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Document 52011IE0355

Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Accès aux matières premières secondaires (ferraille, papier recyclé, etc.)» (avis d'initiative)

OJ C 107, 6.4.2011, p. 1–6 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

6.4.2011   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 107/1


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Accès aux matières premières secondaires (ferraille, papier recyclé, etc.)» (avis d'initiative)

2011/C 107/01

Rapporteur: M. ZBOŘIL

Corapporteur: M. GIBELLIERI

Le 15 juillet 2010, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29 paragraphe 2 de son Règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème

«Accès aux matières premières secondaires (ferraille, papier recyclé, etc.)».

La commission consultative des mutations industrielles, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 13 janvier 2011.

Lors de sa 469e session plénière des 16 et 17 février 2011 (séance du 16 février 2011), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 88 voix pour, et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le Comité apprécie grandement les analyses des différentes associations industrielles qui expliquent la situation actuelle et présentent des scénarios futurs probables susceptibles de générer de graves déséquilibres entre l'offre et la demande sur le marché des matières premières secondaires.

1.2   Le CESE fait également remarquer que la disponibilité des matières premières en tant que telle est considérée et traitée comme une question stratégique dans plusieurs pays (États Unis, Chine). Bien sûr, les matières premières secondaires ne sont pas exclues d'un régime plus strict similaire dans ces pays. Le CESE se félicite dès lors que l'utilisation rationnelle des matières soit devenue une priorité majeure de la DG Environnement.

1.3   L'accès aux matières premières nécessaires diffère d'un secteur industriel à l'autre. Il en va de même des flux de matières premières eux-mêmes, selon leur nature et les modes d'utilisation traditionnels des matières premières par les différentes industries. Dans certains cas, notamment dans les secteurs du verre et de l'acier, l'objectif d'utilisation rationnelle des matières pourrait être servi simplement en ajustant et en équilibrant les systèmes et processus de production existants à l'aide de mesures incitatives bien conçues. Le CESE tient cependant à signaler que ces incitants ne peuvent porter atteinte au nombre des emplois dans les industries du recyclage et de transformation ou à leur qualité.

1.4   Des quantités importantes de matières premières secondaires collectées sont actuellement exportées alors qu'elles font cruellement défaut dans les industries de base et de transformation. Cette tendance met gravement en péril l'emploi dans toutes les industries de transformation.

1.5   La pression qui résulte des volumes excédentaires de déchets collectés dans le cadre des systèmes de collecte spécialisés est souvent résolue simplement en vendant sans discernement ces catégories de déchets collectés, sans traitement supplémentaire et sans veiller à garantir une utilisation finale au sein de l'Union européenne.

1.6   Malheureusement, l'on a souvent recours à des pratiques commerciales illégales pour contourner le contrôle direct des flux de matières premières secondaires importants. Par exemple, de fausses déclarations en douane classant des déchets dans la catégorie des marchandises de seconde main sont utilisées pour éviter le règlement concernant les transferts de déchets dans le cas de flux de matières premières secondaires spécifiques.

1.7   De cette manière, les flux de déchets collectés pour le compte des contribuables européens ne génèrent pas les bénéfices escomptés mais réduisent plutôt la compétitivité des industries concernées en limitant l'approvisionnement en matières premières secondaires ou en le rendant inutilement plus coûteux.

1.8   Dans le même temps, il est évident que les nombreuses réglementations spécifiques régissant le recyclage n'ont pas été conçues de façon cohérente. Elles ont tendance à n'aborder que certains aspects spécifiques et isolés de la collecte et du recyclage sans prendre en compte les forces du marché actives dans les systèmes et les processus.

1.9   La réglementation REACH est également une source de problèmes pour certains secteurs du recyclage étant donné l'absence d'une distinction claire entre marchandises en fin de vie (déchets) et marchandises de seconde main. Pour cette raison, ce concept, qui partait d'une bonne intention, a malheureusement manqué son objectif. Certains secteurs concernés, comme l'industrie du papier, ont réussi à débloquer la situation tandis que d'autres recherchent toujours des solutions viables. Ce cas illustre bien l'incohérence du cadre réglementaire, que l'industrie avait pourtant soulignée préalablement!

