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Document 52013DC0866

    RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL sur l’opportunité d’établir un système d’étiquetage applicable à l’agriculture locale et à la vente directe

    /* COM/2013/0866 final */

    52013DC0866

    RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL sur l’opportunité d’établir un système d’étiquetage applicable à l’agriculture locale et à la vente directe /* COM/2013/0866 final */


    TABLE DES MATIÈRES

    RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

    sur l’opportunité d’établir un système d’étiquetage applicable à l’agriculture locale et à la vente directe

    1............ Introduction. 3

    2............ Contexte et sources du rapport 3

    3............ Situation de l’agriculture locale et de la vente directe. 4

    3.1......... Importance socioéconomique de l’agriculture locale et de la vente directe. 5

    3.2......... Critères environnementaux. 6

    4............ Conclusions sur les systèmes d’étiquetage existant dans les États membres. 8

    5............ Est-il judicieux de créer un système d’étiquetage à l’échelon de l’Union?. 9

    5.1......... Un système d’étiquetage spécifique. 10

    5.2......... Une approche alternative. 11

    6............ Conclusion. 11

    1.           Introduction

    Le règlement (UE) n° 1151/2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires[1] est entré en vigueur le 3 janvier 2013. L’article 55 stipule que la Commission doit présenter «un rapport au Parlement européen et au Conseil sur l’opportunité d’établir un nouveau système d’étiquetage applicable à l’agriculture locale et à la vente directe, visant à aider les producteurs à commercialiser leurs produits localement», au plus tard le 4 janvier 2014. Ce rapport «porte principalement sur la capacité de l’exploitant à conférer une valeur ajoutée à ses produits grâce à la nouvelle étiquette et devrait tenir compte d’autres critères, tels que les possibilités de réduire les émissions de carbone et les déchets grâce au raccourcissement des chaînes de production et de distribution».

    Enfin, le rapport «est, si nécessaire, accompagné de propositions législatives appropriées concernant la création d’un système d’étiquetage applicable à l’agriculture locale et à la vente directe».

    Le présent rapport se penchera sur les implications socioéconomiques et environnementales de l’agriculture locale et de la vente directe et étudiera les possibilités d’introduction d’un outil d’étiquetage à l’échelon de l’Union européenne.

    2.           Contexte et sources du rapport

    Dans «Des revenus équitables pour les agriculteurs: une chaîne d’approvisionnement alimentaire plus performante en Europe»[2], le Parlement européen invite la Commission à «proposer l’adoption d’instruments de soutien et de promotion des filières alimentaires gérées par les agriculteurs, des filières courtes et des marchés gérés directement par les agriculteurs (vente à la ferme) afin de permettre l’établissement d’un rapport direct avec les consommateurs et de donner aux agriculteurs la faculté d’obtenir une partie plus équitable de la valeur du prix de vente final à travers une réduction des transferts et des interventions des intermédiaires».

    Dans «L’avenir de la politique agricole commune après 2013»[3], le Parlement européen insiste sur la nécessité d’inclure l’amélioration de la compétitivité à différents niveaux, y compris celui des marchés locaux, parmi les objectifs fondamentaux de la PAC après 2013.

    Le Comité des régions estime[4] que la Commission devrait «adopter une définition des concepts de «produits agroalimentaires locaux» et de «systèmes agroalimentaires locaux» et créer un nouveau logo et définir un symbole commun ainsi qu’une identité propre pour les produits locaux […]».

    Dans son examen des défis posés par la PAC après 2013[5], la Commission souligne que «les Européens exigent des produits alimentaires (y compris des produits locaux) de grande qualité et très variés, qui répondent à des normes rigoureuses en matière de sécurité, de qualité et de bientraitance».

    Afin de mieux cerner la thématique de l’agriculture locale et de la vente directe dans l’Union européenne, la Commission a engagé diverses activités, parmi lesquelles des consultations des États membres et des parties prenantes, la création d’un groupe de travail spécialisé et la commande d’une étude externe[6]. Elle a convié au mois d’avril 2012 les parties intéressées à une conférence de haut niveau intitulée «Agriculture locale et circuits courts alimentaires». Le document de travail des services de la Commission qui accompagne ce rapport fournit de plus amples informations sur ces activités[7].

