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Document 52009AE0344

Avis du Comité économique et social européen sur le Livre vert — migration et mobilité: enjeux et opportunités pour les systèmes éducatifs européens

OJ C 218, 11.9.2009, p. 85–90 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

11.9.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 218/85


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre vert — migration et mobilité: enjeux et opportunités pour les systèmes éducatifs européens»

COM(2008) 423 final

2009/C 218/17

Le 3 juillet 2008, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 262 du Traité CE, de consulter le Comité économique et social européen sur le:

«Livre vert — migration et mobilité: défis et opportunités pour les systèmes éducatifs européens»

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 décembre 2008 (rapporteur: Mário SOARES).

Lors de sa 451e session plénière des 25 et 26 février 2009 (séance du 25 février 2009), le Comité économique et social européen a adopté par 142 voix pour, 1 voix contre et 6 abstentions, l’avis suivant.

1.   Introduction

1.1

Le livre vert à l’examen s’intéresse à une difficulté importante à laquelle les systèmes éducatifs sont aujourd’hui confrontés, à savoir la présence dans les écoles d’un nombre important d’enfants issus de l’immigration, qui se trouvent dans un environnement socio-économique défavorable. N’étant pas nouveau, ce problème s’est intensifié et propagé ces dernières années.

1.2

De l’avis de la Commission, une consultation des parties concernées sur la politique éducative en faveur des enfants issus de l’immigration serait utile. Les parties prenantes sont notamment invitées à faire part de leurs vues sur:

les enjeux stratégiques,

les mesures à même de répondre à ces enjeux,

le soutien que l’Union européenne pourrait apporter aux États membres dans ce contexte, et

le futur de la directive 77/486/CEE.

1.3

Le CESE estime qu’il s’agit là d’une matière complexe et exigeante qui peut faire l’objet de multiples approches, tout aussi pertinentes et importantes les unes que les autres. Cependant, pour des raisons méthodologiques, l’on ne tentera de répondre qu’aux cinq questions formulées, sans préjudice de certaines observations à caractère général.

2.   Observations générales

2.1

Le CESE souscrit entièrement à l’approche initiale du livre vert consistant à considérer la présence de nombreux élèves immigrants dans les écoles comme un défi et non comme un problème, en posant un diagnostic juste et en abordant l’enjeu sous pratiquement toutes ses facettes.

2.2

Toutefois, en utilisant une définition aussi large qu’«enfants issus de l’immigration», «enfants de migrants» ou «élèves immigrants», incluant aussi bien les enfants originaires de pays tiers que ceux des pays de la Communauté qui ne vivent pas dans leur pays d’origine, l’on court le risque d’homogénéiser une réalité considérablement diverse.

2.3

Tous s’accordent en réalité à reconnaître qu’être citoyen européen ou extracommunautaire ne revient pas au même. La Commission elle-même admet le risque que présente l’utilisation de cette définition en rappelant que les citoyens européens, contrairement aux citoyens extracommunautaires, peuvent circuler librement dans l’Union. Néanmoins, elle semble justifier son choix par son acceptation des critères utilisés dans les bases des données recueillies (PIRLS et PISA) (1).

2.4

Le CESE comprend l’approche de la Commission consistant à englober dans ses préoccupations tous les enfants qui n’ont pas la nationalité du pays d’accueil car ils ont tous besoin d’un soutien spécifique. Il préférerait néanmoins que cette question soit abordée dans le cadre du double volet évoqué: les enfants de citoyens européens, d’une part, et les enfants de ressortissants de pays tiers, d’autre part.

2.5

Cet avis ne traite pas spécifiquement du phénomène migratoire mais plutôt du rôle des systèmes éducatifs dans l’amélioration de l’intégration des immigrants et plus particulièrement des enfants d’immigrés. Il prend toutefois en considération différents avis du CESE en la matière, qui constituent un acquis important en termes de doctrine (2).

2.6

Il existe une étroite relation entre l’immigration intégrée avec succès et l’éducation à laquelle les enfants d’immigrants peuvent avoir accès ainsi que leur réussite à l’école. Ce lien est indéniable et il peut être déterminant pour le succès de la politique de cohésion sociale, la stabilité de nos démocraties, voire le développement économique à long terme.

