UE. Selon le rapport, une finance durable doit satisfaire à deux impératifs: 1) améliorer la contribution du système financier à la croissance durable et inclusive en finançant les besoins à long terme de la société; 2) renforcer la stabilité financière en intégrant les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (facteurs ESG) dans la prise de décisions en matière d’investissement. Le rapport formule huit recommandations clés, plusieurs recommandations transversales et des actions ciblant certains secteurs du système financier. Le présent plan d’action fait fond des recommandations du groupe de travail pour définir une stratégie de l’UE en matière de finance durable.
1Une finance au service d’un monde plus durable
La finance soutient l’économie en finançant les activités économiques et, en définitive, soutient la croissance et l’emploi. Si les décisions d’investissement reposent généralement sur plusieurs facteurs, ceux qui ont trait aux considérations environnementales et sociales sont souvent insuffisamment pris en compte, de tels risques se matérialisant probablement sur une échelle de temps plus longue. Il importe de reconnaître que la prise en compte d’intérêts à plus long terme en matière de durabilité se justifie d’un point de vue économique et n’entraîne pas nécessairement une baisse des rendements pour les investisseurs.
La «finance durable» désigne généralement le processus consistant à tenir dûment compte des considérations environnementales et sociales dans la prise de décisions d’investissement, ce qui se traduit par une hausse des investissements dans des activités à plus long terme et durables. Plus précisément, les considérations environnementales font référence à l’atténuation du changement climatique et à l’adaptation à celui-ci, ainsi qu’à l’environnement de manière plus générale 7 et aux risques qui y sont liés (par exemple, les catastrophes naturelles 8 ). Les considérations sociales peuvent se rapporter aux questions d’inégalité, d’insertion, de relations professionnelles, d’investissement dans le capital humain et les communautés. Les considérations environnementales et sociales sont souvent étroitement liées, notamment parce que le changement climatique peut exacerber les systèmes d’inégalité existants. La gouvernance des institutions publiques et privées, y compris les structures de gestion, les relations avec les salariés et la rémunération des dirigeants d’entreprise, contribue de manière fondamentale à ce que les considérations sociales et environnementales soient intégrées dans le processus décisionnel 9 .
Le présent plan d’action sur la finance durable s’inscrit dans le cadre plus large des efforts déployés pour que la finance réponde aux besoins spécifiques de l’économie européenne et mondiale, dans l’intérêt de la planète et de notre société. Concrètement, le présent plan d’action vise à:
1.réorienter les flux de capitaux vers des investissements durables en vue de parvenir à une croissance durable et inclusive;
2.gérer les risques financiers induits par le changement climatique, l’épuisement des ressources, la dégradation de l’environnement et les problématiques sociales; et
3.favoriser la transparence et une vision de long terme dans les activités économiques et financières.
1.1 Réorienter les flux de capitaux vers une économie plus durable
Les niveaux d’investissement actuels ne suffisent pas à soutenir un système économique durable sur les plans environnemental et social. L’Europe doit combler un déficit d’investissement annuel de près de 180 milliards d’EUR si elle veut atteindre les objectifs de l’Union en matière de climat et d’énergie à l’horizon 2030 10 . D’après les estimations de la Banque européenne d’investissement (BEI), le déficit d’investissement global dans les transports, l’énergie et les infrastructures de gestion des ressources s’est creusé pour atteindre un chiffre annuel ahurissant de 270 milliards d’EUR 11 . Un manque de clarté parmi les investisseurs quant à la notion d’investissement durable est un facteur contribuant à ce déficit d’investissement en même temps qu’un obstacle au financement des infrastructures sociales qui sont nécessaires pour s’attaquer aux problèmes d’inégalité et d’inclusion.
La transformation de l’économie de l’Europe en un système plus vert, plus résilient et circulaire ne nous permettra pas seulement de réduire notre empreinte écologique sur la planète et de remédier aux inégalités existantes. Elle permettra également de stimuler la compétitivité en améliorant l’efficience des processus de production et en réduisant le coût d’accès aux ressources et de gestion de celles-ci.
L’UE, résolue à mener à bien cette transition, s’est engagée à consacrer au moins 20 % de son budget à des dépenses directement liées au climat 12 . Par exemple, dès 2017, près d’un tiers des investissements mobilisés par le Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI) ont été affectés à des projets dans les domaines de l’énergie, de l’environnement et de l’utilisation rationnelle des ressources ainsi qu’à des infrastructures sociales. Dans le cadre de l’EFSI 2.0, la durée du fonds est prolongée jusqu’en 2020 et les objectifs d’investissement sont portés à 500 milliards d’EUR, et 40 % au moins de ses financements en infrastructures et innovation soutiendront des projets d’action pour le climat. Mais il est manifeste que des mesures supplémentaires s’imposent pour canaliser encore plus d’investissement vers les secteurs durables.
1.2Intégrer systématiquement la durabilité dans la gestion des risques
L’inclusion d’objectifs environnementaux et sociaux dans les décisions financières vise à limiter l’impact financier des risques environnementaux et sociaux. Par exemple, une augmentation de 2 °C de la température au niveau planétaire pourrait avoir des effets déstabilisateurs sur l’économie et le système financier européens.
Actuellement, le secteur financier ne tient pas toujours suffisamment compte des risques environnementaux et climatiques. Dans un contexte de multiplication des catastrophes liées à des phénomènes météorologiques, les entreprises d’assurance doivent se préparer à supporter des coûts plus élevés. Les banques vont aussi se trouver exposées à des pertes plus élevées, du fait de la moindre rentabilité des entreprises les plus exposées au changement climatique ou fortement dépendantes de ressources naturelles de plus en plus rares. Entre 2000 et 2016, la fréquence annuelle, au niveau mondial, des catastrophes liées à des phénomènes météorologiques a augmenté de 46 % 13 , et, entre 2007 et 2016, les pertes économiques, au niveau mondial, engendrées par une météo extrême ont augmenté de 86 % (pour atteindre 117 milliards d’EUR en 2016) 14 . Cette tendance est d’autant plus inquiétante que l’exposition des banques de la zone euro aux risques est, pour près de 50 %, directement ou indirectement liée au changement climatique 15 . Comme cela est de plus en plus reconnu, d’autres problèmes environnementaux menacent aussi les modèles économiques actuels 16 .