    Ces dernières apportent une contribution essentielle au présent rapport, lequel comporte également des informations tirées de publications révisées par des pairs et d’autres documents et articles externes.

    3.           Situation de l’agriculture locale et de la vente directe

    Aux fins du présent rapport, on entend par:

    – «agriculture locale»: la production de produits agricoles et de denrées alimentaires dans le but de les vendre dans une zone relativement proche de l’exploitation de production;

    – «vente directe»: la vente directe de l’agriculteur au consommateur, sans intermédiaire du côté vendeur;

    – «circuits courts alimentaires»: la vente de l’agriculteur au consommateur avec un nombre réduit d’intermédiaires;

    – «systèmes agroalimentaires locaux»: systèmes dans lesquels la production, la transformation, la vente et la consommation de denrées alimentaires ont lieu dans une zone géographique relativement restreinte.

    Il n’existe pas de définition uniforme du terme «zone locale». Si différentes sources confirment que ce terme renvoie à une zone géographique relativement petite, il n’y a pas d’accord quant à la distance, qui varie entre 20 et 100 km du point de production. Compte tenu des différentes interprétations assez répandues du terme «zone locale», arrêter une définition à l’échelon de l’Union semblerait arbitraire. C’est essentiellement le consommateur qui décide si un produit provient ou non d’une «zone locale».

    L’agriculture locale et la vente directe font face à de nombreux défis, qui ont été abordés durant la conférence d’avril 2012. La Commission a été invitée à: fournir une aide appropriée en vue du développement de l’agriculture locale et des circuits courts alimentaires; adapter les règles de l’Union en matière de marchés publics; clarifier les règles de l’Union en matière d’hygiène; et réfléchir à la manière d’améliorer l’accès aux marchés, éventuellement au moyen d’un système d’étiquetage spécifique. Le document de travail des services de la Commission qui accompagne ce rapport aborde ces défis ainsi que les solutions permettant de les relever grâce à des instruments européens existants ou nouveaux.

    3.1.        Importance socioéconomique de l’agriculture locale et de la vente directe

    L’enquête Eurostat 2007 sur la structure des exploitations[8] a mis en lumière des différences significatives entre les États membres quant à l’essor de la vente directe. En moyenne, environ 15 % des exploitations vendent plus de 50 % de leur production directement aux consommateurs, avec des écarts importants entre les États membres: le pourcentage des exploitations de ce type est compris entre près de 25 % en Grèce et à peine 0,1 % en Espagne. Notons que les petites exploitations sont relativement plus présentes dans les circuits courts alimentaires.

    Des études empiriques portant sur le comportement d’achat révèlent un haut niveau d’intérêt pour l’achat de denrées alimentaires locales. Une étude[9] indique qu’au Royaume-Uni, 70 % des habitants veulent acheter local, près de 50 % veulent acheter plus de produits locaux à l’avenir, et 60 % achètent déjà local. D’après le Natural Marketing Institute[10], 71 % des consommateurs français et 47 % des consommateurs espagnols et britanniques affirment qu’acheter local est important.

    Les activités menées pour répondre à la demande croissante de produits locaux peuvent renforcer et développer la compétitivité des zones rurales. La participation aux systèmes agroalimentaires courts ne va pas que dans le sens de l’intérêt des producteurs agricoles. Elle se répercute également sur les activités ultérieures à la production primaire, telles que la transformation, la distribution et la vente de détail, et a donc un effet multiplicateur sur la communauté locale, en générant de l’emploi. L’actuelle crise économique a encore accentué l’importance de ce facteur. Le soutien public à l’agriculture locale et à la vente directe pourrait contribuer à maximiser ces bienfaits.

