COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 4.3.2019
COM(2019) 190 final
RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS
relatif à la mise en œuvre du plan d’action en faveur d’une économie circulaire
{SWD(2019) 90 final}
1Introduction
En décembre 2015, la Commission a adopté un plan d’action en faveur de l’économie circulaire afin de donner un nouvel élan à l’emploi, à la croissance et à l’investissement et de développer une économie neutre en carbone, efficace dans l’utilisation des ressources et compétitive. Les 54 mesures au titre du plan d’action ont à présent été réalisées ou sont en cours de mise en œuvre, même si le travail sur certaines d’entre elles se poursuivra après 2019.
Le cadre de suivi pour l’économie circulaire de l’Union montre que la transition a contribué à remettre l’Union sur la voie de la création d’emplois. En 2016, les secteurs pertinents pour l’économie circulaire employaient plus de quatre millions de travailleurs, en hausse de 6 % par rapport à 2012. Des emplois supplémentaires seront inévitablement créés dans les années à venir afin de répondre à la demande attendue générée par des marchés des matières premières secondaires pleinement opérationnels.
La circularité a aussi laissé entrevoir de nouvelles possibilités commerciales, permis l’émergence de nouveaux modèles d’entreprise et créé de nouveaux marchés, à l’intérieur de l’Union et en dehors. En 2016, des activités circulaires telles que la réparation, la réutilisation ou le recyclage ont généré près de 147 milliards d’EUR en valeur ajoutée tout en représentant des investissements d’une valeur de 17,5 milliards d’EUR environ.
En Europe, le recyclage des déchets municipaux a augmenté au cours de la période 2008-2016 et la contribution des matières recyclées à la demande globale de matières est en constante amélioration. Cependant, en moyenne, les matières recyclées ne couvrent que moins de 12 % de la demande de matières de l’Union. Un récent rapport émanant de parties prenantes va dans le même sens et laisse entendre que 9 % seulement de l’économie mondiale serait entièrement circulaire, ce qui laisse une ample marge d’amélioration.
Le cadre de suivi pour l’économie circulaire de l’Union européenne présenté par la Commission en 2018 comprend dix indicateurs clés couvrant chaque phase du cycle de vie des produits ainsi que les aspects liés à la compétitivité. Tous les indicateurs sont régulièrement mis à jour et sont disponibles sur un site web dédié.
Certains États membres ont conçu des indicateurs supplémentaires de l’économie circulaire nationale, qui viennent donc compléter le panorama offert par le cadre de l’Union. Le Parlement européen, le Conseil, et le Comité économique et social européen ont aussi souligné le rôle d’autres indicateurs pour rendre compte d’éléments manquants de l’économie circulaire, tels que l’évaluation des flux de matières dans la symbiose industrielle et la prise en compte du capital naturel.
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Le plan d’action a pour la première fois encouragé une approche systémique à travers toutes les chaînes de valeur. Grâce à ce plan, la Commission a intégré pleinement les principes circulaires dans la production et la consommation des matières plastiques, la gestion de l’eau, les systèmes alimentaires et la gestion de certains flux de déchets. Cela a été rendu possible par le ferme soutien et la forte mobilisation des États membres, du Parlement européen, des entreprises et des citoyens. Le plan a aussi permis de faire un pas vers la réalisation du programme de développement durable à l’horizon 2030.
Le présent rapport présente les principaux résultats de la mise en œuvre du plan d’action. Il esquisse aussi les futurs défis qui nous attendent pour façonner notre économie et continuer à créer un avantage compétitif, afin d’ouvrir la voie à une économie neutre pour le climat dans laquelle la pression sur les ressources naturelles et les ressources en eau douce ainsi que sur les écosystèmes sera réduite au minimum. Le rapport est publié en réponse à une demande du Conseil de présenter «un rapport annuel actualisé sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre du plan d’action», demande également formulée par le Parlement européen. Un état complet de la mise en œuvre du plan d’action est présenté dans un document de travail des services de la Commission (SWD).
2Mettre en place une économie circulaire
2.1Processus de conception et de production circulaires
La conception a lieu au début du cycle de vie des produits et est essentielle pour garantir la circularité. Avec la mise en œuvre du plan de travail «Écoconception» 2016-2019, la Commission a une fois encore encouragé la conception circulaire des produits, ainsi que des objectifs en matière d’efficacité énergétique.