Des facteurs sociaux tels qu’une dégradation des conditions de travail et un creusement des inégalités peuvent avoir des conséquences concrètes pour les établissements financiers, y compris sous la forme de risques juridiques. Par exemple, les entreprises qui ne respectent pas les normes internationales du travail abîment leur réputation. Or des dommages réputationnels et juridiques peuvent, à terme, se traduire par des pertes financières. De la même manière, une inégalité croissante des revenus peut constituer un frein à une croissance stable et durable: dans des travaux de recherche, le FMI a démontré une corrélation entre creusement des inégalités et fragilité de la croissance 17 .
1.3 Favoriser la transparence et le long terme
La transparence des activités des acteurs du marché est essentielle au bon fonctionnement du système financier. Si l’on veut permettre aux acteurs des marchés financiers d’apprécier dûment si les entreprises créent de la valeur à long terme et comment elles gèrent les risques en matière de durabilité, une condition préalable est de garantir la transparence des entreprises sur les questions de durabilité. Le reporting d’entreprise est inefficace lorsqu’il n’y a pas de transparence totale sur les risques à plus long terme et que ceux-ci ne peuvent alors pas être pris en considération. La transparence sur les questions de durabilité ne servira pas uniquement à informer les acteurs du marché, mais contribuera aussi à orienter les entreprises sur la voie d’un développement plus durable et à plus long terme.
Une transparence accrue, sous-tendue par des technologies novatrices, permet, en effet, aux citoyens de comparer les performances des entreprises en matière de durabilité, et aux investisseurs de détail de prendre leurs décisions en connaissance de cause. Dans ce contexte, la Commission salue et encourage, les initiatives privées en matière de publication d’informations, qui promeuvent la diffusion d’une information aisément accessible sur la finance durable.
Durabilité et long-termisme vont de pair. Par long-termisme, il faut entendre une pratique décisionnelle intégrant des objectifs ou les conséquences à long terme. Investir dans des objectifs environnementaux et sociaux suppose une vision de long terme. À l’heure actuelle, il est pourtant fréquent que les marchés accordent la priorité à la production de rendements élevés à court terme. Une priorité centrale du programme en matière de durabilité est donc de réduire la course injustifiée aux performances à court terme dans la prise de décisions économiques et financières, notamment par une transparence accrue, permettant aux investisseurs, qu’il s’agisse d’entreprises ou de particuliers, de prendre des décisions d’investissement plus éclairées et plus responsables.
2Réorienter les flux de capitaux vers une économie plus durable
2.1Un système de classification unifié des activités durables
Pour réorienter les flux de capitaux vers des activités économiques plus durables, il est nécessaire de se fonder sur une compréhension commune de la notion de «durable». Établir un système européen de classification unifié — ou taxinomie — permettra de déterminer clairement quelles sont les activités pouvant être considérées comme «durables». À ce stade, il s’agit de la mesure la plus importante et la plus urgente prévue dans le présent plan d’action. Des orientations claires sur les activités pouvant être considérées comme contribuant à l'adaptation au changement climatique et à son atténuation, ainsi qu’à la réalisation d’objectifs environnementaux et sociaux, éclaireront les investisseurs. Elles fourniront des informations détaillées sur les secteurs et activités concernés, sur la base de critères d’évaluation, de seuils et d’indicateurs. C’est une étape essentielle pour diriger les flux de capitaux vers des secteurs durables en quête de financements. Une taxinomie européenne sera progressivement intégrée dans la législation de l’UE afin d’apporter une plus grande sécurité juridique.
Mettre au point une véritable taxinomie européenne de la durabilité couvrant le climat, l’environnement et les problématiques sociales prendra du temps en raison de la complexité et du caractère hautement technique de l’élaboration d’un tel système de classification. En outre, il faudra un suivi continu compte tenu de l’évolution des objectifs des politiques de l’UE et d’autres éléments, tels que le marché, l’environnement et les technologies. La Commission propose donc de procéder par étapes, en commençant par une taxinomie des activités d’adaptation au changement climatique et d’atténuation de celui-ci et de certaines activités environnementales. Dans un second temps, la taxinomie couvrira les autres activités environnementales et sociales, en reconnaissance du fait qu’un aspect de la durabilité ne peut pas être pris en compte au détriment d'autres risques ou objectifs connexes.
Action nº 1: établir un système européen de classification unifié des activités durables 1. En fonction des résultats de son analyse d’impact, la Commission présentera, au deuxième trimestre de 2018, une proposition législative qui permettra l’élaboration progressive d’une taxinomie européenne des activités durables en matière de changement climatique, sur le plan environnemental et social, s’appuyant sur les travaux existants, le cas échéant. L’objectif est d’intégrer la future taxinomie européenne dans le droit de l’UE et de créer la base permettant d’utiliser un tel système de classification dans différents domaines (normes, labels, facteur de soutien vert dans les exigences prudentielles et indicateurs de référence en matière de durabilité, par exemple). La proposition prévoira des outils pour établir et mettre régulièrement à jour ce système de classification. 2. En outre, en guise de première étape intermédiaire, la Commission mettra en place un groupe d’experts techniques sur la finance durable. Ce groupe sera invité à publier, sur la base d’une large consultation de toutes les parties prenantes, un rapport proposant une première taxinomie axée sur les activités d’atténuation des effets du changement climatique d’ici au premier trimestre de 2019. D’ici au deuxième trimestre de 2019, cette taxinomie sera étendue aux activités d’adaptation au changement climatique et autres activités dans le domaine de l’environnement. Ces rapports seront utiles à la Commission au fur et à mesure qu’elle élaborera la taxinomie européenne de la durabilité et, entre-temps, ils constitueront un premier point de référence pour l'investissement dans les activités durables liées au changement climatique et à l’environnement. |
2.2 Normes et labels pour les produits financiers durables
S’appuyant sur la future taxinomie européenne de la durabilité, des normes et labels de l’UE pour les produits financiers durables protègeraient l’intégrité et la fiabilité du marché financier durable, et ils les rendraient plus accessibles aux investisseurs qui recherchent ce type de produits. Par exemple, les obligations vertes permettent aux entités (entreprises, banques, organisations gouvernementales, etc.) d’emprunter de l’argent à des investisseurs afin de financer ou de refinancer des projets, des actifs ou des activités commerciales dits «verts». Même s'il connaît un essor rapide, le marché des obligations vertes représente toujours moins de 1 % de l’encours total des obligations au niveau mondial 18 . Une norme de l’UE, fondée sur les meilleures pratiques et accessible aux acteurs du marché, permettrait de canaliser davantage d’investissements vers des projets verts et constituerait une base pour développer une labellisation fiable des produits financiers.