    Le projet de recherche paneuropéen IMPACT[11] a établi que si la proportion du nombre total d’exploitations impliquées dans la vente directe variait considérablement d’un État membre à l’autre (de 0,5 % en Irlande à 34,6 % en Italie), celle de l’UE-15 était estimée à 20,2 %. La valeur nette supplémentaire générée par la vente directe pour l’UE-15 était estimée à 2,7 % de la valeur ajoutée nette totale. L’une des conclusions de la recherche était que l’essor de la vente directe est devenu un élément central du développement rural dans plusieurs États membres.

    L’absence de données quantitatives était compensée par des estimations d’importance économique significative pour le secteur. Ainsi, les estimations correspondant à certains États membres fournies dans la revue rurale de l’Union[12] font état d’écarts sensibles dans l’Union: si au Danemark, par exemple, seuls 3 % des producteurs pratiquent la vente directe, en Autriche, c’est le cas d’un tiers des exploitations.

    L’étude relative aux circuits courts alimentaires a analysé 84 circuits courts alimentaires répartis dans l’Union, au moyen du cadre des cinq grands capitaux[13]. Elle révèle que la majorité des circuits (54) sont fortement orientés vers la création de capital social, en renforçant les contacts sociaux entre les individus, de même qu’un sentiment de communauté et de confiance, ou encore la coopération entre entreprises, d’une part, et entre producteurs et consommateurs, d’autre part. L’étude démontre en outre que des relations étroites entre producteurs et consommateurs renforcent la connaissance et la compréhension des consommateurs vis-à-vis des denrées alimentaires, tout en ayant une incidence positive sur les activités agricoles et sur les questions environnementales. Il arrive même dans certains cas que les comportements évoluent, notamment au niveau des habitudes alimentaires et des décisions d’achat. Enfin, d’après l’étude, le fait de passer par des circuits courts alimentaires requiert davantage de main-d’œuvre de la part des exploitations que la vente de produits agricoles et de denrées alimentaires sur les marchés traditionnels, en raison des activités de transformation, de conditionnement et de commercialisation.

    3.2.        Critères environnementaux

    En ce qui concerne les circuits alimentaires, la littérature existante se penche surtout sur la consommation énergétique et sur les émissions de carbone découlant de l’agriculture, de la transformation, du stockage et de la distribution des produits alimentaires. Le secteur agroalimentaire représentant environ 30 % de la consommation énergétique totale[14], il a une incidence directe sur le changement climatique.

    Une étude menée par Jones[15] à partir d’une analyse de l’impact environnemental de la composante «transport» des circuits alimentaires a établi que s’approvisionner en pommes cultivées localement au Royaume-Uni produisait moins d’émissions de dioxyde de carbone qu’acheter au supermarché des pommes importées de Nouvelle-Zélande. Cependant, une étude menée par Saunders et al[16] en utilisant une autre approche a abouti à la conclusion inverse. Dans ce cas, la Nouvelle-Zélande obtenait de meilleurs résultats que le Royaume-Uni en termes de consommation énergétique totale, en considérant l’énergie directe et indirecte utilisée dans la production de pommes, de même que dans le transport et le stockage.

    Une étude de cas réalisée en Espagne en utilisant un modèle de transport montre qu’adopter un mode de consommation plus local entraîne des économies d’énergie (Aranda et al[17]).

    Une autre étude (Sundkvist et al[18]) analyse les conséquences environnementales de la production locale de pain à petite échelle par rapport à la production centralisée à grande échelle. Il en ressort que les émissions de CO2, SO2 et NOX sont moindres pour les boulangeries locales que pour les grandes boulangeries de la Suède continentale.

    Une étude de Coley et al[19] se penche sur la consommation énergétique et sur l’empreinte carbone d’un consommateur qui se rend dans une ferme pour y acheter des produits. Elle arrive à la conclusion qu’un trajet de 7,4 km destiné à acheter un produit constitue la limite: si la distance est plus longue, les émissions de carbone sont supérieures à celles produites par le circuit alimentaire traditionnel.