2.7

Plus précoce et meilleure est l’intégration scolaire, plus grande sera la réussite scolaire des enfants et des jeunes issus de l’immigration. Il y a lieu par conséquent de souligner l’importance de l’enseignement préscolaire pour se doter des outils nécessaires à la réussite scolaire et sociale.

2.8

Cependant, si les données montrent clairement que les résultats des enfants d’immigrés qui fréquentent le système éducatif depuis la prime enfance sont considérablement meilleurs, cela ne signifie pas pour autant qu’ils auront plus de chances pour accéder à l’université ou trouver un emploi digne.

2.9

Par ailleurs, plus le choix d’une future carrière professionnelle est fait librement et en connaissance de cause, plus grand est l’investissement dans la recherche de la réussite scolaire des jeunes enfants d’immigrants, meilleurs sont les résultats au plan social, économique et politique.

2.10

L’école est le lieu privilégié de l’intégration, dès lors que c’est le premier espace de socialisation en dehors de la famille. Si celle-ci, au lieu de contribuer à atténuer les effets de l’origine socio-économique des familles immigrées, rejette, discrimine ou est source de ségrégation, l’intégration sera difficile et c’est toute la société qui en paiera le prix.

2.11

D’où la nécessité de refuser les écoles majoritairement ou exclusivement consacrées aux enfants d’immigrés, même si les raisons qui ont présidé à leur existence peuvent à première vue être généreuses. L’école doit refléter la composition sociale de la communauté et ne saurait être un ghetto pour qui que ce soit. La ségrégation physique et sociale des élèves enfants d’immigrés dans des écoles qui leur sont spécialement consacrées s’accompagne généralement d’une ségrégation habitationnelle ou en est la conséquence.

2.12

Les enseignants, en tant qu’acteurs essentiels du processus éducatif, méritent une attention particulière des autorités responsables des systèmes éducatifs, puisqu’ils ont une responsabilité directe dans les résultats scolaires des élèves. Des carrières attractives et bien rémunérées et surtout une formation initiale et continue qui tienne compte de ces nouvelles réalités sont des éléments clés pour obtenir des résultats positifs (3).

2.13

À cet égard, il serait intéressant de miser sur une augmentation du nombre de professeurs d’origines ethniques et d’horizons culturels plus diversifiés, leur exemple pouvant être stimulant et contribuer à l’acquisition par les élèves de l’estime de soi.

2.14

La connaissance de la langue nationale est une des conditions sine qua non de la réussite scolaire. C’est un problème qui n’a pas été bien résolu car l’on a confondu capacité de communication avec connaissances linguistiques. L’existence de soutiens spécifiques dans ce domaine, l’intégration le plus tôt possible (dès la petite enfance) dans le milieu scolaire, l’interaction de l’école avec les mères et les parents et la mise à disposition de ces derniers également de cours dans la langue nationale sont autant de stratégies qui peuvent être adoptées pour surmonter ce problème, l’un des plus complexes.

2.15

L’implication des mères et des parents immigrés dans tout le processus éducatif, leur interaction avec les familles de la communauté autochtone ainsi que la valorisation de leurs savoirs et de leurs expériences sont des facteurs d’intégration scolaire et communautaire tant pour les élèves que pour les communautés immigrées de manière générale. Il importe pour cela d’assurer une présence de personnel auxiliaire d’éducation et de médiateurs culturels (4).

3.   La contribution du CESE

3.1   Le livre vert ouvre le débat sur quatre thèmes pour lesquels il élabore un ensemble de questions à savoir:

A.    Les enjeux stratégiques

Quels sont les enjeux stratégiques majeurs liés à l’offre d’une bonne éducation aux enfants issus de l’immigration? Outre ceux qui ont été définis dans le présent document, convient-il d’en prendre d’autres en considération?

B.    Les mesures stratégiques

Quelles sont les mesures stratégiques propres à répondre à ces enjeux? D’autres mesures et démarches outre celles exposées ici devraient-elles être envisagées?

C.    Le rôle de l’Union européenne

Quelles actions peuvent être entreprises via les programmes communautaires pour influencer positivement l’éducation des enfants issus de l’immigration?

Comment convient-il de répondre à ces problématiques dans le cadre de la méthode ouverte de coordination pour l’éducation et la formation? Verriez-vous de l’intérêt à envisager d’éventuels indicateurs et/ou critères comme moyen de concentrer davantage l’action des pouvoirs publics sur l’atténuation des écarts de résultats?