Les systèmes de labels peuvent se révéler particulièrement utiles pour les investisseurs de détail qui souhaiteraient marquer leur préférence pour des activités durables. Ils pourraient faciliter les choix des investisseurs de détail en étant progressivement intégrés dans des outils, tels que les sites internet comparateurs ou les services de planification financière, actuellement mis au point dans le cadre du plan d’action de la Commission relatif aux services financiers pour les consommateurs. Des enquêtes montrent que les investisseurs de détail veulent de plus en plus que leurs placements tiennent compte d’aspects climatiques, environnementaux et sociaux 19 . Cependant, l’absence de produits financiers labellisés peut empêcher les investisseurs de s'orienter directement vers des placements durables. La Commission estime qu’il existe un intérêt potentiel à utiliser le règlement sur le label écologique de l’UE pour créer un système volontaire de labellisation à l’échelle de l’UE. Les critères devraient en être définis pour certains produits financiers proposés aux investisseurs de détail (comme les produits d’investissement packagés de détail et les produits d’assurance). La Commission examinera également le bien-fondé d’un système de labellisation pour les produits financiers socialement responsables, comme l’ISR 20 , en s’appuyant sur l’expérience acquise des fonds d’entrepreneuriat social européens.
Action nº 2: créer des normes et des labels pour les produits financiers verts 1. Dans un premier temps, le groupe d’experts techniques de la Commission sur la finance durable sera chargé d'élaborer, sur la base des résultats d’une consultation publique et d'ici au deuxième trimestre de 2019, un rapport sur une norme européenne pour les obligations vertes, fondée sur les meilleures pratiques actuelles. 2. Dans le cadre du règlement sur les prospectus, la Commission précisera, d’ici au deuxième trimestre de 2019, le contenu du prospectus pour les émissions d’obligations vertes afin de fournir des informations complémentaires aux investisseurs potentiels. 3. La Commission étudiera la possibilité d’utiliser le cadre du label écologique de l’UE pour certains produits financiers une fois la taxinomie européenne de la durabilité adoptée. |
2.3Favoriser l’investissement dans des projets durables
La mobilisation de capitaux privés pour des projets durables, notamment d’infrastructures, est une condition préalable à la transition vers un modèle économique plus durable. D’après l’OCDE, les infrastructures sont responsables d’environ 60 % des émissions de gaz à effet de serre 21 . Étant donné les besoins en investissements dans des infrastructures durables, il est essentiel de progresser dans la mise en place de cadres appropriés pour mobiliser l’investissement privé aux côtés des fonds publics.
Toutefois, la capacité de développer des projets et de les mettre en œuvre varie considérablement au sein de l’UE et selon le secteur. Des services de conseil et d’assistance technique renforcés contribueraient à élargir l’offre de projets durables. Au-delà des projets d’infrastructures à grande échelle, la transition vers une énergie propre suppose également que les projets dispersés et à plus petite échelle bénéficient de financements adéquats 22 .
Outre les subventions 23 , dans le cadre du plan d’investissement pour l’Europe, la Commission a nettement intensifié son soutien financier et technique en faveur des investissements dans les infrastructures durables, en particulier par l’EFSI et la plateforme européenne de conseil en investissement. L’EFSI s’est avéré utile pour attirer les investissements privés vers des projets stratégiques dans l’ensemble de l’Union, en mobilisant au total près de 265 milliards d’EUR d’investissements 24 . Après le succès remporté au cours de ses premières années de fonctionnement, l’EFSI a été récemment prolongé jusqu’en 2020 (EFSI 2.0), et son objectif d’investissement a été porté à 500 milliards d’EUR. En outre, l’EFSI 2.0 sera encore plus axé sur les projets durables puisqu’au moins 40 % de ses financements dans les infrastructures et l’innovation devront soutenir des projets d’action pour le climat. La plateforme européenne de conseil en investissement, portail européen de l'aide à l’investissement, fournira également une plus grande capacité de conseil au niveau régional et local pour promouvoir des projets ayant une incidence environnementale, climatique et sociale.
En parallèle, le déploiement du plan d'investissement extérieur de l'UE favorisera les investissements durables dans les pays partenaires, en commençant par l’Afrique et les pays voisins de l’Union. Ce plan devrait mobiliser plus de 44 milliards d’EUR de financements publics et privés d’ici à 2020, à l’aide du Fonds européen pour le développement durable (FEDD), il fournira une assistance technique à l’élaboration de projets d’investissement et il créera un climat favorable aux investissements et un environnement propice aux entreprises. Le développement durable fait partie intégrante de la conception de l’instrument, et tous les projets auront une dimension de durabilité claire, par exemple en soutenant l’agriculture et la connectivité durables, ainsi que la création d’emplois décents.
