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Document 52001AE0530

Avis du Comité économique et social sur la "Proposition de directive du Conseil relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres"

OJ C 193, 10.7.2001, p. 77–83 (ES, DA, DE, EL, EN, FR, IT, NL, PT, FI, SV)

52001AE0530

Avis du Comité économique et social sur la "Proposition de directive du Conseil relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres"

Journal officiel n° C 193 du 10/07/2001 p. 0077 - 0083


Avis du Comité économique et social sur la "Proposition de directive du Conseil relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres"

(2001/C 193/16)

Le 11 décembre 2000 le Conseil a décidé, conformément à l'article 262 du Traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social sur la proposition susmentionnée.

La section "Emploi, affaires sociales, citoyenneté", chargée de préparer les travaux en la matière, a adopté son avis le 6 avril 2001 (rapporteur: M. Melícias).

Lors de sa 381e session plénière des 25 et 26 avril 2001 (séance du 26 avril 2001), le Comité économique et social a adopté par 98 voix pour et 2 abstentions l'avis suivant.

1. Introduction

1.1. Le Comité économique et social est invité à se prononcer sur la "Proposition de directive du Conseil relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres"(1).

1.2. Le Comité est convaincu que cette proposition constitue une étape nécessaire et positive vers "une politique commune dans le domaine de l'asile incluant un régime d'aide européen commun" et un "élément constitutif de l'objectif de l'Union européenne visant à mettre en place progressivement un espace de liberté, de sécurité, et de justice ouvert à ceux qui, poussés par les circonstances, recherchent légitimement une protection dans la Communauté" (premier considérant).

1.3. Le Comité estime en outre que la proposition de directive à l'examen s'inscrit dans le prolongement des conclusions de Tampere, qui prévoient "qu'un tel régime devrait comporter, à court terme, des normes communes pour une procédure d'asile équitable et efficace dans les États membres" (3e considérant).

1.4. Enfin, il est d'avis que "les normes minimales énoncées dans la présente (proposition de) directive doivent donc permettre aux États membres d'appliquer un système simple et rapide capable de traiter rapidement et correctement les demandes d'asile, en conformité avec les obligations internationales et les constitutions des États membres" (6e considérant).

2. Observations générales

2.1. Le Comité considère que le document mérite d'être pris en considération en ce qui concerne notamment les points suivants:

2.1.1. La proposition de directive à l'examen fait explicitement référence à la Convention de 1951 relative au statut de réfugié (Convention de Genève) ainsi qu'au Protocole de New-York de 1967, notamment en ce qui concerne la définition de réfugié (article 2, lettre b) de la proposition de directive), soulignant ainsi l'importance humaniste et humanitaire de cet instrument du droit international. En effet, le Comité est d'avis que l'application uniforme d'une politique commune en matière d'asile, sur le territoire européen, requiert une interprétation uniforme de la Convention de Genève.

2.1.1.1. Il faut garder présent à l'esprit que la Convention de Genève constitue un instrument au service des droits de l'homme. Les références, contenues dans les considérants, à la Déclaration universelle des Droits de l'Homme de 1948 renforcent l'idée que la protection des réfugiés doit être considérée comme faisant partie intégrante de la protection des droits de l'homme dans la mesure où elle trouve son origine et son fondement dans la protection de la dignité et des droits fondamentaux de tous les êtres humains.

2.1.2. Outre la Convention citée ci-dessus, le Comité estime que la proposition de directive devrait comporter une référence à d'autres conventions internationales pertinentes en la matière comme la Convention européenne des droits de l'homme, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Convention des droits de l'enfant et la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination vis-à-vis des femmes.

2.1.3. Le Comité souligne en outre que la proposition de directive à l'examen fait référence à l'intervention du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Que l'on se reporte à cet égard aux articles 13 lettre b), 7 lettre c), 15 paragraphe 4, et 17 lettre a). Par ces références, la proposition de directive renforce encore l'importante mission de surveillance que confère au HCR l'article 35 de la Convention de Genève, qui lui permet de faire des démarches auprès de toutes les autorités compétentes en ce qui concerne chaque demande d'asile et à tous les stades de la procédure (article 17 lettre c).