    Pour ce qui est des incidences environnementales du gaspillage alimentaire, les études renvoient à deux aspects. Le premier est la quantité d’énergie et d’eau utilisée dans la phase de production. Le deuxième est la quantité supplémentaire de dioxyde de carbone, de méthane et d’ammoniac produite durant la phase de décomposition[20].

    Une étude de Gustavsson et al[21] révèle que le gaspillage alimentaire concerne principalement les fruits, légumes et céréales. Pour l’Europe, les chiffres indiquent une perte de plus de 30 % pour les céréales et d’environ 45 % pour les fruits et les légumes. Les pertes se chiffrent à 20 % pour les semences, à plus de 20 % pour la viande et à plus de 10 % pour les produits laitiers.

    Cette même étude souligne la nécessité d’agir avec prudence à l’heure d’interpréter les résultats des questions liées aux déchets, en raison de l’insuffisance des données, des incertitudes qui entourent les données disponibles et des nombreux présupposés relatifs aux niveaux de gaspillage alimentaire. De même, Hall et al[22] soulignent qu’il est difficile de quantifier le gaspillage alimentaire car les méthodes se basent sur des facteurs de déchets mesurés dans des échantillons de population. Qui plus est, Parfitt et al[23] affirment que la comparaison des études est encore compliquée par les différentes méthodes et définitions utilisées pour mesurer le gaspillage alimentaire.

    Une étude de la Commission consacrée au gaspillage alimentaire[24] s’est penchée sur les différentes causes du gaspillage alimentaire dans les quatre secteurs suivants: industrie manufacturière, gros/détail, restauration et ménages. Il en ressort qu’il est malaisé de tirer des conclusions concrètes sur la question, à cause des données limitées qui ne représentent que deux secteurs (produits laitiers et viande). Qui plus est, le rôle éventuel joué par les circuits courts alimentaires pour réduire le gaspillage alimentaire n’est pas abordé dans cette étude.

    Afin de pouvoir tirer des conclusions fiables, il conviendra de procéder à de nouvelles recherches autour de la relation qui existe entre le type de circuit alimentaire, les attitudes des consommateurs et la réduction du gaspillage. Il semble que les consommateurs attachent souvent une plus grande valeur aux produits achetés directement à la ferme ou sur un marché d’agriculteurs, ce qui pourrait générer moins de déchets. Ceci dit, compte tenu de la part relativement restreinte des circuits courts alimentaires et des systèmes agroalimentaires locaux dans la production, la transformation et la distribution mondiales, l’impact potentiel de ces systèmes ne doit pas être surestimé.

    L’étude sur les circuits courts alimentaires révèle que pour réduire autant que possible l’impact négatif sur l’environnement, les circuits courts alimentaires devraient en même temps être locaux et saisonniers, utiliser des méthodes de production éco-performantes et veiller à limiter leur empreinte carbone. Combiner les caractéristiques locales et saisonnières réduit les besoins de stockage, tandis que des méthodes de production éco-performantes peuvent également contribuer à diminuer l’utilisation de pesticides, la pollution des sols et des eaux et la dégradation des sols, tout en renforçant la biodiversité et la durabilité de l’utilisation de l’eau.

    4.           Conclusions sur les systèmes d’étiquetage existant dans les États membres

    L’Union compte une grande variété de systèmes. La plupart consistent en des formes de vente à proximité du site de production. Il peut s’agir de ventes à la ferme (boutiques sur le lieu d’exploitation, échoppes le long de la route, cueillette en libre-service, etc.) ou de vente à l’extérieur (marchés d’agriculteurs et autres, livraisons ou vente aux détaillants ou au secteur de la restauration). La vente à distance est parfois de mise, par exemple dans le cas des livraisons et de la vente par internet. L’étude sur les circuits courts alimentaires indique que les étiquettes et logos sont davantage susceptibles d’être utilisés par des systèmes établis depuis plus longtemps ou par des initiatives régionales de plus grande envergure, tandis qu’ils sont moins fréquents dans le cas d’une clientèle plus localisée, entretenant une communication en face à face entre producteur et consommateur.