Pour le cadre financier pluriannuel post-2020, la Commission a présenté l’idée, à discuter par les dirigeants de l'Union européenne, d’établir un fonds d’investissement unique regroupant l’ensemble des instruments de l’UE fondés sur le marché afin d’améliorer encore l’efficacité du soutien de l’UE à l’investissement 25 . S’appuyant sur le déploiement réussi de l’EFSI, ce fonds pourrait apporter un soutien financier et l’assistance technique y afférente pour attirer des investissements privés, notamment en faveur d’infrastructures durables. Assorti d’une garantie budgétaire de l’UE, un fonds d’investissement unique pourrait soutenir les priorités d’investissement et simplifier l’interaction entre les investisseurs, les bénéficiaires, la Commission européenne, les partenaires chargés de la mise en œuvre, tels que la BEI et les banques nationales de développement, et les nouveaux partenaires potentiels, telles que fondations et organisations philanthropiques. Dans la continuité de la plateforme européenne de conseil en investissement, ce soutien pourrait également inclure une assistance au développement de projet pour continuer à renforcer les capacités de développement de projets durables.
Action nº 3: favoriser l’investissement dans des projets durables S’appuyant sur les efforts en cours pour renforcer la capacité de conseil, notamment en faveur du développement de projets d’infrastructures durables, la Commission prendra de nouvelles mesures qui amélioreront l’efficience et l’impact des instruments visant à soutenir l’investissement durable dans l’UE et dans ses pays partenaires. |
2.4Intégration de la durabilité dans le conseil financier
Par leurs conseils, les entreprises d’investissement et les distributeurs de produits d’assurance peuvent jouer un rôle central dans la réorientation du système financier vers la durabilité. Avant de fournir des conseils, ces intermédiaires sont tenus d’évaluer les objectifs d’investissement et la tolérance au risque de leurs clients, afin de pouvoir leur recommander des instruments financiers ou des produits d’assurance appropriés. Toutefois, il arrive souvent que les conseils fournis ne tiennent pas suffisamment compte des préférences des investisseurs et des bénéficiaires en matière de durabilité.
La directive concernant les marchés d’instruments financiers (MiFID II) et la directive sur la distribution d’assurances (DDA) imposent aux entreprises d’investissement et aux distributeurs de produits d’assurance de proposer des produits «appropriés», qui répondent aux besoins de leurs clients, lorsqu’ils leur fournissent des conseils. C’est la raison pour laquelle ces entreprises devraient demander à leurs clients leurs préférences (en termes de facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance, par exemple) et les prendre en considération lorsqu'elles apprécient l’éventail d’instruments financiers et de produits d’assurance qu’elles recommanderont, c’est-à-dire lors de la sélection des produits et de l’évaluation de leur caractère approprié.
Action nº 4: intégrer la durabilité dans le conseil financier En fonction des résultats de son analyse d’impact, la Commission modifiera les actes délégués MiFID II et DDA au cours du deuxième trimestre de 2018 afin que les préférences en matière de durabilité soient prises en compte dans l’évaluation du caractère approprié. Sur la base de ces actes délégués, la Commission invitera l’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) à inclure des dispositions sur les préférences en matière de durabilité dans ses orientations portant sur l’évaluation du caractère approprié, qui doivent être mises à jour d’ici au quatrième trimestre de 2018. |
2.5Indicateurs de référence en matière de durabilité
Les indicateurs de référence sont des indices qui jouent un rôle essentiel dans la formation des prix des instruments financiers et d’autres actifs financiers. Ce sont des instruments utiles pour les investisseurs, car ils leur permettent de suivre et de mesurer les performances et de placer leurs actifs en conséquence.
Les indicateurs traditionnels reflètent le statu quo, en conséquence de quoi leurs méthodes d'établissement n'intègrent les objectifs de durabilité que dans une mesure limitée. Ils ne sont donc pas adaptés pour mesurer la performance des investissements durables. Dès lors, les fournisseurs d’indices ont travaillé à l’élaboration d’indicateurs de référence ESG afin d'intégrer les objectifs de durabilité, mais le manque de transparence des méthodes utilisées a jeté un doute sur leur fiabilité. Il est nécessaire que ces méthodes soient plus transparentes et plus solides afin de réduire les risques d’éco-blanchiment 26 . Par exemple, afin d’améliorer l’évaluation de la performance des fonds bas carbone, une méthode fiable d'établissement d’indices bas carbone devrait être cohérente avec les objectifs de l’accord de Paris.
Action nº 5: élaborer des indicateurs de référence en matière de durabilité D’ici au deuxième trimestre de 2018, la Commission entend (i) adopter des actes délégués, dans le cadre du règlement sur les indices de référence, relatifs à la transparence des méthodologies et des caractéristiques des indicateurs de référence pour permettre aux utilisateurs de mieux évaluer la qualité des indicateurs de référence en matière de durabilité; et (ii) présenter, en fonction des résultats de son analyse d’impact, une initiative d’harmonisation des indicateurs de référence incluant les émetteurs bas carbone, sur la base d’une méthodologie solide pour calculer leur empreinte carbone, à mettre en place une fois que la taxinomie en matière de climat sera prête. Le groupe d’experts techniques de la Commission publiera, sur la base d'une consultation de toutes les parties prenantes, un rapport sur la conception et la méthodologie de l’indicateur de référence bas carbone d’ici au deuxième trimestre de 2019. |
3Intégrer systématiquement la durabilité dans la gestion des risques
3.1Durabilité dans les secteurs des études de marché et des notations de crédit
Au cours des dernières années, les prestataires d’études de marché et les agences de notation de la durabilité ont intensifié leurs efforts pour évaluer les performances environnementales, sociales et de gouvernance des entreprises et leur aptitude à gérer les risques en matière de durabilité. Ce type d’évaluation contribue à une affectation plus durable des capitaux et améliore la circulation de l’information entre émetteurs et investisseurs. En l’absence de normes du marché largement reconnues pour évaluer la performance des entreprises en matière de durabilité, la transparence des méthodes utilisées par les prestataires d’études de marché revêt une importance particulière. En outre, selon certaines parties prenantes, le fait que les cabinets de recherche spécialisés en durabilité se focalisent sur les très gros émetteurs a une incidence négative sur l’attractivité des petits émetteurs pour les investisseurs institutionnels.