D.    Le futur de la directive 77/486/CEE

Eu égard à la façon dont elle a été appliquée par le passé et compte tenu de l’évolution de la nature des flux migratoires depuis son adoption, comment la directive 77/486/CEE peut-elle jouer un rôle d’appui dans les politiques des États membres sur ces questions? Recommanderiez-vous plutôt son maintien telle quelle, sa modification ou son abrogation? Avez-vous d’autres approches à proposer pour appuyer les politiques des États membres sur les questions qu’elle aborde?

3.2   Les enjeux stratégiques

3.2.1

L’enjeu politique majeur aujourd’hui au niveau européen est l’instauration d’une école qui favorise l’inclusion dans une société qui lui est de moins en moins propice, soit parce que le fossé se creuse entre les riches et les pauvres avec pour conséquence plus d’exclusion sociale, soit parce que, dans le cas concret de l’immigration, le durcissement généralisé des politiques migratoires s’est renforcé. Il faut accorder une attention particulière à la situation économique et sociale des personnes originaires de l’immigration car les possibilités d’éducation sont également dans une large mesure déterminées par des situations de désavantage social.

3.2.2

L’on ne peut analyser l’enjeu énorme que représente l’intégration de millions de migrants à travers l’école sans s’interroger sur les aspects suivants: le statut juridique des citoyens étrangers, qui a une influence sur leur accès au système général d’enseignement obligatoire (5), les processus de régularisation des «sans-papiers», les barrières imposées au regroupement familial et les critères régissant l’octroi des visas qui en arrivent à porter atteinte aux droits fondamentaux de l’individu (obligation de se soumettre à un test ADN pour prouver la parenté, par exemple), entre autres mesures.

3.2.3

Ces questions globales ne peuvent être mises de côté au moment où sont prises des décisions politiques ou éducatives qui concernent des millions d’enfants et de jeunes issus de l’immigration. L’école ne naît pas et ne se développe pas déconnectée de la matrice sociale dans laquelle elle s’insère. Elle est le reflet de cette société, tout en pouvant contribuer de manière décisive à la faire évoluer.

3.2.4

Concrètement, des réformes de l’éducation qui envisagent l’éducation comme un problème économique au même titre que les autres, transposant à l’école le langage commercial (les enfants et les parents étant considérés comme «consommateurs/usagers» et les professeurs comme des «prestataires de services») et faisant la promotion d’une évaluation basée exclusivement sur le rendement individuel des élèves, ne contribuent en rien à une intégration réussie. Il faut revenir à une définition de l’éducation plutôt comme un droit de l’homme fondamental pour tous les enfants et les jeunes.

3.2.5

Compte tenu du fait que l’éducation continue d’être une compétence nationale, un défi majeur se posera à savoir la possibilité, pour l’Union européenne, de pouvoir coordonner dans la pratique les politiques nécessaires pour parvenir au meilleur niveau d’intégration possible. Le paradoxe entre, d’une part, la reconnaissance des répercussions au niveau communautaire du phénomène migratoire et, d’autre part, la poursuite ou non du développement des politiques au niveau national ne pourra être résolu que lorsqu’il y aura une volonté politique d’aller plus loin dans la coordination de ces mêmes politiques.

3.2.6

Le défi pour l’Union européenne consiste par conséquent à reconnaître que les difficultés de gestion de phénomènes migratoires massifs pourront difficilement être surmontées État par État et qu’il faudra se doter des instruments politiques nécessaires pour pouvoir faire face à une présence d’étudiants extracommunautaires de plus en plus nombreux dans le système éducatif.

3.2.7

La situation de désavantage dans laquelle se trouvent les personnes issues de l’immigration se reflète au niveau de l’éducation des adultes. En effet, ces personnes participent moins à des actions de formation continue et les cours qui leur sont proposés sont essentiellement axés sur l’acquisition de compétences linguistiques. Les établissements d’enseignement consacrés à l’éducation des adultes devront veiller à s’ouvrir davantage à toute la population cible. Les personnes issues de l’immigration devront être prises en considération dans tout l’éventail de l’offre. Il importera en ce sens d’élargir l’éducation des adultes à des domaines tels que la culture, la politique, le fondement d’une famille mais également la santé, les compétences sociales, etc.