2.2. Sans vouloir préjuger de l'intervention spécifique du HCR et d'autres organisations spécialisées en la matière, et attendu que le CES européen est un organe consultatif qui représente largement la société civile organisée et voit s'accroître de jour en jour sa fonction globale d'"expression de la société civile organisée au niveau européen" ou si l'on préfère de "pont essentiel entre l'Europe et la société civile", le Comité considère qu'il a le devoir de jouer un rôle dynamique afin d'impliquer davantage la société civile dans ce domaine.

2.3. Ainsi, conformément à l'article 13 lettre b), les autorités devront avoir accès "à des informations précises et à jour provenant des différentes sources, y compris du HCR, sur la situation existant dans les pays d'origine des demandeurs d'asile et les pays de transit". Sur la base de cette formulation, le Comité estime que les informations sur le pays d'origine du demandeur d'asile et sur les pays de transit qu'il a traversés doivent pouvoir également être fournies par des organisations dûment représentatives de la société civile, actives dans chacun des Etats membres examinant la demande d'asile. On peut citer, uniquement à titre d'exemple, Amnesty International, l'Assistance médicale internationale (AMI), la Croix-Rouge et Médecins sans frontières, ainsi que d'autres organisations humanitaires susceptibles, dans chaque État membre, de fournir ce type d'informations.

3. Observations spécifiques

3.1. De la même façon, la formulation de l'article 2 mérite un commentaire en ce qui concerne les passages suivants:

- lettre i): conformément à l'article 1er de la Convention de Genève, le statut de réfugié est reconnu et non accordé par les États membres. Voir à cet égard "Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié", HCR, Genève, 1992, paragraphe 28.

- lettre l): l'article 33, paragraphe 32 de la Convention de Genève ne réglemente pas le "retrait du statut de réfugié" indiqué ici comme base de définition, mais se réfère à une dérogation relative à l'interdiction d'expulsion et de refoulement.

3.2. Le Comité considère que les aspects suivants doivent être pris en considération dans le texte de la proposition de directive.

3.2.1. L'article 4, paragraphe 1, constitue une garantie extrêmement importante car il prévoit que l'accès à la procédure d'asile ne peut être assorti d'aucune condition. En effet, bien que le 6e considérant stipule que "les normes minimales énoncées dans la présente (proposition de) directive doivent permettre aux États membres d'appliquer un système simple et rapide", ce dernier devra être équitable et permettre, précisément, à tous les demandeurs d'asile d'avoir accès à la procédure indépendamment du moment, du délai fixé ou de l'accomplissement ou non des formalités préalables éventuellement exigées pour la présentation d'une demande.

3.2.2. En raison précisément de la nature et de l'objectif humanitaire du droit d'asile, l'accès libre et illimité au territoire et à la procédure d'asile sont des garanties fondamentales que les États membres doivent s'efforcer d'obtenir.

3.2.3. Afin de consacrer ce droit comme un droit communautaire, il paraîtrait opportun d'introduire dans le texte de l'article 2, lettre b) une référence à l'article 3 du Protocole n° 4 de la Convention européenne des Droits de l'homme.

3.2.3.1. Le Comité juge également digne d'intérêt la présomption contenue à l'article 2, lettre b), in fine. Cette présomption est importante dans la mesure où elle attribue une prépondérance au droit d'asile sans préjudice d'autres moyens de protection complémentaire mais avec une priorité sur ces derniers. En effet, on a observé dans certains États membres une tendance à renvoyer les demandes d'asile à des mécanismes de protection complémentaire.

3.2.3.2. La même remarque vaut pour l'article 3 paragraphe 3 et le 17e considérant. Cette situation exigera un effort de la part des États membres afin de définir les différents cas couverts par la protection subsidiaire.