Les notations de crédit sont un autre élément important pour le bon fonctionnement des marchés financiers, parce qu'elles procurent aux investisseurs des évaluations de la qualité du crédit des entreprises et des établissements publics. Les agences de notation de crédit opèrent sur un marché très concentré et adoptent leurs notations sur la base des informations pertinentes disponibles. La mesure dans laquelle elles tiennent compte de facteurs de durabilité demeure toutefois obscure. La Commission suit l’évolution du marché des notations de crédit et reconnaît la nécessité de mieux comprendre la manière dont les agences de notation prennent en compte les facteurs de durabilité et d’assurer la transparence à cet égard. La Commission invitera l’AEMF à promouvoir des solutions garantissant que les agences de notation de crédit intègrent pleinement la durabilité et les risques à long terme. La Commission poursuivra également le dialogue sur ces questions avec toutes les parties prenantes, y compris sur l’apparition possible de nouvelles agences de notation de crédit qui rempliraient cet objectif.
Action n° 6: mieux intégrer la durabilité dans les notations et les études de marché 1.Dès le deuxième trimestre de 2018, la Commission engagera un dialogue avec toutes les parties prenantes en vue d’étudier l’opportunité d’une modification du règlement sur les agences de notation de crédit qui imposerait à ces dernières d’intégrer explicitement les facteurs de durabilité dans leurs évaluations, d’une manière proportionnée, afin de préserver l’accès au marché pour les acteurs de plus petite taille. Les services de la Commission feront rapport sur les progrès accomplis à cet égard d’ici au troisième trimestre de 2019. 2.La Commission invite l’AEMF: i) à évaluer les pratiques actuelles du marché des notations de crédit d’ici au deuxième trimestre de 2019, en analysant dans quelle mesure les considérations environnementales, sociales et de gouvernance sont prises en compte; ii) d’ici au deuxième trimestre de 2019, à inclure l'information sur la durabilité environnementale et sociale dans ses orientations en matière de publication d’informations adressées aux agences de notation de crédit, et à envisager le cas échéant des orientations ou des mesures supplémentaires. 3.La Commission réalisera une étude exhaustive sur les notations et les études en matière de durabilité d’ici au deuxième trimestre de 2019. Elle analysera les méthodes utilisées et étudiera des aspects tels que la structure de marché des services de notation et d’études de marché dans le domaine de la durabilité, la profondeur et la portée des travaux de recherche et des notations en matière de durabilité, et l’indépendance de ces prestataires de recherches/notations. L’étude examinera également les mesures envisageables pour encourager la fourniture de notations et d’études de marché en matière de durabilité. |
3.2 Obligations des investisseurs institutionnels et des gestionnaires d’actifs en matière de durabilité
Plusieurs instruments législatifs de l’UE 27 imposent aux investisseurs institutionnels et aux gestionnaires d’actifs d’agir dans l’intérêt supérieur de leurs investisseurs/bénéficiaires finaux. Cette obligation est fréquemment dénommée «devoir ou obligation fiduciaire». Cependant, les règles actuelles de l’UE sur le devoir des investisseurs institutionnels et des gestionnaires d’actifs de prendre en compte les facteurs et risques de durabilité dans leurs décisions d’investissement ne sont pas suffisamment claires ni cohérentes d’un secteur à l’autre.
Certains éléments donnent à penser que les investisseurs institutionnels et les gestionnaires d’actifs ne prennent toujours pas systématiquement en considération les facteurs et risques de durabilité dans le processus d’investissement. En outre, les investisseurs institutionnels et les gestionnaires d’actifs ne disent pas suffisamment à leurs clients si, et comment, ils intègrent ces facteurs de durabilité dans leur prise de décision. Il est par conséquent possible que les investisseurs finaux qui souhaiteraient tenir compte de préoccupations de durabilité dans leurs propres décisions d'investissement ne reçoivent pas toutes les informations dont ils auraient besoin. Dès lors, les investisseurs ne tiennent pas suffisamment compte de l’incidence des risques en matière de durabilité pour évaluer la performance de leurs placements dans le temps.
Action nº 7: clarifier les devoirs des investisseurs institutionnels et des gestionnaires d’actifs En fonction des résultats de l’analyse d’impact, la Commission présentera, d’ici au deuxième trimestre de 2018, une proposition législative visant à clarifier les devoirs des investisseurs institutionnels et des gestionnaires d’actifs en matière de durabilité. Cette proposition visera i) à exiger explicitement des investisseurs institutionnels et gestionnaires d’actifs qu’ils intègrent la durabilité dans leurs décisions d’investissement, et ii) à accroître la transparence à l’égard des investisseurs finaux sur la manière dont ces prestataires intègrent les facteurs de durabilité dans leurs décisions d’investissement, notamment en ce qui concerne leur exposition aux risques en matière de durabilité. |
3.3Exigences prudentielles applicables aux banques et aux entreprises d’assurance
Les banques, les entreprises d’assurance et les fonds de pension représentent la principale source de financement externe de l’économie européenne et un important vecteur de transformation de l’épargne en investissement. Ces acteurs du marché pourraient dès lors fournir la masse financière critique qui serait nécessaire pour combler le déficit d’investissement empêchant encore la transition vers une économie plus durable. Cependant, les banques, les entreprises d’assurance et les fonds de pension peuvent aussi être exposés à des risques liés à un développement économique non durable. Par exemple, selon certaines estimations, au moins la moitié des actifs des banques de la zone euro 28 sont actuellement exposés à des risques liés au changement climatique. Les autorités de surveillance macroprudentielle ont également mis en évidence ce type de risques pour la stabilité financière 29 .