3.2.8

L’autre enjeu politique déterminant pour toute décision est lié aux conséquences de la crise économique actuelle. L’augmentation du chômage, les difficultés auxquelles sont confrontés les systèmes de sécurité sociale et qui, dans certains pays, compromettent les modèles même de protection sociale, peuvent faire émerger des phénomènes de racisme et de xénophobie qui sont totalement contraires aux valeurs de l’Europe démocratique. L’école aussi bien que la communauté dans laquelle elle s’insère doivent être attentives à ces phénomènes, non seulement pour les prévenir mais également pour agir si et quand cela est nécessaire.

3.3   Les mesures stratégiques

3.3.1

Les États membres ont la responsabilité première et fondamentale de s’engager effectivement dans l’intégration de leurs migrants. Dans le cas des enfants et des jeunes cela suppose non seulement d’assurer l’accès de tous au système éducatif, en garantissant l’exclusion de toute forme de sélection pour des raisons liées au statut social, mais également d’œuvrer pour que la réussite scolaire soit considérée comme un droit des élèves issus de l’immigration.

3.3.2

Pour y parvenir, la réponse au niveau éducatif doit reposer:

sur une école de qualité et un accès universel et gratuit à celle-ci;

sur une politique qui soit respectueuse des différences ethniques, socioculturelles, économiques et de genre, entre autres, et soit à même de tirer parti des potentialités existantes;

sur le respect des caractéristiques de chaque communauté immigrée, qui doivent être prises en considération dans l’élaboration des programmes, en vue d’une ouverture interculturelle des établissements d’enseignement;

sur un corps enseignant compétent pour répondre aux besoins des élèves non nationaux, disposant des soutiens et de la formation continue indispensables pour poursuivre les objectifs définis en matière d’éducation et qui puisse compter sur l’aide d’un personnel auxiliaire connaissant les langues et les cultures des communautés présentes dans l’école. Dans cette perspective, il serait utile de renforcer la présence d’équipes pluridisciplinaires dans les écoles (en incluant par exemple un vaste programme d’action sociale en milieu scolaire);

sur un accès amélioré à la Cybertoile ou (world wide web) en tant qu’outil d’aide à l’éducation des enfants immigrés, dès lors qu’il s’agit d’un instrument essentiel pour la réussite des études dans l’UE. À cette fin, l’on pourrait proposer de créer des clubs de jeunes et des centres communautaires équipés avec Internet, de constituer des partenariats avec les bibliothèques locales soutenues par les municipalités ou avec des entreprises disposées à fournir un équipement informatique ancien, etc.;

sur une éducation «durable»: la promotion de la langue ne peut se limiter aux premières années de la vie et à l’apprentissage préscolaire. Elle doit être poursuivie en continu dans le cadre de l’école et ne pas être circonscrite à la langue du pays d’accueil. L’acquisition d’un langage technique et professionnel requiert l’intervention d’une série de disciplines et une formation appropriée des enseignants dans toutes les spécialités. Parallèlement à l’apprentissage de la langue du pays d’accueil, il faudra également veiller à offrir des cours de langues parlées par les familles des élèves. La préservation et la promotion du multilinguisme devrait faire partie de l’offre pédagogique de base de chaque école;

sur la promotion de programmes de «mentor/camarade» dans le cadre duquel les étudiants sont invités à s’associer à des collègues plus anciens et plus expérimentés;

sur la création d’une plate-forme de dialogue entre les enfants issus de l’immigration et ceux qui sont originaires du pays d’accueil, qui pourrait contribuer à mettre fin aux préjugés et à renforcer l’intégration;

sur la participation des parents d’enfants issus de l’immigration: ils ont un rôle particulier à jouer et doivent par conséquent mieux connaître le système scolaire et les possibilités de formation professionnelle et être appelés à se prononcer;

sur une offre de cours pour adultes de qualité pour les immigrés, qu’ils soient parents ou non, pour les raisons ci-dessus évoquées (6);

sur la promotion des compétences «interculturelles», ce qui comprend l’attribution de bourses d’études et l’octroi d’une aide financière en vue de compenser les désavantages en termes d’éducation (mesures non limitées aux enfants issus de l’immigration).