    Les réponses apportées par les États membres au questionnaire sur la vente directe et locale de produits agricoles et de denrées alimentaires ont montré des disparités au niveau du développement de ce type de vente et du soutien dont il bénéficie. Pareillement, l’étude sur les circuits courts alimentaires a établi que de nombreux outils sont disponibles aux échelons européen et national pour aider les agriculteurs, mais qu’ils ne sont pas appliqués de manière systématique dans l’Union, d’où un développement inégal des circuits courts alimentaires. Les défis liés au lancement d’une activité dans l’agriculture locale n’étant pas les mêmes pour tous les États membres de l’Union, ces derniers devraient sélectionner une combinaison de mesures adaptées à leurs besoins en matière de développement.

    L’étude portant sur les circuits courts alimentaires montre que les étiquettes servent également à signaler qu’un produit a été certifié. Cet aspect est important pour protéger les produits des imitations: des étiquettes dont le contenu est réglementé sont un outil de lutte contre les informations trompeuses, voire contre la fraude.

    L’étude sur les circuits courts alimentaires avance en outre que les consommateurs se sentent perdus face aux différents systèmes d’étiquetage. Avant tout, les consommateurs attendent de l’étiquetage qu’il les informe du prix et de la durée de conservation d’un produit. Suivent l’origine géographique et l’identité du producteur. Des informations sur la nature du circuit sont également importantes: le produit est-il vendu à un prix équitable, tant pour le producteur que pour le consommateur?

    Enfin, les conclusions de l’étude et de la consultation suggèrent que les systèmes d’étiquetage impliquent inévitablement des coûts pour les producteurs, qui se répercutent parfois sur le prix de vente des produits.

    5.           Est-il judicieux de créer un système d’étiquetage à l’échelon de l’Union?

    La conférence d’avril 2012 a souligné l’importance d’une vision partagée faisant la part belle à la qualité, à l’environnement, à l’éthique, à la culture, aux liens sociaux et à la convivialité. Les ingrédients majeurs de l’approche locale sont le réseautage, la confiance et la connaissance mutuelle, ainsi que la sensibilisation des agriculteurs et des consommateurs. Les conclusions de la conférence indiquent que ces valeurs pourraient être encouragées par une nouvelle étiquette relative aux circuits courts alimentaires, à la condition qu’il s’agisse d’un outil volontaire et simple, n’entraînant pas de surcoût pour les producteurs.

    Les forums qui ont abordé la question de l’agriculture locale et de la vente directe ont souligné la nécessité de faciliter l’accès aux investissements et à la connaissance, de permettre la participation aux marchés publics, et d’adapter les règles d’hygiène, souvent citées comme obstacles à ce type d’agriculture et de vente. Le document de travail des services de la Commission qui accompagne le présent rapport explique les instruments déjà en place pour aider les producteurs et suggère aux États membres des mesures à prendre. Les États membres devraient endosser un rôle plus proactif et adapter le cas échéant la législation, au bénéfice des petits agriculteurs et de la vente directe. L’agroalimentaire et la restauration figurent parmi les secteurs prioritaires pour les marchés publics verts. Dans l’optique d’approvisionner les cantines publiques en denrées locales, les pouvoirs publics devraient observer des approches innovantes pour rendre les contrats plus écologiques, tandis que les agriculteurs, afin d’être en mesure de soumissionner conjointement aux marchés publics, devraient s’organiser et utiliser divers modèles de coopération.

    Les consommateurs désireux d’acheter de la nourriture produite localement ne sont souvent pas en mesure de la distinguer sur le marché[25]. L’enquête Eurobaromètre sur l’autonomisation des consommateurs[26] a mis en lumière un manque de connaissances et de compétences chez les consommateurs, y compris au niveau de l’interprétation des étiquettes et des logos. Ces résultats ont été étayés par les conclusions d’une étude sur le fonctionnement du marché de la viande pour les consommateurs[27].