Dans ce contexte, il convient d’assurer une meilleure prise en compte des risques associés aux facteurs climatiques et à d’autres facteurs environnementaux dans la réglementation prudentielle, en procédant à un calibrage minutieux qui ne compromettrait pas la crédibilité et l’efficacité du cadre prudentiel actuel de l’UE, qui est par nature fondé sur les risques. En s’appuyant sur l’élaboration de la taxinomie européenne de la durabilité, la Commission évaluera s’il est possible d’adopter des exigences de fonds propres reflétant mieux le risque qui caractérise les actifs durables détenus par les banques et les entreprises d’assurance. Il conviendrait d'introduire progressivement ce type de facteur de soutien, à mesure que la taxinomie européenne est élaborée. Dans son travail de calibrage, la Commission tiendra compte par exemple de tous les éléments de preuve disponibles sur le lien entre les gains d’efficacité énergétique et la performance des prêts hypothécaires 30 .
Par ailleurs, dans son analyse des recommandations du comité de Bâle de décembre 2017, la Commission accordera une attention particulière aux incidences négatives possibles sur les prêts, investissements et autres activités des banques européennes, qui sont essentiels pour la finance durable.
Action nº 8: intégrer la durabilité dans les exigences prudentielles 1.La Commission examinera la faisabilité d’une intégration des risques liés au climat et à d’autres facteurs environnementaux dans les politiques de gestion des risques des établissements, et d’un calibrage potentiel des exigences de fonds propres applicables aux banques dans le cadre de la directive et du règlement sur les exigences de fonds propres. Le but serait de prendre en considération de tels facteurs, si cela est justifié du point de vue des risques, pour préserver la cohérence et l’efficacité du cadre prudentiel et la stabilité financière. Tout recalibrage des exigences de fonds propres, à partir de données et de l’évaluation du risque prudentiel lié aux expositions des banques, devrait s’appuyer sur la future taxinomie européenne des activités durables (voir action nº 1) et être cohérent avec celle-ci. 2.Au cours du troisième trimestre de 2018, la Commission invitera le comité européen des assurances et des pensions professionnelles (AEAPP) à rendre un avis sur l’incidence des règles prudentielles applicables aux entreprises d’assurance sur les investissements durables réalisés par celles-ci, en accordant une importance particulière à l’atténuation du changement climatique. La Commission tiendra compte de cet avis dans le rapport qui doit être transmis au Parlement européen et au Conseil pour le 1er janvier 2021 au titre de la directive Solvabilité II 31 . |
4Favoriser la transparence et une vision de long terme
4.1Publication d’informations et règles comptables
La publication, par les entreprises, d’informations sur les questions de durabilité permet aux investisseurs et aux parties prenantes d’évaluer leur création de valeur à long terme et leur exposition aux risques en matière de durabilité. Depuis 2018, la directive de l’UE sur la publication d’informations non financières impose aux grandes entités d’intérêt public de publier des informations significatives sur des aspects essentiels en matière environnementale, sociale et de gouvernance, ainsi que sur la manière dont elles gèrent les risques liés 32 . La directive accorde aux entreprises une certaine souplesse quant aux modalités de publication de ces informations sur la durabilité. Pour l’avenir, il faut trouver un juste équilibre entre cette souplesse et la normalisation des publications d’informations qui apparaît nécessaire pour générer les données dont les investisseurs ont besoin pour prendre leurs décisions. S’agissant de la publication d’informations par le secteur financier, il y a lieu d’amener les gestionnaires d’actifs et les investisseurs institutionnels à plus de transparence, notamment pour ce qui est de la façon dont ces acteurs tiennent compte des risques en matière de durabilité et de leur exposition aux risques liés au changement climatique.
Par ailleurs, les inquiétudes grandissent quant au fait que les règles comptables en vigueur pourraient ne pas favoriser la prise de décisions en faveur d’investissements durables. En particulier, dans sa résolution sur la norme internationale d’information financière (IFRS) 9 adoptée le 6 octobre 2016 33 , le Parlement européen se déclarait inquiet de l’incidence que pourrait avoir, sur les investissements à long terme, la nouvelle norme comptable sur les instruments financiers (IFRS 9). La Commission reconnaît l’importance de veiller à ce que les normes comptables n’aient pas pour effet direct ou indirect de décourager les investissements durables et à long terme. À cet égard, il faut se demander s’il ne faudrait pas faire preuve d’une plus grande souplesse dans l’adoption des IFRS chaque fois que des ajustements spécifiques pourraient davantage favoriser les investissements à long terme.