3.2.3.3. Il est vraiment important de mentionner clairement que "toute déclaration par laquelle une personne fait connaître son souhait d'obtenir une protection contre des persécutions, toute manifestation ou expression indiquant que cette personne craint d'être renvoyée dans son pays, doit donc être traitée comme une demande d'asile" (proposition de directive à l'examen, Exposé des motifs, article 4, page 13).

3.2.4. Article 7, lettre b): recours à un interprète

3.2.4.1. La possibilité pour les autorités compétentes ou les demandeurs d'asile de recourir à un interprète devra constituer une des garanties de la procédure d'asile, quelle que soit sa nature et à n'importe quel stade de la procédure. L'interprète devra être compétent, qualifié et impartial. Aussi, même si certains États membres craignent que cela soit très onéreux, le Comité propose que les services d'un interprète soient toujours payés sur des fonds publics, pour autant qu'ils aient été sollicités par les autorités compétentes ou par le demandeur d'asile, dans la mesure où il n'est pas opportun que les autorités aient le pouvoir discrétionnaire de décider du recours ou non à un interprète. Le Comité suggère, comme moyen de financement des services d'interprétation, le recours au Fonds européen pour les Réfugiés (FER), institué dans le but précis de soutenir l'accueil et l'insertion des demandeurs d'asile dans les États membres.

3.2.4.2. Une telle pratique est nécessaire, sans quoi on compromettrait l'un des objectifs de la proposition de directive (établir des garanties procédurales minimales). Le manque d'une interprétation appropriée pourrait affecter la possibilité pour le demandeur d'asile de présenter sa demande convenablement, condition essentielle pour une connaissance parfaite du dossier et pour la garantie du droit d'asile.

3.2.4.3. Dans le même ordre d'idée, le Comité approuve le contenu des articles 10, paragraphe 3 lettre b) (mineurs non accompagnés), 19 (responsabilité d'un autre État membre dans l'examen d'une demande d'asile) et 8, paragraphe 7.

3.2.4.4. Concernant la lettre c) de ce même article 7, le Comité estime que le texte de la proposition devrait aller plus loin. Ainsi, outre le droit de contacter, à tous les stades de la procédure, le HCR ou d'autres organisations agissant au nom du HCR, le demandeur devrait avoir le droit de contacter des organisations non gouvernementales (ONG) reconnues qui poursuivent comme objectif la défense et la promotion du droit d'asile.

3.2.5. Article 8, paragraphe 2 (entretien personnel)

3.2.5.1. S'agissant de la partie finale de cet article: de quelle façon le fonctionnaire habilité devra-t-il inviter le demandeur à donner son accord? Le Comité propose de supprimer la partie finale du texte ou bien de la reformuler de la façon suivante: "le fonctionnaire est tenu de lire à haute voix, portant ainsi à la connaissance du demandeur le contenu du procès-verbal de l'entretien, et de l'informer que ce procès-verbal est à sa disposition, y compris pour d'éventuelles utilisations futures". En outre, il conviendra d'inclure dans la proposition la possibilité pour le demandeur de recevoir une copie du procès-verbal, qui sera dûment authentifiée selon les modalités en vigueur dans le pays d'accueil (par exemple par la signature du demandeur sur chaque page).

3.2.5.2. En réalité, ce paragraphe 2 est complété par le paragraphe 6, du même article, qui pose le droit, dans le cadre d'une procédure normale, pour le demandeur d'asile de consulter dans un délai raisonnable la transcription de l'entretien personnel sur le fond de sa demande d'asile et de formuler d'éventuelles observations.

3.2.5.3. Concernant l'article 8 paragraphe 6, le Comité considère que cette possibilité de consulter la transcription de l'entretien personnel et de formuler d'éventuelles observations devrait s'étendre également à la procédure accélérée, le délai étant nécessairement plus court dans ce cas.