    L’étude consacrée aux circuits courts alimentaires cite plusieurs cas de déclarations trompeuses ou erronées sur les étiquettes, ce qui est une source de concurrence déloyale. Les mesures prises pour se protéger des imitations, au moyen de la fourniture d’informations appropriées sur les étiquettes à l’échelle de l’Union, pourraient réduire le risque d’induire le consommateur en erreur.

    5.1.        Un système d’étiquetage spécifique

    La Commission a demandé des conseils d’experts dans l’optique de faciliter l’analyse des différentes options possibles pour créer un système d’étiquetage[28].

    Les experts ont rendu un avis clair: si un système d’étiquetage devait être créé, il devra:

    – être facultatif pour les producteurs,

    – éviter les procédures de certification et d’accréditation qui sont perçues comme fastidieuses et coûteuses,

    – fixer des critères d’éligibilité clairs pour les produits inclus dans le système.

    Les experts ont suggéré qu’un système d’étiquetage spécifique ne serait utile que s’il était intégré ou rattaché à d’autres mesures visant à aider les agriculteurs à trouver des canaux de vente alternatifs. Ces mesures sont disponibles dans le contexte de la politique de développement rural, et en particulier: le soutien sous la forme de conseils et d’informations, les investissements dans les actifs matériels; le développement des exploitations et des entreprises; la coopération horizontale et verticale parmi les acteurs du circuit et les activités de promotion à l’échelon local; le soutien à la participation à des systèmes de qualité, et les actions d’information et de promotion.

    Dans la réflexion sur les diverses options, il convient de faire attention au type de circuit concerné. La «vente directe» représente la vente directe de l’agriculteur au consommateur, sans intermédiaire du côté vendeur. Les informations de l’étiquette visent à se substituer à cette communication directe lorsqu’elle n’est pas possible. Plus il y a d’intermédiaires entre le producteur et le consommateur, plus il y a d’informations habituellement transmises dans la vente directe qui se perdent, et plus les informations de l’étiquette sont nécessaires. On peut en tirer la conclusion qu’un système d’étiquetage qui se limiterait à la vente directe n’aurait qu’un impact limité.

    5.2.        Une approche alternative

    Une approche alternative à un système de certification indépendant pourrait consister à prévoir une place pour une mention de qualité facultative.

    L’évaluation des incidences[29] a conclu que le recours à des mentions de qualité facultatives constitue un outil efficace permettant aux agriculteurs de communiquer la valeur qu’ils ajoutent à leurs produits et garantissant que ces efforts supplémentaires sont récompensés.

    Cette mention de qualité facultative pourrait répondre aux principales attentes des consommateurs: connaître l’origine du produit et les caractéristiques du circuit. Cependant, pour des raisons juridiques, une mention de qualité facultative ne comporterait pas de logo/symbole, mais uniquement des mots.

    Laisser de la place à l’ajout d’une mention de qualité facultative aurait les avantages suivants:

    – il s’agit d’un instrument léger avec une charge administrative, budgétaire et de contrôle relativement faible;

    – il peut fournir une protection contre l’utilisation abusive, la fraude et les pratiques trompeuses;

    – il ouvre la porte à d’autres mécanismes de soutien de l’Union, en particulier dans le cadre du développement rural.

    Pour ce qui est de la coexistence et du maintien des systèmes d’étiquetage nationaux, régionaux et locaux, publics et privés, avec un éventuel outil à l’échelon de l’Union, il convient d’étudier comment cette coexistence pourrait être garantie et si elle serait source de complexité accrue pour les consommateurs.

    6.           Conclusion

    L’agriculture locale et la vente directe sont une réalité au sein de l’Union européenne et demeureront une composante de l’agriculture européenne. Le présent rapport a démontré les points suivants:

    – Il existe une demande pour des produits de la ferme authentiques vendus dans des circuits courts alimentaires, qu’il convient de définir.

    – Il existe de grandes disparités entre les États membres pour ce qui est de l’essor de la vente directe, qui sont probablement dus aux différences nationales et régionales entre les structures des exploitations, les canaux de distribution et les cultures.