-Les mesures d’écoconception et d’étiquetage énergétique applicables à plusieurs produits comprennent à présent des règles sur les exigences en matière d’utilisation rationnelle des matériaux, telles que la disponibilité de pièces de rechange, la facilité de réparation, et la facilitation du traitement en fin de vie.
-La Commission a chargé les organismes européens de normalisation d’élaborer des critères horizontaux afin de mesurer la durabilité, la réutilisabilité, la réparabilité, la recyclabilité et la présence de matières premières critiques. Ces critères devraient être appliqués dans les normes existantes et à venir.
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Les produits et les services conçus de façon circulaire peuvent réduire l’utilisation des ressources et favoriser la réutilisation, la valorisation et la recyclabilité des matériaux en aval. Différentes politiques de l’Union abordent déjà l’utilisation rationnelle des ressources: outre la directive relative à l’écoconception et le règlement relatif à l’étiquetage énergétique, ces politiques incluent aussi des outils facultatifs, tels que les critères du label écologique de l’Union ou des marchés publics écologiques. Le document de travail des services de la Commission sur les politiques de produit, publié avec le présent rapport, examine les possibilités en vue de mieux articuler les divers outils de politique de produit qui existent au niveau de l’Union et leur contribution à l’économie circulaire. Il s’agit notamment d’envisager d’étendre la politique d’écoconception, une stratégie fructueuse pour les produits énergétiques, à des groupes de produits non énergétiques, et de continuer à soutenir le secteur de la réparation dans l’Union. Le document analyse aussi les possibilités dans d’autres secteurs, tels que les emballages, le textile et l’ameublement. Un travail de révision des exigences essentielles en matière d’emballage est en cours, dans le but d’améliorer la conception en vue d’une réutilisation et d’un recyclage de haute qualité des emballages.
La circularité est aussi synonyme d’adaptation des procédés industriels. La Commission a introduit des aspects de la circularité (consommation d’énergie et utilisation des matériaux, prévention des déchets, recyclage et réduction des produits chimiques dangereux) dans certains documents de référence sur les meilleures techniques disponibles (documents de référence MTD) au titre de la directive relative aux émissions industrielles, faisant de ceux-ci des normes de référence pour les États membres dans le cadre de l’octroi des permis aux installations industrielles. De plus, le résultat du bilan de qualité du système communautaire de management environnemental et d’audit (EMAS) a confirmé son potentiel à améliorer les résultats obtenus par les organisations en matière d’environnement.
Les petites et moyennes entreprises (PME) sont au cœur de la transition. Elles ont accès aux conseils du réseau Entreprise Europe et de l’EREK (European Resource-Efficiency Knowledge Centre) en vue de rationaliser l’utilisation de leurs ressources et d’améliorer leurs processus de production. De plus, la Commission a créé un réseau paneuropéen spécialement consacré aux technologies de production de pointe innovantes et est en train d’élaborer une base de connaissances pour la substitution des substances dangereuses préoccupantes. Les PME bénéficient aussi du programme pilote de vérification des technologies environnementales, un programme permettant aux concepteurs de technologies de prouver les performances annoncées de technologies innovantes et de gagner en crédibilité sur de nouveaux marchés.
2.2Responsabiliser les consommateurs
La transition vers une économie plus circulaire nécessite que les citoyens contribuent activement à changer les habitudes de consommation. À cet effet, le document de travail sur les politiques de produits expose dans le détail une approche stratégique visant à renforcer l’efficacité du label écologique de l’Union européenne afin d’offrir au consommateur des informations environnementales précises, conformément aux recommandations du bilan de qualité. Il présente aussi une évaluation détaillée de la phase pilote de l’empreinte environnementale.
Les méthodes de calcul de l’empreinte environnementale des produits (PEF) et de l’empreinte environnementale des organisations (OEF) mises au point par la Commission peuvent permettre aux entreprises de faire des allégations environnementales fiables, reproductibles et comparables. Ces méthodes permettent de détecter les points sensibles dans le domaine environnemental et d’aider les entreprises à rendre leur chaîne d’approvisionnement plus écologique et à devenir plus durables et plus circulaires. Les consommateurs pourront aussi faire des choix éclairés sur la base d’informations fiables.
Pendant cinq ans, environ 300 entreprises issues de 27 secteurs différents et plus de 2 000 acteurs concernés se sont attelés à tester ces méthodes, qu’ils considèrent comme une bonne pratique d’évaluation du cycle de vie.