1.10   La tension existant entre les forces du marché et le cadre réglementaire actuel devrait faire l'objet d'une analyse approfondie afin de dégager des résultats plus équilibrés. L'une des solutions possibles serait d'appliquer des droits à l'exportation afin de se prémunir contre le risque de perdre des matériaux précieux. De telles mesures devraient naturellement être conformes aux règles de l'OMC. L'UE devrait éventuellement négocier avec l'OMC des modalités d'urgence établissant des conditions claires et transparentes pour les restrictions et les droits à l'exportation concernant les déchets revêtant une importance stratégique.

1.11   Une autre option serait de s'entendre sur des objectifs de recyclage flexibles, qui tiennent compte des évolutions réelles du marché: en cas de déclin du marché (diminution de la demande), les objectifs de recyclage pourraient être revus à la baisse et, dans les périodes de forte croissance et de demande élevée, revus à la hausse. Dans le même temps, il y a lieu d'envisager des moyens intelligents de garantir le maintien de niveaux d'emploi critiques tout au long du cycle conjoncturel et de la chaîne de valeur dans les secteurs concernés tels que les déchets d'emballage, le papier, etc.

1.12   Enfin, une autre option consisterait à faire en sorte que les objectifs/quotas de recyclage correspondent aux seuls volumes de déchets susceptibles d'être réutilisés au sein de l'UE, sans inclure les déchets ne pouvant être exploités dans les installations européennes et appelés à être vendus à l'étranger. Il conviendrait toutefois d'assortir cette mesure d'un réajustement des objectifs/quotas afin de les faire correspondre aux capacités réelles de recyclage de l'Union européenne.

1.13   Le CESE soutient résolument la demande adressée par l'industrie à l'UE d'élaborer une politique globale et cohérente, visant à garantir un accès aux matières premières et une utilisation des ressources qui soient durables à long terme. Cette politique devrait assister l'industrie européenne dans ses efforts en faveur d'une utilisation des ressources «du berceau au berceau». Il convient de favoriser le recyclage en assurant la sécurité juridique ainsi que des conditions de concurrence égales, et en supprimant les formalités administratives inutiles. Cette exigence essentielle doit pouvoir s'appuyer sur une gamme complète de réglementations, de directives et de décisions cohérentes et équilibrées.

1.14   La réglementation européenne en matière de déchets prévoit des obligations légales pour tous les acteurs des flux de déchets et cette responsabilité devrait être strictement vérifiée et réclamée par les autorités respectives. La formation de leur personnel est une condition préalable essentielle à la lutte contre les pratiques illégales de certains acteurs peu scrupuleux, surtout dans le commerce international.

1.15   Chaque élément de la politique européenne de lutte contre le changement climatique devrait tenir compte des bénéfices environnementaux générés par les matières premières secondaires. Il importe également d'éviter les incohérences: par exemple, le système communautaire d'échange de quotas d'émission ne reflète pas les économies d'énergie et de carbone résultant de l'utilisation de matières premières renouvelables dans d'autres secteurs industriels et de la construction et fait peser sur ceux-ci des charges complémentaires inutiles.

1.16   Enfin, il importe de gérer un cadre aussi complexe dans le contexte du dialogue social sérieux qui est en cours, afin d'encourager la création d'emplois nouveaux et de qualité d'un bout à l'autre des chaînes de valeur concernées.

2.   Introduction

2.1   La durabilité de l'accès aux matières premières et de leur utilisation est au cœur de la politique de développement durable de l'Union européenne. Elle constitue le fondement de la compétitivité actuelle et future des industries manufacturières de l'UE (1). Les chaînes d'approvisionnement de matières premières - secondaires ou non - sont d'authentiques secteurs économiques qui créent des emplois et de la richesse en Europe et le recyclage est une activité économique qui contribue considérablement au PIB de l'UE. La collecte de matières premières ou de produits utilisés implique les citoyens, les communes et les pouvoirs publics, qui ont investi dans la mise en place de systèmes efficaces visant à répondre à la demande croissante de durabilité à long terme.