    – Comme expliqué dans le document de travail des services de la Commission, le développement de circuits courts alimentaires fait face à de nombreux défis, qu’il convient de relever avec des outils autres qu’un système d’étiquetage. Plusieurs instruments sont disponibles à l’échelon européen et national, mais ils ne sont pas appliqués de manière uniforme. Les parties prenantes estiment que certaines règles de l’Union entravent l’essor de l’agriculture locale.

    – Une éventuelle nouvelle étiquette devrait être simple et ne pas représenter une contrainte trop lourde pour les producteurs, tout en étant contrôlable et garante d’une crédibilité suffisante pour les consommateurs. Elle devrait également viser à réduire le risque d’induire le consommateur en erreur, même si la législation européenne existante permet, si elle est correctement appliquée, de prendre des mesures à l’encontre des pratiques trompeuses.

    – Une nouvelle étiquette pourrait apporter une valeur ajoutée aux produits issus de l’agriculture locale si elle va au-delà de la vente directe et si les États membres veillent à l’intégrer ou à la rattacher à d’autres mesures.

    Dans le présent rapport, la Commission a fourni des éléments factuels en vue de faciliter le débat devant déterminer s’il convient de créer une nouvelle étiquette européenne et portant également sur les questions plus vastes de l’agriculture locale et de la vente directe. Une série de questions est jointe en annexe afin d’orienter le débat.

    La Commission invite le Parlement européen et le Conseil à examiner ce rapport et à communiquer leurs observations.

    [1]               Règlement (UE) n° 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires, JO L 343 du 14.12.2012, p. 1.

    [2]               Résolution du Parlement européen du 7 septembre 2010 sur des revenus équitables pour les agriculteurs: une chaîne d’approvisionnement alimentaire plus performante en Europe, P7_TA(2010)0302.

    [3]               Résolution du Parlement européen du 8 juillet 2010 sur l’avenir de la politique agricole commune après 2013, P7_TA(2010)0286.

    [4]               Avis du Comité des régions sur le thème «Systèmes agroalimentaires locaux» (avis de prospective), 2011/C 104/01.

    [5]               La PAC à l’horizon 2020: Alimentation, ressources naturelles et territoire - relever les défis de l’avenir, COM(2010) 672 final.

    [6]               Knefsey, M., Schmutz, U., Venn, L., Balint, B., Trenchard, E.: «Short Food Supply Chains and Local Food Systems in the EU. A State of Play of their Socio-Economic Characteristics», Union européenne, 2013.

    [7]                      http://ec.europa.eu/agriculture/quality/reports/index_en.htm

    [8]               http://epp.eurostat.ec.europa.eu/statistics_explained/index.php/Farm_structure_survey_2007

    [9]               Local Government Regulation, Buying food with geographical descriptions – How ‘local’ is ‘local’?, 2011.

    [10]             Les chiffres de la consommation responsable, édition 2010, disponible à l’adresse: http://www.mescoursespourlaplanete.com/medias/pdf/RapportwebVF-2010.pdf

    [11]             IMPACT project: The socio-economic impact of rural development policies: realities and potentials (CT-4288), 4e programme-cadre FAIR, 2002. Les États membres concernés sont les Pays-Bas, le Royaume-Uni, l’Irlande, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne et la France.

    [12]             Revue rurale de l’UE, n° 12 (2012), p. 11 à 12.

    [13]             Le cadre des cinq capitaux examine les incidences sur le capital humain, financier, physique, social et naturel.

    [14]             FAO Policy Brief 2011: The case for energy–smart food systems, 2011, disponible à l’adresse: http://www.fao.org/docrep/014/i2456e/i2456e00.pdf.

    [15]             Jones, A.: An environmental assessment of Food Supply Chains: a case study on dessert apples, in: Environmental Management, vol. 30, 4 (2002), p. 560 à 576.

    [16]             Saunders, S.; Barber, A.; Taylor, G.: Food miles- Comparative energy/emissions performance of New Zealand’s agriculture industry, Research Report, 2006 (285).