3.3.3

Au-delà des réponses à caractère global, qui doivent tenir compte des caractéristiques de la population immigrée et englober des aspects tels que l’accès au système de santé et au marché du travail ainsi qu’à un logement digne, il y a lieu de souligner la nécessité d’apporter des réponses sectorielles en matière d’éducation telles que la révision des matériels scolaires afin qu’il ne soit pas donné des immigrés une image négative, l’existence d’activités extrascolaires d’intégration, l’accès au système éducatif depuis la plus tendre enfance, les ressources nécessaires pour la formation initiale et continue des enseignants ainsi que pour l’engagement de personnel auxiliaire qualifié et dans la mesure du possible originaire des pays dont est issue la population scolaire, etc.

3.3.4

La participation de la société civile est non seulement souhaitable mais constitue également un indicateur sur la qualité de la démocratie sociale et éducative, de même qu’elle est un facteur important pour l’intégration des migrants. Les associations de parents d’élèves et les acteurs sociaux liés à l’éducation peuvent apporter leur contribution à l’édification d’une société et d’une citoyenneté qui favorisent l’inclusion, sont respectueuses des différences et conscientes de l’importance d’une forte cohésion sociale.

La politique adoptée dans différents pays qui consiste à accorder le droit de vote aux immigrés en situation régulière pour les élections municipales doit être soutenue et encouragée, dans la mesure où elle constitue une reconnaissance de l’intégration des immigrants dans la communauté d’accueil et renforce le sentiment d’appartenance à celle-ci.

3.4   Le rôle de l’Union européenne

3.4.1

Dans le cadre du processus d’adoption et d’application du nouveau traité de Lisbonne, l’Union européenne devrait faire en sorte que les États membres continuent à garantir une politique d’intégration de la population immigrée, en particulier le droit à l’éducation, à l’enseignement de la langue maternelle et à la participation des parents d’élèves immigrés afin d’améliorer leurs capacités et de soutenir leurs enfants dans les décisions et les processus éducatifs.

3.4.2

L’Union européenne pourrait encourager le recours des États membres à la Méthode ouverte de coordination et, dans ce cadre, la réalisation d’études comparatives et de programmes de recherche qui aideraient à recueillir et à diffuser les bonnes pratiques en la matière et à soutenir les initiatives innovantes qui attireraient l’attention sur des questions émergentes au plan européen lesquelles sont parfois plus difficiles à détecter à l’échelon exclusivement national. Dans les paragraphes suivants, certaines propositions concrètes allant dans ce sens sont avancées.

3.4.3

La définition d’indicateurs et de modèles de référence, dans l’objectif de concentrer les efforts sur l’élimination non seulement de l’échec scolaire mais également des difficultés objectives que l’élève issu de l’immigration peut rencontrer dans le contexte spécifique dans lequel il se trouve, peut être une mesure stratégique particulièrement pertinente. Pour éviter l’abandon scolaire ou le décrochage scolaire, il faut avant tout prévoir des programmes permettant la concrétisation des offres d’action sociale en milieu scolaire.

3.4.4

Parmi les critères de référence à utiliser dans le cadre de la Méthode ouverte coordination, sont par exemple suggérés les suivants: le statut socio-économique des personnes originaires ou non de l’immigration; l’achèvement des études (scolarité obligatoire); la proportion d’enseignants issus de l’immigration; les compétences interculturelles du corps enseignant; la perméabilité sociale du système scolaire; la promotion du multilinguisme dans le système éducatif public; l’ouverture du système éducatif à tous les enfants et les jeunes, etc.

3.4.5

Par ailleurs, il est très important d’associer directement le Parlement européen à la définition, au suivi et à l’évaluation des propositions et des actions visant à garantir que l’exclusion ou la marginalisation ne sont pas admises dans l’espace européen.

3.5   Le futur de la directive 77/486/CEE

3.5.1

La directive 77/486/CEE a été un pas important, force est de le reconnaître, pour garantir l’inscription à l’ordre du jour politique du droit à l’éducation pour tous les enfants issus de l’immigration. Il n’en est pas moins vrai qu’elle ne portait que sur les enfants de citoyens européens et fondait l’intégration exclusivement sur l’utilisation de la langue. En outre, elle a été inégalement mise en œuvre et trente ans après son entrée en vigueur, elle n’a pas encore été totalement transposée dans les législations des États membres actuels de l’Union.