2.2   La complémentarité entre matières premières et matières premières secondaires doit être reconnue: si les matières premières secondaires constituent une manière écologiquement performante de réintroduire dans l'économie des ressources précieuses, elles ne suffisent cependant pas (encore) pour satisfaire la demande croissante de matériaux (papier, métaux et minerais). Les deux types de matières premières sont nécessaires et complémentaires. L'amélioration des systèmes de collecte et de l'exploitation des matières premières secondaires au sein de l'UE contribuera à réaliser les objectifs de la stratégie Europe 2020.

2.3   L'industrie demande à l'UE d'élaborer une politique globale et cohérente, visant à garantir un accès aux matières premières et une utilisation des ressources qui soient durables à long terme. Cette politique devrait assister l'industrie européenne dans ses efforts en faveur d'une utilisation des ressources «du berceau au berceau» (économie circulaire, recyclage permanent). L'initiative «Matières premières», la stratégie thématique pour la prévention et le recyclage des déchets, la stratégie thématique sur l’utilisation viable des ressources naturelles et l'initiative phare lancée par le commissaire Potočnik, Une Europe efficace dans l’utilisation des ressources, sont autant d'initiatives interdépendantes qui devraient être cohérentes et intégrées. Il conviendrait de se pencher également sur d'autres initiatives telles que Production et consommation durables, la directive-cadre sur les déchets ou d'autres politiques liées au recyclage et à l'utilisation des ressources.

3.   Identification des principaux flux de matières premières secondaires  (2)

3.1   Plusieurs types de déchets – comme les débris ferreux et non ferreux, les déchets d'emballage en carton ou en papier, le verre – font déjà, traditionnellement et de longue date, l'objet d'un recyclage dans le cadre d'un circuit plus ou moins fermé. Ces industries spécifiques ne pourront survivre sans une offre constante de matériaux de récupération et de produits usagés. En comparaison de ces déchets traditionnels, d'autres matériaux, comme les plastiques, sont relativement nouveaux dans le recyclage. Dans leur cas, le processus de réutilisation des matériaux n'aboutit pas nécessairement à un circuit fermé.

3.2   Les caractéristiques propres au recyclage des principales matières premières secondaires prédéterminent les flux et les acteurs qui leurs sont propres dans leurs chaînes de valeur.

3.2.1   Déchets de fer et d'acier: en général, le recyclage des déchets de fer et d'acier comprend la collecte, le tri, la mise en balles, l'empaquetage, le découpage, le cisaillement, le broyage et/ou le calibrage, et finalement la fusion à l'aciérie. Les débris de métaux ferreux sont collectés, séparément ou non, avant d'être triés sur le chantier de récupération, pour être ensuite vendus aux installations de traitement ou envoyés directement à l'aciérie. Une fois les déchets arrivés à l'installation de traitement, on sépare différents types de métaux et on les prépare à être broyés/calibrés. Le broyage et le calibrage sont souvent indispensables à une étape ultérieure de séparation. Dans le cas de l'acier inoxydable, des morceaux plus grands sont collectés séparément ou triés sur le chantier de récupération avant d'être broyés. Les particules d'acier inoxydable de plus petite taille sont séparées grâce à des processus de séparation en plusieurs étapes. À l'aciérie, les déchets de fer et d'acier sont généralement amenés directement aux fours.

3.2.1.1   Le secteur européen de la récupération de l'acier (au stade du traitement) est relativement concentré, avec sept entreprises qui assurent la livraison de 40 % de la quantité totale des déchets d'acier livrée aux aciéries. Selon le Bureau international de la récupération et du recyclage (BIR) et la Fédération européenne de récupération et du recyclage des ferrailles (EFR), l'UE-27 compterait environ 42 000 parcs à ferraille. Le secteur estime que parmi ceux-ci, 250 ont le statut d'une grande entreprise et 9 000 sont des entreprises de taille moyenne à grande qui traitent plus de 120 000 tonnes par an. Le reste, approximativement 36 000 entreprises, sont de taille moyenne et petite.