3.2.5.4. Concernant l'article 8 paragraphe 7, le Comité souhaite que soit clarifiée la question suivante: quand on spécifie que "les États membres font en sorte qu'un fonctionnaire et un interprète, du sexe choisi par la personne interrogée, participent à l'entretien personnel s'il y a lieu de croire que la personne interrogée a des inhibitions qui l'empêchent d'exposer ..." est-ce que cela veut dire que le demandeur d'asile a seulement le droit de choisir le sexe de l'interprète? Une telle solution n'est certainement pas la plus favorable à l'instauration lors de l'entretien personnel du climat de confiance nécessaire pour faire tomber les barrières provoquées par les inhibitions du demandeur d'asile. En fait, pour atteindre cet objectif, la personne interrogée devra pouvoir choisir le sexe et du fonctionnaire, et de l'interprète.

3.2.5.5. Le Comité souhaite également souligner à cet égard le contenu de l'article 10, paragraphe 2 de la proposition de directive, qui se réfère de façon explicite à l'entretien personnel de mineurs non accompagnés, et qui précise que les États membres veillent à ce que cet entretien soit mené par un agent "ayant reçu une formation sur les besoins particuliers" de ces personnes vulnérables, ce qui est conforme aux dispositions de l'article 14, paragraphe 1, lettre c) de la proposition. De la même façon le Comité suggère, conformément à la "Déclaration de Bonne Pratique" (adoptée dans le cadre du programme "Enfants séparés en Europe", initiative conjointe du Mouvement international "Save the Children" et du HCR, dont l'objectif est de définir clairement la politique et les pratiques nécessaires pour l'application et la protection des droits des enfants séparés en Europe), que chaque fois que des enfants sont interrogés ou doivent accéder à des services, ils puissent bénéficier des services d'un interprète qui parle la langue dans laquelle ils préfèrent s'exprimer.

3.2.5.6. Le Comité considère, par souci de transparence et de rigueur procédurale, qu'il conviendrait de permettre également au demandeur d'accéder à l'information disponible, sur la base de laquelle la décision relative à sa demande a été prise, notamment concernant son pays d'origine.

3.2.5.7. De même, le Comité propose que le fonctionnaire prévu à l'article 8, paragraphe 1 de la proposition, fasse partie de l'autorité responsable de la détermination.

3.2.6. Article 9 (assistance judiciaire)

3.2.6.1. Pour le Comité, il convient de se battre pour la gratuité de l'assistance judiciaire à toutes les étapes de la procédure (recevabilité, procédure normale, procédure accélérée) et non pas uniquement lorsque l'autorité responsable de la détermination rend une décision de rejet, aux termes du paragraphe 4. Les demandeurs d'asile sont en effet des personnes vulnérables qui ne connaissent pas la procédure légale et ont besoin pour cette raison d'un conseil juridique.

3.2.6.2. En outre, comme cela se passe dans le cadre de la procédure normale (article 9, paragraphe 3), le Comité estime qu'il conviendrait de prévoir que le conseil juridique du demandeur puisse assister à l'entretien personnel également dans le cadre d'une procédure accélérée.

3.2.6.3. De plus, en ce qui concerne les dispositions des articles 23 paragraphe 3, et 29 paragraphe 3 (c'est-à-dire la possibilité pour l'autorité compétente de prendre une décision sans effectuer d'entretien personnel avec le demandeur dans le cadre de la procédure normale ou respectivement accélérée), le Comité estime qu'il faut garantir que l'autorité compétente procédera toujours à un entretien personnel. L'objectif est de garantir qu'une demande d'asile sera instruite le plus complètement possible, de façon à permettre une décision fondée.

3.2.6.4. L'article 9, paragraphe 2, ne devra pas être utilisé pour refuser l'accès à l'assistance judiciaire. Des avocats spécialisés dans le droit d'asile pouvant ne pas être disponibles dans toutes les situations et dans toutes les phases de la procédure, il faudra prévoir la possibilité, pour les demandeurs d'asile, de se faire assister d'un conseil juridique complémentaire, par exemple auprès du personnel d'ONG compétentes en la matière.