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Des informations sur la durabilité et la réparabilité des produits peuvent aussi faire pencher les décisions d’achat vers des choix plus durables. Sur la base de l’expérience positive acquise au titre du règlement relatif à l’étiquetage énergétique, la Commission élabore actuellement un système de notation de la réparabilité des produits. Par ailleurs, afin de protéger le consommateur contre les produits défectueux, la proposition concernant certains aspects des contrats de ventes de biens, qui se trouve actuellement dans les dernières phases du processus législatif, prolonge le délai du renversement de la charge de la preuve, ce qui aidera le consommateur à appliquer sa garantie légale de droits.
Par ailleurs, la Commission a proposé de renforcer la protection des consommateurs contre les fausses allégations environnementales et les pratiques d’obsolescence prématurée grâce à de meilleures possibilités de recours individuel et collectif contre les pratiques commerciales déloyales. Cela complète les informations fournies dans les orientations révisées concernant la mise en œuvre et l’application de la directive relative aux pratiques commerciales déloyales.
Pour tirer parti du potentiel des pouvoirs publics à stimuler les marchés des produits et services circulaires, la Commission a adopté de nouveaux critères applicables aux marchés publics écologiques de l’Union et révisé les critères existants afin d’inclure des aspects de l’économie circulaire, et a encouragé leur utilisation au moyen de documents d’orientation et de sessions de formation. La Commission montre l’exemple dans ses propres marchés publics. Les services de la Commission à Bruxelles ont utilisé les critères applicables aux marchés publics écologiques dans 93 % de l’ensemble de leurs contrats d’une valeur supérieure à 60 000 EUR
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2.3Transformer les déchets en ressources
Des systèmes de gestion des déchets éprouvés et efficaces constituent un élément essentiel d’une économie circulaire. Afin de moderniser les systèmes de gestion des déchets dans l’Union et de consolider la position du modèle européen – l’un des plus efficaces au monde – un cadre législatif révisé relatif aux déchets est entré en vigueur en juillet 2018. Celui-ci inclut:
-de nouveaux taux de recyclage ambitieux mais réalistes;
-la simplification et l’harmonisation des définitions et des méthodes de calcul et la clarification du statut juridique des matières recyclées et des sous-produits;
-des règles renforcées et de nouvelles obligations en matière de collecte séparée (déchets biologiques, textiles et déchets dangereux produits par les ménages, déchets de construction et de démolition);
-des exigences minimales applicables aux régimes de responsabilité élargie des producteurs;
-des mesures renforcées pour la prévention et la gestion des déchets, notamment des déchets marins, des déchets alimentaires et des produits contenant des matières premières critiques.
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La Commission apporte un soutien aux États membres et coopère avec ceux-ci dans le cadre de la mise en œuvre de la législation relative aux déchets afin de mieux faire connaître et de mieux faire comprendre les possibilités qu’offre l’économie circulaire dans les États membres qui rencontrent le plus de difficultés à atteindre leurs objectifs de recyclage. Dans le cadre de visites ciblées menées par les commissaires dans les pays, des experts des différents États membres partageront leurs expériences et donneront des conseils pour atteindre au mieux les objectifs des politiques relatives aux déchets.
La Commission a clarifié la relation entre différents procédés de valorisation énergétique des déchets et la pertinence de ceux-ci en vue d’éviter la perte inutile de précieuses ressources mises en décharge ou incinérées. Par ailleurs, les États membres ont été encouragés à recenser les technologies de valorisation qui font une utilisation rationnelle de l’énergie et des matières, afin de mieux se servir des instruments économiques et d’améliorer la planification pour éviter la surcapacité d’incinération.
Une gestion écologique saine des déchets, à l’intérieur de l’Union et en dehors, est essentielle pour parvenir à une économie plus circulaire. Les opérateurs de gestion des déchets et les agents des douanes ont tiré profit d’une plus grande clarté dans le code des douanes de l’Union pour repérer plus facilement les flux de déchets. L’amélioration de l’échange de données électroniques a aussi contribué à une meilleure application du règlement concernant les transferts de déchets. Enfin, il a été proposé des obligations de collecte séparée des déchets issus des navires accostant dans les ports de l’Union pour faciliter une meilleure gestion des déchets.