3.2.1.2   Le système de collecte peut varier selon le type de produits et le pays concernés. Les produits en fin de vie de grande taille et ceux qui sont fabriqués en grandes quantités, comme les produits qui proviennent de constructions ou de démolitions, sont généralement amenés directement au chantier à ferraille ou à l'installation de traitement. Tant la directive sur les véhicules hors d'usage que la directive sur les déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE) prévoient que la responsabilité de la récupération, et donc de la collecte des déchets, incombe aux producteurs. Les produits de petite taille comme les matériaux d'emballage sont collectés par les autorités locales, ce qui veut dire que, dans ce cas, l'industrie de la ferraille n'en est pas responsable. Néanmoins, plusieurs initiatives ont été lancées par le secteur, s'agissant notamment des boîtes de boissons usagées, par exemple des centres de collecte, des terminaux de déchets, où les boîtes en acier et en aluminium sont séparées et emballées pour le transport vers les installations de traitement ou les aciéries.

3.2.1.3   La ferraille est l'une des rares matières premières secondaires pour lesquelles l'Europe peut espérer une disponibilité constante, voire un léger surplus. Le commerce de la ferraille au sein de l'UE ainsi que les importations et les exportations en provenance et vers d'autres pays sont établis depuis des décennies. Il est difficile d'estimer dans l'UE la quantité totale de ferraille transportée. Les estimations relatives aux importations et aux exportations s'élèvent quant à elles (en 2008) respectivement à 5,3 millions et à 12,9 millions de tonnes par an, tandis que la consommation totale de ferraille a atteint 112 millions de tonnes par an la même année.

3.2.2   Les débris non ferreux et les autres flux de déchets contenant ce type de métaux: en comparant cette catégorie des non-ferreux avec le fer et l'acier, on constate une variation bien plus importante (a) dans les métaux concernés, (b) dans les ressources disponibles et (c) dans les méthodes à utiliser pour séparer et extraire certains métaux particuliers des flux de déchets. Les métaux les plus importants, également en termes de volume, sont l'aluminium, le zinc, le plomb et le cuivre. Les flux de déchets contiennent aussi des métaux comme l'étain et des métaux précieux, qui peuvent être extraits à l'aide des méthodes appropriées.

3.2.2.1   Les systèmes de collecte sont identiques ou similaires à ceux qui sont utilisés pour la ferraille. Pour obtenir de la ferraille de récupération de bonne qualité à partir de produits en fin de vie (véhicules hors d'usage, DEEE), des technologies sophistiquées sont utilisées. En revanche, les métaux non ferreux de base sont extraits des flux de déchets avec un taux de récupération très élevé et des taux d'utilisation également très élevés.

3.2.2.2   Les cendres et les scories sont également importantes pour la récupération de métaux non ferreux qui nécessite des technologies spécifiques. Les déchets miniers dans les régions minières de l'UE contiennent des ressources largement inexploitées de ce genre de métaux. Bien que ces déchets (3) ne soient pas couverts par la réglementation européenne générale sur les déchets, leur exploitation, pour peu qu'elle soit économiquement réalisable, ne devrait pas être négligée.

3.2.3   Papier recyclé: l'industrie papetière est un secteur qui dès l'origine a été basé sur des ressources renouvelables et le recyclage. Les chiffons récoltés ont constitué la première matière première utilisée dans la fabrication du papier. À ce jour, le recyclage du papier s'est imposé relativement comme une évidence et son utilisation matérielle a été prédominante. De façon caractéristique (et similaire à ce qui prévaut dans le cas des métaux ferreux), le recyclage du papier s'appuie sur deux ressources: le papier récupéré auprès des industries (les secteurs du conditionnement et de l'impression notamment) et les déchets (municipaux) résidus de la consommation. Les papiers triés sont privilégiés, c'est pourquoi il importe de soumettre les déchets municipaux à un processus de séparation du papier utilisé et à diverses opérations élémentaires de tri.