Action nº 9: améliorer la publication d’informations en matière de durabilité et la réglementation comptable 1.La Commission est en train d’engager un bilan de qualité de la législation de l’UE sur la publication d’informations par les entreprises, qui couvrira aussi la directive sur la publication d’informations non financières, afin d’évaluer si les exigences en la matière qui s’appliquent aux sociétés cotées et non cotées remplissent leur objectif. L’évaluation portera notamment sur les exigences de publication d’informations en matière de durabilité et sur les possibilités de communiquer les informations par voie numérique. La Commission lancera une consultation publique à ce sujet au premier trimestre de 2018. Les conclusions du bilan de qualité seront publiées d’ici au deuxième trimestre de 2019 et orienteront toute future proposition législative que la Commission pourrait adopter. 2.D’ici au deuxième trimestre de 2019, la Commission révisera les lignes directrices sur l’information non financière. Les lignes directrices révisées, qui se fonderont sur les indicateurs que doit élaborer le groupe d’experts techniques de la Commission sur la finance durable, aideront les entreprises à mieux comprendre comment publier des informations climatiques conformes, d’une part, aux recommandations de la Task Force on Climate-related Financial Disclosure (groupe de travail sur le reporting financier des risques climatiques, TCFD) 34 du Conseil de stabilité financière et, d’autre part, aux indicateurs climatiques qui seront intégrés dans le nouveau système de classification (voir l’action n° 1). Par la suite, les lignes directrices seront encore modifiées pour tenir compte d’autres facteurs environnementaux et sociaux. 3.D’ici au troisième trimestre de 2018, un laboratoire européen sur le reporting d’entreprise sera créé dans le cadre du groupe consultatif pour l’information financière en Europe (EFRAG), afin de promouvoir l’innovation et les meilleures pratiques dans le reporting d’entreprise, notamment en matière de comptabilité environnementale. Ce forum permettra aux entreprises et aux investisseurs de partager les meilleures pratiques de reporting en matière de durabilité, par exemple en ce qui concerne les informations climatiques à publier conformément aux recommandations du TCFD. 4.En ce qui concerne les informations à publier par les gestionnaires d’actifs et les investisseurs institutionnels, en vertu de la législation proposée par la Commission au titre de l’action n° 7, ces acteurs seraient tenus de rendre compte de la manière dont ils tiennent compte des facteurs de durabilité, et notamment de leur exposition aux risques liés au changement climatique, dans leur stratégie et leurs décisions d’investissement. 5.La Commission demandera à l’EFRAG, s’il y a lieu, d’évaluer l’incidence des IFRS nouvelles ou révisées sur les investissements durables 35 . Elle invitera également l’EFRAG à étudier la possibilité de traitements comptables autres que l’évaluation de la juste valeur pour les portefeuilles d’investissement à long terme en actions et instruments assimilés. Au quatrième trimestre de 2018, la Commission publiera un rapport, tenant compte des travaux actuellement menés par l’EFRAG, sur l’incidence de l’IFRS 9 sur les investissements à long terme et elle étudiera la possibilité d’amender cette norme pour améliorer le traitement des instruments de fonds propres. 6.Dans le cadre du bilan de qualité de la législation de l’UE sur la publication d’informations par les entreprises, la Commission évaluera aussi les aspects pertinents du règlement sur l’application des normes comptables internationales. En particulier, elle étudiera comment le processus d’adoption des IFRS pourrait intégrer la possibilité d’apporter des ajustements spécifiques aux normes lorsque celles-ci ne favorisent pas l’intérêt général européen, par exemple lorsqu’elles pourraient contrecarrer des objectifs d’investissement à long terme. |
4.2 Gouvernance des entreprises et court-termisme injustifié des marchés des capitaux
En permettant aux entreprises de prendre les mesures stratégiques nécessaires pour développer de nouvelles technologies, consolider leur modèle économique et améliorer leurs performances, la gouvernance d’entreprise peut grandement contribuer à une économie plus durable. Par ricochet, les pratiques de gestion du risque et la compétitivité des entreprises s’en trouveraient améliorées avec, à la clé, des créations d’emplois et une dynamisation de l’innovation. De nombreuses entreprises disposent à cet effet de stratégies de gouvernance, même si celles-ci ne sont pas toujours aisément comparables.
Cependant, les entreprises européennes, en dépit des efforts consentis par un certain nombre d’entre elles, peuvent avoir du mal à élargir l’horizon temporel dans leur prise de décisions, en raison des pressions de court terme injustifiées exercées par le marché. Les chefs d’entreprise peuvent en venir à accorder une importance excessive aux résultats financiers à court terme, au mépris des opportunités et des risques que recèlent les questions de durabilité environnementale et sociale. Ainsi, la conjugaison des pressions exercées par les marchés des capitaux et des incitations mises en place au sein des entreprises peut conduire ces dernières à s’exposer inutilement à long terme à des risques en matière de durabilité. La Commission engagera un dialogue avec toutes les parties prenantes pour analyser cette question plus en détail.
Action n° 10: favoriser une gouvernance durable des entreprises et atténuer le court-termisme des marchés des capitaux 1.Afin de promouvoir une gouvernance des entreprises plus propice aux investissements durables, d’ici au deuxième trimestre de 2019, la Commission procèdera à des analyses et à des consultations auprès des parties intéressées, pour évaluer: i) l’éventuelle nécessité d’imposer aux conseils d’administration l’obligation d’élaborer une stratégie de croissance durable, prévoyant notamment l’exercice d’une diligence appropriée tout au long de la chaîne d’approvisionnement et des objectifs mesurables en matière de durabilité, et l’obligation de la publier; et ii) l’éventuelle nécessité de clarifier les règles en vertu desquelles les administrateurs sont censés agir dans l’intérêt à long terme de l’entreprise. 2.La Commission invite les autorités européennes de surveillance à recueillir des données factuelles sur les pressions à court terme indûment exercées par les marchés des capitaux sur les entreprises et à envisager si nécessaire de nouvelles mesures sur ce fondement, d’ici au premier trimestre de 2019. Plus précisément, la Commission invite l’AEMF à recueillir des informations sur le court-termisme injustifié des marchés des capitaux, et notamment: i) sur les taux de rotation des portefeuilles et les périodes de détention des titres de fonds propres par les gestionnaires d’actifs; ii) sur les éventuelles pratiques des marchés des capitaux qui génèreraient des pressions de court terme injustifiées dans l’économie réelle. |
5Mise en œuvre du plan d'action
Des politiques engagées et ambitieuses proposant des solutions aux questions du changement climatique, de la dégradation de l’environnement, de l’épuisement des ressources naturelles et de la durabilité sociale n’atteindront leurs objectifs que si elles sont sous-tendues par une définition claire des priorités et une planification judicieuse.
Le présent plan d’action met l’accent, en particulier, sur l’importance et l’urgence de doter l’UE d’une taxinomie présentant des définitions unifiées qui assureront la fiabilité et la comparabilité des informations relatives aux investissements durables. C’est une condition préalable à d'autres activités telles que l'élaboration de normes et de labels, le calibrage des exigences prudentielles et l’utilisation de données de référence sur le bas carbone. La taxinomie de l’UE complète en outre d’autres activités telles que la publication d’informations par les entreprises ou la fourniture de conseil financier 36 . Si les travaux d’élaboration de la taxinomie porteront en premier lieu sur l'atténuation du changement climatique, ils s’étendront progressivement à l'adaptation au changement climatique et à d’autres questions environnementales et, par la suite, à la durabilité sociale. Cette approche reflète l’urgence d’agir contre le changement climatique et d’œuvrer à la réalisation des objectifs de l’UE à long terme en matière de climat et d’énergie.