2.4Boucler les boucles des matériaux valorisés
Le nouveau règlement relatif aux fertilisants, qui en est aux derniers stades du processus législatif, introduit des règles harmonisées applicables aux engrais organiques produits à partir de matières premières secondaires telles que les sous-produits agricoles et les déchets biologiques valorisés. Le nouveau règlement:
-réduira sensiblement d’importants obstacles à l’entrée sur le marché des produits plus durables et circulaires;
-inclut de nouvelles limites de substances dangereuses pour tous les engrais, y compris ceux issus de matières premières vierges, afin de réduire le risque de cycles de matières contenant des taux dangereux de certains éléments toxiques;
-inclut des critères de fin de statut de déchet et contribue ainsi au bon fonctionnement de l’interface entre les textes législatifs relatifs aux substances chimiques, aux produits et aux déchets et offre davantage de sécurité juridique aux investisseurs.
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Stimuler l’utilisation des matières premières secondaires est un des objectifs du plan d’action en faveur de l’économie circulaire. Sa réalisation, qui nécessite de comprendre les principales difficultés rencontrées par les opérateurs du marché, devrait s’appuyer sur un marché unique fort et efficace. Le système d’information sur les matières premières lancé en 2017 met en évidence les besoins en matière de connaissances dans des secteurs industriels stratégiques, et s’intéresse plus particulièrement au suivi du recyclage des matières pertinentes et à la disponibilité des données dans les secteurs clés.
La communication sur l’interface entre les textes législatifs relatifs aux substances chimiques, aux produits et aux déchets
a été à l’origine d’un vaste débat sur la façon de s’attaquer aux quatre principaux obstacles à l’utilisation sûre des matières premières secondaires. Une analyse préliminaire des résultats de la consultation
confirme un consensus entre les parties concernées quant à la pertinence des problèmes mis en évidence. Elle montre un fort soutien en faveur de l’amélioration de la traçabilité des substances et des flux d’information; d’une meilleure application et utilisation d’autres mesures afin de garantir des conditions égales aux opérateurs de l’Union et des pays tiers; d’une meilleure harmonisation et d’une reconnaissance mutuelle des critères de fin de statut de déchet; et d’un soutien au renforcement des aspects de l’économie circulaire dans les instruments tels que la directive relative à l’écoconception. De plus, trois études sur différents aspects de l’interface ont été lancées et fourniront davantage d’informations utiles en 2019 et au début de 2020.
L’accès aux informations sur la présence et la composition des substances dangereuses dans le flux de déchets est essentiel pour améliorer les techniques de démantèlement et de décontamination, qui facilitent la valorisation des déchets. L’Agence européenne des produits chimiques est en train de créer une base de données afin de rassembler des informations et d’améliorer les connaissances concernant les substances préoccupantes dans les produits et dans les produits lorsqu’ils deviennent des déchets. De plus, la plateforme de l’Union intitulée «Information for Recyclers» recueille et partage des informations sur la préparation à la réutilisation et au traitement des nouveaux équipements mis pour la première fois sur le marché de l’Union.
Les informations sur la composition des déchets peuvent aussi être utilisées pour permettre la valorisation efficace des matières premières critiques. Le rapport de la Commission sur les matières premières critiques et l’économie circulaire met en évidence des actions clés nécessaires pour exploiter ces bienfaits potentiels – extraction de composants essentiels en fin de vie, amélioration de la gestion des données sur les déchets miniers et mobilisation de fonds. Cependant, le rapport a aussi montré qu’il existait une ample marge de manœuvre pour améliorer le recyclage et faire en sorte que les matières premières critiques restent en Europe.
Afin de contribuer à renforcer la confiance dans les matières premières secondaires, la Commission et les organismes européens de normalisation ont entamé un processus de normalisation et ont, dans un premier temps, lancé une analyse complète des activités de normalisation dans ce domaine. Les organismes de normalisation travaillent aussi sur de possibles normes applicables au recyclage de haute qualité des déchets de piles, des déchets d’équipements électriques et électroniques et d’autres produits complexes en fin de vie qui permet une utilisation efficace des matières afin d’en tirer des matières premières critiques.
Le plan d’action vise aussi à stimuler le marché de l’eau réutilisée, afin de faire face au problème de la pénurie d’eau dans l’Union européenne. La Commission a proposé une législation spécifique fixant des exigences minimales applicables à l’eau réutilisée pour l’irrigation agricole. De plus, des pratiques de réutilisation de l’eau sont intégrées dans la planification et la gestion de l’eau ou dans la révision des documents de référence MTD pertinents.