3.2.3.1   Les flux de matériaux ont subi de plein fouet la récente récession: l'utilisation du papier récupéré a connu une baisse de 7,6 %, à 44,9 millions de tonnes, en 2009. Pour la première fois, la collecte de papier a baissé, de 3,6 %, à 56,6 millions de tonnes, tandis que la consommation de papier s'est contractée de 10,1 % sur la même période. Les exportations de papier récupéré vers des pays non membres de l'UE, la Norvège et la Suisse ont continué d'augmenter pour atteindre 12,8 millions de tonnes. 96,3 % du total de ces exportations étaient destinés aux marchés asiatiques, essentiellement à la Chine (71,4 % des exportations européennes). Des suites des évolutions observées au cours de cette année exceptionnelle, le taux de recyclage a fait un bond pour atteindre le niveau record de 72,2 % en 2009, comparé à 66,7 % l'année précédente. Il se peut qu'un revirement de tendance se présente de manière temporaire quand l'économie se rétablira, étant donné que le secteur du recyclage pourrait ne pas être immédiatement à même de suivre le rythme de la relance de la consommation de papier. Grâce aux développements récents dans la structure du secteur, le papier recyclé représente 44,2 % et la pulpe de bois 40,4 % des fibres utilisées dans la fabrication du papier dans les pays membres de la Confédération des industries papetières européennes.

3.2.4   Verre: le verre peut être recyclé plusieurs fois à 100 %, sans perte de qualité, pour produire un autre récipient en verre. Le verre récupéré est utilisé pour fabriquer du verre nouveau de la même qualité. Cela fait du verre un authentique matériau de recyclage «du berceau au berceau». Près de 90 % des déchets de verre peuvent être utilisés pour fabriquer de nouveaux récipients en verre; la seule véritable limite au recyclage aujourd'hui est la quantité de verre récupéré et la disponibilité du verre usagé en Europe.

3.2.4.1   Le système de recyclage du verre est assez simple. La majorité du verre recyclé provient des déchets de conditionnement (via les bulles à verre) et une petite partie est récupérée dans les déchets de construction (verre plat). Le taux moyen de collecte du verre de conditionnement aux fins de recyclage atteint 65 % pour les pays de l'UE-27. Près de 11,5 millions de tonnes d'emballage en verre ont été récoltées à travers l'Europe (Norvège, Suisse et Turquie comprises) en 2008.

3.2.4.2   Dans ce domaine, le défi est de parvenir à recycler les 7 millions de tonnes de verre restantes, mises sur le marché en 2008 et non encore recyclées. Il est primordial d'améliorer le recyclage et de soutenir les systèmes de recyclage dignes de ce nom dans l'Union européenne.

3.2.4.3   Les systèmes de collecte et de valorisation du verre plat et du verre provenant de véhicules retirés de la circulation n'ont pas été à ce jour suffisamment développés. Il en résulte que cette précieuse ressource demeure toujours surtout un fardeau pour l'environnement.

3.2.5   Les déchets plastiques représentent environ 25 % de l'ensemble des déchets solides accumulés dans les décharges. Étant donné la résistance des matières plastiques à la dégradation, le processus de décomposition nécessite beaucoup de temps après le dépôt aux immondices. La combustion du plastique aux fins de valorisation énergétique doit s'effectuer de manière contrôlée dans des installations adaptées, compte tenu des risques élevés liés aux émissions qui en résultent.

3.2.5.1   Les grands secteurs consommateurs de plastique sont également les principales sources de déchets plastiques: le conditionnement (38,1 %), les ménages (22,3 %) et la construction (17,6 %). Les emballages produits par le secteur de la distribution représentent plus de 80 % des déchets plastiques pouvant être collectés (potentiellement). La collecte et le traitement des déchets plastiques issus de déchets ménagers mélangés constituent l'une des fractions de déchets les plus difficiles à gérer. La majorité des plastiques utilisés dans la construction le sont pour une longue période.

3.2.5.2   Une partie des déchets plastiques, comme les emballages alimentaires et les plastiques mélangés à d'autres matériaux, ne peut être recyclée étant donné que le nettoyage du plastique contaminé consommerait une grande quantité d'énergie et que son coût dépasserait dès lors la valeur des produits. Ces déchets peuvent néanmoins être exploités à des fins de valorisation énergétique.

3.2.5.3   L'UE-27 est exportatrice nette de déchets, débris et rognures de plastique. Depuis 1999, l'écart entre les importations et les exportations n'a cessé de se creuser. Après une légère hausse entre 1999 et 2002, les exportations ont grimpé en flèche entre 2002 et 2006, pour atteindre 2,1 millions de tonnes. De 1999 et 2006, les importations sont passées de 55 000 à 256 000 tonnes.