3.2.7. Article 10 (mineurs non accompagnés)

3.2.7.1. Le Comité estime qu'il y a lieu de supprimer l'expression "dès que possible" du texte de l'article 10, paragraphe 1, lettre a). En effet, conformément au principe de l'intérêt supérieur du mineur (article 3 de la Convention des Nations unies sur les Droits de l'enfant), les États membres doivent faire en sorte qu'un tuteur légal ou un conseil juridique soit désigné pour assister et représenter le mineur dans le cadre de l'examen de sa demande, la désignation devant avoir lieu avant l'entretien personnel, de façon à rendre effective la situation décrite à la lettre b) du même paragraphe.

3.2.7.2. De même, en vertu des principes qui sous-tendent la "Déclaration de Bonne Pratique" déjà mentionnée au paragraphe 3.2.5.5 du présent document, le Comité propose de prévoir que l'accès à une procédure d'asile ne peut pas être refusé aux mineurs non accompagnés, qui une fois admis suivent la procédure normale, avec une garantie spéciale en ce qui concerne le respect du principe du bénéfice du doute.

3.2.7.3. Le Comité propose également de tenir compte des aspects spécifiques liés à la situation de vulnérabilité des mineurs non accompagnés, notamment lors de l'entretien personnel.

3.2.7.4. On ne saurait passer sous silence à ce stade d'autres catégories vulnérables, comme les personnes âgées isolées et, en particulier, les femmes victimes d'abus.

3.2.7.4.1. L'article 28 du chapitre V (Garanties supplémentaires pour les mineurs non accompagnés et les femmes) de la Résolution sur les garanties minimales pour les procédures d'asile, de juin 1995, se réfère explicitement à cette situation.

3.2.7.4.2. Les femmes, tout comme les enfants et les jeunes, sont particulièrement exposées à la violence, notamment sexuelle.

3.2.7.4.3. De même, la Conclusion n° 39 du Comité exécutif sur la Protection internationale des Réfugiés de l'ONU (EXCOM), qui reste d'actualité, reconnaît la nécessité de tenir compte des besoins particuliers des femmes.

3.2.7.4.4. Pour cette raison, le Comité propose d'inclure dans la directive un article plus vaste qui reconnaisse comme sujets particulièrement vulnérables les demandeurs d'asile souffrant de traumatismes suite à des tortures, des viols ou d'autres abus physiques et/ou sexuels, et qui devront bénéficier d'une attention et d'une assistance particulières, notamment sous la forme d'un soutien psychologique et/ou psychiatrique spécialisé et d'un respect accru du principe du bénéfice du doute.

3.2.7.4.5. Dans ces cas, compte tenu de la spécificité et de la vulnérabilité des demandeurs, le Comité juge plus approprié de ne pas recourir à la procédure accélérée, s'agissant de la première demande présentée dans l'un des États membres.

3.2.8. Article 13, lettre b) (accès des autorités responsables de la détermination à des informations précises et à jour sur la situation existant dans le pays d'origine des demandeurs d'asile et les pays de transit).

3.2.8.1. Ainsi que souligné plus haut, le Comité estime qu'il faut citer, outre le HCR, des organisations comme Amnesty International, l'Assistance médicale internationale (AMI), la Croix-Rouge et Médecins sans frontières, ainsi que d'autres organisations humanitaires représentatives et actives dans la société civile pouvant, dans chaque État membre, fournir ce type d'informations. L'objectif est d'étayer solidement la décision sur les demandes d'asile à l'aide d'informations rigoureuses, objectives, indépendantes et empreintes d'humanité.

3.2.8.2. En raison de la multiplication et de la spécificité des demandes pour persécution à caractère religieux, le Comité juge opportun d'ajouter à l'article 13, lettre c), la possibilité d'obtenir un avis auprès des communautés religieuses respectives.

3.2.9. Le Comité souscrit à l'importance que la proposition de directive à l'examen attache à une formation adéquate et spécifique du personnel responsable de l'exécution des obligations découlant de la directive (articles 13 et 14), dont les fonctionnaires aux frontières.