2.5Une approche systémique: la stratégie de l’Union sur les matières plastiques dans une économie circulaire
La stratégie de l’Union sur les matières plastiques dans une économie circulaire est le premier cadre stratégique de l’Union qui adopte une approche fondée sur le cycle de vie spécifique d’une matière pour intégrer les activités de conception circulaire, d’utilisation, de réutilisation et de recyclage dans les chaînes de valeur des matières plastiques. Elle joue donc un rôle de catalyseur d’action. La stratégie expose un projet clair, avec des objectifs quantifiés au niveau de l’Union, afin, entre autres, que d’ici 2030, tous les emballages en plastique mis sur le marché de l’Union soient réutilisables ou recyclables.
La stratégie met aussi en évidence des actions clés permettant la mobilisation de multiples acteurs concernés et leur collaboration tout au long de la chaîne de valeur. Par exemple, l’invitation à prendre des engagements volontaires lancée par la Commission aux parties concernées a créé une forte dynamique dans l’industrie visant à stimuler l’utilisation de matières plastiques recyclées dans les produits. Cependant, comme l’indique le document d’accompagnement qui évalue ces engagements, davantage d’efforts sont nécessaires pour atteindre l’objectif fixé dans la stratégie, à savoir faire en sorte que, d’ici à 2025, 10 millions de tonnes de plastiques recyclés soient utilisées dans des produits neufs. Alors que les engagements pris par les fournisseurs de plastiques recyclés, s’ils sont respectés, atteignent cet objectif, la demande de plastiques recyclés, calculée sur la base des engagements de l’industrie, s’élèvera à environ 6,2 millions de tonnes par an d’ici 2025. L’alliance circulaire sur les matières plastiques récemment créée facilitera les prochaines étapes pour les entreprises en vue de combler cet écart et de contribuer à atteindre l’objectif susmentionné conformément à l’objectif de la stratégie consistant à améliorer la qualité et l’économie du recyclage des plastiques en Europe.
De grandes étapes clés ont déjà été atteintes sur la voie d’un recyclage de meilleure qualité des matières plastiques. Parmi celles-ci, le nouvel objectif de recyclage des emballages en plastique, fixé à 55 % en 2030, les obligations de collecte séparée et les améliorations apportées aux régimes de responsabilité élargie des producteurs. Ces derniers devraient faciliter la conception axée sur la recyclabilité par l’«écomodulation» des charges des producteurs. Les futures améliorations résulteront de la révision des exigences essentielles en matière d’emballage prévue pour la fin de 2020.
La stratégie crée des synergies entre les objectifs économiques et environnementaux. La preuve de l’existence de risques potentiels pour la santé et pour l’environnement liés à la pollution par les microplastiques justifie de restreindre l’utilisation des microplastiques ajoutés intentionnellement et de rassembler des connaissances sur la mesure et l’étiquetage dans le cas des microplastiques rejetés de façon involontaire. La Commission s’est aussi engagée à élaborer un cadre sur la biodégradabilité des plastiques, afin de garantir que la mise au point et l’utilisation de ces produits en plastique ne soient encouragées que lorsqu’elle est bénéfique pour l’environnement et n’interfère pas avec les systèmes de gestion des déchets ni ne compromet la sécurité alimentaire. Les actions à cet égard comprennent la communication d’informations sur la gestion de ces produits en fin de vie (par exemple le marquage des sacs en plastique compostables à domicile). D’autres synergies stratégiques, en particulier en combinaison avec les besoins de la recherche, sont aussi explorées dans le rapport sur l’économie circulaire des matières plastiques récemment publié.
La stratégie incite au changement au-delà des frontières européennes. Sur la base d’actions exemplaires, en particulier dans le domaine des plastiques à usage unique, le rôle moteur de l’Union dans les forums bilatéraux et multilatéraux a été essentiel pour maintenir la dynamique internationale autour des enjeux prioritaires en matière de plastiques, comme le montrent des initiatives telles que la plateforme mondiale des plastiques avec le PNUE et le futur partenariat international sur les déchets plastiques dans le cadre de la convention de Bâle. En parallèle, l’Union européenne soutient les pays en développement dans leurs efforts de lutte contre la pollution par les plastiques.