3.2.5.4   S'agissant des fibres discontinues de polyester, les PET recyclés représentent 70 % des matières premières traitées dans l'UE. La disponibilité de bouteilles en polyester est dès lors cruciale. Cependant, les producteurs européens sont confrontés aujourd'hui à de sérieux problèmes causés par la tendance croissante des opérateurs économiques à expédier les PET vers l'Extrême-Orient et surtout vers la Chine, sous la forme de paillettes (fragments de bouteilles broyés) ou de bouteilles emballées. Ce pays procède actuellement à la levée des restrictions à l'importation sur les déchets de PET afin de renforcer encore le flux de sortie de cette importante matière première secondaire en provenance de l'UE.

4.   Cadre juridique du recyclage

4.1   Réglementation directe dans l'UE

4.1.1   Il convient de favoriser le recyclage en améliorant les infrastructures de collecte, en assurant la sécurité juridique ainsi que des conditions de concurrence égales, et en supprimant les formalités administratives inutiles. Cette exigence essentielle doit pouvoir s'appuyer sur une gamme complète de réglementations, de directives et de décisions cohérentes et équilibrées. Si la directive-cadre relative aux déchets (2008/98/CE) est un pas dans la bonne direction, elle doit être considérée comme une première étape nécessitant des évaluations de terrain régulières et les ajustements qui en découlent.

4.1.2   Parmi les autres actes législatifs majeurs figurent la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d'emballage, la directive 2000/53/CE sur les véhicules hors d'usage (VHU), le règlement (CE) no 1013/2006 concernant les transferts de déchets et la directive 2002/96/CE relative aux déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE). Les directives mentionnées ci-avant fixent des objectifs de recyclage de façon arbitraire, ce qui contribue à perturber le libre marché des matières premières secondaires. Compte tenu des modifications et des amendements presque constants, il y a lieu d'accorder une attention permanente aux retombées de ce cadre juridique.

4.2   Réglementation indirecte: les processus de récupération et de recyclage ne sont pas régis uniquement par le large éventail de réglementations relatives aux déchets. Il existe d'autres restrictions et contrôles provenant de la réglementation régissant certains secteurs spécifiques ou l'industrie en général. Le plus important dans ce domaine sont les retombées du règlement REACH (CE 1907/2006) et de la politique européenne de lutte contre le changement climatique.

4.2.1   Dans le cas de REACH, les déchets ne sont pas directement visés mais une substance ou un mélange récupéré peut relever de REACH s'il satisfait au critère de la «fin de la qualité de déchet». La Commission s'est penchée sur le problème et des groupes de travail techniques compétents ont proposé des suggestions plus ou moins satisfaisantes pour sortir de l'impasse. Cependant, des incertitudes demeurent et des études très utiles sont disponibles au CCR-IPTS de la Commission à Séville, en plus des informations consultables auprès de l'Agence européenne des produits chimiques, qui sont susceptibles de contribuer à résoudre le problème. Néanmoins, la menace de l'enregistrement n'est pas pleinement écartée, même quand l'enregistrement ne peut s'accompagner d'aucun bénéfice.

4.2.2   La politique européenne de lutte contre le changement climatique devrait contribuer à l'émergence d'une série de mesures incitatives qui permettront à la société planétaire de passer de manière cohérente et durable des sources d'énergie primaires fossiles à des sources d'énergie alternatives. Le Programme européen sur le changement climatique se compose de différents éléments, censés être intégrés, mais malheureusement, cette intégration relève davantage du discours que de la réalité. Certains de ces éléments ont un impact considérable sur les processus de récupération et de recyclage. C'est notamment le cas du système communautaire d'échange de quotas d'émission mis à jour pour la période de l'après-Kyoto et dont l'approche administrative de la fixation des quotas pour la période 2013-2020 entrave les opérateurs des unités de production. En outre, l'introduction graduelle de la mise aux enchères aurait pour effet de ponctionner les ressources financières des opérateurs, qui disposeraient alors d'encore moins de moyens à consacrer à de futurs processus de réduction du carbone. D'autre part, le système communautaire d'échange de quotas d'émission ne reflète pas les économies d'énergie et de carbone résultant de l'utilisation de matières premières renouvelables dans d'autres secteurs industriels et de la construction.