3.2.9.1. S'agissant de l'objectif poursuivi à moyen terme, le développement d'une formation régulière au niveau européen, le Comité propose de préconiser de faire expressément référence à une participation plus active d'organisations comme le HCR ou la Conférence européenne sur les réfugiés et les exilés (CERE), mais aussi d'organisations non gouvernementales (ONG) reconnues qui poursuivent comme objectif la défense et la promotion du droit d'asile.

3.2.9.2. Le Comité suggère, comme moyen de financement d'une formation régulière au niveau de chaque État membre, le recours au Fonds européen pour les Réfugiés (FER) et au programme "Odysseus".

3.2.10. Il juge également important d'inclure et d'observer, dans la proposition de directive à l'examen, les principes suivants:

- Principe du non-refoulement (article 5), principe selon lequel aucun réfugié ne sera expulsé ou refoulé vers un pays dans lequel sa vie ou sa liberté seraient menacées. Ce principe s'appliquera à chaque fois qu'un réfugié se trouvera sur le territoire ou à la frontière d'un pays, indépendamment du fait que son statut de réfugié ait été ou non formellement reconnu (article 33 de la Convention de Genève, article 3 du Protocole n° 4 de la Convention européenne des Droits de l'homme et Conclusion EXCOM n° 6).

- Principe de la confidentialité des informations relatives à chaque demande d'asile (article 15).

3.2.11. Le Comité juge également très importante la garantie de non-détention des demandeurs d'asile au seul motif qu'ils sont demandeurs d'asile. En cas de détention, au terme d'une procédure prévue par le droit national et seulement pendant le temps strictement nécessaire, il existera la possibilité de réexamens ultérieurs réguliers de la décision de placement en rétention des demandeurs d'asile (article 11).

3.2.11.1. Le Comité estime que cette possibilité d'un réexamen ne doit pas être laissée à la seule discrétion des autorités administratives et politiques.

3.2.11.2. Au cas où le demandeur serait détenu, le Comité souhaite souligner que les conditions de détention devront refléter le statut "non criminel" de ces prisonniers, qui devront avoir accès, au même titre que tous les autres demandeurs, à une assistance judiciaire gratuite, indépendante et qualifiée. Tant le HCR, ONG spécialisée dans ce domaine, que les représentants légaux du demandeur, devront avoir accès aux lieux de détention.

3.2.11.3. Le Comité souhaite en outre que soit précisée l'utilité de l'article 11, paragraphe 1, lettre c) de la proposition de directive, dans la mesure où son contenu semble déjà exposé à la lettre précédente du même article.

3.2.12. Articles 21 et 22 (pays tiers sûrs)

3.2.12.1. Il s'agit d'une solution de compromis entre l'Annexe I (normes fondamentales) et les listes établies par les États membres. Le Comité estime qu'un accord entre les États membres pour limiter ce concept aux conditions visées à l'Annexe I améliorerait les garanties procédurales. Cela permettra d'empêcher que le concept de "pays tiers sûrs" soit utilisé pour limiter l'accès à la procédure d'asile tout en protégeant les demandeurs d'asile contre le refoulement.

3.2.12.2. La directive devra par ailleurs garantir que les critères indiqués dans cet article seront analysés au cas par cas, indépendamment de l'existence d'accords de réadmission. Il ne suffira pas de garantir que le demandeur d'asile sera admis sur les territoire du pays tiers, il faudra aussi que la protection soit effective dans cet autre pays, ce qui veut dire que le demandeur devra avoir accès à la procédure d'asile telle que pratiquée dans le pays en question.

3.2.12.3. La notion de pays sûr, définie à l'annexe 1, ne peut en aucun cas justifier à elle seule le rejet d'une demande d'asile. Le Comité estime qu'il est indispensable que toutes les raisons ayant motivé la demande d'asile par le requérant soient examinées et, en cas de rejet, le requérant devra bénéficier d'un recours effectif devant une autorité ou une juridiction impartiales et indépendantes.