3.5.2

La directive 77/489 est historiquement et politiquement datée et n’est pas à la hauteur des besoins d’intégration actuels, raison pour laquelle elle doit faire l’objet d’importantes modifications compte tenu de l’évolution du phénomène migratoire lui-même. Si la question de l’apprentissage des langues mérite bien toujours le plein engagement de l’Union et des États membres, le CESE est d’avis qu’une directive en la matière doit aller beaucoup plus loin et englober d’autres dimensions si l’on veut en faire un instrument d’intégration sociale, économique et politique des immigrés et de leurs enfants.

3.5.3

La future directive doit prendre en considération le fait que la complexité de l’intégration des immigrés dans les communautés d’accueil est bien plus grande que l’intégration de leurs enfants dans le système éducatif et que cette dernière joue un rôle clé pour la réussite de la première.

3.5.4

En conséquence, la future directive ne doit pas considérer uniquement la problématique de la langue (qui demeure une question centrale), mais aborder également l’intégration des enfants et des jeunes dans le système éducatif d’une manière plus globale et cohérente.

Bruxelles, le 25 février 2009.

Le Président

du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  PIRLS: «Progress in Internacional Reading Literacy Study», étude réalisée par l’Association internationale pour l’Évaluation du rendement scolaire (IEA); PISA: «Programme for International Student Assessment» (Programme international d’évaluation des étudiants), étude coordonnée par l’ OCDE.

(2)  Parmi les 50 avis et plus élaborés par le CESE à ce sujet, voir en particulier les suivants: «Communication sur le mécanisme de coordination ouverte pour les politiques d’immigration et d’asile», rapporteuse: Mme ZU EULENBURG (JO C 221 du 17.9.2002); «Proposition de directive du Conseil relative aux conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’étude, de formation professionnelle ou de volontariat», rapporteur: M. L. M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 133 du 6.6.2003); «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un programme d’assistance technique et financière en faveur de pays tiers dans le domaine de l’asile et des migrations», rapporteuse: Mme G. Cassina (JO C 32 du 5.2.2004), «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur l’immigration, l’intégration et l’emploi» rapporteur: M. L. M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 80 du 30.3.2004); «L’accès à la citoyenneté de l’Union européenne» (avis d’initiative), rapporteur: M. L. M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 208 du 3.9.2003); «La Convention internationale pour les travailleurs migrants» (avis d’initiative), rapporteur: M. L. M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 302 du 7.12.2004); «L’immigration dans l’UE et les politiques d’intégration: la collaboration entre les gouvernements régionaux et locaux et les organisations de la société civile» (avis d’initiative), rapporteur: M. L. M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 318 du 23.12.2006); «Politique communautaire d’immigration et de coopération avec les pays d’origine pour promouvoir le développement» (avis d’initiative), rapporteur: M. L. M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 44 du 16.2.2008); «Éléments pour la structure, l’organisation et le fonctionnement d’une plateforme destinée à une plus grande participation de la société civile à la promotion de politiques d’intégration de ressortissants de pays tiers au niveau de l’UE» (avis exploratoire), rapporteur: M. L. M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 27 du 3.2.2009); «Intégration des minorités - Roma», rapporteuse: Mme A.- M. SIGMUND, corapporteur: M. SHARMA (JO C 27 du 3.2.2009; «Une politique commune de l’immigration pour l’Europe: principes, actions et instruments», rapporteur: M. L. M. PARIZA CASTAÑOS, CESE 342/2009 du 25.2.2009 (par encore publié au JO).

(3)  Voir l’avis du CESE «Améliorer la qualité des études et de la formation des enseignants», rapporteur: M. SOARES (JO C 151 du 17.6.2008).

(4)  Ces idées, entre autres, sont contenues dans le rapport d’avril 2008 «Education et migration – Strategies for integrating migrant children in European schools and societies. A synthesis of research findings for policy-makers» du réseau d’experts NESSE (réseau d’experts pour les aspects sociaux de l’éducation et de la formation soutenu par la Commission) (http//www.nesse.fr-nesse-nesse_top-activites-education-and-migration).

(5)  En Allemagne, le statut juridique de «citoyens étrangers» conduit fréquemment à l’exemption de l’obligation générale de scolarisation. Cependant, conformément à l’article 14 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, «Toute personne a droit à l’éducation (…). Ce droit comporte la faculté de suivre gratuitement l’enseignement obligatoire».

(6)  Voir paragraphe 3.2.7 ci-dessus.


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