4.2.3   D'autres problèmes découlent de l'application de la directive-cadre sur les sources d'énergie renouvelables. Eu égard aux efforts considérables déployés afin de promouvoir l'utilisation des sources renouvelables et au soutien massif et déséquilibré qui les accompagne, il existe un risque sérieux de voir des quantités importantes de matières premières secondaires récupérées (tous les types de biomasse, le papier récupéré) être destinées à la production d'énergie, d'électricité et de chaleur plutôt qu'à une réutilisation sous la forme de matériaux. Il importe que ces risques soient étudiés et limités comme il convient si l'on veut garantir, voire améliorer là où cela est possible, l'accès aux matières premières secondaires. La définition de la «biomasse» doit être respectée et, le cas échéant, renforcée pour éviter un recours abusif à celle-ci aux fins de production d'énergie renouvelable. Dans certains cas, l'existence de subventions créant des distorsions de marché fait qu'on en vient même à tout simplement brûler des matières premières telles que le bois.

4.2.4   La réglementation européenne en matière de déchets prévoit des obligations légales pour tous les acteurs des flux de déchets et cette responsabilité devrait être strictement vérifiée et réclamée par les autorités respectives. La formation de leur personnel est une condition préalable essentielle à la lutte contre les pratiques illégales de certains acteurs peu scrupuleux, surtout dans le commerce international.

5.   Chaînes de valeur et acteurs au sein des principaux flux de matières premières secondaires

L'identification qui fait l'objet du chapitre 3 fait ressortir de manière évidente les grandes différences qui existent entre les flux de matières premières secondaires. Certains sont pratiquement autosuffisants sur la base naturelle de systèmes historiquement fonctionnels de collecte, prétraitement et traitement (tri compris) de déchets qui interviennent avant que les matériaux récupérés soient transférés vers une installation importante. Plusieurs caractéristiques peuvent être inventoriées afin d'identifier et d'éviter des risques potentiels dans les processus de récupération et de recyclage.

5.1   La valeur commerciale des matières premières secondaires constitue l'un des facteurs majeurs qui influencent l'accessibilité finale des matériaux. La collecte et le prétraitement du flux de déchets sont des étapes relativement peu coûteuses quand les flux sont concentrés (fer, verre et papier) et les matières premières secondaires qui en résultent restent donc plutôt accessibles, à un coût raisonnable. Les conditions de marché s'appliquent à la totalité du circuit fermé. Par ailleurs, une part toujours plus importante du recyclage ne s'effectue pas en fonction du prix du marché du matériau mais bien pour satisfaire à la politique européenne en matière de gestion des déchets. Les déchets d'emballage, les déchets électroniques et électriques et les déchets biodégradables sont en grande partie traités afin d'atteindre les objectifs fixés par les différentes directives.

5.1.1   La production de matières premières secondaires à partir de ces flux n'est pas économiquement viable sur le marché mondial. La collecte, le tri et le traitement des déchets ont lieu soit dans le but de mettre en œuvre des règles relatives à la responsabilité étendue des producteurs, soit parce qu'un financement public direct existe. Dans un cas comme dans l'autre, c'est le citoyen européen qui paie pour la transformation, en qualité de contribuable ou de consommateur.

5.1.2   L'Europe constitue un réservoir de matières premières secondaires aisément accessible par n'importe quel acteur mondial, n'importe quand, alors que la demande du marché mondial pour ces matières est en croissance. De grandes quantités de déchets collectés non traités sont exportées, principalement vers l'Asie. Le marché mondial étant volatil, la volatilité des prix est également très importante. Quand le marché mondial est en baisse, les matières premières secondaires récupérées s'accumulent, les objectifs en matière de recyclage devant être atteints. Cette situation crée des distorsions de marché très graves au sein de l'Union européenne.