3.2.12.4. Le Comité recommande que l'expression "en règle générale", figurant au point 1 de l'annexe 1, et qui concerne les critères de désignation qui y sont mentionnés, soit remplacée par une formule plus précise, moins floue. Il propose par conséquent l'expression "de manière générale et continue", qui tient notamment compte des situations spécifiques d'exception, locales et autres possibilités d'interruption ou de suspension de l'observation habituelle des normes et principes évoqués.

3.2.13. Le Comité juge raisonnables et réalistes les délais établis aux articles 23 (recevabilité), 24 (procédure normale) et 29 (procédure accélérée) ainsi que les délais prévus pour la présentation d'un recours.

3.2.13.1. Le Comité considère également comme une garantie importante la disposition suivant laquelle le demandeur a le droit, dans le cadre de la procédure normale, de solliciter une décision de l'organe de recours lorsque l'autorité responsable de la détermination n'a pas statué dans le délai visé (article 24). En cas de non-respect des délais prévus, tant dans la phase de recevabilité que dans la procédure accélérée, la demande d'asile est traitée dans le cadre de la procédure normale (respectivement articles 23 et 29).

3.2.14. Article 25 (règles d'instruction à suivre pour l'examen des demandes d'asile)

3.2.14.1. Le texte proposé, qui a pour objectif de garantir une procédure équitable, suit les indications prévues dans le "Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié" du HCR, Genève, Janvier 1992, en mettant en avant le principe du bénéfice du doute (paragraphe 4), ce que le Comité approuve pleinement.

3.2.14.2. Afin de garantir une procédure équitable, le Comité considère que les éventuelles fausses déclarations du demandeur ne pourront pas constituer en soi un motif de rejet d'une demande d'asile, dans la mesure où elles peuvent être justifiées par des circonstances déterminées. De même, l'utilisation de fausses pièces d'identité ne devra pas être préjudiciable au demandeur d'asile à condition que ce dernier puisse fournir une explication cohérente à cette situation (interprétation a contrario de l'article 28, paragraphe 1, lettre a)).

3.2.14.3. L'article 25, paragraphe 2 indique parmi les informations importantes que le demandeur d'asile doit communiquer aux autorités compétentes, son itinéraire. Le Comité est d'avis que bien qu'il constitue un élément important, l'itinéraire n'est cependant pas un facteur décisif ou prépondérant pour la détermination du statut de réfugié.

3.2.14.4. L'article 25 ne contient aucune référence à la charge de la preuve. A cet égard, le Comité propose de renvoyer au paragraphe 196 du "Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié" du HCR.

3.2.15. Article 28 (demande manifestement infondée)

3.2.15.1. Le Comité propose d'ajouter la précision suivante "uniquement aux termes du présent article" afin de garantir que les États membres ne puissent pas adopter arbitrairement d'autres motifs outre ceux qui figurent dans cet article.

3.2.15.2. Le Comité souhaite en outre que la proposition de directive prévoie expressément que les principes essentiels auxquels doit se conformer une procédure d'asile, décrits dans la section 1, s'appliquent à toutes les demandes d'asile y compris celles "manifestement infondées". En effet, toutes les procédures, y compris la procédure accélérée, devraient respecter les garanties minimales prévues par la directive à l'examen.

3.2.16. Le Comité souligne et approuve le contenu de l'article 28, paragraphe 2, lettre a): l'existence d'une possibilité de fuite à l'intérieur du pays ne peut pas être considérée comme un motif de rejet d'une demande d'asile.

3.2.17. Articles 30 et 31 (pays d'origine sûrs)

3.2.17.1. Il s'agit d'une solution de compromis entre l'Annexe II (normes fondamentales) et les listes établies par les États membres. Le Comité estime qu'un accord entre les États membres pour limiter ce concept aux conditions visées à l'Annexe II améliorerait les garanties procédurales. Cela permettra d'empêcher que le concept de "pays d'origine sûrs" soit utilisé pour limiter l'accès à la procédure d'asile, ce qui pourrait donner lieu aux situations discriminatoires que l'article 41 entend éviter.