    [17]             Aranda, A.; Scarpellini, S.; Zabalza, I.; Valero Capelli, A.: An analysis of the present food’s transport model based on a case study carried out in Spain. 6th International Conference on LCA in the Agrifood sector, Zurich, 2008, p. 12 à 14.

    [18]             Sundkvist, A., Jansson A., Larsson, P.: Strengths and limitations of localizing food production as a sustainability building strategy — an analysis of bread production on the island of Gotland, Sweden, in: Ecological Economics, 37 (2001), p. 217 à 227.

    [19]             Coley, D., Howard, M., Winter, M.: Local food, food miles and carbon emissions: a comparison of farm shop and mass distribution approaches, in: Food Policy, 34 (2009), p. 150 à 155.

    [20]                    Hall, K. D., Guo, J., Dore, M., Chow, C. C.: The progressive increase of food waste in America and its environmental impact, in: PLoS ONE, vol. 4, 11 (2009).

    [21]             Gustavsson, J., Cederberg, C., Sonesson, U.: Global food losses and food waste. Extent, causes and prevention, FAO, 2011.

    [22]             Hall, K. D., Guo, J., Dore, M., Chow, C. C.: The progressive increase of food waste in America and its environmental impact, in: PLoS ONE, vol. 4, 11 (2009).

    [23]             Parfitt, J., Macnaughton, S. Food waste within food supply chains: quantification and potential for change to 2050, in: Philosophical Transactions of the Royal Society: Biology, 365 (2010), p. 3065 à 3081.

    [24]             Commission européenne: Preparatory study on food waste across the EU 27, 2010, disponible à l’adresse: http://ec.europa.eu/environment/eussd/pdf/bio_foodwaste_report.pdf

    [25]             Enquête Eurobaromètre spéciale: L’attitude des Européens à l’égard de la sécurité alimentaire, de la qualité de l’alimentation et de l’environnement rural, 389, 2012.

    [26]             Eurobaromètre spécial: «Consumer Empowerment», 342, 2011.

    [27]             http://ec.europa.eu/consumers/consumer_research/market_studies/docs/mms_follow-up_study_2012_en.pdf

    [28]             Un groupe de travail a été créé sous les auspices du groupe consultatif «Qualité de la production agricole».

    [29]             Agricultural product quality policy: Impact assessment Annex A(II): Marketing standards, 2009, disponible à l’adresse: http://ec.europa.eu/agriculture/quality/policy/com2009_234/ia_annex_a2_en.pdf

    ANNEXE

    Propositions de points à aborder dans le cadre des discussions sur le rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur l’opportunité d’établir un système d’étiquetage applicable à l’agriculture locale et à la vente directe:

    – Certains des instruments mis en place à l’échelon de l’Union pour soutenir l’agriculture locale et la vente directe ne semblent pas avoir été mis en œuvre de manière uniforme. Ces instruments sont-ils toujours appropriés?

    – Les parties prenantes ont identifié certaines règles européennes, notamment en matière d’hygiène ou de marchés publics, qui entraveraient l’essor de l’agriculture locale. La Commission estime que la législation européenne garantit déjà une certaine flexibilité qui n’est pas pleinement exploitée. Le Parlement européen et le Conseil partagent-ils l’avis de la Commission? Convient-il d’apporter des éclaircissements à l’échelon européen aux règles relatives aux productions à petite échelle?

    – Plusieurs systèmes d’étiquetage existent au niveau national/régional pour soutenir l’agriculture locale. Un système européen spécifique pourrait-il apporter une valeur ajoutée aux agriculteurs tout en fournissant des informations aux consommateurs, contribuant ainsi à réduire le risque que ces derniers soient induits en erreur? Ce système d’étiquetage devrait-il comporter un symbole/logo?

    – Sachant que le recours à un système d’étiquetage entraîne inévitablement des coûts, comment pourrait-on développer un système européen qui ne soit pas source de contraintes trop lourdes pour les agriculteurs, tout en apportant des garanties suffisantes aux consommateurs?

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