5.1.3   Les acteurs européens du recyclage sont contraints d'investir bien plus que leurs concurrents asiatiques lorsqu'ils construisent des installations de recyclage car ils doivent être à même d'assurer la surcapacité et de satisfaire à des exigences technologiques plus strictes. Ensuite, quand le marché mondial des matières premières connaît une croissance, leurs infrastructures coûteuses ne sont pas utilisées, les déchets collectés quittant l'Europe sans avoir été traités. Pour cette raison, il est essentiel d'assurer une cohérence entre les forces mondiales dans le domaine des matières premières d'une part et le cadre réglementaire de la gestion des déchets d'autre part, afin d'éviter les distorsions de marché et de faciliter l'accès des industries européennes aux matières premières secondaires.

5.1.4   Les restrictions au commerce illégal ou semi-illégal de matières premières secondaires pourraient s'appuyer sur l'exigence stricte de certificats de qualité reconnus internationalement tels que des certificats fondés sur les normes ISO émanant des pays tiers partenaires qui réceptionnent les matières premières secondaires. Les États membres devraient également prendre toutes les mesures juridiques nécessaires quand ils vérifient la légalité de l'origine des déchets collectés si celle-ci est susceptible de poser problème.

5.1.5   Étant donné que la politique relative aux matières premières constitue une question de sécurité stratégique dans de nombreuses parties du monde, l'aide de l'UE d'un bout à l'autre des chaînes de valeur, particulièrement dans le cas de matières premières secondaires de grande qualité («premium quality»), pourrait résoudre de nombreux problèmes concernant l'accès aux matières premières secondaires. Il s'avère clairement nécessaire de revoir la spécification européenne des matières premières secondaires pour définir une «première qualité» («premium quality») pour celles-ci.

5.2   L'impact environnemental du recyclage raisonnable doit être bénéfique pour tous les grands secteurs qui utilisent d'importantes quantités de matières premières secondaires. Même le fait de recourir à des technologies de fabrication sophistiquées pour traiter des flux de déchets exigeants ne doit rien y changer. Généralement, la consommation totale d'énergie est réduite, parfois à une fraction de la consommation normalisée dans le cas du traitement de matières premières extraites/récoltées. Cela signifie également une baisse des émissions de dioxyde de carbone, surtout des émissions gazeuses, etc. Compte tenu des impuretés contenues dans les flux de déchets, de nouveaux déchets font leur apparition qui doivent être traités et, dans certains cas, il convient de recourir également à des équipements efficaces de traitement des eaux usées. Les flux de déchets difficiles de ce type comportent par ailleurs des coûts de prétraitement et de traitement plus élevés, ce qui rend les processus encore plus coûteux.

5.3   L'utilisation concurrente de matières premières secondaires en dehors du secteur concerné présente un risque élevé pour ce type de secteurs (voir paragraphe 4.2.3). L'environnement concurrentiel connaît de graves distorsions à cause de ressources financières qui sont destinées à un tout autre objectif et cela pourrait se traduire par des distorsions majeures sur les marchés des matières premières. L'industrie papetière ne peut être compétitive à la fois pour la pulpe de bois (en tant que principale matière première) et le papier récupéré (la seconde matière première essentielle) face aux installations de production d'électricité et de chaleur durables qui bénéficient de subventions liées à l'énergie durable. Il y a lieu de prendre des mesures de sauvegarde appropriées afin de garantir l'accès aux matières premières de base. Si de telles mesures s'avèrent inefficaces, l'un des secteurs clés de l'Union européenne sera sérieusement menacé. Le soutien apporté à la production de matières premières secondaires de «première qualité» aura pour effet d'augmenter la demande de main-d'œuvre et générera des retombées sociales positives en période de crise dans la consommation des matières premières secondaires.

Bruxelles, le 16 février 2011.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Avis du CESE Initiative «matières premières» — répondre à nos besoins fondamentaux pour assurer la croissance et créer des emplois en Europe, JO C 277 du 17.11.2009, p.92.

(2)  Les données proviennent essentiellement des études sur les déchets réalisées par le Centre commun de recherche (http://publications.jrc.ec.europa.eu/repository/) et de statistiques sectorielles.

(3)  Les déchets miniers font l'objet de la directive 2006/21/CE.


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