3.2.17.2. Le Comité se rend compte qu'il s'agit là d'un concept difficile à cerner dans la mesure où un pays peut être "sûr" en termes généraux mais dangereux pour un individu ou un groupe de personnes. La situation d'un pays pouvant changer d'un jour à l'autre, il faudra être très attentif à la situation internationale et dès lors les listes mentionnées ci-dessus devront être souples et à jour.

3.2.17.2.1. Le Comité rappelle que l'asile est un droit fondamental et qu'en tant que tel, c'est un droit dont le pays où l'asile est sollicité est débiteur. Il ne s'agit pas par conséquent d'une faculté dépendant de la bonne volonté ou d'une appréciation contingente de ce pays. Ce fait devra faire l'objet d'une mention expresse dans le corps de la directive.

3.2.17.3. En ce qui concerne les normes figurant à l'annexe II, le Comité souligne que pour être considéré comme un pays d'origine sûr, un pays doit répondre pleinement aux critères énoncés aux paragraphes A et C du point 1 de cette annexe. De même, les voies de recours mentionnées au paragraphe D de ce même point doivent être effectives.

3.2.18. Article 32 (procédure de recours)

Le Comité approuve l'inclusion, dans la proposition de directive à l'examen, du droit des demandeurs d'asile de présenter un recours "contre toute décision sur la recevabilité ou le fond de leur demande".

3.2.19. Article 33 (procédure de recours)

La règle générale est que le recours a un effet suspensif, tant dans la procédure normale que dans la procédure accélérée. L'objectif étant d'éviter le refoulement, le Comité estime qu'un accord entre les États membres pour limiter les dérogations à cette règle prévues au paragraphe 2 améliorerait les garanties procédurales.

3.2.20. Article 41 (disposition de non-discrimination)

Le Comité approuve l'inclusion d'une telle disposition dans la proposition de directive à l'examen, qui tient ainsi compte de l'obligation internationale des États membres de protéger les réfugiés contre la discrimination.

3.2.21. Article 43 (Rapport de la Commission)

Compte tenu du rôle que joue le Comité en tant que défenseur actif d'une plus grande implication de la société civile dans la thématique du droit d'asile et afin de sauvegarder la tradition européenne de protection des droits de l'homme, dont fait partie le droit d'asile, le Comité propose que le rapport que soumet la Commission au Parlement européen et au Conseil sur l'application de la directive à l'examen dans les États membres, soit également présenté au Comité économique et social.

4. Conclusions

4.1. Le Comité approuve l'adoption de la directive à l'examen relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres, considérant qu'elle constitue un pas positif et nécessaire pour parvenir à une politique européenne commune en matière d'asile.

4.2. Dans le présent avis, le Comité propose des ajouts qui méritent d'être pris en compte, dans l'objectif:

- de clarifier et de renforcer les droits des demandeurs d'asile et des réfugiés;

- de garantir aux demandeurs d'asile et aux réfugiés une procédure juste et, si possible, harmonisée;

- de faire en sorte que les demandeurs d'asile aient une meilleure connaissance de leurs droits, conformément à la proposition de directive;

- de développer le sens de la coresponsabilité et de l'engagement mutuel, tant des États membres que de la société civile, dans la défense du droit d'asile.

Le Comité croit qu'à travers les recommandations formulées, la directive établira des normes minimales qui constitueront la base d'une politique d'asile. Toutefois, ces normes minimales devront être envisagées comme un premier pas vers la réalisation d'un ensemble de normes communes indispensables dans le cadre de l'harmonisation juridique qui devra garantir, à l'avenir, la nécessaire protection des réfugiés et leur libre circulation dans les pays de l'Union.

4.3. A cette fin, le Comité invite le Conseil et le Parlement européen à faire en sorte d'adopter les mesures préconisées dans les propositions de modifications formulées dans le présent avis, en les intégrant au texte de la proposition de directive le plus rapidement possible.

Bruxelles, le 26 avril 2001.

Le Président

du Comité économique et social

Göke Frerichs

(1) COM(2000) 578 final.

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