La stratégie de mise en œuvre associe des mesures non législatives et législatives à de nouvelles mesures et à des modifications très spécifiques de règles existantes. En parallèle aux mesures législatives, les mesures non législatives permettraient de garantir l'adaptabilité et d’alléger la charge administrative 37 . La Commission veillera à ce que toute incidence pertinente de la législation relative aux services financiers sur la durabilité soit évaluée de manière adéquate dans les analyses d’impact, les consultations publiques et les évaluations ex post en la matière, conformément aux lignes directrices et à la boîte à outils pour une meilleure réglementation 38 .
La mise en œuvre en souplesse du présent plan d’action et le contrôle de la réalisation de ses trois principaux objectifs nécessiteront un soutien technique approprié et une structure de gouvernance solide, étant donné l’expertise que requiert chacun des secteurs du développement durable.
À court terme, les AES sont invitées par le plan d’action à soutenir directement sa mise en œuvre par des tâches spécifiques alignées sur les suggestions de la présente stratégie. En particulier, les AES devraient, d’une part, fournir des orientations sur la manière de prendre en compte de façon effective les aspects de durabilité dans la législation européenne pertinente relative aux services financiers et, d'autre part, aider à repérer les lacunes existantes. En outre, elles devraient encourager la convergence de la mise en œuvre des dispositions en matière de durabilité contenues dans le droit de l’Union. La Commission évaluera la future dotation en ressources des AES lors de la préparation du cadre financier pluriannuel post-2020. À court terme, les AES devraient jouer un rôle important dans le recensement des risques que font peser les facteurs de durabilité sur la stabilité financière, et dans l’information concernant ces risques. À cette fin, elles pourraient concevoir une méthodologie commune de l’UE pour les analyses de scénarios pertinents, qui pourrait ultérieurement évoluer vers des tests de résistance aux contraintes climatiques/environnementales.
À long terme, vu les incidences du nouveau système de classification (taxinomie) sur la mise en œuvre du présent plan d’action, et afin d'assurer qu'il puisse être adapté dans le temps, la Commission envisagera de mettre sur pied une structure de gouvernance plus stable, qui sera opérationnelle une fois en place le cadre juridique applicable à la taxinomie. Cette structure de gouvernance serait conçue comme une plateforme public-privé réunissant, d’une part, les experts et les acteurs du marché et, d'autre part, les organismes du secteur public, tels que les AES, l’EEE, la Banque européenne d’investissement (BEI) et Eurostat. Cette plateforme assurerait, en particulier, le suivi des principaux développements, de façon à assurer l’enrichissement et l’adaptabilité de la taxinomie européenne de la durabilité. Au fil du temps, elle pourrait également effectuer d’autres tâches nécessaires à la réalisation des objectifs du présent plan d’action. La plateforme pourrait également conseiller la Commission sur de futures actions de financement durable, et elle servira d’enceinte de discussion centrale pour les décideurs politiques et les autres parties prenantes. En améliorant l'information des personnes concernées et en facilitant les travaux à venir, la plateforme permettrait de faire de la durabilité une composante permanente de l’élaboration des politiques.
6La voie à suivre
Le présent plan d’action contribuera à maints égards à la concrétisation de l’accord de Paris et des objectifs de développement durable définis dans la communication de la Commission intitulée «Prochaines étapes pour un avenir européen durable - action européenne en faveur de la durabilité». Dans son discours sur l’état de l’Union de 2017, le président Jean-Claude Juncker a fait part de l’ambition de l’Europe d’être à l’avant-garde de la lutte contre le changement climatique. À l’heure où les États-Unis ont pris la décision de se retirer de l’accord de Paris de 2015, la nécessité de faire preuve d’initiative au niveau mondial pour évoluer vers un développement durable est de plus en plus criante. L’Europe est bien placée pour endosser ce rôle et, partant, devenir la destination privilégiée des investissements durables, par exemple dans les technologies à faibles émissions de carbone.
La Commission reconnaît que le secteur financier a un rôle essentiel à jouer dans la réalisation de ces objectifs environnementaux et sociaux fondamentaux, car de larges volumes de capitaux privés devront être mobilisés pour assurer un tel changement. La Commission aura également pour objectif de limiter au maximum l’impact de nouveaux risques pour la stabilité financière liés aux questions environnementales et sociales, qui pourraient atteindre le système financier et les citoyens touchés par les retombées négatives considérables du changement climatique. Cette approche aiderait les entreprises européennes à rester compétitives dans une économie mondiale en mutation.
L’UE, cependant, n’y arrivera pas seule. Il est indispensable de coordonner les efforts au niveau mondial. En fixant dans le présent plan d'action un critère de référence pour les politiques en matière de finance durable, la Commission en appelle également aux autres acteurs, y compris les États membres 39 , les responsables de la surveillance, le secteur privé et les grands pays hors UE, pour qu'ils prennent des mesures concluantes qui encourageront et orienteront les transformations dans leurs domaines respectifs. C’est pourquoi le présent plan d’action a l’ambition de servir de schéma directeur pour les futures discussions qui auront lieu au sein des instances internationales dans le but de promouvoir une approche repensée d’une gestion plus durable du système financier. La Commission encouragera les discussions sur le présent plan d’action dans les enceintes existantes, tels que le Conseil de stabilité financière, le G20, le G7, les Nations unies et l’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV).
La Commission présentera un rapport sur la mise en œuvre du présent plan d’action en 2019. La stratégie exposée dans ce plan d’action est une première étape essentielle dans la transition vers la durabilité. Pour autant, pour en tirer tous les avantages, il est nécessaire de le compléter par des mesures dans d'autres domaines 40 , en concertation avec tous les acteurs concernés.
Annexe I – Rôle de la taxinomie de l’UE dans le cadre du plan d'action