Les règles relatives aux articles en plastique à usage unique et aux engins de pêche
, qui concernent les dix objets les plus fréquemment retrouvés sur les plages de l’Union, aux installations de réception portuaire, et les propositions de la Commission concernant le contrôle des pêches placent l’Union à l’avant-garde de la lutte mondiale contre les déchets marins, qui est une des préoccupations majeures des citoyens de l’Union à l’égard de la pollution par les matières plastiques. Ces règles donnent aux entreprises de l’Union des occasions d’innover dans le domaine des produits, des matériaux, des technologies et des modèles d’entreprise en tenant compte du comportement des consommateurs et des autres options disponibles.
Ces ensembles de mesures adaptées, qui en sont aux phases finales de la procédure législative, comprennent:
-l’interdiction des produits à usage unique en plastique et des plastiques oxodégradables;
-des mesures visant à réduire la consommation de récipients et gobelets à usage alimentaire en plastique, et le marquage et l’étiquetage de certains produits;
-un objectif visant à incorporer 30 % de plastiques recyclés dans les bouteilles de boisson à compter de 2030 et 25 % dans les bouteilles PET à compter de 2025, ainsi qu’un objectif de collecte séparée de 90 % des bouteilles en plastique d’ici 2029 et l’introduction d’exigences de conception imposant d’attacher les bouchons aux bouteilles;
-des régimes de responsabilité élargie des producteurs qui couvrent le coût du ramassage des déchets, appliqués à des produits tels que les filtres pour les produits du tabac et les engins de pêche;
-des mesures visant à réduire les déchets plastiques des navires, telles que la création d’un forfait pour les déchets des navires;
-des obligations de notification améliorées pour les engins de pêche perdus et des obligations de marquage et de contrôle des engins de pêche destinés à la pêche récréative.
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3Accélérer la transition
3.1Innovation et investissements
Pour accélérer la transition vers une économie circulaire, il est nécessaire d’investir dans l’innovation et de soutenir l’adaptation de la base industrielle. Au cours de la période 2016-2020, la Commission a intensifié les efforts dans les deux directions et consacré un total de plus de 10 milliards d’EUR de fonds publics à la transition, dont:
-1,4 milliard d’EUR provenant d’Horizon 2020 jusqu’en 2018 (dans des domaines tels que les industries de transformation durables, la gestion des déchets et des ressources, les systèmes de production en circuit fermé ou la bioéconomie circulaire), y compris 350 millions d’EUR destinés à intégrer le plastique dans une dynamique circulaire. La Commission a publié un inventaire des projets pertinents pour l’économie circulaire financés au titre d’Horizon 2020 entre 2016 et 2018;
-au moins 7,1 milliards d’EUR provenant de la politique de cohésion (1,8 milliard d’EUR pour l’adoption de technologies éco-innovantes dans les PME et 5,3 milliards d’EUR pour soutenir la mise en œuvre de la législation de l’Union relative aux déchets); en outre, une aide significative est disponible grâce à la spécialisation intelligente pour une innovation et un déploiement axé sur le marché;
-2,1 milliards d’EUR provenant de mécanismes de financement tels que le Fonds européen pour les investissements stratégiques et Innovfin;
-au moins 100 millions d’EUR investis, dans le cadre de LIFE, dans plus de 80 projets contribuant à une économie circulaire.
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Pour stimuler davantage encore les investissements, la plateforme d’aide au financement de l’économie circulaire a publié des recommandations afin d’améliorer la bancabilité des projets liés à l’économie circulaire, de coordonner les activités de financement et de partager les bonnes pratiques. La plateforme collaborera avec la Banque européenne d’investissement afin d’apporter une assistance financière et d’exploiter les synergies avec le plan d’action pour financer la croissance durable.
Outre le financement de la transition, la Commission s’est aussi attaquée aux obstacles réglementaires susceptibles d’entraver l’innovation circulaire grâce à deux accords d’innovation pilotes lancés en 2016. Sur la base de l’expérience de ces deux accords pilotes, la Commission cherche à présent à tester l’approche dans d’autres secteurs.
La circularité devrait rester un pilier de la politique de cohésion au cours de la période de programmation 2021-2027. La proposition de la Commission relative aux nouveaux Fonds européen de développement régional et Fonds de cohésion fait de l’économie circulaire une priorité dans le cadre des efforts de l’Union en vue de parvenir à une Europe plus écologique et plus intelligente, et exclut les investissements dans les décharges et dans les installations de traitement des déchets résiduels, conformément à la hiérarchie des déchets.
3.2 Forte mobilisation des acteurs concernés
La mobilisation des acteurs concernés est vitale pour la transition. L’approche systémique du plan d’action a donné aux pouvoirs publics, aux acteurs économiques et à la société civile un cadre à reproduire afin de favoriser les partenariats entre les secteurs et tout au long de la chaîne de valeur.
Les actions de l’Union ont inspiré des débats nationaux sur l’économie circulaire et une majorité des États membres a adopté ou est en train d’adopter des stratégies nationales de transition vers une économie circulaire. Ces cadres sont souvent reproduits aux niveaux régional et local, afin de rapprocher l’économie circulaire des citoyens et des entreprises. Le rôle de la Commission dans la promotion de cette approche systémique et dans l’inscription de l’économie circulaire parmi les enjeux prioritaires européens et internationaux a aussi été reconnu au Forum économique mondial 2019, lors duquel la Commission a reçu le prix Circulars dans la catégorie «secteur public».
La plateforme des acteurs européens de l’économie circulaire réunit de nombreux réseaux et initiatives sur l’économie circulaire. Elle fait office de multiplicateur pour les bonnes pratiques des secteurs public et privé. Au cours de sa première année d’activité
, la plateforme a rassemblé et diffusé plus de 300 exemples de bonnes pratiques, de stratégies et de rapports.
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Les parties concernées servent de moteur à la transition dans différents secteurs. Par exemple, la mobilisation de l’industrie a conduit à l’adoption du protocole et des lignes directrices de l’Union concernant les déchets de construction et de démolition, dans l’objectif final de renforcer la confiance dans le processus de gestion des déchets et dans la qualité des matières recyclées dans le secteur. De plus, les entreprises se sont engagées à améliorer les performances des bâtiments en matière de ressources et sont en train d’expérimenter Level(s), le premier cadre d’indicateurs de mesure de la durabilité du secteur, et ce dans plus de 130 projets à travers l’Europe.
De même, les acteurs clés des secteurs public et privé tout au long de la chaîne de valeur travaillent ensemble au sein de la plateforme de l’Union consacrée aux pertes et gaspillages alimentaires afin d’accélérer les progrès de l’Union dans la réalisation de l’objectif de développement durable visant à réduire de moitié le gaspillage alimentaire par habitant d’ici 2030. La plateforme a permis à la Commission de réaliser des progrès substantiels dans la mise en œuvre d’actions de prévention du gaspillage alimentaire, notamment des lignes directrices visant à faciliter les dons alimentaires, l’élaboration de méthodes de mesure du gaspillage alimentaire et l’amélioration des pratiques de marquage des dates.
Les parties concernées exportent aussi la transition en dehors de l’Europe. Les entreprises européennes participent régulièrement à des missions conjointes sur l’économie circulaire, ce qui renforce les liens entre les institutions européennes, les ONG, les entreprises et les parties concernées dans les pays tiers.
4 Défis pour l’avenir
L’économie circulaire est à présent une mégatendance mondiale irréversible. Il reste cependant beaucoup à faire pour intensifier le mouvement au niveau de l’Union et au niveau mondial, boucler complètement la boucle et profiter de l’avantage compétitif qu’elle confère aux entreprises de l’Union. L’interaction avec les parties concernées laisse entendre que des domaines qui ne sont pas couverts par le plan d’action pourraient être explorés afin de compléter l’agenda circulaire.
Si l’UE souhaite conserver son rôle moteur dans la conception et la fourniture de produits et de services circulaires et garder son avance dans les moyens renforcés qu’elle offre aux consommateurs d’adopter des modes de vie plus durables, de nouvelles actions seront nécessaires. Comme cela et proposé dans le document de réflexion «Vers une Europe durable à l’horizon 2030», il faut faire de l’économie circulaire l’élément central de la stratégie industrielle de l’UE, en favorisant la circularité dans de nouveaux domaines et secteurs; l’évaluation des cycles de vie des produits devrait devenir la norme et le cadre relatif à l’écoconception devrait être élargi autant que possible. Si l’on veut que l’Union récolte tous les bénéfices de la transition vers l’économie circulaire, il convient d'accélérer le rythme des travaux entamés en ce qui concerne les produits chimiques, un environnement non toxique, l’éco-étiquetage et l’éco-innovation, les matières premières critiques et les engrais. De même, les consommateurs devraient avoir la possibilité de faire des choix en connaissance de cause et le secteur public devrait intensifier les efforts en la matière au moyen de marchés publics durables.
Avec le soutien de la Commission, les États membres – notamment dans les régions qui présentent un risque avéré de ne pas atteindre les objectifs de recyclage pour 2020 ou qui connaissent des difficultés spécifiques – et les entreprises devront intensifier leurs efforts pour mettre en œuvre la législation relative aux déchets, dans sa version révisée, et développer des marchés pour les matières premières secondaires. L’objectif est de garantir que les matières qui retournent dans l’économie sont rentables et sûres pour les citoyens comme pour l’environnement.
L’Union devrait également continuer à soutenir la recherche, l’innovation et l’investissement dans les secteurs prioritaires mis en avant dans le plan d’action. Conformément à l’exemple de la stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie circulaire, de nombreux autres secteurs ayant une forte incidence sur l’environnement et un solide potentiel de circularité, tels que les TI, l’électronique, la mobilité, l’environnement bâti, l’exploitation minière, l’ameublement, l’alimentation et les boissons ou le textile, pourraient bénéficier d’une approche globale analogue axée sur la circularité. Le potentiel du marché unique de l’Union n’a encore été pleinement exploité dans aucun d’entre eux.
La mise en œuvre de la stratégie pour une bioéconomie récemment actualisée et du cadre pour les énergies renouvelables révisé sera une étape supplémentaire vers l’utilisation circulaire des ressources biologiques, dans le respect des limites biologiques et en contribuant à mettre un terme à la perte de biodiversité.
Comme il est indiqué dans la vision stratégique à long terme pour une économie prospère, moderne, compétitive et neutre pour le climat à l’horizon 2050, la transition vers une économie circulaire et une économie neutre pour le climat doit être poursuivie ensemble, sur la base d’une ambition industrielle forte et en tirant parti de la position pionnière des entreprises de l’Union dans ces domaines. Les nouveaux modèles d’entreprise circulaires, le recyclage, l’utilisation rationnelle de l’énergie et des ressources et les nouvelles habitudes de consommation ont un potentiel considérable de réduction des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Le fait d’encourager cette approche conjointe dans les entreprises (notamment dans les PME) et auprès de la population peut dans le même temps réduire les coûts de production et favoriser de nouvelles formes d’interactions commerciales telles que la symbiose industrielle. De plus, la circularité et la durabilité de l’approvisionnement, de l’utilisation et du traitement des matières premières (en particulier des matières critiques) seront essentielles pour garantir la sécurité d’approvisionnement nécessaire, des conditions égales à celles des concurrents industriels et la position dominante de l’Union européenne sur la scène mondiale dans la production de technologies clés génériques et faibles en carbone.
L’intelligence artificielle et la numérisation ont le potentiel d’optimiser l’utilisation de l’énergie et des ressources et de rendre l’information disponible afin de favoriser les modèles d’entreprise circulaires et les choix de consommation responsables. Cependant, une économie numérique circulaire doit avoir une incidence positive nette sur les ressources et lutter contre d’importantes difficultés, telles que le risque d’alimenter des habitudes de consommation non durables, de raccourcir la durabilité des produits intelligents et de compromettre la sécurité des données commerciales sensibles.
Par-dessus tout, la transition vers une économie circulaire, renforce la cohésion sociale et territoriale et garantit une répartition équilibrée d’emplois répondant aux normes de santé et de sécurité, ce qui permet d’engendrer une croissance équitable et durable.
5Conclusions
La mise en œuvre du plan d’action en faveur d’une économie circulaire a accéléré la transition vers une économie circulaire en Europe. Dans le même temps, une vision commune plus forte de l’économie circulaire ne peut que stimuler les efforts entrepris en vue de moderniser la base industrielle de l’Union afin de lui garder son avantage concurrentiel au niveau mondial ainsi que de préserver et de rétablir son capital naturel.
Ces éléments et les mesures réussies du plan d’action figurant dans le présent rapport peuvent faciliter et orienter les futurs travaux des institutions européennes, des États membres, des entreprises et des partenaires sociaux.